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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1338/2013

ATA/317/2013 du 21.05.2013 ( MARPU ) , REFUSE

Recours TF déposé le 17.06.2013, rendu le 03.09.2013, 2C_553/2013
Parties : EGG-TELSA SA / SEDELEC SA, DEPARTEMENT DE L'URBANISME
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1338/2013-MARPU ATA/317/2013

 

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Décision du 21 mai 2013

sur effet suspensif

 

dans la cause

 

EGG-TELSA S.A.
représentée par Me Olivier Carrard, avocat

contre

 

DÉPARTEMENT DE L’URBANISME

 

et

 

SEDELEC S.A., appelée en cause
représentée par Me Jean-Marie Faivre, avocat



Attendu en fait :

Le 15 janvier 2013, l’office des bâtiments (ci-après : OBA) du département de l’urbanisme (ci-après : le département), a lancé une procédure d’adjudication HUG-Bdl2-CFC 232.00 pour l’attribution des travaux d'installations électriques à courant fort du nouveau bâtiment des lits de l’hôpital cantonal de Genève.

Le dossier d'appel d'offres mentionnait notamment 11 annexes liées aux éléments d'appréciation de l'offre et une annexe 6.3 intitulée « conditions particulières de l'architecte et ingénieur électricien ». Il indiquait que la qualité du matériel serait un autre élément d'appréciation, les candidats devant fournir tous les documents permettant de qualifier les produits proposés avec indication des performances et données techniques.

L'évaluation des offres devait se faire sur la base de quatre critères pondérés : le prix (50 %), l'organisation du candidat et la qualité technique de l'offre (25 %), les références et les expériences (20 %) et la formation professionnelle (5 %).

L'OBA a reçu quatre offres pour ce marché dont celles des sociétés Sedelec S.A. (ci-après : Sedelec) à CHF 7'164'720.- et Egg-Telsa S.A (ci-après : Egg- Telsa) à CHF 6'989'594.-.

Après une première analyse des offres, le représentant de l'OBA a demandé à Egg-Telsa, par courriel du 25 mars 2013, de compléter plusieurs annexes de son dossier comportant des lacunes ou des imprécisions. Il s'agissait de l'annexe R15 concernant les sous-traitants, de plusieurs pages de l'annexe 6.3 relative à des éléments techniques et de prix, en particulier des fiches descriptives de produits, du cahier des charges d'hygiène et de sécurité et de la feuille de série de prix détaillés.

Le 27 mars 2013, Egg-Telsa a transmis l'annonce R15, les pages de l'annexe 6.3 complétées, rectifiées et signées, dont la p. 32 relative au tarif des travaux supplémentaires et la p. 33 concernant le matériel - sans fiches techniques, mais avec la précision que le choix des marques et modèles de matériaux utilisés en cas d'adjudication serait de qualité égale voire supérieure à la liste indicative -, la planification des moyens et le cahier des charges d'hygiène et de sécurité. La feuille de prix détaillés ne comportait pas de chiffres, mais la mention « confidentiel ».

Le rapport d'adjudication du 7 avril 2013 relevait, dans le cadre de l'analyse de la crédibilité des offres et tarifs, les lacunes de celle d'Egg-Telsa en matière de tarifs et de fiches techniques de produits.

Le rapport d'adjudication proposait d'adjuger le marché à Sedelec, qui avait obtenu 395,36 points. Egg-Telsa en avait obtenu 392, 36.

Par décision du 16 avril 2013, l'OBA a adjugé le marché à Sedelec et en a informé les autres soumissionnaires, dont Egg-Telsa.

Par acte du 29 avril 2013, Egg-Telsa a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision susmentionnée, concluant principalement à son annulation et l'adjudication du marché à elle-même. Subsidiairement, la cause devait être renvoyée à l'OBA pour nouvelle décision sur la base d'une nouvelle procédure d'adjudication. Dans l'hypothèse où le contrat aurait été conclu, elle conclut à ce que le caractère illicite de l'adjudication soit constaté et que son droit de quantifier ultérieurement sa conclusion en dommages-intérêts soit réservé. Préalablement, elle a demandé la restitution de l'effet suspensif au recours.

L'autorité adjudicatrice avait violé le principe de transparence en ne l’informant pas de l’importance qui serait attribuée à la qualité des matériaux proposés. Son évaluation de l'offre d'Egg-Telsa était arbitraire et avait abouti à une éviction fondée sur des critères subjectifs.

L'effet suspensif devait être restitué au recours qui apparaissait suffisamment fondé. Aucun intérêt public ou privé n'était suffisamment prépondérant pour aller de l'avant, les travaux d'installations électriques intervenant en parallèle des autres travaux et dans un délai plus restreint. Si le recours n'avait pas d'effet suspensif, l'OBA pourrait conclure le contrat avec Sedelec et il serait alors impossible de remettre en cause l'adjudication.

Le 30 avril 2013, le juge délégué a appelé en cause Sedelec et invité les parties à se déterminer sur la requête de restitution d'effet suspensif jusqu'au 15 mai 2013 et sur le fond jusqu'au 3 juin 2013.

Le 10 mai 2013, l'OBA a conclu au rejet de la requête de restitution d'effet suspensif.

Le principe de transparence n'avait pas été violé, le dossier d'appel d'offre mentionnant expressément que les candidats devaient fournir tous les documents permettant de qualifier les produits proposés avec indication des performances et données techniques.

L'évaluation des offres s'était faite sur la base de critères objectifs, les lacunes du dossier d'Egg-Telsa l'ayant pénalisée.

Le contrat devait pouvoir être rapidement conclu car des interventions, en particulier la pose d'éclairages provisoires, devaient avoir lieu prochainement sur un bâtiment en cours d'exploitation. Il en allait de la sécurité des ouvriers. Les travaux s'inscrivaient dans le cadre d'une planification complexe. Cet intérêt public primait l'intérêt privé d'Egg-Telsa.

Le 15 mai 2013, Sedelec a conclu au rejet de la requête de restitution d'effet suspensif, l'autorité adjudicatrice n'ayant pas abusé de son pouvoir d'appréciation. Egg-Telsa tentait de substituer son évaluation à celle qui avait été faite et les chances de succès de son recours étaient ténues.

Sedelec, avant d'avoir connaissance du recours, avait engagé des frais importants. Les travaux de gros-œuvre étaient terminés et il était urgent de poursuivre la construction en cours.

 

Considérant en droit

Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente. Il est recevable de point du vue (art. 15 al. 2 de l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 - AIMP - L 6 05 ; art. 3 al. 1 et 2 let. 1 de la loi autorisant le Conseil d’Etat à adhérer à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 - L-AIMP - L 6 05.0 ; art. 56 al. 1 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 - RMP - L 6 05.01).

Aux termes des art. 17 al. 1 AIMP et 58 al. 1 RMP, le recours n’a pas d’effet suspensif. Toutefois, l’autorité de recours peut, d’office ou sur demande, restituer cet effet pour autant qu’il paraisse suffisamment fondé et qu’aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose (art. 17 al. 2 AIMP et 58 al. 2 RMP).

« L’examen de la requête suppose une appréciation prima facie du bien-fondé du recours ; le but est alors de refuser l’effet suspensif au recours manifestement dépourvu de chance de succès, dont le résultat ne fait aucun doute ; inversement, un diagnostic positif prépondérant ne suffit pas d’emblée à justifier l’octroi d’une mesure provisoire mais suppose de constater et de pondérer le risque de préjudice » (B. BOVAY, Recours, effet suspensif et conclusion du contrat, in J.-B. ZUFFEREY/ H. STÖCKLI, Marchés publics 2010, Zurich 2010, p. 311-341, n. 15 p. 317).

La restitution de l’effet suspensif constitue cependant une exception en matière de marchés publics et représente une mesure dont les conditions ne peuvent être admises qu’avec restriction (ATA/76/2012 du 7 février 2012 ; ATA/752/2011 du 8 décembre 2011 ; ATA/614/2011 du 28 septembre 2011 consid. 2 ; ATA/214/2011 du 1er avril 2011, et la jurisprudence citée).

Par rapport à l'examen prima facie qui prévaut dans le cadre de l'estimation des chances de succès du recours, le grief du manque de transparence apparaît faire abstraction des exigences explicites figurant dans le dossier d'appel d'offres. Quant aux critiques relatives à l'évaluation, elles devront faire l'objet d'une instruction. Le recours n'est ainsi pas d'emblée dépourvu de toute chance de succès.

Il reste dès lors à examiner les différents intérêts en présence.

La recourante fait valoir un intérêt à pouvoir obtenir le marché. Si cet intérêt doit être pris en compte, il n'est pas prépondérant par rapport à celui privé de l'appelée en cause à pouvoir conclure le contrat, ni à celui, public, allégué par l'OBA concernant la nécessité de procéder à des travaux électriques, notamment pour assurer la sécurité des ouvriers et respecter une planification complexe des travaux.

Au vu de ce qui précède, la restitution de l'effet suspensif sera refusée, le sort des frais de la procédure étant réservé jusqu'à droit jugé au fond.

La présente décision est prise par la présidente de la chambre administrative, en application de l’art. 7 du règlement interne de la chambre administrative du 21 décembre 2010.

LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

refuse la restitution de l’effet suspensif au recours ;

réserve le sort des frais de la procédure jusqu’à droit jugé au fond ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique la présente décision, en copie, à Me Olivier Carrard, avocat de la recourante, au département de l’urbanisme ainsi qu'à Me Jean-Marie Faivre, avocat de l'appelée en cause.

 

 

La présidente :

 

 

 

E. Hurni

 

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :