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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3257/2009

ATA/662/2012 du 02.10.2012 sur DCCR/1276/2010 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 09.11.2012, rendu le 28.01.2013, REJETE, 2C_1104/2012
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3257/2009-PE ATA/662/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 octobre 2012

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Dominique de Weck, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 août 2010 (DCCR/1276/2010)


EN FAIT

1. Monsieur A______, ressortissant du Kosovo, est né le ______ 1963.

2. Ses quatre enfants, nés de son union avec Madame S______, se prénomment F______ (né le ______ 1990), B______ (née le ______ 1991), C______ (né le ______ 1992) et D______ (né le ______ 1997).

3. Le 25 août 2003, M. A______ a déposé une demande d’asile auprès de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, à l'adresse 45, rue Robespierre, 94126, Fontenay-sous-Bois, en France.

4. Le 9 janvier 2004, M. A______ a été interpellé par la gendarmerie genevoise car il séjournait illégalement à Genève.

Selon sa déclaration, prise le même jour, il faisait du tourisme. Il savait toutefois qu'il devait bénéficier d'un passeport muni d'un visa valable pour venir en Suisse. Son épouse et ses quatre enfants vivaient en ex-Yougoslavie. Il n'avait pas de parenté domiciliée en Suisse. Il avait déjà eu affaire aux services de police suisses pour des faits similaires.

5. Le 8 mars 2004, l’office fédéral de l’immigration, de l’intégration et de l’émigration, devenu depuis l’office fédéral des migrations (ci-après : ODM), a prononcé contre lui une mesure d’interdiction d'entrée en Suisse valable jusqu'au 7 mars 2006.

6. Par jugement du 20 octobre 2004, le Tribunal du district de Gjilan (Kosovo) a dissous le mariage de Mme et M. A______.

7. Le 6 décembre 2004, M. A______ a épousé à Genève Madame W______ (ci-après : Mme W______), née le ______ 1952 et ressortissante suisse.

8. Le 14 décembre 2004, Mme W______ a déposé une demande d'autorisation de séjour dans le cadre du regroupement familial auprès de l'office cantonal de la population (ci-après : OCP).

9. Le 1er juin 2005, Mme W______ a écrit à l'OCP. Elle sollicitait la levée de l’interdiction d’entrée qui frappait son mari, afin que le couple puisse commencer une vie normale. Un employeur était disposé à l’engager.

10. Le 1er juillet 2005, l'OCP a autorisé M. A______ à travailler auprès de T______ S.à r.l., à Genève, en qualité de peintre, jusqu'à droit connu sur sa demande d'autorisation de séjour.

11. Le 17 août 2005, l'OCP a informé Mme W______ qu’il était disposé à délivrer une autorisation de séjour à M. A______ dans le cadre du regroupement familial. Il soumettait le dossier de son époux à l’ODM, en vue de lever la mesure d'interdiction d'entrée et de lui délivrer un visa d'entrée en Suisse.

12. Le 6 octobre 2005, l'OCP a demandé à Mme W______ d'inviter son époux à se présenter auprès de la représentation suisse à Pristina afin d'y déposer une demande d'autorisation d'entrée, ainsi que son acte de divorce dûment traduit.

13. M. A______ a répondu à l'OCP le 16 novembre 2005, par le biais de son conseil. Il vivait en Suisse depuis près d'une année, ______, rue de X______, au domicile de son épouse. Il était disproportionné de lui demander de se rendre à Pristina. Une autorisation de séjour devait lui être délivrée en raison de son mariage avec une ressortissante suisse, de même que l'autorisation de travailler auprès de l'entreprise K______ S.A. Il aspirait à vivre sereinement son union conjugale.

14. Le 23 novembre 2005, l'OCP a accusé réception de ce courrier.

15. Le 1er décembre 2005, l'OCP a reçu un courrier anonyme l'informant que M. A______ avait contracté un mariage de complaisance pour lequel il avait payé CHF 25'000.-. Si l'OCP faisait surveiller l'intéressé, il apparaîtrait qu’il n'était jamais avec sa femme. Il était marié au Kosovo, où il avait quatre enfants.

16. Le 23 décembre 2005, sur proposition de l'OCP, l’ODM a annulé la mesure d'éloignement prononcée à l'encontre de M. A______. Le droit d'octroyer une autorisation de séjour ou d'établissement appartenait en premier lieu aux autorités cantonales compétentes. M. A______ était invité à rester en contact avec l'OCP pour toute question complémentaire.

17. Le 5 janvier 2006, faisant suite au courrier de l'ODM, M. A______ a requis l'OCP de lui délivrer une autorisation de séjour « en bonne et due forme ».

18. Selon une feuille d’enquête de l'OCP du 10 février 2006, Mme W______ avait été inscrite jusqu'au 14 juin 2005 dans le registre de la brigade des mœurs en tant que prostituée. A cette date, elle avait annoncé une cessation d'activité. Elle était domiciliée au ______, rue de X______. Seul son nom figurait sur la boîte aux lettres à cette adresse, mais une tierce personne y logeait également, qui avait précisé que Mme W______ n’y « passait que de temps à autre ». Cette dernière avait rappelé l’enquêteur en lui précisant que M. A______ habitait chez « un ami » à la rue de Y______, et recherchait un logement pour qu’ils puissent faire vie commune. Elle ignorait le numéro de la rue et le nom de l'ami en question.

19. Le 15 mars 2006, l'OCP a écrit à M. A______. Il avait appris qu'il ne vivait pas avec son épouse et l'invitait à annoncer son adresse et à joindre une copie de son contrat de bail ou de sous-location. Il souhaitait savoir si le couple A______ avait l'intention de vivre sous le même toit.

20. Le conseil de M. A______ a répondu le 31 mars 2006. Le studio était occupé par Mme W______ et sa colocataire avant le mariage des époux. Il était trop petit pour que M. A______ puisse l'intégrer. Ce dernier vivait chez une connaissance à la rue de Y______ dans l'attente de trouver un logement approprié. Les époux avaient entamé des démarches auprès de la Gérance immobilière municipale et de la Direction du logement pour trouver un logement. Dans l'intervalle, ils passaient tous leurs loisirs ensemble. M. A______ sollicitait à nouveau la délivrance d'une autorisation de séjour.

21. Par courrier du 8 mai 2006, l'OCP a enjoint M. A______ à lui faire connaître son adresse et à présenter une copie de son contrat de bail. Le logement sis au ______, rue de X______ ne pouvait pas être considéré comme étant l'adresse officielle du couple.

22. Le 8 juin 2006, les époux A______ ont informé l'OCP qu'ils avaient emménagé ensemble dans une chambre au restaurant « I______ », 1213 Petit-Lancy. Mme W______ avait déjà entrepris toutes les démarches pour annoncer son changement d'adresse. M. A______ restait dans l'attente de son autorisation de séjour.

23. Le 2 août 2006, l’OCP a délivré à M. A______ une autorisation de séjour au titre du regroupement familial, valable jusqu’au 18 mars 2007.

24. Par courrier du 3 novembre 2006, l'OCP a validé une demande de changement d’employeur et de renouvellement d'autorisation de séjour pour M. A______, sur demande de L______ S.A.

25. Par courrier du 20 décembre 2006, l'OCP a demandé à l'épouse du recourant leurs recherches en vue de trouver un appartement.

26. L'OCP a réitéré cette demande le 7 février 2007, octroyant un délai au 22 février 2007.

27. Le 6 mars 2007, Mme W______ a répondu à l'OCP que les époux vivaient depuis le 1er mars 2007 dans un appartement de 4 pièces à la rue des E______. Elle a joint à son courrier un contrat de bail au nom de M. A______.

28. Le 19 juin 2007, les époux A______ ont annoncé à l’OCP qu’ils avaient déménagé à l’adresse ______, promenade des Z______ au 5ème étage.

29. Le 30 avril 2007, l'entreprise L______ S.A. a informé l'OCP que M. A______ ne travaillait plus à son service depuis cette date.

30. Selon une feuille d'enquête de l'OCP datée du 27 septembre 2007, Mme W______ poursuivait son activité de prostitution et recevait ses clients à l'Hôtel Q______, où elle avait loué une chambre « jusqu'au 20 juillet 2007 ». Pour la brigade des mœurs, elle habitait toujours au ______, rue de X______. Selon l’enquêteur de l’OCP, son nom figurait sur la boîte aux lettres.

Une responsable du restaurant « I______ » avait reconnu M. A______ sur photo. Il était le seul occupant de la chambre. Le service postal avait informé l'OCP que le courrier était seulement destiné à M. A______, sauf pour ce qui concernait quelques lettres officielles à l'intention de son épouse.

Les époux A______ avaient été co-titulaires d'un logis au ______, rue des E______, mais ils n'y étaient restés qu'un mois. Ils auraient ensuite trouvé un logement plus grand à Meyrin, au ______, promenade des Z______.

A cette dernière adresse, lors du premier passage de l’enquêteur, le 16 août 2007, le nom de M. A______ ne figurait ni sur la boîte aux lettres, ni sur la porte de l'appartement. La régie avait indiqué que les titulaires du bail de l'appartement étaient des tiers, et qu'aucun contrat de sous-location n’avait été établi.

Lors d'un second passage de l’enquêteur, le 10 septembre 2007, une étiquette avait été rajoutée sur la boîte aux lettres, sur laquelle figuraient les noms « A______, W______ ». M. A______ était arrivé vers 19h. Il s'exprimait avec peine en français et soutenait que son nom et celui de son épouse figuraient sur la boîte aux lettres depuis leur arrivée à cette adresse. Il ignorait à quelle heure son épouse serait de retour. Selon l'enquêteur de l'OCP, l'intéressé était gêné par ces questions. Lorsqu'il avait commencé son contrôle, l’enquêteur avait entendu les voix d’autres personnes dans l’appartement. D'après M. A______, il s'agissait de connaissances, qui lui rendaient visite.

Selon l’enquêteur, les époux A______ ne semblaient pas faire ménage commun.

31. Le 17 octobre 2007, Mme W______ a été auditionnée à l’OCP. Depuis le début de l’année, elle avait emménagé successivement au restaurant « I______ », à la rue des E______, puis à la promenade des Z______. Elle n’avait jamais habité dans la chambre louée au restaurant précité car elle habitait chez une amie dont elle s’occupait du chien. Son époux ne travaillait pas. Elle continuait à se prostituer. Son mari voulait faire venir ses quatre enfants en Suisse.

32. Le 20 novembre 2007, l'OCP a demandé au tiers contractant du bail de l'appartement du ______, promenade des Z______ de confirmer son adresse et de produire une copie de son contrat de bail.

33. Par courrier du 22 janvier 2008, M. A______ a sollicité de l'OCP le renouvellement de son permis de séjour.

34. Par courrier du 10 mars 2008, M. A______ a rappelé à l'OCP la teneur de son précédent courrier. Il était à la recherche d'un emploi.

35. Le 18 avril 2008, alors qu'elle était hospitalisée au service de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), Mme W______ a formé auprès du Tribunal de première instance une requête en mesures protectrices de l'union conjugale, concluant à la suspension de la vie commune pour une durée indéterminée. La vie commune avec son époux avait généré de grandes difficultés. Leurs divergences de mentalité étaient la cause de graves malentendus qui les empêchaient de vivre ensemble. Il leur fallait du temps pour faire le point sur leur situation. Ses graves problèmes de santé ne s'amélioraient pas dans ce climat très tendu. Elle se trouvait complètement démunie et une décision urgente était nécessaire.

36. Le 25 juin 2008, le conseil de M. A______ a informé l'OCP que celui-ci était employé par M______ S.A., ainsi que cela ressortait du formulaire transmis à l'OCP le 9 mai 2008. Il sollicitait une nouvelle fois le renouvellement du permis de séjour de son mandant, afin que ce dernier puisse rendre visite à sa famille au Kosovo.

37. Le conseil de M. A______ a repris les termes de son précédent courrier dans une lettre adressée à l'OCP, datée du 22 juillet 2008.

38. Selon un contrat de travail daté du 31 juillet 2008 transmis à l’OCP, M. A______ a été employé par P______ S.A. en qualité de peintre dès le 1er août 2008. Selon un autre certificat, il avait travaillé en qualité d'aide-peintre entre le 1er mai 2008 et le 30 juin 2008 pour l'entreprise N______ S.à r.l.

39. Le 9 septembre 2008, le conseil de M. A______ a sollicité une nouvelle fois de l’OCP la prolongation de son permis de séjour.

40. Le 19 septembre 2008, l'OCP a indiqué à M. A______ que l'instruction de son dossier n'était pas terminée, mais qu'il serait informé de son suivi par courrier.

41. A cette date, l'OCP a demandé à Mme W______ de se présenter en ses bureaux le 25 septembre 2008 pour un examen de situation. Mme W______ n'a pas donné suite à cette convocation.

42. Par jugement de mesures protectrices de l'union conjugale du 25 septembre 2008, le Tribunal de première instance a autorisé les époux A______ à vivre séparés.

43. Le 15 octobre 2008, Mme W______ a informé l'OCP qu'elle était domiciliée au ______, rue du G______, à Genève.

44. Le 19 novembre 2008, M. A______ a informé l'OCP qu'il avait déménagé et était domicilié au ______, rue de la H______, depuis le 1er novembre 2008. Ce changement d'adresse concernait ses trois enfants mineurs : B______, C______ et D______ A______, mais pas son épouse.

45. Le 3 décembre 2008, l'OCP a demandé à Mme W______ pour quelles raisons elle n'avait pas le même domicile que son époux.

46. Par courrier du 29 décembre 2008, Mme W______ a confirmé à l'OCP qu'elle était séparée de son époux depuis le 25 septembre 2008. Elle espérait que M. A______ aurait « enfin son permis B » et joignait un certificat médical attestant qu'elle avait été hospitalisée aux HUG à partir du 31 octobre 2007. Sa capacité de travail serait totale dès le 29 septembre 2008. Un autre certificat médical indiquait qu'elle avait été hospitalisée aux HUG entre le 26 novembre 2008 et le 16 décembre 2008.

47. Par courrier du 13 janvier 2009, l'OCP a informé M. A______ que sa séparation d'avec son épouse était connue de ses services. Dès lors que son mariage et le fait de vivre en communauté conjugale lui avaient permis de solliciter une autorisation de séjour, cette séparation ne l’autorisait plus à en revendiquer le maintien. Considérant que sa présence en Suisse ne se justifiait par aucun motif déterminant, l'OCP n'avait pas l'intention de renouveler son autorisation de séjour. Un délai de trente jours était imparti à l’intéressé pour faire valoir son droit d'être entendu.

48. Par courrier du 20 janvier 2009, le conseil de M. A______ a demandé à l'OCP de lui adresser ce courrier en rappelant que son mandant avait élu domicile en son étude. Un jugement sur mesures protectrices de l'union conjugale avait été prononcé, qui autorisait la séparation.

49. Le 27 janvier 2009, l'OCP a adressé au mandataire de M. A______ une lettre d’une teneur similaire à celle du 13 janvier 2009.

50. Le 1er février 2009, Mme W______ a informé l'OCP qu'elle était domiciliée à l'Hôtel Q______ en poste restante.

51. Par formulaire signé le 9 février 2009, M. A______ et son nouvel employeur, O______ S.A., ont demandé à l'OCP la validation de la prise d'emploi du recourant auprès de cette société.

52. Le 3 février 2009, Mme W______ a informé l'OCP qu'elle était désormais domiciliée à l’adresse ______, rue de X______.

53. Le 2 mars 2009, M. A______ a répondu au courrier de l’OCP du 27 janvier 2009. Sa situation matrimoniale trouvait son origine dans les graves problèmes de santé de son épouse, qui avait été hospitalisée. Elle était restée plus de huit mois à l'hôpital et avait ensuite préféré se reposer et ne pas retourner au foyer conjugal. Il avait l'intention de reconstruire son foyer lorsqu'elle se sentirait mieux et ne souhaitait pas mettre fin à son mariage. La séparation momentanée faciliterait les retrouvailles des époux. Il était très bien intégré à Genève, où il avait toujours travaillé, n'avait pas été au bénéfice de l'assistance sociale ni eu de problème avec la justice. Il souhaitait continuer à vivre en Suisse où il avait construit son foyer conjugal et sa vie. L’union conjugale était entière, même si pour des « raisons physiques » Mme W______ s’était constituée un domicile séparé. Une reprise de la « cohabitation » était à prévoir. Il souhaitait que son permis de séjour soit renouvelé.

54. Par courrier du 24 mars 2009, l'OCP a demandé à Mme W______ si elle souhait reprendre la vie commune avec son époux.

55. Le 28 mars 2009, Mme W______ a répondu par la négative.

56. Le 27 avril 2009, l'OCP a requis du conseil de M. A______ de pouvoir se prononcer sur le degré d'intégration de son mandant, et l'invitait à lui faire parvenir un extrait de son casier judiciaire, un certificat d'études confirmant un niveau de français de type A2, son contrat de travail ainsi que les justificatifs de ses moyens financiers actuels.

57. Le 5 mai 2009, l'office des poursuites a indiqué à l'OCP que M. A______ faisait l'objet de quatre poursuites dans le canton de Genève pour un montant d’environ CHF 2’600.-.

58. Par courrier du 20 mai 2009, le conseil de M. A______ a adressé à l'OCP un extrait de casier judiciaire, un diplôme d'aptitude professionnelle établi au Kosovo, ainsi qu’un formulaire individuel de renouvellement de son autorisation de travail signé par P______ S.A., entreprise de faux-plafonds et cloisons.

59. Le 28 mai 2009, le mandataire de M. A______ a adressé à l'OCP une attestation de l'Université populaire albanaise établie le 26 mai 2009, selon laquelle l'intéressé suivait à cette période un cours de français débutant à raison de deux fois deux heures par semaine.

60. Par décision du 6 août 2009, l'OCP a refusé de prolonger l'autorisation de séjour de M. A______ et lui a imparti un délai au 6 novembre 2009 pour quitter la Suisse.

M. A______, qu’il a désigné à une reprise sous le nom de « Monsieur J______ » dans sa décision, avait obtenu son autorisation de séjour à la suite de son mariage avec Mme W______. Il avait pu ainsi obtenir la levée de la mesure d’interdiction d’entrée en Suisse qui le frappait.

Le couple s’était séparé le 25 septembre 2008. L'union conjugale avait certes duré plus de trois ans, mais ce dernier élément n'était pas le seul déterminant pour le maintien de l'autorisation de séjour : l’intégration de l’étranger devait encore être considérée comme réussie. Or, M. A______ était entré illégalement en Suisse, était connu de l'office des poursuites et son niveau de français était faible. La durée de son séjour devait également être relativisée par rapport aux quarante années passées au Kosovo. La réintégration dans son pays d'origine ne poserait pas de problème majeur, du fait que ses enfants y résidaient.

Bien qu’il n’ait pas été prouvé que le mariage des époux ait été fictif, il existait un doute sur la volonté réelle de l’intéressé de créer une réelle union conjugale avec Mme W______. Ce doute se fondait sur de sérieux indices au regard des directives de l’ODM relatives à l’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) : le mariage était intervenu alors qu'une procédure de renvoi était en cours, les fiancés ne se connaissaient que depuis peu de temps et le fiancé disposant du droit de présence appartenait à un groupe marginal « alcoolisme, toxicomanie, prostitution, etc. ». Le fiancé étranger n'avait pas de lien avec la Suisse. Mme W______ était connue de la brigade des mœurs et elle avait poursuivi son activité de prostituée durant les années de mariage. Elle avait conservé son studio à la rue de X______, qu'elle occupait avec une colocataire, jusqu'en juin 2006. De plus, elle n'envisageait pas de reprendre la vie commune avec M. A______ et leur séparation était définitive.

Il n'existait aucune raison personnelle majeure au sens de la loi justifiant le maintien de l'autorisation de séjour de l'intéressé. En outre, il n’apparaissait pas que l'exécution de son renvoi soit impossible, illicite ou qu’elle ne puisse être raisonnablement exigée.

61. M. A______ a recouru le 7 septembre 2009 auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), devenue le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI), concluant à l'annulation de la décision attaquée et au renouvellement de son autorisation de séjour, avec suite de dépens. Il demandait également que « l'effet suspensif lui soit accordé ».

Le fait que l’OCP l’ait désigné sous le nom de M. J______ était la preuve que la décision de cette autorité était basée sur des informations concernant un tiers. Elle contenait des affirmations fausses, voire calomnieuses, en affirmant qu'il était fiancé et pas marié, et qu'il faisait partie d'un groupe marginal. Son union durait depuis presque cinq ans et il n'avait jamais appartenu à un groupe marginal. Il travaillait depuis des années sur des chantiers et n'avait jamais connu de période creuse. La décision ne faisait aucune mention de l'extrait de son casier judiciaire, lequel était vierge, et de son contrat de travail, qui démontraient qu'il était bien intégré. Elle se limitait à survoler sa situation et comportait des erreurs. Son droit d’être entendu avait été violé, ce qui devait conduire à l’annulation de cette décision. Son épouse avait certes conservé son studio à la rue de X______, mais elle l'utilisait uniquement à des fins professionnelles. Si elle y avait travaillé, c'était à son insu. Il parlait de mieux en mieux le français. Ses liens avec la Suisse étaient forts et il souhaitait y rester.

62. L’OCP a répondu le 18 novembre 2009, concluant au rejet du recours. La référence à M. J______ était une erreur de plume mais la situation rappelée était celle du recourant. Celui-ci ne cohabitait officiellement plus avec son épouse depuis le mois de septembre 2008 et cette dernière avec requis la suspension de la vie commune pour une durée indéterminée. On pouvait douter que l'union conjugale ait duré au moins trois ans. Il ne ressortait du dossier ni l'existence effective d'une relation conjugale ni la volonté de la conserver. Depuis leur mariage, les époux n'avaient pas ou peu habité ensemble. Ils avaient tenu des propos contradictoires quant à l'historique de leur domiciliation et leurs affirmations n'avaient pas été corroborées par les témoins entendus. La constitution de domiciles séparés n'avait pas été provisoire.

Les indices déterminés par la jurisprudence et les directives fédérales faisaient douter de la volonté réelle du recourant de créer une réelle union conjugale avec son épouse.

La question de la réalité du mariage pouvait rester ouverte, puisque le recourant ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration réussie. Il parlait mal le français. Il avait traversé de longues périodes de chômage et faisait l'objet de plusieurs poursuites. Avant son mariage, il avait séjourné illégalement en Suisse et avait fait l'objet d'une interdiction d'entrée. Il avait « oublié » d'annoncer ses changements d'adresse et avait tenté d'induire l'enquêteur de l'OCP en erreur, tel que cela ressortait du rapport d'enquête du 26 septembre 2007. Il n'avait pas non plus invoqué de raisons personnelles majeures lui permettant d'obtenir le renouvellement de son autorisation de séjour. Enfin, l'intéressé ne résidait en Suisse que depuis cinq ans. Il avait donc passé la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine, où il avait grandi et s'était forgé sa personnalité. L'ensemble de sa famille y résidait, et il était retourné dans sa patrie à réitérées reprises, comme le démontraient les relevés téléphoniques produits ainsi que ses demandes de visa de retour. En 2004, il avait d'ailleurs déposé des demandes de regroupement familial en faveur de deux de ses enfants. Il n'avait jamais été au bénéfice de l'assistance sociale, mais n'avait pas de qualifications professionnelles particulières.

63. M. A______ et l’OCP ont été auditionnés le 31 août 2010 par la commission. Selon le premier, il ne vivait plus avec son épouse « depuis 2008 ». Il souhaitait cependant reprendre la vie commune. Le 8 juin 2006, ils avaient trouvé une chambre au restaurant « I______ » afin de faire ménage commun. Avant cette date, M. A______ vivait dans un studio prêté par un ami à la rue de Y______. Il faisait déjà vie commune avec son épouse à cette époque. Il était au chômage depuis le 10 mars 2010. Trois employeurs souhaitaient l'engager mais le contrat ne pouvait pas être conclu, à défaut d'autorisation de séjour. Son fils F______ était arrivé en Suisse en 2008 et s'était marié avec une personne au bénéfice d'un permis C. Ses trois autres enfants vivaient au Kosovo.

Mme W______, bien que dûment convoquée, ne s'est pas présentée à cette audience.

64. Par décision du 31 août 2010, la commission a rejeté le recours de M. A______.

De nombreux indices tendaient à démontrer l'existence d'un mariage de complaisance. Les époux A______ s'étaient mariés alors que le recourant faisait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse. Le couple n'avait pas fait ménage commun durant les dix-huit mois qui ont suivi la célébration du mariage, au motif que le studio occupé par l'épouse à la rue de X______ avec une colocataire était trop petit. Ensuite, les époux avaient indiqué avoir emménagé dans une chambre au restaurant « I______ ». Or, le responsable du restaurant avait affirmé que l'épouse du recourant n'y avait jamais habité. Cette dernière avait fourni une explication peu crédible à ce propos : à cette époque, elle s'absentait souvent pour s'occuper du chien d'un ami. Pendant le mois durant lequel les époux ont été co-titulaires d'un bail à la rue des E______, le nom de Mme W______ figurait toujours sur la boîte aux lettres du studio de la rue de X______. Il n'a pas été établi non plus que les époux aient vécu ensemble à Meyrin car, lors d'un premier passage d'un enquêteur de l'OCP, leurs noms ne figuraient pas sur la boîte aux lettres et, lors d'un deuxième passage, les noms avaient été ajoutés mais l'épouse du recourant n'était pas présente. Mme W______ appartenait à un groupe marginal. De plus, le couple devait rencontrer des difficultés pour communiquer : l'enquêteur de l'OCP avait constaté que le recourant parlait à peine le français, et il ne ressortait pas du dossier que son épouse parlait le kosovar.

Il était établi que le couple n'avait pas fait ménage commun durant les dix-huit mois qui ont suivi la célébration du mariage. L'argument selon lequel le studio qu'occupait Mme W______ avec une colocataire était trop petit n'était pas un motif justifiant une exception au principe de la vie commune. En revanche, la commission relevait qu’elle avait préféré partager son studio avec une tierce personne plutôt qu’avec son mari.

M. A______ ne pouvait pas se prévaloir d'une intégration réussie, alors qu'il séjournait en Suisse depuis plus de six ans. Il parlait le français avec difficulté. Il n'avait pas tissé de liens particulièrement étendus et étroits sur le plan social. Son intégration professionnelle ne pouvait pas être qualifiée d'exceptionnelle. Il se trouvait au chômage depuis le mois de mars 2010. Son comportement n'était pas exempt de tout reproche, puisqu'il était resté en Suisse en dépit d'une interdiction d'entrée prononcée à son encontre.

Après une période de réadaptation, M. A______ devait être en mesure de refaire sa vie au Kosovo, où il avait vécu la plus grande partie de son existence et où il possédait toutes les attaches culturelles et familiales, en particulier ses trois autres enfants. Il n'avait pas allégué que la poursuite de son séjour s'imposait pour des raisons personnelles majeures. Aucun élément concret ne permettait de retenir que l'OCP avait excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation.

La violation éventuelle du droit d'être entendu n'entraînait pas l'admission du recours. Le plein pouvoir d'examen de la commission réparait le vice par la procédure et l'instruction de la cause devant cette juridiction, puisque l'OCP ne s'était pas prononcé en opportunité.

65. Le 15 octobre 2010, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif, lequel est devenu dès le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la Cour de Justice (ci-après : la chambre administrative), contre la décision précitée reçue le 15 septembre 2010, concluant à son annulation ainsi qu’à celle de l'OCP du 6 août 2009. Son autorisation de séjour devait être prolongée. Il demandait également la restitution de l'effet suspensif à son recours, à titre de mesures provisionnelles.

Il avait toujours vécu avec son épouse, même si celle-ci avait conservé un appartement pour exercer ses activités professionnelles. Son épouse était sortie lors du seul contrôle de l'OCP et le contrôleur n'avait pas voulu l'attendre. Mme W______ avait souffert d'importants problèmes de santé et avait été hospitalisée. Un ami du recourant, Monsieur R______, pouvait attester qu’il était très attaché à son épouse et que leurs relations étaient très bonnes. Il avait construit son foyer conjugal et sa vie en Suisse, et souhaitait y rester. Il suivait toujours des cours pour améliorer son français. La décision de l'OCP prétendait faussement qu'il aurait été fiancé. De plus, il n'appartenait pas à un « groupe marginal ». Ces affirmations étaient calomnieuses. Son casier judiciaire était vierge et il avait été au bénéfice de contrats de travail, ce que l'OCP n'avait pas pris en compte. Il était bien intégré. Il souhaitait reprendre la vie commune avec son épouse. Les époux étaient très attachés l'un à l'autre et avaient vécu ensemble dès leur mariage. Ils n'avaient pas contracté un mariage de complaisance. L'intégration du recourant était réussie selon la loi.

66. Le 25 octobre 2010, la commission a transmis son dossier au Tribunal administratif en précisant qu'elle n'avait pas d'observations à formuler sur le recours précité.

67. A la même date, l'OCP ne s'est pas opposé pas à la requête du recourant en restitution de l’effet suspensif.

68. Par décision sur effet suspensif du 11 novembre 2010, le Tribunal administratif a constaté que la demande formée par le recourant étant sans objet, puisque le dépôt du recours entraînait ex lege la prolongation de l'effet suspensif, ce qui conduisait à prolonger le droit du recourant à séjourner en Suisse jusqu'à droit connu sur son recours.

69. Le 16 décembre 2010, l'OCP a transmis ses observations. La condition de ménage commun entre les époux n'était pas remplie, la communauté conjugale n'était pas « effectivement vécue » au sens de la jurisprudence. Le recourant était en bonne santé, et le Kosovo ne se trouvait pas en proie à une guerre, une guerre civile ou à des violences généralisées sur l'ensemble de son territoire.

70. Le 19 mars 2011, le Tribunal de première instance a prononcé le divorce des époux W______.

71. Le 6 février 2012, les parties ont été entendues lors d’une audience de comparution personnelle. Selon le recourant, il vivait chez son fils F______ à Meyrin. Celui-ci était marié et avait un enfant. Il était au chômage depuis 2011. Il avait de la famille au Kosovo. Il ne percevait pas de prestations de chômage et n'avait pas retrouvé d'emploi depuis la fin du mois d'octobre 2011.

La représentante de l'OCP a persisté dans ses conclusions. Il n’y avait jamais eu de véritable communauté conjugale des époux, ainsi que les enquêtes opérées par l'OCP l’avaient mis en évidence.

72. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction alors compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 -aLOJ ; 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 dans sa teneur au 31 décembre 2010.

3. La présente procédure est soumise à la LEtr, entrée en vigueur le 1er janvier 2008 et à ses dispositions d'exécution, dès lors que la décision de l'OCP de refuser le renouvellement du permis de séjour du recourant date du 6 août 2009 (Arrêt du Tribunal administratif fédéral C_2918/2008 du 1er juillet 2008 ; ATA/637/2010 du 14 septembre 2010 ; ATA/378/2010 du 1er juin 2010).

Le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, celle-ci ne connaît pas de l’opportunité d’une décision prise en matière de police des étrangers, dès lors qu’il ne s’agit pas d’une mesure de contrainte (art. 61 al. 2 LPA ; art. 10 al. 2 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers, du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

4. Selon l’art. 42 LEtr, le conjoint d’un ressortissant suisse a droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de la durée de sa validité à condition de vivre en ménage commun avec lui. Après un séjour légal ininterrompu de cinq ans, le conjoint a droit à l’octroi d’une autorisation d’établissement.

A teneur de l'art. 49 LEtr, l’exigence du ménage commun n’est pas applicable lorsque la communauté familiale est maintenue et que des raisons majeures justifiant l’existence de domiciles séparés peuvent être invoquées.

5. Selon l'art. 50 LEtr, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 et 43 subsiste dans les cas suivants :

a. l’union conjugale a duré au moins trois ans et l’intégration est réussie (art. 50 al. 1 let. a LEtr) ;

b. la poursuite du séjour en Suisse s’impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEtr) ; constituent de telles raisons, le fait que le conjoint soit victime de violences conjugales et que la réintégration sociale dans le pays d’origine semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEtr).

6. L’art. 77 de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) répète la teneur de l’art. 50 LEtr en précisant que l’étranger s’est bien intégré au sens de l’art. 50, al. 1 let. a, LEtr, notamment lorsqu’il respecte l’ordre juridique suisse et les valeurs de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), manifeste sa volonté de participer à la vie économique et d’apprendre la langue nationale parlée au lieu de domicile (art. 77 al. 4 let. a et b OASA).

7. Selon les directives et circulaires de l’ODM (domaine des étrangers, regroupement familial, version du 30 septembre 2011, ch. 6.14.2.1) qui ne lient pas le juge mais dont celui-ci peut tenir compte en vue d'assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré et pourvu qu'elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATA/565/2012 du 21 août 2012 consid. 8 et la jurisprudence citée), les considérations suivantes sont applicables après la dissolution de la communauté familiale :

« Afin d’éviter des cas personnels d’extrême gravité, le règlement du séjour reste, à certaines conditions, inchangé après la dissolution du mariage ou de la communauté familiale, lorsque l’intégration est avancée ou que des raisons personnelles majeures justifient la prolongation du séjour en Suisse.

La poursuite du séjour en Suisse peut s’imposer lorsque le conjoint demeurant en Suisse est décédé ou lorsque la réinsertion familiale et sociale dans le pays d’origine s’avère particulièrement difficile en raison de l’échec du mariage. Tel est notamment le cas lorsqu’il y a des enfants communs, étroitement liés aux conjoints et bien intégrés en Suisse. Il faut également prendre en considération les circonstances ayant conduit à la dissolution du mariage ou de la communauté conjugale.

En revanche, rien ne s’oppose à un retour dans le pays d’origine lorsque le séjour en Suisse a été de courte durée, que les personnes n’ont pas établi de liens étroits avec la Suisse et que leur réintégration dans le pays de provenance ne devrait pas poser de problème majeur ».

8. L’union conjugale au sens des art. 50 al. 1 let. a LEtr et 77 al. 1 let. a OASA suppose l’existence d’une communauté conjugale effectivement vécue durant trois ans (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_416/2009 du 8 septembre 2009, consid. 2.1.2 ; directives et circulaires de l’ODM précitées, ch. 6.15.1 p. 27).

9. L'existence d'une communauté conjugale effectivement vécue suppose l'unité du domicile conjugal. L'intéressé qui veut invoquer la poursuite de la communauté familiale malgré la séparation des domiciles doit justifier cette séparation par des raisons majeures (art. 49 LEtr; Arrêts du Tribunal fédéral 2C_845/2010 du 21 mars 2011 ; 2C_50/2010 du 17 juin 2010 consid. 2.2 et 2C_575/2009 du 1er juin 2010 consid. 3.5-3.7). Les notions d'union conjugale et de mariage ne sont pas identiques. Le mariage peut être purement formel, alors que l'union conjugale implique en principe la vie en commun des époux, sous réserve des exceptions mentionnées à l'art. 49 LEtr (ATF 2C_416/2009 du 8 septembre 2009 ; M. SPESCHA, Kommentar Migrationsrecht, 2008, n° 4 ad art. 50 LEtr). Ne constitue pas un motif valable au sens de l’art. 49 LEtr, la séparation à des fins de clarification de la relation. (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_575/2009 du 1er juin 2010). En outre, une séparation d'une certaine durée fait présumer que la communauté familiale a cessé d'exister (ATF 2C_575/2009 du 1er juin 2010 consid. 3.5, où la séparation avait duré plus d'une année).

10. Le recourant a épousé Mme W______ le 6 décembre 2004 et il en a divorcé le 19 mars 2011. Le mariage a formellement duré plus de six ans. Toutefois, c’est la durée de la vie commune qui représente l’élément relevant à déterminer pour statuer sur le droit à une prolongation du permis de séjour de l’ex-conjoint.

Mme W______ a indiqué à l’OCP être séparée de son époux le 25 septembre 2008, Si l’union conjugale, calculée à partir de la date du mariage, soit le 6 décembre 2004, a duré plus de trois ans en se référant à cette date de séparation, il n’en va pas de même de la communauté conjugale soit de la période pendant laquelle le recourant et son épouse ont effectivement formé une communauté conjugale au sens de la jurisprudence rappelée ci-dessus. De fait, ceux-ci n’ont pas vécu ensemble durant les dix-huit premiers mois qui ont suivi leur mariage. S’ils se sont formellement domiciliés en juin 2006 dans une chambre située à l’étage d’un restaurant en 2006, Mme W______ a admis auprès de l’enquêteur de l’OCP qu’elle n’y avait jamais habité, confirmant ce que l’exploitant du restaurant avait déjà indiqué à celui-ci. S’il doit être retenu que les époux ont conjointement loué pendant un mois un appartement à la rue des E______ puis qu’ils se sont annoncés auprès de l’OCP comme s’installant à la promenade des Z______ à Meyrin, et si Mme W______ a confirmé ces déménagements, l’enquête effectuée en 2007 à la demande de l’OCP n’a pas permis de confirmer qu’elle ait réellement vécu avec son époux dans l’appartement de Meyrin. Finalement, le 18 avril 2008, Mme W______, hospitalisée depuis novembre 2007, a sollicité en urgence le droit de se constituer un domicile séparé en raison de sa grave mésentente avec le recourant, dont elle se plaignait qu’il laissait dans le dénuement.

Les éléments qui précèdent font douter que le recourant ait formé une fois une véritable communauté conjugale avec son épouse. Quoi qu’il en soit, même en admettant - hypothèse la plus favorable au recourant - que les époux ont vécus ensemble du 8 juin 2006, date de leur installation à l’étage du restaurant  « I______ » jusqu’au 25 septembre 2008, date à laquelle ils ont été autorisés à se constituer un domicile séparé, sans jamais qu’ils reprennent la vie commune, la communauté conjugale qu’ils ont pu former pendant cette période n’a pas duré plus de deux ans et trois mois, soit un temps inférieur aux trois ans exigés par l’art. 50 al. 1 let. a LEtr. Sur cette seule base, l’OCP était fondé à refuser de renouveler l’autorisation de séjour du recourant.

11. Selon l’OCP, l’autorisation de séjour devait être également refusée parce que l’intégration du recourant n’est pas réussie, condition que l’art. 50 al. 1 let. a LEtr impose. En l’occurence, ce dernier est au chômage depuis mars 2010 et n’a pas pu, depuis qu’il réside en Suisse, trouver un emploi stable dans une entreprise, alors qu’il a été autorisé à travailler par l’OCP pendant la durée de la procédure. En outre, il ne justifie pas d’une grande intégration sociale, ne maîtrisant qu’imparfaitement le français. Même si l’examen de ce second motif de refus peut paraître superflu vu l’absence de vie commune suffisamment longue, la chambre administrative constate, à l’instar du TAPI, que le recourant ne remplit pas non plus les critères d’intégration énoncés à l’art. 77 al. 4 OASA, ce qui conforte le bien-fondé de la décision du 6 août 2009.

12. Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEtr, tout étranger dont l’autorisation est refusée, révoquée ou qui n’est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyé. La décision de renvoi est assortie d’un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEtr).

13. Le renvoi d’un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l’exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigé (art. 83 al. 1 LEtr). La portée de cette disposition étant similaire à celle de l’ancien art. 14a de la loi fédérale sur le séjour et l’établissement des étrangers du 26 mars 1931(LSEE - RS 142.20), la jurisprudence rendue et la doctrine en rapport avec cette disposition légale restent donc applicables (ATA/244/2012 du 24 avril 2012 ; ATA/750/2011 précité ; ATA/848/2010 du 30 novembre 2010).

Le renvoi d’un étranger n’est pas possible lorsque celui-ci ne peut quitter la Suisse pour son Etat d’origine, son Etat de provenance ou un Etat tiers, ni être renvoyé dans un de ces Etats (art. 83 al. 2 LEtr). Il n’est pas licite lorsqu’il serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83 al. 3 LEtr). Il n’est pas raisonnablement exigible s’il met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr).

En l’espèce, le recourant n’est pas en droit d'obtenir une autorisation de séjour. La conséquence légale d’une telle décision est qu’il doit être renvoyé de Suisse. Il ne découle ni de ses déclarations ni du dossier que son renvoi serait illicite, inexigible ou impossible au sens de l’art. 83 LEtr. C’est donc à juste titre que l’OCP a ordonné le renvoi de Suisse de M. A______.

14. Le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe. Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 octobre 2010 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 31 août 2010 ;

au fond :

le rejette ;

confirme la décision du 6 août 2009 de l'office cantonal de la population ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il ne lui est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Dominique de Weck, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'à l'office fédéral des migrations.

 

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 

 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.