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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1069/2015

ATA/293/2017 du 14.03.2017 sur JTAPI/245/2016 ( IFD ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1069/2015-IFD ATA/293/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mars 2017

4ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Bernard Cron, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 mars 2016 (JTAPI/245/2016)


EN FAIT

1. Monsieur A______ a fait l'objet, le 2 août 2007, d'une décision de taxation d'office pour l'année 2006, dès lors qu'il n'avait pas remis de déclaration fiscale à l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE).

2. Le 12 septembre 2007, M. A______ a déposé une formule de déclaration fiscale 2006 non remplie auprès de l'AFC-GE, demandant à cette dernière si elle était « en mesure d'annuler la taxation d'office » du 2 août 2007.

3. Considérant le dépôt de cette déclaration comme une réclamation contre les bordereaux du 2 août 2007, l'AFC-GE l'a déclarée irrecevable, par deux décisions du 15 novembre 2007.

Non contestées, ces décisions sont entrées en force.

4. Par lettre recommandée du 30 septembre 2009, l’AFC-GE a ouvert à l'encontre de M. A______ une procédure en rappel d’impôt et une procédure pénale pour soustraction d’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2006, au motif qu'il n'avait pas déclaré un gain immobilier de CHF 2'250'076.-, réalisé en 2006 lors de la vente de son immeuble sis à Morges, soit dans le canton de Vaud.

5. Le 18 juin 2010, l'AFC-GE a informé M. A______ de la clôture des procédures ouvertes à son encontre le 30 septembre 2009, en lui notifiant un bordereau de rappel d’impôt pour l'IFD 2006 et un bordereau d'amende. Calculés sur un revenu non déclaré de CHF 2'250'076.-, le supplément d'IFD s'élevait à CHF 259'118,85, et les intérêts de retard à CHF 31'763,65. Retenant que le contribuable avait agi par dol éventuel, l'AFC-GE a fixé la quotité de l'amende à une fois l'impôt soustrait, soit à CHF 259'118.-.

Il était en particulier reproché au contribuable de ne pas avoir déclaré ce revenu dans le cadre de la réclamation qu'il avait formée contre la taxation d'office 2006.

6. Le 21 juillet 2010, M. A______, sous la plume de son conseil, a élevé réclamation contre ces bordereaux, concluant à l’établissement d’un bordereau rectificatif fondé sur un revenu additionnel de CHF 1'320'076.-.

7. Par décision sur réclamation datée du 25 février 2015, expédiée sous pli recommandé à l'adresse de son conseil, l'AFC-GE a maintenu le bordereau de rappel d'impôt et le bordereau d'amende du 18 juin 2010.

8. Selon le suivi des envois de la Poste suisse, ce pli a été distribué le jeudi 26 février 2015 à 12h37 au conseil de M. A______.

9. Par acte déposé le 30 mars 2015, le contribuable, toujours sous la plume de son conseil, a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce que l'AFC-GE établisse un nouveau bordereau de rappel d'impôt, fondé sur un gain immobilier de CHF 1'320'076.-.

L'acte de recours mentionnait que la décision sur réclamation contestée avait été notifiée à son conseil en date du 25 février 2015, si bien que le délai de recours de trente jours avait commencé à courir le 26 février 2015 et expirait le lundi 30 mars 2015, dès lors que ce délai était prolongé du samedi 28 mars au lundi 30 mars.

10. Dans sa réponse du 1er septembre 2015, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours sur le fond, sans se prononcer sur sa recevabilité.

11. Par jugement du 7 mars 2016, le TAPI a déclaré le recours irrecevable pour cause de tardiveté.

Selon une pratique constatée à de nombreuses reprises, l'AFC-GE postdatait ses décisions afin qu'elles parviennent aux contribuables à la date indiquée en en-tête du courrier.

Il n'y avait aucun doute quant à la date de notification de la décision sur réclamation litigieuse, dès lors que le recourant reconnaissait clairement que celle-ci avait été reçue par son conseil le 25 février 2015. Le délai était donc arrivé à échéance le vendredi 27 mars 2015, et n'était pas prolongé jusqu'au 30 mars 2015.

12. Par acte posté le 17 mars 2016 et adressé au TAPI, M. A______ a demandé que ce dernier « revienne sur son jugement du 7 mars 2016 » et rende un jugement sur le fond. Si l'erreur commise ne pouvait être corrigée avant le 8 avril 2016, il saisirait l'instance supérieure d'un recours.

La décision sur réclamation avait été reçue le 26 février 2015 et non la veille. Il s'agissait d'une erreur de plume. La notification remontant à plus de six mois, il n'avait plus accès au suivi des envois.

13. Par jugement sur compétence du 24 mars 2016, le TAPI a transmis l'acte du 17 mars 2016 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), comme objet de sa compétence.

14. Le 7 avril 2016, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

15. Le 26 avril 2016, l'AFC-GE a répondu au recours sans prendre de conclusions formelles.

La décision sur réclamation avait été retirée au bureau de poste le 26 février 2015, de sorte que le délai venait bien à échéance le 30 mars 2015.

L'AFC-GE n'avait soulevé aucun grief concernant la recevabilité du recours par-devant le TAPI, si bien qu'en cas d'admission du recours par la chambre administrative, aucun émolument ni indemnité de procédure ne devait être mis à sa charge.

16. Le 4 mai 2016, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 20 mai 2016 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

17. Le 19 mai 2016, M. A______ a persisté dans ses conclusions. Il ressortait de la réponse de l'AFC-GE que le délai de recours avait été respecté.

18. L'AFC-GE ne s'est quant à elle pas manifestée.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant une juridiction administrative et transmis à la juridiction compétente pour en connaître, le recours est recevable (art. 140 al. 1 cum 145 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11 ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 al. 5, 62 al. 1 let. a et 64 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur la tardiveté du recours déposé par le recourant auprès du TAPI le 30 mars 2015.

3. Selon l'art. 140 al. 1 LIFD, le délai pour recourir auprès du TAPI contre la décision sur réclamation en matière d'IFD est de trente jours à compter de la notification de cette dernière.

Le délai court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 17 al. 1 LPA, la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 - n'étant pas applicable au contentieux portant sur le seul IFD selon l'art. 1 LPFisc). Lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou sur un jour légalement férié, le délai expire le premier jour utile (art. 17 al. 3 LPA). Les délais sont réputés observés lorsque l’acte de recours est parvenu à l’autorité ou a été remis à son adresse à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse au plus tard le dernier jour du délai avant minuit (art. 17 al. 4 LPA).

4. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phr. LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même (ATA/30/2016 du 12 janvier 2016 consid. 3a). Ainsi, celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/751/2013 précité consid. 5 ; ATA/805/2012 du 27 novembre 2012 consid. 1d ; ATA/712/2010 du 19 octobre 2010).

5. En l'espèce, la décision sur réclamation a été expédiée par l'AFC-GE le 25 février 2015 par pli recommandé.

Ce pli a, selon le suivi des envois de la Poste qui n'a été communiqué qu'au stade de la réponse de l'AFC-GE au recours déposé par-devant la chambre de céans, été communiqué au conseil du recourant le 26 février 2015, point qui a visiblement échappé au TAPI qui s'est, à tort, uniquement fondé sur les déclarations contenues dans l'acte de recours.

Le délai de recours a ainsi commencé à courir le 27 février 2015. Le trentième jour tombant sur le samedi 28 mars 2015, le délai venait à échéance le premier jour utile suivant, soit le lundi 30 mars 2015. Le délai de recours a donc été respecté.

6. Il découle de ce qui précède que le recours doit être admis. Le jugement attaqué sera annulé, et la cause renvoyée au TAPI pour qu'il examine les autres conditions de recevabilité et, le cas échéant, le fond du litige.

7. Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 144 al. 1 LIFD et 87 al. 1 LPA). En revanche, malgré cette issue, aucune indemnité de procédure ne sera allouée, le recourant n'y ayant pas conclu (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 17 mars 2016 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 mars 2016 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 7 mars 2016 ;

renvoie la cause au Tribunal administratif de première instance au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Bernard Cron, avocat du recourant, à l'administration fiscale cantonale, à l’administration fédérale des contributions, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :