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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/353/2015

ATA/281/2017 du 14.03.2017 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT
Normes : Statut des employés de la Ville de Genève.47.al1
Résumé : interprétation d'une disposition du statut des employés de la ville de Genève qui prévoit que le traitement, en cas de réévaluation d'une fonction, est fixé dans la nouvelle classe de traitement en tenant compte des annuités déjà acquises. La systématique du statut, l'historique de la pratique de la ville, l'adoption de la disposition et le but que celle-ci poursuit indiquent que les termes « annuités déjà acquises » doivent se comprendre comme correspondant au montant des annuités et non pas à leur nombre. Il s'agit, en cas de réévaluation de la fonction d'un coulissement en francs.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/353/2015-FPUBL ATA/281/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 mars 2017

 

dans la cause

 

M. A______
représenté par le Syndicat interprofessionnel des travailleuses et travailleurs (SIT), soit pour lui Madame Valérie Buchs, mandataire


contre


VILLE DE GENèVE



EN FAIT

1) M. A______, né le ______ 1958, a été engagé par la Ville de Genève (ci-après : la ville) le 14 septembre 1983 à titre temporaire en qualité de surveillant-nettoyeur au service des sports.

2) Depuis lors, M. A______ a occupé plusieurs fonctions au sein du service des sports et dès le 1er février 2011, il occupait celle de « chef de centres sportifs », classée en catégorie H, annuité 14.4/25 de l’échelle des traitements. Son traitement annuel était fixé à CHF 99'140.- plus allocation de vie chère.

3) Le 16 avril 2014, le conseil administratif de la ville (ci-après : le CA) a validé la modification de la fonction occupée par M. A______ qui devenait « chef de section d’exploitation technique 1 » dès le 1er mai 2014. La fonction était classée en catégorie I de l’échelle des traitements.

4) Le 7 mai 2014, la direction générale des ressources humaines (ci-après : DRH) a fait parvenir à M. A______ une proposition de salaire avec effet rétroactif au 1er mai 2014. Le traitement passait de la classe H, annuité 17.40 correspondant à un traitement de CHF 102'118.- par an, à la classe I annuité 11.00 correspondant à un traitement annuel de CHF 103'376.-, calculé en fonction d’un salaire de base de CHF 102'118.- auquel s’ajoutait 11 % d’une « grande » annuité sur 10 ans de CHF 345.73 ainsi que 89 % d’une « petite » annuité sur 15 ans de CHF 799.22, allocation de vie chère de 0,1 % en sus, soit un traitement total de CHF 103'479.40.

Au bas de la proposition de salaire figurait le commentaire suivant : une annuité de la nouvelle classe et arrondi à l’annuité immédiatement supérieure, lorsque la nouvelle classe de fonction correspondant à 1 classe de plus que la fonction antérieure (art. 47 al. 1 du statut du personnel de la ville de Genève du
29 juin 2010 - SPVG - LC 21 151).

5) Le 26 juin 2014, M. A______ a contesté cette nouvelle rémunération auprès de la DRH au motif qu’il n’avait pas été tenu compte des annuités déjà acquises en violation de l’art. 47 al. 5 SPVG.

La DRH a accusé réception du courrier le 10 juillet 2014. Une réponse serait donnée dans les meilleurs délais.

6) Dans sa séance du 30 juillet 2014, le CA a confirmé l’application faite de l’art. 47 al. 5 SPVG et chargé la DRH de diffuser cette information auprès des collaborateurs de la ville. Un courrier dans ce sens a été joint à la fiche de salaire du mois d’août 2014 de l’ensemble des membres du personnel de l’administration municipale.

7) Le 12 août 2014, la DRH a informé M. A______ de la position du CA et l’a invité à signer la proposition de salaire, ce que celui-ci a fait.

8) a. Le 29 août 2014, le Syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT) a contesté auprès de la DRH l’interprétation que celle-ci faisait de l’art. 47 al. 5 SPVG.

b. Le CA a répondu au SIT que l’information communiquée le 12 août 2014 aux membres du personnel concernés par une réévaluation de leur fonction n’avait pas à faire l’objet de négociations préalables avec les organisations représentatives du personnel. Il s’agissait d’une information concernant les modalités selon lesquelles la DRH fixait le traitement en application de l’art. 47 al. 5 SPVG. Cette pratique existait depuis l’entrée en vigueur du SPVG le 1er décembre 2010 et n’avait jamais été contestée par les organisations représentatives du personnel.

9) Le 17 décembre 2014, le CA a formellement informé M. A______ de la modification du libellé de sa fonction et de la classification de la fonction avec effet rétroactif au 1er mai 2014. Le traitement était fixé à CHF 103'479.40, selon les calculs déjà exposés dans la proposition du 7 mai 2014.

10) Par envoi mis à la poste le 2 février 2015, M. A______, représenté par le SIT, a interjeté un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision du CA du 17 décembre 2014 en concluant à son annulation et à la classification de sa fonction en classe I 17.40 correspondant à un traitement de base annuel de CHF 109'122.20 pour la période de mai à décembre 2014 et en classe I 18.40 dès le mois de janvier 2015. Il concluait également au paiement rétroactif des salaires et des charges sociales afférentes aux périodes concernées.

Le texte clair de l’art. 47 al. 5 SPVG prévoyait que le traitement correspondant à une nouvelle classification de fonction soit fixé dans la nouvelle classe de fonction en tenant compte des annuités déjà acquises.

La DRH interprétait le terme annuité par « montant de l’annuité » de façon arbitraire, ce qui entraînait inévitablement une inégalité de traitement entre les collaborateurs déjà en poste et ceux qui seraient engagés ultérieurement.

L’application de l’art. 47 al. 1 SPVG n’avait pas lieu d’être puisque cette disposition ne concernait que les nouveaux postes et non les réévaluations de fonction. En outre l’application faite par la DRH était peu compréhensible s’agissant des grandes et petites annuités, et en application de cette disposition, c’était un traitement de CHF 106'069.- correspondant à une classe I 14 qui aurait dû être fixé.

La décision violait encore l’art. 18 SPVG, car le CA aurait dû ouvrir des négociations avec les organisations représentatives du personnel avant toute adoption d’une pratique d’interprétation du SPVG qui consistait plutôt en une modification de celui-ci.

11) Le 24 mars 2015, la ville a répondu au recours en concluant à son rejet. Elle requérait l’audition de témoins.

Depuis l’entrée en vigueur du SPVG, la DRH interprétait l’article 47 al. 5 SPVG en tenant compte d’un montant correspondant aux annuités acquises. L’ancien traitement était donc repris et positionné dans la nouvelle classe de fonction sur la grille des salaires. Afin de considérer l’expérience acquise sur la partie du cahier des charges qui avait évolué au fil du temps, le salaire était augmenté d’une ou plusieurs annuités complémentaires en appliquant par analogie le mécanisme prévu à l’art. 47 al. 1 SPVG et arrondi à l’annuité supérieure.

Cette pratique, non contestée jusque-là, permettait de reconnaître l’évolution de la fonction en modifiant, en cas d’augmentation de classe de traitement, la perspective future de salaire tout en préservant les deniers publics.

L’ensemble des fonctions existantes au sein de l’administration municipale étaient en cours de réévaluation et il importait de procéder à une interprétation raisonnable de la disposition concernée, le surcoût impliqué étant de près de CHF 23'000'000.- selon l’estimation effectuée par le département finances et du logement produite.

Cette interprétation correspondait en outre à celle déjà adoptée lors du processus d’élaboration du nouveau statut.

En outre, ces questions relevaient très largement de l’opportunité et échappaient par conséquent au contrôle de la chambre administrative.

Le détail du calcul du traitement du recourant était exposé et sera repris dans la partie en droit, en tant que de besoin.

12) Le 15 mai 2015, le recourant a déposé des observations complémentaires confirmant les conclusions prises et l’argumentation présentée dans son recours.

13) Le 21 mai 2015, la ville a réitéré sa demande d’audition de témoins.

14) Le 6 novembre 2015, lors d’une audience de comparution personnelle et d’enquêtes, le représentant de la ville a exposé que la signature par le recourant de la proposition de salaire valait acceptation.

Le recourant a précisé qu’il n’avait signé cette proposition du 7 mai 2014 que le 9 septembre 2014 après que sa cheffe de service lui ait montré un courrier émanant d’un juriste de la ville dans lequel il était indiqué qu’après signature des propositions de salaires, les employés pouvait encore contester celles-ci auprès du CA.

Il a produit des procès-verbaux, prises de position, tableaux synoptiques, etc., relatifs à la négociation de l’art. 47 du statut, dont il ne ressortait aucun accord quant à la notion de « montant d’annuités ». Chaque alinéa de l’art. 47 SPVG visait une situation différente.

Mme B______, directrice des ressources humaines, n’avait pas participé aux négociations qui avaient conduit à l’adoption du statut, n’étant devenue collaboratrice de la ville qu’en mai 2011. Elle a confirmé le calcul du traitement du recourant. Les annuités étaient là pour reconnaître l’expérience de la personne sur un cahier des charges défini. Lorsque l’on procédait à une évaluation de fonction à la hausse, il y avait une modification du cahier des charges avec des compétences et missions supplémentaires ou différentes. Les mêmes connaissances et expérience ne pouvaient donc pas être reconnues dans le nouveau cahier des charges par rapport à l’ancien. La proposition de salaire était signée par le collaborateur puis le CA confirmait, en général, la proposition. Depuis 2011, il y avait eu plus de cent quarante décisions évaluant à la hausse les classes de fonction qui n’avaient pas été contestées.

Mme C______, présidente de la commission interne du service des sports, M. D______, chef de groupe piscine à la piscine E______, M. F______, responsable du centre sportif G______ et M. H______, adjoint technique au service des sports, avaient tous bénéficié d’une réévaluation de leur fonction en 2014 et d’un nouveau traitement ne prenant pas en compte le nombre des annuités de leur ancien traitement. Certains d’entre eux avaient assisté à une séance le 9 septembre 2014 lors de laquelle ils avaient reçu des explications sur la différence du nombre d’annuités avant et après la réévaluation. La DRH avait confirmé que pour recourir contre la proposition de salaire, il fallait d’abord la signer. Ceci avait encore été confirmé par un courriel du juriste de la DRH.

15) Le 17 décembre 2015, lors d’une audience de comparution personnelle et d’enquêtes, le représentant de la ville a retiré le grief concernant les conséquences de la signature par M. A______ de la proposition de salaire. Celle-ci ne valait pas acceptation.

La représentante du SIT, mandataire du recourant, s’est engagée à produire les extraits pertinents de l’accord signé entre la ville et les syndicats à la suite des négociations.

M. I______, "titre______" du département des finances et du logement, avait participé ponctuellement aux négociations qui avaient mené au statut, surtout concernant la nouvelle échelle de traitement et les coûts de sa mise en œuvre.

Il n’avait pas participé aux discussions de négociation relatives à l’art. 47 al. 5 SPVG. Il le comprenait comme appliquant le même système qu’autrefois. Dans l’ancien système, il y avait l’octroi d’une annuité supplémentaire après le coulissement en francs. Ceci valait également pour les réévaluations de fonction. Les chiffres avancés concernant l’impact d’une autre interprétation de l’art. 47 al. 5 SPVG déjà produits lui paraissaient tout à fait plausibles.

L’adoption de la nouvelle grille salariale était soumise à des contraintes d’équilibre budgétaire et le CA voulait qu’elle ait un coût global comparable à l’ancienne.

M. J______, directeur général de la ville avait participé aux discussions qui avaient donné lieu à l’extrait de la séance du CA du 30 juillet 2014 relatif à l’interprétation de l’art. 47 al. 5 SPVG. La pratique en vigueur ne faisait que confirmer celle adoptée sous l’ancien statut. Il avait participé à toutes les séances de négociation, sauf une, qui avaient mené à l’adoption du nouveau statut. Il n’avait pas le souvenir de discussions sur la signification de l’art. 47
al. 5 SPVG.

Le Conseil municipal (ci-après : CM) avait adopté le statut issu des négociations quasiment sans modification.

La proposition du CA de modifier le terme annuités par échelons mentionnée dans le tableau synoptique du 24 novembre 2008 n’était qu’une pure question de terminologie sans impact sur le litige. Dans son esprit et celui des représentants de la ville, l’annuité était un montant d’argent et la pratique alors en usage allait perdurer.

Madame Valérie BUCHS, mandataire du recourant, représentante du SIT lors des négociations, a exposé que chaque alinéa du projet de statut avait fait l’objet d’une discussion pour lui-même. Les termes « en tenant compte des annuités déjà acquises » n’avait jamais fait l’objet de discussions contradictoires entre la ville et les organisations représentatives du personnel, contrairement à d’autres points. À l’époque, elle avait compris les termes de l’art. 47 al. 5 SPVG comme invoqué dans le recours. La méthode décrite par la ville valait pour les promotions mais non pour la réévaluation de fonction. Cette méthode de coulissement en francs avait été employée lors du passage de l’ancienne à la nouvelle grille salariale, mais ceci n’avait rien à voir avec la réévaluation de fonction.

16) Le 21 décembre 2015, le SIT a produit des extraits de l’accord signé le 12 novembre 2009 entre la ville et les syndicats suite aux négociations sur le SPVG.

17) Le 16 février 2016, le recourant a déposé des observations.

Tous les documents figurants au dossier indiquaient que les termes « annuités déjà acquises » ne devaient pas être interprétés mais appliqués à la lettre.

L’art. 47 al. 1 SPVG ne concernait que les cas d’affectation à un nouveau poste. Le CA avait validé une pratique illicite de la DRH. L’impact financier allégué était disproportionné et non prouvé.

18) Le 15 février 2016, la ville a déposé des observations en développant son argumentation qui sera reprise en tant que de besoin dans la partie en droit, et produit l’ancien statut du personnel.

19) La cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées le 25 février 2016.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 104 SPVG).

2) Le litige concerne la fixation du traitement du recourant après réévaluation de sa fonction. Plus précisément il concerne la portée de l’art. 47 al. 5 SPVG, le recourant estimant arbitraire l’application faite par l’intimée de cette disposition.

3) a. Le pouvoir d’examen de la chambre administrative est limité à la violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1
let. a LPA). Sauf exception prévue par la loi, la chambre de céans ne peut pas revoir l’opportunité de la décision litigieuse (art. 61 al. 2 LPA).

b. Les communes disposent d’une grande liberté de décision dans la définition des modalités concernant les rapports de service qu’elles entretiennent avec leurs agents (arrêts du Tribunal fédéral 8C_78/2012 du 14 janvier 2013 consid. 6.1 ; 2P.46/2006 du 7 juin 2006 consid. 2.2 ; ATA/623/2016 du 19 juillet 2016 ; ATA/653/2015 du 23 juin 2015). Ainsi, l’autorité communale doit bénéficier de la plus grande liberté d’appréciation pour fixer l’organisation de son administration et créer, modifier ou supprimer des relations de service nécessaires au bon fonctionnement de celle-ci, questions relevant très largement de l’opportunité et échappant par conséquent au contrôle de la chambre de céans (art. 61 al. 2 LPA). Ce pouvoir discrétionnaire ne signifie pas que l’autorité est libre d’agir comme bon lui semble, dès lors qu’elle ne peut ni renoncer à exercer ce pouvoir, ni faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l’égalité de traitement, la proportionnalité et l’interdiction de l’arbitraire (ATA/87/2017 du 3 février 2017).

4) a. Selon une jurisprudence constante du Tribunal fédéral, la loi s’interprète en premier lieu d’après sa lettre (interprétation littérale). Si le texte légal n’est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, le juge recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d’autres dispositions légales, de son contexte (interprétation systématique), du but poursuivi, singulièrement de l’intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté du législateur telle qu’elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique) (ATF 138 II 557 consid. 7.1 p. 565 ;138 II 105 consid. 5.2 p. 107 ; 132 V 321 consid. 6 p. 326 ; 129 V 258 consid. 5.1 p. 263/264 et les références citées). Le Tribunal fédéral utilise les diverses méthodes d’interprétation de manière pragmatique, sans établir entre elles un ordre de priorité hiérarchique (ATF 138 II 217 consid. 4.1 p. 224 ; 133 III 175 consid.3.3.1 p. 178 ; 125 II 206 consid. 4a p. 208/209 ; ATA/422/2008 du 26 août 2008 consid. 7). Enfin, si plusieurs interprétations sont admissibles, il faut choisir celle qui est conforme à la Constitution (ATF 119 Ia 241 consid. 7a p. 248 et les arrêts cités).

b. Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) lorsqu’elle est manifestement insoutenable, se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. Il n’y a pas arbitraire du seul fait qu’une autre solution que celle adoptée par l’autorité intimée serait concevable, voire préférable (ATF 141 I 49 consid. 3.4 ; 140 I 201 consid. 6.1 ; 133 I 149 consid. 3.1).

5) L’art. 47 al. 5 SPVG figure dans le chapitre V, intitulé : Droits du personnel, à la section 1 : Traitement.

a. Le traitement annuel des membres du personnel est fixé conformément à une échelle de classes de traitement (art. 43 al. 1 SPVG). Le statut prévoit que le maximum de chaque classe de traitement est atteint par des augmentations annuelles (annuités) dont le montant dépend de la classe de traitement (art. 46 al. 1 SPVG). En annexe, une grille des traitements indique pour chaque classe ou catégorie de A à V, le traitement annuel pour chaque annuité de la classe entre 0 et 25. Cette grille indique également le montant des annuités sur 10 et 15 ans, les secondes représentant environ le tiers des premières.

b. Les fonctions font l’objet d’une description, d’une évaluation et d’une classification salariale (art. 8 al. 1 SPVG). Lorsqu’une fonction est réévaluée, elle peut, suivant les constatations faites, être maintenue dans la même classe de fonction ou être placée dans une classe de fonction supérieure ou inférieure (art. 8 al. 3 SPVG).

c. L’art. 47 SPVG concerne le traitement en cas de changement de poste ou de nouvelle classification. Les quatre premiers alinéas de cette disposition prévoient les modalités du traitement en cas d’affectation à un nouveau poste (art. 47 al. 1 à 4). Selon l’alinéa 1, lorsqu’un membre du personnel est affecté à un nouveau poste auquel correspond une classe de fonction supérieure, son traitement est augmenté d’une à trois annuités selon le nombre de classes dont il bénéficie en plus. Les alinéas 5 et 6 s’appliquent, à teneur de texte, lorsque la fonction exercée par un ou une membre du personnel fait l’objet d’une nouvelle classification au sens de l’art. 8 al. 3 SPVG. Dans cette hypothèse, le traitement est fixé dans la nouvelle classe de fonction dès la prise d’effet de la nouvelle classification en tenant compte des annuités déjà acquises (art. 47 al. 5 première phrase SPVG).

6) La question litigieuse est celle de savoir si ce nouveau traitement après réévaluation de la fonction – sans tenir compte des éventuels réajustements et des annuités supplémentaires pouvant être octroyées – se fait par coulissement vertical sur la grille salariale, c’est-à-dire en conservant le nombre d’annuités de l’ancien traitement ou si le coulissement se fait en francs, c’est-à-dire que le nouveau traitement correspond au montant de l’ancien, la classe et le nombre d’annuités étant modifiés.

Dans la première interprétation, les termes « en tenant compte des annuités déjà acquises » indiquent le nombre d’annuités qui serviront à fixer le nouveau traitement dans la nouvelle classe, alors que dans la seconde, ces mêmes termes impliquent de prendre en compte le montant de l’ancien traitement y compris les annuités, pour déterminer sur la grille de salaires à quelle annuité correspond le nouveau traitement dans la nouvelle classe.

Il est vrai qu’une lecture hors contexte de la disposition litigieuse donne une assise au sens voulu par le recourant, mais l’interprétation retenue par la ville n’apparaît pas non plus d’emblée en contradiction avec le texte.

7) Afin de déterminer le sens qu’il faut donner à cette disposition, il convient de retenir les éléments suivants qui découlent de la systématique du statut, de l’historique de la pratique de la ville, de l’adoption de la disposition ainsi que du but qu’elle poursuit.

a. Les annuités sont définies à l’art. 46 al. 1 SPVG. Selon les termes de cette disposition, elles constituent des « augmentations annuelles » du traitement. L’art. 47 al. 5 SPVG peut donc également se lire : Le traitement est fixé dans la nouvelle classe de traitement ( ) en tenant compte des augmentations annuelles déjà acquises. Cette lecture corrobore l’interprétation retenue par la ville puisque dans cette version, le nombre d’annuités n’apparaît plus pertinent en soi, l’accent étant clairement mis sur le montant du traitement, par l’emploi du terme augmentation.

b. La ville a allégué à l’appui de son interprétation, et cela n’est pas contesté, que la méthode du coulissement en francs était celle prévalant sous l’ancien statut. En outre, les dispositions transitoires du SPVG prévoient que le coulissement entre les classes de l’ancien et celles du nouveau statut s’effectue en francs (art. 115 al. 8 SPVG – auditions M. I______ et M. J______).

c. S’agissant des négociations entre partenaires sociaux ayant abouti au projet de SPVG ensuite adopté par le CM sans changement sur la question litigieuse, aucune des pièces produites ne fait état de discussions portant spécifiquement sur la question de l’interprétation qui doit être faite des termes « en tenant compte des annuités déjà acquises ». Les témoignages recueillis n’indiquent pas autre chose, la question n’ayant pas été abordée lors des négociations (auditions M. J______, Mme BUCHS) et les termes « annuités déjà acquises » figuraient déjà dans l’avant-projet de SPVG datant de novembre 2007 ayant servi de base aux négociations.

Il apparaît donc que le coulissement d’une classe ou catégorie à une autre, en cas de réévaluation de fonction, comme en l’espèce, qui existait déjà sous l’ancien statut et s’opérait déjà en francs, n’a pas été discuté à l’occasion de l’adoption du nouveau statut.

d. L’explication sur les buts de la méthode du coulissement en francs donnée par la ville, notamment exposée par la directrice de la DRH (audition Mme B______), est convaincante, dans la mesure où l’expérience de l’employé est reconnue par l’augmentation du traitement annuel selon un cahier des charges défini dans sa fonction. En cas de réévaluation de la fonction, le cahier des charges est modifié avec des compétences et des missions supplémentaires ou différentes. Il apparaît logique que dans la nouvelle fonction, il n’y ait pas de reconnaissance de l’expérience sur l’entier de la fonction. En revanche, l’expérience déjà acquise est prise en compte par le coulissement en francs et l’adjonction d’une ou plusieurs annuités par application de l’art. 47 al. 1 SPVG.

e. Rien dans le SPVG ne permet de penser que la fixation du traitement du recourant et celle d’un hypothétique employé nouvellement engagé doivent être identiques, de sorte que le grief d’inégalité de traitement doit être écarté d’emblée.

8) Le recourant allègue encore, sans aucunement étayer ses propos à cet égard, qu’une inégalité de traitement serait créée par l’art. 47 al. 5 SPVG entre sa situation et celle d’employés qui seraient nouvellement engagés.

Au vu de ce qui précède, il apparaît qu’aucun indice à l’appui de l’interprétation soutenue par le recourant n’a pu être mis en évidence et aucun motif ne permet donc de s’écarter de l’interprétation donnée par la ville dans sa décision de fixation du traitement du recourant. Cette dernière devra être confirmée.

9) Le recourant remet également en cause le principe de l’application de l’art. 47 al. 1 SPVG à sa situation. Toutefois, dans la mesure où en l’absence d’application de cette disposition, le traitement qui résulterait de la seule application de l’art. 47 al. 5 SPVG est inférieur à celui fixé dans la décision, le grief ne saurait être examiné ici. En effet, la chambre administrative est liée par les conclusions des parties, soit en l’espèce par la confirmation de la décision ou la fixation d’un traitement supérieur à celui fixé par ladite décision.

10) Le recourant estime encore que la ville a fait une mauvaise application de l’art. 47 al. 1 SPVG. Selon lui, un traitement de CHF 106'069.-, correspondant à une classe I 14 devrait être fixé en application de cette disposition.

L’art. 47 al. 1 SPVG prévoit l’attribution d’une annuité de la nouvelle classe arrondi à l’annuité immédiatement supérieure, lorsque la nouvelle classe de fonction correspond à une classe de plus que la fonction antérieure. Prévu pour l’affectation à un nouveau poste, cette disposition est appliquée par analogie par la ville aux cas de réévaluation des fonctions avec pour effet d’augmenter immédiatement le traitement des employés dans leur nouvelle fonction.

En l’espèce, le résultat du coulissement du traitement du recourant aboutit à la classe I annuité 9,89 pour un traitement de CHF 102'118.-. Par ajout d’une annuité supplémentaire, le traitement est fixé en classe I annuité 10,89 et se calcule en différenciant l’annuité inférieure à 10 et celle supérieure à 10, soit 11 % (10 - 9,89) de la grande annuité de CHF 3'143.-, CHF 345.73 et 89 % (10,89 - 10) de la petite annuité de CHF 898.-, CHF 799.22, soit au total CHF 103'262.95 (102'118 + 345,73 + 799.22) correspondant à un traitement de classe I annuité 11.

Le recourant conteste ce calcul, estimant que l’annuité supplémentaire doit être une « grande » annuité, ce qui porte le traitement à CHF 105'261.20
(102'118 + 3'143), arrondi à l’annuité supérieure, soit un montant de CHF 106'069.- correspondant à une classe I 14.

Ce dernier raisonnement, prenant en compte l’entier de l’annuité supplémentaire, ne saurait être suivi dans la mesure où la grille salariale du SPVG prévoit deux annuités distinctes pour chaque classe, l’une dite « grande » pour les dix premières annuités et l’autre dite « petite » pour les quinze annuités suivantes.

La prise en compte de cette distinction par la ville dans l’application faite de l’art. 47 al. 1 SPVG s’avère donc correcte et le grief du recourant, au demeurant peu motivé, sera écarté.

11) Finalement, le recourant invoque une violation de l’art. 18 SPVG. Il estime que l’application de l’art. 47 al. 5 faite par l’intimée aurait dû donner lieu à l’ouverture de négociations avec les organisations représentatives du personnel et les commissions du personnel concernées.

L’art. 18 SPVG prévoit que le CA, ou l’instance déléguée par lui à cet effet, ouvre des négociations avec les organisations représentatives du personnel et les commissions du personnel concernées avant toute modification du statut et de ses règlements.

Comme vu ci-dessus, l’interprétation retenue par la ville de l’art. 47 al. 5 SPVG est conforme au droit et ne saurait donc être assimilée à une « modification » du statut qui nécessiterait l’ouverture de négociations au sens de l’art. 18 SPVG.

12) En définitive, en tous points infondé, le recours sera rejeté.

Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- (art. 87 al. 1 LPA) sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 février 2015 par M. A______ contre la décision de la Ville de Genève du 17 décembre 2014 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de M. A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt au syndicat interprofessionnel de travailleuses et travailleurs (SIT), mandataire du recourant, ainsi qu'à la Ville de Genève.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges,
Mme Steiner Schmid, juge suppléante.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :