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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2776/2011

ATA/20/2014 du 14.01.2014 ( MARPU ) , REJETE

Recours TF déposé le 26.02.2014, rendu le 09.05.2015, IRRECEVABLE, 2C_811/11, 2C_203/14
Descripteurs : ; MARCHÉS PUBLICS ; APPEL D'OFFRES(MARCHÉS PUBLICS) ; PROCÉDURE D'ADJUDICATION ; PROCÉDURE OUVERTE ; ADJUDICATION(MARCHÉS PUBLICS) ; MOTIVATION DE LA DÉCISION ; SOUMISSIONNAIRE ; ADJUDICATEUR ; PRINCIPE DE LA TRANSPARENCE(EN GÉNÉRAL) ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE
Normes : LPA.62.al2.letb ; LPA.60.letb ; LPA.87 ; Cst.8.al1 ; Cst.9 ; Cst.29.al2 ; AIMP.1 ; AIMP.11.leta ; AIMP.15 ; AIMP.16.al1 ; AIMP.16.al2 ; AIMP.18.al2 ; RMP.12 ; RMP.16 ; RMP.24 ; RMP.27.letf ; RMP.33 ; RMP.43 ; RMP.46 ; RMP.55.leta ; RMP.55.letd ; L-AIMP.3 ; L-AIMP.3A
Parties : SPS SERVICE PRIVE DE SECURITE SA / AEROPORT INTERNATIONAL DE GENEVE
Résumé : Rejet du Recours contre l'adjudication d'un marché public portant sur l'accomplissement des tâches d'accueil et d'information aux passagers de l'aéroport international de Genève. En tant que soumissionnaire évincée et, bien que le contrat ait été déjà conclu, la recourante conservait un intérêt actuel à recourir contre la décision d'adjudication. Le grief concernant la modification de pondération du sous-critère « Tarif » était tardif. La recourante aurait dû le faire valoir antérieurement, dans le cadre d'un recours contre l'appel d'offres lui-même ou contre la décision d'interruption de la première procédure de soumission à laquelle elle était partie. Par ailleurs, les notes obtenues par la recourante pour certains sous-critères correspondaient au barème des notes applicable à tous les soumissionnaires et elle ne démontrait pas avoir été traitée différemment par rapport à ses concurrents. Il ne pouvait pas non plus être reproché à l'AIG d'avoir favorisé un candidat par une trop grande importance accordée aux sous-critères en question. Concernant d'autres sous-critères, la recourante ne faisait que substituer sa propre appréciation à celle du pouvoir adjudicateur. Enfin, la question de savoir si la recourante méritait une note plus élevée que la note 0 pour un dernier sous-critère pouvait rester ouverte, vu que cela n'aurait de toute manière pas modifié le résultat de l'appel d'offres en question. Le caractère illicite de la décision d'adjudication en cause n'ayant pas été démontré, le recours a été rejeté. Dès lors, la question des dommages-intérêts n'avait pas à être examinée.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2776/2011-MARPU ATA/20/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 janvier 201 4

 

dans la cause

 

SPS SERVICE PRIVÉ DE SÉCURITÉ S.A.
représentée par Me Nicola Meier, avocat

contre

AÉROPORT INTERNATIONAL DE GENÈVE
représenté par Me Nicolas Wisard, avocat

 

 



EN FAIT

1) SPS Service Privé de Sécurité S.A. (ci-après : SPS) a été mandatée en 2009 par l’Aéroport International de Genève (ci-après : AIG) pour exécuter différentes missions dans le but d’assurer la sécurité et l’accueil des passagers.

2) Le 28 juin 2010, l’AIG a fait savoir à SPS qu’il mettait fin au contrat précité. Il voulait soumettre cette prestation de sécurité à une procédure de marché public.

3) Selon ce courrier, la résiliation prenait effet au 30 avril 2011. Elle a cependant été reportée à deux reprises jusqu’au 31 octobre 2011. En effet, l’AIG avait lancé en 2010 une première procédure d’appel d’offres, qu’il a interrompue le 23 mai 2011 par décision d’interruption de la procédure notifiée aux soumissionnaires. Au nombre de ceux-ci figurait la société SPS, qui avait déposé une offre le 15 avril 2011. Aucun recours n’avait été interjeté contre cette décision.

4) a. Le 27 juin 2011, l’AIG a fait paraître un nouvel appel d’offres en procédure ouverte, soumise à l’Accord GATT/OMC du 15 avril 1994 sur les marchés publics (AMP - RS 0632.231.422), à l’Accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) et au règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01), sur le marché des services dans le domaine des transports aériens, intitulé « accueil passagers à l’AIG » portant sur l’accomplissement des tâches d’accueil et d’information aux passagers afin de passer au mieux le contrôle de sécurité. L’activité se déroulait sur le site de l’aéroport.

b. Le délai de clôture pour le dépôt des offres échéait le 8 août 2011.

c. Le marché n’était pas divisé en lots et l’exécution se ferait de manière échelonnée dès le 1er novembre 2011.

d. L’appel d’offres décrivait les conditions générales et particulières de participation, ainsi que les critères d’aptitude. Le dossier pouvait être obtenu par téléchargement sur le site des marchés publics www.simap.ch ou auprès de l’AIG.

Dans les conditions administratives dudit dossier étaient mentionnés les critères d’adjudication et leur pondération :

Critères et éléments d’appréciation

Poids

Critère financier

- Tarif (15 %)

- Analyse des coûts et Analyse prix/volume (15 %)

30 %

Critère organisation et formation

- Organisation qualité (5 %)

- Organisation interne (2,5 %)

- Organisation Santé et sécurité au Travail (2,5 %)

- Capacité en personnel (12,5 %)

- Plan de formation (5 %)

- Formation aux situations de crises (12,5 %)

40 %

Critère Ressources humaines

- Calcul de l’effectif (10 %)

- Processus de recrutement (7,5 %)

- Plan de reprise (7,5 %)

25 %

Critère Divers

- Références (5 %)

5 %

En rapport avec ces sous-critères, les soumissionnaires devaient également remplir et remettre différentes annexes avec leur offre, notamment :

-          Annexe B : Organisation qualité du soumissionnaire pour satisfaire les exigences du client

Avez-vous obtenu une certification qualité officielle qui prouve qu’une organisation interne a été mise en place afin de garantir que le marché pourra être exécuté conformément aux exigences du client (type ISO 9000 ou équivalent) ?

-          Annexe E : Capacité en personnel

Le soumissionnaire doit indiquer ci-dessous l’effectif de l’entreprise ou du bureau : effectif du bureau ou de l’entreprise (personnel administratif et technique), sans le personnel temporaire ou en formation. (Un poste de travail correspond à une activité à 100 % dans le cadre du bureau ou de l’entreprise. Une personne employée à 60 % représente 0.6 poste de travail.)

-          Annexe F : Formation interne

Avez-vous un plan de formation interne afin de garantir que les collaborateurs de votre société auront reçu une formation de base et pourront exécuter le marché conformément aux exigences du client ?

-          Annexe G : Références

Le soumissionnaire doit fournir trois références, si possible :

-          qui sont en rapport avec le type de marché à exécuter, en termes de complexité et d’importance ;

-          qui démontrent l’aptitude, les compétences et l’expérience nécessaires pour le marché à exécuter ;

-          qui sont en cours d’exécution depuis au moins cinq ans ou proches d’être achevées ;

-          qui reflètent le même type d’organisation exigée pour le marché à exécuter.

-          Annexe H : Calcul de l’effectif

Pour chaque ligne correspondante (CDI Femme, CDI Homme, CDD Femme, CDD Homme et Total), les soumissionnaires devaient inscrire le nombre absolu, EQPT et les heures prestées.

Dans les conditions administratives, figuraient également les informations relatives au barème des notes utilisé.

5) Le 5 août 2011, SPS a déposé une offre pour un montant global de CHF 3’287’895.-.

6) Par pli recommandé du 30 août 2011, l’AIG a informé SPS que le marché pour lequel elle avait déposé une offre était adjugé à ISS Facility Services S.A. (ci-après : ISS) pour le montant hors TVA de CHF 3’777’864.-. L’offre en question remplissait pleinement les conditions qui permettaient d’être adjudicataire et elle avait été jugée économiquement la plus avantageuse, conformément au tableau récapitulatif des résultats de tous les soumissionnaires. SPS avait été classée au 5ème rang sur les six offres évaluées.

En annexe à ce courrier, figurait un tableau récapitulant les notes obtenues par les différents soumissionnaires par comparaison avec celles obtenues par ISS, et donnant le détail de celles-ci en fonction des différents critères d’adjudication énumérés dans les conditions administratives de l’appel d’offres. Il résultait de ce tableau qu’ISS avait obtenu 152,20 points et une note moyenne de 3,81. De son côté, SPS totalisait 104,10 points et une note moyenne de 2,50.

7) Le 12 septembre 2011, SPS a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision d’adjudication du 30 août 2011, concluant préalablement à l’octroi de l’effet suspensif à son recours sans qu’elle ait à fournir des sûretés et à l’octroi d’un délai supplémentaire pour compléter son acte. Sur le fond, elle concluait à ce que la chambre administrative constate l’illicéité de la décision du 30 août 2011 qui devait être annulée, la cause devant être renvoyée au pouvoir adjudicateur.

Le principe d’égalité de traitement entre les soumissionnaires avait été violé. En outre, l’AIG avait violé son pouvoir d’appréciation concernant divers critères d’évaluation retenus.

La pondération du critère relatif au tarif était passée de 40 % dans le premier appel d’offres à 15 % dans le deuxième. Or, l’offre d’ISS était de CHF 1’500’000.- supérieure à la sienne. Même si SPS était mieux notée qu’ISS sur ce point, ce résultat avait été minoré par la nouvelle pondération.

Concernant le critère « capacité en personnel », ISS avait été mieux notée qu’elle. Or, cette société insistait pour reprendre le personnel de SPS affecté jusqu’à ce jour à l’AIG, ce que ce dernier ne pouvait ignorer. Il était incompréhensible qu’ISS ait obtenu une meilleure note que SPS. Pour le critère « calcul des effectifs », SPS avait été moins bien notée qu’ISS alors qu’elle avait toujours fourni un nombre adéquat d’employés pour sa mission. Les notes inférieures à celles d’ISS qu’elle avait obtenues pour les critères « plan de formation », « formation aux situations de crises » et « organisation qualité pour satisfaire les exigences du client » étaient incompréhensibles et injustifiées. Elle ne comprenait pas pour quelle raison elle avait reçu une note de 0 concernant le critère « plan de reprise » alors qu’il ne s’agissait que de reprendre un mandat qu’elle avait assumé depuis de nombreuses années.

8) Par courrier spontané du 15 septembre 2011, SPS a persisté dans ses conclusions d’octroi de l’effet suspensif. ISS avait publié des offres d’emploi dans la presse pour engager du personnel en rapport avec des activités liées à l’attribution du marché. C’était la preuve qu’elle n’avait pas les capacités en personnel pour faire face à cette nouvelle tâche et sa note, bien supérieure à celle de SPS, était dès lors incompréhensible.

9) Le 23 septembre 2011, l’AIG a conclu au rejet de la requête d’effet suspensif.

Le recours de SPS n’avait aucune chance de succès. De plus, celle-ci était arrivée au 5ème rang. Il n’y avait dès lors pas lieu d’octroyer l’effet suspensif à son recours puisque l’admission du recours n’aurait pas nécessairement pour effet d’attribuer le marché à la recourante, qui n’y avait d’ailleurs pas conclu. Les critiques de SPS contre les critères d’évaluation étaient sans consistance. Dans une pesée des intérêts entre les intérêts publics et privés en jeu, l’intérêt public à ce que la procédure aille de l’avant pour permettre le contrôle de sécurité à l’AIG primait l’intérêt privé de la recourante. Au surplus, il y avait un intérêt privé non seulement de l’adjudicataire à pouvoir planifier ses engagements pour le 1er novembre 2011, mais aussi des employés de SPS qui devaient être repris par ISS en application de l’art. 333 de la loi fédérale complétant le Code civil suisse du 30 mars 1911 (Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220), à savoir quel serait leur emploi à la date précitée.

En tout état, si l’effet suspensif était accordé, le versement de sûretés devrait être imposé à SPS, compte tenu du préjudice important que le contentieux risquait de générer.

10) Par décision présidentielle sur effet suspensif du 28 septembre 2011, la chambre administrative a rejeté la demande d’effet suspensif (ATA/614/2011).

Le recours paraissait avoir peu de chances de succès et n’était pas suffisamment étayé pour faire prévaloir les intérêts privés de SPS sur ceux de l’AIG. Une partie des griefs formulés par la recourante concernait des modifications dans la pondération des critères d’adjudication intervenues entre le premier appel d’offres et celui à l’origine de la décision du 30 août 2011. De tels griefs auraient dû être invoqués antérieurement, dans le cadre d’un recours contre l’appel d’offres lui-même ou contre la décision d’interruption de la première procédure de soumission. Concernant le traitement inégal dont la recourante se plaignait, il n’était étayé par aucune pièce ou autre élément probant.

11) Le 30 septembre 2011, SPS a déposé des observations complémentaires sur effet suspensif, suite à la réponse de l’AIG.

SPS avait un intérêt personnel et digne de protection à requérir l’effet suspensif. Elle avait soulevé des irrégularités concernant huit critères sur douze, représentant 72.5 % de l’évaluation globale de son offre. Cela justifiait un intérêt à l’annulation de la décision querellée.

Elle avait annoncé à certains de ses employés et au syndicat l’ouverture d’une procédure de consultation auprès de l’office cantonal de l’emploi mais n’avait procédé à aucun licenciement collectif. L’intérêt privé des employés de SPS était de poursuivre leur emploi. De surcroît, la sécurité des passagers n’était pas mise en péril, vu qu’il suffisait que le mandat confié par l’AIG soit une nouvelle fois prolongé aux même termes et conditions. La sauvegarde de l’intérêt public commandait donc de conserver sur le site de l’aéroport le personnel formé et présent depuis plusieurs années.

12) Le 3 octobre 2011, l’AIG a conclu avec ISS le contrat portant sur le marché objet de l’adjudication querellée.

13) Par acte du 4 octobre 2011, SPS a déposé un recours en matière de droit public et un recours constitutionnel subsidiaire auprès du Tribunal fédéral contre la décision présidentielle précitée.

14) Par ordonnance présidentielle du 7 octobre 2011, le Tribunal fédéral a informé les parties que, jusqu’à décision sur la requête d’effet suspensif, aucune mesure d’exécution de la décision attaquée ne pourrait être prise.

15) Par ordonnance du 21 octobre 2011, le Tribunal fédéral a rejeté la requête d’effet suspensif formée par SPS.

16) Par arrêt du 5 janvier 2012 (2C_811/2011), le Tribunal fédéral a déclaré les recours de SPS irrecevables.

17) Le 10 février 2012, SPS a demandé à la chambre administrative la prolongation au 6 mars 2012 du délai qui lui avait été imparti.

18) Le 6 mars 2012, SPS a déposé un complément à son recours, concluant préalablement à l’ouverture des enquêtes et à la production par l’AIG de la première offre reçue d’ISS ainsi que du contrat passé avec la société précitée. Principalement, elle concluait à l’illicéité de la décision rendue par l’AIG en date du 30 août 2011, à la condamnation de l’AIG à des dommages-intérêts de CHF 92’233,80 avec intérêts à 5 % dès le 12 septembre 2011 pour les dépenses effectuées par SPS en relation avec la procédure de soumission et le recours, se réservant le droit d’amplifier ce montant à l’issue de la procédure, à la condamnation de l’AIG à des dommages-intérêts de l’ordre de CHF 1’172’474,90 avec intérêts à 5 % dès le 6 mars 2012, à titre de gain manqué relatif au marché litigieux adjugé à ISS ainsi qu’à l’obtention de dommages-intérêts à hauteur de CHF 350’155,75 au titre de dommage complémentaire consécutif à la conclusion abusive du contrat litigieux.

L’analyse des notations attribuées à SPS et à ISS démontrait une application arbitraire des critères d’évaluation. La décision d’attribution du marché en cause était illicite. SPS invoquait également une inégalité de traitement entre soumissionnaires. L’offre retenue n’était par ailleurs pas la plus intéressante pour la collectivité publique. La certification ISO 9000 ou équivalente ne certifiait en rien la qualité des services proposés pour le marché en question. Concernant le sous-critère de l’organisation interne, il ne devait pas y avoir de différence de notation entre ISS et elle-même, puisque, dans son organigramme, ISS avait le même nombre de départements qu’elle. Quant à la capacité en personnel, il fallait comptabiliser les seuls employés aptes et qualifiés à remplir la mission prévue dans le cahier des charges et non le personnel global. De plus, ISS n’avait pas fourni de meilleures références qu’elle. En outre, la nécessité de respecter un équilibre entre le nombre de femmes et d’hommes faisant partie du personnel n’était pas prévue dans l’appel d’offres. Pour ce qui est du sous-critère relatif à la formation aux situations de crise, SPS ne comprenait pas comment ISS avait pu obtenir une meilleure note qu’elle en allouant pratiquement trois fois moins de ressources à la formation. Enfin, elle aurait dû obtenir la note maximale pour le sous-critère « plan de reprise », puisqu’elle était déjà en charge de l’accueil et de la sûreté des passagers pour l’AIG.

SPS détaillait les dépenses subies en relation avec les procédures de soumission et de recours, soit CHF 45’189.- relatifs à ses impenses consécutives à son appel d’offres et CHF 47’044,80 correspondant à ses frais d’avocat.

Le comportement de l’AIG avait été abusif. En concluant le contrat avec ISS le premier jour ouvrable suivant la décision sur effet suspensif de la chambre administrative, l’AIG avait empêché SPS de se prévaloir de la voie de droit extraordinaire et qui avait dès lors définitivement perdu toute possibilité de se voir attribuer le marché en question. Des dommages-intérêts positifs devaient en conséquence lui être alloués, c’est-à-dire un manque à gagner estimé à CHF 1’172’474,90 et un dommage complémentaire de CHF 350’155,75 correspondant aux salaires et charges sociales réglées aux employés affectés sur le site de l’aéroport, ceci afin de respecter les délais légaux de congé.

19) Dans sa réponse du 30 avril 2012, l’AIG a conclu à l’irrecevabilité du recours de SPS et, subsidiairement, à son rejet, dans la mesure où il serait déclaré recevable, et à la condamnation de SPS en tous les frais et dépens de l’instance.

SPS ne disposait d’aucun intérêt actuel et pratique à l’admission de son recours. Il ne faisait valoir aucun vice grave de procédure dont la reconnaissance impliquerait l’annulation de la procédure de l’appel d’offres en cause. Il n’alléguait pas non plus que la notation correcte de son offre aurait pour conséquence de lui attribuer le marché. SPS n’avait enfin pas requis l’adjudication du marché public en question en sa faveur.

La conclusion du contrat en cause n’était pas constitutive d’un abus de droit. La demande de restitution de l’effet suspensif faite par SPS avait été rejetée par le chambre administrative dans sa décision du 28 septembre 2011. Quelques jours plus tard, soit le 3 octobre 2011, l’AIG avait ainsi conclu avec ISS le contrat portant sur le marché de service « Accueil et orientation des passagers et personnels aéroportuaire ». Cette conclusion était nécessaire au bon fonctionnement de l’aéroport, compte tenu du fait que SPS quittait ses fonctions le 31 octobre 2011 et qu’ISS devait débuter ses activités le 1er novembre 2011. L’intérêt public consistant à permettre à l’AIG de disposer du personnel assurant les tâches d’accueil des passagers supposait une exécution immédiate. ISS devait également pouvoir planifier l’occupation de son personnel en vue de l’exécution du mandat et de procéder aux engagements nécessaires. En outre, SPS n’avait pas pris de conclusions visant à ce que le marché litigieux lui soit attribué.

La décision d’adjudication n’était pas arbitraire. Elle respectait pleinement les critères de qualification publiés dans l’appel d’offres et les preuves requises. Les griefs relatifs à la pondération des critères et sous-critères et à leur modification dans le deuxième appel d’offres auraient dû être invoqués dans le cadre d’un recours contre l’appel d’offres lui-même ou contre la décision d’interruption de la première procédure de soumission. L’évaluation des différents critères et sous-critères avait été effectuée de manière objective et pertinente. L’admission des griefs dirigés contre les notes attribuées à SPS ne suffirait pas à modifier le résultat global de l’appréciation de offres. La décision d’adjudication contestée était donc parfaitement licite.

Quant aux prétentions en dommages et intérêts de SPS, le montant de CHF 45’189.- relatif à la constitution de son dossier de soumission apparaissait totalement déraisonnable au vu du dossier présenté. La preuve du dommage supporté par la recourante n’était pas apportée à satisfaction de droit, de sorte qu’il était impossible pour l’AIG de se déterminer au sujet de sa quotité. En ce qui concerne les frais d’avocat de l’ordre de CHF 47’044,80 au 6 mars 2012, le détail des notes d’honoraires n’avait pas été produit. Le gain manqué invoqué par SPS n’était pas couvert par l’art. 3 al. 3 AIMP.

20) Le 25 juin 2012, le juge délégué a entendu les parties lors d’une première audience de comparution personnelle.

a. L’administrateur président de SPS a relevé l’existence d’un conflit d’intérêts puisque l’étude qui représentait l’AIG était également mandataire d’une des sociétés dont il était administrateur. Il demandait le report de l’audience jusqu’à ce que cette question soit réglée.

b. Le conseil de SPS ignorait l’existence d’un tel conflit d’intérêts potentiel.

Suite à cela, l’audience a été reportée à la rentrée 2012. La recourante devait aviser de la situation le juge délégué, au plus tard le 30 août 2012.

21) Par courrier du 30 août 2012, le conseil de l’AIG a informé la chambre administrative que, par détermination du 29 août 2012, le Bâtonnier de l’Ordre des avocats avait considéré qu’il ne se trouvait pas dans une situation de conflit d’intérêts impliquant qu’il doive cesser d’occuper.

22) Le 22 octobre 2012, le juge délégué a procédé à une nouvelle audience de comparution personnelle à laquelle l’AIG était représenté par Messieurs Olivier Deletraz, chef de division des ressources humaines, et Guillaume Spoorenberg, juriste. Quant à SPS, elle était représentée par Monsieur Jean-Pascal Grec, administrateur-président.

a. Le chef de la division des ressources humaines de l’AIG avait participé à l’adjudication. Selon lui, toutes les offres dépassaient le montant qui avait été budgété. L’« optique » du rôle de ce marché avait dès lors été modifié. Afin de diminuer les coûts et d’améliorer l’accueil à la clientèle, l’AIG avait redéfini la tâche de l’accueil sûreté des passagers. La suppression des postes d’agents de sécurité de chez SPS à la fouille des passagers, avant le passage des scanners et des détecteurs, conduisait à une diminution du nombre d’heures. Leur fonction devait être assurée en interne par les propres agents de sécurité de l’aéroport. L’appel d’offres ne contenait ainsi que l’aspect accueil des passagers ne nécessitant pas le personnel ayant le titre d’agent de sécurité. La mission d’ISS était donc différente de celle dont était chargée SPS. Ni les agents de sécurité de l’aéroport ni le personnel d’ISS n’étaient soumis à la législation sur les entreprises de sécurité. Il ne savait pas non plus pourquoi ISS n’avait pas soumissionné lors du premier appel d’offres. Les critères d’adjudication avaient été modifiés entre la première et la deuxième adjudication afin de privilégier la qualité de l’accueil et non le prix. La redéfinition des besoins rendait le critère du prix moins important. Le montant de la rémunération versée par les soumissionnaires au personnel n’avait pas été pris en considération. Le rabais global offert par les entreprises importait plus, dans le but d’éviter tout risque de dumping salarial. En outre, toute entreprise se devait d’avoir une certification ISO.

b. Le juriste représentant l’AIG n’avait pas participé à la décision d’adjudication. Le premier appel d’offres avait été lancé en février ou mars 2011 et les offres devaient être déposées avant le 18 avril 2011. A la réception des offres, le comité d’évaluation interne s’était aperçu que les besoins de l’AIG par rapport au nombre d’heures à prester avaient été surévalués. La direction générale de l’AIG avait donc pris la décision d’interrompre le marché précité et l’avait notifiée à tous les soumissionnaires. Dans le second appel d’offres, la mission était décrite de manière identique mais il y avait une différence entre le point 2 « conditions du poste » prévu dans le premier appel d’offres et le point 3 « profil du personnel » du deuxième. En effet, sous le point 3 précité, il avait été ajouté que le personnel du sous-traitant n’était soumis à aucune accréditation. En outre, l’objet du contrat avait été modifié. Dans le premier appel d’offres, il était question de passer le contrôle de sécurité alors que dans le second il s’agissait d’assurer la fluidité et l’accueil des passagers. Cette nouvelle mission qui ne présentait plus d’aspect de sûreté avait été présentée aux soumissionnaires. Jusqu’à la décision d’adjudication, ISS était présente sur le site de l’aéroport mais n’effectuait pas de prestations pour l’AIG. L’AIG ne s’était pas intéressé à la rémunération du personnel des soumissionnaires, hormis l’exigence de la soumission aux usages locaux. La certification exigée était une certification ISO 9000 ou équivalente. Il s’agissait d’établir une aptitude à maîtriser les processus. Le sous-critère « capacité en personnel » se référait à la capacité du soumissionnaire d’exécuter le marché et de réagir à l’évolution des besoins. Le fait que le soumissionnaire dispose du personnel nécessaire au moment du dépôt de l’offre n’était pas indispensable mais il fallait qu’il soit capable de réagir sur le plan organisationnel pour remplir sa mission. Le sous-critère « plan de reprise » avait pour objectif de limiter le nombre de chômeurs potentiels suite au transfert de mission. Concernant ce sous-critère, SPS avait eu la note de 0. Quant à la note du critère des tarifs, celle-ci résultait de l’application d’une formule mathématique.

c. L’administrateur-président de SPS a relevé que les critères prévus dans le deuxième appel d’offres étaient un peu différents par rapport à ceux du premier. Toutefois, la mission résumée aux soumissionnaires dans les deux appels d’offres précités était identique. Dans ces deux appels d’offres, il s’agissait d’accueillir les passagers et plus d’assurer leur sécurité. Dans son premier appel d’offres, l’AIG avait donné une estimation d’heures nécessaires avec un tarif horaire indicatif. Par ailleurs, il n’y avait pas de lien entre la certification demandée et la mission faisant l’objet de l’appel d’offres en question. Il ne comprenait pas que l’AIG ait diminué le nombre d’heures totales à prester et augmenté l’importance dudit critère. Le personnel d’ISS devait être soumis à la législation sur les agents de sécurité, puisqu’il était question du contrôle des titres de transport. Il avait saisi l’organe de surveillance compétent pour statuer sur cette question. Il sollicitait également la production d’une copie complète du contrat passé entre l’AIG et ISS.

d. Le conseil de l’AIG s’étant opposé en l’état à ce que SPS accède audit contrat, un délai au 20 novembre 2012 a été accordé à la recourante pour formuler sa requête en accès au contrat, et au 17 décembre 2012 à l’AIG pour répondre.

23) Le 20 novembre 2012, SPS a sollicité une prolongation de sept jours du délai imparti qui a été accordée par le juge délégué le même jour.

24) Le 27 novembre 2012, SPS a déposé sa requête en accès au contrat passé entre l’AIG et ISS ainsi que ses éventuels avenants.

Elle voulait vérifier que le contrat précité correspondait au marché adjugé, connaître la date de sa signature et examiner si des clauses relatives à un effet suspensif ou toute autre clause relative aux procédures judiciaires en cours au moment de la conclusion du contrat avaient été intégrées.

Le secret d’affaire ne pouvait être invoqué par l’AIG. L’accès au contrat en question ne dévoilerait aucun élément confidentiel concernant soit l’AIG soit ISS.

25) Le 17 décembre 2012, l’AIG s’est déterminé sur la requête en accès au contrat conclu avec ISS.

En accord avec cette dernière, il a versé à la procédure la version intégrale du contrat d’adjudication conclu le 3 octobre 2011.

26) Le 19 décembre 2012, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 31 janvier 2013 pour lui faire parvenir leurs observations finales.

27) Le 30 janvier 2013, l’AIG a adressé ses observations finales à la chambre de céans. Il persistait intégralement dans les conclusions de son mémoire réponse du 30 avril 2012.

SPS n’avait apporté aucun élément permettant d’admettre l’illicéité de l’adjudication litigieuse. Dans le deuxième appel d’offre, l’AIG avait modifié certains sous-critères d’adjudication et leur pondération, après avoir repensé l’objet du marché, soit les tâches précédant ou accompagnant le contrôle de sécurité. En effet, les tâches de sécurité étaient remises à son propre personnel.

Quant à la certification qualité officielle des soumissionnaires, elle permettait d’apprécier le degré d’organisation des candidats. Par rapport au sous-critère relatif à la capacité en personnel, il s’agissait de connaître la capacité du soumissionnaire d’exécuter le marché et de réagir à l’évolution des besoins, sur le plan organisationnel, pour remplir sa mission. Le sous-critère « plan de reprise » s’adressait aussi à SPS qui devait se soucier des membres de son personnel dont le profil d’agent de sécurité ne correspondait plus à la réorganisation du marché confié par l’AIG. Le grief relatif à l’assujettissement du personnel d’ISS au concordat sur les entreprises de sécurité était tardif et infondé. Les prestations exécutées par le personnel d’ISS consistaient à accueillir les passagers et les accompagner jusqu’à leur embarquement. Les contrôles de sécurité étaient effectués par le personnel de l’AIG.

SPS n’alléguait aucun grief commandant soit l’annulation de l’adjudication en raison de vices graves dans la procédure ou l’évaluation des offres, soit une correction de la notation de son offre qui lui aurait garanti l’adjudication du marché, ce qu’elle n’avait pas requis.

Concernant le remboursement des dépenses nécessaires en relation avec la procédure et le remboursement des frais d’avocat, les prétentions de SPS ne pouvaient être tenues pour établies. Quant au gain manqué, il n’était pas couvert par l’art. 3 al. 3 de l’accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 (L-AIMP - L 6 05.0).

Enfin, SPS ne disposait d’aucun intérêt actuel et pratique à l’admission du recours et celui-ci devait être déclaré irrecevable.

28) Par courrier du 31 janvier 2013, SPS a sollicité une prolongation de délai de quinze jours pour produire ses observations finales.

29) Le même jour, le juge délégué a informé les parties que le délai qui leur avait été accordé pour produire leurs observations finales était prolongé au 15 février 2013.

30) Par courrier du 1er février 2013, le conseil de l’AIG a interpellé le juge délégué au sujet du report précité, indiquant que sa copie des observations finales adressée à SPS avait déjà été postée.

Le principe de simultanéité des écritures n’était ainsi pas respecté, puisque SPS disposait de deux semaines supplémentaires pour produire les siennes. L’AIG se réservait donc le droit de s’en prévaloir.

31) Le 15 février 2013, SPS a produit ses observations finales, persistant intégralement dans ses écritures du 6 mars 2012.

Aucune explication crédible concernant la modification arbitraire du critère principal, soit celui du tarif de l’offre soumise, n’avait été apportée par l’AIG. En appliquant la pondération du prix telle qu’elle avait été prévue dans le premier appel d’offres, ISS n’aurait pas remporté le marché soumissionné. Par ailleurs, ISS ne disposait pas du personnel nécessaire à la réalisation du marché, lors de la décision d’adjudication litigieuse. De surcroît, la certification ISO ou équivalente exigée dans l’appel d’offres était sans rapport avec le marché en question. Sa note attribuée au critère du plan de reprise était injustifiée. Si les critères avaient été notés correctement et sans arbitraire, le marché querellé aurait été attribué à SPS.

Enfin, le mandat de SPS aurait pu être prolongé une troisième fois. Or, l’AIG avait signé le contrat avec ISS avant que la chambre administrative n’ait statué sur la requête en restitution de l’effet suspensif.

32) Le 18 février 2013, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Le marché offert est soumis notamment à l’AIMP, au RMP, à la L-AIMP, ainsi qu’à la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

En vertu des art. 62 al. 1 let. b LPA, 15 al. 1 et 2 AIMP, 3 et 3A L-AIMP et 56 RMP, le recours est adressé à la chambre administrative dans les dix jours dès la notification de la décision.

Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours de SPS du 12 septembre 2011 est recevable de ces points de vue.

2) a. La qualité pour recourir appartient à toute personne touchée directement par une décision et ayant un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée (art. 60 let. b LPA). Tel est le cas de celle à laquelle la décision attaquée apporte des inconvénients qui pourraient être évités grâce au succès du recours, qu’il s’agisse d’intérêts juridiques ou de simples intérêts de fait (ATA/580/2013 du 3 septembre 2013 ; ATA/517/2009 du 13 octobre 2009).

En l’espèce, le contrat ayant été conclu avec l’adjudicataire (art. 46 RMP), soit ISS, il convient de se demander si la recourante conserve un intérêt digne de protection au maintien du recours.

b. Selon l’art. 18 al. 2 AIMP, lorsque le contrat est déjà conclu, l’autorité qui admet le recours ne peut que constater le caractère illicite de la décision. Si cette illicéité est prononcée, le recourant peut demander la réparation de son dommage, limité aux dépenses qu’il a subies en relation avec les procédures de soumission et de recours (art. 3 al. 3 L-AIMP). Par ailleurs, selon l’arrêt du Tribunal fédéral 2P.307/2005 du 24 mai 2006, le recourant qui conteste une décision d’adjudication et qui déclare vouloir maintenir son recours après la conclusion du contrat conclut, au moins implicitement, à la constatation de l’illicéité de l’adjudication, que des dommages-intérêts soient réclamés ou non.

En tant que soumissionnaire évincée, et bien que le contrat ait été déjà conclu, la recourante conserve un intérêt actuel à recourir contre la décision d’adjudication au sens de l’art. 60 let. b LPA, son recours étant à même d’ouvrir ses droits à une indemnisation (ATF 125 II 86 consid. 5 b p. 96 ; ATA/580/2013 précité). Elle dispose donc de la qualité pour recourir.

3) Dès lors que toutes les conditions ci-dessus énumérées sont remplies, le recours est recevable.

4) Selon l’art. 16 al. 1 et 2 AIMP, le recours contre une décision d’adjudication peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès ou l’abus de pouvoir d’appréciation, et pour constatation inexacte ou incomplète de faits pertinents. Le grief d’inopportunité ne peut pas être invoqué.

5) La législation en matière de marchés publics est fondée sur les principes énoncés à l’art. 1 AIMP. Il s’agit notamment d’assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires, de garantir l’égalité de traitement à l’ensemble de ceux-ci, l’impartialité de l’adjudication ainsi que la transparence des marchés publics et, finalement, de permettre une utilisation parcimonieuse des deniers publics.

6) La recourante invoque l’illicéité de la décision d’adjudication objet du présent litige. Elle excipe de la violation du principe de l’égalité de traitement et d’une application arbitraire de plusieurs critères d’évaluation.

7) a. L’inégalité de traitement, au sens de l’art. 8 al. 1 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), consiste à traiter de manière inégale ce qui devrait l’être de manière semblable ou inversement (ATF 137 I 167 consid. 3.5 ; 129 I 346 consid. 6 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2D_63/2011 du 16 février 2012 consid. 3.3). Le principe de l’égalité de traitement entre personnes appartenant à la même branche économique est spécifiquement garanti à l’art. 27 Cst. En vertu de ce principe, les mesures étatiques qui ne sont pas neutres sur le plan de la concurrence entre les personnes exerçant la même activité économique (concurrents directs) sont prohibées (ATF 130 I 26 consid. 6.3.3.1 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2D_15/2011 consid. 3.3 et 2C_116/2011 du 29 août 2011 consid. 7.1).

b. En particulier, le respect de l’égalité de traitement entre soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. b et 11 let. a AIMP ; art. 16 RMP) oblige l’autorité adjudicatrice à traiter de manière égale les soumissionnaires pendant tout le déroulement formel de la procédure (ATA/646/2013 du 1er octobre 2013 ; ATA/884/2004 du 26 octobre 2004 ; J.-B. ZUFFEREY / C. MAILLARD / N. MICHEL, Droit des marchés publics, 2002, p. 109 ; B. BOVAY, La non-discrimination en droit des marchés publics in RDAF 2004, p. 241).

8) Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst. lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité (ATF 138 I 49 consid. 7.1 p. 51 et les arrêts cités). A cet égard, le Tribunal fédéral ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale de dernière instance que lorsque celle-là est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain (ATF 136 III 552 consid. 4.2 p. 560 ; 132 III 209 consid. 2.1 p. 211 ; Arrêt du Tribunal fédéral 9C_227/2012 du 11 avril 2012). L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 137 I 1 consid. 2.4 p. 5 ; ATF 136 I 316 consid. 2.2.2 p. 318 ; ATF 134 II 124 consid. 4.1 p. 133 et les arrêts cités).

Appelée à examiner le caractère arbitraire d’une décision, la chambre de céans suit le raisonnement du Tribunal fédéral en la matière (ATA/342/2012 du 5 juin 2012 consid. 5 et les arrêts cités).

9) En procédure ouverte, les offres sont évaluées en fonction des critères d’aptitude et des critères d’adjudication (art. 12 RMP) qui doivent être objectifs, vérifiables et pertinents (art. 24 RMP) et qui doivent figurer dans les documents d’appel d’offres (art. 27 let. f RMP). Pour les critères d’aptitude, l’autorité adjudicatrice peut exiger des soumissionnaires des justificatifs attestant leurs capacités sur les plans financiers, économiques, techniques et organisationnels (art. 33 RMP).

10) En application de l’art. 43 RMP, l’évaluation est faite selon les critères prédéfinis, conformément à l’art. 24 RMP et énumérés dans l’appel d’offres et/ou les documents d’appel d’offres (al. 1). Le résultat de l’évaluation des offres fait l’objet d’un tableau comparatif (al. 2). Par ailleurs, le marché est adjugé au soumissionnaire ayant déposé l’offre économiquement la plus avantageuse, c’est-à-dire celle qui présente le meilleur rapport qualité/prix (al. 3).

11) La jurisprudence reconnaît une grande liberté d’appréciation au pouvoir adjudicateur (ATF 125 II 86 précité consid. 6 p. 98). L’appréciation de la chambre administrative ne saurait donc se substituer à celle de ce dernier. Seul l’abus ou l’excès de pouvoir d’appréciation doit être sanctionné, ce que le Tribunal fédéral a confirmé à maintes reprises (ATF 130 I 241 précité consid. 6.1 p. 251 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2P.111/2003 du 21 janvier 2004 consid. 3.3 ; 2P.172/2002 précité consid. 3.2 ; RDAF 1999 I p. 301). En outre, pour que le recours soit fondé, il faut encore que le résultat, considéré dans son ensemble, constitue un usage abusif ou excessif du pouvoir d’appréciation (JAAC 1999 p. 143).

Ainsi, même dans les marchés publics plus importants soumis à l’AIMP, le pouvoir adjudicateur n’est pas lié par telle ou telle méthode, mais il lui est loisible de choisir celle qui est la mieux appropriée au marché. La loi ne lui impose aucune méthode de notation particulière. Le choix de ladite méthode relève ainsi du pouvoir d’appréciation de l’autorité adjudicatrice, sous réserve d’abus ou d’excès du pouvoir d’appréciation (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.172/2002 précité consid. 3.2 ; ATA A/201/2001 du 24 avril 2001 consid. 9 ; D. ESSEIVA, note ad S12 in DC 2/2003, p. 62). L’opportunité de ce choix ne peut être revue par l’autorité de recours (art. 16 al. 2 AIMP). De surcroît, aucune norme n’impose à l’autorité de faire connaître à l’avance la méthode de notation (ATF 2P.172/2002 précité consid. 2.3 ; ATA/834/2004 du 26 octobre 2004 consid. 6 ; arrêt du Tribunal administratif vaudois du 26 janvier 2000 in DC 2/2001, p. 67 et note de D. ESSEIVA précitée ; O. RODONDI, Les critères d’aptitude et les critères d’adjudication dans les procédures de marchés publics, RDAF I 2001, p. 406).

Il est donc parfaitement admissible d’attribuer une plus ou moins grande importance à tel ou tel critère, le prix par exemple, suivant le type de marché à adjuger. De plus, l’offre économiquement la plus avantageuse ne signifie pas qu’elle doit être la moins chère. Ce n’est qu’en présence de biens standardisés que l’adjudicateur peut alors se fonder exclusivement sur le critère du prix le plus bas (RDAF 1999 I précitée p. 305).

12) La recourante soutient tout d’abord que la pondération du sous-critère « Tarif » a été modifiée sans aucune explication, passant de 40 % dans le premier appel d’offres à 15 % dans celui qui est à l’origine de la décision du 30 août 2011. Selon elle, l’offre retenue représentait un coût largement supérieur à celui qu’elle avait proposé et même si elle était mieux notée sur ce point, ce résultat était minoré par sa valeur, alors qu’il s’agissait d’un critère essentiel.

13) a. A la teneur de l’art. 15 al. 1 AIMP, les décisions de l’adjudicateur peuvent faire l’objet d’un recours, auprès d’une autorité juridictionnelle cantonale. Sont notamment réputées décisions sujettes à recours : l’appel d’offres (art. 15 al. 1bis let. a AIMP et 55 let. a RMP) et l’adjudication, sa révocation ou l’interruption d’une procédure d’adjudication (art. 15 al. 1bis let. e AIMP et 55 let. d RMP).

b. Conformément à la jurisprudence, les griefs à l’encontre de l’appel d’offres ne peuvent plus être invoqués dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision d’adjudication (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.47/2004 du 6 avril 2004 ; ATA/399/2012 du 26 juin 2012 consid. 3 ; ATA/677/2005 du 12 octobre 2005). Le Tribunal fédéral a en outre déjà jugé qu’il était admissible d’exiger des candidats qu’ils contestent immédiatement les documents d’appels d’offres prétendument incomplets ou entachés d’autres vices de forme lors de la procédure d’appel d’offres déjà et non dans le cadre d’un recours dirigé contre la décision d’adjudication (ATF 130 I 241 consid 4.2 ; 129 I 313 consid. 6.2 ; 125 I 203).

14) En l’espèce, le grief concernant la modification de pondération du sous-critère « Tarif » est tardif. La recourante aurait dû le faire valoir antérieurement, dans le cadre d’un recours contre l’appel d’offres lui-même ou contre la décision d’interruption de la première procédure de soumission à laquelle elle était partie.

Le grief doit dès lors être déclaré irrecevable.

15) SPS critique ensuite la notation de plusieurs sous-critères d’adjudication.

16) A son avis, la certification qualité officielle de type ISO 9000 ou équivalent demandée pour l’évaluation du sous-critère « organisation qualité » n’attestait en rien de la qualité des services proposés. En outre, la différence de note par rapport à ISS pour ce sous-critère n’était pas justifiée.

17) Tout d’abord, la recourante aurait dû invoquer ce grief dans le cadre d’un recours contre l’appel d’offres lui-même. Cela étant, en l’espèce, ISS avait obtenu la certification ISO 9001 et méritait donc qu’on lui attribue la note maximale. De son côté, SPS n’était pas au bénéfice d’une telle certification. Selon l’annexe B remise avec son offre, elle envisageait d’obtenir la certification ISO 9001. En outre, elle y indiquait succinctement sa méthodologie de travail pour satisfaire les exigences du client.

Il était toutefois précieux pour le pouvoir adjudicateur de choisir une entreprise ayant mis en place un « système qualité » reconnu, puisqu’il permettait de minimiser les risques de survenance de problèmes sur le site de l’aéroport en démontrant une capacité à maîtriser des processus et à réagir sur le plan organisationnel pour remplir la mission confiée.

Par ailleurs, la note obtenue par la recourante pour ce sous-critère, soit la note de 3, correspondait au barème des notes applicable à tous les soumissionnaires et elle ne démontre pas avoir été traitée différemment par rapport à ses concurrents. Par ailleurs, il ne peut pas non plus être reproché à l’AIG d’avoir favorisé un candidat par une trop grande importance accordée au sous-critère en question. Le poids relatif attribué à celui-ci (5 % du référentiel) ne conduit pas à retenir qu’il génère une inégalité de traitement entre soumissionnaires.

Ce grief sera donc écarté.

18) En ce qui concerne le sous-critère « capacité en personnel », la recourante explique qu’ISS avait indiqué son effectif complet, soit 6’300 postes de travail, et non le seul personnel qualifié pour le marché litigieux.

En l’occurrence, il ressort de l’annexe E que le sous-critère précité demandait seulement aux soumissionnaires d’indiquer « l’effectif du bureau ou de l’entreprise, sans le personnel temporaire ou en formation » et non pas le seul personnel qualifié pour le marché à adjuger. Sur ce point, SPS a indiqué disposer de 218 postes de travail, sans préciser les qualifications de ses collaborateurs, tandis que le nombre de postes de travail en Suisse d’ISS s’élevait à 6’300.

La note 2 attribuée à SPS et la note 5 attribuée à ISS résultent de la simple application du tableau comparatif et la recourante ne démontre pas avoir été traitée différemment par rapport aux autres soumissionnaires, de sorte que ce grief doit également être écarté.

19) S’agissant des sous-critères « références » et « formation aux situations de crise », la recourante soutient que les références produites en annexe de son offre ainsi que les ressources allouées à la formation étaient chacune comparables à celles d’ISS, voire meilleures, et devaient dès lors au minimum être notées au même niveau.

Elle ne fait toutefois là que substituer sa propre appréciation à celle du pouvoir adjudicateur, ce qui n’est pas admis (ATF 130 I 241 consid. 6.1 ; ATF 125 II 86 consid. 6). Il faut tout d’abord noter que les références soumises ne peuvent être qualifiées d’identiques. ISS a notamment fait valoir son expérience dans les prestations d’accueil des passagers auprès des aéroports d’Helsinki et de Melbourne. Ces références étaient ainsi plus aptes à démontrer les compétences spécifiques d’ISS par rapport au marché en cause. Quant à la formation relative aux situations de crise, SPS n’indique pas précisément le contenu de la formation dispensée à ses employés, ni sa durée. Au contraire, ISS prévoyait un programme complet d’une journée de huit heures de cours répété chaque année.

Ces griefs tombent donc à faux.

20) Pour la recourante, le sous-critère « calcul de l’effectif » avait également été appliqué de manière arbitraire, car la nécessité de respecter un équilibre entre les hommes et les femmes n’était pas expressément prévu dans l’appel d’offres.

L’annexe H relative au calcul de l’effectif comportait une grille dans laquelle chaque soumissionnaire devait inscrire le nombre de femmes CDI, d’hommes CDI, de femmes CDD et d’hommes CDD. Il était ainsi compréhensible que cette distinction fût importante pour l’adjudicateur et qu’un équilibre entre hommes et femmes soit un avantage. Par ailleurs, à nouveau, la note obtenue par la recourante pour ce sous-critère, soit la note de 2, correspondait au barème des notes applicable et elle ne démontre pas avoir été traitée différemment par rapport à ses concurrents.

Ce grief sera rejeté.

21) La recourante se plaint encore de la notation du sous-critère « plan de reprise ». La note 0 qui lui avait été attribuée était infondée puisque la mission objet du marché en question était similaire à celle qu’elle avait déjà exercée pour l’AIG. Elle estimait mériter la note maximale.

22) La jurisprudence reconnaît une grande liberté d’appréciation au pouvoir adjudicateur (ATF 125 II 86 consid. 6 p. 98). L’appréciation de la chambre administrative ne saurait donc se substituer à celle de ce dernier. Seul l’abus ou l’excès de pouvoir d’appréciation doit être sanctionné, ce que le Tribunal fédéral a affirmé à maintes reprises (ATF 130 I 241 consid. 6.1 p. 251 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2P.111/2003 du 21 janvier 2004 consid. 3.3 ; RDAF 1999 I p. 301). En outre, pour que le recours soit fondé, il faut encore que le résultat, considéré dans son ensemble, constitue un usage abusif ou excessif du pouvoir d’appréciation (JAAC 1999 p. 143).

23) En l’occurrence, dans son offre en rapport avec ce sous-critère, SPS avait prévu la reconduction de l’ensemble des collaborateurs engagés pour l’exercice du mandat comprenant la sécurité et l’accueil des passagers exercé pour le compte de l’AIG. Elle n’a cependant pas expliqué en quoi elle avait tenu compte du changement de marché qui était passé d’une mission de sécurité et d’accueil des passagers à une mission d’accueil exclusivement. Elle n’a notamment pas précisé ce qu’elle entendait faire de son personnel spécialement dédié à la sécurité, qui ne trouvait plus place dans le nouveau marché offert. Dès, lors, on ne peut pas retenir que l’AIG a fait preuve d’arbitraire en estimant que la réponse de la recourante était lacunaire en ce qui concerne le sous-critère querellé. En considérant que l’AIG devait lui octroyer la note maximale, celle-ci n’a fait que substituer sa propre appréciation à celle du pouvoir adjudicateur, ce qui n’est pas admis (ATF 130 I 241 consid. 6.1 ; ATF 125 II 86 consid. 6).

24) Toutefois, la question de savoir si la recourante méritait une note plus élevée peut rester ouverte, vu que cela n’aurait de toute manière pas modifié le résultat de l’appel d’offres en question. En effet, même si elle avait décroché la meilleure note possible pour ce sous-critère, soit la note 5, obtenant finalement 15 points (0 accordé plus 15 après pondération) et donc 119.10 points au total, elle n’aurait pas égalé ISS, qui avait totalisé 152.20 points.

25) Le caractère illicite de la décision d’adjudication en cause n’ayant pas été démontré, le recours sera rejeté dans la mesure où il est recevable. Dès lors, la question des dommages-intérêts ne se pose pas et ne sera pas examinée.

26) Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

Conformément à la jurisprudence récente (ATA/581/2013 du 3 septembre 2013), aucune indemnité de procédure ne sera allouée à l’AIG (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 12 septembre 2011 par SPS Service privé de sécurité S.A. contre la décision de l’Aéroport international de Genève du 30 août 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de SPS Service privé de sécurité S.A. un émolument de CHF 1’500.- ;

dit qu’il ne lui est alloué aucune indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s’il soulève une question juridique de principe ;

- sinon, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nicola Meier, avocat de SPS Service privé de sécurité S.A., à Me Nicolas Wisard, avocat de l’Aéroport international de Genève, ainsi qu’à la commission de la concurrence.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :