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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3254/2010

ATA/727/2013 du 29.10.2013 sur JTAPI/275/2013 ( LCI ) , SANS OBJET

Parties : ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE DE LA CHAPELLE ET AUTRES, SEEMULLER Alain, PERROTTET Albert, ROSSIER CHAROSKY Aline, DELETRAZ Noëlle / DEPARTEMENT DE L'URBANISME, LA COMMUNE DE PLAN-LES-OUATES, DEPARTEMENT DE L'INTERIEUR ET DE LA MOBILITE - DGNP
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3254/2010-LCI ATA/727/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 octobre 2013

2ème section

 

dans la cause

ASSOCIATION POUR LA SAUVEGARDE DU SITE DE LA CHAPELLE

Madame Noëlle DELETRAZ

Madame Aline ROSSIER CHAROSKY

Monsieur Alain PERROTTET

Monsieur Alain SEEMULLER
représentés par Me Nicolas Wisard, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L’URBANISME

et

DÉPARTEMENT DE L’INTÉRIEUR, DE LA MOBILLITÉ ET DE L’ENVIRONNEMENT

et

COMMUNE DE PLAN-LES-OUATES

représentée par Me François Bellanger, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 11 mars 2013 (JTAPI/275/2013)


EN FAIT

Par décision du 23 août 2010, le département de l’urbanisme (ci-après : DU) a délivré à l’office du génie civil (ci-après : l’OGC) qui était rattaché au département de l’urbanisme et qui est devenu depuis lors la direction générale du génie civil (ci-après : DGGC), rattachée au département de l’intérieur, de la mobilité et de l’environnement (ci-après : DIME), une autorisation de construire pour divers aménagements routiers (DD 103’181-1) en rapport avec l’aménagement d’une route provisoire pour les travaux de la liaison ferroviaire Cornavin - Eaux-Vives - Annemasse (ci-après : CEVA).

Par décision du même jour, la direction générale de la nature et des paysages du département du territoire, devenu le DIME depuis lors, a délivré à l’OGC une autorisation d’abattage d’arbres en rapport avec l’autorisation de construire précitée.

Par décision du même jour également, le DIME a délivré à l’OGC l’autorisation n° 2010-02 pour le défrichage temporaire d’une surface de 2’871 m2 sur deux parcelles nos 5’561 et 5’563, commune de Plan-les-Ouates, en rapport avec l’autorisation de construire précitée.

L’Association pour la sauvegarde du site de la Chapelle (ci-après : l’association), ainsi que Madame Noëlle Deletraz, Madame Aline Rossier Charosky, Monsieur Alain Perrottet et Monsieur Alain Seemuller ont recouru le 27 septembre 2010 auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA), devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), contre l’autorisation de construire précitée, concluant à son annulation.

Le 27 septembre 2010, la commune de Plan-les-Ouates (ci-après : la commune) a également recouru contre l’autorisation de construire DD 103’181-1, concluant à son annulation, et contre les deux décisions du 23 août 2010 prises par le DIME autorisant l’abattage d’arbres et celle n° 2010-02 autorisant le défrichage temporaire des deux parcelles nos 5’561 et 5’563.

Les recours, enregistrés sous les nos de cause A/3254/2010 et A/3352/2010, ont été joints par la CCRA par décision du 9 décembre 2010 sous le n° de cause A/3254/2010.

La cause a été suspendue jusqu’au 13 décembre 2011, reprise puis suspendue à nouveau le 21 janvier 2012, et reprise le 22 mai 2012.

Par jugement du 11 mars 2013, le TAPI a admis partiellement les recours. L’autorisation de construire DD 103’181-1 était octroyée pour l’aménagement d’une route provisoire, valable jusqu’au 31 décembre 2020. Les recours pour le surplus étaient rejetés et les décisions querellées confirmées. Un émolument de CHF 1’000.- a été mis à la charge de l’association, conjointement et solidairement avec les quatre recourants personnes physiques, et un émolument de CHF 1’000.- à la charge de la commune.

Par acte posté le 29 avril 2013, l’association et les quatre autres recourants ont recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI, concluant à son annulation et à celle de l’autorisation de construire DD 103’181-1, subsidiairement à ce qu’elle soit complétée ou que la cause soit renvoyée au DU pour l’octroi de l’autorisation complétée par diverses prescriptions en rapport avec sa mise en exploitation et au rétablissement de l’état antérieur à la construction de la route dès le 1er janvier 2021.

Le TAPI a transmis son dossier le 7 mai 2013 sans formuler d’observation.

Le 10 juin 2013, l’office de l’urbanisme (ci-après : l’office) a répondu. Il a transmis une copie d’un courrier du 5 juin 2013 émanant de la DGGC selon laquelle celle-ci renonçait à la mise en œuvre de l’autorisation de construire DD 103’181-1 du 23 août 2010, suite aux mesures d’économie imposées par les restrictions budgétaires et vu la réouverture à la circulation de la route de la Chapelle.

Compte tenu du contenu du courrier précité, l’office partait du principe que la procédure de recours n’avait plus aucune raison d’être.

Le 24 juin 2013, les recourants se sont déterminés au sujet des observations de l’Etat de Genève. Ils prenaient note des déclarations de la DGGC selon lesquelles elle renonçait à la construction de la route provisoire qui faisait l’objet de l’autorisation de construire DD 103’181-1. Cette déclaration d’intention demeurait cependant insuffisamment précise au sujet du sort qu’elle entendait donner à ladite autorisation de construire. L’autorité qui en était la bénéficiaire ne spécifiait aucunement qu’elle renonçait définitivement au bénéfice de celle-ci, notamment au cas où elle en assurerait le financement. Si tel n’était pas le cas, il y avait lieu de statuer sur leur recours. Si elle renonçait définitivement à ladite autorisation, cela signifiait que l’Etat de Genève se ralliait aux arguments des recourants et acquiesçait au recours. Dans ces circonstances, l’Etat de Genève succombait et des « dépens » devaient leur être alloués.

Sur ce point, les honoraires liés à la préparation du recours s’élevaient à CHF 7’233,30 pour la seule procédure de recours devant la chambre de céans. Les frais antérieurs s’élevant à CHF 12’266,95. Dès lors, la procédure de recours pouvait être radiée du rôle moyennant le paiement des frais et dépens de la procédure incluant une indemnité pour honoraires d’avocat à hauteur de CHF 19’500,25.

Le 18 juillet 2013, le DIME a relevé que le recours ne portait pas sur les autorisations d’abattage d’arbres et l’autorisation de défrichage temporaire. Toutefois, ces deux autorisations ne pourraient être mises en œuvre indépendamment de l’autorisation de construire DD 103’181-1. La juridiction administrative pouvait donner acte au bénéficiaire de l’autorisation de construire, respectivement d’abattage et de défrichage, qu’il renonçait à se prévaloir desdites autorisations, puis constater que ces autorisations cessaient de déployer leurs effets à compter du jugement, de sorte que le recours devenait sans objet et devait être rayé du rôle. Le montant de l’indemnité de procédure sollicité par les recourants ne respectait pas le principe de la proportionnalité. En tout état, il ne pouvait être condamné à verser une indemnité de procédure aux recourants puisque les autorisations d’abattage et de défrichage n’étaient pas litigieuses.

Le 18 juillet 2013, la commune s’en est rapportée à l’appréciation de la chambre administrative quant à la suite à donner au courrier du 24 juin 2013 des recourants.

Le 18 juillet 2013 également, l’office s’est déterminé. Le courrier du 5 juin 2013 transmis par la DGGC valait renonciation à l’autorisation de construire. Concernant les conclusions en allocation de dépens, le TAPI avait rejeté leur recours et si la procédure initiée devant la chambre administrative prenait fin, c’était uniquement parce que ces recours étaient devenus sans objet. Les prétentions de l’association et des autres recourants qui dépassaient largement le maximum prévu par le règlement devaient être rejetées.

Le 29 juillet 2013, à réception d’une lettre de clôture adressée par le juge délégué, les recourants lui ont écrit. Ils relevaient que l’OGC, requérant et bénéficiaire de l’autorisation DD 103’181-1, ne s’était pas prononcé. Peut-être était-il possible que celui-ci n’ait pas été interpellé. Il était très important pour eux d’avoir la confirmation que l’Etat de Genève renonce définitivement à réaliser la route provisoire.

Par courrier du 6 août 2013, la DGGC s’est déterminée. Aucune notification ne lui avait été faite concernant l’affaire visée sous rubrique. Elle confirmait l’envoi, le 5 juin 2013, d’un courrier à l’office à teneur duquel elle faisait part de la renonciation de l’Etat de Genève à la mise en œuvre de l’autorisation de construire DD 103’181-1 du 23 août 2010, soit à la construction de la route provisoire.

Le 14 août 2013, le DU a persisté dans ses précédentes écritures.

Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

Interjeté dans le délai légal et devant l’autorité judiciaire compétente, le recours est recevable sous cet angle (art. 132 al. 1 de loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

Dans la mesure où la recevabilité du recours des quatre voisins, personnes physiques, est acquise, celle du recours de l’association souffrira de rester ouverte.

La renonciation à un droit est possible de la part d’un administré pour tous les droits pour lesquels celui-ci a un libre pouvoir de dispositions sur la prétention ou son objet. Tel est en particulier le cas lorsque le droit s’éteint faute d’intervention de son titulaire, notamment par prescription ou péremption (P. MOOR / E. POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, n. 1.3.4.1 p. 109 et 110). La possibilité d’assortir le constat d’une telle renonciation à des charges est possible pour éviter des abus de droit.

L’administration ne peut pas renoncer à la mise en œuvre d’une compétence. Elle est en règle générale tenue d’exécuter les décisions qu’elle a prises sauf à les révoquer (P. MOOR / E. POLTIER, op.cit., p. 111). Le cas d’espèce ne correspond pas à une telle situation. Ce n’est pas l’autorité administrative qui a délivré l’autorisation qui veut y renoncer mais celle qui l’a reçue. Dans de telles circonstances, il y a lieu d’admettre que l’autorité administrative titulaire de l’autorisation détient un droit à une telle renonciation. Elle se trouve en effet dans la situation de tout titulaire d’une autorisation de construire, qu’il s’agisse d’un administré privé ou d’une collectivité publique, qui doit l’exercer dans le délai de prescription de deux ans de l’art. 4 al. 5 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), mais qui peut aussi y renoncer.

La chambre de céans donnera donc acte au DIME, soit pour lui à la DGGC, de ce qu’il renonce définitivement à se prévaloir de l’autorisation de construire DD 103’181-1 du 23 août 2010 ainsi qu’aux autorisations d’abattage de défrichement qui y sont liées. Lesdites autorisations cesseront de déployer leur effet à compter de l’entrée en force du présent arrêt. Le recours interjeté contre le jugement du TAPI du 11 mars 2013 devenant sans objet, ledit jugement n’étant jamais entré en force et n’ayant pas acquis autorité de chose jugée, la cause sera rayée du rôle.

Même si la décision de renoncer à la réalisation de la route provisoire est de nature politique, étant apparemment liée à la capacité financière de l’Etat, il n’en demeure pas moins que la présente issue est consécutive à la procédure de recours engagée par les recourants, qui ont dû recourir aux services d’un avocat. Il est donc conforme à l’art. 87 al. 2 LPA de leur allouer une indemnité de procédure pour couvrir les frais qu’ils ont dû engager dans le cadre du recours qu’ils ont interjeté devant la chambre de céans. Dite indemnité sera fixée en application du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03). Selon une jurisprudence constante (ATA/554/2009 du 3 novembre 2009 ; ATA/236/2009 du 12 mai 2009), elle peut ne constituer qu’une participation auxdits honoraires et elle est limitée à CHF 10’000.- par l’art. 6 RFPA.

La juridiction dispose d’un large pouvoir d’appréciation, non seulement quant au principe de l’octroi d’une telle indemnité mais aussi quant à sa quotité. La décision fixant le montant des dépens n’a en principe pas besoin d’être motivée. Cependant, elle doit échapper au grief d’arbitraire (ATF 114 Ia 332 ; ATA/554/2009 précité ; ATA/67/2009 du 5 février 2009 ; ATA/439/2007 du 27 août 2007).

Aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA). En l’espèce, le temps consacré par le mandataire des recourants à ces diverses procédures donne une indication de l’ampleur de celles-ci mais l’indemnité ne constituant qu’une participation aux honoraires, comme exposé ci-dessus, la totalité des heures mentionnées, au tarif horaire pratiqué, ne saurait être prise en considération. La chambre administrative arrêtera donc à CHF 2’000.- le montant de l’indemnité de procédure qui leur sera allouée, laquelle sera mise à la charge de l’Etat de Genève, la commune de Plan-les-Ouates s’en étant rapportée à justice devant la présente instance (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

donne acte au département de l’intérieur, de la mobilité et de l’environnement, soit pour lui à la direction générale du génie civil, de ce qu’il renonce à se prévaloir de l’autorisation de construire DD 103’181-1 délivrée par le département de l’urbanisme le 23 août 2010 ainsi que des autorisations d’abattage d’arbres et de défrichement, délivrées le même jour, qui y sont liées ;

dit que ladite renonciation entrera en force à l’issue du délai de recours contre le présent arrêt ;

dit que de nouvelles autorisations devront être requises de l’autorité compétente si l’exécution des mêmes travaux était décidée ;

cela fait,

raye la cause du rôle ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue à l’Association pour la sauvegarde du site de la Chapelle, Madame Noëlle Deletraz, Madame Aline Rossier Charosky, Monsieur Alain Perrottet et Monsieur Alain Seemuller, pris conjointement et solidairement, une indemnité de procédure de CHF 2’000 .-, à la charge de l’Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nicolas Wisard, avocat des recourants, à Me François Bellanger, avocat de la commune de Plan-les-Ouates, au département de l’urbanisme, au département de l’intérieur, de la mobilité et de l’environnement, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

M. Rodriguez Ellwanger

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :