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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4080/2007

ATA/190/2008 du 22.04.2008 ( FIN ) , REJETE

Recours TF déposé le 02.06.2008, rendu le 01.10.2008, IRRECEVABLE, 2C_414/2008
Descripteurs : IMPÔT; SÛRETÉS; COMPÉTENCE; MOTIVATION DE LA DÉCISION; PRESCRIPTION; PÉREMPTION; SÉQUESTRE(LP); PROPORTIONNALITÉ; SÛRETÉS EN MATIÈRE D'IMPÔTS
Normes : LCP.371A.al1.letb ; LP.274 ; LIFD.169 ; LIFD.170 ; aLCP.368
Résumé : Examen des conditions permettant à l'administration d'exiger le paiement de sûretés par un contribuable. Pouvoir d'examen limité du Tribunal administratif. En l'espèce, la demande est suffisamment motivée et l'existence de créances fiscales a été rendue vraisemblable. Ces dernières ne sont par ailleurs pas prescrites et il n'y a pas non plus péremption du droit de les taxer. Enfin, les comportements du recourant (défaut de collaboration, dissimulation d'une part considérable du revenu, etc.) sont autant d'indices qui permettent d'admettre qu'un cas de séquestre est réalisé. Le montant de la garantie exigée est par ailleurs proportionné.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4080/2007-FIN ATA/190/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 22 avril 2008

 

dans la cause

 

Monsieur C______
représenté par Me Antoine Berthoud, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE


 


EN FAIT

1. Monsieur C______ (ci-après : le contribuable), ressortissant français, a été domicilié à Genève du 14 avril 1982 au 14 décembre 2000, date à laquelle il a déménagé dans canton de Vaud, où il avait acquis un bien immobilier pour lui et sa famille. Il a donc été assujetti à l’impôt cantonal et communal genevois (ci-après : ICC) jusqu’en décembre 2000.

2. Le contribuable est administrateur de la société T______ S.A., dont le but est le courtage, la gestion de biens et les opérations financières, à l’exclusion d’opérations immobilières en Suisse. Cette société n’a toutefois plus d’activité depuis de nombreuses années.

3. Le 25 octobre 2001, l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC ou l’administration) a notifié à M. C______ et à son épouse, Madame C______ (ci-après : les contribuables) un bordereau ICC 2000 s’élevant à CHF 123’116,20, basé sur un revenu imposable de CHF 438’113.- et une fortune de CHF 246’001.-.

4. Fin 2004, de nombreux articles publiés dans la presse genevoise ont fait état de l’ouverture à Genève d’une procédure pénale pour blanchiment d’argent à l’encontre du contribuable.

M. C______ a également fait l’objet de poursuites pénales en France pour des infractions commises entre 1996 et 2001, consistant d’une part en recels, abus de biens sociaux et complicité de corruption d’agents publics étrangers et, d’autre part, en fraude fiscale. Ces poursuites ont abouti à son incarcération.

5. Le 2 novembre 2005, l’AFC a informé les contribuables de l’ouverture d’une procédure en rappel et soustraction d’impôt au sens des articles 151 et 175 et suivants de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) ainsi que des articles 59, 69 et suivants de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17), portant sur les périodes fiscales IFD 1995-1996 à 1999-2000 et ICC 2000 et 2001-A.

Elle avait constaté que « des éléments de revenu et fortune pourraient ne pas avoir été déclarés ». Une entrevue avec les contribuables a été fixée au 14 novembre 2005 dans les locaux de l’administration.

6. Par lettre signature du 13 décembre 2005, l’administration a informé les contribuables qu’elle mettait un terme à la procédure ouverte à leur encontre concernant l’ICC 2000. Elle leur a notifié un bordereau « rappel d’impôt » ICC 2000 d’un montant de CHF 1’796’219,95. Ce faisant, l’autorité a procédé à une reprise relative à des revenus non déclarés, lesquels se montaient à CHF 4’912’907.-. L’administration s’est réservé le droit d’infliger une amende aux contribuables une fois la procédure de redressement fiscal terminée.

7. Le 13 janvier 2006, M. C______ a réclamé du bordereau précité par l’intermédiaire de son conseil.

Les montants que l’AFC avait considéré comme « non déclarés » ne constituaient pas des revenus imposables ; il se réservait le droit de compléter sa réclamation une fois les pièces justificatives réunies.

A cette fin, l’administration a accordé de nombreuses prolongations de délai au contribuable. Près de six mois se sont ainsi écoulés avant que M. C______ ne lui transmette un certain nombre de documents.

8. Par courrier du 13 novembre 2006, le contribuable a été invité à se présenter dans les locaux de l’administration le 5 décembre 2006, muni de divers documents relatifs à certains montants considérés comme « non déclarés ».

9. Le 20 décembre 2006, l’administration a informé les contribuables qu’elle mettait un terme à la procédure de contrôle ouverte à leur encontre pour la période fiscale ICC 2001-A. Elle leur a notifié un bordereau « rappel d’impôt » d’un montant de CHF 1’524’250,10. La reprise, concernant des revenus extraordinaires réalisés durant l’année fiscale 2000, s’élevait à CHF 4’219’292.-.

10. Le 3 janvier 2007, le contribuable a élevé une nouvelle réclamation auprès de l’administration, contestant avoir réalisé les revenus extraordinaires allégués. Au surplus, l’administration n’avait fourni aucun détail à ce sujet. Partant, elle était invitée à préciser le contenu de la décision du 20 décembre 2006.

11. Le 9 janvier 2007, l’administration a expliqué au contribuable que le montant des fonds crédités sur ses comptes bancaires avait été calculé sur la base des éléments fournis dans sa lettre du 30 juin 2006 et lors de l’entretien du 5 décembre suivant. Quant aux revenus extraordinaires acquis en 2000, ils avaient été définis en comparaison avec la moyenne de ceux qu’il avait réalisés en 1997, 1998 et 1999. L’administration considérait la différence obtenue comme extraordinaire au vu des revenus « particulièrement élevés » perçus en 2000 par rapport aux années antérieures.

12. Par acte du 21 août 2007, le contribuable a conclu un contrat portant sur la vente de la villa familiale située à Yens. Ledit contrat stipulait notamment que l’intéressé et sa famille étaient autorisés à occuper les lieux jusqu’au 31 décembre 2007.

Le 1er septembre 2007, M. C______ a signé, avec une consultante en immobilier, un contrat portant sur un programme offrant une assistance complète aux fins de trouver un logement approprié pour sa famille dans les cantons de Genève et de Vaud.

13. Par courrier du 12 septembre 2007, l’administration a informé le contribuable qu’elle mettait un terme aux procédures ouvertes à son encontre concernant les périodes fiscales 1995-1996 à 1999-2000. Elle lui a notifié trois bordereaux « rappel d’impôt » aux montants totaux de respectivement CHF 1’601’452,40 (IFD 1995-1996), CHF 320’166,50 (IFD 1997-1998) et CHF 132’624,60 (IFD 1999-2000). Elle lui a également infligé une amende de CHF 1’508’793.-.

A ce courrier était en outre joint un tableau récapitulatif contenant le total des fonds crédités en faveur de l’intéressé entre 1993 et 2004.

14. Le 28 septembre 2007, l’administration a notifié à M. C______ une demande de sûretés portant sur la somme de CHF 1’812’447,25 sans intérêts, en vue de garantir le paiement de l’impôt cantonal et communal pour les années fiscales 2000 et 2001-A.

Les droits du fisc étaient menacés pour plusieurs raisons : d’une part, parce que le contribuable était de nationalité française, qu’il avait été écroué en France et qu’il était sous contrôle judiciaire dans ce pays, et, d’autre part, parce qu’il n’avait aucune attache en Suisse, exceptée sa propriété à Yens, laquelle était sur le point d’être vendue.

15. Le 29 octobre 2007, le contribuable a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée concluant à son annulation, sous suite de dépens.

Il vivait en Suisse depuis plus de vingt-cinq ans et la vente de sa propriété de Yens ne constituait pas une menace pour les droits du fisc car il recherchait un nouveau logement dans les cantons de Genève et Vaud. La Suisse restait au centre de sa vie et de ses affaires. Il n’avait certes pas collaboré à l’établissement des faits dans les procédures de contrôle ouvertes à son encontre par l’administration. Cela était dû à son incarcération en France et à la mesure de contrôle judiciaire dont il faisait l’objet. Les documents nécessaires aux procédures en question se trouvaient à son domicile en Suisse.

Enfin, le contribuable a contesté le montant des sûretés, qui était disproportionné, infondé et n’avait en outre pas été motivé à satisfaction par l’administration.

16. L’administration a répondu le 9 janvier 2008. Elle conclut au rejet du recours, reprochant au contribuable son manque de collaboration. Il n’avait notamment pas produit les documents pertinents qui auraient permis à l’AFC d’entamer la procédure de vérification des exercices ICC 2000 et ICC 2001-A sans désemparer. De plus, les renseignements qu’il avait accepté de fournir manquaient de clarté. Enfin, il ne l’avait jamais informée des procédures judiciaires ouvertes à son encontre en France. A cet égard, l’AFC a encore indiqué qu’outre les démêlées de l’intéressé avec la justice française, il avait aussi maille à partir avec les autorités pénales de Genève.

S’agissant de la demande de sûretés, elle était pertinente. Au demeurant, le contribuable n’avait pas démontré en quoi les montants articulés seraient disproportionnés ou injustifiés : ils correspondaient d’une part à la somme du bordereau de l’ICC 2001-A (CHF 1’524’250,10) et, d’autre part, à l’estimation du montant de l’ICC 2000, soit CHF 288’197,15, lequel avait été revu à la baisse suite aux explications données par M. C______ en juin et en décembre 2006.

Pour l’AFC, la vente du seul bien immobilier que le contribuable possédait en Suisse, soit sa propriété de Yens, constituait un moyen de toucher des liquidités dont le transfert à l’étranger était facilement réalisable. Pour cette raison déjà, les droits du fisc étaient menacés.

Enfin, une ordonnance de séquestre avait été transmise le 28 septembre 2007 à l’office des poursuites compétent aux fins de séquestrer les parcelles propriétés de l’intéressé.

17. M. C______ a répliqué le 3 mars 2008. Les prétentions de l’administration étaient échues, s’agissant des prétendus revenus extraordinaires réalisés en 2000. Le bordereau « rappel d’impôt » du 20 décembre 2006 avait été notifié alors que la péremption du droit de taxer prévue à l’article 368 de la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre 1887 (selon son ancienne teneur, en vigueur jusqu’au 31 décembre 2000 - aLCP - D 3 05), était déjà acquise.

Le bordereau « rappel d’impôt » ICC 2001-A, du 20 décembre 2006, était remis en cause. La pratique de l’administration, consistant à comparer le revenu réalisé en 2000 avec la moyenne des revenus des années précédentes, était douteuse. Elle n’avait été reconnue que sous le régime du nouveau droit cantonal en la matière, lequel était entré en vigueur le 1er janvier 2001.

Enfin, s’agissant du bordereau « rappel d’impôt » ICC 2000 du 13 décembre 2005, il était étonnant de constater que l’administration, après avoir revu le montant de la reprise à la baisse, l’avait maintenu à CHF 130’206,85. Le chiffre d’affaires brut réalisé en 1999 avait en effet déclaré, à CHF 670.- près. Cette différence tenait dans le taux de change utilisé pour convertir les montants encaissés en dollars américains.

18. Le 3 avril 2008, l’AFC a dupliqué. L’envoi d’un courrier, le 2 novembre 2005, informant le contribuable de l’ouverture des procédures de contrôle concernant l’ICC 2001-A avait interrompu le délai de péremption du droit de taxer.

M. C______ avait donné des explications contradictoires au sujet du chiffre d’affaires déclaré en 1999. En tout état, les montants en question ne pouvaient être déduits à deux reprises.

EN DROIT

1. Le présent litige porte sur la validité de la décision du 28 septembre 2007, relative à une demande de sûretés requise à l’encontre de M. C______, pour un montant de CHF 1’812’447,25.

2. Le Tribunal administratif examine d’office sa compétence (art. 11 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Ni l’administration ni la commission cantonale de recours en matière d’impôt (ci-après : la commission) n’ont la compétence pour statuer sur une contestation relative à une demande de sûretés, car il ne s'agit pas d'une décision d'assujettissement ou de taxation (art. 371A de la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre l887 - LCP - D 3 05 ; art. 7 al. 1, 39 al. 1 et 49 al. 1 de la loi sur la procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17), décision contre laquelle la législation genevoise ne prévoit ni procédure de réclamation ni voie de recours particulière.

Au vu de ce qui précède, et dans la mesure où le tribunal de céans est l’autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 56A al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05), il convient de lui reconnaître la compétence pour statuer sur les contestations relatives aux demandes de sûretés.

3. Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 56A LOJ ; art. 63 al. 1 LPA).

La décision litigieuse n'indiquant pas de délai de recours, l’acte enregistré au tribunal le 29 octobre 2007 doit être considéré comme ayant été interjeté en temps utile sans qu'il ne soit nécessaire de déterminer s’il s'agit d'une décision finale, dont le délai de recours est de trente jours, ou d'une « autre décision » dont le Tribunal administratif doit être saisi dans les dix jours (art. 63 al. 1 let. a et b LPA). En effet, une décision ne donnant aucune indication quant aux délais de recours n'est pas régulièrement notifiée, ce qui ne peut nuire aux parties (art. 46 al. 1 et 47 LPA).

4. Le fond du litige concerne l’ICC 2000 et 2001-A.

Bien que de nouvelles lois fiscales soient entrées en vigueur le 1er janvier 2001, l’ancien droit reste applicable au cas d’espèce, les éléments déterminants étant antérieurs à cette modification (ATA/378/2005 du 24 mai 2005 et les références citées).

5. A teneur de l’article 371A alinéa 1 lettre b LCP, si le contribuable n’a pas de domicile en Suisse ou que les droits du fisc paraissent menacés, l’AFC peut, notamment, exiger des sûretés en tout temps et même avant que le montant de l’impôt ne soit fixé par une décision entrée en force. La demande de sûretés indique le montant à garantir ; elle est immédiatement exécutoire. Dans la procédure de poursuite, elle produit les mêmes effets qu’un jugement exécutoire. La demande de sûretés est assimilée à l’ordonnance de séquestre, au sens de l’article 274 de la loi fédérale sur la poursuite pour dette et la faillite du 11 avril 1889 (LP - RS 281.1). Le séquestre est opéré par l’office compétent. L’alinéa 2 de l’article précité prévoit que l’opposition à l’ordonnance de séquestre, prévue à l’article 278 LP est irrecevable.

L’article précité de la loi genevoise reprend textuellement les termes des articles 169 et 170 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) qui règlent le cas des créances fiscales portant sur l’impôt fédéral direct. Il s’ensuit que, mutatis mutandis, les développements doctrinaux et jurisprudentiels concernant ces dernières dispositions sont applicables en l’espèce.

6. Le recourant reproche à l’autorité intimée d’avoir insuffisamment motivé la décision litigieuse.

A cet égard, ni l’article 169 alinéa 1, ni l’article 116 LIFD n’imposent expressément aux autorités fiscales de motiver les demandes de sûretés en garantie du paiement de l’impôt fédéral direct. La première de ces dispositions se limite à exiger que la demande de sûreté indique le montant à garantir, alors que la seconde prévoit que les décisions et les prononcés doivent être notifiés au contribuable par écrit et indiquer les voies de droit. Sauf exceptions expresses, une telle obligation découle du droit d’être entendu garanti par l’article 29 alinéa 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (RS 101 - Cst.). Pour satisfaire à cette exigence, il suffit que l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que le justiciable puisse exercer ses droits de recours en connaissance de cause (RJJ 2004 p. 182, consid. 2.1, et les références citées). La motivation ne doit pas être nécessairement contenue dans la décision attaquée ; elle peut aussi être indiquée dans une communication écrite séparée. Si de telles exigences ne devaient pas être respectées, l’éventuel vice de forme entachant la décision querellée peut néanmoins être réparé devant l’instance de recours (P. AGNER, A. DIGERONIMO, H.-J. NEUHAUS, G. STEINMANN, Commentaire de la loi sur l’impôt fédéral direct, Complément, Zurich 2001, ad. art. 169, p. 357).

En l’espèce, la motivation de la demande de sûretés du 28 septembre 2007 est certes sommaire, mais elle contient, de façon résumée, la description des causes menaçant les droits du fisc. Enfin, il y a lieu d’observer que l’AFC a dûment précisé les éléments qui, selon elle, établissent la mise en péril de ses droits et justifient le montant des sûretés prévu dans sa réponse du 9 janvier 2008. Ainsi, l’éventuel défaut de motivation a été réparé, de sorte que ce grief devra être écarté.

7. Pour qu’une demande de sûretés soit valable, il est nécessaire que l’un des cas de séquestre mentionné à l’article 169 alinéa 1 LIFD (ainsi qu’à l’alinéa 1 de l’article 371A LCP) soit réalisé, que l’existence de la créance fiscale apparaisse comme vraisemblable et que le montant de la garantie exigée ne se révèle pas manifestement exagéré. La détermination de l’obligation fiscale et la fixation de l’impôt effectivement dû demeurent cependant réservées à la procédure ordinaire concernant l’affaire fiscale elle-même. Statuant sur la contestation d’une demande de sûretés, le Tribunal fédéral ne peut examiner ces questions que préjudiciellement et en limitant son contrôle à un examen prima facie de la situation (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.446/2006 du 9 mars 2007, consid. 4 et les références citées ; P. AGNER, A. DIGERONIMO, H.-J. NEUHAUS, G. STEINMANN, op. cit., ad. art. 169, p. 356). Appelé à examiner la validité de ladite demande, le Tribunal administratif suivra le raisonnement du Tribunal fédéral en la matière.

8. Le recourant conteste les créances fiscales correspondant aux bordereaux « rappel d’impôt» des 13 décembre 2005 et 20 décembre 2006. Les procédures de réclamation y relatives sont encore en cours. Malgré la diminution du montant de la reprise pour l’ICC 2000, le recourant affirme avoir déclaré l’entier des revenus réalisés en 1999, pour lesquels il avait été, de surcroît, taxé. S’agissant du bordereau «rappel d’impôt» ICC 2001-A, il a expliqué, d’une part, que les prétentions de l’administration étaient échues et, d’autre part, que la méthode choisie par celle-ci aux fins de calculer le montant du rappel «ne résistait pas à l’examen».

9. a. S’agissant des demandes de sûretés, le tribunal de céans ne revoit la situation que sous l’angle de la simple vraisemblance, dans le cadre d’un examen prima facie.

b. Il appartient à l’autorité de taxation d’établir les faits qui fondent la créance d’impôt ou qui l’augmentent, alors que le contribuable doit alléguer et prouver les faits qui la suppriment ou la réduisent. Dans le cadre d’une procédure de rappel d’impôt et d’amende, l’AFC doit prouver que l’imposition est incomplète. La jurisprudence n’exige toutefois pas de l’autorité compétente une certitude absolue, mais seulement la conviction que les éléments sur lesquels les rappels et les amendes sont fondés ont été soustraits avec une vraisemblance confinant à la certitude. II se justifie en revanche de laisser à la charge du contribuable la preuve du contraire de ce que prétend le fisc lorsque l’état de fait admis par celui-ci sur la base d’indices précis est très vraisemblable (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.373/2007 du 1er avril 2004, consid. 3.2.2 et les références citées). « L’omission ou l’échec de ces preuves contraires peut être considéré comme un indice suffisant de la véracité des allégations de la partie adverse si celles-ci sont vraisemblables » (J.-M. RIVIER, Droit fiscal suisse, L’imposition du revenu et de la fortune, p. 142; W. RYSER/B. ROLLI, Précis de droit fiscal suisse, p. 462).

10. En l’espèce, suite à la procédure pénale ouverte à Genève à l’encontre du contribuable, l’administration a eu accès à différents comptes bancaires appartenant au recourant, lesquels laissaient apparaître de nombreux mouvements inexpliqués.

L’AFC a notifié à M. C______ un bordereau « rappel d’impôt » pour la période fiscale ICC 2000 d’un montant de CHF 1’547’020,70, lequel a été réévalué suite aux explications du recourant et au vu des pièces justificatives qu’il a apportées. L’autorité intimée a cependant maintenu les montants des revenus demeurés inexpliqués, tous les documents pertinents n’ayant pas été produits.

Concernant les revenus extraordinaires fondant le bordereau « rappel d’impôt » ICC 2001-A de CHF 1’524’250,10, l’AFC a effectué une comparaison entre la moyenne des revenus encaissés de 1997 à 1999 et les revenus perçus par M. C______ en 2000. En l’absence de justificatifs quant à la grande différence constatée, qualifiée d’extraordinaire par l’administration, cette dernière l’a considérée comme un revenu imposable réalisé par le recourant.

Il eût appartenu au recourant de renverser la vraisemblance découlant des considérations précitées en justifiant la provenance desdits revenus. Ne l’ayant fait que peu ou prou, il ne saurait se plaindre des poursuites fiscales dont il fait l’objet.

Sous réserve que la péremption du droit de taxer les « revenus extraordinaires » réalisés par le recourant en 2000 soit acquise, l’existence des créances fiscales est vraisemblable.

11. a. L’article 368 aLCP indique que lorsqu’un contribuable n’a pas payé l’impôt pour une année déterminée (...), soit qu’il n’ait pas fait de déclaration ou qu’elle ait été incomplète, soit qu’il n’ait pas été taxé d’office, l’impôt non payé peut lui être réclamé dans un délai de cinq ans, non compris l’année courante.

b. La limitation dans le temps du droit de taxer est un délai de péremption dont le dies a quo est fixé au 1er janvier de l’année suivant l’objet de la taxation. La procédure de taxation est dès lors valablement introduite par le premier acte de l’AFC déployant ses effets sur le plan externe et portant sur la taxation du contribuable (RDAF 1989, p. 352). Si ce dernier acte intervient avant l’échéance du délai de cinq ans imparti par la loi, le droit de procéder à la taxation n’est plus limité, l’aLCP n’instituant pas de prescription absolue du droit de taxer (ATA/547/2001 du 28 août 2001).

c. En matière d’IFD, le Tribunal fédéral a jugé que tous les actes officiels tendant à la fixation de la prétention fiscale et qui sont portés à la connaissance du contribuable constituent des actes interruptifs de la prescription. Tel est le cas des communications officielles qui annoncent simplement une taxation à venir et dont le but premier est d'interrompre la prescription (ATF 126 II 1, c 2c). Ces communications font en effet connaître au contribuable la volonté de l’autorité de poursuivre son travail en vue de concrétiser la créance fiscale.

De même, le Tribunal fédéral a jugé que des courriers adressés aux contribuables afin d'obtenir des renseignements sur leurs gains (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.1/2007 du 24 mai 2007, c 4.4), l'envoi d'une formule de déclaration, la sommation pour la remise de la déclaration ainsi que la notification d'un bordereau provisoire; de même que toute communication officielle faisant connaître au contribuable la volonté des autorités de poursuivre leur travail en vue de la concrétisation de la créance fiscale, même s’ils ne continuent pas concrètement la procédure de taxation, interrompaient la prescription (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.227/2002 du 19 juin 2003).

En l’espèce, le dies a quo du délai de péremption du droit de taxer est fixé au 1er janvier 2001 et échoit le 31 décembre 2005.

Avant cette date, soit le 2 novembre 2005, l’administration a adressé aux contribuables un courrier les informant de l’ouverture de la procédure de contrôle. Un tel document constitue, au sens des jurisprudences précitées, un "acte tendant à faire constater la créance" (RDAF 1989, p. 352).

Partant, le droit de taxer ne s’est pas périmé.

e. Les créances fiscales se prescrivent par cinq ans dès l’entrée en force de la taxation (art. 369 aLCP). Ce délai peut être interrompu par toute mesure de l’autorité tendant au recouvrement de ladite créance fiscale (ATA/440/2005 du 21 juin 2005 ; ATA/547/2001 précité).

f. Au vu des considérants qui précèdent, les méthodes utilisées par l’autorité intimée pour estimer les reprises pour l’impôt cantonal et communal des périodes en cause sont suffisamment convaincantes dans le cadre d’un examen limité à la vraisemblance. Même si les chiffres avancés par l’AFC n’ont fait l’objet d’aucune décision définitive, l’examen des faits rappelés ci-dessus suffit à rendre vraisemblable l’existence de la dette fiscale et ses montants, dans la mesure où un contrôle prima facie du dossier corrobore ces conclusions.

12. Les créances en cause étant vraisemblables, il est nécessaire de déterminer si un cas de séquestre est réalisé.

13. Le recourant est domicilié en Suisse, de sorte que le premier cas de séquestre mentionné à l’article 371A alinéa 1 lettre b LCP n’entre pas en ligne de compte. Il faut dès lors examiner si les droits du fisc à l’encontre du contribuable sont menacés.

Pour que la créance d’impôt paraisse menacée, il n’est pas nécessaire que le recouvrement de l’impôt semble compromis par des actes du débiteur ayant pour effet de le soustraire à une éventuelle exécution forcée (Archives de droit fiscal suisse 67 722 consid. 3d ; Archives 66 479 consid. 2). Il suffit que le recouvrement de la créance fiscale paraisse objectivement « menacé » au regard de l’ensemble des circonstances (RDAT 1998 20t II 343 consid. 4c ; Archives 67 722 consid. 3d ; Archives 66 479 consid. 2). Tel est notamment le cas lorsque le contribuable dissimule systématiquement les éléments de son revenu et de sa fortune à l’autorité de taxation (RDAT 1998 II 20t 343 consid. 4c ; Archives 66 479 consid. 2), ou lorsqu’il transforme des biens immobiliers en liquidités, facilement réalisables et transférables (Arrêt du Tribunal fédéral précité, consid. 5.2.1 et les références citées ; RF 51 1996 86 consid. 3d ; Archives 65 386 consid. 3 ; Archives 49 485 consid. 3b). Enfin, il faut également tenir compte de l’attitude du contribuable pendant la procédure, notamment de la manière dont il a répondu aux demandes de renseignements sur sa situation financière (Archives 65 386 consid. 3).

En l’espèce, le recourant n’a que très partiellement répondu aux demandes de renseignements qui lui ont été adressées par l’AFC. De plus, il a dissimulé à l’autorité de taxation une part considérable de son revenu réalisé en 2000. Il fait actuellement l’objet d’une procédure pénale à Genève pour blanchiment d’argent. Ces circonstances démontrent, comme le soutient à juste titre l’AFC, que les affaires du contribuable ne revêtent pas la clarté souhaitable et ne sont pas conformes aux exigences du droit commercial.

Enfin, le recourant a vendu le seul immeuble qu’il possédait en Suisse. La transformation d’éléments de fortune mobiliers et immobiliers en liquidités, particulièrement mobiles, représente en soi un acte permettant de déplacer avec une grande facilité des éléments de son patrimoine, de sorte que l’autorité intimée peut craindre que le recouvrement des montants dus ne soit compromis. Le fait que le contribuable recherche un autre logement en Suisse n’est pas pertinent à cet égard.

Ces indices traduisent un comportement propre à établir une mise en danger objective des droits du fisc.

14. Le recourant soutient que le montant de la garantie exigée est manifestement exagéré.

L’AFC a réexaminé, en faveur du contribuable, le bordereau « rappel d’impôt » ICC 2000, dont le montant était estimé à CHF 288’197,15. La décision du 20 décembre 2006 avait fixé le rappel ICC 2001-A à CHF 1’524’250,10.

Le montant total de la créance se monte ainsi à CHF 1’812’447,25. Les sûretés demandées équivalent à ce dernier chiffre, de sorte que les garanties requises ne sont nullement disproportionnées.

15. Il résulte de ce qui précède que la demande de sûretés doit être confirmée. Partant, le recours, entièrement mal fondé, doit être rejeté.

Vu l’issue du litige un émolument de procédure de CHF 3’000.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe. (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 octobre 2007 par Monsieur C______ contre la décision de l’administration fiscale cantonale du 28 septembre 2007 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 3’000.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession de le recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Antoine Berthoud, avocat du recourant ainsi qu’à l’administration fiscale cantonale.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, MM. Paychère et Thélin, Mme Junod, juges, M. Grodecki, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :