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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1119/2005

ATA/199/2006 du 04.04.2006 ( TPE ) , REJETE

Descripteurs : ; LOGEMENT ; RÉNOVATION D'IMMEUBLE ; TRAVAUX SOUMIS À AUTORISATION ; LOYER ; AMENDE
Normes : LDTR.9; LDTR.3; LCI.137
Résumé : Travaux dans un appartement ayant entraîné un changement qualitatif de ce dernier et rendant nécessaire, en raison de leur importance, une autorisation au sens de la LDTR. Amende de CHF 1'000.- confirmée.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1119/2005-TPE ATA/199/2006

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 4 avril 2006

dans la cause

 

Monsieur S__________
représenté par Me Guillaume Ruff, avocat

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE DE CONSTRUCTIONS

et

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION


 


1. Monsieur S__________, né en 1941, a travaillé pour le compte de la Société de Banque Suisse, puis de l’Union de Banques Suisses S.A. en qualité de gérant de fortune. Après avoir quitté cet établissement, il s’est installé comme tiers gérant indépendant. Il a alors décidé de retirer une partie du capital de sa prévoyance professionnelle afin de placer celle-ci dans l’immobilier. Le 10 décembre 2003, M. S__________ s’est ainsi porté acquéreur de l’immeuble sis X_____ en ville de Genève (quartier Y_____), à l’occasion de la vente aux enchères de ce bien. Destiné à l’habitation, l’immeuble, d’une surface de 269 m2, compte une vingtaine d’appartements.

2. En automne 2004, à l’occasion d’un changement de locataire, M. S__________ a fait exécuter par un architecte des travaux dans un appartement de trois pièces de 61 m2, situé au premier étage de l’immeuble précité. Le loyer annuel de l’appartement a alors passé de CHF 5'526.- à CHF 18'600.-.

3. À la suite de la conclusion du contrat de bail avec le nouveau locataire de l’appartement susmentionné, le 16 décembre 2004, une procédure en contestation du loyer initial a été introduite. Les travaux exécutés dans l’appartement ont alors été dénoncés par l’ASLOCA, mandataire du locataire, au département de l’aménagement, de l’équipement et du logement (devenu depuis lors département des constructions et des technologies de l’information, ci-après : le département).

4. Selon un rapport établi le 25 janvier 2005 par un collaborateur du service juridique de la police des constructions, les travaux exécutés dans l’appartement sont les suivants :

pose d’un nouvel aménagement de cuisine avec remplacement des revêtements sur les parois ;

réfection de la peinture, des murs et des plafonds dans toutes les pièces ;

réfection des parquets dans le hall, la chambre et le séjour ;

rénovation totale de l’installation électrique avec pose d’un nouveau compteur ;

installation de nouveaux radiateurs dans le salon et dans la chambre ;

transformation et regroupement de la salle de bains et du wc avec pose de nouveaux revêtements sur les parois et le sol ;

installation d’appareils sanitaires neufs (baignoire, cuvette, lavabo) ;

installation d’un nouveau radiateur sèche-linge.

5. Par courrier du 1er février 2005, le département a invité l’agence immobilière B__________ S.A., alors gérante de l’immeuble propriété de M. S__________, à lui faire part de sa détermination sur la question de l’assujettissement des travaux accomplis à la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), d’une part, et à la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20), d’autre part. La régie a par ailleurs été invitée à produire tous documents utiles relatifs à la nature et au coût de l’ensemble des travaux réalisés dans le logement, ainsi qu’à préciser l’époque à laquelle remontaient les derniers travaux d’entretien qui y avaient été exécutés.

6. L’agence immobilière B__________ S.A. a transmis le courrier du département à M. S__________. Dans sa réponse du 3 mars 2005, ce dernier a, par l’intermédiaire de son conseil, contesté l’assujettissement des travaux litigieux à la LCI et à la LDTR. Le seul remplacement d’éléments vétustes par de nouveaux éléments de même nature ne constituait pas une transformation au sens de la LDTR et n’engendrait pas une amélioration du confort de l’appartement. L’absence éventuelle d’entretien régulier de l’appartement antérieurement à son acquisition par M. S__________ ne signifiait pas que l’ensemble des travaux accomplis en une seule fois devait conduire à une transformation et à un changement de catégorie de logement. Une autorisation n’était en conséquence nullement requise.

7. Le 11 mars 2005, le département a ordonné à M. S__________ de déposer dans un délai de trente jours une requête en autorisation de construire pour les travaux effectués dans l’appartement. M. S__________ n’avait pas répondu aux questions concernant le coût des travaux entrepris et la date à laquelle les derniers travaux d’entretien remontaient. Eu égard à leur nature et leur ampleur, ces travaux ne ressortissaient pas à l’entretien courant, mais devaient au contraire être considérés comme des travaux d’entretien différés dans le temps, assujettis à ce titre à une autorisation de construire.

La salle de bain et les wc avaient en effet été regroupés, les nouvelles installations sanitaires et le nouvel agencement de cuisine apportant une amélioration du confort existant. Passant de CHF 5'526.- à CHF 18'600.-, la hausse de loyer corrélative, qui représentait 235 %, avait manifestement entraîné un changement qualitatif de l’objet loué.

Le département a en outre infligé à M. S__________ une amende de CHF 1’000.- pour avoir procédé aux travaux susmentionnés sans autorisation.

8. M. S__________ a recouru le 14 avril 2005 auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : la commission) contre la décision lui ordonnant de requérir une autorisation. Par acte du même jour, il a recouru auprès du Tribunal administratif contre l’amende qui lui avait été infligée (procédure n° A/1119/2005).

En ce qui concerne l’obligation de requérir une autorisation de construire, il a contesté la soumission des travaux accomplis à la LDTR et repris les arguments qu’il avait fait valoir devant le département.

S’agissant de l’amende, M. S__________ a fait valoir que, n’étant pas un professionnel de l’immobilier, il s’était fondé sur l’avis de son architecte pour prendre sa décision. C’est ainsi, de bonne foi, qu’il avait cru que les travaux en question n’étaient pas soumis à autorisation. Il contestait pour le surplus avoir violé la loi, les travaux auxquels il avait procédé ne représentant que des travaux d’entretien, non soumis à autorisation.

9. Le 9 mai 2005, le Tribunal administratif a suspendu la procédure concernant l’amende dans l’attente de la décision de la commission relative à l’autorisation de construire.

10. Au cours de l’audience de comparution personnelle qui s’est déroulée le 17 juin 2005 devant la commission, M. S__________ a précisé que la locataire précédente était une dame âgée, qui avait quitté l’appartement pour rejoindre un home spécialisé. Les travaux avaient été effectués au mois d’octobre ou de novembre 2004.

Sur ordre de la commission, M. S__________ a, par la suite, produit les factures relatives aux travaux litigieux. Celles-ci totalisent CHF 31'919,10.-. Le 30 septembre 2005, il a produit une facture supplémentaire d’un montant de CHF 1'614.-. Le montant total des travaux s’élevait ainsi à CHF 33'533,10.-.

11. Par décision du 30 septembre 2005, notifiée le 6 octobre suivant, la commission a rejeté le recours.

À teneur des documents dont la commission avait ordonné la production – le recourant ne les ayant jamais produits devant le département –, l’impact du coût des travaux sur le loyer avait fait passer celui-ci de CHF 5'526.- à CHF 18'600.-, ce qui représentait un prix à la pièce de CHF 6'200.-. Ces éléments constituaient un changement qualitatif au regard de loi et de la jurisprudence. Il ne faisait dès lors aucun doute que les travaux étaient assujettis à la LDTR. L’injonction du département tendant à l’obtention d’une autorisation ne consacrait par conséquent aucune violation de la loi.

12. Par acte du 3 novembre 2005, M. S__________ a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision de la commission (procédure n° A/3881/2005).

Les travaux n’avaient consisté qu’en un rafraîchissement de l’appartement, quelques réparations des systèmes de chauffage et d’électricité, ainsi que le remplacement de certains équipements vétustes. La distribution de l’appartement n’avait pas subi de modification et l’équipement n’avait pas été amélioré. L’appartement n’avait pas changé de catégorie, l’augmentation du loyer ne résultant pas intégralement du coût des travaux, mais du fait que le loyer versé par la locataire précédente ne correspondait pas, à l’époque déjà, à la valeur locative du logement. De fait, si l’appartement avait été convenablement nettoyé et reloué sans travaux, le loyer mensuel aurait pu atteindre CHF 1’000-. à CHF 1'200.-. C’était ainsi la faveur consentie par les précédents propriétaires de l’appartement à la locataire, dont les moyens financiers étaient très modestes, qui constituait l’essentiel de la différence entre le loyer antérieur et le loyer actuel.

La LDTR ne comportait de surcroît aucun critère relatif à l’importance des travaux permettant de distinguer la rénovation d’un appartement de son entretien. La jurisprudence du Tribunal administratif démontrait que des dépenses qui excédaient le montant des travaux, objet de la présente procédure, s’étaient avérées insuffisantes à faire présumer l’existence d’une rénovation soumise aux exigences de la LDTR. En voulant empêcher les propriétaires d’entretenir leurs immeubles, le département se trompait de cible, violait la LDTR et cherchait à instaurer un contrôle des loyers d’une manière contraire à la loi.

13. Le département a conclu au rejet du recours le 9 décembre 2005.

Eu égard à leur nature, à leur ampleur, à leur coût, ainsi qu’à leur répercussion sur le loyer, les travaux litigieux s’analysaient sans conteste comme des travaux de rénovation et d’entretien différés, entraînant un changement d’affectation qualitatif du logement considéré. En passant de CHF 5'526.- à CHF 18'600.-, le loyer avait en effet pour conséquence de faire passer l’appartement dans une catégorie de logements ne correspondant plus aux besoins prépondérants de la population. Le département était par conséquent fondé à ordonner le rétablissement d’une situation conforme au droit et à ordonner le dépôt d’une requête en autorisation de construire.

14. Le 19 décembre 2005, le juge délégué a prononcé la reprise de la procédure et joint les causes A/1119/2005 et A/3881/2005 sous la cause A/1119/2005.

15. Le 16 janvier 2006, le département a exposé que l’amende de CHF 1'000.- infligée à M. S__________ pour violation de la LDTR était conforme à la loi, justifiée dans son principe et, au demeurant, peu élevée. Il a conclu au rejet du recours exercé le 14 avril 2005 par M. S__________.

16. Le 17 mars 2006, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.


EN DROIT

1. Interjetés tous deux en temps utile et selon les formes prévues par la loi devant la juridiction compétente, les recours sont recevables (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 – LOJ – E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 – LPA – E 5 10).

I. Exigence d’une autorisation pour les travaux effectués :

2. a. Ainsi que le précise son article premier, la LDTR a pour but de préserver l’habitat. Elle s’applique aux bâtiments qui, comme c’est le cas en l’espèce, comportent des locaux qui, par leur aménagement et leur distribution, sont affectés à l’habitation (art. 2 al. 1 litt. b LDTR).

Conformément à l’article 9 LDTR, une autorisation est nécessaire pour toute transformation ou rénovation au sens de l’article 3 LDTR. L’article 3 alinéas 1 lettre d et 2 LDTR qualifie de transformation les travaux qui ont pour objet la rénovation, c’est-à-dire la remise en état, même partielle, de tout ou partie d’une maison d’habitation, en améliorant le confort existant sans modifier la distribution des logements, à moins qu’il s’agisse de travaux d’entretien. Cette dernière catégorie de travaux, non assujettie à la LDTR, comprend l’entretien courant faisant partie des frais d’exploitation ordinaires d’une maison d’habitation. Seuls les travaux raisonnables d’entretien régulier ne sont pas considérés comme travaux de transformation pour autant qu’ils n’engendrent pas une amélioration du confort existant (ATA/567/2005 du 16 août 2005).

b. Il ressort des travaux législatifs qui ont précédé la modification de l’article 3 alinéa 2 LDTR, adopté en 1999, que le Grand Conseil désirait, pour tracer une limite précise entre travaux soumis et non soumis à la loi, que soient pris en compte le coût de ces derniers, de même que leur incidence sur les loyers, comme cela était d’ailleurs prévu, à l’époque déjà, par la jurisprudence (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève, 1999, p. 1076). La minorité du Grand Conseil avait proposé une teneur différente à l’article 3 alinéa 2 LDTR, en précisant que les travaux d’entretien qui ne devaient intervenir qu’à une échéance lointaine, telle la remise à neuf d’un appartement lors d’un changement de locataire, n’étaient pas assujettis à la LDTR (MGC 1999, p. 1166). Lors du deuxième débat concernant ce projet de modification de la LDTR, un nombre considérable d’amendements a été soumis au Grand Conseil par la minorité, notamment celui tendant à préciser, à l’article 3 alinéa 1 lettre d LDTR, que devaient être considérés comme travaux de rénovation ceux dont le coût total engendrait une augmentation de loyer supérieure à 20 % (MGC 1999, p. 1211). Cet amendement a été refusé, tout comme celui qui visait à préciser que la remise à neuf d’un appartement lors d’un changement de locataire échappait à l’empire de la loi (MGC 1999, p. 1415).

c. Cela étant, les notions de transformation et d’entretien n’ont pas reçu de nouvelles définitions, de sorte que la jurisprudence rendue à leur égard sous l’empire de l’ancienne LDTR conserve sa pertinence (ATA A/522/2004 du 8 juin 2004 et les références citées).

3. a. De jurisprudence constante (ATA/567/2005 du 16 août 2005 ; ATA/659/2004 du 24 août 2004 et les autres références citées), il est admis, s’agissant de la distinction entre travaux d’entretien, d’une part, et de rénovation ou de transformation, d’autre part, consacrée à l’article 3 LDTR, de tenir un raisonnement en deux temps, à savoir :

- D’abord en examinant si, en raison de leur nature, les travaux en cause relèvent de l’entretien ou, au contraire, consistent en des travaux de rénovation. Dans le prolongement de cette distinction, la jurisprudence a admis que des travaux d’entretien sont susceptibles d’aboutir à une rénovation ou à une transformation soumises à la LDTR lorsque, faute d’avoir été exécutés périodiquement ou par rotation tout au long de l’existence de l’immeuble, ou encore parce qu’ils n’ont pas été exécutés du tout pendant de nombreuses années, leur accumulation, même en tenant compte d’une exécution rationnelle commandant un regroupement, leur confèrent une incidence propre à engendrer un changement de standing de l’immeuble (A. MAUNOIR, La nouvelle LDTR au regard de la jurisprudence, in RDAF 1996, p. 314 et la jurisprudence citée) ;

- Ensuite, en s’attachant à l’ampleur et, partant, au coût desdits travaux, ainsi qu’à leur répercussion sur le montant du loyer, dès lors qu’il pourrait en résulter un changement d’affectation qualitatif sur les logements, ces derniers ne répondant plus aux besoins prépondérants de la population (ATA/365/2001 du 29 mai 2001 ; ATA/261/2001 du 24 avril 2001 et les références citées). Le coût total des travaux peut dans cette mesure constituer un critère décisif pour apprécier l’importance des travaux au regard de la finalité impartie à la LDTR (A. MAUNOIR, op. cit., p. 315), en tant qu’il peut atteindre une ampleur telle qu’il est susceptible d’aboutir à un changement qualitatif de l’immeuble. De même, l’augmentation du loyer consécutive aux travaux peut avoir pour effet d’entraîner un changement d’affectation qualitatif d’un logement (ATA/802/2001 du 4 décembre 2001).

b. Dans la mesure où la loi vise principalement à maintenir un habitat correspondant, notamment sous l’angle économique, aux besoins prépondérants de la population, il faut ainsi éviter que des travaux non soumis à la loi ne conduisent à la longue à une érosion dudit habitat. En d’autres termes, la loi cherche à soumettre au contrôle de l’Etat certaines catégories de travaux davantage en fonction des risques que ceux-ci font peser sur le caractère abordable des loyers qu’en fonction du type de travaux eux-mêmes (O. BINDSCHEDLER, F. PAYCHÈRE, La jurisprudence récente du Tribunal administratif du Canton de Genève en matière d’entretien des immeubles, in RDAF 1998, p. 368). Qu’il s’agisse de soumettre au régime des transformations certains travaux d’entretien ou, malgré l’absence de régularité, de ne pas assimiler ces travaux à des transformations, le critère décisif est donc leur coût et ses conséquences sur le caractère abordable des loyers (O. BINDSCHEDLER, F. PAYCHERE, op. cit., p. 369).

4. a. A l’appui de son recours, M. S__________ se réfère en particulier à l’arrêt A/522/2004 rendu le 8 juin 2004 par le Tribunal administratif. Dans cette affaire, qui portait sur un logement de quatre pièces dont le loyer avait, suite à des travaux, passé de CHF 13'560.- à CHF 24'000.-, le Tribunal administratif a considéré que certains des travaux litigieux, pour consister en un entretien régulier du logement en cause, s’étaient limités à maintenir l’état de ce dernier, sans améliorer le confort du logement, ni entraîner de changement d’affectation qualitatif. Ils n’étaient, partant, pas soumis à la LDTR.

b. Comme la commission et l’autorité intimée l’ont démontré, le cas d’espèce est différent de ce précédent. D’une part, les travaux exécutés dans l’appartement, propriété du recourant, ont induit une hausse considérable du loyer, nettement supérieure à celle qui caractérisait l’état de fait à l’origine de l’arrêt précité, dans la mesure où le loyer a passé de CHF 5'526.- à CHF 18'600.-, soit une hausse de 235 %. D’autre part, la nature de ces travaux, faute de s’inscrire dans le cadre d’un entretien régulier du logement en cause – contrairement au précédent susmentionné –, a sans conteste entraîné un changement d’affectation qualitatif de ce dernier.

c. A cet égard, le fait que, comme le relève d’ailleurs le recourant lui-même, les travaux auxquels il a procédé visaient à pallier, en une seule opération, l’absence d’entretien du logement durant plusieurs années démontre à l’évidence que l’on ne se trouve nullement dans une situation d’entretien régulier au sens des critères dégagés par la jurisprudence. Le cas d’espèce entre ainsi pleinement dans la catégorie des précédents pour lesquels la jurisprudence a retenu qu’en raison de l’importance des travaux en cause, un changement d’affectation qualitatif du logement litigieux rendait nécessaire l’obtention d’une autorisation au sens de la LDTR, sauf à dénaturer le but poursuivi par cette loi (ATA872/2004 du 9 novembre 2004 et les autres références citées).

d. Le recours dirigé contre la décision de la commission du 30 septembre 2005 doit par conséquent être rejeté.

II. Amende administrative :

5. Conformément à l’article 137 alinéa 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), lu en relation avec l’article 44 alinéa 1 LDTR, est passible d’une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.- tout contrevenant à la LCI et à la LDTR. Le montant maximum de l’amende s’élève à CHF 20'000.- lorsqu’une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation, mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales (art. 137 al. 2 LCI). Il est tenu compte dans la fixation de l’amende du degré de gravité de l’infraction (art. 137 al. 3 LCI).

6. a. Les amendes administratives sont de nature pénale. Aucun critère ne permet en effet de les distinguer clairement des amendes ordinaires pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister (ATA/86/2006 du 14 février 2006 ; ATA/362/2005 du 24 mai 2005 ; P. MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2ème édition, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, pp. 139-141 ; P. NOLL/S. TRECHSEL, Schweizerisches Strafrecht : allgemeine Voraussetzungen der Strafbarkeit, AT I, 6ème édition, Zurich 2004, p. 37). C’est dire que la quotité de la peine administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal. En vertu de l’article 1 alinéa 2 de la loi pénale genevoise du 20 septembre 1941 (LPG – E 4 05), il y a lieu de faire application des dispositions générales contenues dans le Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), sous réserve des exceptions prévues par le législateur cantonal à l’article 24 LPG.

b. Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence. Selon des principes qui n’ont pas été remis en cause, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi (A. GRISEL, Traité de droit administratif, vol. 2, Neuchâtel, 1984, pp. 646-648; ATA G. du 20 septembre 1994). Elle bénéficie en particulier d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende et la juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès. Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (ATA/86/2006 du 14 février 2006 ; ATA/567/2005 du 16 août 2005). Il est ainsi tenu compte, dans la fixation du montant de l’amende, du degré de gravité de l’infraction et de la situation du recourant, par application analogique de l’article 63 CP.

7. a. En l’espèce, en effectuant les travaux litigieux sans autorisation, le recourant a contrevenu aux dispositions de la LCI et de la LDTR. Le principe d’une amende administrative à son encontre est en conséquence acquis.

b. Le recourant conteste l’amende au motif que, n’étant pas un professionnel de l’immobilier, il s’est fié à l’avis exprimé par son architecte. L’argument ne saurait être retenu, dès lors que, conformément à la jurisprudence constante, la responsabilité du mandant ne saurait être dissociée de celle de son mandataire. Une partie est ainsi responsable des actes de celle qui la représente et répond de toute faute de ses auxiliaires (ATA/408/2005 du 7 juin 2005 et les références citées).

c. En exécutant les travaux litigieux sans se préoccuper de la nécessité de requérir une autorisation, prenant le risque de contrevenir à la loi, tout en mettant l’autorité devant le fait accompli, en ne répondant de surcroît que partiellement aux demandes clairement exprimées par le département dans son courrier du 1er février 2005, le recourant a ainsi commis une faute manifeste. En fixant à CHF 1'000.- le montant de l’amende, le département a fait une application des plus mesurées du principe de la proportionnalité. La décision sera également confirmée sur ce point.

8. En tous points mal fondés, les recours seront rejetés. Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 LPA). Aucune indemnité ne sera allouée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevables les recours interjetés les 14 avril 2005 et 3 novembre 2005 par Monsieur S__________ contre la décision du département des constructions et des technologies de l’information du 11 mars 2005 et celle de la commission de recours en matière de constructions du 30 septembre 2005 ;

au fond :

les rejette ;

met un émolument de CHF 1’500.- à la charge du recourant ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ;

communique le présent arrêt à Me Guillaume Ruff, avocat du recourant, au département des constructions et des technologies de l’information ainsi qu’à la commission cantonale de recours en matière de constructions

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges, M. Hottelier, juge suppléant.


Au nom du Tribunal administratif :

 

la greffière-juriste  adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :