Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3135/2019

ATA/1697/2019 du 19.11.2019 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3135/2019-FORMA ATA/1697/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 novembre 2019

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

 

DéPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE

 



EN FAIT

1) a. En août 2016, Madame A______ a commencé une formation de culture générale à l'école de culture générale B______ (ci-après : ECG).

b. En juin 2017, Mme A______ n'a pas été promue.

2) a. En août 2017, Mme A______ s'est réorientée et a intégré une 1ère année d'apprentissage d'employée de commerce, profil E, à l'ECG C______.

b. Au terme du premier semestre, en janvier 2018, elle était non promue et a été transférée en profil B ; elle cumulait cent cinquante et une heures d'absences non excusées et quinze arrivées tardives.

c. À l'issue du deuxième semestre, en juin 2018, elle était non promue avec une moyenne école de 2.4, six disciplines insuffisantes, une somme des écarts négatifs à la moyenne de 11.0 et un total du domaine d'enseignement spécifique de 9.5. Elle cumulait septante et une heures d'absences non excusées, douze arrivées tardives et dix-huit renvois.

3) a. La direction de l'ECG lui a accordé une promotion par dérogation au troisième semestre.

b. En janvier 2019, Mme A______ a conclu le troisième semestre en étant non promue, avec une moyenne école de 3.3, quatre disciplines insuffisantes, une somme des écarts négatifs à la moyenne de 6.0, un total du domaine d'enseignement spécifique de 12.0. et une pratique professionnelle non satisfaisante. Elle cumulait cinquante-trois heures d'absences non excusées et vingt-sept arrivées tardives.

c. En juin 2019, elle était non promue avec une pratique professionnelle non satisfaisante.

4) La direction de l'ECCG n'a pas accordé à Mme A______ de promotion par dérogation ni de redoublement de la deuxième année.

5) Par courrier du 7 juin 2019, Mme A______ a demandé à la direction générale de l'enseignement secondaire II (ci-après : la direction générale) de lui accorder un redoublement de la deuxième année.

6) Par décision du 25 juillet 2019, la direction générale a rejeté cette demande.

7) Par courrier du 30 juillet 2019, Mme A______ a demandé à la direction générale de reconsidérer sa décision. Elle a joint un certificat médical de la Dresse D______, du même jour, attestant du fait qu'elle avait dû interrompre son année scolaire en mars 2017, pour raison de santé ayant nécessité une hospitalisation de longue durée, ce qui avait causé une rupture dans les acquis scolaires, qui avait lourdement entravé le déroulement de ses études. Mme A______ se montrait motivée à poursuivre ces dernières malgré les difficultés de santé qu'elle avait rencontrées.

8) Par décision du 15 août 2019, la direction générale a rejeté la demande de reconsidération de l'intéressée, au motif que, si les problèmes de santé étaient incontestablement la cause de son échec au terme de la première année à l'ECG en 2017, ceux-ci ne permettaient pas d'expliquer l'écart aux normes constaté lors de son parcours en apprentissage d'employé de commerce en 2019.

9) Par courrier mis à la poste le 29 août 2019, Mme A______ a saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d'un recours contre la décision précitée. Elle se référait à ses précédentes lettres, expliquant qu'un professeur lui avait dit qu'elle avait la possibilité « de doubler si [elle] voulai[t] ». Elle désirait redoubler sa deuxième année, espérant aussi pouvoir changer d'école mais sa première demande était « de redoubler avant tout ». Elle affirmait être motivée et demandait une chance de refaire cette année.

10) Par courrier du 13 septembre 2019, le service de protection de l'adulte a informé la chambre administrative que, par ordonnance du 7 mars 2018, le Tribunal de protection de l'adulte de l'enfant avait institué une mesure de curatelle de représentation en faveur de Mme A______.

11) Le 19 septembre 2019, la direction générale a conclu au rejet du recours.

Mme A______, qui avait été transférée de la première année de l'ECG à la première année d'apprentissage d'employée de commerce, était donc considérée comme redoublante et ne pouvait en principe pas bénéficier d'un redoublement de la deuxième année. Le redoublement n'était pas un droit - la priorité devant être mise sur l'orientation de l'élève - et n'avait de sens que pour autant que l'élève présentait des chances de terminer sa formation avec succès, compte tenu de l'ensemble des circonstances. En l'espèce, Mme A______ présentait des difficultés depuis son entrée dans l'enseignement secondaire II.

L'échec de sa première année d'ECG était expliqué par des problèmes de santé qui n'étaient pas contestés. Toutefois, depuis le début de son apprentissage, elle n'avait jamais rempli les conditions de promotion, cumulait de nombreuses heures d'absences non excusées et arrivées tardives, ce qui était inadmissible et démontrait un manque d'intérêt marqué pour sa formation. La recourante ne faisait valoir aucun élément permettant de justifier la faiblesse des résultats obtenus au cours des deux dernières années à apprentissage.

12) Mme A______ n'a pas exercé son droit à la réplique.

13) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Le recours porte contre la décision du 15 août 2019, par laquelle la direction générale a rejeté une demande de reconsidération faite par la recourante et maintenu la décision de refus de promotion par dérogation.

Une demande de reconsidération facultative peut être déposée en tout temps devant l'autorité administrative qui n'est alors pas obligée d'entrer en matière. Si elle entre en matière, elle rend une nouvelle décision susceptible d'un recours sur le fond (ATA/375/2005 du 24 mai 2005 ; Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 610 ad. art. 48 LPA).

En l'espèce, l'autorité est entrée en matière sur la demande de reconsidération puisqu'elle a rendu une deuxième décision rejetant les arguments de la recourante et a confirmé son refus d'octroyer un redoublement.

2) En outre, le recours interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3) Le litige porte sur la question de savoir si la recourante devrait, ou non, pouvoir redoubler sa deuxième année.

4) a. L'art. 29 al. 1 du règlement de l'enseignement secondaire II et tertiaire B du 29 juin 2016 (REST - C 1 10.31) indique que les conditions de promotion sont déterminées par les règlements de chaque filière.

b. L'art. 39 al. 2 du règlement du centre de formation professionnelle commerce (RCFPCom - C 1 10.58) qui traite des conditions de promotion en formation professionnelle initiale d'employé de commerce profil B, voie plein temps, prévoit qu'est promu au terme de la 2ème année l'élève qui satisfait cumulativement aux conditions suivantes : pour la partie scolaire : une moyenne, arrondie à la première décimale, égale ou supérieure à 4,0 (let. a) ; une somme des écarts négatifs pondérés par rapport à la note 4,0 égale ou inférieure à 2,0 points (let. b) ; au maximum 2 branches inférieures à 4,0 dans les disciplines spécifiques à la voie plein temps (let. c) ; un total de 16,0 au minimum pour les 4 branches d'enseignement scolaire suivantes : français, anglais, économie et société (E&S) et information, communication et administration (ICA) (let. d). Pour la partie pratique professionnelle une moyenne de pratique professionnelle égale ou supérieure à 4,0 (let. e).

c. L'art. 40 al. 3 et 4 RCFPCom, qui traite de la non-promotion à l'issue d'un semestre de formation professionnelle initiale d'employé de commerce, prévoit que : l'élève en profil E qui échoue une seconde fois au terme du 2ème ou 3ème semestre scolaire peut être transféré en profil B. L'élève peut être autorisé à redoubler ; il ne peut toutefois répéter qu'une année scolaire complète (al. 3) ; l'élève en profil B qui échoue une seconde fois au terme du 2ème ou 3ème semestre scolaire ne peut redoubler qu'une année scolaire complète ou voir son contrat d'apprentissage résilié (al. 4).

d. En vertu de l'art. 31 REST, l'octroi d'un redoublement n'est pas un droit (al. 1). La direction d'un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut autoriser un élève non promu à redoubler l'année (al. 2). Dans les voies de formation générale, cette mesure ne peut être accordée qu'une seule fois par filière (al. 3). Un élève ayant bénéficié d'un redoublement ne peut prétendre ni à un triplement de l'année ni à un redoublement de l'année immédiatement supérieure (al. 4).

Cette disposition utilisant une formule potestative concernant la possibilité d'octroyer ou de refuser le redoublement, une liberté d'appréciation est reconnue à l'autorité, que celle-ci doit exercer en effectuant une pesée des intérêts afin de respecter le principe de la proportionnalité. La décision doit tenir compte des circonstances pertinentes et ne pas être arbitraire (ATF 129 III 400 consid. 3.1 ; 128 II 97 consid. 4a, par analogie). Dans ce cadre, l'autorité scolaire bénéfice d'un très large pouvoir d'appréciation (ATA/870/2018 du 28 août 2018 et les références citées), dont la chambre de céans ne censure que l'abus ou l'excès. Ainsi, alors même que l'autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d'inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité (ATA/870/2018 précité ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER /Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 3ème éd., 2012, p. 743 ss et les références citées).

e. Enfin, l'art. 33 al. 5 REST, traitant du « Transfert », prévoit que l'élève transféré dans la même année d'études est considéré comme redoublant dans sa nouvelle filière de formation.

5) La recourante, considérée réglementairement comme redoublante de première année, ne peut pas prétendre à un redoublement de la deuxième année. Elle n'a été promue ni à l'ECG en juin 2017 ni à l'ECG en apprentissage en août 2017, en janvier et en juin 2018 ; malgré cela, la direction de l'école lui a octroyé une promotion par dérogation au troisième semestre, auquel elle a encore échoué en janvier et juin 2019. Si la chambre administrative n'entend pas minimiser les problèmes de santé de la recourante qui permettaient d'expliquer son échec aux termes de la première année de l'ECG, il convient de retenir que, depuis lors, rien n'explique l'écart aux normes constaté lors de son parcours en apprentissage. D'une part, à teneur du bulletin de juin 2018, ses notes étaient faibles, avec une moyenne école de 2.4 et six disciplines insuffisantes et, à teneur de celui de janvier 2019, avec une moyenne de 3.3 et quatre disciplines insuffisantes. D'autre part, excepté ses notes insuffisantes, la recourante a cumulé de très nombreuses heures d'absence non excusée, des arrivées tardives et des renvois, qui permettent de douter fortement de son intérêt pour la formation et de sa motivation.

C'est ainsi à bon droit que la direction générale a retenu que la recourante n'avait jamais rempli les conditions de promotion et qu'elle ne faisait valoir aucun élément permettant de justifier la faiblesse des résultats obtenus au cours des deux années passées en apprentissage employé de commerce.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Tant la décision de la direction de l'ECG que celle de la direction générale du département seront confirmées.

6) Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 1 et 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 août 2019 par Madame A______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse 15 août 2019 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______ ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Verniory, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :