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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3247/2015

ATA/30/2016 du 12.01.2016 sur JTAPI/1187/2015 ( ICCIFD ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3247/2015-ICCIFD ATA/30/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 12 janvier 2016

4ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

et

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 octobre 2015 (JTAPI/1187/2015)


EN FAIT

1. Par jugement du 12 octobre 2015, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a déclaré irrecevable le recours interjeté par Monsieur A______ le 14 septembre 2015 contre deux décisions de l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) du 29 mai 2015 déclarant irrecevable pour cause de tardiveté les réclamations de l’intéressé à l’encontre de ses taxations à la source 2011 et 2012.

M. A______ avait reconnu dans ses écritures qu’il avait été informé de l’existence des deux décisions querellées le 23 juin 2015. Elles lui avaient donc été notifiées à cette date, même s’il affirmait qu’il n’en connaissait alors pas le contenu. On pouvait en effet exiger de lui, en tant que partie à la procédure, qu’il fasse le nécessaire pour en prendre connaissance et utiliser cas échéant les voies de droit. Déposé le 14 septembre 2015 seulement, son recours était tardif. Le TAPI attirait par ailleurs l’attention de l’intéressé sur la possibilité de demander une remise ou un arrangement de paiement auprès de l’AFC.

2. Le 12 novembre 2015, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant en substance à son annulation.

Il pensait avoir agi en temps utile devant le TAPI, car une personne qu’il avait contactée à l’AFC le 21 juin 2015 pour s’enquérir de l’avancement de son dossier, lui avait indiqué qu’il lui fallait attendre la notification par la poste de décisions, dont le contenu ne lui avait pas été révélé. Il était parti de Suisse en famille durant plusieurs semaines alors qu’il n’avait pas reçu ces courriers et n’en avait pris connaissance qu’à son retour le 4 septembre 2015. Son courrier avait été bloqué à la poste durant son absence.

Sa situation financière était très mauvaise. Chirurgien de formation au bénéfice d’un diplôme « hors Union européenne », il était sans emploi depuis trois ans et seul le revenu de son épouse assurait l’entretien de la famille qui comptait quatre enfants. Les charges étaient lourdes et leur découvert bancaire mensuel était de plusieurs milliers de francs. Il avait une important dette fiscale, soit plus de CHF 18'000.- au titre de l’impôt 2013, auxquels allait s’ajouter la taxation 2014 en cours de calcul. Il avait changé de statut fiscal suite au changement d’employeur de son épouse, fonctionnaire internationale. Étant initialement imposé à la source, il ne s’était pas vraiment préoccupé du suivi administratif de sa situation fiscale.

Il ne refusait pas de payer ses impôts mais souhaitait une approche sociale de son dossier, qui tienne compte de la situation de précarité dans laquelle il se trouvait.

3. Le 16 novembre 2015, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

4. Le même jour, le juge délégué a transmis à l’AFC, pour information, le recours de M. A______ et lui a demandé uniquement d’indiquer la date de communication des courriers du 29 mai 2015.

5. Le 27 novembre 2015, l’AFC a répondu que les courriers susmentionnés avaient été envoyés au contribuable le 29 mai 2015, en courrier simple.

6. Le 7 janvier 2016, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

a. M. A______ a confirmé qu’il était dans une situation financière inextricable et espérait trouver une solution par rapport aux impôts dont il ne contestait pas le principe de devoir en payer.

Au mois de mai-juin 2015, une amie travaillant dans une fiduciaire devait s’occuper de sa situation mais elle était en vacances au moment où l’AFC avait envoyé les courriers litigieux.

b. Se référant à un courrier du 14 septembre 2015 adressé à l’AFC par le contribuable en vue d’obtenir une « réévaluation » de sa situation, les représentantes de cette autorité ont indiqué qu’il n’y avait pas encore été donné suite en raison de la présente procédure. Compte tenu de la situation évoquée par M. A______, cette démarche serait plutôt traitée sous l’angle de la demande de remise une fois que les décisions entreprises seraient en force.

7. À l’issue de l’audience, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 -LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’art. 24 de loi sur l’imposition à la source des personnes physiques et morales du 23 septembre 1994 (LISP - D 3 20), la procédure de recours contre une décision sur réclamation est régie par l’art. 49 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17), selon lequel le contribuable peut s'opposer à cette-ci en s'adressant, dans les trente jours à compter de la notification de la décision attaquée, au TAPI.

3. a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1 LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Les cas de force majeure sont réservés, conformément à l’art. 16 al. 1 2ème phr. LPA, par quoi on entend les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de façon irrésistible (ATA/1260/2015 du 24 novembre 2015 consid. 5).

En procédure fiscale, passé le délai de trente jours, le recours n’est recevable que si le contribuable établit que, par suite de service militaire, de service civil, de maladie, d’absence du pays ou pour d’autres motifs sérieux, il a été empêché d’agir en temps utile et qu’il a déposé ses écritures dans les trente jours après la fin de l’empêchement (art. 49 al. 4 et 41 al. 3 LPFisc).

Celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/1068/2015 du 6 octobre 2015 consid. 5a ; ATA/918/2015 du 8 septembre 2015 consid. 3a).

b. Les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 LPA). À cet égard, les actes du représentant sont opposables au représenté comme les siens propres (ATA/797/2014 du 14 octobre 2014 consid. 5 et les références citées).

c. S’agissant d’un acte soumis à réception, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée faite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, pp. 302-303 n. 2.2.8.3). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 118 II 42 consid. 3b p. 44 ; 115 Ia 12 consid. 3b p. 17 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 ; 2A.54/2000 du 23 juin 2000 consid. 2a et les références citées). Un envoi est réputé notifié à la date à laquelle son destinataire le reçoit effectivement. Celui qui, pendant une procédure, omet de prendre les dispositions nécessaires pour que les envois postaux lui soient transmis en temps utile en cas d’absence s’il doit s’attendre, avec une certaine vraisemblance, à recevoir une telle communication.

4. En l’espèce, il ressort du dossier que l’AFC a adressé les décisions du 29 mai 2015 à la fiduciaire du recourant, où, selon tampon de réception, ils ont été reçu le 1er juin 2015. La transmission de ces courriers au recourant est intervenue ultérieurement, à une date non précisée mais alors qu’il était absent et son courrier bloqué à la poste. Ainsi, en admettant que le recourant avait eu connaissance de l’existence des décisions lors de son appel téléphonique à l’AFC le 23 juin 2015, le TAPI a retenu une date de communication erronée au regard de la jurisprudence susmentionnée en matière d’effet de la représentation, et en tout état la plus favorable au contribuable. C’est par ailleurs à bon droit qu’il a estimé, toujours selon la jurisprudence ci-dessus, que l’on pouvait attendre du recourant, qui savait au plus tard à cette date qu’un courrier officiel devait lui parvenir, qu’il fasse le nécessaire pour en connaître le contenu avant son départ de Suisse pour plusieurs semaines. Il était donc fondé à déclarer le recours irrecevable.

5. Si formellement, le recourant conteste l’irrecevabilité de son recours contre les décisions sur réclamation du 29 mai 2015, il ne conteste ni dans ses écritures ni dans ses déclarations, être assujetti à l’impôt ni ne remet en cause le calcul de son montant. Compte tenu de l’argumentation développée devant les deux juridictions, on ne saurait reprocher au TAPI d’avoir attiré l’attention du recourant sur les procédures de demande de remise et/ou de facilités de paiement prévues par la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales du 26 juin 2008 (LPGIP - D 3 18).

6. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Compte tenu des circonstances particulières du cas d’espèce, aucun émolument ne sera mis à la charge du recourant. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 novembre 2015 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 octobre 2015 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :