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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3655/2016

ATA/330/2018 du 10.04.2018 sur JTAPI/1074/2017 ( ICCIFD ) , ADMIS

Recours TF déposé le 18.05.2018, rendu le 31.05.2019, PARTIELMNT ADMIS, 2C_444/2018
Descripteurs : DUPLIQUE ; PRESCRIPTION ; LEX MITIOR ; INTENTION ; NÉGLIGENCE ; DOL ÉVENTUEL ; FAUTE ; SOUSTRACTION D'IMPÔT ; TAXATION CONSÉCUTIVE À UNE PROCÉDURE ; AMENDE
Normes : LPA.74; LIFD.124.al1; LIFD.175; LHID.56.al1; LPFisc.26.al1; LPFisc.28.al1; LPFisc.69
Résumé : La violation d'une obligation légale est réalisée. L'AFC-GE a considéré sur la base des informations en sa possession que l'intimé était assujetti à Genève et devait par conséquent remplir ses formules d'impôt. Elle a statué sur l'assujettissement. Par conséquent, il appartenait ensuite au contribuable de réfuter, preuves à l'appui, le bien-fondé de cet assujettissement, tout en respectant son obligation légale, soit en remettant ses déclarations fiscales.
En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3655/2016-ICCIFD ATA/330/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 avril 2018

4ème section

 

dans la cause

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

contre

Monsieur A______
représenté par Me Xavier Oberson et Me Dominique Gay, avocats

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________




Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2  octobre 2017 (JTAPI/1074/2017)

 


EN FAIT

1) Monsieur A______ a quitté Genève pour le Kenya le 1er avril 1989. Il y a créé une société. Il a également travaillé sur un projet depuis la Suisse et a été employé par deux sociétés sises à Genève dès 1990.

2) Victime d'un grave accident de la circulation le 8 décembre 1991, M. A______ perçoit depuis lors une rente mensuelle d'invalidité et une rente mensuelle de la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : SUVA) ; il souffre de troubles de la concentration.

3) En juillet 1995, M. A______ a créé B______ Sàrl
(ci-après : B______), société actuellement en liquidation, sise à Meyrin et dont il est seul associé.

Entre 1995 et 2007, M. A______ a perçu des salaires de la part de B______. Étant donné qu'il résidait au Kenya, ces rémunérations ont été soumises à l'impôt à la source.

4) En 1996, M. A______ a acquis une maison en France, à C______ et sa fille est née l'année d'après. Étant séparé de la mère, il exerçait son droit de visite un week-end sur deux et durant la moitié des vacances scolaires.

5) Par courrier recommandé du 15 décembre 2005, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a informé M. A______ de l'ouverture d'une procédure de rappel et soustraction d'impôt concernant l'impôt cantonal et communal (ci-après : ICC) 2000 à 2004 et l'impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 1995 à 2004.

M. A______ était invité à remplir, signer et retourner ses déclarations fiscales, avec les justificatifs, avant le 13 janvier 2006.

Un bordereau de rappel d'impôt pour l'ICC 2000 lui était également remis dans le but de préserver les droits de l'administration, qui se réservait également la possibilité de lui infliger une amende.

6) Le 26 janvier 2006, M. A______ a retourné à l'AFC-GE les déclarations fiscales qu'il n'avait pas remplies, dès lors qu'il n'était pas domicilié à Genève. Il a également contesté le bordereau de rappel d'impôt pour l'ICC 2000, qui devait être annulé.

7) Le 29 septembre 2008, l'AFC-GE a décidé de l'assujettissement de manière illimitée à Genève de M. A______ dès le 1er janvier 2001.

Contestée, cette décision a été confirmée le 12 mai 2015 par le Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 2C_924/2014).

8) Le 22 juillet 2009, l'AFC-GE a notifié à M. A______ un bordereau de taxation d'office ICC et IFD pour l'exercice fiscal 2008.

9) Le 14 août 2009, M. A______ a élevé réclamation contre ce dernier, concluant à son annulation.

10) Par courrier recommandé du 8 juillet 2015, faisant suite à l'arrêt du Tribunal fédéral du 12 mai 2015, l'AFC-GE a informé M. A______ qu'en complément à la lettre du 15 décembre 2005, elle décidait d'ouvrir à son encontre une procédure en rappel et en soustraction d'impôt pour les années 2005 à 2008, tant pour l'ICC que pour l'IFD.

M. A______ était invité à retourner ses déclarations fiscales pour les années 2000 à 2008.

11) Les 30 octobre 2015, M. A______ a transmis à l'AFC-GE ses déclarations d'impôts pour les années 2005 à 2008 et a demandé un délai pour remettre ses déclarations fiscales 2000 à 2004.

12) Par décision du 20 novembre 2015, l'AFC-GE a décidé de maintenir le bordereau de rappel d'impôt ICC 2000. Le 25 novembre 2015, l'AFC-GE a fait parvenir à M. A______ le bordereau d'amende ICC 2000. Le 22 décembre 2015, M.  A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre ces décisions, concluant à leur annulation avec suite de dépens.

13) Le 5 février 2016, M. A______ a transmis à l'AFC-GE ses déclarations 2000 à 2004.

14) Le 29 février 2016, l'AFC-GE a notifié à M. A______, tant pour l'IFD que pour l'ICC, les bordereaux de taxation pour les années 2001 à 2004, les bordereaux de rappel d'impôt pour les années 2005 à 2008, les bordereaux d'amende pour tentative de soustraction pour les années 2001 à 2004 ainsi que les bordereaux d'amende pour soustraction d'impôt pour les années 2005 à 2008.

En dissimulant son domicile fiscal à Genève, il n'avait pas été imposé sur sa réelle capacité contributive. Il en résultait une soustraction d'impôt qui était due à une faute intentionnelle. S'agissant de la tentative de soustraction, la quotité de l'amende avait été ramenée aux deux tiers du montant de l'impôt soustrait. Pour la soustraction consommée, l'amende avait été fixée au montant de l'impôt soustrait. Pour l'année 2004 toutefois, le montant de l'amende équivalait à celui des impôts.

15) Le 31 mars 2016, M. A______ a élevé réclamation à l'encontre des bordereaux d'amende précités, concluant à leur annulation.

Il n'avait pas tenté de se soustraire à ses obligations fiscales. Il était au contraire convaincu que ses liens avec la France étaient plus forts que ceux avec la Suisse.

16) Par jugement du 19 septembre 2016 (JTAPI/944/2016), le TAPI a annulé le bordereau d'ICC 2000, à la suite du recours interjeté par M. A______ le 22 décembre 2015.

17) Le 23 septembre 2016, faisant suite aux réclamations du 31 mars 2016 l'AFC-GE a décidé, par deux décisions séparées pour l'ICC et l'IFD, de maintenir les amendes et leur quotité, de modifier la taxation 2005 selon les remarques formulées par M. A______ et de maintenir la quotité de l'amende dont le montant était calculé sur la taxation rectifiée.

Dès lors que les bordereaux de taxation 2001 à 2004 et de rappel d'impôts 2006 à 2008 du 29 février 2016 n'étaient pas contestés, ses taxations étaient entrées en force et il y avait lieu de considérer comme dûment établi que M.  A______ avait soustrait des montants d'impôts de CHF 202'958.- (ICC) et de CHF  28'559 (IFD) et que la collectivité publique avait subi une perte fiscale non négligeable.

M. A______ avait volontairement voulu tromper les autorités fiscales afin de ne pas être taxé. Cette présomption ne se laissait pas facilement renverser, car il était difficile d'imaginer quel autre motif pourrait conduire un contribuable à fournir à l'administration des informations qu'il savait incorrectes. En n'étant imposé nulle part pendant de nombreuses années, M. A______ était manifestement conscient de l'absence d'imposition. La faute devait être qualifiée d'intentionnelle. Considérant le caractère répétitif et l'importance des montants soustraits, l'amende apparaissait modérée.

18) Par acte du 25 octobre 2016, M. A______ a interjeté recours auprès du TAPI contre les décisions précitées, concluant à leur annulation ainsi qu'à celle des bordereaux d'amende.

Le fait d'accepter un rappel d'impôt ne valait pas aveu de soustraction. Il avait considéré que, dans la mesure où le Tribunal fédéral avait confirmé son assujettissement pour les années 2000 à 2008, il devait admettre que des taxations soient effectuées. En revanche, il entendait contester le droit de l'AFC-GE de lui notifier des amendes, tant pour des motifs de procédure, que sur le fond.

a. L'AFC-GE n'avait pas ouvert de procédure en tentative de soustraction pour les années 2001 à 2004, mais seulement une procédure de soustraction consommée. En effet, les dispositions légales citées dans la lettre du 15 décembre 2005 étaient celles relatives à la soustraction consommée. Par conséquent, la procédure n'avait pas été valablement ouverte et aucune amende pour soustraction ou tentative de soustraction ne pouvait être notifiée pour les années 2001 à 2004.

Pour 2005 à 2007, les procédures de taxation ordinaire avaient été ouvertes par l'envoi de déclarations d'impôt pour chacune des années en cause. Il avait à chaque fois contesté son assujettissement, de sorte que le délai de prescription ne courait pas. Dès lors, l'AFC-GE ne pouvait pas ouvrir une procédure en soustraction d'impôt mais aurait dû le taxer dans le cadre d'une procédure de taxation ordinaire.

Pour 2008, une taxation d'office avait été notifiée et contestée par réclamation du 22 janvier 2009, mais aucune procédure en tentative de soustraction n'avait été ouverte de sorte que, formellement, aucune amende ne devrait pouvoir être mise à sa charge. En tout état, aucune amende pour soustraction consommée ne pouvait être mise à sa charge dans la mesure où une réclamation était pendante.

Si par impossible le TAPI devait considérer que les courriers d'ouverture de procédure avaient été valablement notifiés, il ne pourrait s'agir que de procédure de tentative de soustraction, sachant qu'aucune taxation n'était entrée en force, et seules les infractions intentionnelles étaient punissables en cas de tentative.

b. Nairobi restait le lieu où il avait l'intention de s'établir. Il n'avait aucune intention de vivre en Suisse. Son accident et ses suites médicales et judiciaires l'avaient contraint à résider dans la région genevoise plus longtemps que souhaité. Compte tenu de ses liens avec la France voisine, soit sa fille et sa maison, il avait pensé de bonne foi que si un domicile dans la région devait être admis, ce serait plutôt en France. Ce n'était qu'à l'issue d'une longue procédure que la question du domicile fiscal avait pu être tranchée. Il ignorait qu'il était assujetti aux impôts à Genève, de sorte qu'on ne saurait lui reprocher d'avoir fait en sorte que ses taxations ne soient pas effectuées.

19) Dans ses observations du 27 février 2017, l'AFC-GE a conclu au rejet du recours.

20) Dans sa réplique du 21 mars 2017, M. A______ a persisté dans les conclusions de son recours.

Il a invoqué la prescription des amendes pour 2001 à 2005 en raison de l'entrée en vigueur le 1er janvier 2017 des nouvelles dispositions de droit pénal fiscal. Les amendes pour les années 2006 à 2008 étaient également prescrites, dès lors qu'elles auraient dû être prononcées pour tentative de soustraction. En effet, aucune taxation n'était entrée en force lorsque les deux procédures avaient été ouvertes, la prescription du droit de taxer ayant été suspendue pendant la procédure de contestation d'assujettissement.

21) Dans sa duplique du 9 juin 2017, l'AFC-GE a conclu à l'admission partielle du recours, considérant que la poursuite pénale pour l'année 2005, tant pour l'ICC que pour l'IFD, était effectivement prescrite, vu le nouveau droit entré en vigueur au 1er janvier 2017 et l'application du principe de la lex mitior.

22) Par jugement du 2 octobre 2017, le TAPI a admis le recours, restitué l'avance de frais à M. A______ et condamné l'État de Genève, soit pour lui
l'AFC-GE, à lui verser une indemnité de CHF  1'500.- à titre de dépens.

Le 26 janvier 2006, il avait retourné ses formules de déclarations fiscales 2001 à 2004 non remplies en relevant qu'il contestait son assujettissement. Ce faisant, il n'avait pas violé son obligation de déclarer l'ensemble de ses revenus et fortune, par le biais de la remise au fisc d'une déclaration d'impôt complète et conforme à la vérité. Au contraire, il s'était contenté d'user de son droit de remettre en cause son assujettissement aux impôts suisses, en réclamant une décision préjudicielle à ce sujet, ainsi que la loi le lui permettait. Certes, l'intéressé avait été débouté en dernière instance par le Tribunal fédéral, mais celui-ci n'avait pas retenu que la contestation soulevée se révélait manifestement abusive. Au contraire, le Tribunal fédéral avait examiné l'ensemble des circonstances de la vie sociale et professionnelle du contribuable, pour retenir qu'il avait échoué dans la démonstration qu'il s'était effectivement créé un domicile en France.

Pour ces motifs, en ne déposant pas de déclaration fiscale pour les années 2001 à 2008, M. A______ n'avait pas adopté un comportement illicite. Par conséquent, l'ensemble des éléments objectifs d'une soustraction tentée, respectivement consommée n'étaient pas réunis et pour ce seul motif, les bordereaux d'amende 2001 à 2008 pour l'ICC et l'IFD étaient annulés.

23) Par acte du 10 novembre 2017, l'AFC-GE a interjeté recours contre le jugement précité, concluant à son annulation et à la confirmation de ses propres décisions du 23 septembre 2016, sous réserve de celles concernant l'année fiscale 2005, la poursuite pénale pour cet exercice ayant été atteinte par la prescription en cours de procédure devant le TAPI.

Le TAPI ne pouvait pas se contenter de dire que l'obligation de déclarer les revenus et la fortune tombait du simple fait que le contribuable contestait son assujettissement. Un tel raisonnement exclurait toute punissabilité du contribuable du moment qu'il contestait son assujettissement. Sans l'analyser dans le cas d'espèce, le TAPI avait réservé la punissabilité aux cas d'abus de droit, ce qui était trop restrictif.

Tout contribuable assujetti avait l'obligation de remplir une déclaration fiscale de manière conforme à la vérité et la remettre à l'autorité compétente. Le fait de ne pas avoir reçu de formule de déclaration ne dispensait pas du paiement des impôts, ni de l'obligation de faire une déclaration. Le fait de contester l'assujettissement pour des raisons fondées ou non ne faisait pas disparaître cet assujettissement ni les obligations qui en découlaient.

L'obligation de remettre une déclaration reposait sur des faits objectifs et ne naissait pas à la suite d'une décision d'assujettissement. L'assujettissement débutait le jour où le contribuable prenait domicile en Suisse, respectivement dans le canton, ou y commençait son séjour au regard du droit fiscal ou encore le jour où il y acquérait un élément imposable.

Le contribuable qui ne remettait pas de déclaration fiscale, car il considérait ne pas être assujetti, ne commettait pas en soi de faute et ce n'était pas parce que le contribuable était débouté à l'issue de la procédure d'assujettissement qu'une amende était ipso facto méritée. Mais cette question devait être examinée sous l'angle de la faute et non de l'acte illicite. Le TAPI ne pouvait pas faire l'impasse sur l'examen de la faute.

Lorsqu'il s'agissait d'examiner la culpabilité du contribuable, il ne pouvait être ignoré que durant vingt-quatre ans, M. A______ n'avait selon toute vraisemblance payé ses impôts dans aucun État. Le TAPI n'avait pas relevé cet élément pourtant capital. Dès lors que M. A______ avait des liens avec plusieurs États (Kenya, France et Suisse), il lui incombait de s'informer sur ses obligations en matière fiscale. En tant qu'homme d'affaires, capable de fonder plusieurs sociétés, assisté par des mandataires, il aurait aisément pu le faire. M. A______ s'était accommodé du risque que son revenu réalisé à Genève n'y soit pas dûment taxé.

La quotité des amendes correspondait à une sanction ordinaire en l'absence de motifs particuliers. Cela apparaissait même modéré, compte tenu du caractère répétitif et de l'importance des montants soustraits. Le montant de l'amende pour tentative de soustraction avait été réduit à deux tiers conformément à la loi. Pour ces motifs, les amendes litigieuses n'apparaissaient pas disproportionnées.

24) Le 20 novembre 2017, le TAPI a transmis son dossier sans formuler d'observations.

25) Dans ses observations du 12 décembre 2017, l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC-CH) a conclu à l'admission du recours.

26) Dans sa réponse du 22 décembre 2017, M. A______ a conclu au rejet du recours « sous suite de frais et dépens ».

27) Le 16 janvier 2018, faisant suite aux observations de l'AFC-CH, M. A______ a persisté dans ses conclusions.

Si une procédure de contestation d'assujettissement donnait droit à une décision préalable c'était bien pour éviter l'obligation de remplir une déclaration aussi longtemps que l'assujettissement n'était pas constaté et pour que les droits et obligations de procédure des parties soient clarifiés avant d'exiger du contribuable qu'il dévoile sa situation à une autorité qui n'aurait, peut-être, aucun droit à l'exiger.

28) Par courrier du 19 janvier 2018, l'AFC-GE a persisté dans ses conclusions.

29) Le 29 janvier 2018, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

30) Par courrier du 8 février 2018, M. A______ a pris bonne note que la cause était gardée à juger sans que lui ait été accordé le droit de dupliquer au courrier de l'AFC-GE du 19 janvier 2018. Il tenait toutefois à se déterminer et persistait dans les conclusions de sa réponse du 22 décembre 2017.

L'AFC-GE indiquait que la taxation d'office 2008 du 22 juillet 2009 aurait été annulée sans fournir aucune pièce à l'appui de cette allégation, ce qui s'expliquait aisément, dès lors que M. A______ n'avait pas reçu d'avis d'annulation. Le relevé de compte 2008 annexé au bordereau de rappel d'impôt permettait de constater que le bordereau de taxation d'office n'avait pas été annulé, mais que le bordereau de rappel d'impôt s'était ajouté à la taxation d'office. Par conséquent, l'administration aurait dû statuer en février 2016 dans le cadre de la réclamation contre cette taxation d'office et ne pouvait pas mettre une amende pour soustraction consommée à la charge de M. A______.

31) Le 13 février 2018, le juge délégué a accusé réception du courrier du 8  février 2018 et informé M. A______ qu'il serait statué sur sa recevabilité dans l'arrêt à rendre au fond.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12  septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 7 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 - LPFisc - D 3 17 ; art. 145 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2) Aux termes de l'art. 74 LPA, la juridiction peut autoriser une réplique et une duplique si ces écritures sont estimées nécessaires.

De plus, l'exercice du droit de se déterminer sur les écritures de la partie adverse est garanti par l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101 ; ATF 133 I 98 ; ATF 132 I 42 ; SJ 2007 I 487), étant précisé que cette notion s'applique uniquement aux personnes protégées par la convention précitée, ce qui n'est pas le cas des autorités dans une procédure administrative (ATA/193/2014 du 1er avril 2014).

Au vu du pouvoir d'appréciation que lui laisse l'art. 74 LPA, la chambre administrative n'a pas autorisé un deuxième échange d'écritures. Toutefois, en application du principe rappelé ci-dessus, on doit admettre la duplique de l'intimé reçue le 9 février 2018 par la chambre administrative suite à la réplique produite par l'AFC-GE le 19 janvier 2018, sans que cette dernière soit amenée à pouvoir y répondre (ATA/752/2011 du 8 décembre 2011), tous ses arguments étant pris en compte.

3) Le litige porte sur les exercices fiscaux 2001 à 2004 et 2006 à 2008 et concerne tant l'IFD et l'ICC.

4) La prescription ou la péremption sont des questions de droit matériel que la chambre administrative, à l'instar du Tribunal fédéral, examine d'office lorsqu'elles jouent en faveur du contribuable (ATF 138 II 169 consid. 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_177/2016 du 30 juin 2017 consid. 3 ; ATA/686/2017 du 20  juin 2017). Il appartenait au TAPI de trancher cette question avant de statuer sur le fond du litige.

5) a. De jurisprudence constante, les questions de droit matériel sont résolues par le droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses (arrêts du Tribunal fédéral 2C_663/2014 du 25 avril 2015 consid. 4 ; 2C_476/2014 du 21 novembre 2014 consid. 4.1 ; ATA/1641/2017 du 19 décembre 2017 et les arrêts cités).

Le rappel d'impôt relevant du droit matériel, le droit applicable obéit aux mêmes règles (arrêts du Tribunal fédéral 2C_663/2014 précité consid. 4 ; 2C_620/2012 du 14 février 2013 consid. 3.1 ; ATA/1641/2017 précité et les arrêts cités).

La prescription est également une institution de droit matériel qui concerne directement l'existence de la créance fiscale (arrêt du Tribunal fédéral 2P.227/2002 du 19 juin 2003 ; RDAF 2002 II 89 p. 94 et les arrêts cités ; ATA/37/2014 du 21 janvier 2014). Elle est aussi soumise au droit en vigueur au cours des périodes fiscales litigieuses.

Le principe de la lex mitior s'applique aux amendes (ATA/192/2018 du 27  février 2018 et les références citées).

b. En l'espèce, sont applicables en matière d'IFD, les dispositions de la LIFD. En matière d'ICC, la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), entrée en vigueur le 1er janvier 2010, ne s'applique qu'à partir de l'exercice fiscal 2010 (art. 72 LIPP). Le litige est donc soumis aux cinq lois cantonales que la LIPP a remplacées, désignées à l'art. 69 LIPP qui les abroge, ainsi qu'à leur réglementation d'application (art. 72 al. 1 phr. 2 LIPP). Il est également soumis aux dispositions de la LPFisc, entrée en vigueur le 1er janvier 2002 (art. 86 LPFisc) et qui précise à son art. 86 que les règles de procédure s'appliquent dès son entrée en vigueur aux causes encore pendantes. La LPA est au surplus applicable dans la mesure où la LPFisc n'y déroge pas (art. 2  al. 2 LPFisc).

6) L'intimé invoque la prescription de l'action pénale.

Il est admis que la prescription de la poursuite pénale pour l'année fiscale 2005 a été atteinte en cours de procédure devant le TAPI. Reste à trancher la question pour les exercices fiscaux 2001 à 2004 et 2006 à 2008, en distinguant l'IFD et l'ICC.

a. La LIFD est entrée en vigueur le 1er janvier 1995. L'art. 184 LIFD dans sa teneur avant le 1er octobre 2002 (ci-après : 184 aLIFD) prévoit que la poursuite pénale se prescrit en cas de tentative de soustraction d'impôt par quatre ans à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la tentative de soustraction a été commise (al. 1 let. a). Elle se prescrit, en cas de soustraction d'impôt consommée, par dix ans a compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée ou l'a été de façon incomplète
(al. 1 let.  b)

Selon l'art. 184 al. 2 aLIFD, la prescription est interrompue par tout acte de procédure tendant a la poursuite du contribuable. L'interruption est opposable au contribuable. Un nouveau délai commence a courir a chaque interruption ; la prescription ne peut toutefois être prolongée de plus de la moitie de sa durée initiale.

b. Le 1er octobre 2002, l'art. 72 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), a été abroge. Il prévoyait la possibilité d'interrompre le délai de prescription de l'action pénale (RO 2002 2993). Afin de compenser le raccourcissement de l'ensemble des délais de prescription fixés par le droit pénal accessoire, la loi fédérale du 22 mars 2002 relative a la prescription de l'action pénale (RO 2002 2986 ; FF 2002 2512) avait introduit une réglementation transitoire a l'art. 333 al. 5 CP (ci-après : 333 al. 5 aCP), abrogée le 1er janvier 2011.

Ainsi, aux termes de l'art. 333 al. 5 aCP, jusqu'à l'adaptation des autres lois fédérales, les délais de prescription de l'action pénale pour les contraventions qui dépassent un an sont augmentés de la durée ordinaire (b) ; la prescription de l'action pénale ne court plus si, avant son échéance, un jugement de première instance a été rendu (d).

c. Le nouvel art. 184 LIFD est entré en vigueur le 1er janvier 2017. Il prévoit que la poursuite pénale se prescrit en cas de tentative de soustraction d'impôt par six ans à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la tentative de soustraction a été commise (al. 1 let. a) et en cas de soustraction d'impôt consommée, par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée ou l'a été de façon incomplète (al. 1 let. b, ch.1).

La prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente avant l'échéance du délai de prescription (al. 2).

d. Ainsi, jusqu'à la modification du 1er octobre 2002, le délai de prescription absolue était de six ans en matière de tentative de soustraction fiscale
(art. 184 al.  1 let. a et al. 2 in fine aLIFD). Il était de huit ans sur la base de
l'art. 333 al. 5 let. b CP. Il est de six ans sur la base du nouvel art. 184 LIFD.

Quant à la soustraction fiscale consommée, elle se prescrivait par quinze ans jusqu'au 1er octobre 2002 (art. 184 al. 1 let. b et al. 2 in fine aLIFD). Le délai de prescription était de vingt ans sous l'art. 333 al. 5 let. b CP. Il est de dix ans sur la base du nouvel art. 184 LIFD.

e. En l'espèce, les bordereaux de taxation pour les années fiscales 2001 à 2004 ont été notifiés le 29 février 2016. Ils n'ont pas été contestés si bien qu'ils sont entrés en force au plus tôt le 29 mars 2016. C'est à partir de ce moment que les délais de prescription ont commencé à courir. Par conséquent, s'agissant de la tentative de soustraction, les délais de prescription ne sont pas échus.

De même pour les bordereaux de rappel d'impôts 2006 à 2008, quel que soit le droit appliqué, la prescription n'est pas atteinte pour les poursuites pénales concernant les soustractions consommées.

Partant, l'action pénale n'est pas prescrite en matière d'IFD.

7) a. La loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) est entrée en vigueur le 1er janvier 1993. L'art. 58 LHID dans sa teneur avant le 1er octobre 2002 (ci-après : l'art. 58 aLHID) prévoit à son al. 1 que la poursuite de la tentative de soustraction se prescrit par quatre ans à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la violation d'obligations de procédure ou la tentative de soustraction a été commise. Elle se poursuit par dix ans en cas soustraction d'impôt consommée, à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle le contribuable n'a pas été taxé ou l'a été de manière incomplète (al. 2).

Selon l'art. 58 al. 3 aLHID, la prescription est interrompue par tout acte de procédure tendant à la poursuite de l'infraction introduit à l'encontre du contribuable. L'interruption est opposable au contribuable. Un nouveau délai commence à courir à chaque interruption; la prescription ne peut toutefois être prolongée de plus de la moitié de sa durée initiale (al. 3).

b. La LHID a également été modifiée le 1er janvier 2017 afin de tenir compte des nouvelles dispositions du CP.

À teneur du nouvel art. 58 LHID, la poursuite de la tentative de soustraction se prescrit par six ans, à compter de la clôture définitive de la procédure au cours de laquelle la tentative de soustraction a été commise (al. 1). La poursuite de la soustraction d'impôt consommée se prescrit par dix ans à compter de la fin de la période fiscale pour laquelle le contribuable n'a pas été taxé ou l'a été de manière incomplète (al. 2 let. a). La prescription ne court plus si une décision a été rendue par l'autorité cantonale compétente avant l'échéance du délai de prescription (al. 3).

c. Ainsi, jusqu'au 1er octobre 2002, le délai de prescription absolu était de six ans en matière de tentative de soustraction fiscale (art. 58 al. 1 et al. 3 aLHID). Il était de huit ans sur la base de l'art. 333 al. 5 let. b aCP. Il est de six ans sur la base du nouvel art. 58 LHID.

Quant à la poursuite pour soustraction fiscale consommée, elle se prescrivait par quinze ans sous l'ancien droit. Ce délai était de vingt ans sous l'art. 333 al. 5 let. b aCP. Il est réduit à dix ans depuis le 1er janvier 2017.

d. En l'espèce, les bordereaux d'impôt pour les années 2001 à 2004 ont été notifiés le 29 février 2016. Toutefois, ce sont les décisions sur réclamation rendues le 23 septembre 2016 qui ont clôturé la procédure. Ainsi, sous l'ancien droit, le délai de six ans a commencé à courir à compter de la clôture définitive des procédures de taxation, soit le 23 octobre 2016 au plut tôt.

Selon le nouveau droit, les procédures au cours desquelles les tentatives de soustraction ont été commises ont été clôturées par les décisions de taxation rendues le 29 février 2016, faisant ainsi partir le délai de six ans. Toutefois, à cette date, les délais ont également cessé de courir (art. 58 al. 3 LHID).

Par conséquent, les délais de prescription ne sont pas échus pour les poursuites pénales concernant les tentatives de soustractions en matière d'ICC pour les années 2001 à 2004.

De même, pour les bordereaux de rappel d'impôt 2006 à 2008, quel que soit le droit appliqué, la prescription n'est pas atteinte pour les poursuites pénales concernant les soustractions consommées.

Partant, l'action pénale n'est pas prescrite en matière d'ICC.

8) L'intimé soutient, et le TAPI lui a donné raison, qu'il n'était pas tenu de remplir ses déclarations d'impôt, tant que son assujettissement était contesté.

9) Parmi les obligations de procédure, l'art. 124 al. 1 LIFD et l'art. 26 al. 1 et 28 al. 1 LPFisc prévoient que les contribuables sont invités à remplir et à déposer une formule de déclaration d'impôt. Les contribuables qui n'ont pas reçu de formule doivent en demander une à l'autorité compétente.

Selon la doctrine, les contribuables inscrits au rôle ou au registre des contribuables présumés (art. 122 LIFD) sont tenus de remplir et de déposer la déclaration d'impôt qu'ils reçoivent. Le fait de n'avoir pas reçu de formule de déclaration d'impôt, pour quelque motif que ce soit, ne dispense pas le contribuable de cette obligation (Isabelle ALTHAUS-HOURIET in Yves NOËL/Aubry GIRARDIN [éd.], Impôt fédéral direct, Commentaire de la loi sur l'impôt fédéral direct, 2017, ad. art. 124 LIFD, p. 1647 n. 1). L'obligation de remplir la déclaration fait partie des obligations de procédure du contribuable dont la violation est sanctionnée (art. 174 al. 1 let. a LIFD ; Isabelle ALTHAUS-HOURIET, op. cit. p. 1648 n. 2).

10) a. Aux termes de l'art. 175 LIFD, le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu'une taxation ne soit pas effectuée alors qu'elle devrait l'être, ou qu'une taxation entrée en force soit incomplète, est puni d'une amende (al. 1). En règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait ; si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant et si elle est grave, elle peut au plus être triplée (al. 2).

b. Les art. 56 al. 1 LHID, applicables dès le 1er janvier 2001 (ATA/975/2014 du 9 décembre 2014 ; ATA/57/2014 du 4 février 2014) et 69 al. 1 LPFisc relatifs à la soustraction d'impôt, ont la même teneur que l'art. 175 LIFD. La chambre de céans peut ainsi ne rendre qu'un seul arrêt valant pour les deux amendes prononcées, ce qui est admissible, dès lors que l'amende pour soustraction fiscale est réglée de la même façon en droit fédéral et dans le droit cantonal harmonisé (ATF 135 II 260 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_907/2012 du 22 mai 2013 consid. 1 et 2C_918/2012 du 11 février 2013 consid. 1).

c. Pour qu'une soustraction fiscale soit réalisée, trois éléments doivent être réunis : la soustraction d'un montant d'impôt, la violation d'une obligation légale incombant au contribuable et la faute de ce dernier (arrêt du Tribunal fédéral 2C_907/2012 précité consid. 5). Les deux premières conditions sont des éléments constitutifs objectifs de la soustraction fiscale, tandis que la faute en est un élément constitutif subjectif (ATA/370/2015 du 21 avril 2015 et les références citées).

11) a. La soustraction est punissable aussi bien intentionnellement que par négligence (ATA/1019/2015 du 29 septembre 2015 ; ATA/724/2015 du 14 juillet 2015).

b. Il y a comportement intentionnel lorsqu'il est établi avec une sécurité suffisante que le contribuable était conscient que les informations données étaient incomplètes ou incorrectes ; si cette conscience est avérée, on peut alors présumer l'intention ou du moins le dol éventuel (Xavier OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, n 26 p. 587). Une telle présomption est difficile à renverser à teneur de la jurisprudence constante (ATF 114 Ib 27 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 5.5 ; RDAF 2003 II 632 ss, notamment 637, et la jurisprudence citée).

c. Il y a negligence lorsque, par une imprevoyance coupable, un contribuable ne se rend pas compte ou ne tient pas compte des consequences de son acte. Tel est le cas lorsque le contribuable n'a pas use des precautions commandees par les circonstances et par sa situation personnelle (art. 12 al. 3 du Code penal suisse du 21 decembre 1937 - CP - RS 311.0 ; RDAF 2003 II 622, 631 ; Xavier OBERSON, op. cit., p. 587 n. 18). Agit par negligence, au sens de l'art. 12 CP, quiconque, par une imprevoyance coupable, agit sans se rendre compte (negligence inconsciente) ou sans tenir compte des consequences de son acte (negligence consciente). L'imprevoyance est coupable quand l'auteur n'a pas use des precautions commandees objectivement par les circonstances et subjectivement par sa situation personnelle, par quoi on entend sa formation, ses capacites intellectuelles, sa situation economique et sociale ainsi que son experience professionnelle. Si le contribuable a des doutes sur ses droits ou obligations, il doit faire en sorte de lever ce doute ou, au moins, en informer l'autorite fiscale (ATF 135 II 86 consid. 4.3 ; ATA/907/2016 du 25 octobre 2016 et les références citées). La negligence implique de porter un jugement sur le comportement de l'auteur, en se demandant ce qu'il aurait pu et du faire, et non de rechercher ce qu'il avait a l'esprit (ATA/686/2017 du 20 juin 2017 consid. 36b).

12) a. En l'espèce, dans l'analyse des trois conditions de la soustraction fiscale, la première condition, soit la soustraction d'un montant d'impôt, n'est pas litigieuse.

b. Est contestée la réalisation d'une violation d'une obligation légale incombant au contribuable, soit précisément l'obligation de remplir sa déclaration fiscale.

À l'appui de sa motivation, le TAPI cite un avis de doctrine selon lequel, lorsque le contribuable conteste son assujettissement à l'impôt, il peut demander une décision constatatoire préjudicielle relative à cet assujettissement avant de remplir une déclaration d'impôt. L'obligation de remettre une déclaration d'impôt dûment complétée ne déploiera ses effets qu'après l'entrée en force de cette décision (Isabelle ALTHAUS-HOURIET, op. cit. ad art. 124, n. 5a, p. 1649). Dans l'arrêt auquel cet avis se réfère, le Tribunal fédéral, qui avait à trancher la question de la recevabilité du recours qui lui était soumis, a mentionné que lorsqu'une personne conteste son assujettissement à l'impôt dans un canton, ce dernier doit, en règle générale, prendre une décision préjudicielle sur l'assujettissement avant de poursuivre la procédure de taxation. Il n'a toutefois pas tranché cette question (ATF 131 I 145 consid. 2.1).

La chambre de céans ne partage pas l'analyse du TAPI, dès lors qu'il ne peut être admis que l'obligation de déclarer les revenus et la fortune tombe du simple fait que le contribuable conteste son assujettissement. Cela reviendrait à dire que le simple fait de contester son assujettissement dispenserait le contribuable de ses obligations fiscales, jusqu'à droit jugé sur cette contestation, ce qui peut prendre plusieurs années. Ce raisonnement ne peut être celui voulu par le législateur.

En matière fiscale, quand des indices clairs et précis rendent vraisemblable l'état de fait établi par l'autorité, il revient ensuite au contribuable de réfuter, preuves à l'appui, les faits avancés par celle-ci (arrêts du Tribunal fédéral 2C_111/2012 du 25 juillet 2012 consid. 4.4 et 2C_484/2009 du 30 septembre 2010 consid. 3.3 ; ATA/ 1155/2017 du 2 août 2017).

En l'espèce, l'AFC-GE a considéré sur la base des informations en sa possession que l'intimé était assujetti à Genève et devait par conséquent remplir ses formules d'impôt. Elle a statué sur l'assujettissement. Par conséquent, il appartenait ensuite au contribuable de réfuter, preuves à l'appui, le bien-fondé de cet assujettissement, tout en respectant son obligation légale, soit en remettant ses déclarations fiscales.

Par conséquent, il sera constaté que l'intimé a commis un acte illicite. La condition objective de la violation d'une obligation légale est réalisée et le jugement du TAPI sera annulé sur ce point.

c. Il y a encore lieu d'examiner si la condition de la faute est réalisée.

Pendant les années fiscales en cause, l'intimé était employé d'une société qu'il avait lui-même créée à Genève. La création d'une entreprise implique des connaissances et une pratique du monde des affaires, de même que la capacité d'appréhender de nombreuses règles administratives et commerciales. Or, il ne pouvait raisonnablement penser qu'il ne serait pas assujetti à des impôts en Suisse, pays dans lequel il déploie l'essentiel de son activité. Compte tenu des circonstances, il devait à tout le moins s'en douter et s'informer sur ses obligations fiscales en Suisse.

L'intimé, qui dit avoir vécu au Kenya et en France, n'a ni allégué ni démontré avoir payé des impôts dans ces deux pays. Partant, il sera constaté que durant de nombreuses années, l'intimé s'est satisfait de n'être imposé dans aucun des trois pays avec lesquels il dit avoir des liens particuliers. Il savait qu'il ne versait aucune contribution au fisc français, ni même d'ailleurs au Kenya. Il ne peut prétendre avoir pensé, en toute bonne foi, ne pas être assujetti en Suisse. Partant, il ne pouvait ignorer le risque que son revenu réalisé à Genève n'y soit pas dûment taxé et il s'en est accommodé.

La condition subjective est ainsi également réalisée, sans devoir déterminer si l'intimé a agi de manière intentionnelle ou par négligence, dès lors que la soustraction est punissable dans les deux cas.

Il sera ainsi retenu que l'intimé a soustrait ou tenté de soustraire, par un comportement fautif, un montant d'impôt. Par conséquent, le bien-fondé des décisions attaquées sera confirmé.

13) a. Dans la mesure où elles respectent le cadre légal, les autorités fiscales cantonales disposent d'un large pouvoir d'appréciation lors de la fixation de l'amende (ATF 114 Ib 27 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1007/2012 du 15 mars 2013 consid. 5.2 et 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 6.2) et la chambre administrative ne les censure qu'en cas d'abus ou d'excès dans l'exercice de ce pouvoir (ATA/686/2017 précité consid. 37a ; ATA/765/2015 du 28 juillet 2015 ; ATA/42/2011 du 25 janvier 2011). De jurisprudence constante, l'autorité doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi (ATA/167/2012 du 27 mars 2012 ; ATA/42/2011 du 25 janvier 2011).

b. Conformément aux art. 175 al. 2 LIFD, 56 al. 1 LHID et 69 al. 2 LPFisc, en règle générale, l'amende est fixée au montant de l'impôt soustrait. Si la faute est légère, l'amende peut être réduite jusqu'au tiers de ce montant ; si la faute est grave, elle peut au plus être triplée.

En présence d'une infraction intentionnelle sans circonstances particulières, l'amende équivaut en principe au montant de l'impôt soustrait. Ce dernier constitue donc le premier critère de fixation de l'amende, la faute intervenant seulement, mais de manière limitée, comme facteur de réduction ou d'augmentation de sa quotité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_480/2009 du 16 mars 2010 consid. 6.2).

c. En l'espèce, l'AFC-GE a retenu que la faute de l'intimé ne pouvait être qualifiée de légère, dès lors qu'il avait agi durant de nombreuses années et que les montants soustraits sont importants. De plus, sa collaboration durant la procédure n'a pas été exemplaire. Il a régulièrement tardé à donner les informations demandées et a longtemps tenu des discours contradictoires, notamment quant à son domicile, dans le but d'induire en erreur l'administration fiscale.

L'AFC-GE a fixé la quotité des amendes à une fois le montant soustrait, ce qui est la sanction ordinaire en l'absence de motifs particuliers. Compte tenu du nombre d'exercices fiscaux en cause et des montants soustraits, cette sanction apparaît modérée. Quant à la tentative de soustraction, le montant de l'amende a été réduit à deux tiers conformément à la loi.

L'AFC-GE a ainsi agi dans le respect de la législation fiscale et de son pouvoir d'appréciation. Il n'y a dès lors pas lieu de remettre en cause le montant des amendes.

14) Dans un dernier grief, l'intimé soulève plusieurs vices de forme affectant les courriers d'ouverture de procédure.

a. Selon l'intimé, les procédures de rappel et de soustraction d'impôt 2001 à 2004 ne pouvaient être ouvertes, dès lors qu'une procédure ordinaire était encore possible. Ces rappels d'impôts devaient par conséquent être annulés.

En l'espèce, l'AFC-GE a ouvert le 15 décembre 2005 une procédure en rappel et soustraction d'impôt concernant l'ICC 2000 à 2004 et l'IFD 1995 à 2004. Par la suite, elle a notifié à l'intimé des bordereaux de taxation ordinaire et n'a retenu qu'une tentative de soustraction.

Cette manière de procéder n'entraîne aucun vice de forme, dès lors que le 15  décembre 2005, une taxation était alors encore possible. Elle est au contraire justifiée par les délais dans lesquels les informations ont été communiquées par l'intimé à l'autorité recourante. En effet, le 15 décembre 2005, le contribuable ne s'était pas manifesté auprès de l'AFC-GE et n'avait pas encore rempli ses déclarations fiscales. L'AFC-GE avait ainsi toutes les raisons de penser que l'intimé souhaitait échapper à ses obligations fiscales. L'ouverture d'une procédure en rappel d'impôt se justifiait. Ce n'est que le 5 février 2016 que le contribuable a finalement transmis à l'AFC-GE ses déclarations 2000 à 2004. En possession des déclarations d'impôts, l'AFC-GE a alors décidé de notifier au contribuable les bordereaux de taxation ordinaire du 29 février 2016, de même que les bordereaux d'amende pour tentative de soustraction pour les années 2001 à 2004, au lieu d'un bordereau de rappel d'impôt et d'un bordereau d'amende pour soustraction d'impôt consommée.

Le courrier du 15 décembre 2005 mentionnait également les dispositions légales relatives à la procédure pour tentative de soustraction. Les droits du contribuable ont ainsi été préservés et respectés.

b. Le même raisonnement doit être suivi pour les années 2005 à 2008, dès lors que l'AFC-GE a notifié à l'intimé à chaque étape de la procédure les documents adéquats et n'a ainsi commis aucun vice de forme.

En effet, par courrier recommandé du 8 juillet 2015, l'AFC-GE a informé le contribuable, qu'en complément à la lettre du 15 décembre 2005, elle décidait d'ouvrir à son encontre une procédure en rappel et en soustraction d'impôt pour les années 2005 à 2008, tant pour l'ICC que pour l'IFD. Étant rappelé que ce n'est que le 30 octobre 2015 que l'intimé a transmis à l'AFC-GE ses déclarations d'impôts pour les années 2005 à 2008.

À cette date du 8 juillet 2015, le délai de cinq ans pour procéder à la taxation ordinaire pour les années 2005 à 2008 était alors échu, le courrier du 15  décembre 2005 ne concernant pas les exercices après 2004. Contrairement à ce que soutient l'intimé, ce délai n'a pas été suspendu par la procédure ayant pour objet la question de l'assujettissement, définitivement close par l'arrêt du Tribunal fédéral du 12 mai 2015, dès lors que cette procédure n'avait pas le même objet. En effet, l'intimé y conteste la question de son assujettissement uniquement, et non pas celle de la taxation.

c. Pour 2008, la décision de taxation d'office a été rendue et contestée par réclamation en 2009. Selon l'AFC-GE, elle a dû être annulée au motif qu'elle avait été rendue alors qu'une procédure en constatation de l'assujettissement était encore en cours.

Dans l'impossibilité de procéder par la voie de la taxation d'office et en l'absence de déclarations fiscales complétées par le contribuable, c'était à juste titre que l'AFC-GE avait ouvert le 8 juillet 2015, soit à l'issue de celle constatant l'assujettissement, une procédure en rappel d'impôt, le délai de cinq ans pour taxer selon la procédure ordinaire étant échu.

Le fait que l'avis d'annulation de la taxation d'office ne figure pas au dossier n'est pas pertinent, dès lors qu'il est démontré que l'autorité recourante a par la suite ouvert une procédure en rappel d'impôt, si bien que le bordereau de rappel d'impôt ne s'est pas ajouté à celui de la taxation d'office, contrairement à ce que soutient l'intimé sans toutefois le démontrer.

Par conséquent, aucun vice de procédure n'affecte la procédure en rappel d'impôt pour 2008.

15) Compte tenu de ce qui précède, le recours sera admis, le jugement entrepris sera annulé et les décisions prononcées le 23 septembre 2016 confirmées. Seul le bordereau d'amende pour l'année 2005 sera annulé en raison de la prescription intervenue en cours de procédure devant le TAPI.

16) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de l'intimé, qui succombe et a pris matériellement des conclusions tendant au rejet du recours et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 1 LPA ; 12 al. 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 novembre 2017 par l'administration fiscale cantonale contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2  octobre 2017 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 2 octobre 2017 ;

annule le bordereau d'amende 2005 ;

confirme les décisions sur réclamation de l'administration fiscale du 23 septembre 2016 pour le surplus ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions, à Me Xavier Oberson et Me Dominique Gay, avocats de l'intimé, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Junod, présidente, Mme Krauskopf, juge, M. Hofmann, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :