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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4688/2009

ATA/475/2011 du 26.07.2011 sur DCCR/1624/2010 ( LCI ) , REJETE

Parties : PICCAND Brigitte et René, PICCAND René / PICCAND Jacqueline, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4688/2009-LCI ATA/475/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 juillet 2011

2ème section

 

dans la cause

 

Madame Brigitte et René PICCAND
représentée par Me Serge Patek, avocat

contre

Madame Jacqueline PICCAND
représentée par Me Flavien Valloggia, avocat

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 novembre 2010 (DCCR/1624/2010)


EN FAIT

1. Madame Jacqueline Piccand est propriétaire de la parcelle 5340, feuille 34 de la commune de Veyrier à l'adresse 44, chemin des Bûcherons.

Sise en zone de construction 5, cette parcelle d'une surface de 216 m2 abrite un immeuble d'habitation à un seul logement de 55 m2 et un garage privé de 16 m2.

2. Madame Brigitte et Monsieur René Piccand (ci-après : les consorts Piccand) sont copropriétaires de la parcelle 5341, feuille 34 de la commune de Veyrier à l'adresse 46, chemin des Bûcherons.

Cette parcelle abrite un immeuble à un seul logement de 55 m2, un garage privé de 16 m2 et une véranda cadastrée sous n° 5474.

3. Le 18 juin 2008, Mme Jacqueline Piccand a déposé en mains du département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : le département) une demande d'autorisation de construire en procédure accélérée ayant pour objet une véranda (D30229-3).

Selon les plans enregistrés par le département le 12 septembre 2008, la véranda se présentait sous une forme légèrement arrondie, aux angles cassés. La surface était de 16,5 m2, la hauteur de 2,10 m. au bas du toit et 2,50 m. en son point le plus élevé. La construction n'était pas accolée aux murs existants.

Sur la base des préavis favorables recueillis par le département, celui-ci a délivré l'autorisation sollicitée le 9 octobre 2008.

Ladite autorisation n'a pas fait l'objet d'un recours.

4. Le 1er octobre 2009, Mme Jacqueline Piccand a déposé une demande d'autorisation en procédure accélérée, ayant pour objet la modification de la forme de la véranda (D30229-3/2).

Mme Piccand expliquait que cette modification était le fruit de la concertation avec ses voisins et avait pour but de ne pas dénaturer la cohésion des villas.

Selon les plans produits à l'appui de cette requête, la véranda avait une forme rectangulaire et une surface de 18,80 m2.

5. Sur la base des préavis recueillis favorables, en particulier celui de la commune, le département a délivré l'autorisation sollicité le 27 novembre 2009.

6. Les consorts Piccand ont recouru contre la décision précitée auprès de la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission), devenue depuis le 1er janvier 2011 le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) par acte du 30 décembre 2009 (A/4688/2009).

Ils ont conclu à l'annulation de l'autorisation du 27 novembre 2009. La construction réalisée par Mme Jacqueline Piccand était très différente de celle qui avait été autorisée le 9 octobre 2008. Elle était rectangulaire, d'une hauteur de 2,85 m. environ et sa structure était faite de briques et de ciment. Elle constituait une extension de la surface habitable du bâtiment et comme telle devait être soumise au régime ordinaire de l'art. 59 al. 1 de la loi sur les constructions et installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Au niveau esthétique, la construction ne s'inscrivait pas dans l'ensemble formé par les villas mitoyennes sises aux nos 40 à 48 du chemin des Bûcherons.

Mme Jacqueline Piccand avait manifestement donné au département des indications ne correspondant pas à la réalité, violant par là l'obligation de bonne foi incombant à l'administré.

7. Parallèlement, le 14 janvier 2010, les consorts Piccand ont saisi le département d'une demande de révocation des autorisations de construire des 9 octobre 2008 et 27 novembre 2009. Loin de faire ériger une véranda ou un jardin d'hiver, Mme Jacqueline Piccand avait créé une véritable extension à sa villa. De dimensions beaucoup plus importantes que celles qui avaient été autorisées, cette construction leur portait un préjudice, notamment sous la forme d'une nette diminution de l'ensoleillement dont bénéficiait leur parcelle.

Le département devait ordonner la démolition de cette construction.

8. Le département a ouvert un dossier d'infraction à l'encontre de Mme Jacqueline Piccand (I/14576).

9. Le 14 janvier 2010, un inspecteur de la construction du département s'est rendu sur place et du constat qu'il a dressé à cette occasion il résulte que la véranda litigieuse avait été réalisée en maçonnerie, en lieu et place de matériaux légers, et que la séparation prévue par une menuiserie extérieure entre la villa et la véranda avait été supprimée, de sorte que la villa avait subi un agrandissement ; de plus, ce nouveau volume était chauffé.

10. Par courrier du 2 février 2010, le département a imparti à Mme Jacqueline Piccand un délai de dix jours pour présenter ses observations quant aux faits constatés.

11. Mme Jacqueline Piccand s'est déterminée le 14 février 2010. Le jardin d'hiver n'était absolument pas chauffé. Le 8 octobre 2009, à la suite d'une discussion entre le département et son architecte, une demande complémentaire d'autorisation de construire avait été déposée pour adapter son projet de jardin d'hiver à celui de ses voisins, Madame Nicole et Monsieur Alain Manzoni, propriétaire de la parcelle 5339. La modification avait été acceptée notamment par la mairie.

12. Par décision du 1er mars 2010, le département a ordonné à Mme Jacqueline Piccand, soit de se conformer aux plans autorisés, soit de procéder, dans un délai de trente jours, au dépôt d'une requête complémentaire en autorisation de construire, étant entendu que la construction en question constituait un agrandissement de la villa existante, supérieur au rapport de surface de 25 % initialement autorisé sous DD 83081.

Pour des raisons formelles, le département a repris la même décision le 12 avril 2010, notifiée à Mme Jacqueline Piccand en son domicile élu.

13. Le 15 mars 2010, Mme Jaqueline Piccand a complété ses observations.

En ce qui concernait la séparation entre la villa et la véranda, des portes vitrées étaient prévues depuis le début des travaux, ce qu'attestaient des devis joints à son courrier. Elle avait stoppé cette commande étant donné qu'elle avait été frappée d'une dénonciation de la part de son beau-frère, M. René Piccand, qui avait saisi aussi bien la commune que le département.

Concernant la construction de la véranda, celle-ci n'avait pas été réalisée en maçonnerie mais, comme mentionné dans la requête de demande complémentaire, de mur à mur avec l'accord de son voisin de droite (parcelle n°5341, ndr). La façade était constituée de menuiseries vitrées et la toiture d'une ossature légère en bois, emboîtable avec un grand vitrage centrale.

La surface habitable était de 18,19 m2.

14. Dans la cause A/4688/2009, la commission a procédé à un transport sur place le 16 avril 2010.

Elle a constaté qu'à droite et à gauche de la véranda de Mme Jacqueline Piccand, les fenêtres étaient de biais et non toutes parallèles comme les plans de l'autorisation le prévoyaient.

Mme Jacqueline Piccand a confirmé que le mur de gauche lorsque l'on regardait la maison depuis le jardin était existant. Le mur de droite avait été accolé à celui de la véranda des consorts Piccand. Elle n'avait pas demandé l'accord de ces derniers pour fixer le recouvrement de sa véranda à la leur. Elle n'avait appris ce fait que dans le cadre du recours.

La véranda des époux Manzoni (propriétaires de la parcelle 5339, ndr) et la sienne avaient été réalisées en même temps.

Les consorts Piccand ont confirmé qu'ils avaient dénoncé la situation au département. Eux-mêmes s'étaient acquittés d'une amende de CHF 1'000.- dans le cadre de la construction de leur propre véranda.

15. Le 23 juin 2010, Mme Jacqueline Piccand a déposé en mains du département une demande d'autorisation en procédure accélérée ayant pour objet la modification de la toiture du jardin d'hiver et la forme de celui-ci (fenêtres d'angle) (APAT D 5562-3).

16. Le 6 juillet 2010, le département a délivré l'autorisation sollicitée.

17. Par courrier du 10 juillet 2010, les consorts Piccand et Mme Jacqueline Piccand ont sollicité de la commission la suspension de la procédure en application de l'art. 78 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

18. Le 6 août 2010, les consorts Piccand ont recouru contre l'APAT 5562-3 (A/2699/2010).

Cette autorisation, délivrée par la voie d'une procédure accélérée, en lieu et place d'une procédure ordinaire, était nulle.

Pour le surplus, ils ont repris les arguments développés dans le cadre de leur recours du 30 décembre 2009.

19. Le 15 septembre 2010, Mme Jacqueline Piccand a sollicité de la commission la reprise de l'instruction de la cause.

20. Par décision du 10 novembre 2010, communiquée aux parties le 18 du même mois, la commission a joint les deux recours et les a rejetés.

La véranda litigieuse constituait une construction de peu d'importance dont la surface était inférieure à 20 m2. Les griefs tirés de la violation de l'art. 15 LCI n'étaient pas fondés : lors du transport sur place auquel elle avait procédé, la commission avait pu se rendre compte que la nouvelle forme de la véranda de Mme Jacqueline Piccand était identique à celle réalisée par ses voisins, Mme et M. Manzoni et proche de celle réalisée par les recourants.

C'était à bon escient que le département avait traité la demande d'autorisation du 23 juin 2010 en procédure accélérée, la requête ne portant que sur la modification de la forme de la véranda (fenêtres d'angle).

21. Les consorts Piccand ont recouru contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative) par acte du 20 décembre 2010. Leur qualité pour recourir était donnée en leur qualité de propriétaires et de voisins.

Ils ont élevé plusieurs griefs à l'encontre de la construction autorisée par le département, en particulier :

- elle modifiait dans une très notable mesure la typologie du bâtiment et de la façade côté jardin. C'était à tort que le département avait traité la requête du 23 juin 2010 par la voie de la procédure accélérée. L'autorisation du 6 juillet 2010 était frappée de nullité ;

- elle n'était pas de peu d'importance mais constituait une extension à sa villa et, comme telle, devait être analysée en application de l'art. 59 al. 1 LCI. Si l'on additionnait la surface de la maison d'habitation (55 m2) et celle de l'extension (20,19 m2, voire 21,05 m2), l'on arrivait à un rapport de surface de 35,21 %, soit largement supérieur au maximum légal autorisé ;

- d'une hauteur de 2,98 m., elle était supérieure à toutes les constructions voisines et notamment à leur propre véranda et ne tenait nullement compte de l'architecture d'ensemble constituée par les villas mitoyennes du chemin des Bûcherons. La commission avait noté que la nouvelle forme de la construction de Mme Jacqueline Piccand était identique à celle réalisée par Mme Nicole et M. Alain Manzoni, propriétaires de la parcelle 42, chemin des Bûcherons. Ce faisant, ils avaient simplement omis que cette dernière construction l'avait également été en violation des règles de la LCI.

Par ailleurs, la commission ne s'était pas prononcée au sujet d'une éventuelle application du principe de la bonne foi au cas d'espèce alors que Mme Jacqueline Piccand avait donné de fausses indications au département.

Ils concluent à l'annulation de la décision querellée avec suite de frais et dépens.

22. Dans sa réponse du 15 avril 2011, Mme Jacqueline Piccand s'est opposée au recours, faisant sien les arguments de la commission.

23. Le 15 avril 2011, le département s'est opposé au recours, la commission ayant fait une juste application du droit, aussi bien au niveau de l'utilisation de la procédure accélérée que dans l'application des art. 15 et 59 LCI.

24. Le juge délégué a procédé à un transport sur place le 30 mai 2011.

Il a fait les constatations suivantes :

Concernant la construction de Mme Jacqueline Piccand, la hauteur extérieure de la véranda a été mesurée à 2,42 m. et la profondeur intérieure à 3,31 m. Les deux fenêtres latérales coupent les angles alors que les murs latéraux se prolongent jusqu'en fond de façade. Le toit est en légère pente.

Le représentant de Mme Jacqueline Piccand a confirmé que la construction de la véranda correspondait aux plans déposés à l'appui de la requête du 23 juin 2010. La véranda n'était pas chauffée. La surface habitable était de 19,19 m2 et non pas de 19 m2 comme indiqué par erreur sur les plans. Lorsque les consorts Piccand avaient construit leur véranda, ils avaient prolongé le mur en limite de propriété sur une longueur d'1,50 m. La véranda de Mme Jacqueline Piccand avait été construite sur la base d'un nouveau mur érigé en limite de propriété et prolongé sur une longueur d'1,80 m.

Le département a précisé que l'autorisation avait été accordée sur la base des plans produits à l'appui de la demande d'autorisation du 23 juin 2010 et qu'il n'avait pas procédé à un nouveau contrôle sur place depuis le 14 janvier 2010.

Les consorts Piccand ont affirmé que les dimensions de la véranda de Mme Jacqueline Piccand ne correspondaient pas à celles qui étaient indiquées sur les plans.

Le juge délégué s'est rendu dans le jardin de Mme Jacqueline Piccand et a pu constater qu'une véranda identique était accolée à l'immeuble voisin, propriété des époux Manzoni. Il a également constaté que la villa des consorts Piccand, en retrait par rapport à celle de Mme Jacqueline Piccand, était munie d'une véranda.

Le juge délégué s'est rendu dans la maison des consorts Piccand.

Il a mesuré la véranda accolée à l'immeuble de ces derniers dont les dimensions étaient les suivantes : profondeur intérieure 3,20 m., hauteur extérieure au niveau du sol 2,77 m. Le toit était en faible pente.

Il a également constaté que M. René Piccand avait posé un chablon vert qui correspondait selon lui aux dimensions de la véranda de Mme Jacqueline Piccand telle qu'autorisée par le département. Il en résultait un dépassement de 42,5 cm de profondeur et de 60 cm de hauteur. Le représentant de Mme Jacqueline Piccand a fait toutes réserves au sujet de ce gabarit.

25. Dans son audience du 22 juin 2011, la chambre a entendu M. Florian Barro, architecte des consorts Piccand.

Celui-ci a confirmé s'être rendu dans la propriété de ses mandants et depuis chez ces derniers avoir pris les mesures de la véranda de Mme Jacqueline Piccand. Il avait établi un croquis duquel il résultait que la profondeur de la véranda était de 3,68 m. au lieu et place des 3,45 m. annoncés, les fenêtres d'angle étaient moins grandes que les dimensions prévues (0,70 cm X 0,95 cm en lieu et place de 1 m X 1 m), la hauteur de la construction était plus importante (2,98 m. en lieu et place de 2,20 m.), étant précisé que cette dernière mesure avait été prise par rapport au terrain naturel de M. René Piccand.

Il avait également pu constater, en se rendant au fond du jardin de ses mandants, qu'il n'y avait pas de porte entre la véranda et le salon de Mme Jacqueline Piccand.

26. Il résulte encore du dossier les éléments suivants :

- le 11 mars 2011, le TAPI a rejeté le recours des consorts Piccand dirigé contre l'autorisation de construire une véranda délivrée le 8 octobre 2008 par le département aux époux Manzoni (JTAPI/171/2011) ;

- le 28 juin 2011, le conseil des consorts Piccand a transmis à la chambre administrative l'exemplaire d'un recours daté du 27 avril 2011, formé par les consorts Piccand à l'encontre du jugement du précité tout en précisant qu'il n'était pas en mesure d'apporter la preuve formelle de l'envoi postal de ce recours dans la mesure où celui-ci semblait avoir été expédié par pli simple ;

- vérification faite, le recours susmentionné n'a pas été enregistré au rôle de la chambre administrative.

27. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, comme annoncé lors de l'audience du 22 juin 2011.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative de la Cour de justice, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 131 et 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - aLOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10, dans sa teneur au 31 décembre 2010).

3. La qualité pour recourir des consorts Piccand, propriétaires de la parcelle voisine de celle de Mme Jacqueline Piccand ne prête pas lieu à discussion (ATA/235/2011 du 12 avril 2011 et les références citées).

4. Les recourants soutiennent que le département ne pouvaient pas traiter la requête d'autorisation complémentaire du 23 juin 2010 par le biais de la procédure accélérée. Partant, l'autorisation y relative délivrée le 9 juillet 2010 serait frappée de nullité.

Pour mémoire, ladite demande avait pour objet la modification de la toiture du jardin d'hiver ainsi que de sa forme (fenêtres d'angle).

L'art. 3 al. 7 LCI dispose que le département peut traiter par une procédure accélérée des demandes d'autorisations relatives à des constructions nouvelles de peu d'importance ou provisoires.

Aux termes de l'art. 3 al. 3 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 05 01), sont réputées constructions de peu d'importance celles dont la surface n'excède pas 50 m², qui ne dépassent pas un gabarit donné et ne sont affectées ni à l'habitation, ni à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale.

Selon la jurisprudence de la chambre administrative, les vérandas sont considérées comme construction de peu d'importance, au sens de l'art. 1 A RCI et la procédure accélérée doit être applicable (ATA/337/2011 du 24 mai 2011 ; ATA/584/2010 du 31 août 2010) ;

En l'espèce, le département a utilisé la procédure accélérée pour la demande de modification des fenêtres d'angle de la véranda. Ce faisant, il s'est parfaitement conformé à la ratio legis de la procédure accélérée (ATA/599/2007 du 20 novembre 2007) ainsi qu'à la jurisprudence de la chambre de céans citée ci-avant.

Il s'ensuit que ce premier grief doit être rejeté.

5. Pour les recourants, l'autorisation de construire la véranda délivrée le 27 novembre 2009 violerait la LCI, notamment l'art. 59 al. 1 LCI.

a. Selon l'art. 59 al. 1 LCI, la surface de la construction en 5ème zone, exprimée en m² de plancher, ne doit pas excéder 20 % de la surface de la parcelle. Toutefois, sous certaines conditions, le département peut autoriser un indice d'utilisation de 25 % pour un projet de construction en ordre contigu (art. 59 al. 4 let. a LCI).

b. Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier, le département peut renoncer à prendre en considération, dans le calcul du rapport des surfaces, la surface de planchers des garages de dimensions modestes, lorsque ceux-ci font partie intégrante du bâtiment principal (art. 59 al. 3 let. c LCI) et des serres, jardins d'hiver ou constructions analogues en matériaux légers et de dimensions modestes (art. 59 al. 3 let. d LCI).

c. Les constructions de peu d'importance ne sont pas prises en considération pour le calcul du rapport des surfaces (art. 59 al. 7 LCI).

d. Aux termes de l'art. 3 al. 3 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 05 01), sont réputées constructions de peu d'importance celles dont la surface n'excède pas 50 m², qui ne dépassent pas un gabarit donné et ne sont affectées ni à l'habitation, ni à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale.

Dans tous les cas, la surface totale des constructions de peu d'importance ne doit pas excéder 8 % de la surface de la parcelle et au maximum 100 m².

6. La chambre administrative reconnaît le pouvoir d’appréciation du département, qui peut statuer en opportunité dans le cadre de l’art. 59 al. 1, 3 et 4 LCI et déroger aux principes généraux dans les cas où «les circonstances le justifient» et où cela est compatible avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier (ATA/788/1997 du 23 décembre 1997 et références citées). Il incombe toutefois à l’administration, au nom de ce pouvoir, de procéder dans chaque cas à une soigneuse pesée des intérêts. Plus les circonstances défavorables à des dérogations sont importantes, plus le département doit faire preuve de retenue. Il convient notamment de faire application de ce pouvoir en perspective avec le principe de l’égalité de traitement (B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle 1991, p. 35 n° 165 ; ATA/125/2008 du 18 mars 2008 et les références citées).

Dans le cadre de l'art. 59 al. 3 let. d LCI, il est admis que lorsqu’il s’agit d’une maison d’habitation conforme à la zone, une véranda d’une surface inférieure à 20 m² n’est en général pas prise en compte dans le calcul du rapport de surfaces (ATA/792/2001 du 27 novembre 2001).

En l'espèce, la surface de la véranda autorisée est, selon les plans déposés le 23 juin 2010, de 19 m2 (5,50 m X 3,45 m dont à déduire les surfaces d'angle des fenêtres, soit 2 m2). Comme vu ci-dessus, la véranda litigieuse est une construction de peu d'importance au sens de la législation pertinente. Sa surface étant inférieure à 20 m2, elle n'a pas à être prise en compte dans le calcul de rapport des surfaces (ATA/125/2008 du 18 mars 2008 et les références citées).

Ce grief n'est donc pas davantage fondé que le précédent.

7. Pour les recourants, la véranda de Mme Jacqueline Piccand nuit à l'esthétique du quartier.

A teneur de l'art. 15 al. 1 LCI, le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public. La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la commission d'architecture ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la commission des monuments, de la nature et des sites. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (art. 15 al. 2 LCI).

Selon l'art. 4 al. 1 de la loi sur les commissions d'urbanisme et d'architecture du 24 février 1961 (L 1 55) la commission d'architecture est consultative. Sous réserve des projets d'importance mineure et de ceux qui font l'objet d'un préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites, elle donne son avis en matière architecturale au département des constructions et des technologies de l'information, lorsqu'elle en est requise par ce dernier, sur les projets faisant l'objet d'une requête en autorisation de construire.

La clause d’esthétique de l'art. 15 LCI constitue une notion juridique indéterminée, laissant un certain pouvoir d’appréciation à l’administration, celle-ci n’étant limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation (ATA/59/2004 du 20 janvier 2004 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997 ; A. GRISEL, Traité de droit administratif, Neuchâtel, 1984, p. 332-333 ; B. KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1991, p. 34-36, n° 160-169). Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi. Lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/51/2006 du 31 janvier 2006 ; ATA/253/1997 du 22 avril 1997).

La chambre administrative a relevé à plusieurs reprises qu’elle apprécie librement le caractère esthétique d'une construction lorsque, d'une part, elle a elle-même procédé à un transport sur place et que, d'autre part, elle a affaire à des préavis divergents, ou lorsque les préavis sont empreints d'éléments subjectifs sortant du cadre de la seule appréciation de l'impact d'une construction dans le site, auquel cas ils doivent être écartés du débat (ATA/360/2001 du 29 mai 2001 et les références citées).

En l'espèce, la commission d'architecture ne s'est pas prononcée. Tous les autres services consultés, y compris la commune, ont rendu des préavis favorables. Par ailleurs, la chambre de céans avait elle-même procédé à un transport sur place. Elle a pu constater que la véranda de Mme Jacqueline Piccand est strictement identique à celle se trouvant sur la parcelle voisine, propriété des époux Manzoni, d'une part et que l'immeuble des recourants est lui aussi pourvu d'une véranda. Il est établi que cette dernière a été érigée bien avant celle de Mme Jacqueline Piccand. Ainsi donc, s'il fallait retenir une rupture d'harmonie, ce grief devrait être formulé en premier lieu à l'encontre des recourants. A cela s'ajoute que dans son jugement du 11 mars 2011 rejetant le recours des époux Piccand dirigé contre l'autorisation de construire une véranda, délivrée aux époux Manzoni, le TAPI a retenu qu'aucun reproche ne pouvait être formulé à l'encontre du département dans le cadre de l'application de l'art. 15 LCI. Or, ce jugement est entré en force, ce qui amenuise encore la substance du grief soulevé par les recourants. Toute autre solution se heurterait d'ailleurs au principe de l'égalité de traitement eu égard à la confirmation de l'autorisation de construire délivrée aux époux Manzoni et confirmée par le jugement du TAPI devenu définitif (ATF 131 1).

8. Enfin, les recourants reprochent à la commission de ne pas d'être prononcée sur une éventuelle application du principe de la bonne foi de Mme Jacqueline Piccand.

Dans la mesure où la construction de Mme Jacqueline Piccand n'est ou ne serait pas conforme aux autorisations délivrées, le comportement de celle-ci est appréhendé par le dossier d'infraction ouvert à son encontre par le département suite à la dénonciation des recourants.

Il n'y a donc pas lieu d'examiner cette question dans le cadre du recours lié aux autorisations délivrées à Mme Jacqueline Piccand.

Pas plus que les précédents, ce grief n'est fondé.

9. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté et la décision de la commission du 10 novembre 2010 confirmée.

Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des consorts Piccand qui succombent. Une indemnité de procédure de CHF 2'000.- sera allouée à Mme Jacqueline Piccand à la charge conjointe et solidaire des consorts Piccand (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 décembre 2010 par Madame Brigitte et Monsieur René Piccand contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 10 novembre 2010 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1'500.- ;

alloue à Madame Jacqueline Piccand une indemnité de procédure de CHF 2'000.- ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Serge Patek, avocat des recourants, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à Me Flavien Valloggia, avocat de Madame Jacqueline Piccand.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

C. Derpich

 

la présidente siégeant :

 

 

L. Bovy

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :