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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/991/2011

ATA/805/2012 du 27.11.2012 ( LIPAD ) , ADMIS

Descripteurs : ; NOTIFICATION DE LA DÉCISION ; NOTIFICATION IRRÉGULIÈRE ; DÉLAI DE RECOURS ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; MOTIVATION DE LA DÉCISION ; PARLEMENT COMMUNAL ; COMMISSION PARLEMENTAIRE ; PROCÈS-VERBAL ; RAPPORT(EXPOSÉ) ; DOCUMENT ÉCRIT ; PUBLICITÉ(EN GÉNÉRAL) ; ACCÈS(EN GÉNÉRAL) ; DROIT COMMUNAL
Normes : LPA.46 ; LPA.47 ; Cst.29.al2 ; LIPAD.3.al1.letb ; LIPAD.16 ; LIPAD.24.al1 ; LIPAD.25 ; LIPAD.26.al4 ; LAC.10.al3 ; LAC.10.al5
Parties : JORDAN Philippe / COMMUNE DE CORSIER
Résumé : En tant qu'institutions publiques, les communes sont soumises à la LIPAD. Les rapports des commissions du Conseil municipal sont des documents publics, dont l'accès peut être demandé en application de la LIPAD, contrairement aux procès-verbaux de ces commissions, qui sont confidentiels. Accès admis en l'espèce aux documents intitulés à tort « procès-verbaux », mais qui sont dans les faits des rapports de commissions.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/991/2011-LIPAD ATA/805/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 novembre 2012

 

dans la cause

 

Monsieur Philippe JORDAN
représenté par Me Ronald Asmar, avocat

contre

COMMUNE DE CORSIER
représentée par Me François Bellanger, avocat

 

_________



EN FAIT

1) Monsieur Philippe Jordan est un habitant de la commune de Corsier (ci-après : la commune).

2) Par courriel du 19 avril 2010, il a sollicité de la mairie de Corsier l'autorisation de se rendre dans ses locaux et prendre connaissance des procès-verbaux des commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances de la législature en cours.

3) Le même jour, Madame Florence Schenkel (ci-après : Mme Thierrin-Schenkel), secrétaire générale de la mairie, a refusé de donner suite à sa requête. Les séances des commissions se tenaient à huis clos et les procès-verbaux n’étaient pas consultables par le public, conformément à l’art. 10 de la loi sur l’administration des communes du 13 avril 1984 (LAC - B 6 05).

4) Par retour de courriel, M. Jordan s’est référé aux dispositions de la loi sur l’information du public et l’accès aux documents du 5 octobre 2001 (LIPAD - A 2 08), qui lui donnaient le droit de consulter ces pièces. Il a réitéré sa demande le 26 avril 2010, précisant qu’il saisirait la préposée cantonale à la protection des données et à la transparence s’il ne pouvait accéder aux documents requis.

5) Le 21 avril 2010, Monsieur Gilbert Henchoz, maire de la commune, a requis du service de surveillance des communes, alors dépendant du département de l'intérieur et de la mobilité, devenu aujourd'hui le département de l'intérieur, de la mobilité et de l'environnement, qu’il lui transmette une « marche à suivre », un habitant souhaitant consulter différents procès-verbaux des séances des commissions du Conseil municipal.

6) Par courrier du 23 avril 2010, ce service lui a répondu que les procès-verbaux de commissions ne pouvaient être transmis à l’habitant en vertu de l’art. 10 al. 5 LAC, dont l’application était réservée par l’art. 26 al. 4 LIPAD, qui restreignait les droits conférés par l’art. 21 al. 1 LIPAD.

7) Par courrier du 4 mai 2010 adressé à M. Jordan, M. Henchoz a refusé sa requête. Les procès-verbaux des séances de commissions n’étaient ni consultables, ni transmissibles au public en application de l’art. 10 LAC, cette disposition constituant une exception au principe de transparence prévu par la LIPAD.

8) Le 10 mai 2010, M. Jordan a sollicité la médiation de Madame Isabelle Dubois, préposée à la protection des données et à la transparence (ci-après : la préposée), en application de l’art. 30 LIPAD. Il avait fait usage de son droit d’accès fondé sur la LIPAD pour consulter les « rapports » des séances des commission des finances et de l’aménagement auprès de la mairie de Corsier, qui étaient publics, contrairement aux procès-verbaux. Il était domicilié dans cette commune depuis 1979 et avait été élu au sein du Conseil municipal au cours de la précédente législature. A l’issue des séances de commissions, un procès-verbal, non public, était établi, ainsi qu’un rapport plus succinct résumant l’objet des discussions et des décisions intervenues. Ce rapport étant public, il n’entrait pas dans la catégorie d’exclusion de l’art. 10 al. 5 LAC, de sorte que la mairie ne pouvait lui en refuser la consultation.

9) Le 12 octobre 2010, la préposée a constaté que la médiation n’avait pas abouti.

10) Par acte du 8 décembre 2010, notifié à M. Jordan et à la commune, la préposée a recommandé à cette dernière de donner accès à M. Jordan aux documents remis aux conseillers municipaux, intitulés procès-verbaux mais qui valent rapport, par les commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances pour l’actuelle législature, au sens des art. 24 al. 2 LIPAD, 10 al. 3 LAC et 16 du règlement du Conseil municipal de Corsier du 20 janvier 2004 (ci-après : le règlement).

Le 10 novembre 2010, elle avait sollicité de la commune le règlement et avait eu un entretien téléphonique avec « la mairie ». Selon celle-ci, la mention, sur le site internet de la commune, sous l’onglet « rapports des commissions », que « les conseillers ont reçu les rapports des commissions qui ont étudié différents projets », ne signifiait pas qu’il existait des rapports des commissions. Les procès-verbaux approuvés des commissions étaient envoyés aux conseillers municipaux, qui en prenaient connaissance sans les divulguer avant les séances plénières. En cas de discussion de ces procès-verbaux au Conseil municipal, le président demandait le huis clos de la séance. Il n’existait aucun rapport des commissions au Conseil municipal, la commission présentant son projet sous forme de délibération ou de proposition en séance publique.

Au plan juridique, la commune disposait, depuis janvier 2004, d’un règlement précisant de manière claire les obligations découlant de la LIPAD. La politique d’information de la mairie était toutefois contraire à la lettre de ce règlement, à celle de la LAC et à l’esprit de la LIPAD, et contrevenait au principe de la transparence. La commune qualifiait, de manière erronée, de procès-verbaux les documents fournis par les membres des commissions aux conseillers municipaux, dès lors qu’il s’agissait de rapports au sens de l’art. 10 al. 3 LAC, soit des documents publics soumis au droit d’accès, qui n’avaient pas à être caviardés, sauf si certaines données ou parties de documents étaient soustraites à la communication en vertu de l’art. 26 LIPAD.

11) Le 20 décembre 2010, la préposée a informé M. Jordan que la mairie de Corsier rendrait sa décision le 20 janvier 2011.

12) Elle lui a précisé, le 27 janvier 2011, que la mairie avait été contactée, mais que cette dernière n’avait pas encore travaillé à la décision.

13) Le 4 février 2011, elle a informé M. Jordan que la commune ne prendrait pas de décision « dans un proche avenir », le maire désirant convoquer au préalable une séance du Conseil municipal, qui devait se tenir au printemps.

14) Par acte du 7 février 2011, M. Jordan a saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d’un recours en déni de justice. Il concluait à ce qu’il soit ordonné à la commune de rendre une décision au sens de l’art. 30 al. 5 LIPAD suite à la recommandation de la préposée du 8 décembre 2010 dans un délai de dix jours.

15) Dans un courrier du 10 février 2011, qui ne comportait pas la mention de « décision » ni n’indiquait les voies et délai de recours, notifié à la préposée, la commune a refusé la requête de M. Jordan. Elle n’acceptait pas la recommandation du 8 décembre 2010, considérant que les procès-verbaux des commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances pour l’actuelle législature revêtaient un caractère confidentiel.

16) Par courrier du 25 février 2011 adressé à la chambre administrative, qui ne mentionnait pas d’annexe, le conseil de la commune s’est constitué pour la défense de ses intérêts dans le cadre du recours en déni de justice. La procédure était devenue sans objet, dès lors que la commune, dans un courrier du 10 février 2011, avait statué sur la requête de M. Jordan. Cette décision avait été notifiée à la préposée et était annexée au courrier du 25 février 2011.

17) Par pli du même jour au conseil de M. Jordan, l’avocat de la commune a transmis « une copie de son courrier de ce jour à la chambre administrative [ ] ». Aucune autre annexe n’était mentionnée dans la lettre de garde.

18) Le 8 mars 2011, la chambre administrative a transmis copie, pour information, à M. Jordan de la décision de la commune du 10 février 2011.

19) Par décision du 11 mars 2011, la chambre administrative a rayé la cause du rôle, le recours pour déni de justice étant devenu sans objet.

20) Par acte du 6 avril 2011, M. Jordan a recouru auprès de la chambre administrative contre la décision de la commune du 10 février 2011, reçu le 9 mars 2011. Il concluait, avec suite de frais, à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à la commune de lui donner accès aux documents remis aux conseillers municipaux, intitulés procès-verbaux mais valant rapports, par les commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances pour la législature 2007-2011.

La décision attaquée, qui n’indiquait pas les voie et délai de recours et ne comportait aucune motivation, avait été rendue en violation des art. 46 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). Sur le fond, elle contrevenait aux art. 24 et 25 LIPAD, dans la mesure où la commune refusait, de manière infondée, l’accès aux documents litigieux, le recourant faisant sienne la motivation de la préposée dans sa recommandation du 8 décembre 2010.

21) Par courrier du 12 avril 2011, le juge délégué a invité la commune à répondre en lui demandant de transmettre une copie des procès-verbaux des séances du Conseil municipal pour la législature 2007-2011 avec les ordres du jour et toutes pièces permettant de déterminer quels étaient les documents mis à disposition des conseillers municipaux lors de chacune des séances. En outre, la commune devait transmettre, dans une enveloppe fermée, une copie des procès-verbaux des séances des commissions de l’aménagement et des constructions et des finances de la législature 2007-2011. Par application de l’art. 45 al. 2 LPA, ces pièces ne seraient pas consultables par le recourant jusqu’à droit jugé sur le recours.

22) a. Dans sa réponse du 11 mai 2011, la commune a conclu à l’irrecevabilité du recours du 6 avril 2011, subsidiairement à son rejet et, plus subsidiairement, à son rejet partiel, seul l’accès aux documents dont les passages ou données confidentiels avaient été caviardés devant être autorisé.

Le recours était irrecevable, M. Jordan ayant eu, par l’intermédiaire de son conseil, connaissance de la décision de la commune à réception de son courrier du 25 février 2011, soit le 28 février 2011 au plus tard. Bien que ne constituant pas une notification formelle, cette communication était valable, dès lors qu’elle avait été faite à un mandataire professionnellement qualifié.

Sur le fond, l’art. 10 al. 5 LAC prévoyait expressément que les procès-verbaux des séances de commissions n’étaient pas publics. Les art. 67 et 68 du règlement allaient dans le même sens, celui-ci ayant entendu préserver en toute hypothèse le secret des délibérations en commissions et l’identité des intervenants. Les seules informations émanant des commissions adressées au Conseil municipal étaient constituées, d’une part, d’un résumé de l’objet du débat et des opinions exprimées et d’autre part, de la proposition de la commission quant au projet à délibérer par celui-là. La commune se conformait « en substance à cette procédure ». Une fois que les commissions s’étaient prononcées sur un objet, celui-ci était transmis au Conseil municipal sous forme d’un projet de délibération. Lorsqu’était abordé le point de l’ordre du jour de la séance « rapports des commissions », le commissaire désigné faisait part au Conseil municipal de la synthèse des travaux de la commission ayant conduit à déposer le projet de délibération soumis au vote. Il s’agissait d’un compte-rendu oral explicitant la proposition de délibération qui était le reflet des propos tenus en commission et entièrement protocolé dans le procès-verbal de la séance du Conseil municipal. La mention figurant dans les procès-verbaux en question, selon laquelle « les conseillers municipaux avaient reçu les rapports des commissions », se référait en réalité au projet de délibération joint à l’ordre du jour, à l’exclusion des procès-verbaux des commissions.

Si les conseillers municipaux recevaient en cette qualité les procès-verbaux des commissions, cette remise se faisait avec la mention qu’ils ne devaient pas être divulgués et ne pouvaient être discutés par le Conseil municipal qu’à huis clos afin que le secret rattaché à ces documents soit conservé. Tel était le cas des procès-verbaux relatifs à des délibérations portant sur des demandes de naturalisation. Au demeurant, M. Jordan était au courant de cette pratique, puisqu’il avait été conseiller municipal lors de la législature 2003-2007. Dès lors que les procès-verbaux des commissions ne pouvaient être divulgués, la recommandation du 8 décembre 2010 violait les art. 24 et 26 LIPAD, en relation avec l’art. 10 LAC, et avec les art. 66 à 68 du règlement. Subsidiairement, si la chambre administrative n’adhérait pas à ce point de vue et décidait d’ordonner la transmission des procès-verbaux des séances de commission dépendant du Conseil municipal, il lui incomberait en tout état de s’assurer de ce que les éléments strictement confidentiels ne soient pas divulgués. Tel était le cas du nom des commissaires intervenant en commissions ainsi que des informations concernant les tiers entrant en négociation avec la commune avant la conclusion d’un contrat ou s’agissant des finances, d’éléments chiffrés relevant de choix politiques discutés en commissions avant d’être présentés ensuite, d’une seule voix, devant le Conseil municipal.

b. La commune a annexé à sa réponse une copie des ordres du jour et des procès-verbaux du Conseil municipal de la législature en cours et, sous pli fermé, les « procès-verbaux » des commissions.

Il ressort des différents ordres du jour qu’un point était consacré aux « rapports des commissions ».

Les procès-verbaux des séances du Conseil municipal comportaient, sous ce point, la mention que les conseillers municipaux avaient reçu copie des rapports de commissions. Certains procès-verbaux se référaient également aux discussions et aux corrections à apporter à ces rapports, ainsi que le rappel de la procédure à suivre en vue de leur communication aux conseillers municipaux, qui étaient annexés aux convocations aux séances du Conseil municipal. Des discussions avaient lieu en relation avec l’avis exprimé par l’une ou l’autre des commissions, des références étaient faites à leurs rapports et la lecture des délibérations avait lieu. Le huis clos n’était prononcé qu’en relation avec des demandes de naturalisation.

Lors de la séance du Conseil municipal du 23 juin 2009 et à partir de celles d’avril 2010, les procès-verbaux du Conseil municipal, tout en comportant la référence que les conseillers municipaux avaient reçu divers rapports de commission, mentionnaient le prononcé du huis clos lors des discussions relatives à ces rapports, au motif que les séances des commissions n’étaient elles-mêmes pas publiques.

A partir du mois de mai 2010, les procès-verbaux des séances du Conseil municipal comportaient, sous le chapitre consacré aux rapports des commissions, la mention que les conseillers municipaux avaient reçu divers « procès-verbaux des séances des commissions ». Lorsque le débat était ouvert sur ces procès-verbaux, le huis clos était prononcé. Quant au procès-verbal du 14 décembre 2010, il mentionnait que la séance de la commission de l’aménagement et des constructions du 18 novembre 2010 revêtait une grande importance, de sorte qu’un rapport public avait été établi en complément du procès-verbal, lequel était confidentiel.

23) Le 16 mai 2011, le juge délégué a écrit à l’intimée pour réclamer la production des ordres du jour adressés aux conseillers municipaux et toutes pièces permettant de déterminer quels étaient les documents qui avaient été mis à disposition de ceux-ci lors de chacune de ces séances.

24) Le 26 mai 2011, la commune a répondu au courrier précité. Les ordres du jour avaient été adressés avec les procès-verbaux des séances du Conseil municipal. Quant aux procès-verbaux des séances de commissions, ils n’avaient pas été remis aux conseillers municipaux avec les ordres du jour comme des documents devant être traités lors du Conseil municipal, mais leur étaient envoyés en même temps que l’ordre du jour de la séance et n’étaient pas traités en séances du Conseil municipal. S’ils devaient l’être de manière exceptionnelle, ils étaient discutés à huis clos. Il ne s’agissait dès lors pas de documents destinés à la séance du Conseil municipal. Au surplus, pendant toute la durée de la législature, la procédure dite de rapports était effectuée oralement comme exposé dans le mémoire de réponse.

25) a. Le 10 juin 2011, le recourant a écrit à la chambre de céans. Dans les procès-verbaux des séances du Conseil municipal, il n’était jamais fait mention que des « rapports de commissions ». Ce n’était qu’à partir de mai 2010 que le Conseil municipal avait utilisé la formulation de « procès-verbaux de commissions ». Il en voulait pour exemple le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 11 novembre 2008, dans lequel il était expressément protocolé que les rapports des commissions remis aux conseillers municipaux faisaient l’objet en public de remarques, ajouts ou corrections. En outre, à l’occasion de cette séance, le maire avait demandé qu’il soit rappelé aux conseillers la décision prise en début de législature au sujet de la rédaction des rapports de commissions, Mme Thierrin-Schenkel ayant décrit le processus par lequel ces rapports étaient établis et envoyés à l’ensemble des conseillers municipaux avec la convocation de la séance du Conseil municipal suivante. Il y avait donc bien des rapports de commissions, rédigés par écrit, qui étaient remis à chaque conseiller municipal avant les séances plénières, dont il demandait l’accès, que l’intimée intitulait opportunément « procès-verbaux » pour éviter d’avoir à suivre la recommandation de la préposée.

b. M. Jordan a annexé à son courrier quelques copies des convocations du Conseil municipal ainsi que des procès-verbaux des séances de ce dernier. Selon le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 11 novembre 2008, qui contenait, sous le point 4 intitulé « rapports des commissions », sans mention du prononcé du huis clos, les conseillers municipaux avaient reçu les rapports de plusieurs séances de commissions. Plusieurs remarques, ajouts ou corrections étaient proposés par les conseillers municipaux. Mme Thierrin-Schenkel rappelait la procédure de correction de ces rapports, qui, une fois finalisés, étaient envoyés à l’ensemble des conseillers avec la convocation de la séance du Conseil municipal. Le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 10 novembre 2009 comportait, sous point 4 intitulé « rapports des commissions », la mention que différents rapports avaient été établis et distribués aux membres du Conseil municipal. Bien que la commission des finances se soit réunie, un rapport n’avait pas encore été rédigé, par manque de temps. Les points importants de ces séances étaient toutefois résumés brièvement. Quant au procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 16 mai 2006, il mentionnait, sous l’intitulé « rapports des commissions », les interventions de M. Jordan en séance de commission « qui reflétaient le contraire de ce qu’il avait déclaré ».

26) Le 15 juillet 2011, la commune persistait dans les explications contenues dans son mémoire de réponse et dans ses conclusions.

27) Le juge délégué a procédé à l’audition des parties lors d’une audience de comparution personnelle le 21 mai 2012.

a. M. Jordan a persisté dans les termes de son recours, requérant la production des exemplaires des rapports et des procès-verbaux visés dans celui du 10 novembre 2009.

Il avait été conseiller municipal de 2003 à 2007 et, à ce titre, avait tenu les procès-verbaux de la commission de finances. Il n’avait jamais été rappelé aux conseillers municipaux que les procès-verbaux étaient secrets, ceux-ci ne comportant pas non plus mention de leur confidentialité. D’ailleurs, la notion du « secret » était relative, dès lors qu’à l’occasion d’une séance plénière du Conseil municipal, l’une de ses interventions en commission avait été largement commentée. La mention, dans le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 10 novembre 2009, de rapports qui n’avaient pas été rédigés par manque de temps se référait à des documents qui auraient dû être mis à disposition du Conseil municipal avant l’approbation du budget.

b. La commune, représentée par Mme Thierrin-Schenkel, a persisté dans ses conclusions.

Selon Mme Thierrin-Schenkel, chaque commission dressait un procès-verbal de ses propres séances au sens de l’art. 68 du règlement. Ce document retranscrivait les débats ayant eu lieu dans le cadre des commissions et comportait la mention du nom des intervenants et de leurs opinions. Il était distribué à l’ensemble du Conseil municipal pour la séance suivante. Lorsque des propositions devaient être soumises à l’attention de celui-ci à la suite de travaux des commissions, ces dernières lui en faisaient rapport ; ce dernier pouvait être écrit ou oral et contenait les conclusions et la position de la commission sur le sujet qu’elle avait étudié et, le cas échéant, ses propositions. L’objet du rapport était ensuite soumis au vote du Conseil municipal. Aux convocations adressées aux conseillers municipaux étaient annexés, d’une part, les procès-verbaux des commissions et d’autre part, les rapports écrits relatifs aux points de l’ordre du jour devant être traités. Jusqu’au 18 novembre 2010, les rapports étaient oraux et les procès-verbaux des séances de commissions continuaient à être distribués aux conseillers municipaux. Les procès-verbaux desdites séances étaient confidentiels et les conseillers municipaux ne pouvaient en divulguer le contenu.

28) Le juge délégué a procédé à l’ouverture du pli fermé annexé à la réponse de la commune du 11 mai 2011. Son contenu a mis en évidence plusieurs documents, sans intitulés, relatifs aux séances des commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances entre 2007 et 2010. Ces documents correspondent à ceux mentionnés dans les différents procès-verbaux des séances du Conseil municipal, sous l’intitulé « rapports des commissions ». A titre d’exemple, le procès-verbal de la séance du Conseil municipal du 11 septembre 2007, en référence à une séance de la commission de l’aménagement et des constructions du 7 juin 2007, rappelait une intervention d’un conseiller municipal qui figurait dans le document « commission de l’aménagement et des constructions, jeudi 7 juin 2007 » contenu dans le pli fermé remis par la commune.

29) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) a. Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire - LOJ - E 2 05 ; art. 60 al. 1 LIPAD).

b. L’intimée conclut à ce que le recours soit déclaré tardif, la décision litigieuse ayant été communiquée au recourant par pli du 25 février 2011.

c. Les décisions doivent être désignées comme telles, motivées et signées, et indiquer les voies et délai de recours (art. 46 al. 1 LPA). Elles sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 LPA). Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA).

Seul peut bénéficier du principe de la bonne foi celui qui ne sait pas que l’indication de la voie de recours est inexacte et qui ne pourrait pas le savoir en faisant preuve de quelque attention. Le justiciable ne peut ainsi se prévaloir du principe de la confiance lorsque l’erreur contenue dans la décision attaquée ne pouvait lui apparaître, à lui-même ou à son mandataire, en se contentant de lire la disposition légale pertinente. Il n’est ainsi pas exigé du justiciable ni de son mandataire de prendre connaissance de la jurisprudence et de la doctrine, même si la lecture de l’une ou l’autre permettait de se rendre compte de l’erreur (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C_394/2011 du 2 février 2012 consid. 2.2.2).

d. Le délai de recours est de trente jours s’il s’agit d’une décision finale ou d’une décision en matière de compétence (art. 62 al. 1 let. a LPA) et de dix jours s’il s’agit d’une autre décision (art. 62 al. 1 let. b LPA). Le délai court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 62 al. 3 LPA). Les délais sont réputés observés lorsque l’acte de recours est parvenu à l’autorité ou a été remis à son adresse à un bureau de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse au plus tard le dernier jour du délai avant minuit (art. 17 al. 4 LPA).

Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phrase LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même (ATA/164/2012 du 27 mars 2012 consid. 5 ; ATA/351/2011 du 31 mai 2011 consid. 3). Ainsi, celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/712/2010 du 19 octobre 2010).

e. La preuve de la notification d’une décision administrative et de la date à laquelle cette notification a eu lieu incombe, en principe, à l’administration. Celle-ci supporte les conséquences de l’absence de preuve, en ce sens que, si la notification, ou sa date, sont contestées, et qu’il existe effectivement un doute à ce sujet, il y a lieu de se fonder sur les déclarations du destinataire de l’envoi (ATF 129 I 8 consid. 2.2. p. 10 ; 124 V 400 consid. 2a p. 402 ; Arrêt du Tribunal fédéral 8C_227/2011 du 22 mars 2012 consid. 4.2).

f. En l’espèce, la décision du 10 février 2011 refusant l’accès du recourant aux documents litigieux et rejetant les recommandations de la préposée à la protection des données ne remplit pas les conditions de l’art. 46 LPA, dès lors qu’elle n’est pas désignée comme telle et n’indique pas les voie et délai de recours. Elle a toutefois été communiquée au mandataire du recourant, avocat breveté. Celui-ci était en mesure de se rendre compte de l’erreur et de saisir l’autorité compétente dans le délai imparti, soit trente jours s’agissant d’une décision finale, ce qu’il a fait.

Il reste à déterminer le moment auquel la décision litigieuse a été notifiée au recourant. Il ressort du dossier que celui-ci ne pouvait s’attendre à ce qu’une décision soit prise par la commune, eu égard à la communication que lui avait faite la préposée en date du 4 février 2011 selon laquelle l’intimée ne prendrait pas position avant la tenue d’une séance du Conseil municipal au printemps. Toutefois, peu après que le recourant eut saisi la chambre de céans d’un recours en déni de justice, la commune a rendu une décision. Datée du 10 février 2011, celle-ci a été communiquée par l’intimée à la préposée, aucune copie n’ayant été envoyée directement au recourant, ce que les parties ne contestent pas.

Leurs vues divergent s’agissant de la date de transmission au recourant de la copie de la décision. L'intimée indique lui en avoir communiqué, par l’intermédiaire de son conseil, une copie à l’occasion de son courrier adressé à la chambre de céans le 25 février 2011, le recourant expliquant n’en avoir reçu copie que suite à la lettre envoyée par la chambre administrative le 8 mars 2011. La lecture du dossier laisse toutefois apparaître que la lettre du 25 février 2011 du conseil de la commune à la chambre de céans comportait en annexe, malgré l’absence d’indication en bas de page, la décision litigieuse ; bien qu’une copie de ce courrier eût été transmise au recourant le même jour, la lettre d’accompagnement ne comporte aucune mention d’une annexe autre que le pli du 25 février 2011 à la chambre administrative. Il n’est ainsi pas insoutenable de considérer que le recourant n’avait pu avoir eu connaissance de la décision litigieuse qu’après que la juridiction administrative lui en eut transmis une copie par courrier du 8 mars 2012. En outre, en tant que partie à la procédure devant la préposée, le recourant pouvait s’attendre à ce que la décision litigieuse lui soit directement notifiée, le fait que la lettre du 25 février 2011 du conseil de la commune, dont copie lui a été remise, reprenne la teneur de la décision, ne constituant pas une notification. Celle-là ne saurait ainsi tirer avantage d’une situation ambiguë qu’elle a elle-même créée.

Au regard de ces éléments, la décision litigieuse a été notifiée au recourant par courrier de la chambre administrative du 8 mars 2011. Interjeté dans le délai de trente jours de l’art. 62 al. 1 let. a LPA, le recours est par conséquent recevable.

2) Selon le recourant, la décision querellée violerait l’art. 29 al. 2 Cst. en tant qu’elle n’est pas motivée.

a. Le droit d’être entendu, tel qu’il est garanti à l’art. 29 al. 2 Cst., confère à toute personne le droit d’exiger, en principe, qu’un jugement ou une décision défavorable à sa cause soit motivé. Cette garantie tend à éviter que l’autorité ne se laisse guider par des considérations subjectives ou dépourvues de pertinence ; elle contribue ainsi à prévenir une décision arbitraire (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_369/2009 du 25 février 2010). L’objet et la précision des indications à fournir dépendent de la nature de l’affaire et des circonstances particulières du cas ; néanmoins, en règle générale, il suffit que l’autorité mentionne au moins brièvement les motifs qui l’ont guidée (ATF 133 III 439 consid. 3.3 p. 445 ; 126 I 97 consid. 2b p. 102 ; 125 II 369 consid. 2c p. 372). L’autorité peut se limiter à l’examen des questions décisives pour l’issue du litige ; il suffit que le justiciable puisse apprécier correctement la portée de la décision et l’attaquer à bon escient et que l’autorité de recours puisse exercer son contrôle (ATF 134 I 83 consid. 4.1 p. 88 ; 133 I 270 consid. 3.1 p. 277 ; 130 II 530 consid. 4.3 p. 540 ; 125 II 369 consid. 2c p. 372).

Par exception au principe de la nature formelle du droit d’être entendu, une violation de ce dernier est considérée comme réparée lorsque l’intéressé jouit de la possibilité de s’exprimer librement devant une autorité de recours disposant du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure, et qui peut ainsi contrôler librement l’état de fait et les considérations juridiques de la décision attaquée (ATF 133 I 201 consid. 2.2 p. 204 ; 129 I 129 consid. 2.2.3 p. 135 ; 127 V 431 consid. 3d/aa p. 437 ; 126 V 130 consid. 2b p. 132). Toutefois, la réparation de la violation du droit d’être entendu doit rester l’exception et n’est admissible que dans l’hypothèse d’une atteinte qui n’est pas particulièrement grave aux droits procéduraux de la partie lésée. En présence d’un vice grave, elle peut cependant se justifier lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 133 I 201 consid. 2.2 p. 204). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation, la partie lésée devant avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 consid. 2b).

b. En l’espèce, dans sa décision du 10 février 2011, la commune motive son refus de donner accès au recourant aux procès-verbaux des commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances par le fait que ces documents sont confidentiels. Elle ne donne toutefois pas d’autre explication, ni ne mentionne de disposition légale justifiant son refus. Dans ces conditions, la décision litigieuse ne satisfait pas aux exigences de l’art. 29 al. 2 Cst.

Cette violation a toutefois pu être réparée devant la chambre de céans, dès lors que le litige porte sur une question de droit, soit l’application de la LIPAD aux documents dont la consultation a été requise, que celle-ci peut revoir librement (art. 61 LPA). De plus, un échange d’écritures de même qu’une comparution personnelle des parties ont été ordonnées. Dans ce cadre, chaque partie a pu développer de manière suffisante ses arguments et prendre position sur ceux de sa partie adverse. En outre, un renvoi constituerait une vaine formalité, dès lors que l’intimée a, avant la saisine de la préposée, déjà motivé son refus dans un courrier au recourant du 4 mai 2010 et persisté dans ses conclusions devant la chambre administrative. Aussi la violation du droit d’être entendu a-t-elle été réparée.

3) Selon le recourant, l’application de la LIPAD lui donne le droit de consulter les documents litigieux, ce que la commune conteste.

a. La commune étant une institution publique, elle est soumise à la LIPAD (art. 3 al. 1 let. b LIPAD).

b. La LIPAD a pour but de favoriser la libre formation de l’opinion et la participation à la vie publique (art. 1 LIPAD). En édictant cette loi, le législateur a érigé la transparence au rang de principe aux fins de renforcer tant la démocratie que le contrôle de l’administration et de valoriser l’activité étatique et la mise en œuvre des politiques publiques (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève 2000 45/VIII 7671 ss). Le principe de transparence est un élément indissociable du principe démocratique et de l’Etat de droit, prévenant notamment des dysfonctionnements et assurant au citoyen une libre formation de sa volonté politique (ATA/307/2008 du 10 juin 2008). L’adoption de la LIPAD a renversé le principe du secret de l’administration pour faire primer celui de la publicité. Toutefois, l’application de la LIPAD n’est pas inconditionnelle et ne confère pas un droit d’accès absolu. Elle fait l’objet d’exceptions, aux fins notamment de garantir la sphère privée des administrés et de permettre le bon fonctionnement des institutions (ATA/211/2009 du 28 avril 2009 ; ATA/307/2008 du 10 juin 2008 consid. 3 ; MGC 2000/VIII 7694).

c. Toute personne a accès aux documents en possession des institutions, dont font notamment partie les communes, ainsi que leurs administrations et les commissions qui en dépendent (art. 3 al. 1 let. b LIPAD), sauf exception prévue ou réservée par cette loi (art. 24 al. 1 LIPAD). L’accès comprend la consultation sur place des documents et l’obtention de copies de ceux-ci (art. 24 al. 2 LIPAD).

d. Selon l’art. 25 LIPAD, sont des documents tous les supports d’information détenus par une institution contenant des renseignements relatifs à l’accomplissement d’une tâche publique (al. 1), soit en particulier les messages, rapports, études, procès-verbaux approuvés, statistiques, registres, correspondances, directives, prises de position, préavis ou décisions (al. 2). En revanche, les notes à usage personnel, les brouillons ou autres textes inachevés ainsi que les procès-verbaux encore non approuvés ne constituent pas des documents (al. 4).

Sont soustraits au droit d’accès les documents à la communication desquels un intérêt public ou privé prépondérant s’oppose (art. 26 al. 1 LIPAD). Tel est notamment le cas lorsque le droit fédéral ou cantonal interdit l’accès à des documents (art. 26 al. 4 LIPAD).

e. Dans le domaine de la LIPAD, l’intérêt personnel et la qualité du demandeur n’interfèrent en aucune manière dans l’examen de ces conditions. Bien que le cercle des bénéficiaires de l’accès à l’information ne soit pas précisé dans le texte de ces dispositions (ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3), l’exposé des motifs figurant dans le rapport du Conseil d’Etat à l’appui du projet de loi précise que le droit d’accès aux documents est un droit reconnu à chacun, sans restriction liée notamment à la démonstration d’un intérêt digne de protection du requérant. Dès lors qu’un document doit être considéré comme accessible à une personne en vertu du principe de la transparence (et non en vertu des dispositions sur la protection des données personnelles ou des droits inhérents à la qualité de partie à une procédure), il n’y a pas de raison d’en refuser l’accès à d’autres personnes. Les exceptions prévues à l’art. 26 LIPAD constituent ainsi des clauses de sauvegarde pour les informations qui ne doivent pas être portées à la connaissance du public (ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3 ; MGC 2000/VIII, Volume des débats, séance 45, p. 7691-7692). Dès lors, ce qui est décisif dans l’application de la LIPAD, c’est le contenu même de l’information sollicitée et non la qualité du requérant (F. BELLANGER, Note à propos de l’ATA/752/2004 in SJ 2005 I p. 137 ss ; ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3).

f. Au niveau communal, la LIPAD définit les conditions auxquelles les communes sont soumises dans l’organisation des séances des autorités (art. 16 LIPAD). Ainsi, les séances des conseils municipaux sont publiques (al. 1), sauf en matière de demandes de naturalisation ou de levée du secret ou en raison d’un intérêt prépondérant (al. 2). Les séances des commissions des conseils municipaux ne sont pas publiques, sauf disposition contraire (al. 3).

Ces conditions sont reprises à l’art. 10 LAC, qui prévoit, sauf disposition contraire, que les séances des commissions ne sont pas publiques et ont lieu à huis clos pour l’examen des objets à traiter devant le Conseil municipal (al. 4). Les commissions font rapport au Conseil municipal sur l’objet de leurs travaux (al. 3). Les procès-verbaux de leurs séances ne sont pas publics (al. 5).

g. Le règlement prévoit que les procès-verbaux des séances du Conseil municipal et les rapports de commissions approuvés peuvent être communiqués au public en application de la LIPAD (art. 16 al. 1 du règlement).

Les commissions municipales font rapport au Conseil municipal sur l’objet de leurs travaux (art. 62 al. 2 du règlement). Les membres d’une commission sont tenus au secret de fonction quant aux délibérations de ladite commission jusqu’au moment de la discussion au sein du Conseil municipal (art. 66 al. 3 du règlement).

L’art. 67 du règlement concerne les rapports des commissions et reprend les exigences de l’art. 10 LAC en prévoyant que les rapports présentés par les commissions au Conseil municipal résument l’objet du débat et les opinions exprimées et concluent soit à l’acceptation, soit à la modification, soit au renvoi, à l’ajournement ou au rejet de la proposition examinée (al. 1). Il peut y avoir un rapport de majorité et un rapport de minorité sur la même proposition, auquel cas le Conseil municipal ouvre d’abord la discussion sur le rapport de majorité et ensuite sur le rapport de minorité (al. 3). Les rapports de minorité sont présentés par un membre de la commission (al. 4). Les rapports de majorité sont soumis au président de la commission avant leur envoi à leurs destinataires. Les rapports de minorité doivent être communiqués au président de la commission avant l’envoi à leur destinataire (al. 5).

L’art. 68 du règlement, consacré au procès-verbal, prévoit que chaque commission décide de cas en cas si, en plus du rapport, un procès-verbal est établi, notamment pour tous les sujets qui sont purement informatifs, de même que pour ceux qui ne sont pas en état de faire l’objet d’un rapport (al. 1). Le procès-verbal, rédigé par le rapporteur désigné par la commission ou le secrétaire de l’administration municipale, est adressé aux conseillers municipaux, aux maires et ses adjoints (al. 2). Il résume les opinions émises sans citer le nom des intervenants, à moins qu’il ne s’agisse d’interventions purement informatives (al. 3). Il n’est pas donné lecture des procès-verbaux, qui ne sont pas publics, en séance du Conseil municipal (al. 4).

h. En l’espèce, le litige porte sur l’accès, par le recourant, aux rapports des commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances du Conseil municipal de la commune intimée pour la législature 2007 à 2011, dont celle-ci conteste qu’ils soient accessibles au public en vertu de la LIPAD.

Il ressort du dossier que la procédure décrite aux art. 16, 62 et 67 du règlement suivie par les autorités municipales au cours de la législature concernée. Il ressort des procès-verbaux des séances du Conseil municipal de 2007, 2008 et partiellement de 2009 et 2010, que les différentes commissions établissaient des documents appelés « rapports », qui étaient rédigés et remis au plénum, et non simplement communiqués oralement. En effet, ces documents étaient transmis aux conseillers municipaux à l’appui de la convocation aux séances du Conseil municipal. Il ressort également des procès-verbaux des séances de celui-ci que ses membres discutaient et débattaient, au plénum, de ces documents, y mentionnant des corrections à apporter, de sorte qu’il ne s’agissait pas de simples résumés mais de rapports complets. L’intimée ne saurait ainsi arguer que tel n’était le cas que de manière exceptionnelle, dès lors qu’à chaque séance, l’un ou l’autre de ces rapports était débattu, ce qui résulte d’ailleurs des procès-verbaux des 11 novembre 2008 et 10 novembre 2009. Leur lecture montre également que les discussions ne se tenaient pas à huis clos, celui-ci n’étant prononcé qu’en cas de débat sur des demandes de naturalisation en application de la LAC. Ces éléments sont d’ailleurs corroborés par les documents contenus dans le pli fermé remis par la commune à la chambre de céans le 11 mai 2011. S’il est vrai qu’à teneur de la LAC, ainsi que de la LIPAD, les séances des commissions ne sont pas publiques, les rapports approuvés par celles-ci le sont néanmoins, ce que prévoit d’ailleurs expressément l’art. 16 du règlement.

La procédure suivie par la commune lors de la séance du Conseil municipal du 23 juin 2009 et à partir de celles d’avril 2010 consistant à instaurer le huis clos aux séances du Conseil municipal lors des discussions portant sur les rapports de commissions au motif que les séances des commissions ne sont pas publiques n’est ainsi pas fondée, dès lors qu’elle ne repose sur aucune disposition légale et est en contradiction avec la procédure suivie jusqu’alors. En particulier, elle constitue une application contra legem de l’art. 10 al. 4 LAC, qui prévoit l’inverse, c’est-à-dire l’instauration du huis clos lors des séances des commissions si l’objet soumis au Conseil municipal doit être traité par ce dernier à huis clos.

L’intimée ne saurait davantage se retrancher derrière la terminologie utilisée lors des séances du Conseil municipal à partir du mois de mai 2010, consistant à user du terme « procès-verbal» lors du traitement du point à l’ordre du jour consacré aux « rapports des commissions ». Rien ne justifiait son emploi, hormis la procédure introduite par le recourant. Son règlement, qui, bien que disposant que les procès-verbaux des commissions sont confidentiels, ce qui est conforme aux dispositions de la LIPAD et de la LAC, prévoit expressément que ces documents sont établis à titre exceptionnel, en complément des rapports, lesquels constituent la base de travail des commissions et des conseillers municipaux au plénum. D’ailleurs, les procès-verbaux ne sont censés porter que sur des sujets informatifs, de même que sur ceux qui ne sont pas en état de faire l’objet d’un rapport (art. 68 al. 1 du règlement).

Au regard de l’ensemble de ces éléments, l’intimée ne pouvait refuser au recours l’accès aux rapports des commissions de l’aménagement et des constructions ainsi que des finances du Conseil municipal.

Le recours sera par conséquent admis et la décision du 11 février 2011 annulée. L'intimée devra donner accès au recourant aux rapports et aux documents intitulés procès-verbaux, mais qui valent rapports, remis aux conseillers municipaux par les commissions de l’aménagement et des constructions et des finances pour la législature 2007-2011. Les documents publics n’ont pas à être caviardés, sauf si certaines données ou parties de documents sont soustraites à la communication en vertu de l’art. 26 LIPAD.

4) Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge de M. Jordan. Une indemnité de procédure de CHF 1’000.- lui sera allouée, à charge de la commune de Corsier (art. 87 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 avril 2011 par Monsieur Philippe Jordan contre la décision de la commune de Corsier du 11 février 2011 ;

au fond :

l’admet ;

ordonne à la commune de Corsier de donner accès à Monsieur Philippe Jordan aux rapports et aux documents intitulés procès-verbaux, mais qui valent rapports, remis aux conseillers municipaux par les commissions de l’aménagement et des constructions et des finances pour la législature 2007-2011 ;

l’y condamne en tant que de besoin ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

condamne la commune de Corsier à verser à Monsieur Philippe Jordan une indemnité de procédure de CHF 1’000.- ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Ronald Asmar, avocat du recourant, ainsi qu’à Me François Bellanger, avocat de la commune de Corsier.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Hurni et Junod, MM. Dumartheray et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i.:

 

 

C. Sudre

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :