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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2440/2007

ATA/265/2008 du 27.05.2008 ( BARR ) , REJETE

Recours TF déposé le 07.07.2008, rendu le 28.01.2009, PARTIELMNT ADMIS, 2C_504/08, 2C_505/08
Descripteurs : ; AVOCAT ; AUTORITÉ DE SURVEILLANCE ; PARTIE À LA PROCÉDURE ; MESURE DISCIPLINAIRE ; LACUNE(LÉGISLATION)
Normes : LPA.7 ; LLCA.12 ; LLCA.14 ; LPAV.12 ; LPAV.14
Résumé : Le client de l'avocat, faisant l'objet d'une procédure disciplinaire, ne peut être partie à ladite procédure. Son recours est irrecevable. La compétence de la commission du barreau pour prononcer une injonction visant à ce que l'avocat cesse d'occuper en cas de conflit d'intérêts est admise, une lacune existant tant dans la LLCA que dans la LPav à cet égard. En l'espèce, existence du conflit d'intérêts admise.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2440/2007-BARR ATA/265/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 27 mai 2008

 

dans la cause

 

Monsieur W______

et

Monsieur P______

contre

COMMISSION DU BARREAU


 


EN FAIT

1. Maître W______ (ci-après : l'intéressé ou le recourant) a obtenu son brevet d’avocat en février 1990. Depuis lors, il est inscrit au barreau de Genève où il exerce sa profession comme avocat indépendant dès 1994. A partir du 1er janvier 2005, il s’est associé avec Maîtres X______, Y______, Z______ et A______. Il s’agit d’une association intégrée.

2. Depuis plusieurs années, Me Y______ a assuré la défense des intérêts de la banque L______ (ci-après : L______ ou la banque) dans différentes procédures pénales et civiles. Il s’agissait notamment d’une procédure pénale visant Monsieur B______, débiteur de la banque, dans laquelle la L______ était partie civile. Il a été le conseil de la banque également dans diverses procédures civiles qui étaient connexes à la précédente, en particulier une action en responsabilité contre l’organe de révision des sociétés animées par M. B______.

3. La L______ était, par ailleurs, partie civile dans plusieurs procédures pénales dans lesquelles Monsieur P______ (ci-après : le client ou l'intervenant), ancien directeur général, était inculpé à divers titres. Il s’agissait essentiellement des trois procédures suivantes :

Procédure n° P/3409/01 où la banque était représentée par Maîtres C______ et E______ ;

Procédure n° P/4171/01 dans laquelle la banque était représentée par Me E______ seul ;

Procédure n° P/12481/01 dans laquelle Me C______ représentait seul la banque.

Dès le début, dans ces trois procédures, M. P______ a été assisté par Me W______.

4. Dans le courant de l’année 2004, au cours des pourparlers précédant l’association avec l’étude X______, Y______, Z______ (ci-après : étude XYZ______), l’hypothèse d’un conflit d’intérêts entre les dossiers pour lesquels Me Y______ était constitué et la poursuite de la défense de M. P______ par l'intéressé a été étudiée. Les futurs associés ont considéré qu’aucun conflit d’intérêts ne pouvait être sérieusement retenu.

5. Au cours du premier trimestre qui a suivi l'association, la L______ est intervenue auprès de Me Y______ en invoquant un tel conflit.

6. Suite à un entretien avec le directeur du département juridique de la L______, Me W______ a cessé d’occuper dans deux procédures opposant M. P______ à la banque dans un affrontement direct, soit les procédures pénales P/4171/01 et P/12481/01. Dans ces deux procédures, la défense du client a été assurée depuis lors par Me D______, ancien associé de l'intéressé. En revanche, Me W______ a refusé de cesser d’occuper dans la procédure P/3409/01, en raison de l’absence d’un conflit d’intérêts tant actuel que potentiel.

7. Dans le cadre de cette dernière procédure, il était reproché à Me R______ et MM. P______, I______, J______, K______ et V______ d’avoir, en leur qualité d'organes de la banque, constitué des provisions insuffisantes pour les exercices 1994 à 1999, dont il découlait l’établissement de bilans trop optimistes. M. P______ avait été inculpé de gestion déloyale et de faux dans les titres.

La L______ n’avait pas porté plainte de ces chefs mais s'était constituée partie civile. Selon Me W______, il n’y avait jamais eu d’affrontement entre la banque et son client dans ce dossier. Il était même arrivé qu’à l’occasion de diverses procédures de recours soumises à la chambre d’accusation, la L______ et son client aient pris des conclusions identiques. Par ailleurs, un accord avait été conclu entre la L______ et M. P______ selon lequel les frais exposés pour la défense de ce dernier lui seraient remboursés par la banque, hormis le cas où il ferait l’objet d’une condamnation pénale en raison des faits qui lui étaient reprochés.

8. Par pli du 2 juin 2005, Me W______ a saisi le conseil ad hoc « conflit d’intérêts L______ » de l’ordre des avocats (ci-après : le conseil ad hoc), afin qu’il se prononce sur l’existence d’un conflit d’intérêts dans le cadre de la procédure précitée.

L'intéressé avait assisté M. P______ dans cette procédure gigantesque depuis le premier jour. Il n’y avait jamais eu d’affrontement direct entre la L______ et son client. Dès lors, l’hypothétique conflit d’intérêts allégué devait s’effacer devant le droit de M. P______ à une défense efficace. Il était inapproprié et inéquitable d’imposer à ce dernier la constitution d’un nouvel avocat tant pour des raisons financières que temporelles compte tenu de la dimension et de la complication de la procédure. Celle-ci était en effet très difficile à comprendre sans avoir participé aux très nombreuses audiences d’instruction et aux multiples procédures de recours à la chambre d’accusation et au Tribunal fédéral.

La situation de son étude était similaire à celle de l’étude T______ et associés (ci-après : étude T______). En effet, Me R______ avait été défendu par feu Me T______ puis par Maîtres F______, G______ et H______. Parallèlement, cette même étude défendait les intérêts de la L______ qui s’était constituée partie civile contre Monsieur M______ dans l’affaire dite « N______ ». A sa connaissance, le conseil ad hoc avait été saisi de ce conflit d’intérêts qui avait été jugé inexistant puisque Mes F______, G______ et H______ avaient continué à participer à la procédure.

Il s'engageait à se soumettre à la décision du conseil ad hoc, quelle qu'en soit la teneur.

9. Par pli du 22 septembre 2005, adressé au conseil ad hoc, la L______ a indiqué qu’elle n’entendait pas se joindre à la démarche unilatérale de Me W______. Dès le début de l'année 2005 cette situation de conflit d’intérêts avait été soulevée auprès de Mes Y______ et W______, ce qui avait conduit ce dernier à se retirer de deux procédures pénales. La L______ ne comprenait donc pas que Me W______ persiste à vouloir assister M. P______ dans cette dernière procédure dont rien ne pouvait justifier un traitement distinct. La banque contestait qu’elle puisse avoir des intérêts communs avec M. P______ ou que ce dernier puisse adopter une ligne de défense concertée avec elle.

10. Par courrier du 4 janvier 2006, la L______ a dénoncé Me W______ à la commission du barreau (ci-après : CBA) afin que cesse la situation de conflit d’intérêts qui existait à son préjudice au sein de l’étude XYZ______. Dans un courrier ultérieur, la banque a précisé que dans le cas d’espèce, le conflit d’intérêts était avéré et qu’il fallait simplement contraindre Me W______ à respecter ses engagements et à cesser d’occuper dans la procédure susmentionnée.

11. Sur demande de Me W______, la CBA a décidé, par pli du 8 février 2006, de suspendre l’instruction de cette nouvelle procédure jusqu’à droit jugé par le conseil ad hoc.

12. Le conseil ad hoc a rendu une décision le 27 avril 2006. Il a constaté à l’unanimité de ses membres qu'il existait un risque de conflit d’intérêts dans l’exercice simultané du mandat de Me W______ pour M. P______ et ceux de Me Y______ pour la L______. Elle invitait l'intéressé à prendre des mesures pour le faire cesser.

13. Par courrier du 1er juin 2006 adressé à la CBA, M. P______ a sollicité son audition expliquant que dès lors qu’il n’avait pas été partie à la procédure par-devant le conseil ad hoc, il ne se sentait pas lié par celle-ci. Il reprenait les mêmes arguments qu’avait développés son conseil soit :

- l’impossibilité de se séparer de son défenseur après cinq ans de procédure ;

- l’identité de son cas avec celui de l’étude de Me G______ et associés, défenseurs de Me R______ et simultanément mandatés par la banque ;

- aucun conflit ne pouvait l’opposer à la banque puisqu’elle l’avait cité comme témoin dans plusieurs procédures tant pénales que civiles et que parfois leurs intérêts étaient même convergents.

14. A sa demande, l'intéressé a été entendu par une délégation de la CBA le 17 novembre 2006. Il a confirmé les explications qu’il avait déjà fournies antérieurement. Il a ajouté toutefois que dans la procédure n° P/3409/01, l’Etat de Genève était la partie civile la plus active. Par ailleurs, dans le cadre de la procédure civile opposant l’Etat de Genève aux anciens réviseurs de la L______, il avait défendu M. P______ dans la procédure d’appel en cause, collaborant d’ailleurs avec Me X______, son associé, mandaté par un autre ancien administrateur de la banque, laquelle ne s’était pas plainte de cette situation.

Interrogé sur son revirement quant à son engagement de se soumettre à la décision du conseil ad hoc, il a expliqué que la saisine de ce dernier était intervenue d’entente avec la banque. Comme celle-ci s’était finalement rétractée, il ne se sentait plus lié par son propre engagement.

15. Par courrier du 8 décembre 2006, M. P______ a demandé à la CBA d’être considéré comme intervenant, demande qui a été acceptée.

Au cours de son audition le 15 décembre 2006, M. P______ a indiqué qu’il ne comprenait pas l’acharnement de la banque à voir Me W______ mettre fin à ses mandats alors qu’elle confiait encore actuellement des mandats à Me Y______. D'après ses calculs, l'intéressé avait consacré plus de 1'500 heures à cette affaire et près de 300 audiences. Un changement d'avocat aurait pour lui des conséquences désastreuses, tant sur le plan financier que sur le plan de sa défense personnelle. A l'origine de l'acharnement de la banque à son endroit, il voyait les manœuvres de Me E______, actuel conseil de la banque.

A l’issue de cette audience, Me W______ a invité la CBA à sanctionner l’attitude de la banque (sic) dont les actes relevaient de l'abus de droit. Il se réservait en outre le droit de faire entendre les dénonciateurs.

16. Par courrier du 5 février 2007, Me W______ a informé la CBA qu’il renonçait à ces auditions. En revanche, il sollicitait celles de Mes F______, G______ (avocate de Me R______), O______ et Q______ (avocats de la L______ dans l’affaire N______, notamment). Il signalait encore que dans le cadre de la procédure pénale en cause, les experts avaient rendu un rapport de trois cents pages dont la compréhension était hermétique pour toute personne n'ayant pas participé à l'instruction.

17. Par décision du 9 mai 2007, communiquée aux parties par plis recommandés du 21 mai 2007, la CBA a retenu qu’il existait un conflit d’intérêts. En conséquence, elle faisait interdiction à Me W______ de représenter M. P______ dans la procédure pénale. Elle l’invitait également à justifier d’avoir cessé d’occuper dans cette procédure dès que la décision serait devenue définitive et exécutoire.

Le prononcé d’une interdiction de représenter un client était une mesure qui n’était spécifiquement envisagée ni par la loi fédérale sur la libre circulation des avocats du 23 juin 2000 (LLCA - RS 935.61) ni par la loi d’application cantonale. La CBA en déduisait qu’il y avait une lacune de la loi qu'il lui appartenait de combler. En sa qualité de garante du respect des règles professionnelles des avocats comme autorité cantonale de surveillance instituée par l’article 14 LLCA, la CBA estimait être de sa compétence les domaines qui touchaient tant l’intérêt public que l’intérêt du client, telle la levée ou non du secret professionnel ou l’interdiction faite à un avocat de représenter une partie. La commission avait refusé l’audition des avocats chargés de la défense des intérêts de Me R______. En effet, elle avait retenu sur les éléments dont elle avait connaissance que les mandats qui avaient été confiés par Me R______ et par la L______ à l’étude précitée n’avaient aucune connexité et que le risque d’un conflit d’intérêts était nul. L’interdiction de plaider en cas de conflit d’intérêts était une règle cardinale de la profession d’avocat qui découlait de l’obligation d’indépendance rappelée à l’article 12 lettre b LLCA, de l’obligation de fidélité et du devoir de diligence de l’avocat.

Le critère du devoir de fidélité devait être relativisé dans le cas d’espèce. En effet la L______ était un acteur important de la vie économique et financière du canton et au vu de l’inévitable contentieux qui était le sien, elle pouvait, par une stratégie critiquable, bloquer l’exercice normal des mandats et restreindre le choix des clients de l’avocat.

En revanche, s’agissant du respect du secret professionnel et du critère de l’indépendance, le risque potentiel, voire la mise en danger abstraite des intérêts du client du recourant comme ceux de la banque, existait puisque Me Y______ avait reçu mandat de la banque de défendre ses intérêts dans d’autres procédures parallèles. En sa qualité de directeur général de la banque, M. P______ était au courant de toutes les démarches entreprises contre les débiteurs ou envers les créanciers de celle-ci. Même s'il avait témoigné en faveur de son ancien employeur, ou pris des conclusions identiques aux siennes dans certaines procédures, l’on ne pouvait pas exclure, suivant le déroulement futur des dites procédures, que les intérêts des parties divergent voir s’opposent. Dans de telles circonstances, l’obligation de confidentialité pouvait être transgressée même involontairement par l’un ou l’autre des avocats. Pour le surplus, la question de la pesée des intérêts de M. P______ et ceux de la banque n’était pas pertinente, car au niveau du principe de l’interdiction du conflit d’intérêts il n’y avait pas de pesée d’intérêts possible. Tant M. P______ que le recourant savaient, dès fin 2004 en tous les cas, que cette question se poserait, ce d’autant plus que la banque avait attiré sur ce point l’attention de l’avocat dénoncé et celle de son associé, Me Y______. Comme le recourant avait pris le parti de se mettre dans une situation de conflit d’intérêts lorsqu’il s’était associé à l’étude XYZ______, il ne pouvait invoquer les conséquences pénibles qu’entraînaient pour son client la révocation de son mandat.

18. Par acte du 21 juin 2007, Me W______ a interjeté recours à l'encontre de la décision précitée auprès du Tribunal administratif.

La commission ne pouvait pas lui enjoindre de cesser d'occuper puisqu'une telle sanction n'était pas prévue par la LLCA. En outre, cette décision contrevenait tant au principe de la liberté économique qu'à celui de l'égalité entre concurrents. Au surplus, elle violait également le principe de la proportionnalité. Enfin, elle reposait sur une constatation inexacte des faits et avait été rendue alors qu'il n'existait pas de risque concret de conflit d'intérêts. Le recourant sollicitait l'audition de Mes F______, O______, Q______ ainsi que la production de la décision rendue par le conseil ad hoc dans le cadre du conflit d'intérêts hypothétique existant dans l'étude T______.

19. M. P______ a également interjeté recours auprès du Tribunal administratif à l'encontre de la décision précitée, par pli du 21 juin 2007. Il a conclu à son annulation.

L'intervenant faisait valoir que la décision querellée entraînait la violation de son droit à un procès équitable, aucun autre avocat n'étant en mesure de remplacer le recourant compte tenu de l'avancement de la procédure pénale existant à son encontre.

20. Entendu par le tribunal de céans le 29 février 2008, le recourant a confirmé les propos qu'il avait tenus devant la CBA.

Il avait toujours été le seul avocat constitué pour assurer la défense des intérêts de l'intervenant dans cette procédure. Il ne s'était jamais engagé vis-à-vis de la L______ à cesser d'assurer la défense de ce dernier dans la procédure concernée. De plus, il était parfaitement loisible à la banque de mettre fin au conflit d'intérêts en résiliant les mandats qu'elle avait confiés à Me Y______. Compte tenu de la fin du volet pénal de l'affaire B______, le conflit d'intérêts allégué par la banque avait pris fin. Enfin, il insistait sur le fait que ses propres dossiers étaient physiquement séparés de ceux de son associé.

21. L'intervenant a été également entendu par le tribunal de céans le 29 février 2008.

Il a confirmé que la banque avait pris la décision en mars avril 2000 de lui rembourser les frais encourus pour sa défense, sauf en cas de condamnation pénale.

22. Sur demande du juge rapporteur, le tribunal d'arrondissement de la côte du canton de Vaud a confirmé par pli du 26 mars 2008 que l'affaire dirigée contre M. B______ dans laquelle Me Y______ représentait les intérêts de la L______ était terminée.

23. Par pli du 15 avril 2008, le juge d'instruction du canton de Vaud a indiqué au tribunal de céans qu'il venait de clôturer deux dossiers concernant M. B______. Me Y______ n'était plus constitué pour la L______ dans aucune procédure pénale pendante auprès de son office.

24. Le 22 mai 2008, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Lorsque différentes affaires se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune, l'autorité peut d'office les joindre en une même procédure (art. 70 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 – LPA – E 5 10). Le recours interjeté par Me W______ (A/2440/2007) et celui qui a été interjeté par M. P______ (A/2441/2007) se rapportent à une situation identique. En effet il s'agit de savoir si, en continuant d'assurer la défense de M. P______ comme inculpé dans la procédure P/3409/01 alors que son nouvel associé, Me Y______, défendait, dans d'autres procédures, la L______, également partie civile dans le cadre de la procédure précitée, Me W______ a contrevenu à l'article 12 LLCA proscrivant le conflit d'intérêts. Les deux recours seront joints en une même procédure, sous le numéro de cause A/2440/2007.

2. La décision querellée a été notifiée aux parties par plis recommandés du 21 mai 2007. Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables de ce point de vue (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3. Dans la décision querellée, la CBA a admis l'intervention du client sans examiner s'il pouvait avoir la qualité de partie à une telle procédure.

a. La LPA ne connaissant pas l'intervention (ACOM/32/2005 du 27 avril 2005 ; ATA/789/2002 du 10 décembre 2002), le client n'aurait pas dû être considéré comme intervenant mais comme appelé en cause. Reste à savoir s'il disposait de la qualité de partie.

b. Pour les tiers, il n'y a par définition aucune "atteinte" juridique, aucune diminution de leurs droits, aucune aggravation de leurs obligations ; les effets préjudiciables de la décision sont de fait. La question est : à partir de quelle intensité de tels effets constituent-ils une atteinte assez pertinente pour léser un intérêt digne de protection ? […] Pour qu'une relation suffisante existe, il faut qu'il y ait véritablement un préjudice porté de manière directe à la situation personnelle du recourant. […] Il faut être atteint plus que quiconque, mais il importe d'ajouter tout de suite que cela ne suffit pas, puisque […] il faut en plus un rapport étroit avec l'objet du litige tel qu'il est déterminé par le droit applicable au fond (P. MOOR, Droit administratif, II : Les actes administratifs et leur contrôle, 2e édition, Berne 2002, p. 630-631 ; cf. également ATF 130 V 560 consid. 3.5 p. 564).

c. Par rapport au destinataire direct d'une sanction disciplinaire, la doctrine considère comme "tiers" tant les personnes qui pourraient subir des conséquences négatives suite à cette sanction que celles qui sont victimes du comportement poursuivi disciplinairement (lésé) ou celles qui ont alerté l'autorité sur ce comportement (dénonciateur ; T. TANQUEREL, Les tiers dans la procédure administrative, Genève 2004, p. 105).

d. Les personnes qui pourraient subir des conséquences négatives n'ont pas la qualité de partie, quel que soit le critère applicable, faute d'être touchées directement par la décision. En effet, par définition, une sanction ne touche directement que la personne qui en est l'objet. D'autres personnes ne peuvent être affectées qu'indirectement, principalement en raison des conséquences que pourraient avoir sur elles les changements provoqués par la sanction dans la situation économique du sanctionné (T. TANQUEREL, op.cit. p.105).

e. Selon la jurisprudence constante du tribunal de céans, ni le dénonciateur ni le plaignant n'ont la qualité de partie dans une procédure disciplinaire dirigée contre la personne dont ils ont révélé les agissements Cette solution reste inchangée sous l'angle de l'article 7 LPA : selon la portée qu'il faut donner à cette disposition, il ne suffit pas que l'administré puisse se prévaloir d'un intérêt digne de protection pour que la qualité de partie lui soit reconnue. Il faut que la décision en question soit susceptible d'affecter directement ses droits ou obligations. Selon une formule communément admise, seules les personnes se trouvant dans le champ protecteur de la norme appliquée ont un intérêt juridique à en demander ou à en faire contrôler l'application (J.-F. AUBERT, Traité de droit constitutionnel suisse, 1967 et supplément 1967-1982 ; R. MAHLER, Réflexions sur la qualité pour recourir en droit administratif genevois, RDAF 1982, p. 272 et ss ; A. AUER, La juridiction constitutionnelle en 1983, no 369 ss). Tel n'est cependant pas le cas du dénonciateur ou du plaignant, car une procédure disciplinaire et la sanction à laquelle elle peut aboutir sont destinées à assurer la protection de l'intérêt public, et non ceux de la victime (ATA/514/1997 du 26 août 1997). Ce principe s'applique en outre nonobstant la question de savoir si la décision litigieuse peut avoir une incidence dans une procédure civile à laquelle le dénonciateur est partie (ATA/165/1998 du 24 mars 1998).

D'après la doctrine, la situation du lésé et du dénonciateur, dans le cadre des procédures disciplinaires, doit être traitée de manière identique (T. TANQUEREL, op.cit. p. 105).

La jurisprudence précitée a été développée essentiellement en matière de sanctions disciplinaires, mais elle est applicable à toute mesure intervenant au terme d'une procédure disciplinaire.

En l'espèce, le client n'est qu'une personne qui pourrait subir des conséquences négatives en étant obligé de changer d'avocat. N'étant affecté que de manière indirecte par la décision querellée, il ne pouvait pas être partie à la procédure devant la CBA. Il ne peut être considéré comme lésé puisqu'il n'est pas victime du comportement poursuivi disciplinairement. Au demeurant, même si c'était le cas, il n'aurait pas la qualité de partie, compte tenu de la jurisprudence précitée.

Au vu de ce qui précède, le recours de M. P______ tendant à l'annulation de la décision querellée est irrecevable, car il ne peut pas être partie à une procédure disciplinaire.

4. Selon le recourant, la CBA n'avait pas la compétence de lui faire interdiction de représenter l'intervenant dans la procédure pénale P/3409/01 puisqu'une telle sanction ne figure pas parmi les sanctions disciplinaires prévues par l'article 17 LLCA et qu'aucun texte légal n'attribue de compétence à la CBA en la matière.

Le tribunal de céans a déjà eu l'occasion de dire que l'injonction se distinguait de la sanction disciplinaire par le but poursuivi. La première vise à rétablir dans l'immédiat une situation conforme au droit, alors que la sanction disciplinaire a un effet essentiellement préventif. Elle doit conduire la personne fautive à adopter à l'avenir un comportement correct (SJ 1983, p. 223 ; ATA W. du 28 septembre 1988 consid. 2a). Dans un arrêt récent, le Tribunal fédéral a confirmé cette jurisprudence en relevant que l'interdiction faite à un avocat de continuer à assurer la défense de son client n'avait nullement le caractère d'une sanction disciplinaire mais visait à garantir le bon déroulement de la procédure en cours (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.560/2004 du 1er février 2005 consid. 8).

En conséquence, le fait que les injonctions ne figurent pas dans la liste des sanctions disciplinaires n'est, en soi, pas déterminant. Le Tribunal fédéral a rappelé que la LLCA réglementait de manière exhaustive le droit disciplinaire et qu'elle ne prévoyait que les sanctions exposées en son article 17, tout en relevant que le droit cantonal pouvait mettre d'autres moyens de contrôle à disposition de l'autorité de surveillance des avocats. Dans le cas qui lui était soumis, il renonçait à examiner si et dans quelle mesure une norme cantonale donnant compétence à l'autorité de surveillance d'imposer un comportement à l'avocat serait admissible, le droit cantonal visé en l'espèce, n'apparaissant pas connaître une telle règle et le moyen n'ayant pas été invoqué par le dénonciateur (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.447/2005 du 6 mars 2006 consid. 4.3). Dans deux autres arrêts, le Tribunal fédéral a admis, en l'absence d'une norme cantonale de compétence, la pratique valaisanne, selon laquelle l'autorité habilitée à empêcher de plaider l'avocat confronté à un conflit d'intérêts était le tribunal saisi au fond (Arrêts du Tribunal fédéral 2A.560/2004 du 1er février 2005 consid. 8 ; 1A.223/2002 du 18 mars 2003 consid.3.2).

5. a. Il est constant que le prononcé d'une interdiction de représenter un client est une mesure qui n'est pas envisagée par la loi sur la profession d’avocat du 26 avril 2002 (LPAv - E 6 10). En conséquence, la LPAv n'attribue aucune compétence pour le prononcé d'une telle mesure à la CBA. Le Tribunal fédéral retient, toutefois, que l'interdiction de plaider en cas de conflit d'intérêts est une règle cardinale de la profession d'avocat qui découle de l'obligation d'indépendance rappelée à l'article 12 let b LLCA (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.123/2002 du 18 mars 2003, consid. 5.2).

b. L'article 14 LLCA institue une autorité cantonale de surveillance ayant une compétence générale. En effet, elle est "chargée de la surveillance des avocats qui pratiquent la représentation en justice sur son territoire". Désignée par l'article 14 LPAv, il s'agit, à Genève, de la CBA. Outre les compétences particulières qui lui sont attribuées par la LLCA, elle a celles de se prononcer sur la levée du secret professionnel (art. 12 al. 3 et 4 LPAv) et de désigner un suppléant en cas d'empêchement de l'avocat (art. 9 LPAv) qui lui sont attribuées par la LPAv.

6. a. Il y a lacune dans une réglementation juridique lorsqu'une question se pose à laquelle aucune réponse ne peut être trouvée par l'interprétation ou, en droit administratif, par l'application de principes généraux ou de règles générales. On distingue ainsi les lacunes non authentiques qui sont caractérisées par le fait que le législateur a délibérément omis de prévoir une règle (silence qualifié) et les lacunes authentiques qui se caractérisent par le fait que l'application du texte exige qu'une règle soit posée et que le législateur aurait prévu la règle nécessaire s'il y avait songé (ATF 84 I 96 ; 89 I 270 ; 94 I 308 ; 107 V 196 ; ATA/778/2002 du 10 décembre 2002 consid. 5).

b. Pour assurer le respect de l'interdiction de plaider en cas de conflit d'intérêts, l'injonction est une mesure adéquate puisqu'elle permet de mettre fin rapidement à ce type de situations. Le Tribunal fédéral l'a d'ailleurs admis dans les deux jurisprudences précitées (Arrêts du Tribunal fédéral 2A.560/2004 du 1er février 2005 consid. 8 ; 1A.223/2002 du 18 mars 2003 consid.3.2 précités) rendues sur recours contre des décisions valaisannes. Il a paru ensuite mettre en doute ce principe dans une espèce zurichoise déjà citée, tout en reconnaissant que le droit cantonal pouvait mettre d'autres moyens de contrôle, que les sanctions disciplinaires prévues par la LLCA, à disposition de l'autorité de surveillance des avocats. Par ailleurs, dans ce dernier cas, le recours ne portait pas sur ce point précis mais sur la qualité pour recourir du dénonciateur (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.447/2005 précité). Au vu de ce qui précède, l'absence de référence à une injonction visant à interdire de continuer la représentation d'un client en cas de conflit d'intérêts dans la LPAv constitue une lacune à laquelle il appartient au juge de remédier en faisant acte de législateur. Il en va de même pour la compétence de l'autorité chargée de prononcer une telle mesure.

7. La compétence de prononcer une injonction s'inscrit dans le devoir général de surveillance énoncé à l'article 14 LLCA et attribué à la CBA par l'article 14 LPAv. Il s'ensuit que la compétence de prononcer une interdiction de pratiquer est du ressort de la CBA, à l'instar d'autres compétences qui touchent tant l'intérêt public que l'intérêt du client (art. 9 et 12 al. 3 et 4 LPAv).

Selon le recourant, le législateur n'a pas voulu conférer de compétence à la CBA en matière de prononcé d'injonction, puisqu'une telle intention ne ressort pas des travaux préparatoires de la LPAv. C'est oublier que, sous l'empire de l'ancien droit, le principe que l'autorité de surveillance soit compétente pour prononcer des injonctions à l'égard des avocats, en vue de rétablir une situation conforme au droit, était acquis et n'a pas été contesté par le tribunal de céans (ATA W. du 28 septembre 1988). C'est oublier également que dans les deux jurisprudences déjà citées à plusieurs reprises, le Tribunal fédéral a admis la compétence des autorités valaisannes du fond pour prononcer de telles injonctions alors que celle-ci ressortait de la pratique et non d'une loi cantonale.

Au vu de ce qui précède, le raisonnement de la CBA n'est pas critiquable. Les arguments du recourant doivent être rejetés et la compétence de la CBA doit être admise.

8. En demandant la production de la décision rendue par le conseil ad hoc au sujet de l'étude T______ ainsi qu'en sollicitant l'audition des avocats de cette dernière étude, le recourant se plaint en réalité d'une inégalité de traitement.

Il y a inégalité de traitement lorsque, sans motifs sérieux, deux décisions soumettent deux situations de fait semblables à des règles juridiques différentes ; les situations comparées ne doivent pas nécessairement être identiques en tous points, mais leur similitude doit être établie en ce qui concerne les éléments de fait pertinents pour la décision à prendre (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.227/2005 du 13 mai 2005 consid. 4.1 ; ATF 130 I 65 consid. 3.6 p. 70 ; 129 I 113 consid. 5.1 p. 125/126, 265 consid. 3.2 p. 268/269, 346 consid. 6 p. 357, et les arrêts cités). Selon la jurisprudence toutefois, le principe de la légalité de l'activité administrative prévaut sur celui de l'égalité de traitement. En conséquence, le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d'une inégalité devant la loi, lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas, alors qu'elle aurait été faussement, voire pas appliquée du tout, dans d'autres cas (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.227/2005 du 13 mai 2005 consid. 4.1 ; ATF 126 V 390 consid. 6a p. 392 ; 117 Ib 266 consid. 3f p. 270 ; 116 Ib 228 consid. 4 p. 234/235 ; 108 Ia 212 et les arrêts cités). Cela présuppose cependant, de la part de l'autorité dont la décision est attaquée, la volonté d'appliquer correctement à l'avenir les dispositions légales en question. Le citoyen ne peut prétendre à l'égalité dans l'illégalité que s'il y a lieu de prévoir que l'administration persévérera dans l'inobservation de la loi (Arrêt du Tribunal fédéral 1P.227/2005 consid. 4.4 ; ATF 127 I 1 consid. 3a p. 2/3 ; 126 V 390 consid. 6a p. 392 ; 115 Ia 81 consid. 2 p. 82/83 ; et les arrêts cités).

Tout d'abord, la décision dont se prévaut le recourant dans le cas de l'étude T______ n'a pas été rendue par la CBA mais par le conseil ad hoc. Bien que dans la décision querellée, la CBA considère que sur la base des éléments qui lui étaient connus de ce dernier dossier, il n'y avait pas lieu de retenir l'existence d'un conflit d'intérêts, il est impossible de savoir comment elle aurait jugé de ce cas si elle en avait été saisie. Ensuite, la CBA a clairement manifesté dans sa jurisprudence récente la volonté d'enjoindre aux avocats confrontés à un conflit d'intérêts de cesser d'assurer la défense des clients concernés (décisions citées par C. REISER, M. VALTICOS, Conflits d'intérêts : L'autorité de surveillance des avocats est-elle fondée à intervenir préventivement? in Revue de l'avocat, 6-7/2006 p. 247). Cet argument du recourant doit également être rejeté.

9. Le recourant a fait valoir qu'en l'espèce il n'existait pas concrètement de conflit d'intérêts et que son client et la L______ n'étaient pas en opposition directe dans la procédure visée par la décision querellée. Par ailleurs, les procédures dont était chargé son associé pour le compte de la banque étaient terminées à ce jour et leurs dossiers respectifs étaient physiquement séparés puisqu'ils étaient entreposés dans des locaux distincts sis sur des étages différents.

A teneur de l'article 12 lettre LLCA, l'avocat évite tout conflit entre les intérêts de son client et ceux des personnes avec lesquelles il est en relation sur le plan professionnel ou privé.

a. L'interdiction de plaider en cas de conflit d'intérêts est une règle cardinale de la profession d'avocat qui découle de l'obligation d'indépendance rappelée à l'article 12 lettre b LLCA (V. AMBERG, Das Bundesgesetz über die Freizügigkeit der Anwältinnen und Anwälte, Revue de l'Avocat, 3/2002 p. 11), de l'obligation de fidélité et du devoir de diligence de l'avocat (F. WERRO, Les conflits d'intérêts de l'avocat, in : Droit suisse des avocats, Berne, 1998 p. 231 ss, 232). L'avocat a ainsi notamment le devoir d'éviter la double représentation (F. WERRO, op.cit., p. 243-246), c'est-à-dire le cas où il serait amené à défendre les intérêts de deux parties à la fois, car l'opposition entre les intérêts des deux clients interdit en pareil cas à l'avocat de respecter pleinement son obligation de fidélité et son devoir de diligence (J. MATILE, L'indépendance de l'avocat, in : L'avocat moderne, Mélanges publiés par l'ordre des avocats vaudois à l'occasion de son centenaire, Bâle, 1998 p. 207 ss, 210). Cette règle est absolue en matière de représentation en justice ; le consentement éventuel des parties n'y change rien (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.223/2002 du 18 mars 2003, consid. 5.2 ; F. WERRO, op.cit., p. 244).

b. Il n'est pas déterminant, pour qu'un conflit d'intérêts au sens de l'article 12 lettre c LLCA surgisse, que deux parties opposées soient constituées, au sens du droit de procédure. Il suffit que dans une affaire quelconque, deux personnes (au moins) liées au même avocat aient maille à partir et se trouvent objectivement à poursuivre des intérêts opposés (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.223/2002 précité, consid. 5.3). L'avocat doit éviter un simple risque de conflit d'intérêts (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.310/2006 du 21 novembre 2006 consid. 6.2 ; cf. également A. LE FORT, Les conflits d'intérêts, in Défis de l'avocat au XXIe siècle, Mélanges en l'honneur de Madame le Bâtonnier Dominique Burger, Genève 2008, p. 184 et 203 ).

c. Il y a conflit d'intérêts dès qu'existe la possibilité d'utiliser, consciemment ou non, dans un nouveau mandat, les connaissances acquises antérieurement sous couvert du secret professionnel, dans l'exercice d'un premier mandat. Toute situation potentiellement susceptible d'entraîner un tel conflit d'intérêts doit être évitée. Le Tribunal fédéral (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.297/2005 du 19 avril 2006), comme les règles déontologiques, précise que l'incapacité de représentation affectant un avocat rejaillit sur ses associés (A. LE FORT, op.cit. p. 191).

d. L'obligation d'éviter les conflits impose à l'avocat un devoir particulier de discrétion. De ce devoir, il résulte l'interdiction d'utiliser les informations obtenues dans l'accomplissement d'un mandat. Cette interdiction subsiste après la fin du mandat ; c'est même là qu'elle prend toute son importance : elle doit empêcher l'avocat d'utiliser des informations acquises dans un mandat antérieur […] Au demeurant, savoir quand il y a incompatibilité entre deux mandats dépend de leur proximité et du temps qui s'est écoulé depuis le premier (F. WERRO, op.cit. p. 246-247 ; cf. également dans le même sens Arrêt du Tribunal fédéral 2A.310/2006 précité consid. 6.2 ainsi que A. LE FORT, op.cit. p. 204). La CBA a considéré qu'une situation de conflits d'intérêts n'était pas avérée lorsqu'un avocat s'était constitué dans une procédure judiciaire pour un client plaidant contre une société dont l'actionnaire unique avait été représenté plus de dix ans auparavant par l'ancien associé de l'avocat dénoncé (C. REISER, M. VALTICOS, op.cit. p. 247).

Au vu de la jurisprudence et de la doctrine citée, le simple risque de conflit d'intérêts suffit. En particulier, le fait que la banque et le client du recourant ne soient pas véritablement opposés dans le cadre de la procédure pénale concernée n'est pas déterminant tant au regard de la jurisprudence du Tribunal fédéral précitée qu'au vu des circonstances. D'une part, une telle position risque de changer au gré de l'évolution de ladite procédure et d'autre part, le recourant a bien admis qu'il existait un conflit d'intérêts à tout le moins abstrait entre la banque et son client puisqu'il a cessé d'occuper dans deux autres procédures pénales impliquant les mêmes acteurs. C'est d'ailleurs l'élément déterminant : on ne peut raisonnablement admettre qu'il existe un conflit d'intérêts dans deux procédures pénales et qu'il soit absent de la troisième alors que les parties impliquées sont les mêmes.

Pour le surplus, le fait que la banque se soit engagée à rémunérer le client du recourant en cas d'acquittement indique que la banque et l'intervenant poursuivent des buts opposés. En effet, la banque a un intérêt économique à obtenir une condamnation de M. P______ à tout le moins pour diminuer ses frais.

Certes, les procédures diligentées à l'encontre de M. B______ et dans lesquelles l'associé du recourant assurait la défense de la banque sont terminées. Cependant, leur épilogue est extrêmement récent puisque dans son courrier d'avril 2008, le juge d'instruction du canton de Vaud a indiqué qu'il venait de clôturer les deux derniers dossiers. De plus, les procédures initiées à l'encontre de M. B______ et celle qui implique M. P______ ne sont pas dépourvues de toute connexité. En effet M. B______ était débiteur de la banque du temps où l'intervenant était organe de celle-ci et dans le cadre de la procédure litigieuse il est précisément reproché au client du recourant d’avoir constitué des provisions insuffisantes.

Le fait que les dossiers soient séparés n'apparaît pas comme déterminant en l'espèce. Vu le type d'association étroite, dite intégrée et le nombre restreint d'associés, il est permis de penser que ceux-ci communiquent et que le risque de transgresser l'obligation de confidentialité, même involontairement existe.

Au vu de ce qui précède, il existe in casu un risque de conflit d'intérêts qui justifie l'interdiction de représenter le client prononcée par la CBA.

10. Enfin, le recourant fait valoir que la résiliation de son mandat ferait subir un préjudice tel à son mandant, tant dans l'efficacité de sa défense que pour les frais qu'il lui ferait encourir, que l'injonction serait disproportionnée.

Le recourant perd de vue qu'il n'y a pas de place ici pour une pesée des intérêts : la règle de l'interdiction de plaider en cas de conflit d'intérêts est absolue en matière de représentation en justice (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.223/2002 du 18 mars 2003, consid. 5.2.). Elle vise à protéger l'obligation de fidélité due à l'ancien client (A. LE FORT, op.cit. p.205).

De plus, le recourant a admis que lorsqu'il a entrepris des pourparlers avec l'étude de Me Y______, en vue d'une association, il a envisagé la possibilité d'un conflit d'intérêts. Compte tenu du fait qu'il s'est associé volontairement avec l'étude XYZ______, cette situation lui est imputable.

Dès lors qu'il a accepté de résilier les deux autres mandats sur demande de la banque en 2005, il est incompréhensible qu'il n'ait pas résilié le dernier. Si la situation qu'il a créée en s'associant avec l'étude XYZ______ devait porter préjudice à son mandant, cela affecterait les relations contractuelles de droit privé qui les lient. Les règles du droit disciplinaire ne s'appliquent pas à cette problématique (A. LE FORT, op.cit. p. 201). Au demeurant, l'instruction du dossier a démontré qu'un conseil différent assistait M. P______ dans le cadre des autres procédures pénales en cours.

Ce grief doit donc également être écarté.

11. Entièrement mal fondé le recours est rejeté. Un émolument de CHF 3'000.- sera mis à la charge des recourants qui succombent (art. 87 LPA), pris conjointement et solidairement.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

préalablement :

joint les causes nos A/2440/2007 et A/2441/2007 sous le n° A/2440/2007 ;

à la forme :

déclare irrecevable le recours interjeté le 21 juin 2007 par Monsieur P______ contre la décision de la CBA du 9 mai 2007 ;

déclare recevable le recours interjeté le 21 juin 2007 par Monsieur W______ contre la décision de la commission du barreau du 9 mai 2007 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 3'000.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

 communique le présent arrêt à Monsieur P______, Monsieur W______ ainsi qu'à la commission du barreau.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, juges, M. Bonard, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :