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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1694/2014

ATA/146/2018 du 20.02.2018 sur JTAPI/287/2015 ( AMENAG ) , ADMIS

Recours TF déposé le 20.04.2018, rendu le 10.10.2018, IRRECEVABLE, 1C_180/2018
Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; PRINCIPE DE LA BONNE FOI ; PROPORTIONNALITÉ ; TRAITEMENT DES DÉCHETS ; AUTORISATION D'EXPLOITER ; SANCTION ADMINISTRATIVE ; RETRAIT DE L'AUTORISATION
Normes : Cst.29.al2; LGD.24; LGD.26.al1; LGD.38; LPA.61.al1; Cst.5.al2; Cst.36; Cst.9; Cst.5.al3
Résumé : Absence de violation du droit d'être entendu dès lors que la recourante était à même de comprendre qu'un retrait de son autorisation d'exploiter était envisagé et qu'elle a eu plusieurs occasions informelles de s'exprimer à cet égard. Retrait de l'autorisation d'exploiter un centre de tri et de conditionnement des déchets en raison du changement, incontesté, du mode d'exploitation de celui-ci. Bien que la décision attaquée apparût justifiée au moment de sa notification, elle doit désormais être annulée au vu des mesures prises et documents fournis par la recourante durant la procédure de recours, ce qui implique l'admission de celui-ci
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1694/2014-AMENAG ATA/146/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 février 2018

 

dans la cause

 

A______
représentée par Me Bénédict Fontanet, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'ENVIRONNEMENT, DES TRANSPORTS ET DE L'AGRICULTURE - GESDEC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 mars 2015 (JTAPI/287/2015)


EN FAIT

1. A______, société sise rue B______ à C______, inscrite au registre du commerce de Genève depuis le 19 juin 2007, a pour but social des « activités d'import-export, de négoce, de recyclage dans le domaine des matières premières et des déchets ; négoce de palettes, de vêtements professionnels, d'équipement de protection et de produits d'entretien ».

2. Par décision du 7 avril 2008, le service cantonal des déchets, devenu depuis lors le service de géologie, sols et déchets (ci-après : GESDEC), auprès du département du territoire, devenu depuis lors le département de l'environnement, des transports et de l'agriculture (ci-après : DETA) a transféré à A______ l'autorisation d'exploiter une installation des déchets n° 1______ (ci-après : autorisation n° 1______) délivrée le 13 août 2001 à A______. Cette dernière bénéficiait également d'une autorisation provisoire de réception d'appareils électriques et électroniques à des fins de stockage n° 2______.

3. Le 12 novembre 2008, A______ a déposé auprès du DETA une requête en autorisation d'exploiter une installation d'élimination des déchets portant sur l'élimination (tri, recyclage et conditionnement) de 6'000 tonnes de déchets ménagers et industriels (tels que papier, carton, palettes de bois, plastique, ferraille et métaux) et 20 tonnes d'appareils électriques et électroniques, par année.

4. Par décision du 6 mars 2009, le GESDEC a délivré à A______ une autorisation d'exploiter un centre de tri et de conditionnement de déchets
n° 3______ (ci-après : autorisation n° 3______), sur les parcelles n°s 4______, 5______ et 6______, feuille n° 7______, commune de C______, laquelle annulait et remplaçait l'autorisation n° 8______. La liste des déchets admis, figurant en annexe avec leur codification définie dans l'ordonnance du département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (ci-après : DETEC) concernant les listes pour les mouvements de déchets (ci-après : LMoD), ainsi que leurs procédés d'élimination selon l'annexe 2 LMoD, en faisant partie intégrante. L'installation, d'une capacité maximale de 6'020 tonnes par an, comprenait les équipements et les aménagements et fonctionnait de la manière décrite dans le dossier de requête de l'autorisation d'exploiter du 12 novembre 2008 ainsi que dans la notice d'impact sur l'environnement (ci-après : NIE) du 3 novembre 2008 élaborée par D______. L'autorisation d'exploiter, délivrée pour une durée de cinq ans, renouvelable tacitement d'année en année, était en outre assortie de charges complémentaires. Toute modification ou transformation de l'installation devait faire l'objet au préalable d'une nouvelle autorisation d'exploiter.

5. Par courrier du 20 avril 2010, le GESDEC, ayant constaté que A______ avait repris des déchets ne figurant pas sur la liste de ceux autorisés, lui a demandé des explications à cet égard afin de déterminer si une modification de son autorisation d'exploiter était nécessaire.

6. Faisant suite à un rendez-vous du 23 juin 2010, le GESDEC a transmis par courriel du même jour à A______ une nouvelle version de la liste des déchets qu'elle était autorisée à traiter. Vu les divers nouveaux déchets dont elle souhaitait développer la reprise, elle devait lui communiquer le tonnage annuel qu'elle envisageait de reprendre ainsi que la filière d'élimination choisie.

7. Après avoir reçu divers documents de la part de A______, le GESDEC lui a rappelé par courriel du 28 juin 2010, la nécessité de lui communiquer, pour chaque type de déchets, le tonnage annuel envisagé, la quantité stockée simultanément sur la plateforme, les conditions d'entreposage et la filière d'élimination, préalablement à la modification de l'autorisation n° 3______.

8. Faute de réponse de A______, le GESDEC l'a relancée le 4 octobre 2010.

9. Par courrier du 16 février 2011, le GESDEC a transmis à A______ la liste finale des déchets autorisés qu'elle lui avait soumise pour approbation le 26 janvier 2011, ainsi que la liste détaillée des tonnages qu'elle entendait faire transiter annuellement dans son centre de tri et de conditionnement des déchets. Elle devait en vérifier la concordance avec ses besoins afin qu'il puisse les valider formellement.

10. Le 22 février 2011, A______ a confirmé au GESDEC le contenu des documents précités en le priant de lui délivrer l'autorisation adéquate en rapport avec la nature actuelle de ses activités de collecte, de tri et de regroupement des matières premières, secondaires et des déchets.

11. Selon un rapport établi à la suite d'une inspection annoncée du site exploité par A______ le 11 mai 2011, effectuée dans le cadre de la mise à jour de l'autorisation n° 3______, le GESDEC a alors constaté que l'entreprise avait surtout développé ses activités dans le domaine de la récupération de métaux. Celles-ci s'apparentaient plus à celles d'une plateforme de transfert de déchets qu'à celles d'un centre de tri.

12. D'autres visites, inopinées, ont été effectuées début juin 2011 et les 27 et 31 octobre 2011. D'après le rapport y relatif, divers problèmes avaient été rapportés au GESDEC, notamment par l'administration des douanes, d'importants stocks de déchets, autorisés ou non, avaient été constatés, et des visites de suivi régulières s'imposaient pour évaluer les capacités réelles de A______ à fonctionner en flux tendu. Une demande de garantie bancaire allait être évaluée en fonction des tonnages constatés et demandés par l'entreprise.

13. Une nouvelle visite a été effectuée le 15 mars 2012, sur la base d'une plainte du 23 février 2012 due aux nuisances sonores. Selon le rapport subséquent, il avait été constaté qu'il y avait entre deux et quatre livraisons de ferraille à trier par jour, de sorte qu'en moyenne, dix à vingt bennes de 63 m3 de matière triée étaient évacuées par semaine. A______ s'était engagée à prendre des mesures pour réduire le bruit. Néanmoins, « il apparai[ssait] nécessaire de demander une objectivation, afin de vérifier s'il y a[vait] dépassement des valeurs de planification du bruit ».

14. Le 26 août 2012, A______ a transmis au GESDEC un « inventaire 2011 des déchets du canton de Genève », démontrant qu'elle avait traité durant cette période un volume total de plus de 7'200 tonnes de déchets, correspondant principalement à des ferrailles, métaux et de l'aluminium.

15. Par décision du 3 janvier 2013, le GESDEC a imparti à A______ un délai de dix jours pour évacuer ou entreposer sur des aires étanches et sous couvert les déchets stockés en extérieur, les bennes situées à l'extérieur et servant à l'entreposage intermédiaire des déchets devant être couvertes ; un délai au 1er mars 2013 pour déposer une requête complète en modification de son autorisation n° 3______, indiquant les informations précises requises et comportant une NIE relative au développement de ses nouvelles activités.

A______ avait notablement modifié ses activités sans en évaluer les impacts sur l'environnement, les législations fédérales et cantonales en matière de protection de l'environnement étant susceptibles de ne pas être respectées. L'exploitation actuelle de son site n'était plus conforme à l'autorisation n° 3______. Durant l'examen d'une éventuelle modification de celle-ci, les déchets encombrants, la ferraille, les palettes et les métaux devaient être entreposés sur des aires étanches et sous couvert. Leur traitement devait être effectué de façon à en minimiser les émissions de bruit. En cas de violation grave ou réitérée de la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20) ou de ses décisions, le GESDEC pouvait retirer l'autorisation d'exploiter en tout temps et sans indemnité (art. 26 al. 1 LGD).

16. Le 12 mars 2013, constatant que A______ ne lui avait fait parvenir aucune requête dans le délai imparti, le GESDEC lui a fixé un ultime délai au 5 avril 2013 pour s'exécuter. La teneur de l'art. 26 al. 1 LGD lui était rappelée.

17. Par courriel du 13 mars 2013, A______ a transmis au GESDEC un dossier de demande d'autorisation d'exploiter, lequel visait à répondre à la demande de celui-là de « mise à jour de [son] autorisation d'exploiter notamment au niveau des tonnages mais aussi des rubriques de déchets autorisés sur le site jusqu'à la définition des travaux à mettre en œuvre pour la modernisation de la plateforme de collecte dédiée aux déchets et matières recyclables issus des collectes sélectives, des déchets non dangereux des industries etc » (dossier de demande d'autorisation d'exploiter, p. 6).

18. Le 7 avril 2013, A______ a adressé au GESDEC une version finale de son dossier.

19. Le 8 mai 2013, le GESDEC l'a informée qu'après examen de son dossier et avoir reçu les préavis des différents services compétents consultés, des compléments étaient nécessaires. Un délai de trente jours lui était imparti pour les fournir.

20. Le 26 mai 2013, A______ a transmis au GESDEC les modifications ou précisions demandées. S'agissant des mesures sonores et de la protection de l'air, la société mandatée rendrait son rapport avant le 8 juin 2013.

21. Par courrier recommandé du 10 juillet 2013, le GESDEC a demandé à A______ de lui fournir des documents complémentaires concernant le plan de situation, la liste des déchets, le tri du papier, la garantie financière, le certificat délivré par la fondation E______, les aménagements nouveaux et les filtres à particules des machines.

Sous la rubrique « remarques globales sur le dossier », il soulignait qu'il était « erroné d'affirmer que les activités exercées par A______ [étaient] en tous points identiques à celles ayant actuellement lieu et pour lesquelles l'autorisation n° 3______ [avait] été délivrée. En effet, cette dernière [était] basée sur le fait que "l'activité de A______ consist[ait] principalement à collecter et trier le papier et le carton" alors que la situation actuelle [était], depuis plus de deux ans, notablement différente. De plus, les tonnages annuels traités par A______ [étaient] 50 % supérieurs à ceux autorisés. Pour ces raisons notamment, il [était] indispensable que A______ collabor[ât] activement et sans ambages à la mise à jour de son autorisation d'exploiter ». Par ailleurs, tel que cela lui avait été fréquemment expliqué, notamment lors de leurs entrevues des 9 janvier et 25 mars 2013, « l'autorisation de traiter annuellement 10'000 tonnes de déchets demeur[ait] soumise à la production d'une étude d'impact sur l'environnement ». Tel n'ayant pas été le cas en l'occurrence, une quantité annuelle de 8'869 tonnes serait prise en considération sur la base du tonnage indiqué dans le tableau figurant dans le dossier complémentaire du 26 mai 2013.

22. Le 5 août 2013, le GESDEC a accusé réception des compléments transmis par A______ le 31 juillet 2013, en constatant que leur contenu ne permettait toujours pas d'appréhender avec certitude la situation. A______ devait ainsi lui confirmer certains points et lui transmettre les documents demandés.

23. Le jour même, A______ lui a répondu en apportant des précisions au sujet des machines, la plupart d'entre elles étant changées afin d'en réduire les émissions.

24. Le lendemain, la fondation E______ a confirmé au GESDEC que A______ n'avait aucun contrat avec elle. Après l'avoir approchée, celle-ci s'était ravisée au vu de la faible quantité d'appareils électriques et électroniques collectés.

25. Le 3 octobre 2013, le GESDEC a effectué une visite inopinée du site de A______ afin « de vérifier les divers engagements promis […] durant le 2ème trimestre 2013 » et de « faire le point sur l'avancement du dossier ». Le rapport d'inspection du 8 octobre 2013 y relatif relevait l'absence de conformité de certains équipements, installations et conditions d'exploitation. Ainsi, des mesures correctives avaient été fixées, avec des délais d'exécution. Le site étant en chantier, une tolérance relative avait été appliquée.

26. Par décision du 25 novembre 2013, le GESDEC a imparti à A______ un ultime délai au 13 décembre 2013 pour lui remettre divers documents, dont le numéro de requête en autorisation de construire concernant les aménagements effectués durant les mois de septembre et/ou octobre 2013, un certificat d'affiliation à la fondation E______ ou, à défaut, une attestation de la procédure d'affiliation en cours et l'original de la garantie financière d'un montant de CHF 30'000.-, ainsi que pour équiper d'un filtre à particules conforme au droit en vigueur toute grue active sur son site. Pour rappel, il était interdit d'entreposer des déchets à même le sol sur les surfaces sans revêtement et toute matière explosive à l'intérieur de la halle de tri et d'entreposage. Il mentionnait à nouveau qu'en cas d'inexécution de cette décision dans les délais fixés, il pourrait être procédé au retrait, partiel ou total, de l'autorisation d'exploiter n° 3______.

27. D'après un rapport d'inspection du 9 janvier 2014, le GESDEC a derechef constaté lors d'une visite inopinée le 16 décembre 2013 sur le site de A______, diverses irrégularités, en particulier concernant le filtre à particules de la grue, l'absence d'affiliation à la fondation E______, l'entreposage de déchets au sol et à l'extérieur sans couverture ni rétention.

28. Par décision du 21 février 2014, le GESDEC a infligé à A______ une amende de CHF 300.-, lui a imparti un délai de dix jours pour fournir certains documents, ainsi que les compléments requis dans sa décision du 11 décembre 2013. L'intégralité des documents mentionnés dans la décision du 25 novembre 2013 ne lui avait pas été transmise par A______. L'exploitation actuelle du site de cette dernière n'étant toujours pas conforme à l'autorisation n° 3______, celle-ci serait retirée, en partie ou en totalité, si A______ n'exécutait pas cette décision dans les délais impartis.

29. Par décision du 7 mai 2014, le GESDEC a retiré à A______, avec effet immédiat, l'autorisation n° 3______, en lui interdisant toute réception de déchets, qu'ils soient considérés comme ordinaires, soumis à contrôle ou spéciaux. En outre, il lui a notamment ordonné d'éliminer tous les déchets encore présents sur le site d'exploitation vers d'autres installations de traitement de déchets dûment autorisés et de lui fournir, dans un délai de trente jours, les justificatifs d'élimination desdits déchets. Il réexaminerait la situation à réception des cinq documents listés, dont une étude acoustique intégrant les compléments requis le 11 novembre 2013, l'original d'une garantie financière pour un montant de CHF 30'000.- et une NIE ou tout autre document décrivant les activités projetées par A______.

En plus de lui avoir fait part régulièrement de la non-conformité du site à l'autorisation n° 3______, il lui avait dit, à quatre reprises, entre le 3 janvier et le 11 décembre 2013, qu'en cas de violation grave ou réitérée de la LGD, ladite autorisation pourrait lui être retirée. Bien qu'il l'eût informée du retrait de cette autorisation si elle ne se conformait pas à sa décision du 21 février 2014, elle ne s'était pas exécutée dans les délais impartis. La mesure était donc justifiée.

Cette décision n'a pas été déclarée exécutoire nonobstant recours.

30. Par courriel du 2 juin 2014, le GESDEC a informé A______ que son dossier complémentaire de demande d'autorisation d'exploiter, adressé le 30 mai 2014, n'était pas recevable pour instruction, faute d'intégrer les nombreux commentaires et recommandations communiqués au cours de l'année précédente. Dès lors qu'elle avait décidé de ne pas suivre celles du 10 juillet 2013, rappelées par courriel du 6 août 2013, relatives aux tonnages envisagés pour traitement sur son site, la production d'une étude d'impact sur l'environnement s'avérait obligatoire.

31. Dans sa réponse du 3 juin 2014, faisant suite à un entretien téléphonique du même jour avec le GESDEC, A______ lui a indiqué que le tonnage mentionné dans son document représentait une donnée indicative maximale. Afin d'éviter de solliciter chaque année une autorisation d'augmentation des volumes, il lui apparaissait judicieux de déposer une demande pour 9'500 tonnes.

32. Par acte du 10 juin 2014, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision précitée du 7 mai 2014, en concluant à son annulation.

Son droit d'être entendu avait été violé puisque le GESDEC ne l'avait jamais informée de son intention de lui retirer son autorisation d'exploiter, ni ne l'avait invitée à s'exprimer à ce sujet. Ce vice devait être considéré comme grave étant donné qu'elle ne serait plus en mesure d'exercer ses activités. L'art. 26 LGD n'avait pas non plus été respecté car les documents que le GESDEC lui reprochait de ne pas avoir fournis ne concernaient aucunement l'autorisation d'exploiter en force, mais une nouvelle demande d'autorisation. Disposant d'autres moyens pour la contraindre à lui remettre la documentation requise, il avait violé le principe de la proportionnalité en la sanctionnant ainsi.

33. Après l'octroi d'un délai pour transiger, le GESDEC, soit pour lui le DETA, a répondu le 30 septembre 2014 en concluant au rejet du recours.

Depuis le mois d'avril 2010, il avait été en contact continu avec A______. Comme cette dernière l'invoquait elle-même, il l'avait avertie à plusieurs reprises, notamment dans sa décision du 21 février 2014, que si elle ne se conformait pas aux décisions notifiées, elle s'exposerait à un retrait de son autorisation n° 3______. A______ avait eu l'occasion de se faire entendre. Il avait montré une grande disponibilité et de la patience avant de prendre sa décision. Bien qu'ils eussent eu maints échanges des mois d'avril 2010 à 2014, A______ fournissait régulièrement des documents systématiquement incomplets ou incohérents, ne montrant aucun respect des décisions rendues ni des délais fixés pendant plus de trois ans. Malgré une mise en garde allant jusqu'au prononcé d'une amende, A______ ne s'était jamais mise en conformité. Elle exerçait actuellement son activité illégalement, faute de correspondre aux conditions de l'autorisation
n° 3______. En ces circonstances, la mesure prise constituait le dernier recours à sa disposition.

34. À sa demande considérant l'impact de la décision entreprise sur sa situation, A______ a répliqué le 1er décembre 2014, persistant dans ses conclusions et son argumentation. Elle ajoutait que la situation avait évolué depuis. Ayant transmis au GESDEC les documents exigés, elle s'était mise intégralement en conformité avec celle-ci. Il disposait donc désormais de tous les éléments nécessaires pour la reconsidérer.

Elle joignait à sa réplique les documents précités, dont une NIE réalisée courant novembre 2014 par F______ et intégrant une nouvelle étude acoustique, un exemplaire d'une garantie financière à hauteur de CHF 30'000.- émise par l'G______, ainsi que le règlement d'exploitation de son site.

35. Le 22 décembre 2014, le DETA a dupliqué, en maintenant sa position.

Un dossier relatif à une installation d'élimination des déchets devant être instruit et évalué par les services chargés de la protection de l'environnement préalablement à une mise en service, le seul dépôt des documents par A______ ne permettait pas la délivrance sans autre formalité d'une modification de l'autorisation d'exploiter. Quand bien même A______ avait fourni tous les éléments à cette fin, le cas échéant, pour une nouvelle autorisation d'exploiter, sa requête devait encore être instruite par les services compétents et son activité demeurait non conforme à l'autorisation n° 3______. Une plainte à son encontre avait été déposée le 5 septembre 2014 par plus de quatre-vingt riverains, en raison de nuisances sonores et dégagements de poussières importants générés de façon régulière par ses activités, soit le déchargement de camions et le déplacement de ferraille. Celle-ci était en cours d'instruction par le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA).

36. Par jugement du 5 mars 2015, le TAPI a rejeté le recours précité de A______.

Après avoir augmenté et transformé de manière substantielle son activité, A______ avait, sur demande répétée de l'autorité, sollicité l'autorisation de modifier ses activité afin de se mettre en conformité avec la loi. Depuis lors, cette dernière avait en vain tenté d'obtenir d'elle qu'elle donnât suite à diverses exigences, tout en lui accordant de nombreuses prolongations de délai à cette fin. A______ ayant eu de multiples occasions de s'exprimer et ayant été informée de l'éventualité d'une sanction par le retrait de son autorisation d'exploiter, le GESDEC n'avait pas violé son droit d'être entendu. En dépit des nombreuses démarches entreprises par le GESDEC et des quatre décisions adressées à A______ pour qu'elle se conforme à ses obligations, elle ne s'était jamais exécutée, y compris au moment de la notification de la décision litigieuse. Le manque de coopération de A______ était la cause de cet échec. Vu que son activité ne correspondait plus à celle autorisée en 2009, avec un risque identifié qu'elle contrevienne à la législation fédérale en matière de protection de l'environnement, la mesure était proportionnée et adaptée à la situation.

37. Par acte du 20 avril 2015, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation, « sous suite de frais et dépens ».

Compte tenu de l'impact de la décision querellé sur ses activités, la question de l'efficacité de l'exercice de son droit d'être entendue devait être envisagée strictement. Les premiers juges n'indiquaient ni les courriels ni les visites sur lesquels ils se basaient pour considérer une absence de violation de son droit d'être entendue. Les prolongations de délais accordées ne pouvaient être prises en considération à ce stade car elles visaient la nouvelle requête en autorisation d'exploiter et non pas un éventuel retrait de son autorisation d'exploiter. Les trois décisions précédant celle du 7 mai 2014 ne pouvaient pas non plus être prises en considération dès lors qu'elles concernaient des faits antérieurs et n'indiquaient pas expressément que l'autorisation d'exploiter serait retirée, mais seulement qu'elle pourrait l'être. Elle n'avait pas été invitée par le GESDEC à se déterminer préalablement à un éventuel retrait de son autorisation d'exploiter. Quant à la violation de l'art. 26 LGD, les documents sollicités par le GESDEC concernaient principalement la nouvelle autorisation d'exploiter requise. L'imperfection de sa collaboration devait être prise en considération au même titre que l'évolution des demandes du GESDEC. Le GESDEC aurait pu sanctionner sa
non-coopération d'une amende plus élevée au vu des montants prévus à l'art. 43 al. 1 LGD. Faute d'indiquer que ses activités contrariaient les dispositions de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) ou de la LGD, le GESDEC n'avait pas retenu ce motif pour justifier sa décision. Le TAPI avait ainsi substitué sa propre appréciation à celle du GESDEC, sur un fait qui n'était pas établi ni prouvé. En tout état, ses irrégularités par rapport à son autorisation d'exploiter, connues du GESDEC depuis le mois d'avril 2010, ne pouvaient justifier le retrait immédiat de son autorisation d'exploiter, faute d'urgence. Cette mesure contredisait également la procédure en cours en vue de la délivrance d'une nouvelle autorisation d'exploiter.

38. Le 23 avril 2015, le TAPI a transmis son dossier, sans formuler d'observations.

39. Dans ses écritures responsives du 21 mai 2015, le DETA a conclu au rejet du recours, maintenant sa position et reprenant son argumentation précédente.

En outre, bien qu'il eût accepté de solliciter un délai durant la procédure de première instance pour trouver une solution amiable, il n'avait à nouveau pas obtenu ce qu'il attendait. Vu qu'après quatre ans d'instruction, de multiples démarches et quatre décisions, A______ ne s'était jamais exécutée, une nouvelle amende n'aurait de toute évidence pas été suffisante pour la forcer à coopérer. Selon le rapport produit, établi par le SABRA le 28 avril 2015, les valeurs de planification de l'annexe 6 de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41) étaient dépassées de 2 à 7 dB(A). Le traitement des déchets métalliques, transportés par camion jusqu'à l'entreprise, puis déchargés et triés à l'extérieur dans l'enceinte de celle-ci, étaient une de ses activités depuis 2008. Ainsi, le niveau d'évaluation Lr devait être inférieur aux valeurs de planification pour des logements situés dans une zone en degré de E______ibilité III (ci-après : DS III) selon le plan localisé de quartier (ci-après : PLQ) 9______ adopté par le Conseil d'État le 26 juin 1992. Les mesures du bruit concernant les phases de manipulation d'objets métalliques, effectuées par les appareils installés sur l'un des deux immeubles d'habitation ayant une vue directe sur l'entreprise, entre 6 heures et 18 heures durant cinq jours en décembre 2014, indiquaient des valeurs dépassant entre 3 et 7 dB(a) les valeurs de planification de l'annexe 6 de l'OPB.

40. À la suite d'une prolongation de délai sollicité par A______, le DETA a, par courrier du 9 juillet 2015, attiré l'attention du juge délégué sur l'habitude de celle-ci d'en requérir sans tenir ses promesses. Ses demandes de complément du 16 février 2015 étaient restées sans réponse. Il lui apparaissait souhaitable qu'une décision soit prise rapidement au vu des problèmes environnementaux générés par cette entreprise, laquelle continuait d'exploiter son installation d'élimination de déchets malgré la décision établie à son encontre.

41. Le 23 juillet 2015, A______ a répliqué, persistant dans ses conclusions et son argumentation.

Dans sa lettre du 9 juillet 2015, le DETA ne mentionnait ni les promesses ni les problèmes environnementaux qui auraient été posés. En réalité, le seul problème mis en avant étaient les nuisances sonores. Cet argument invoqué postérieurement à la décision querellée ne pouvait en tout état la justifier. Le SABRA avait traité l'installation comme nouvelle alors que son centre de tri et de traitement de déchets, en tant qu'installation ancienne, devait être soumis uniquement au respect des valeurs limites d'immissions figurant à l'annexe 6 OPB, selon les art. 16 LPE et 13 OPB. Le changement du mode d'exploitation de
celui-ci ne permettait pas de le considérer comme une installation nouvelle. L'arrêt de ses activités serait d'autant moins justifié qu'elle avait pris les mesures exigées par le GESDEC.

42. Le 2 novembre 2015 a eu lieu une audience de comparution personnelle des parties.

Confirmant les termes de son recours, A______ a déposé une NIE version 2.0 réalisée au mois d'avril 2015 par F______ et des tableaux concernant les déchets traités en 2014, que le GESDEC avait reçus au mois de septembre 2015. Sur la base d'une étude acoustique qu'elle avait demandée, elle avait décidé de traiter l'ensemble des métaux ferreux et l'aluminium dans le hangar. Elle renonçait ainsi à traiter les palettes, ce qui engendrait une diminution de son chiffre d'affaires. L'étude acoustique et la mise à jour de la NIE devaient être finalisées pour la fin de l'année 2015.

43. Dans le prolongement de cette audience, A______ a adressé au GESDEC, le 23 décembre 2015, un courrier comportant la NIE précitée, état au mois de décembre 2015, le nouveau règlement d'exploitation de son site et l'étude acoustique du 7 décembre 2015 réalisée par H______ (le déplacement des activités les plus bruyantes à l'intérieur de la halle permettait de diminuer le niveau sonore émis vers l'extérieur d'environ 9.5 dB(A) au point le plus exposé et de respecter les exigences de l'OPB). Ces trois documents démontraient que le site était et serait conforme à la législation environnementale en vigueur. L'autorisation d'exploiter sollicitée devait donc pouvoir lui être délivrée à brève échéance.

44. Le 3 février 2016, A______ a transmis une copie de l'arrêt rendu le 27 janvier 2016 par la chambre civile de la Cour de justice, révoquant la faillite de l'entreprise prononcée le 10 décembre 2015.

45. Le 13 juin 2016 a eu lieu une nouvelle audience de comparution personnelle des parties.

Le GESDEC avait pu constater sur place que la situation évoluait favorablement, ce que A______ avait confirmé. Elle n'avait plus eu connaissance de plaintes de voisins.

46. À la demande du juge délégué, la société I______ a effectué de nouvelles mesures sonores au mois de novembre 2016.

Aux termes du rapport établi, remis le 12 janvier 2017, A______ avait notablement modifié son exploitation afin de satisfaire aux exigences fixées et de réduire les nuisances sonores émises vers l'extérieur, en réorganisant son site de manière à placer les activités les plus bruyantes à l'intérieur de la halle. La mise en benne des déchets d'aluminium à l'extérieur était la principale nuisance sonore produite par l'exploitation du site. Leur contribution à l'évaluation globale se trouvait toutefois nettement réduite du fait de la limitation de ce type d'activité bien spécifique. Le potentiel d'amélioration de la situation était de plus en plus réduit. Le niveau d'évaluation déterminé pour le récepteur le plus exposé montrait que l'objectif fixé était atteint (dans la mesure où les conditions d'exploitation prises en compte étaient conformes à la situation représentative). L'exposition au bruit de la plate-forme de tri de A______ respectait désormais les valeurs de planification pour un DS III fixées par l'annexe 6 de l'OPB.

47. Les 18 avril et 3 mai 2017, le DETA a remis divers préavis, à savoir :

-                 celui du SABRA du 18 avril 2017 concernant le rapport précité, lequel s'avérait être favorable à l'augmentation du tonnage de traitement des déchets pour autant que, comme les autres métaux, l'aluminium soit stocké à l'intérieur de la halle ;

-                 celui du service de l'environnement et des risques majeurs (ci-après : SERMA) du 26 avril 2017, reprenant le préavis du SABRA concernant la protection contre le bruit, et demandant à A______ de compléter la NIE du 24 janvier 2017 et le règlement d'exploitation, ainsi que de fournir certaines informations.

48. Le 8 mai 2017 a eu lieu une dernière audience de comparution personnelle des parties.

a. Confirmant l'avancement des procédures d'adaptation, A______ précisait qu'un complément de la NIE était en cours de réalisation. S'agissant du bruit, le SABRA se disait satisfait sous réserve d'une benne à déposer à l'intérieur du hangar.

b. Pour sa part, le GESDEC attendait les documents complémentaires. D'autres services en charge de l'environnement devraient également être consultés. Une question relative à une évolution jurisprudentielle quant à la légalité de la reconduction tacite des autorisations se posait.

Il a alors été convenu que A______ transmettrait des documents complémentaires dans un délai d'un mois.

49. Cette dernière a confirmé avoir transmis au GESDEC, le 16 juin 2017, les documents complémentaires requis, ainsi qu'un nouveau formulaire de demande d'exploiter le 4 juillet 2017, en précisant qu'il s'agissait uniquement d'une mise à jour formelle de son dossier.

50. Dans sa réponse du 4 août 2017, le GESDEC a rappelé avoir suggéré à A______, sur la base des derniers documents remis, d'aborder son dossier sous l'angle d'un renouvellement et non plus d'une modification de son autorisation d'exploiter, proposition présentant l'avantage de conférer une durée de validité de cinq ans à l'autorisation. A______ ayant toutefois manifesté le souhait d'envisager exclusivement la poursuite de ses activités sous l'angle d'une modification de l'autorisation initiale, son courrier du 4 juillet 2017 l'avait surpris, puisqu'il comprenait le formulaire de requête à fournir en cas de demande de renouvellement. Si le retrait de l'autorisation n° 3______ devait ne pas être confirmé, il serait pris en considération. Cela étant dit, ledit formulaire était incomplet et présentait des incohérences avec la version 4 de sa NIE. Par ailleurs, il disposait désormais de tous les éléments nécessaires à l'instruction de la requête en modification de l'autorisation d'exploiter.

51. Par courrier du 17 août 2017, le GESDEC a fait savoir à A______ qu'il envisageait de prononcer une amende à son encontre. Un délai lui était imparti pour exercer son droit d'être entendu.

Depuis le 2 décembre 2016, l'inspection des douanes Genève-Routes avait refusé l'exportation de cinq chargements provenant de son centre de tri et de conditionnement des déchets, ces cargaisons ne respectant pas les prescriptions légales en vigueur. Il était reproché à A______ d'avoir violé l'autorisation
n° 3______ en ayant réceptionné des déchets non listés dans l'annexe de celle-ci et en les traitant en vue d'exportation, détenu des déchets sans vérifier s'il s'agissait de déchets spéciaux ou soumis à contrôle, transporté des déchets à remettre avec des documents de suivi en l'absence desdits documents, et en ayant tenté d'exporter des déchets sans autorisation et sans noter les indications requises dans un document de suivi et des déchets spéciaux sans qu'ils ne soient étiquetés.

52. Le 13 septembre 2017, le DETA a transmis le préavis du SERMA du 11 septembre 2017, émis dans un délai raccourci en raison d'un énième envoi tardif de A______, lequel s'avérait favorable sous conditions à la délivrance d'une nouvelle autorisation d'exploiter. Pour le surplus, il persistait dans ses conclusions.

53. Le 11 octobre 2017, A______ s'est étonnée de ce « subit revirement » du GESDEC. Au cours de la procédure, elle avait intégralement répondu aux attentes de celui-ci en effectuant divers travaux d'aménagement de son site et en s'engageant à réduire les émissions de bruit gênant une partie de son voisinage. Ces efforts avaient pour objectif d'obtenir l'annulation de la décision de retrait et l'octroi d'une nouvelle autorisation d'exploiter son centre de tri. Alors que les exigences étaient désormais toutes remplies, le GESDEC revenait sur ses promesses en demandant à la chambre administrative de trancher le litige. Il était surprenant que le GESDEC eût attendu le 7 août 2017 pour souligner pour la premières fois ses supposés manquements graves et répétés, alors que selon lui, ceux-ci avaient perduré durant les deux années de procédure et n'étant pas encore en force, faute d'avoir été formalisés par une décision administrative. Il fallait s'en tenir à ce que les parties avaient convenu, à savoir une annulation de la décision litigieuse pour autant qu'elle respectât certaines conditions, ce qui avait été fait, sous peine de violer le principe de la bonne foi. Les mesures requises, mises en œuvre, avaient eu un impact important sur son chiffre d'affaires. Il convenait de lui délivrer une nouvelle autorisation d'exploiter ou d'annuler la décision du 7 mai 2014 et de renvoyer le dossier au GESDEC pour qu'il lui délivre l'autorisation d'exploiter sollicitée.

54. Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger le 13 octobre 2017.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur le jugement du TAPI du 5 mars 2015 qui confirme la décision du 7 mai 2014 prononçant le retrait de l'autorisation n° 3______ de la recourante, selon l'art. 26 al. 1 LGD.

3. Dans un premier grief, la recourante fait valoir que l'autorité intimée aurait violé son droit d’être entendue, faute de lui avoir fait part de son intention de lui retirer l'autorisation n° 3______. À cet égard, les premiers juges auraient retenu à tort que les circonstances du cas d'espèce lui avaient permis de s'exprimer à satisfaction de droit.

a. Le droit d'être entendu, garanti par les art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 41 LPA, sert non seulement à établir correctement les faits, mais constitue également un droit indissociable de la personnalité garantissant à un particulier de participer à la prise d'une décision qui touche sa position juridique. Il comprend, en particulier, le droit pour la personne concernée de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos. En tant que droit de participation, le droit d'être entendu englobe donc tous les droits qui doivent être attribués à une partie pour qu'elle puisse faire valoir efficacement son point de vue dans une procédure (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 129 II 497 consid. 2.2 et les références). L'étendue du droit de s'exprimer ne peut pas être déterminée de manière générale, mais doit être définie au regard des intérêts concrètement en jeu. L'idée maîtresse est qu'il faut permettre à une partie de pouvoir mettre en évidence son point de vue de manière efficace (ATF 111 Ia 273 consid. 2b ; 105 Ia 193 consid. 2b/cc).

b. En l'occurrence, force est de constater que, contrairement à ce que prétend la recourante, l'autorité intimée a expressément mentionné l'éventualité du prononcé du retrait de l'autorisation n° 3______ à plusieurs reprises. Si dans ses décisions des 3 janvier, 12 mars et 25 novembre 2013, elle avait effectivement utilisé la forme potestative en guise de prévention, elle a cependant clairement affirmé la menace d'une telle sanction dans celle du 21 février 2014, en cas d'inexécution dans les délais alors impartis. La recourante avait donc indubitablement connaissance des conséquences de tout manquement éventuel à ses obligations. Quant à relever que les premiers juges n'avaient indiqué ni les courriels ni les visites sur lesquels ils s'étaient basés pour considérer une absence de violation de son droit d'être entendue, un tel argument confine aux limites de la bonne foi. Il ressort en effet du dossier de la procédure que les parties ont entretenu des échanges continus durant près de quatre ans, voire aujourd'hui sept ans, durant lesquels la recourante a été dûment informée des implications résultant du changement du mode d'exploitation de son centre de tri et de conditionnement des déchets. Son activité n'étant alors plus conforme à l'autorisation n° 3______ alors en vigueur, ce qu'elle ne conteste par ailleurs aucunement, il lui appartenait de régulariser sa situation. Les mesures prises tendant à y remédier visant alternativement l'octroi d'une nouvelle autorisation d'exploiter ou le renouvellement de l'autorisation d'exploiter n° 3______, les faits concernant chacune de ces hypothèses étaient concrètement interdépendants. En d'autres termes, les éléments examinés dans le cadre de la demande de la nouvelle autorisation d'exploiter visaient manifestement à pallier la non-conformité du mode d'exploitation du site de la recourant avec l'autorisation n° 3______.

En ces circonstances et au vu de la jurisprudence susrappelée, le GESDEC n'a pas violé le droit d'être entendu de la recourante, celle-ci ayant eu l'occasion de s'exprimer à de multiples reprises sur tout éventuel manquement aux échéances fixées et ayant été suffisamment informée des conséquences découlant du non-respect des exigences formulées à son égard.

4. Dans un second grief, la recourante fait valoir une violation de l'art. 26 al. 1 LGD sous l'angle du non-respect du principe de la proportionnalité, dans la mesure où l'autorité intimée disposait d'autres moyens pour la contraindre à coopérer, tel que l'infliction d'une amende plus élevée, ce d'autant plus que ses propres exigences quant aux documents à fournir avaient varié dans le temps. Au terme de la procédure, la recourante a en outre invoqué une violation du principe de la bonne foi au motif que l'autorité intimée revenait sur son engagement à favoriser une solution transactionnelle en reprenant sa position initiale alors que, dans l'intervalle, elle-même avait satisfait aux exigences indiquées dans la décision attaquée du 7 mai 2014.

5. a. La LGD a pour but de régler la gestion de l'ensemble des déchets résultant d'activités déployées sur le territoire du canton ou éliminés à Genève, à l'exclusion des déchets radioactifs. Elle constitue la loi d'application des dispositions prévues en matière de déchets de la LPE et ses ordonnances d'application (art. 1 LGD).

Le DETA est ainsi désigné pour exercer la surveillance de la gestion des déchets et veille plus particulièrement à ce que la récupération et l'élimination des déchets s'effectue conformément à la législation fédérale et cantonale en la matière. Il prend les mesures pour réduire la production de déchets, favoriser leur recyclage ou leur valorisation et veille à ce que les déchets soient éliminés de manière respectueuse de l'environnement. Il peut imposer la valorisation de certains déchets et coordonne les activités cantonales, communales et privées en matière de gestion des déchets (art. 4 al. 2 LGD et art. 2 al. 1 du règlement d’application de la loi sur la gestion des déchets du 28 juillet 1999 - RGD - L 1 20.01).

Plus particulièrement, le DETA exerce la surveillance générale de l'exploitation des installations d'élimination des déchets (art. 24 al. 1 LGD).

b. Aucune installation d'élimination des déchets ne peut être créée, modifiée ou transformée sans faire l'objet d'une autorisation d'exploiter prévue par la LGD
(art. 19 al. 1 LGD).

Le département peut contrôler, en tous temps, le fonctionnement des installations (art. 24 al. 2 LGD). Il peut également, en tout temps et sans indemnité, ordonner la mise hors service d'une installation, quelle que soit l'époque de sa construction, jusqu'à exécution des modifications nécessaires, si cette installation ne satisfait pas aux conditions de l'autorisation d'exploiter ou aux exigences légales et réglementaires applicables en matière de protection de l'environnement (art. 24 al. 5 LGD).

En cas de violation grave ou réitérée de la LGD ou de décisions, il peut retirer l'autorisation d'exploiter en tout temps et sans indemnité (art. 26 al. 1 LGD).

c. À teneur de l'art. 38 LGD, lorsque l'état d'une construction, d'une installation ou d'une autre chose n'est pas conforme aux prescriptions de la LGD, des règlements qu'elle prévoit ou des ordres donnés en application de ces dispositions légales ou réglementaires, le département peut ordonner l’exécution de travaux (let. a), la suspension des travaux (let. b), le retrait provisoire ou définitif de l’autorisation d’exploiter (let. c), l’interdiction partielle ou totale d’utiliser ou d’exploiter (let. d), la remise en état, la réparation et la modification d’une installation ou d’un bien naturel ou environnemental lésé (let. e), la suppression ou la démolition d’une installation (let. f), toutes mesures nécessaires à la réhabilitation d’un bien naturel ou environnemental lésé (let. g).

Ainsi, dans le cadre de sa surveillance générale prévue aux art. 4 ou 24 LGD, l'État peut imposer au contrevenant de remettre en état de conformité son installation ou encore d'assainir sa parcelle ou un autre bien environnemental lésé (MGC 1998 49/VII 6401).

d. Par ailleurs, est passible d’une amende administrative de CHF 200.- à CHF 400 000.- tout contrevenant à la LGD, aux règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci ou aux ordres donnés par l’autorité compétente dans les limites de la LGD et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci (art. 43 al. 1 LGD).

Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions, pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. La quotité de la sanction administrative doit ainsi être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/1305/2015 du 8 décembre 2015 consid. 12b et les références citées).

6. a. Conformément à l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé : pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a) ; pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). À teneur de l’al. 2, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi.

Constitue un excès négatif du pouvoir d'appréciation le fait que l'autorité se considère comme liée, alors que la loi l'autorise à statuer selon son appréciation, ou encore qu'elle renonce d'emblée en tout ou partie à exercer son pouvoir d'appréciation (ATF 137 V 71 consid. 5.1), ou qu’elle applique des solutions trop schématiques, ne tenant pas compte des particularités du cas d’espèce (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, n. 514). L’autorité commet un abus de son pouvoir d'appréciation tout en respectant les conditions et les limites légales, si elle ne se fonde pas sur des motifs sérieux et objectifs, se laisse guider par des éléments non pertinents ou étrangers au but des règles ou viole des principes généraux tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; ATA/1349/2017 précité consid. 10 ; ATA/1253/2015 du 24 novembre 2015 consid. 5d ; Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2015, p. 566).

b. Le principe de la proportionnalité, garanti par les art. 5 al. 2 et 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude – exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts
privés – et de proportionnalité au garanti étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c).

c. Le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. L’administration doit ainsi s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; 129 I 161 consid. 4). Le principe de la bonne foi protège donc le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2 ; 137 I 69 consid. 2.5.1 ; 131 II 627 consid. 6.1).

7. En l'espèce, tel que relevé précédemment, la recourante ne conteste aucunement que le nouveau mode d'exploitation de son centre de tri et de conditionnement des déchets ne correspond plus à celui admis lors de la délivrance de l'autorisation n° 3______. Elle reconnaît donc implicitement que sa situation nécessitait effectivement d'être régularisée. En dépit de ces circonstances, des relances répétées durant près de quatre ans et des quatre décisions de l'autorité intimée, elle a persisté dans une approche essentiellement passive, consistant le plus souvent à ne pas donner suite aux demandes du GESDEC dans les délais impartis. Même lorsque, par décision du 21 février 2014, elle s'est vue infliger une amende, qui ne peut être qualifiée d'excessive, de CHF 300.- assortie de la menace claire du retrait de l'autorisation n° 3______, elle n'a pas daigné s'exécuter en temps voulu. En ces circonstances, on voit mal quelle autre mesure moins incisive que le retrait et plus efficace que l'amende aurait pu susciter une réaction constructive de sa part. À cet égard, il convient de relever, d'une part, que, lors des divers contrôles et inspections effectués sur son site, l'autorité intimée l'avait déjà invitée à effectuer certains travaux ou aménagements. D'autre part, une éventuelle mise hors service de l'installation jusqu'à l'exécution des modifications nécessaires ne se serait pas avérée nécessairement plus favorable à la recourante, puisqu'elle aurait alors dû cesser ses activités durant cette période. Ainsi, en lui permettant de les poursuivre - notamment du fait qu'elle n'a pas rendu sa décision exécutoire nonobstant recours - tout en régularisant sa situation, l'autorité intimée a fait montre d'une certaine indulgence dont la recourante n'a à l'évidence pas su pleinement tirer profit. S'agissant des prétendues variations des demandes du GESDEC quant aux documents requis, il sied de relever que celles-ci tendaient généralement à s'adapter aux désidératas de la recourante, qui n'entendait pas suivre les recommandations, notamment concernant le tonnage, de sorte que des documents supplémentaires, tels qu'une NIE s'imposaient. Son attention a d'ailleurs été attirée sur ces points par l'autorité intimée.

Cela étant dit, il convient de relever que, durant la procédure de recours
par-devant la chambre de céans, la recourante a manifesté une certaine volonté de satisfaire aux exigences de l'autorité intimée. Elle a tout d'abord pris les dispositions nécessaires pour que ses activités respectent la réglementation applicable en matière de protection contre le bruit, ce que l'étude acoustique effectuée au mois de novembre 2016 par I______ a dûment confirmé. Depuis lors, aucune plainte à ce sujet n'a été déposée. Conformément à la décision du 7 mai 2014, la recourante a également remis les autres documents dont la production était nécessaire au réexamen de sa situation. Les services compétents, dont le SABRA et le SERMA, ont ainsi rendu des préavis favorables à la délivrance de l'autorisation d'exploiter demandée, sous réserve de quelques compléments. Quant au courrier du 17 août 2017 du GESDEC, à teneur duquel celui-ci fait part à la recourante de son intention de lui infliger une amende en raison de cinq chargements destinés à l'exportation ne respectant pas les prescriptions légales en vigueur, il ne saurait en être tenu compte dans le cadre de la présente procédure, ces faits, postérieurs à la décision querellée, n'en faisant pas partie.

Dès lors que la décision du 7 mai 2014 était justifiée au moment de sa notification, aucune violation du principe de la proportionnalité ne peut être constatée. Compte tenu de l’issue de la présente procédure, aucune violation du principe de la bonne foi ne peut être reprochée à l’intimée, pour autant que ce grief, invoqué dans ses dernières écritures par la recourante, soit recevable. Désormais, il convient de considérer qu'au cours de la présente procédure, la recourante s'est conformée aux exigences de l'autorité intimée, telles que mentionnées dans sa décision précitée.

8. Les considérants qui précèdent conduisent à l’admission du recours. Le jugement du TAPI du 5 mars 2015 sera dès lors annulé, de même que la décision du GESDEC du 7 mai 2014. Le dossier sera renvoyé au GESDEC pour nouvelle décision tendant au renouvellement de l'autorisation n°3______ ou à l'octroi d'une nouvelle autorisation d'exploiter.

L’attention de la recourante sera toutefois attirée sur le fait qu’il lui appartient de strictement respecter les autorisations dont elle bénéficie et les procédures régissant leur renouvellement ainsi que leurs modifications, l’autorité étant légitimée, au vu des éléments ressortant du présent arrêt, à ne plus faire preuve d’aucune indulgence à son égard.

9. Vu les motifs ayant conduit à l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 avril 2015 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 mars 2015 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision du 7 mai 2014 ;

renvoie la cause au service de géologie, sols et déchets pour nouvelle décision au sens des considérants ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17  juin  2005 (LTF -RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s’il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n’est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Bénédict Fontanet, avocat de la recourante, au département de l'environnement, des transports et de l'agriculture - GESDEC, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l'office fédéral de l'environnement.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mmes Krauskopf et Junod, M. Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :