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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4755/2007

ATA/434/2009 du 08.09.2009 ( CE ) , REJETE

Descripteurs : ; FONCTIONNAIRE ; LICENCIEMENT ADMINISTRATIF ; PROPORTIONNALITÉ ; RÉSILIATION ; RAPPORTS DE SERVICE ; MOTIF ; RECONVERSION PROFESSIONNELLE ; ÉTAT DE SANTÉ
Normes : LPAC.23
Résumé : licenciement d'un cadre supérieur (fonctionnaire) suite à la suppression de son poste. Portée de l'obligation de reclassement de l'Etat. Cette obligation ne se traduit pas de la même manière selon que la suppression de poste touche un cadre supérieur ou un collaborateur à une fonction inférieure ; en particulier, la règle de priorité figurant dans la directive du Conseil d'Etat en cas de suppression de poste (appelé dispositif) et, corrélativement, celle permettant à l'office du personnel de l'Etat d'imposer la réaffectation du collaborateur à un département disposant d'un poste vacant correspondant à ses compétence, n'est pas applicable aux fonctions de cadres supérieurs, car l'intérêt public de l'Etat à pouvoir placer, à un poste clé de son organisation, le meilleur candidat, peut être prépondérant à celui du fonctionnaire dont le poste a été supprimé. L'Etat demeure néanmoins dans l'obligation de faire tout ce que l'on peut raisonnablement attendre de lui pour tenter le reclassement de l'intéressé, en cherchant des solutions adaptées, en soutenant ses candidatures, etc. Pas de violation du principe de proportionnalité en l'espèce.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4755/2007-CE ATA/434/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 8 septembre 2009

 

dans la cause

 

Madame S______
représentée par Me Christian Bruchez, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT



EN FAIT

1. Madame S______, née en 1955, a été engagée par l'Etat de Genève en qualité de directrice générale de l'office des poursuites et faillites (ci-après : OPF), le 1er décembre 2002. Elle a été nommée dans cette fonction par le Conseil d'Etat le 5 décembre 2005.

Elle est divorcée et mère de deux enfants dont elle a la garde.

Sa fonction est placée en classe 29 de l'échelle des traitements. Son dernier traitement mensuel brut a été de CHF 15'802,70.

2. Le 31 mai 2006, le Conseil d'Etat a validé un projet de loi (ci-après : PL 9866) modifiant la loi d'application dans le canton de Genève de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, du 16 mars 1912 (LaLP - E 3 60), prévoyant la suppression de la direction générale des OPF et, par conséquent, du poste occupé par Mme S______.

3. Dans la perspective de cette suppression et en vue de la réorientation prochaine de la carrière professionnelle de Mme S______, le département des institutions (ci-après : DI) a accepté les demandes de prise en charge d'un plan de formation en sa faveur, d'une valeur de CHF 10'580.- et lui a accordé quinze jours de congé à cette fin.

4. La loi précitée a été adoptée le 1er décembre 2006.

5. Le 15 décembre 2006, Mme S______ a postulé au poste vacant de directrice administrative et financière et à celui de responsable du pilotage départemental auprès du département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI).

6. Elle a appris, le 4 janvier 2007, que sa candidature à ces postes n'avait pas été retenue.

7. Le 18 janvier 2007, Monsieur G______, secrétaire général du DI et Monsieur D______, secrétaire général adjoint, ont confirmé à Mme S______ que son poste serait supprimé à l'échéance du délai référendaire, le 1er mars 2007. Ils l'ont informée de l'existence d'un projet de directive, appelé "dispositif en cas de suppression de poste", qui allait être adopté par le Conseil d'Etat. A l'occasion de cet entretien, il lui a été proposé d'assumer la mission temporaire de cheffe de projet du déménagement de l'office cantonal de la population (ci-après : OCP).

8. Dans le cadre des échanges ayant eu lieu à ce sujet, Mme S______ a fait valoir qu'elle était en recherche d'emploi et qu'elle sortirait du projet si une occasion d'embauche se présentait. Sa présence ne pourrait être que conditionnelle.

Monsieur R______, directeur de l'OCP, a renoncé à lui confier cette mission dans ces conditions, afin de ne pas "rajouter de la fragilité à une équipe qui l'[était] déjà".

9. Le 26 janvier 2007, un certificat de travail intermédiaire a été délivré à Mme S______ pour faciliter ses recherches d'emploi, dont le contenu a reçu son adhésion. Ce document met en avant les compétences de Mme S______ et indique qu'elle a exercé son activité à la pleine satisfaction de sa hiérarchie.

10. Dès le 30 janvier 2007, Mme S______ s'est trouvée en incapacité de travail pour cause de maladie.

11. Son poste a disparu le 1er mars 2007, à l'échéance du délai référendaire et à l'entrée en vigueur de la modification de la LaLP adoptée le 1er décembre 2006.

12. Le 28 mars 2007, le Conseil d'Etat a adopté une directive définissant la procédure applicable en cas de suppression de poste à l'Etat de Genève (appelée "dispositif").

13. Le 7 mai 2007, Madame C______, responsable des ressources humaines auprès du DI, a convoqué Mme S______ à un deuxième entretien, aux fins d'étudier avec elle les possibilités liées à son transfert vers d'autres postes.

14. Le 11 mai 2007, Mme S______ a demandé à ce que cet entretien soit remis à plus tard, en raison de son incapacité de travail.

15. A cette date, et malgré son incapacité de travail, Mme S______ poursuivait des études universitaires (cf. certificat médical annexé à son courrier du 11 mai 2007, établi par la Doctoresse D______, d'où il résulte que "le fait de poursuivre des études HEC est favorable sur le plan thérapeutique").

16. Mme C______ a répondu à la lettre précitée et à l'envoi dudit certificat par courrier du 31 mai 2007.

Le certificat médical délivré n'étayait aucunement l'incapacité de Mme S______ de se rendre à l'entretien proposé. En outre, l'arrêt maladie excédant cent jours, le médecin-conseil de l'Etat de Genève serait saisi d'une demande d'évaluation de son état pour préavis.

L'entretien n'ayant pu avoir lieu, un curriculum vitae actualisé était demandé à Mme S______, avec l'autorisation de le diffuser, pour pouvoir effectuer toutes démarches utiles à son placement. A défaut, il serait considéré que celle-ci renonçait à collaborer aux démarches relatives à son reclassement.

Le dispositif adopté par le Conseil d'Etat le 28 mars 2007, prévoyant la marche à suivre en cas de suppression de poste, était joint à l'envoi.

17. Le 8 juin 2007, Mme S______ a refusé de transmettre son curriculum vitae.

Elle n'était pas remise de sa maladie et ne pouvait ainsi offrir ses services à qui que ce soit. Elle doutait que le dispositif envoyé puisse s'appliquer à une personne en incapacité de travail et de manière rétroactive. Elle ferait appel à un conseil pour défendre ses droits.

18. Le 3 août 2007, le Dr O______, médecin-conseil de l'Etat de Genève, a décerné un préavis médical concernant l'état de Mme S______.

Il avait appris par la demande formée par le service des ressources humaines (RH) que Mme S______ poursuivait des études universitaires. Il ne connaissait pas cette circonstance, qui était de son point de vue incompatible avec un arrêt de travail pour cause de maladie, même si aucune règle précise n'existait en la matière.

En mai 2007, soit à l'époque de l'entretien proposé, l'état de santé de Mme S______ était encore fragile. Il s'était amélioré depuis et l'intéressée était en mesure de rencontrer sa hiérarchie dans les meilleurs délais.

Une reprise d'activité pourrait être envisagée dans un délai approximatif de six semaines.

19. Le 6 août 2007, Mme C______ a informé Mme S______ de ce que le service des ressources humaines du DI allait proposer son licenciement à l'office du personnel de l'Etat (ci-après : OPE).

Le dispositif ne s'appliquait pas rétroactivement. Il précisait la procédure à suivre en cas de suppression de poste, sans préconiser le réexamen des situations pendantes au moment de son adoption. Une incapacité de travail certifiée médicalement ne faisait pas obstacle à son application.

Dans le cadre de la suppression du poste de Mme S______, tout avait été entrepris pour éviter le licenciement. Les tentatives effectuées pour respecter au mieux toutes les étapes du dispositif s'étaient soldées par un échec en raison de l'incapacité de travail alléguée, et alors même que les études universitaires entreprises par l'intéressée attestaient du maintien de ses capacités d'attention et de concentration. L'évaluation effectuée par le médecin-conseil n'avait pas confirmé l'incapacité de Mme S______ de se rendre à un entretien pour étudier ses possibilités de transfert.

20. Sous la plume de son conseil, Mme S______ a contesté le 24 août 2007 que tout avait été entrepris pour son reclassement.

Ses compétences et qualifications étaient étendues. Elle s'était déclarée prête à étudier toute proposition, même impliquant un déclassement. Elle souhaitait entretenir le service des RH de sa situation professionnelle, lui donner et lui expliciter son curriculum vitae, sans toutefois joindre ce document à son envoi.

21. Les 4 et 7 septembre 2007, le service des RH a envoyé des courriels au service des RH du département de l’économie et de la santé (ci-après : DES) invitant ce dernier à l'informer d'éventuelles vacances de postes correspondant aux qualifications et compétences de Mme S______, qui étaient brièvement résumées. Le DES a répondu que l'absence d'un curriculum vitae en bonne et due forme ferait obstacle à ses recherches, l'adéquation entre les postes de cadres supérieurs éventuellement vacants et les compétences avancées ne pouvant être clairement établie.

22. Le 14 septembre 2007, Mme S______ a informé son département qu'elle était apte à reprendre une activité à temps partiel et qu'elle se mettait à disposition pour cette reprise.

23. Le 18 septembre 2007, le service des RH lui a confirmé que son licenciement allait être demandé, pour les motifs précédemment exposés.

Il attirait toutefois son attention sur le fait qu'un poste correspondant à ses capacités avait été récemment publié dans le bulletin des places vacantes de l'Etat de Genève. Il l'invitait à postuler et lui apporterait son soutien si elle le faisait.

Il s'agissait d'un poste d'adjoint de direction chargé du secteur juridique et d'information à 100% auprès du département de la solidarité et de l'emploi (office cantonal des personnes âgées), en classe de traitement 21, dont le délai de postulation avait échu le 7 septembre 2007.

Enfin, la transmission d'un curriculum vitae avec l'autorisation de le diffuser lui était à nouveau demandée.

24. Mme S______ n'a pas postulé à cette fonction de cadre intermédiaire, qui se trouvait trop en deça de ses capacités et de sa formation de cadre supérieur. En revanche, elle a accepté de rejoindre à 50% une équipe de juristes à l'OCP, dont le service faisait face à une importante surcharge de travail, dans l'attente de nouvelles propositions, le 1er octobre 2007.

25. En octobre 2007, Mme S______ a obtenu un diplôme en management des institutions sociales (HEC Genève - session 2006-2007 ; cf curriculum vitae d'octobre 2007).

26. Le 26 septembre 2007, le service des RH a informé Mme S______ qu'un poste de directeur du service de l'assurance-maladie à 100% (cl. max 26), correspondant à son profil, était actuellement mis au concours, et qu'il était prêt à la recommander si elle souhaitait postuler à cette fonction.

27. Le 17 octobre 2007, le service des RH a invité Mme S______ à postuler au poste vacant de directeur adjoint auprès de la direction générale de l'action sociale (cl. max 27), dans les mêmes conditions.

28. Par décision du 31 octobre 2007, le Conseil d'Etat a mis fin aux rapports de service de Mme S______ pour cause de suppression de poste, avec effet au 29 février 2008, "à moins qu'un transfert dans un poste correspondant à ses compétences se réalise dans l'intervalle". A la fin des rapports de service, Mme S______ recevrait une indemnité égale à six fois son dernier traitement mensuel de base, plus 0,2 fois son dernier traitement mensuel de base par année passée au service de l'Etat, une année commencée comptant comme une année entière.

29. Cette décision a été notifiée le même jour à l'avocat de la recourante, auprès duquel celle-ci avait élu domicile.

30. Ce mandataire a refusé de réceptionner ce document au motif qu'il s'agissait d'une décision éminemment personnelle, qui ne pouvait lui être notifiée, en dépit de l'élection de domicile effectuée.

31. Le même jour, un huissier, mandaté par le Conseil d'Etat pour procéder à cette notification, a essuyé le même refus.

32. Une nouvelle notification par pli recommandé a été envoyée à cet avocat, le 2 novembre 2007.

33. Ce même jour, la recourante a été mise en incapacité de travail pour cause d'accident, jusqu'au 6 novembre.

34. La notification a été considérée par Mme S______ comme effectuée en temps inopportun. Un différend, qui a donné lieu à une procédure parallèle, est né à ce sujet entre les parties.

35. Mme S______ a recouru contre son licenciement auprès du Tribunal administratif, le 30 novembre 2007. Elle conclut, à titre principal, à l'annulation de cette décision, à sa réintégration dans un poste correspondant à ses compétences professionnelles, ainsi qu'à l'octroi d'une indemnité de procédure. Subsidiairement, elle sollicite le versement d'une indemnité pour licenciement abusif de CHF 379'264, 80.

Son licenciement ne respectait pas l'art. 23 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05), qui ne permettait à l'Etat d'envisager la rupture des rapports de service qu'en dernière hypothèse, lorsqu'il se révélait impossible de confier au membre du personnel concerné un autre poste correspondant à ses capacités. Sur la base de cette disposition, le Conseil d'Etat avait adopté un dispositif prévoyant que si une proposition de transfert était refusée par l'employé pour un motif objectivement fondé, un deuxième entretien devait être fixé. Or, la participation de Mme S______ à la mission qui lui avait été proposée de travailler au déménagement de l'OCP avait été refusée par le directeur de cet office. Une date avait ensuite été fixée pour le deuxième entretien, mais elle n'avait pu l'honorer, en raison de sa maladie. Après sa reprise d'activité, aucune entrevue n'avait été fixée, en violation de la directive précitée.

D'ailleurs, selon ce dernier texte, les collaborateurs dont le poste était supprimé étaient prioritaires sur les autres postulants (externes et internes). Il résultait en outre de l'art. 5 du règlement sur les cadres supérieurs de l'administration cantonale du 22 décembre 1975 (B 5 05.03) que dès l'âge de cinquante ans et après quatre ans d'activité à leur poste, les cadres supérieurs pouvaient solliciter une autre affectation ou demander d'être chargés d'une mission spéciale. Sur la base de ces prescriptions, l'autorité intimée aurait dû nommer Mme S______ à l'un des postes auxquels elle avait postulé, qui correspondaient parfaitement à ses capacités et à ses qualités professionnelles. Elle n'avait à ce jour pas reçu de réponse définitive pour les postes auxquels elle avait postulé et n'avait encore eu qu'un seul entretien. Contrairement à ce que soutenait l'autorité intimée, les possibilités de transfert n'avaient ainsi pas été épuisées avant son licenciement.

Si le tribunal de céans devait considérer qu'une réintégration n'était pas possible, il convenait, sur la base de l'art. 31 al. 3 LPAC, de lui allouer une indemnité correspondant à vingt-quatre mois de son dernier traitement brut, soit CHF 379'264,80.

36. Le 7 novembre 2007, Mme S______ a postulé au poste vacant de directrice générale de la direction générale de la santé (cl. max 31).

37. Le même jour, M. G______ a envoyé un courrier à la directrice de la direction générale de l'action sociale mettant en avant les compétences de Mme S______ et soutenant sa candidature aux postes de directrice du service de l'assurance-maladie et de directrice adjointe à la direction générale de la santé.

38. Le 3 décembre 2007, il a fait de même pour le poste de directrice générale de la direction générale de la santé au sujet duquel il a appris, le 19 novembre 2007, que Mme S______ avait postulé.

39. La candidature de Mme S______ à ces fonctions n'a pas été retenue, malgré l'adéquation de ses compétences avec les postes proposés.

40. Le Conseil d'Etat a déposé ses observations le 14 janvier 2008 et conclu au rejet du recours.

Le dispositif en cas de suppression de poste prévoyait une priorité des collaborateurs touchés lorsque ceux-ci n'étaient pas des cadres supérieurs. L'application de cette règle dans les cas de vacances des postes clé de l'administration avait été expressément exclue.

La durée des mesures d'accompagnement avait été respectée ; elle était, selon le dispositif, de deux mois, de la décision de suppression de poste à la décision de licenciement, pour les recherches d'emploi et de solutions, les entretiens, notamment, puis de quatre mois pour les mesures d'accompagnement, correspondant au délai légal de congé.

Le nombre d'entretiens avait été respecté. Le deuxième n'ayant pu se tenir oralement, il s'était fait par échange de courriers. Le refus de Mme S______ de se présenter à l'entretien du 7 mai 2007 n'était pas compatible avec les études à l'université qu'elle poursuivait parallèlement et ne trouvait pas d'autre justification que son refus de collaborer.

L'art. 5 du règlement sur les cadres supérieurs n'avait pas pour but de pallier un licenciement fondé sur l'art. 23 LPAC. L'autorité intimée n'avait, quoi qu'il en était, jamais reçu aucune demande de la part de Mme S______, fondée sur cette disposition.

Il ressortait enfin du dispositif qu'il n'existait pas d'obligation formelle pour l'Etat de proposer une solution de transfert ; il lui appartenait, en revanche, d'en chercher et de respecter les délais entre les différents entretiens.

Enfin, il était indiqué que le fonctionnaire concerné était tenu de collaborer, en procédant de son côté aux recherches d'emploi. Les démarches visant le reclassement d'un cadre supérieur nécessitaient la possession d'un curriculum vitae actualisé assorti d'une autorisation de le diffuser. La recourante n'avait pas communiqué ce document malgré les demandes pressantes du service des RH, alors même que la transmission d'un tel document ne présageait pas d'une solution immédiate.

41. Du 25 janvier au 24 mars 2008, Mme S______ a été en incapacité de travailler suite à une intervention chirurgicale.

42. Le 28 février 2008, l'office du personnel a transmis un courrier adressé par le Conseiller d'Etat en charge du département des finances donnant compétence au directeur général de l'office du personnel de signer les mémoires, écritures et autres actes de procédure déposés devant les juridictions cantonales.

43. Les parties ont été entendues en comparution personnelle, le 19 mai 2008.

a. Mme S______ a précisé qu'il existait, parallèlement au recours, un différend au sujet de la date d'échéance des rapports de travail. Ce contentieux n'avait pas encore été porté devant le Tribunal de céans. Elle a campé, pour le reste, sur ses positions.

b. Le Conseil d'Etat et l'OPE en ont fait de même.

c. Madame W______, directrice générale de la direction générale de l'action sociale, avait eu connaissance des postulations concernant son département. Elle avait reçu Mme S______ pour le poste de directrice du service de l'assurance-maladie, mais ne lui avait pas accordé d'entretien pour celui de directrice adjointe à la direction générale de l'action sociale, car celle-ci ne remplissait pas tous les critères. Il avait été décidé que la recourante serait entendue néanmoins, si parmi les six personnes se trouvant en première ligne, aucune n'était retenue, ce qui n'avait pas été le cas. Pour le poste de directrice du service de l'assurance-maladie, il y avait eu environ quarante-cinq candidatures. La personne choisie était à l'intérieur du service depuis six ans. Elle convenait mieux pour le poste et bénéficiait déjà de la confiance des cadres intermédiaires, ce qui était un atout. La seule raison pour laquelle la candidature de Mme S______ n'avait pas été retenue était qu'il y en avait eu une meilleure.

Elle ne se rappelait pas avoir reçu de lettre de M. G______ soutenant cette candidature, bien qu'elle reconnaissait avoir signé une réponse à ce courrier, dont la partie intimée lui a soumis une copie à l'audience. Elle n'avait souvenir d'aucune démarche effectuée par le DI pour soutenir Mme S______ ; une telle initiative aurait de toute façon été inutile, car elle connaissait l'intéressée avec laquelle elle avait suivi une formation.

44. Mme S______ a été mise au bénéfice de l'assurance-chômage à compter du 2 juin 2008.

45. Le 13 juin 2008, Mme S______ a déposé des écritures après enquêtes, confirmant les faits ci-dessus exposés.

46. Le 4 juillet 2008, l'OPE a accordé à Mme S______ une prolongation du délai de congé de trois mois. La contrepartie d'un solde de vacances de 31,5 jours lui était en outre allouée, soit CHF 22'901.-.

Ces faveurs étaient allouées suite au différend opposant les parties au sujet de la validité de la notification de l'arrêté de licenciement, par gain de paix, en raison des absences liées aux opérations chirurgicales électives subies par Mme S______. Tout défaut de notification de l'arrêté du 31 octobre 2007 était cependant contesté, de même que toute autre prétention fondée sur les rapports de travail.

47. Le 5 novembre 2008, le juge délégué a attiré l'attention de l'autorité intimée sur le fait qu'elle ne s'était pas exprimée sur les possibilités de réintégrer Mme S______ au cas où le recours devait être admis ni, subsidiairement, sur la demande d'indemnité formée par cette dernière.

48. Le 2 décembre 2008, l'OPE a répondu à ce courrier.

Entre la validation par le Conseil d'Etat du projet de loi prévoyant la suppression de poste et la date du licenciement, deux ans s'étaient écoulés, lors desquels plusieurs démarches visant un reclassement avaient été effectuées.

Il ne pouvait, dans des postes clé comme ceux visés par la recourante, imposer sa candidature aux départements concernés. Si le recours devait aboutir, une réintégration n'était pas envisageable en l'état. L'indemnité éventuelle, dont il contestait catégoriquement le bien-fondé, devrait tenir compte des importants montants déjà octroyés, soit :

CHF 117'765.- d'indemnité de licenciement ;

CHF 10'580.- de frais de formation universitaire accordés au titre de mesures d'accompagnement ;

CHF 47'743.- pour prolongation du délai de congé, suite à plusieurs opérations chirurgicales électives ;

CHF 22'901.- de solde de vacances.

Ces deux derniers montants avaient été accordés par gain de paix, sans que leur exigibilité ne soit démontrée.

Il devrait enfin être tenu compte du temps que Mme S______ avait pu prendre sur son temps de travail pour bénéficier du suivi des formations suivies, soit 319 heures.

49. Le 22 décembre 2008, le juge délégué a prié l'OPE de lui transmettre le nombre de cas d'application du dispositif en cas de suppression de poste avec indication du nombre de postes de cadres supérieurs concernés et le nombre de cas dans lesquels ce dispositif avait été mis en œuvre avec succès, avec mention du poste supprimé, de son niveau dans l'organisation de l'Etat et de l'issue du processus pour la personne concernée.

50. Le 21 janvier 2009, l'OPE a versé à la procédure les statistiques relatives au reclassement des collaborateurs ayant subi une suppression de poste entre octobre 2006 et janvier 2009.

Il résulte notamment des documents produits que trente-huit postes à l'Etat de Genève ont été supprimés (treize de cadre supérieurs, onze de cadres intermédiaires et quatorze d'autres collaborateurs). Sur ce nombre, vingt-neuf personnes ont retrouvé un emploi à l'Etat, deux ont été engagées à l'extérieur, une a démissionné et six personnes ont été licenciées (deux cadres supérieurs, trois cadres intermédiaires et un collaborateur).

51. Le 23 janvier 2009, les parties ont été informées qu'en l'absence de demandes de mesures d'instruction complémentaires avant le 23 février 2009, la cause serait gardée à juger.

52. Le 23 février 2009, Mme S______ a déposé de nouveaux compléments à ses écritures et persisté dans ses précédentes conclusions.

L'art. 23 LPAC comportait une règle de subsidiarité objective, qui imposait à l'Etat d'accorder une véritable priorité aux employés dont le poste avait été supprimé, lorsqu'un poste vacant correspondant à son profil existait. Cette priorité s'appliquait tant à l'égard des collaborateurs externes qu'internes. La réserve indiquée dans la directive concernant les cadres supérieurs n'était ainsi pas conforme à l'art. 23 LPAC. L'OPE aurait dû imposer la réaffectation de Mme S______, dans le poste qui correspondait parfaitement à ses compétences, soit celui de directrice de l'assurance-maladie, ainsi qu'il ressortait clairement des auditions effectuées et de la lettre de soutien de M. G______. En outre, il résultait des enquêtes qu'aucune démarche sérieuse et concrète n'avait été effectuée par le DI pour reclasser Mme S______. Le témoignage de Mme W______ était éloquent à cet égard.

53. Le Conseil d'Etat a répondu à ces observations le 13 mars 2009.

L'art. 12 al. 1er LPAC posait le principe selon lequel l'affectation d'un membre du personnel dépendait des besoins de l'administration et pouvait être modifiée en tout temps. En contrepartie, la loi prévoyait qu'un changement d'affectation ne pouvait entraîner de diminution de salaire (art. 12 al. 2 LPAC). En adoptant ces dispositions, le législateur avait reconnu à l'administration le droit d'affecter ses ressources de façon à répondre au mieux à ses besoins. Dans l'art. 23 al. 1er LPAC, il avait prévu, répondant à cet impératif, la possibilité de licencier l'employé dont le poste avait été supprimé, si aucun poste correspondant à ses capacités ne pouvait lui être proposé. Les travaux préparatoires précisaient que l'administration était tenue de tenter le reclassement de l'intéressé dans un poste équivalent. Si un tel poste n'était pas trouvé, elle devait affecter l'intéressé à un poste moins bien classé. Enfin, si elle ne trouvait pas un tel poste ou si l'intéressé le refusait, elle pouvait le licencier (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève [ci-après : MGC] 1996 43/VI p. 6362). La jurisprudence neuchâteloise rendue sur le sujet indiquait que l'obligation de la hiérarchie consistait dans l'envoi des candidatures et la rédaction de lettres de recommandation appuyant les démarches de l'employé. L'autorité devait également veiller à la priorité dont bénéficiait le fonctionnaire concerné. Le droit de l'employé au reclassement n'était toutefois pas absolu, et l'Etat n'avait pas d'obligation de résultat (ATAN.2006.202 du 3 novembre 2006, citant l'Arrêt du Tribunal fédéral 2A.486/2000 du 23 novembre 2000 consid. 4b). Le dispositif adopté par le Conseil d'Etat allait certes plus loin, mais réservait la situation des cadres supérieurs, car il n'était guère possible de risquer d'imposer une candidature qui ne soit pas la meilleure parmi celles proposées, à un poste clé de son organisation.

Les enquêtes avaient permis d'établir que pas moins de neuf solutions de transfert à durée indéterminée avaient été étudiées. Le poste de directeur administratif auprès du DCTI avait été attribué au directeur administratif et financier de l'ex-département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après : DAEL) dont le poste avait été supprimé. Celui de responsable du pilotage départemental au DCTI avait également été pourvu par une personne dont le poste avait disparu (collaboratrice chargée de suivre la fusion DAEL/DCTI). Le poste de directeur du service de l'assurance-maladie avait été confié au directeur adjoint de ce service, qui disposait de six années d'expérience en son sein et dont le poste avait consécutivement pu être supprimé. Celui de directeur adjoint à la direction générale de l'action sociale avait été attribué à un spécialiste dans l'intégration socio-professionnelle et les politiques d'asile et de lutte contre les dépendances. Mme W______ avait indiqué, lors de son audition devant le tribunal de céans, que la recourante n'avait pas été reçue pour un entretien, en dépit des recommandations de son secrétaire général, car elle ne remplissait pas les critères fixés. La fonction de directeur de la direction générale de la santé avait échu à une spécialiste du domaine de la collaboration sanitaire internationale, notamment dans la région franco-genevoise, car cette personne était déjà en charge de la préparation aux risques de pandémies et de catastrophes sanitaires. La recourante avait refusé de postuler à la fonction d'adjointe de direction offert par l’office cantonal des personnes âgées (ci-après : OCPA), car il s'agissait d'un poste de cadre intermédiaire, alors même qu'elle aurait été mise au bénéfice de droits salariaux acquis. Il en avait été de même, ou à peu près, pour celui d'inspectrice du travail. La recourante n'avait pas non plus postulé à un poste de directrice de surveillance des fondations, alors qu'elle y avait expressément été invitée par le service des RH, au motif qu'elle ne disposait pas d'expérience en matière de prévoyance professionnelle et alors que seule une licence en droit était exigée pour ce poste. Or, la personne engagée n'était pas un spécialiste en ce domaine. Pour le poste de juriste à la commission de surveillance des professions de la santé, la responsable des ressources humaines était intervenue directement, mais le brevet d'avocat avait été considéré comme un prérequis.

Quant à la mission temporaire de cheffe de projet dans le cadre du déménagement de l'OCP, la recourante avait dit ne pouvoir assurer une présence jusqu'au terme de la mission, à cause de ses recherches d'emploi.

Les enquêtes avaient également démontré que la recourante disposait du curriculum vitae demandé en septembre 2007, puisque ce document était joint à ses offres à cette période. Malgré cette circonstance, celle-là n'avait jamais daigné l'envoyer au service des RH, qui le lui avait demandé plusieurs fois.

Enfin, la recourante avait refusé toute proposition ne correspondant pas à un poste de cadre supérieur, alors que sa formation initiale consistait en une licence de droit français, complétée par des études de droit privé suisse, sans titularité du brevet d'avocat. Or, ce dernier titre étant souvent requis dans les postes de cadres supérieurs, son absence n'avait pas facilité son reclassement.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 31 LPAC ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. A teneur de l'art. 23 al. 1er LPAC, lorsque, pour des motifs de réorganisation ou de restructuration du service, un poste occupé par un membre du personnel régulier est supprimé, le Conseil d'Etat ou le conseil d'administration peut résilier les rapports de service.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la loi réformant la LaLP a conduit à la suppression du poste de la recourante pour des motifs relevant de l'organisation de l'administration, ni que Mme S______ était membre du personnel régulier de l'administration cantonale au moment de cette suppression.

3. En revanche, la recourante considère que l'Etat n'a pas satisfait à son obligation de la reclasser. En effet, à teneur de l'al. 2 de l'art. 23 LPAC, une résiliation pour suppression de poste ne peut intervenir que "s'il se révèle impossible" de confier au membre du personnel régulier un autre poste correspondant à ses capacités (al. 2).

Cette condition est une expression du principe de la proportionnalité qui impose à l'Etat de s'assurer, avant qu'un licenciement soit prononcé, qu'aucune mesure moins préjudiciable pour l'administré ne peut être prise (art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2).

On trouve la même règle dans le statut des fonctionnaires de la Ville de Genève (LC 21 151), à son art. 96 al. 1er et - en des termes un peu différents - à l'art. 19 de la loi sur le personnel de la Confédération du 24 mars 2000 (LPers - RS -172.220.1), applicable aux employés fédéraux, qui dispose qu'avant de résilier le contrat de travail sans qu’il y ait faute de l’employé, l’employeur prend toutes les mesures "qui peuvent être raisonnablement exigées de lui" pour garder l’employé à son service.

4. Le respect du principe de la proportionnalité est assuré, selon le Conseil d'Etat, par le respect du dispositif adopté par cette autorité le 28 mars 2007. Auparavant, aucun processus formalisé n'existait, et les cas de suppression de poste étaient traités au cas par cas.

Ce dispositif émis par l’autorité chargée de l’application concrète de la loi constitue une ordonnance administrative, aussi appelée directive. Ces actes administratifs sont destinés à rendre explicite une ligne de conduite. Ils permettent d’unifier et de rationaliser la pratique, assurant de ce fait le respect du principe de l'égalité de traitement et une meilleure prévisibilité administrative. Ils facilitent le contrôle juridictionnel, puisqu’ils permettent à l’administration d’agir selon des critères rationnels, cohérents et continus, et non pas selon une politique virevoltante de cas en cas, tout en dotant le juge de l’instrument nécessaire pour vérifier la correcte application de la loi (ATA/78/2008 du 19 février 2008 consid. 8 ; ATA/594/2007 du 20 novembre 2007 ; ATA/864/2005 du 20 décembre 2005 consid. 3 ; ATA/763/2002 du 3 décembre 2002, consid. 5 et les autres références citées).

La directive litigieuse prévoit notamment qu'une fois la suppression de poste décidée, l'employé est convoqué à un premier entretien, lors duquel il est formellement informé de la situation. A cette occasion, si une nouvelle affectation lui est proposée et qu'il la refuse pour un motif fondé, un second entretien est fixé un mois plus tard. S'il refuse la proposition pour un motif infondé, il dispose de dix jours pour revenir sur sa décision, ensuite de quoi le licenciement peut être prononcé. Lors du deuxième entretien, si aucune nouvelle proposition d'affectation n'est possible, des mesures d'accompagnement sont proposées et mises en place en collaboration avec l'OPE. Le licenciement peut être prononcé un mois plus tard, avec un délai de congé de quatre mois, mais son effectivité est subordonnée à l'absence de transfert réalisé pendant cette période, suite à l'application des mesures d'accompagnement mises en place. Si le licenciement est prononcé à l'issue de ce processus, l'indemnité prévue par l'art. 23 al. 4 LPAC est versée et les mesures d'accompagnement sont poursuivies si nécessaire.

5. S'il a servi de fil conducteur au processus ayant conduit au licenciement de la recourante, ce dispositif n'a pas été appliqué à la lettre dans son cas ; il a été aménagé à sa situation - souvent en sa faveur, et parfois à son détriment - en raison notamment des obstacles qui se sont opposés à son application : l'incapacité initiale pour cause de maladie de la recourante, qui a duré à 100% du 30 janvier au 14 septembre 2007, puis à 50% ; l'impossibilité qui en a résulté d'organiser le deuxième entretien dans les délais prévus ; le refus persistant de la recourante de fournir et d'autoriser la diffusion d'un curriculum vitae actualisé, et les incapacités de travail pour cause d'accident survenues au moment de la notification du licenciement et pendant le délai de congé, période pendant laquelle des solutions auraient pu encore être recherchées.

6. a. Pour la recourante, les choses se sont passées de la manière suivante : elle a été informée de la probable suppression de son poste en mai 2006, lors de la validation, par le Conseil d'Etat, du projet de réforme de la LaLP. En août 2006, au titre de mesures d'accompagnement et en vue de favoriser sa réintégration professionnelle future, sa hiérarchie a validé la prise en charge des frais de cinq modules de formation, pour un montant total de CHF 10'580.-. Le 18 janvier 2007, la suppression de sa fonction lui a été confirmée par sa hiérarchie, la loi ayant été adoptée. Un poste temporaire de chargé de mission auprès de l'OCP lui a été proposé à cette occasion. La recourante prétend que sa participation à ce projet aurait été refusée par M. R______, directeur de l'OCP. Cet allégué est inexact ; en réalité, Mme S______ a privilégié sa recherche d'emploi, au point de rendre impossible son engagement pour ce poste. En effet, on ne confie pas une mission temporaire de cadre supérieur, quelle qu'elle soit, à une personne qui menace de quitter ses fonctions du jour au lendemain. Or, la mission qui lui était proposée n'était pas incompatible avec des recherches d'emploi, au contraire ; elle donnait à la recourante la possibilité d'être libérée dans un délai relativement proche et planifiable. Les cadres supérieurs postulants sont rarement disponibles immédiatement, sauf à se trouver au chômage. Les raisons alléguées semblent avoir ainsi davantage relevé du ressentiment éprouvé par la recourante suite à la suppression de son poste ou de l'insécurité, compréhensible au vu de son âge et de sa situation familiale, que ces bouleversements ont pu lui causer. Pour cette dernière raison et dans le doute des réels motifs qui l'ont conduite à refuser cette mission, l'existence d'un motif de refus fondé, au sens du dispositif du Conseil d'Etat, sera admise. Le DI ne pouvait ainsi s'arrêter là.

b. Suite à ce refus, le 30 janvier 2007, Mme S______ est tombée malade. Cette circonstance a rendu impossible le deuxième entretien qui lui a été proposé. Devant cette situation, Mme C______ a écrit à la recourante le 31 mai 2007, en l'informant qu'elle avait besoin de son curriculum pour effectuer ses démarches et l'a avertie qu'en l'absence de cet envoi, un refus de collaboration serait retenu. La recourante a indiqué qu'elle n'était pas prête à permettre la diffusion de ce document, car elle ne pouvait donner de date de sa reprise de travail. Elle n'a pas envoyé son curriculum vitae. Ce refus est incompréhensible de la part d'une personne qui n'était pas dans l'incapacité physique ou psychique d'effectuer cet envoi. Tel n'était pas le cas de la recourante, qui poursuivait à ce moment-là des études universitaires. Même si son état ne permettait pas d'exiger d'elle une confrontation avec son employeur en mai 2007, ainsi que le soutient le Dr O______ (ce qui surprend, au vu de l'excellente opinion que son employeur avait d'elle et de ses compétences), rien ne justifie que Mme S______ ait bloqué ainsi les démarches que le service proposait d'effectuer pour tenter de la reclasser. Il est notoire qu'un curriculum vitae constitue un document essentiel en cas de recherche d'emploi et qu'il est impossible de se passer de ce document pour postuler à un poste de cadre supérieur. Ce refus a été réitéré par la recourante après sa reprise au travail à 50%, en septembre 2007, pour des raisons inexplicables. Ce nonobstant, le supérieur hiérarchique de la recourante a soutenu ses candidatures chaque fois qu'il a été informé de celles-ci. Plus de neuf solutions de transfert ont été étudiées ou appuyées par le DI. En raison des incapacités de travailler de l'intéressée, les tentatives de reclassement se sont étendues sur plus de quatorze mois (d'août 2006 à décembre 2008), alors que le processus ne devrait durer que six mois à teneur du dispositif.

7. Lorsque la loi prescrit à l'Etat de ne pas licencier une personne lorsqu'il est possible de la reclasser ailleurs, elle ne lui impose pas une obligation de résultat, mais celle de mettre en œuvre tout ce qui peut être raisonnablement exigé de lui, comme l'exprime l'art. 19 LPers, dont la portée est semblable à celle de l'art. 23 LPAC.

8. On peut se demander encore si l'on aurait dû exiger de l'Etat qu'il impose la réaffectation de la recourante au poste de directrice de l'assurance-maladie, comme le soutient celle-là et comme le prescrit le dispositif pour les cadres inférieurs.

9. En effet, dans son dispositif, le Conseil d'Etat prévoit que l'employé dont le poste a été supprimé est prioritaire sur les autres postulants, internes et externes, et que l'OPE peut imposer sa réaffectation. Cette prérogative ne concerne toutefois que les collaborateurs et les cadres intermédiaires. Le Conseil d'Etat estime que pour les cadres supérieurs, l'application d'une telle règle irait à l'encontre des intérêts de l'Etat. Certes, il ne peut être exigé de ce dernier qu'il place à une fonction clé de son administration et de son organisation une personne qui disposerait des compétences pour le poste à pourvoir, mais dont les capacités seraient inférieures à celles d'autres postulants. Le principe de la proportionnalité exige que l'Etat choisisse, parmi des mesures également aptes à atteindre l'intérêt public visé, celle qui est la moins dommageable pour l'administré. Si un intérêt public prépondérant à l'intérêt privé de l'employé existe, le principe de la proportionnalité n'est pas violé. Ainsi en va-t-il lorsqu'un candidat à une haute fonction s'avère meilleur que celui dont le poste a été supprimé. La réserve pour les cadres supérieurs figurant dans le dispositif ne viole ainsi pas la loi, si elle est assortie de mesures concrètes et sérieuses d'accompagnement, garantissant que tout a été mis en œuvre pour tenter un reclassement. Ainsi, la condition de subsidiarité figurant à l'art. 23 al. 2 LPAC ne s'interprète pas de la même manière selon qu'il s'agit d'un cadre supérieur ou d'un autre collaborateur. Cette interprétation différenciée se justifie par le fait qu'elle est guidée par le principe de la proportionnalité et que les intérêts publics et privés mis en balance ne sont pas de même poids, selon que l'on se trouve en présence du reclassement d'un cadre supérieur ou de celui d'un autre collaborateur.

10. Enfin, l'obligation de l'Etat de rechercher un autre emploi correspondant aux capacités du membre du personnel dont le poste a été supprimé se double, corrélativement, d'une obligation de l'employé, non seulement de ne pas faire obstacle aux démarches entreprises par l'administration, mais de participer activement à son reclassement.

En l'espèce, tel n'a pas été le cas et l'on ne pouvait demander à l'Etat, au vu de cette situation, davantage que ce qu'il a entrepris. On doit admettre qu'il a fait tout ce que l'on pouvait raisonnablement exiger de lui dans les circonstances, conformément au principe de la proportionnalité.

Le grief de violation de l'art. 23 LPAC doit ainsi être écarté.

11. La validité de la date d'échéance des rapports de service ne sera pas examinée. En effet, la recourante n'a pas pris de conclusions dans ce sens. En outre, son délai de congé a été prolongé de trois mois par la décision de l'OPE du 4 juillet 2008, suite au différend survenu entre les parties au sujet de la date de notification de l'arrêté attaqué. Cette solution ayant donné droit aux revendications de la recourante, le recours n'a plus d'objet sur ce point.

12. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 LPA). En application de l'art. 87 al. 2 LPA, il ne lui sera pas alloué d'indemnité.

 

* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 novembre 2007 par Madame S______ contre la décision du Conseil d'Etat du 31 octobre 2007 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 2'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

-  par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

-  par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

-  par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 et suivants LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Christian Bruchez, avocat de la recourante ainsi qu'au Conseil d'Etat.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, juges, M. Hottelier, juge suppléant.

 

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :