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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3393/2018

ATA/158/2019 du 19.02.2019 ( TAXIS ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3393/2018-TAXIS ATA/158/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 février 2019

en section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Guerric Canonica, avocat

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR



EN FAIT

1. Monsieur A______, né le ______ 1970, est domicilié en France et au bénéfice d'une autorisation frontalière valable pour toute la Suisse jusqu'au 9 janvier 2023.

2. Le 31 mars 2016, M. A______ a fait l'objet d'un rapport de dénonciation établi par les services de police.

À teneur de ce rapport, il avait, le 30 mars 2016 à 10h45, pris en charge à l'aéroport international de Genève une cliente pour une course à destination du bureau de celle-ci, près de l'ONU, au moyen du véhicule immatriculé VD 1______ appartenant à la société B______.

Lors de ce contrôle, l'intéressé avait déclaré travailler en qualité de chauffeur de limousine dans le canton de Genève, par le biais de l’application Uber, sans être au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur.

3. Selon un rapport établi le 29 juin 2016 par le secteur inspectorat du service du commerce, devenu depuis lors le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN), M. A______ avait fait l'objet d'un contrôle le 28 juin 2016 à 8h55, lors duquel il avait été constaté qu'il avait pris en charge trois clients à Bellevue, pour les conduire à l'aéroport international de Genève, au moyen du véhicule précité, alors qu'il n'était pas au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur de limousine.

L'intéressé avait en outre confirmé exercer son activité avec l'application Uber et travailler depuis quatre mois pour la société B______.

4. Le 24 novembre 2016, M. A______ a fait l'objet d'un rapport de dénonciation établi par les services de police.

Il ressortait de ce rapport que le 13 octobre 2016 à 23h25, l'intéressé avait pris en charge un client à Genève pour le déposer à la hauteur du Cours de Rive, toujours au moyen du véhicule immatriculé VD 1______, sans être au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur.

5. Le 14 août 2017, M. A______ a déposé auprès du PCTN une demande en vue de l'obtention d'une carte professionnelle de chauffeur de voiture de transport avec chauffeur (ci-après : VTC).

6. Le 2 octobre 2017, une carte professionnelle de chauffeur de VTC a été délivrée à M. A______.

7. Le 23 novembre 2017, le PCTN a imparti à M. A______ un délai pour se déterminer sur le contenu des trois rapports précités, dont copies lui étaient transmises. Les faits retenus étaient constitutifs d'infractions à la législation applicable et susceptibles de donner lieu au prononcé d'une amende administrative. Un formulaire de situation personnelle et financière était également joint au courrier.

8. Le 1er décembre 2017, M. A______ a inscrit au registre du commerce genevois l'entreprise individuelle C______, dont il était titulaire, avec pour but le transport de personnes, la location de véhicules avec ou sans chauffeur, des cours de soutien aux élèves conducteurs et formation aux chauffeurs de transport débutants.

9. Par décision du 28 août 2018, le PCTN a infligé à M. A______ une amende administrative de CHF 3'000.- pour avoir, à plusieurs reprises, enfreint la législation applicable.

Il avait en effet, les 30 mars, 28 juin et 13 octobre 2016, exercé une activité de chauffeur professionnel de limousine sur le territoire du canton de Genève, au moyen du véhicule immatriculé VD 1______, sans être au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur de limousine.

Dès lors qu’il était établi en France, il ne pouvait pas se prévaloir de la législation sur le marché intérieur, quand bien même son activité de chauffeur professionnel de personnes était licite dans le canton de Vaud. Il ne pouvait ainsi pas bénéficier d’un traitement préférentiel sans avoir, au préalable, obtenu une autorisation délivrée par le PCTN à cette fin.

10. Par acte du 28 septembre 2018, M. A______ a interjeté recours contre la décision précitée, concluant principalement à son annulation et, subsidiairement, à ce que l'amende administrative soit réduite à CHF 100.-. Il concluait également à la condamnation du PCTN au paiement d'une indemnité, valant participation aux honoraires de son avocat.

Il était père de deux filles âgées de dix et dix-huit ans, à l'entretien desquelles il contribuait dans une large mesure. Exerçant son activité de chauffeur comme indépendant, son bénéfice mensuel net s'était élevé à CHF 2'431.70 en 2017. Sa situation financière était difficile. Il avait suivi en France une formation complète de chauffeur. Il était titulaire du permis de conduire suisse B-121 autorisant le transport professionnel de personnes. Depuis 2016, il avait exercé de manière indépendante sa profession de chauffeur professionnel à Genève et dans le canton de Vaud, à l'aide de véhicules loués, immatriculés dans le canton de Vaud. Il avait effectué des courses au moyen de l'application Uber.

Dès lors qu'il n'avait reçu aucun courrier du PCTN suite à l'établissement des rapports le concernant, il n'avait pas été en mesure de se déterminer sur les faits qui lui étaient reprochés, de sorte que son droit d'être entendu avait été violé. Or, cela n'avait pas empêché le service de retenir des infractions à la législation applicable et de lui infliger une amende administrative de CHF 3'000.- par décision du 28 août 2018, laquelle devait en conséquence être annulée.

La décision entreprise violait en outre la loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1995 (LMI - RS 943.02) et le principe de libre circulation qui en découlait. Le canton de Vaud ne disposant pas de réglementation cantonale sur le transport professionnel de personnes, le droit fédéral y relatif trouvait application. En l'occurrence, dans la mesure où il était au bénéfice d'un permis de conduire, ainsi que d'une autorisation de transporter des personnes à titre professionnel, la pratique de son activité était licite dans le canton de Vaud. Dans ces circonstances, il disposait d'un droit à offrir librement ses services sur l'ensemble du territoire suisse, l'accès au marché genevois ne pouvant lui être restreint que sous la forme de charges ou conditions et dans le respect des termes de l'art. 3 al. 1 LMI. Dès lors, il contestait formellement avoir commis une quelconque infraction à Genève lors des contrôles opérés en 2016, et la décision attaquée devait être annulée.

Enfin et subsidiairement, le PCTN avait abusé de son pouvoir d'appréciation en lui infligeant une amende administrative de CHF 3'000.-, dont la quotité était disproportionnée relativement aux faits constatés et en l'absence d'antécédents. De plus, sans égard à sa culpabilité – formellement contestée –, sa situation financière ne lui permettait pas de s'acquitter d'un tel montant. L'amende infligée devait en conséquence être réduite drastiquement pour atteindre le montant minimum de CHF 100.- prévu par la loi.

11. Le 30 octobre 2018, le PCTN a transmis son dossier et ses observations sur le recours, concluant à son annulation et à la confirmation de la décision du 28 août 2018.

Le grief de violation du droit d'être entendu devait être écarté. Renseignements pris auprès de la poste, le 1er décembre 2017 le PCTN avait reçu en retour son courrier du 23 novembre 2017, faute d'avoir pu être distribué à son destinataire. Ce courrier avait par la suite été égaré au sein du service, de sorte qu'au moment du prononcé de la décision litigieuse, il pensait à tort que le recourant avait renoncé à faire valoir son droit d'être entendu. De plus, le pouvoir d'examen de la chambre administrative se recoupant avec celui de l'autorité, il y avait lieu de considérer la violation du droit d'être entendu du recourant dans la procédure non contentieuse réparé par la présente procédure de recours.

Le grief d'une violation de la LMI ne pouvait pas être retenu, dès lors que cette loi ne s'appliquait pas au cas du recourant qui n'avait pas démontré, au moment des contrôles dont il avait fait l'objet, qu'il disposait d'un siège ou d'un établissement en Suisse. Il avait ainsi bel et bien enfreint la législation en ayant exercé une activité de chauffeur professionnel de limousine dans le canton de Genève au moyen d'un véhicule immatriculé dans le canton de Vaud, sans être au bénéfice d'une carte professionnelle.

Enfin, tant la décision entreprise que la quotité de l'amende administrative infligée étaient fondées. L'exercice d'une activité de chauffeur professionnel de limousine dans le canton de Genève sans être au bénéfice d'une carte professionnelle constituait l'une des infractions les plus graves à la loi applicable, et le recourant l'avait commise à au moins trois reprises au cours de l'année 2016, soit de façon grave et répétée. Le montant de CHF 3'000.- était proportionné et conforme à la jurisprudence constante en la matière. Le recourant alléguait une situation financière difficile, sans toutefois produire toutes les pièces permettant d'avoir une vision globale de ses charges, ni tenir compte du fait que désormais au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur il y avait lieu de présumer d'une augmentation de ses revenus. L'autorité n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation.

12. Le 23 novembre 2018, le recourant a persisté dans ses conclusions. La violation de son droit d'être entendu était si grave qu'elle ne pouvait pas être réparée par la procédure de recours. Sa situation financière était particulièrement difficile, ce dont le PCTN ne tenait pas suffisamment compte.

13. Le 29 novembre 2018, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. Le 1er juillet 2017, est entrée en vigueur la loi sur les taxis et les voitures de transport avec chauffeur du 13 octobre 2016 (LTVTC - H 1 31) et son règlement d’exécution de la LTVTC du 21 juin 2017 (RTVTC - H 1 31.01) abrogeant la loi sur les taxis et limousines (transport professionnel de personnes au moyen de voitures automobiles) du 21 janvier 2005 (aLTaxis - H 1 30) et le règlement d’exécution de l’aLTaxis du 4 mai 2005 (aRTaxis - H 1 30.01 ; art. 40 LTVTC et 53 RTVTC).

Aux termes des dispositions transitoires du RTVTC, les faits constatés avant l’entrée en vigueur de la loi se poursuivent selon l’ancien droit et devant les autorités compétentes sous l’empire de ce droit. L’art. 48 aLTaxis, concernant la commission de discipline, n’est toutefois pas applicable. L’application du nouveau droit est réservée, si ce dernier est plus favorable à l’auteur de l’infraction (art. 66 RTVTC).

En règle générale, s’appliquent aux faits dont les conséquences juridiques sont en cause, les normes en vigueur au moment où ces faits se produisent (ATA/1212/2018 du 13 novembre 2018 et les références citées).

b. En l’espèce, les faits retenus dans la décision attaquée se sont déroulés entièrement sous l’ancien droit. S’agissant de l’amende, la chambre administrative a déjà retenu que le nouveau droit (art. 38 al. 1 LTVTC), prévoyant en cas de violation de ses prescriptions ou de ses dispositions d’exécution une amende de CHF 200.- à CHF 20'000.-, n’était pas plus favorable que l’art. 45 al. 1 aLTaxis, punissant d’une amende administrative de CHF 100.- à CHF 20'000.- toute personne ayant enfreint les prescriptions de l’aLTaxis ou de ses dispositions d’exécution (ATA/1212/2018 précité et la référence citée).

Il s’ensuit que la présente cause est soumise à l’aLTaxis et au aRTaxis.

3. a. Dans un premier grief, le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu, dès lors qu'il n'a jamais reçu le courrier du 23 novembre 2017 l'invitant à se déterminer sur les faits qui lui étaient reprochés et qu'il n'a en conséquence pas pu faire valoir son point de vue avant que la décision attaquée ne soit rendue.

b. Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_265/2016 du 23 mai 2016 consid. 5.1 et les arrêts cités).

Une décision entreprise pour violation du droit d’être entendu n’est pas nulle mais annulable (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; ATA/632/2017 du 6 juin 2017 et les arrêts cités).

La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 138 I 97 consid. 4.1.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_780/2016 du 6 février 2017 consid. 3.3 ; ATA/ 632/2017 précité et les arrêts cités). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_780/2016 du 6 février 2017 consid. 3.1) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; ATA/1039/2017 du 30 juin). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/1039/2017 du 30 juin 2017 et les arrêts cités).

c. En l’espèce, le recourant affirme n'avoir jamais reçu le courrier du PCTN lui faisant part de son intention de le sanctionner et l'invitant à se déterminer au sujet des faits qui lui étaient reprochés. L'autorité admet quant à elle avoir reçu ledit courrier en retour, faute d'avoir été distribué à son destinataire, puis avoir finalement perdu le document au sein de son service. Lorsque la décision du 28 août 2018 a été rendue, le recourant ne s'était donc pas prononcé. Son droit d’être entendu a dès lors été violé par l’autorité intimée.

Le recourant a cependant pu faire valoir son point de vue au travers des deux écritures produites dans le cadre de la présente procédure accompagnées des pièces qu’il estimait nécessaires pour étayer ses dires, de sorte que la violation de son droit d’être entendu doit être considérée comme réparée, la chambre administrative connaissant de la présente cause avec un plein pouvoir de cognition (ATA/310/2017 du 21 mars 2017 consid. 4b et les références citées).

Ce grief sera donc écarté.

4. a. Le recourant conteste la commission d’une quelconque infraction, la législation sur le marché intérieur lui permettant selon lui d’exercer une activité de chauffeur professionnel de personnes sur l’ensemble du territoire Suisse, en particulier à Genève.

b. L’aLTaxis a pour objet d’assurer un exercice des professions de transport de personnes au moyen de voitures automobiles et une exploitation des services de taxis et de limousines conformes, notamment, aux exigences de la sécurité publique, de la moralité publique, du respect de l’environnement et de la loyauté dans les transactions commerciales ainsi qu’aux règles relatives à l’utilisation du domaine public (art. 1 aLTaxis).

Seul le titulaire d’une carte professionnelle de chauffeur de taxi ou de chauffeur de limousine peut conduire un véhicule pour transporter professionnellement des personnes (art. 5 al. 1 aLTaxis).

La carte professionnelle de chauffeur de taxi confère au chauffeur le droit d’exercer son activité comme chauffeur de taxi ou de limousine indépendant ou comme employé d’un tel chauffeur, ainsi qu’en qualité d’employé d’une entreprise de taxis ou de limousines ou de locataire d’un véhicule d’une entreprise de taxis de service public (art. 6 al. 1 aLTaxis). La carte professionnelle de chauffeur de limousine confère au chauffeur le droit d’exercer son activité comme chauffeur indépendant d’une limousine ou comme employé d’un exploitant indépendant ou d’une entreprise de limousines (art. 7 al. 1 aLTaxis). Ces autorisations sont délivrées lorsque le requérant a notamment réussi les examens prévus par la loi (art. 6 al. 2 let. d et 7 al. 2 let. d aLTaxis).

c. La LMI garantit à toute personne ayant son siège ou son établissement en Suisse l’accès libre et non discriminatoire au marché afin qu’elle puisse exercer une activité lucrative sur tout le territoire suisse (art. 1 al. 1 LMI).

Toute personne a le droit d’offrir des marchandises, des services et des prestations de travail sur tout le territoire suisse pour autant que l’exercice de l’activité lucrative en question soit licite dans le canton ou la commune où elle a son siège ou son établissement (art. 2 al. 1 LMI).

Selon l’art. 3 al. 1 LMI, la liberté d’accès au marché ne peut être refusée à des offreurs externes. Les restrictions doivent prendre la forme de charges ou de conditions et ne sont autorisées que si elles s’appliquent de la même façon aux offreurs locaux (let. a), sont indispensables à la préservation d’intérêts publics prépondérants (let. b), répondent au principe de la proportionnalité (let. c). L’art. 3 al. 2 LMI dispose que les restrictions ne répondent pas au principe de la proportionnalité lorsqu’une protection suffisante des intérêts publics prépondérants peut être obtenue au moyen des dispositions applicables au lieu de provenance (let. a), les attestations de sécurité ou certificats déjà produits par l’offreur au lieu de provenance sont suffisants (let. b), le siège ou l’établissement au lieu de destination est exigé comme préalable à l’autorisation d’exercer une activité lucrative (let. c), une protection suffisante des intérêts publics prépondérants peut être garantie par l’activité que l’offreur a exercée au lieu de provenance (let. d). Les restrictions visées à l’art. 3 al. 1 LMI ne doivent en aucun cas constituer une barrière déguisée à l’accès au marché destinée à favoriser les intérêts économiques locaux (art. 3 al. 3 LMI).

La LMI pose le principe du libre accès au marché selon les prescriptions du lieu de provenance, qui est l’un de ses principes fondamentaux avec celui de la non-discrimination entre les offreurs externes et locaux. Le principe du libre accès au marché a été renforcé par la modification de la LMI du 16 décembre 2005 entrée en vigueur le 1er juillet 2006, au travers de laquelle le législateur a tendu, en supprimant les entraves cantonales et communales à l’accès au marché, à consacrer la primauté du marché intérieur sur le fédéralisme. L’idée du législateur était entre autres d’empêcher que le principe du fédéralisme ne l’emporte sur celui du marché intérieur. Cela ne signifie pas pour autant que toutes les limitations cantonales au libre accès au marché sont prohibées, notamment lorsqu’elles résultent du droit fédéral (ATA/1212/2018 précité et les références citées).

d. En l’espèce, il ressort des rapports des 31 mars, 29 juin et 24 novembre 2016 que le recourant a été contrôlé à trois reprises, les 30 mars, 28 juin et 13 octobre 2016, en train d’effectuer des courses sur le territoire genevois au moyen d'un véhicule immatriculé dans le canton de Vaud, sans être au bénéfice d'une carte professionnelle de chauffeur.

Le recourant n’a pas démontré exercer l’essentiel de son activité à l’extérieur du canton, la lecture des rapports dont il fait l’objet permettant, au contraire, de constater qu’elle se déroule en partie sur le territoire genevois. Le fait qu'il ait utilisé un véhicule immatriculé dans le canton de Vaud ou que le recourant soit inscrit au registre du commerce genevois depuis le 1er décembre 2017 ne permet pas de remettre en cause ce qui précède. De plus, au moment des faits, le recourant, établi en France, ne disposait pas d'un siège ou d'un établissement en Suisse, de sorte que la LMI ne trouve pas application. Il est ainsi pleinement soumis à la législation genevoise, dont il ne respectait pas les conditions au moment des faits, en l’absence d’autorisation délivrée par le service, ce qu’il ne conteste du reste pas.

La décision entreprise sera dès lors confirmée en tant qu’elle retient que le recourant a contrevenu à la loi à au moins trois reprises en 2016 en prenant en charge des clients à Genève alors qu’il n’était pas titulaire d’une carte professionnelle de chauffeur de taxi ou de limousine.

5. a. Le département, soit pour lui le service (art. 1 al. 1 et 2 aRTaxis), peut infliger une amende administrative de CHF 100.- à CHF 20'000.- à toute personne ayant enfreint les prescriptions de l’aLTaxis ou de ses dispositions d’exécution (art. 45 al. 1 aLTaxis).

b. L’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès ou d’abus. L’amende doit également respecter le principe de la proportionnalité (ATA/1212/2018 précité et la référence citée).

c. L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des principes applicables à la fixation de la peine contenus aux art. 47 ss CP, en tenant compte de la culpabilité de l’auteur et en prenant en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2 ; ATA/1472/2017 du 14 novembre 2017).

d. En l’espèce, en infligeant une amende de CHF 3'000.- au recourant en lien avec les faits 30 mars, 28 juin et 13 octobre 2016, le service n’a ni excédé ni abusé de son pouvoir d’appréciation. En effet, les faits reprochés constituent des infractions graves à la aLTaxis, dès lors que le recourant a pris en charge des clients, à trois reprises, et sans tenir compte des contrôles successifs dont il a fait l’objet, en se présentant comme un professionnel, alors qu’il n’y était nullement autorisé, étant rappelé que le but de la aLTaxis est notamment d’assurer une exploitation des services de taxis et de limousines conforme aux exigences de la sécurité publique. Le montant de l'amende infligée dans le cas présent apparaît en outre conforme à la jurisprudence constante rendue en la matière (ATA/1248/2018 du 20 novembre 2018 ; ATA/1212/2018 précité).

S'agissant de la situation financière du recourant, les pièces produites, y compris au stade de la présente procédure, sont largement insuffisantes à prouver qu’elle est difficile au point qu’il ne pourrait s’acquitter de l’amende litigieuse, cas échéant avec un arrangement pour les modalités de règlement. Outre qu’il ne ressort pas des pièces produites qu’il aurait deux enfants, ses charges fixes ne sont pas connues et aucun justificatif ne permet de les évaluer, si bien qu'il n'est pas possible d'avoir une vision globale de sa situation financière.

Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté la décision querellée confirmée.

6. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 28 septembre 2018 par Monsieur A______ contre la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 28 août 2018 ;

 

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'aucune indemnité de procédure n'est allouée ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guerric Canonica, avocat du recourant, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :