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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2453/2004

ATA/375/2005 du 24.05.2005 ( TPE ) , ADMIS

Recours TF déposé le 14.07.2005, rendu le 21.12.2005, IRRECEVABLE, 1P.434/2005
Descripteurs : ACTION EN CONSTATATION; RESTAURANT; CONSTRUCTION ET INSTALLATION; AUTORISATION DE CONSTRUIRE; PERMIS DE CONSTRUIRE; PERMIS D'HABITER; RECONSIDERATION; REVISION
Normes : LCI.1; LPA.48; LPA.80
Parties : MCDONALD'S SUISSE DEVELOPMENT SARL / DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT, COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS
Résumé : Délivrance d'un permis d'occuper délivré à un restaurant (fast food) dans le cadre d'une procédure d'autorisation de construire, contenant un " nota bene " attirant l'attention de la requérante sur le fait que ce permis ne portait " que sur les éléments autorisés (...), à l'exclusion d'un service au volant ". Décision qualifiée de constatatoire. Examen des conditions de l'action en constatation et des voies de droit.
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2453/2004-TPE ATA/375/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 24 mai 2005

dans la cause

 

MCDONALD'S SUISSE DEVELOPMENT SÀRL
représentée par Me Guy-Philippe Rubeli, avocat

contre

 

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE DE CONSTRUCTIONS

 

et

 

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DE L'ÉQUIPEMENT ET DU LOGEMENT


 


1. Le 24 novembre 1999, Mc Donald’s Suisse Development Sàrl (ci-après : McDonald’s) a acquis aux enchères publiques, dans le cadre de la liquidation concordataire de la société coopérative La Cave de Genève, les parcelles 5244 et 5770, sises au 152, route de Thonon, feuille 32 de la commune de Collonge-Bellerive, à Genève.

Ces parcelles sont situées en zone de développement industriel et artisanal.

Leur surface totale est de 5'292 m2.

Elles comportent un accès sur la route de Thonon et un accès sur la route de la Capite.

2. Fin 1999, McDonald’s est entrée en contact avec le chef du département de l’aménagement, de l’équipement et du logement (ci-après : DAEL) pour étudier la question de l’implantation d’un restaurant sur ce site.

3. Le 25 février 2000, dans le cadre des échanges de correspondance qui ont eu lieu à cette occasion, le conseiller d’Etat en charge du DAEL a adressé un courrier à McDonald’s.

Il ressortait du dossier en sa possession que McDonald’s entendait implanter sur ce site un restaurant avec service au volant (ci-après : McDrive). Or, il ne faisait pas de doute que cette implantation n’était pas conforme au plan directeur et à son règlement et qu’une dérogation au sens de l’article 26 LALAT n’était pas envisageable.

4. Le 30 mai 2000, McDonald’s a déposé une demande d’autorisation de construire un « centre artisanal avec restaurant, garage souterrain, aménagements extérieurs et parking » (DD 96'679).

Le projet comportait trois bâtiments : deux étaient destinés à des activités artisanales et le dernier à l’exploitation du restaurant.

5. Ni les plans ni le descriptif de la demande ne font mention d’un McDrive sur le site.

6. Le 23 juin 2000, le DAEL a ordonné une enquête publique, au motif que la requête impliquait l’octroi d’une dérogation au sens de l’article 26 LALAT.

7. Le résultat de cette enquête a été favorable.

8. Après avoir émis quelques réserves et demandé que les plans soient modifiés de sorte que les aménagements extérieurs prévoient sur tous les accès des trottoirs continus et abaissés, l’office des transports et de la circulation du département de l’intérieur, de l’agriculture et de l’environnement (ci-après : OTC), a donné un préavis favorable au projet.

9. Les autres autorités consultées ont également délivré des préavis favorables, parfois sous conditions.

10. Par arrêté du 31 janvier 2001, le Conseil d’Etat a autorisé l’application au projet des normes de construction applicables à la zone industrielle « vu la demande DD 96'679 »  visant notamment « la construction d’un bâtiment comportant un centre artisanal avec restaurant, garage souterrain, aménagements extérieurs et parking  (…) » et vu « les conditions du plan 28’495B-515 et du règlement directeur adopté par le Conseil d’Etat le 19 mai 1993 ».

11. Le 13 février 2001, le DAEL a délivré l’autorisation demandée.

L’autorisation était accordée « conformément aux plans acceptés (…) ».

Les bâtiments à réaliser devaient être exclusivement destinés aux activités industrielles et artisanales, à l’exception du restaurant situé au rez-de chaussée du bâtiment nord  (point 7 de l’autorisation).

Enfin, « la réalisation de deux bâtiments au minimum » (sur les trois visés par l’autorisation) devait être entreprise « simultanément à la construction du restaurant » (point 8).

12. Les 17 décembre 2001 et 15 mars 2002, McDonald’s a déposé deux demandes d’autorisation de construire complémentaires, portant sur la modification des constructions projetées et la création de nouveaux ouvrages (adjonction d’un second niveau de parking, amélioration des dessertes pour les véhicules, modification de la hauteur d’étage des bâtiments, etc ; DD 96’679/2).

13. Sur les plans annexés à la demande du 17 décembre 2001 figurent deux fenêtres sur la façade nord-est du bâtiment, dont le descriptif de la demande ne fait pas mention. Ces plans ne font état d’aucune affectation spéciale à laquelle ces ouvertures seraient destinées.

14. L’autorisation relative à ces travaux a été délivrée par le DAEL le 17 juillet 2002.

15. Par courrier du 18 octobre 2002, Monsieur Dessimoz, architecte mandaté par McDonald’s pour la réalisation du projet a confirmé au DAEL qu’il n’y avait pas de plan de construction d’un McDrive et que « s’il y avait une volonté de son client de le faire, il présenterait au département une demande d’autorisation en bonne et due forme » à cette fin.

16. Début février 2004, suite à des plaintes formées par des voisins et des habitants de la commune qui avaient noté la pose d’enseignes annonçant un  McDrive  sur le site, un inspecteur de la police des constructions a constaté que les deux fenêtres autorisées sur la façade nord-est du bâtiment avaient été réalisées sous la forme de « guichet-fenêtres » et semblaient destinées à la vente de consommations au volant.

17. Par courrier du 13 février 2004 adressé à M. Dessimoz, le DAEL a ordonné l’arrêt du chantier.

La requête en autorisation de construire ne comportait aucune mention d’un service au volant. Le DAEL n’avait pas délivré d’autorisation concernant cet usage.

Dans sa lettre du 18 octobre 2002, M. Dessimoz avait confirmé au chef du DAEL qu’il n’y avait pas de projet de construction d’un McDrive dans le futur restaurant McDonald’s. La façon dont les ouvertures avaient été réalisées laissaient penser qu’une telle utilisation était projetée. Il était intimé un ordre d’arrêt du chantier dans l’attente des explications demandées.

18. Une copie de ce courrier a été envoyée à McDonald’s, qui s’est déterminé le 27 février 2004.

Les deux fenêtres litigieuses avaient été construites en conformité avec l’autorisation délivrée. Cela étant, « il n’y avait jamais eu d’intention d’exploiter un restaurant avec service au volant sans les autorisations requises ».

19. Suite à ce courrier, le 4 mars 2004, le DAEL a levé l’ordre d’arrêt du chantier.

Il prenait note du fait que McDonald’s n’envisageait pas d’exploiter un service au volant sans requérir les autorisations nécessaires.

20. Le 29 mars 2004, le DAEL a délivré un permis d’occuper provisoire.

Dans un « nota bene » figurant au bas de la décision, l’attention de la requérante était expressément attirée sur le fait que le permis d’occuper provisoire ne portait que sur les éléments autorisés dans les autorisations de construire DD 96'679 et DD 96'679/2, à l’exclusion d’un service au volant, « conformément à l’échange de correspondance entre le département et le requérant du 27 février et du 4 mars 2004 ».

21. Le 1er avril 2004, M. Dessimoz a adressé un courrier au DAEL.

Il était extrêmement embarrassé par le comportement de son client qui ne s’inscrivait pas dans la logique des démarches entreprises et des autorisations délivrées par le DAEL. S’il était vrai que le restaurant avait été conçu dans la perspective de pouvoir fonctionner un jour avec un service au volant, il n’avait jamais été question que les autorisations litigieuses couvrent cette utilisation. Il était clair que cet usage futur éventuel devait faire l’objet d’une requête d’autorisation complémentaire.

22. Par courrier du 7 avril 2004, McDonald’s a demandé au DAEL de « reconsidérer les réserves » contenues dans le permis d’occuper provisoire et de délivrer un permis d’occuper définitif ne contenant ni réserves ni conditions.

La construction était conforme aux plans annexés à l’autorisation.

L’usage qui était fait des voies de circulation autorisées relevait du mode d’exploitation du restaurant. Les autorisations concernant ce mode d’exploitation ne ressortaient pas de la compétence du DAEL.

Le DAEL, comme le Conseil d’Etat, avaient autorisé l’édification d’un restaurant en zone artisanale, en dérogation aux normes applicables à la zone. Ces décisions ne contenaient pas de réserves quant à la manière dont le restaurant devait délivrer ses consommations.

23. Le 16 avril 2004, le DAEL a répondu au courrier de McDonald’s du 7 avril 2004.

La parcelle litigieuse se situait en zone de développement industriel et artisanal en vertu de la loi adoptée par le Grand Conseil le 7 mai 1992. Le périmètre en question était régi par le plan directeur de La Pallanterie n° 28’495-515, adopté par le Conseil d’Etat le 19 mai 1993.

Ce plan était assorti d’un règlement qui prévoyait, en son article 3, que les terrains devaient être affectés prioritairement à des activités artisanales et industrielles et que l’implantation de certaines activités commerciales et de service pouvaient être autorisées « en fonction des besoins des utilisateurs de la zone ». Pour obtenir son autorisation de construire, McDonald’s s’était d’ailleurs expressément fondée sur cette disposition. Or, les utilisateurs de la zone constituaient une clientèle qui, compte tenu de la proximité et des heures de présence dans le secteur considéré n’était manifestement pas celle d’un service au volant.

Du point de vue du voisinage, l’exploitation d’un McDrive pouvait apporter des nuisances. Or, la demande n’avait jamais été examinée sous cet aspect.

Contrairement à la demande litigieuse, les plans annexés à la demande d’autorisation d’implanter un McDonald’s au Bois-des-Frères à Vernier contenaient très explicitement l’indication d’un service au volant. Sur les plans figuraient notamment les voies de circulation du « drive » (sous la mention « piste du drive ») et les guichet-fenêtres (sous la mention « McDrive »).

En l’espèce, rien de tel n’avait été demandé et explicité. Or, le projet d’exploiter un McDrive était soumis à autorisation de construire. En attendant que McDonald’s dépose une telle demande, il convenait de confirmer l’interdiction formelle faite à cette entreprise de délivrer des consommations au volant sur le site.

Ce courrier constituait une décision, susceptible d’un recours auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions dans les 30 jours suivant sa notification.

24. McDonald’s en a accusé réception le 20 avril 2004.

25. Elle a recouru contre ce courrier auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : la commission) le 18 mai 2004.

L’interdiction faite à McDonald’s d’exploiter un McDrive constituait une charge inadmissible pesant sur le permis d’habiter délivré le 29 mars 2004, qu’il convenait d’annuler.

Le courrier du 16 avril 2004 du DAEL constituait une décision qui violait les exigences de motivation imposées par la loi, car elle n’indiquait pas de manière suffisante les raisons fondant le refus d’un service au volant.

Le DAEL n’était pas compétent pour décider du mode d’exploitation utilisé. Le restaurant ayant été autorisé, McDonald’s n’était pas tenu de demander une autre autorisation.

Contrairement à ce que soutenait le DAEL, il n’y avait ni modification de la destination de l’ouvrage ni changement d’affectation. En effet, conformément à la jurisprudence du Tribunal administratif, les activités de même type ne constituaient pas une modification soumise à autorisation.

La dérogation accordée par le Conseil d’Etat concernait l’activité de restauration, quel que soit le mode d’exploitation utilisé.

L’existence d’un McDrive sur le site ressortait clairement de la demande d’autorisation. L’attitude du DAEL était donc incohérente et contradictoire, de sorte que le principe de la bonne foi devait s’appliquer.

L’exploitation d’un service au volant engendrerait un trafic supplémentaire de 300 à 450 mouvements de véhicules par jour. Ce nombre ne causerait ni inconvénients graves pour le voisinage ni de problème du point de vue de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41) ou de l’ordonnance sur la protection de l’air du 16 décembre 1985 (Opair – RS 814.318.142).

26. Par décision du 18 octobre 2004, la commission a déclaré le recours irrecevable.

La décision attaquée faisait suite à une demande de reconsidération de la décision du DAEL du 29 mars 2004 (permis d’occuper provisoire). Cette demande avait été rejetée et il n’y avait pas de recours ouvert pour contester ce refus.

Ainsi, contrairement à ce qu’il indiquait, le courrier du DAEL du 16 avril 2004 ne constituait pas une décision sujette à recours. La seule décision susceptible de recours était le permis d’occuper provisoire lui-même, mais le délai pour le contester était échu.

Enfin, même si un recours avait existé contre ledit courrier, celui-là aurait été fondé sur la LPA et non sur la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), de sorte que la commission n’aurait pas été compétente.

27. Cette décision a été reçue par la recourante le 3 novembre 2004.

28. Par acte du 2 décembre 2004, McDonald’s a recouru contre cette décision auprès du Tribunal de céans. Elle conclut à son annulation et, cela fait , à l’annulation « de la charge portant interdiction d’exploiter un restaurant avec service au volant figurant dans le permis d’occuper provisoire délivré le 29 mars 2004 ».

29. Le DAEL a répondu au recours le 7 janvier 2005. Il conclut à son rejet et à la confirmation de la décision du 16 avril 2004.

30. Les parties ont répliqué et dupliqué les 28 février et 24 mars 2005, ensuite de quoi elles ont été informées que la cause était gardée à juger.

31. Leurs arguments seront repris, en tant que de besoin, dans la partie en droit ci-après.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A et ss de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05; art. 149 al. 1 LCI ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les diverses demandes d’autorisation principale et complémentaires déposées par McDonald’s concernant le centre artisanal avec restaurant ont donné lieu à la délivrance de deux autorisations définitives les 13 février 2001 et 17 juillet 2002.

Ces autorisations n’ayant pas été contestées dans les délais impartis par la loi, elles ne peuvent plus faire l’objet d’un recours ordinaire et sont donc entrées en force.

3. Il en va de même du permis d’occuper provisoire du 29 mars 2004.

4. Le seul moyen de remettre en cause une décision entrée en force qui n’a fait l’objet d’aucun recours est la voie de la reconsidération (art. 48 LPA ; ATA/46/2005 du 1er février 2005).

a. Selon l'article 48 alinéa 1 LPA, une décision est sujette à reconsidération obligatoire lorsqu'il existe un motif de révision au sens de l'article 80 lettres a et b LPA (let. a) ou lorsque les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision (let. b).

b. Cette voie de droit extraordinaire se distingue de la demande de reconsidération facultative, qui peut être déposée en tout temps, mais dans le cadre de laquelle l’autorité dispose d’un libre pouvoir d’appréciation. En effet, suite à une telle demande, l’autorité n’est pas obligée d’entrer en matière et aucun recours n’est ouvert contre son refus de réexaminer l’affaire ou de réformer la décision attaquée dans le sens demandé (P. MOOR, Droit administratif, Berne 2002, Vol. 2, p. 343-344, n° 2.4.4.1 et p. 344-345, n° 2.4.4.2).

c. Les deux motifs de révision emportant le réexamen obligatoire d'une décision sont, d'une part, le fait qu'un crime ou un délit, établi par procédure pénale ou d'une autre manière, a influencé la décision (art. 48 al. 1 et 80 let. a LPA), et d'autre part, l'existence de faits ou de moyens de preuve nouveaux et importants que l'administré ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente (art. 48 al. 1 et 80 let. b LPA).

d. Par faits nouveaux, il convient d'entendre des faits qui se sont produits antérieurement à la procédure précédente, mais dont l'auteur de la demande de révision (ou de reconsidération) a été empêché, sans sa faute, de faire état dans la procédure précédente. Quant aux preuves nouvelles, celles-ci doivent, pour justifier une reconsidération, se rapporter à des faits antérieurs à la décision attaquée. Encore faut-il qu'elles n'aient pas pu être administrées lors du premier procès ou que les faits à prouver soient nouveaux, au sens où ils ont été définis (ATF 108 V 171 ss; 99 V 191; 98 II 255; 86 II 386).

e. Faits nouveaux et preuves nouvelles ont un point commun : ils ne peuvent entraîner la révision que s'ils sont importants, c'est-à-dire de nature à influer sur l'issue de la contestation, à savoir s'ils ont pour effet qu'à la lumière de l'état de fait modifié, l'appréciation juridique doit intervenir différemment que dans le cas de la précédente décision. Un motif de révision n'est ainsi pas réalisé du seul fait qu'un tribunal ou une autorité ait pu apprécier faussement des faits connus. Encore faut-il que cette appréciation erronée repose sur l'ignorance de faits essentiels pour la décision ou sur l'absence de preuves de tels faits. Quant à ces moyens de preuve nouveaux, ils doivent être de nature à modifier l'état de fait et, partant, le jugement ou la décision de manière significative (ATF 110 V 141 ; 108 V 171; 101 Ib 222; 99 V 191; 88 II 63 ; P. MOOR, op. cit., p. 342, n° 2.4.4.1.a.).

f. Enfin, la voie de la reconsidération au sens de l’article 48 LPA, comme celle de la révision, ne permet pas d’exiger que soit supprimée une erreur de droit, de pouvoir bénéficier d'une nouvelle interprétation, d'une nouvelle pratique, d'obtenir une nouvelle appréciation de faits connus lors de la décision dont la reconsidération est demandée ou de faire valoir des faits ou des moyens de preuve qui auraient pu ou dû être invoqués dans la procédure ordinaire (ATF 111 Ib 211; 98 Ia 572; P. MOOR, op. cit. p. 343, n° 2.4.4.1.b.). De nouvelles réflexions de nature juridique ne sont pas non plus des motifs de révision (P. MOOR, idem ; F. GYGI, Bundesverwaltungsrechtspflege, 1983, pp. 262, p. 262).

5. Selon la commission, la lettre du 7 avril 2004 dans laquelle la recourante demande au DAEL de « reconsidérer les réserves » contenues dans le permis d’occuper provisoire du 29 mars 2004 et « de délivrer un permis d’occuper définitif ne contenant ni réserves ni conditions » constitue une demande de reconsidération du permis d’occuper provisoire.

6. Cette manière de voir ne saurait être suivie.

En effet, la recourante n’a jamais établi, ni même invoqué, devant le DAEL, l’existence de circonstances nouvelles ou de motifs de révision destinés à remettre en cause les autorisations précitées.

Certes, elle a contesté l’indication figurant au bas du permis d’occuper provisoire - sous la forme d’un « nota bene » - attirant l’attention du requérant sur le fait que ce permis « ne portait que sur les éléments autorisés dans les autorisations de construire DD 96'679 et DD 96'679/2, à l’exclusion d’un service au volant, conformément à l’échange de correspondance entre le département et le requérant du 27 février et du 4 mars 2004 ». Juridiquement, et bien qu’elle se soit trompée elle-même d’objet dans son argumentation, la recourante n’a pas contesté le permis provisoire, qui d’ailleurs lui était accordé et qui ne contenait pas, dans son « nota bene », d’obligation nouvelle par rapport aux autorisations précédemment délivrées. La recourante a réagi ici à une indication qui avait pour seule fonction de clarifier la manière dont les autorisations initiales de 2001 et 2002 devaient être comprises et interprétées quant à la portée des droits et des obligations qu’elles contenaient. Dès lors qu’elle ne visait pas à créer, modifier ou annuler des droits ou des obligations (art. 4 al. 1 let. a LPA), mais à constater l’étendue des droits et des obligations conférés par les autorisations délivrées et par la loi, cette mention n’était pas formatrice mais constatatoire au sens de l’article 4 alinéa 1 lettre b LPA.

7. Pour les mêmes motifs, la lettre de la recourante du 7 avril 2004 ne pouvait être considérée comme un recours adressé à la mauvaise autorité, au sens de l’article 64 alinéa 2 LPA.

8. Les réactions de la recourante ont ainsi donné lieu à l’ouverture d’une procédure en constatation de droit ; la demande de constatation formelle formée par la recourante auprès du DAEL et dans laquelle la recourante fait valoir son droit d’être entendue, date du 7 avril 2004. Dans sa requête, celle-ci a demandé qu’il soit constaté que les autorisations accordées lui confèrent le droit d’exploiter un service au volant et qu’aucune autorisation complémentaire n’est nécessaire du point de vue du droit de la construction pour cette exploitation.

9. C’est à bon droit que le DAEL a statué sur cette demande de constatation le 16 avril 2004.

En effet, selon l'article 49 alinéa 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), l'autorité donne suite à une demande tendant à constater l'existence ou l'étendue de droits ou d'obligations fondées sur le droit public si le requérant rend vraisemblable qu’il a un intérêt juridique personnel et concret, digne de protection, à obtenir une telle constatation (art. 49 al. 2 LPA).

En l’espèce, la recourante est la destinataire directe des autorisations dont la portée est discutée. Il n’est pas contestable qu’elle a un intérêt direct et digne de protection à savoir si, du point de vue du droit de la construction, les autorisations litigieuses couvrent le droit d’exploiter un service au volant, puisqu’elle entend s’appuyer sur ces autorisations pour en commencer l’exploitation. Enfin, elle ne peut obtenir la constatation de ses droits et obligations par le biais d’une décision formatrice, les autorisations litigieuses étant toutes entrées en force (ATF 119 V 11 consid. 2, p. 13 et réf. cit.; ATA/768/1998 du 1er décembre 1998; Mémorial des séances du Grand Conseil 1984, pp. 1587-1588).

En conclusion, pour les raisons indiquées, la décision du DAEL du 16 avril 2004, reçue le 20 du même mois, doit être qualifiée de décision constatatoire au sens de l’article 4 alinéa 1 lettre b LPA. Cette décision, fondée sur la LCI, était sujette à recours auprès de la commission dans un délai de 30 jours dès sa notification, conformément à ce que le DAEL avait indiqué (art. 146 al. 1 LCI, art. 57 al. 1 let. a et 63 LPA).

Interjeté le 18 mai 2004, le recours de McDonald’s auprès de la commission respectait le délai imposé par la loi.

Il était donc recevable.

10. La décision attaquée devra donc être annulée et la cause renvoyée à la commission pour qu’elle statue sur la question de savoir si McDonald’s a, en l’état et sans préjuger des autres autorisations nécessaires, le droit d’exploiter un service au volant, du point de vue de la LCI et des autorisations délivrées par le DAEL.

11. Vu l’issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 LPA).

12. Une indemnité de CHF 1’000.- sera allouée à la recourante à la charge de l’Etat de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 décembre 2004 par McDonald’s Suisse Development Sàrl contre la décision de la commission cantonale de recours en matière de constructions du 18 octobre 2004 ;

au fond :

l’admet ;

renvoie le dossier à la commission cantonale de recours en matière de constructions pour nouvelle décision dans le sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue à McDonald’s une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à la charge de l’Etat de Genève ;

communique le présent arrêt à Me Guy-Philippe Rubeli, avocat de la recourante, ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière de constructions et au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Thélin, M. Paychère, Mme Junod, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :