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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3083/2018

ATA/354/2019 du 02.04.2019 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3083/2018-FORMA ATA/354/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 avril 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Elodie Skoulikas, avocate

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE

 



EN FAIT

1. Madame A______, née le ______ 1998, a suivi sa scolarité aux cycles d'orientation de ______ et des ______, avant d'entamer, à la rentrée 2013, une formation auprès de l'école de culture générale (ci-après : ECG)
B______.

En juin 2017, elle a obtenu le certificat de l'ECG, option socio-éducatif.

2. En août 2017, elle a entamé une Maturité spécialisée dans la filière « travail social » au sein de la même école.

Dans le cadre de la préparation de son travail de maturité spécialisée
(ci-après : TMsp), elle a été encadrée par Mesdames C______, référente ECG, et D______, experte de la Haute école de travail social (ci-après : HETS).

3. Le 11 mai 2018, elle a déposé son TMsp.

4. Par courrier du 24 mai 2018, elle a été informée que son travail avait été jugé insuffisant. Elle devait procéder à une remédiation et améliorer son TMsp, selon les indications de ses référentes, sur les points suivants :

- Structure (partie 2 : introduction et conclusion à incorporer).

- Affiner la formulation de la problématique, trop floue.

- Faire des liens entre les rubriques traitées dans la partie 2 (introduire les raisons pour lesquelles la rubrique était intéressante à être développée).

- Donner une réponse développée et argumentée à la problématique.

- Soigner l'expression française (éviter les erreurs d'orthographe et le style oral).

La version corrigée du TMsp était à rendre jusqu'au 8 juin 2018. Pendant le temps de remédiation, elle pouvait solliciter sa référente pour un entretien et les conseils nécessaires. Son attention était attirée sur le fait qu'une deuxième insuffisance signifierait l'échec de l'année de maturité spécialisée.

5. Par décision du 28 juin 2018, la version remédiée du TMsp a été jugée insuffisante, notamment en raison de la faiblesse du développement entre la théorie et la pratique, l'approche plus descriptive qu'argumentative et de nombreuses erreurs dans l'expression française (orthographe, syntaxe, expression orale dans l'écrit, etc.).

6. Le 2 juillet 2018, Mme A______ a recouru auprès de la direction générale de l'enseignement secondaire II (ci-après : DGES II). Elle a demandé que son travail soit reconsidéré, en précisant qu'elle avait été acceptée à l'HETS sous réserve de l'obtention de sa maturité spécialisée.

7. Par décision du 25 juillet 2018, le directeur général de la DGES II a rejeté le recours. Le travail avait été jugé insatisfaisant par les experts. Aucun élément ne permettait de remettre en question leur évaluation. Le grief de l’absence de qualité de suivi n’était pas étayé. Les problèmes de dysorthographie et dyslexie (ci-après : DYS) avaient été pris en compte.

8. Par acte du 10 septembre 2018, Mme A______ a recouru devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Préalablement, elle sollicitait de pouvoir compléter son recours une fois qu'elle aurait en sa possession les corrigés de son TMsp et la plaquette de présentation de la maturité spécialisée travail social 2017-2018 (ci-après : plaquette MSts). Elle concluait, principalement, à ce que la décision de la DGES II soit annulée et à ce que son TMsp porte la mention « satisfaisant ». Subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l'intimée afin qu'elle procède à un « nouvel examen » de la décision. Plus subsidiairement, elle souhaitait pouvoir présenter une nouvelle version de son travail ou, à défaut, être autorisée à réaliser un TMsp sur un autre sujet. Préalablement, des mesures provisionnelles devaient lui être octroyées afin d’être autorisée à commencer le cursus de formation à la HETS à la rentrée de septembre 2018.

Lors de l'évaluation de son TMsp, ses problèmes DYS n'avaient pas été pris en compte. Elle avait ainsi été pénalisée trop sévèrement pour ses erreurs dans l'expression française, ce qui constituait une inégalité de traitement au sens de l'art. 8 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

Elle n'avait pas reçu un encadrement adéquat de la part de ses référentes et son TMsp avait été évalué de manière particulièrement rigoureuse et arbitraire. Les commentaires des référentes manquaient de clarté et étaient parfois contredits par le contenu du travail. En outre, elle avait été évaluée négativement pour les mêmes éléments sous différentes rubriques.

9. Par décision du 13 septembre 2018, la présidence de la chambre administrative a refusé les mesures provisionnelles (ATA/934/2018).

10. La DGES II a conclu au rejet du recours. Elle s'est référée à sa décision du 25 juillet précédent en précisant qu’en tant qu'autorité de recours, sa compétence se limitait à l'examen du respect des principes de la légalité et de l'interdiction de l'arbitraire.

Le principe de la légalité avait été respecté dès lors que c'était conformément aux réglementations en vigueur que Mme A______ s'était vue attribuer la mention « insuffisant » à son TMsp.

Son travail avait été jugé insuffisant sur la base de critères objectifs appliqués à tous les élèves de la formation. Grâce à la documentation distribuée, Mme A______ était parfaitement informée des exigences requises. Elle ne s'était plainte à aucun moment de la qualité du suivi de son travail. Le rapport d'évaluation était complet et en lien avec les objectifs. Ses problèmes DYS n'avaient pas été niés. Le TMsp s'effectuait en dehors de l'école avec suffisamment de temps à disposition pour que les élèves, quelles que soient leurs conditions, sollicitent une personne qui puisse les aider à corriger les fautes d'orthographe.

11. Dans sa réplique, Mme A______ a soutenu que la cognition de la Cour était plus large que celle de la DGES II. Son droit d'être entendue avait été violé, n'ayant pas eu accès à la version corrigée du travail remédié.

12. Par courrier du 2 novembre 2018, la chambre administrative a sollicité de la DGES II les versions du TMsp corrigées des 11 mai et 18 juin 2018 ainsi que l'original de l'évaluation du travail.

13. Des copies du TMsp, dans sa version du 11 mai 2018 avec les remarques, ainsi que dans sa version remédiée avec les corrections, ont été versées au dossier en date du 15 novembre 2018, à l’instar de l’original de l'évaluation.

Ce dernier comprenant un passage illisible (point 8), une nouvelle requête a été formulée par le juge délégué le jour même. Elle a été renouvelée le 27 novembre 2018. La teneur précise du point 8 de l’évaluation de la recourante a été versée à la procédure le 5 décembre 2018.

14. Les documents ont été adressés à Mme  A______ avec un délai pour formuler toute requête complémentaire et/ou exercer son droit à la réplique.

15. La recourante ne s’est pas manifestée dans le délai imparti.

16. L’autorité intimée ne s’est pas présentée à l’audience du 17 janvier 2019, n’ayant pas reçu la convocation à l’audience.

La recourante a expliqué que le TMsp, dans sa première version, ne lui avait jamais été remis avec les corrections. Elle ne l’avait vu que lors de l’entretien qui avait suivi la première évaluation, à laquelle n’était présente que Mme C______. L’entretien avait duré environ une heure. La première partie s’était déroulée collectivement avec quatre autres étudiants également suivis par la même référente. Celle-ci l’avait gardée à l’issue de l’entretien collectif car elle était l’étudiante qui devait effectuer le plus de corrections sur son travail. Dans cette seconde partie, à aucun moment elle n’avait eu son TMsp en mains. Mme C______ lui avait indiqué globalement ce qu’elle devait changer dans son travail. Elle avait pris des notes. Elle avait posé la question d’un délai éventuellement plus long pour la remédiation compte tenu des mesures DYS dont elle bénéficiait. Elle ne se souvenait plus précisément de la réponse, mais elle n’y avait pas eu droit. Elle avait parlé à Mme C______ de la problématique des mesures DYS. Il lui avait toujours été répondu qu’on verrait, ce qui n’avait jamais été le cas.

À son souvenir, seul un étudiant, sur les cinq suivis par Mme C______, n’était pas en remédiation. Sur les quatre étudiants en remédiation, elle était la seule à avoir eu un entretien avec Mme C______. Elle n’avait pas demandé à obtenir son travail avec les corrections ayant eu l’impression qu’elle n’y avait pas droit, les autres élèves n’y ayant pas non plus eu accès.

Elle n’avait pas osé demander plus d’aide à sa référente, car le doyen, Monsieur E______, avait beaucoup insisté, lors des deux présentations du processus TMsp, sur le fait que les étudiants devaient le rédiger absolument seuls et que toute aide serait immédiatement décelée. Il avait indiqué qu’il était rare d’avoir un échec au TMsp.

Elle était au bénéfice des mesures DYS pour l’année scolaire concernée. Elles consistaient exclusivement en temps supplémentaire. Rien de spécifique n’avait été dit dans les séances préparatoires au sujet des troubles DYS. Compte tenu des mises en garde du doyen sur le fait que le travail devait être fait seul, elle n’avait pas cherché d’aide extérieure pour l’orthographe. Il ne leur avait pas été, par exemple, conseillé de solliciter l’aide de leurs parents pour la relecture. La référente n’avait jamais mis en évidence les fautes concrètes d’orthographe. Il lui avait juste été dit, à plusieurs reprises, de faire attention à l’orthographe. Ses problèmes DYS impliquaient qu’elle se concentre sur l’orthographe des mots, ce qui était parfois au détriment de la qualité de la phrase, de la tournure ou de la syntaxe.

Elle souffrait de l’invisibilité des troubles DYS. Elle avait été diagnostiquée dyslexique et dysorthographique vers 7 ans. Les gens ne comprenaient pas, y compris les enseignants, pourquoi elle avait notamment besoin de plus de temps pour faire certaines choses. Elle se sentait rejetée. Elle souhaitait améliorer la vie des personnes qui souffraient de ce trouble.

Pour mettre toutes les chances de son côté, elle avait régulièrement suivi les séances facultatives de méthodologie du TMsp, à l’exception de la dernière où elle n’avait pas pu se rendre, mais pour laquelle elle avait obtenu copie de la documentation présentée. Environ un tiers des étudiants avait suivi ces séances supplémentaires.

Elle produisait différents documents dont plusieurs fiches d’entretien de suivi ainsi que la grille d’évaluation du TMsp vierge, qui mentionnait de quelle manière les points seraient attribués. Elle avait reçu ce document au tout début de l’année scolaire.

La HETS, pour laquelle elle avait été admise, lui était fermée tant qu’elle n’avait pas de maturité. La résidence dans laquelle elle avait fait son stage l’avait engagée en qualité d’employée. Le patron de ladite résidence lui avait indiqué qu’il n’était pas d’accord avec l’évaluation qui avait été faite de son travail. Si son recours n’aboutissait pas et qu’elle n’obtenait pas sa maturité, elle envisageait de commencer un apprentissage d’assistante socio-éducative pendant trois ans, qu’elle compléterait pour obtenir sa maturité professionnelle. Entrer à la HETS restait son objectif.

17. Par écriture spontanée, l’autorité intimée s’est déterminée sur les allégués de la recourante en audience.

18. Lors de l’audience du 14 février 2019, l’autorité intimée a confirmé que l’étudiante avait bénéficié de mesures DYS tout au long de l’année. S’agissant du TMsp, elle avait pu conserver les mesures, tels que guide de relecture, dictionnaire ou autre, mais n’avait pas bénéficié de temps supplémentaire s’agissant d’un travail effectué à domicile. Les mesures DYS étaient prévues pour le travail qui se faisait en classe.

19. Par observations détaillées du 27 février 2019, la DGES II a répondu à plusieurs questions en suspens à l’issue de l’audience, notamment sur le poids du critère 6.5 « usage correct de la langue ». Il y sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

Mme C______ avait suivi huit élèves. Ils avaient tous obtenu leur TMsp, à l’exception de la recourante. Une autre élève présentant des troubles DYS avait obtenu la mention bien.

20. Le 20 mars 2019, la recourante a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

21. Sur ce, la cause a été gradée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur le constat d'échec de la recourante au titre de maturité spécialisée ainsi que son exclusion de la filière.

3. Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA).

4. a. La maturité spécialisée est réussie si les prestations complémentaires définies à l'art. 46 ont été validées et si le travail de maturité spécialisée, exécuté et rendu dans les délais, a obtenu au moins la mention « suffisant » ou la note de 4,0 (art. 52 du règlement relatif à l'école de culture générale du 29 juin 2016 - RECG – C 1 10.70).

Aux termes de l’art. 51 RECG, le travail de maturité spécialisée est évalué par l'école de culture générale, en collaboration avec la haute école correspondante (al. 1). Un référent de la haute école du domaine d'orientation de la maturité spécialisée est membre du jury d'évaluation du travail de maturité spécialisée (al. 2).

L’élève qui n’obtient pas au moins la mention « suffisant » ou la note de 4.0 à la partie écrite de son travail de maturité spécialisée a la possibilité dans un délai de deux semaines à compter de la notification de le compléter avant de le soutenir oralement. Dans ce cas, la meilleure mention possible pour la partie écrite est « suffisant » (art. 55 al. 1 RECG). Dans les maturités spécialisées travail social, la remédiation ne peut porter que sur la partie écrite du travail de maturité spécialisée (art. 55 al. 2 1ère phrase RECG).

En cas d’échec au TMsp, l’élève est exclu de la filière maturité spécialisée et ne peut pas se réinscrire une deuxième fois (art. 56 RECG).

b. Aux termes de l’art. 39 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 (REST - C 1 10.31), les décisions d'une direction d'un établissement des degrés secondaire II ou tertiaire B (ci-après : établissement) peuvent faire l'objet d'un recours en première instance à la direction générale de l'enseignement secondaire II. Le recours lui est adressé par écrit dans un délai de trente jours dès la communication de la décision (al. 1). Les notes scolaires ainsi que l'évaluation, chiffrée ou non, d'un travail ou d'un stage ne peuvent être revues par l'autorité de recours. Elles ne peuvent pas faire l'objet d'un recours, sauf pour motif d'illégalité ou d'arbitraire dans les cas suivants : a) non-promotion ; b) attribution d'une note ou appréciation insuffisante, annuelle ou de promotion, reprise ultérieurement comme note ou appréciation de diplôme ou de certificat final. Le délai de recours court dès la communication de la note ou de l'appréciation (al. 3).

5. a. En matière d’examens, le pouvoir de l’autorité de recours est extrêmement restreint, sauf pour les griefs de nature formelle, qu’elle peut revoir avec un plein pouvoir d’examen. En effet, selon la jurisprudence, l’évaluation des résultats d’examens entre tout particulièrement dans la sphère des décisions pour lesquelles l’administration ou les examinateurs disposent d’un très large pouvoir d’appréciation et ne peut faire l’objet que d’un contrôle judiciaire limité (ATA/762/2016 du 6 septembre 2016 consid. 3b et les références citées). Cette retenue est en conformité avec la jurisprudence du Tribunal fédéral, qui admet que l’autorité judiciaire précédente fasse preuve d’une certaine retenue (« gewisse Zurückhaltung »), voire d’une retenue particulière (« besondere Zurückhaltung »), lorsqu’elle est amenée à vérifier le bien-fondé d’une note d’examen (ATF 136 I 229 consid. 5.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_54/2014 du 23 janvier 2015 consid. 5.6 ; 2C_632/2013 du 8 juillet 2014 consid. 3.2 ; 2D_6/2013 du 19 juin 2013 consid. 3.2.2). Les marges d’appréciation qui existent en particulier dans le cadre de l’évaluation matérielle d’un travail scientifique impliquent qu’un même travail ne soit pas apprécié de la même manière par des spécialistes. Les tribunaux peuvent ainsi faire preuve de retenue tant qu’il n’y a pas d’éléments montrant des appréciations grossièrement erronées (ATF 136 I 229 consid. 5.4.1).

b. La chambre de céans ne revoit l’évaluation des résultats d’un examen qu’avec une retenue particulière, dès lors qu’une telle évaluation repose non seulement sur des connaissances spécifiques mais également sur une composante subjective propre aux experts ou examinateurs, ainsi que sur une comparaison des candidats. En outre, à l’instar du Tribunal fédéral (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_38/2011 du 9 novembre 2011 consid. 4.1), et par souci d’égalité de traitement, la juridiction de céans s’impose cette retenue même lorsqu’elle possède les connaissances spécifiques requises qui lui permettraient de procéder à un examen plus approfondi de la question, comme c’est le cas en matière d’examens d’avocats ou de notaires (ATA/762/2016 précité consid. 3c et les références citées ; ATA/408/2016 du 13 mai 2016 consid. 4). En principe, elle n’annule donc le prononcé attaqué que si l’autorité intimée s’est laissée guider par des motifs sans rapport avec l’examen ou d’une autre manière manifestement insoutenable (ATF 136 I 229 consid. 6.2 ; 131 I 467 consid. 3.1 ; ATA/762/2016 précité consid. 3c et les références citées).

6. Seule est litigieuse la seconde condition, nécessaire et cumulative, de l’art. 52 RECG qui impose à l’étudiant d’obtenir au moins la mention « suffisant » ou la note de 4,0 à son travail de maturité spécialisée.

La recourante conteste l’évaluation de son TMsp, jugé insuffisant, après remédiation.

a. Elle invoque une inégalité de traitement, ses problèmes DYS n'ayant pas été pris en compte dans l'évaluation de son TMsp.

L’autorité intimée a pris une position fluctuante sur la question des mesures DYS. Dans la décision querellée, elle a affirmé que les problèmes DYS avaient été pris en compte sans donner de précisions. Dans le cadre de ses écritures suite à la première audience, elle a précisé que l’intéressée n’avait pas droit aux mesures DYS dans le cadre d’un TMsp. En audience, elle a précisé que les mesures DYS n’étaient prévues que pour le travail en classe tout en indiquant que, s’agissant du TMsp, la recourante avait pu conserver les mesures, tels que guide de relecture, dictionnaire ou autre, mais n’avait pas bénéficié de temps supplémentaire.

L’instruction n’a pas permis d’établir quelles informations précises, en lien avec la dysorthographie et la dyslexie, avaient été données à l’étudiante que cela soit par le doyen lors de séances d’information ou par les référentes.

S’agissant spécifiquement de problèmes de dyslexie et de dysorthographie, les difficultés rencontrées peuvent avoir une incidence sur la qualité du travail fourni par l’étudiant et les difficultés rencontrées par celui-ci. La remédiation intervient dans trois cas dont deux sont liés à la problématique de l’orthographe et de la syntaxe. Le troisième cas porte sur le critère 6.5. Il peut prendre une importance démesurée en cas de difficultés orthographiques et impliquer à lui seul une remédiation. La remédiation intervient sur la présentation de la seule partie écrite qui comporte soixante-six points. Deux points sont attribués au critère 6.5. Ne pas les obtenir implique la remédiation. Il est précisé que la tolérance est d’une faute par page, soit environ vingt sur la totalité du texte. À lire les corrections, une virgule oubliée compte comme faute.

Il n’est pas sûr que ces trois cas aient été expliqués aux étudiants. Ils ne ressortent pas de la plaquette explicative MSts de seize pages, qui se limite à évoquer le cas de la remédiation pour insuffisance pour la partie « démarche et dossier ». Seule une lecture très attentive des huit pages de la grille d’évaluation, fournie en début d’année aux étudiants, permet de se rendre compte de l’importance de ces critères (critère 6 : seuil de suffisance à 12 points sur 20 pour « maîtriser la rédaction d’idées et la mise en forme du document » ; et le critère 6.5).

Dans ses dernières écritures, l’autorité intimée précise, sans être ultérieurement contredite par la recourante, que l’importance du critère 6.5 a été expliquée par la personne chargée du pilotage des TMsp lors d’une séance obligatoire pour tous les étudiants concernés.

Il ressort des allégations de la recourante une confusion entre l’aide qu’elle aurait pu solliciter pour les questions d’orthographe ou de syntaxe et les conséquences du plagiat. L’étudiante indique avoir craint que demander de l’aide pour les questions de forme puisse être considéré comme contraire à ses obligations. Cette allégation est crédible. Toutefois, il ne ressort pas du dossier, à l’exception des seules allégations de la recourante, qu’elle se soit préoccupée de ses difficultés liées aux troubles DYS ni avant, ni surtout pendant la remédiation, à savoir qu’elle ait sollicité des précisions des référentes ou du doyen, alors même que cet élément avait été mis en avant par la lettre de celui-ci précisant le cadre de la remédiation. Le doyen attirait son attention sur le fait qu'il lui fallait, dans la prochaine version de son travail, « soigner l'expression française (éviter les erreurs d'orthographe et le style oral) ». Malgré ces recommandations, la recourante n’a pas interpellé les référentes ou le doyen pour clarifier l’aide. Ainsi, la version remédiée contenait plus de trente fautes d'orthographe et de syntaxe en treize pages. Pour le surplus, s’agissant d’un travail à domicile, l’école n’avait pas à mettre à sa disposition de moyens particuliers en lien avec ses troubles DYS. Dès lors, il ne peut être fait grief à l’autorité intimée de ne pas avoir pris en compte les difficultés DYS de la recourante ni d’avoir, ce faisant, commis une inégalité de traitement à son encontre.

Partant, l'évaluation du TMsp sur ce point ne prête pas le flanc à la critique.

b. La recourante se plaint d'une évaluation rigoureuse et arbitraire.

Chaque rubrique de la grille d'évaluation contient un commentaire détaillé et précis des éléments évalués qui lui ont porté préjudice. De surcroît, les problèmes soulevés par les référentes se retrouvent aisément dans son TMsp. Chacun des six chapitres de l’évaluation écrite, scindé en dix-neuf sous-points, permettent de comprendre précisément les lacunes du travail. De même, les six rubriques précises de la partie orale font l’objet de commentaires détaillés. Enfin, l’échec de la recourante est constaté tant pour la partie écrite (vingt-cinq points sur soixante-six) que pour la partie orale (seize points sur trente-deux). Enfin, le TMsp n’a pas été déposé dans les temps sur Compilatio. La décision n'est pas arbitraire.

c. Concernant l'absence d'encadrement adéquat allégué par le recourante, qui n'a soulevé le problème qu'en procédure de recours, il n'est conforté par aucun élément au dossier. Par ailleurs, il n'est pas contesté qu'elle a bénéficié à tout le moins de sept heures d'encadrement. La recourante a expliqué avoir bénéficié d’un entretien particulier après la séance collective, compte tenu du nombre d’améliorations à apporter à son travail. De l’avis de la recourante, les autres étudiants suivis par la même référente, aussi en remédiation, n’auraient pas bénéficié d’un tel entretien après la séance collective de remédiation. Contrairement aux allégués de la recourante, le temps que les référents doivent consacrer à l'encadrement et le conseil de l'étudiant n'est ni réglé, ni estimé dans la plaquette MSts. Enfin, la recourante ne conteste pas ne pas avoir contacté les référentes pendant la remédiation, se privant ainsi de conseils. La Cour ne saurait donc suivre la recourante sur ce point.

d. Au vu de ce qui précède et du très large pouvoir d’appréciation des examinateurs, l’autorité intimée n’a pas abusé de son pouvoir d’appréciation en considérant le TMsp de la recourante comme insuffisant et en prononçant son exclusion de la filière.

Partant, le recours sera rejeté, et tant la décision de la direction de l’établissement que celle de la direction générale du département seront confirmées.

7. Vu cette issue, un émolument de procédure, réduit, de CHF 200.-, sera mis à la charge de la recourante, et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 al. 1
et 2 LPA).

* * * * *

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 septembre 2018 par Madame A______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 25 juillet 2018 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’un émolument de CHF 200.- sera mis à la charge de Madame A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s’il porte sur le résultat d’examens ou d’autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d’exercice d’une profession ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Elodie Skoulikas, avocate de la recourante ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :