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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/5137/2014

ACPR/261/2020 du 27.04.2020 sur ONMMP/1965/2019 ( MP ) , REJETE

Recours TF déposé le 28.05.2020, rendu le 08.09.2020, REJETE, 6B_641/2020
Descripteurs : EXTENSION DE LA PROCÉDURE;LÉSÉ;INFRACTIONS EN MATIÈRE DE LP;SCISSION(DROIT DES SOCIÉTÉS);HÉRITIER LÉGAL;ORGANE DE FAIT;ORGANE(PERSONNE MORALE)
Normes : CPP.115; CPP.121; LFus; CPP.310; CP.164; CP.29.letd; CPP.311.al2

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5137/2014ACPR/261/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 avril 2020

 

Entre

A______ SA, ayant son siège rue ______, ______ (GE), comparant par Me François MEMBREZ, avocat, WAEBER AVOCATS, rue Verdaine 12, case postale 3647, 1211 Genève 3,

B______, faisant élection de domicile en l'Étude d'avocats, rue Pédro-Meylan 1, 1208 Genève, comparant en personne,

recourantes,

contre les ordonnances rendues le 3 juin 2019 par le Ministère public,

 

et

C______, domicilié c/o Me Y______, avocat, ______, ______, Genève, et comparant par ce dernier ainsi que par Me Z______et Me AA______, avocats, ______, ______, Genève

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimés.


 

EN FAIT :

A. a. Par acte déposé au greffe de la Chambre de céans le 14 juin 2019, A______ SA recourt contre l'ordonnance du 3 juin 2019, expédiée par pli simple, par laquelle le Ministère public a refusé d'étendre l'instruction à D______ et C______.

Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de l'ordonnance querellée et au renvoi de la cause au Ministère public pour "poursuite" de l'instruction, notamment la mise en prévention de C______, ainsi que l'audition de E______ et de D______.

b. Par acte expédié au greffe de la Chambre de céans le 14 juin 2019, B______ recourt contre la même ordonnance.

Elle conclut, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renvoi de la cause au Ministère public pour ouverture d'une instruction contre C______, subsidiairement pour procéder à l'audition de E______ et de D______.

c. Les recourantes ont versé les sûretés, en CHF 900.- chacune, qui leur étaient réclamées par la Direction de la procédure.

B. Les faits pertinents suivants ressortent du dossier :

a. F______ SA (ci-après : SI F______ SA) était une société anonyme sise à Genève ayant pour le but l'achat, la vente, la construction et la gérance de tous immeubles en Suisse. Ses administrateurs étaient G______, du 6 juin 2001 jusqu'à sa faillite, et H______ (également avocat), du 6 juin 2001 au 5 septembre 2006.

b. Par convention du 15 mai 2001, C______, citoyen kazakh, représenté par I______, horloger, a acquis le capital-actions de SI F______ SA - d'un montant nominal de CHF 50'000.- - pour un prix de CHF 3'700'000.-.

L'unique actif de cette société était alors constitué de la parcelle 1______ de la commune de J______ (GE), sise au ______, chemin 2______, pour laquelle une autorisation définitive de construire un immeuble industriel et administratif avait été délivrée par l'intermédiaire notamment de l'architecte K______, auteur des plans.

c. En septembre 2004, en cours de construction, SI F______ SA a signé avec la société L______ SA un contrat de bail relatif à cet immeuble ainsi qu'à un autre immeuble devant être construit sur la parcelle 3______ de la commune de J______ (GE), sise ______, route 4______, dont elle était entretemps devenue propriétaire.

Il a été convenu à cette occasion que L______ SA pourrait procéder à des modifications du projet initial et à des aménagements intérieurs à sa convenance, à charge pour elle d'en assumer les coûts.

d. Par convention du 30 août 2006, C______, représenté par G______, administrateur de la société, ainsi que par son homme de confiance à Genève, D______, a revendu à I______ le capital-actions de SI F______ SA, sa créance chirographaire inscrite au passif du bilan ainsi que tous ses droits patrimoniaux et sociaux et toutes ses créances contre la société pour un prix de CHF 68'329'565.-.

Ce montant devait être acquitté à raison de CHF 18'329'565.- en mains du notaire, en vue de rembourser les prêts hypothécaires, et à hauteur de CHF 50 millions en mains du vendeur, au plus tard le 29 décembre 2006, les actions de la société demeurant nanties auprès de D______, jusqu'à complète exécution de ses obligations par l'acquéreur.

La société était alors propriétaire des parcelles 5______, 1______ et 3______ de la commune de J______ (GE), ainsi que de la parcelle 6______ de la commune de M______, sise au ______, rue 7______.

e. Par actes des 4 et 15 septembre 2006, SI F______ SA, représentée par G______, a vendu à N______ SA la parcelle 5______ pour un prix de CHF 577'000.-, la parcelle 1______, comprenant tous les travaux de finition de l'immeuble tels que résultant du cahier des charges signé avec L______ SA, pour un prix de CHF 28 millions, la parcelle 6______ pour un prix de CHF 11 millions et la parcelle 3______, comprenant l'immeuble dont la construction venait de débuter, pour un prix de CHF 16 millions, soit un montant total de CHF 55'577'000.-.

L'acquisition de cette dernière parcelle a été liée à la conclusion simultanée d'un contrat d'entreprise entre les parties, aux termes duquel SI F______ SA était chargée de la construction et des finitions de l'immeuble pour un prix de CHF 36'700'000.-, la direction des travaux étant confiée à une société appartenant à G______, O______ SA.

f. Selon un décompte daté du 2 octobre 2008, le prix de vente de CHF 55'577'000.- a servi, à hauteur de CHF 22'862'897.65, au remboursement des crédits hypothécaires (CHF 18'482'747.25) et au paiement de la commission de courtage
(CHF 1'076'000.-), de l'impôt immobilier (CHF 340'874.55), de la facture du notaire (CHF 5'027.05) et d'une créance de l'entreprise P______ (CHF 2'958'248.80).

g. Du prix convenu par le contrat du 30 août 2006, C______ a reçu, par l'intermédiaire d'une société panaméenne dont il avait le contrôle, Q______ SA, CHF 42 millions au total, soit CHF 17 millions le 19 septembre 2006, CHF 12 millions le 29 décembre 2006, CHF 12 millions le 17 avril 2007 et CHF 1 million le 15 juin 2007, le tout au débit des comptes de SI F______ SA et/ou de son notaire.

Les ordres relatifs à trois de ces transferts - le premier et les deux derniers - ont été signés par G______, en sa qualité d'administrateur de SI F______ SA. Sur deux de ces ordres apparaît également la signature de D______.

Le 28 décembre 2006, D______, agissant en qualité de "représentant de l'ancien actionnaire de la SI F______", a demandé à G______ qu'il procède au deuxième transfert (CHF 12 millions le 29 décembre 2006). L'ordre y relatif ne figure pas au dossier. G______ a toutefois confirmé au Ministère public qu'il avait bel et bien donné l'instruction pour ce transfert, puisqu'il était le seul à avoir la signature sur le compte bancaire de SI F______ SA.

Le 10 avril 2007, I______, agissant en sa qualité d'actionnaire de SI F______ SA, a demandé à G______ de procéder au troisième transfert (CHF 12 millions le 17 avril 2007).

h. La poursuite des chantiers sur les parcelles 1______ et 3______ a été marquée par la dégradation des relations entre SI F______ SA, N______ SA, L______ SA et le bureau d'architecte R______ SA, qui avait remplacé K______.

Il ressort en effet d'un jugement rendu par le Tribunal de première instance le 8 mars 2010 (JTPI/3097/10) que SI F______ SA considérait les exigences de L______ SA exorbitantes et ne permettant plus de tenir les projections financières fondant les relations contractuelles entre les divers intervenants. N______ SA s'était pour sa part mise à payer directement les corps de métier en déclarant compenser ces versements avec les sommes dues à SI F______ SA, ce qui avait provoqué une crise de liquidités chez celle-ci.

Les travaux ont finalement été achevés entre fin 2007 et fin 2008. R______ SA n'a toutefois pas établi le décompte des travaux à prendre en charge par SI F______ SA et de ceux à assumer par L______ SA, de sorte que les relations financières entre les différents intervenants n'ont pu être dénouées et que SI F______ SA a été confrontée à de nombreux créanciers impayés.

La faillite de SI F______ SA a été prononcée le ______ 2010, à la requête de K______, créancier de la société à hauteur de CHF 4'253'223.65, admis par la suite à l'état de collocation.

i. Le 10 mars 2014, N______ SA et K______, qui avaient obtenu la cession des droits de la masse pour agir en responsabilité contre les organes de SI F______ SA en liquidation, ont déposé plainte pénale contre ceux-ci des chefs de faux dans les titres (art. 251 CP), gestion déloyale (art. 158 CP), banqueroute frauduleuse (art. 163 CP), diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers (art. 164 CP), gestion fautive (art. 165 CP), violation de l'obligation de tenir une comptabilité (art. 166 CP), avantages accordés à certains créanciers (art. 167 CP) et inobservation des prescriptions légales sur la comptabilité (art. 325 CP), leur reprochant d'avoir utilisé le produit de vente des immeubles pour acquitter le montant dû à C______ plutôt que pour désintéresser les créanciers de la société.

j. K______ a confié la défense de ses intérêts dans ce cadre à sa femme, Me B______, avocate au barreau.

k.a. Entendu le 6 janvier 2015 en qualité de personne appelée à donner des renseignements, G______ a déclaré avoir acquis les actions de SI F______ SA de son précédent actionnaire très peu de temps avant de les revendre, le 15 mai 2001, à C______. Lors de la convention du 30 août 2006, il représentait ce dernier. Il avait demandé à D______, personne de confiance de C______ à Genève, de signer cette convention pour attester que la vente s'était faite selon les instructions de ce dernier. I______ avait alors acquis la société pour son propre compte, même s'il n'avait pas la surface financière pour une telle acquisition. Lui-même n'avait pas d'informations sur la personne qu'il représentait éventuellement. Il était resté administrateur de la société après cette vente du 20 août 2006. I______ en était l'actionnaire. Il était prévu que les immeubles fussent revendus. C______ n'avait pas été payé lors de la vente des actions, mais lors de celle des immeubles.

G______ a ensuite donné diverses explications sur les contrats des 4 et 15 septembre 2006 (parcelles concernées, versement du prix de vente, bénéfice escompté par SI F______ SA en lien avec l'exécution du contrat d'entreprise, difficultés survenues avec N______ SA). La faillite de SI F______ SA était due en grande partie à cette opération immobilière avec N______ SA.

Il avait reçu des instructions écrites de I______ pour effectuer les paiements à Q______ SA. I______ avait en outre signé pour accord les ordres de transfert qu'il avait établis. Il n'aurait pas dû exécuter ces instructions et verser les sommes dues par ce dernier à C______ au travers de SI F______ SA.

k.b. Lors de cette même audience, G______ a produit un courrier adressé le 20 février 2011 à l'Office des faillites, dans lequel il affirmait d'abord que, postérieurement à l'acquisition des actions par I______, il avait "exclusivement" agi sur instructions de ce dernier, puis, au paragraphe suivant, qu'il avait "toujours" agi sur instructions de I______ "et" de C______, représenté par D______. Les trois prénommés devaient dès lors être considérés comme organes de fait de SI F______ SA.

l. Le 5 avril 2017, le Ministère public a ouvert une instruction contre G______ du chef notamment de diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers (art. 164 CP), pour avoir, en sa qualité d'administrateur de SI F______ SA (art. 29 let. a CP), transféré CHF 42 millions à C______, alors que (i) SI F______ SA n'était aucunement débitrice de ce dernier, (ii) C______ n'était créancier que de I______ ou des personnes que celui-ci représentait en signant la convention du 30 août 2006, et (iii) le prix de vente des actions de la société fixé dans cette convention était supérieur à la valeur de ses actifs, de sorte que les valeurs patrimoniales transférées à C______ l'avaient été à titre gratuit, ou à tout le moins contre une prestation de valeur manifestement inférieure.

m. Entendu à nouveau le 6 avril 2017, mais cette fois en qualité de prévenu, G______ a donné certaines précisions sur ses fonctions d'administrateur de SI F______ SA.

Il avait, au nom de celle-ci, confié à O______ SA - société dont il était par ailleurs le seul animateur - un rôle de pilotage dans l'exécution du contrat d'entreprise conclu avec N______ SA. Il avait été rémunéré dans ce cadre, et avait également perçu une rétrocession sur la commission de courtage payée par SI F______ SA à la suite de la vente des immeubles. Il s'était chargé d'approuver les factures des sous-traitants lors des travaux, lesquelles ne lui avaient toutefois pas toutes été soumises. Il avait également mis en oeuvre l'avocat de SI F______ SA, Me H______, lors des procédures ayant opposé la société à ses créanciers, notamment à K______. I______ était présent lors de certaines discussions avec Me H______. En outre, il était le seul à avoir eu des contacts avec l'organe de révision de SI F______ SA, S______ SA.

Il connaissait I______ depuis de nombreuses années. Ce dernier lui avait présenté E______, laquelle avait des clients russes désireux d'investir dans des immeubles commerciaux. C'est ainsi qu'il avait rencontré C______, qu'il avait vu à deux ou trois reprises. Il n'avait pas son numéro de téléphone et devait systématiquement passer par E______ et I______. Me H______ lui avait fait remarquer que les prénommés faisaient même probablement barrage pour les empêcher d'établir un contact direct avec C______.

Il avait alors appris que C______ souhaitait sortir rapidement du projet pour se concentrer sur d'autres affaires. Le montant de son investissement dans SI F______ SA, versé en plusieurs fois sur les comptes de la société, avec l'aide de I______, était de l'ordre de CHF 50 millions. Il avait vu ce chiffre en consultant la procédure et n'en avait plus le souvenir, mais pensait toutefois connaître son ordre de grandeur à l'époque. La solution qu'ils avaient tout de suite imaginée consistait à vendre les immeubles détenus par la société. S'il avait été préféré vendre les actions plutôt que simplement vendre les immeubles, puis liquider la société - et ainsi permettre à son actionnaire d'en récupérer la substance -, c'est que I______ entendait possiblement encore utiliser SI F______ SA.

Il avait rencontré C______ à Genève, avant la signature des contrats des mois d'août et septembre 2006 et avant même d'envisager une possible vente à N______ SA, solution qui avait été trouvée ultérieurement. Lors de la signature de la convention du 30 août 2006, il était en contact avec D______ et I______, moins avec E______. Le premier lui faisait comprendre qu'il fallait "faire avancer les choses", parfois de manière insistante.

n. Entendu le 18 août 2015 en qualité de personne appelée à donner des renseignements, I______ a déclaré qu'il avait, avec E______, employée russophone de la banque T______, présenté C______ - qu'il connaissait depuis deux ans déjà, pour lui avoir vendu des montres et des bijoux - à G______. Ils ne pouvaient toutefois communiquer directement, en raison de la langue, et E______ faisait systématiquement la traduction. C______ n'était pas présent lors de la signature du contrat du 15 mai 2001 et avait accepté l'investissement - proposé par G______ et Me H______ - sur la base d'une "plaquette" relative à l'immeuble détenu par SI F______ SA. Une fois la convention signée, il avait, avec E______, expliqué à C______ qu'il détenait désormais une société, laquelle était propriétaire d'un immeuble. Ce dernier avait procédé à des investissements complémentaires, ayant permis l'acquisition de parcelles et la construction d'immeubles. Il n'était lui-même pas intervenu, entre 2001 et 2006, sur les questions de construction et d'adjudication, domaines que G______ se réservait.

Par la suite, C______ avait cherché à vendre ses biens à Genève, désirant investir dans deux hôtels à ______ (Grande-Bretagne). Une rencontre avait eu lieu à Genève. C______ souhaitait récupérer son investissement et s'était énervé. S'agissant de la convention du 30 août 2006, il n'avait jamais été question que lui-même achète SI F______ SA. Dès lors qu'il n'avait rien versé, il ne se considérait pas comme actionnaire. En réalité, peu de temps après la réunion avec C______, celui-ci lui avait donné le mandat de trouver un acquéreur pour les actifs de la société. G______ avait tout organisé, avec Me H______ ; ils avaient mis en place la structure et préparé la convention du 30 août 2006, laquelle avait été signée dans les locaux de G______. Par sa signature, il espérait percevoir une commission en apportant l'acheteur. Il avait pour cela un délai d'une année ou deux. C'était finalement G______ qui avait trouvé l'acheteur. Il était question qu'il participe à la négociation de la vente, mais G______ lui avait dit que cela n'était plus nécessaire. Il n'avait pas lui-même suivi la vente ultérieure des immeubles, ni participé aux aspects financiers de l'opération, notamment les versements à C______. Il ne connaissait pas la situation financière de SI F______ SA et ignorait jusqu'à aujourd'hui que les immeubles s'étaient vendus au mois de septembre 2006 déjà.

o. Entendu les 25 janvier et 22 février 2017 en qualité de personne appelée à donner des renseignements, C______ a expliqué que les personnes en charge de SI F______ SA étaient les administrateurs de celle-ci, Me H______ et G______. Il n'avait presque pas eu de contacts avec ce dernier et l'avait rencontré à deux reprises. À cette époque, il venait à Genève une fois par année seulement.

C______ a donné certains détails sur le projet, précisant qu'il savait "vaguement" de quoi il s'agissait, notamment par des photos qui lui avaient été adressées et deux visites du terrain. Il avait d'abord décidé d'acheter en 2001 un bâtiment sis à la rue 7______, présenté par E______ comme une "bonne affaire", en acceptant le prix proposé. Lorsqu'il était retourné en Suisse, il avait visité avec E______ un terrain vague à la rue 2______, sur lequel l'un des bâtiments les plus modernes de la ville devait être construit, avec l'aide d'un architecte talentueux. La société U______ envisageait de conclure un bail de quinze ans sur ce bâtiment. Il avait décidé d'investir dans ce projet également. E______ lui avait dit qu'il était plus usuel de détenir des immeubles au travers d'une société anonyme, en l'occurrence SI F______ SA. Le lendemain ou le surlendemain, il avait rencontré G______. Il avait investi CHF 50 millions au total, en plusieurs versements, entre 2001 et 2004. Il ne disposait en l'état pas des documents bancaires attestant du versement de cette somme, mais s'engageait à entreprendre des démarches pour les obtenir auprès de ses comptables à ______ (Russie).

Durant l'été 2004, il avait fait part à G______ et à I______ de son intention de se retirer du projet, qui ne s'inscrivait pas dans son "vrai business", notamment parce qu'il ne parlait ni français, ni anglais. Une réunion s'était tenue à cette époque à Genève avec les deux prénommés. En 2005, il avait proposé à I______ de reprendre sa participation dans SI F______ SA moyennant le remboursement de ses investissements, ce que l'intéressé avait accepté. Dans sa compréhension, c'était donc bien I______, dont il pensait qu'il était riche au regard des enseignes qu'il détenait, qui reprenait l'investissement. Il n'avait jamais vu et ignorait l'existence de la convention du 30 août 2006, mais savait à l'époque qu'il sortait du projet en vendant ses actions de la société, même si en réalité, il ne pensait même pas avoir utilisé les termes "vendre des actions". Ce qu'il demandait, c'était de récupérer les CHF 50 millions qu'il avait investis.

Il avait mandaté D______, employé de la banque V______, pour l'aider à sortir de la société, car il parlait russe et était l'une des rares personnes qu'il connaissait à Genève. Ce dernier l'avait longtemps assuré qu'il serait intégralement payé, même après le dernier versement ; lui-même avait compris que tel ne serait pas le cas qu'en apprenant la faillite de SI F______ SA, au cours de la procédure pénale. Tous les contacts se faisaient alors par l'entremise de D______, et non par I______ ou G______ directement. Il n'avait jamais demandé lui-même des explications, mais supposait que D______ en exigeait. Ce n'était d'ailleurs pas à lui de dire ce que ce dernier faisait concrètement. Il fallait lui demander directement. Lui-même ne s'était jamais adressé à E______ pour lui faire savoir qu'il voulait sortir du projet, respectivement pour lui demander pour quelle raison il ne percevait pas le solde qui lui était dû.

Dans ses souvenirs, il avait reçu les CHF 42 millions en un seul versement. Il ne se rappelait pas de qui, cela ne l'intéressait d'ailleurs pas. Il ne s'était pas posé la question de comment il avait reçu cette somme. Il était d'usage qu'on l'informât des versements, ce qui avait été fait en l'occurrence, par téléphone.

p. Le 3 mars 2017, le Ministère public a ordonné le séquestre de CHF 9'285'897.65 détenus par W______ LTD, société dont C______ était l'ayant droit économique.

Le recours intenté par W______ LTD contre cette décision a été rejeté par la Chambre de céans le 4 septembre 2017 (ACPR/600/2017), confirmé par le Tribunal fédéral le 28 février 2018 (1B_426/2017).

q. Le 16 août 2017, le conseil de G______ a annoncé au Ministère public le décès de son mandant.

r. Le 22 août 2018, le Ministère public a informé les parties qu'il entendait classer la procédure en raison du décès de G______ et prononcer, cas échéant, une créance compensatrice à l'endroit de C______ et W______ LTD. Les parties étaient invitées à se déterminer sur la procédure, notamment sur la valorisation de SI F______ SA au 30 août 2006.

s. Le 15 novembre 2018, N______ SA et K______ ont requis diverses mesures d'instruction, dont l'audition de D______, E______ et I______. Le premier avait signé la convention du 30 août 2006 ainsi que deux bons pour paiement de SI F______ SA à Q______ SA. La deuxième, russophone, avait systématiquement été sollicitée pour faire l'interface entre les intervenants. Le dernier était beaucoup plus investi dans l'administration de SI F______ SA qu'il ne l'avait admis lors de son audition.

La procédure devait en outre être étendue à l'encontre de I______, C______ et D______, dans la mesure où il était "plausible" qu'ils aient participé à l'infraction en qualité d'organe de fait de SI F______ SA au moment du transfert des actifs de celle-ci à Q______ SA.

t. Le 15 novembre 2018, C______ et W______ LTD ont contesté la qualité de partie plaignante de N______ SA et K______.

Le 19 décembre 2018, K______ a répondu que sa créance contre SI F______ SA avait été colloquée dans la faillite et qu'il s'était vu délivrer un acte de défaut de biens à l'issue de celle-ci. Il était ainsi directement lésé par les agissements dénoncés.

u. Le 19 décembre 2018, A______ SA - se présentant comme une entreprise de construction lésée dans le cadre de la faillite de SI F______ SA et cessionnaire des droits de la masse - a annoncé se constituer partie plaignante et pris diverses conclusions, tendant notamment au prononcé, puis à l'allocation d'une créance compensatrice contre C______ et W______ LTD.

Elle a produit la copie d'un acte de défaut de biens après faillite du ______ 2014, délivré au créancier "A______ SA" pour un montant impayé de CHF  88'294.55, ainsi qu'un courrier du 16 novembre 2018, adressé par l'Office des faillites à son conseil, Me François MEMBREZ, contenant la prolongation du délai imparti à ce dernier pour agir au nom de la masse en faillite de SI F______ SA.

v. Selon les informations figurant au Registre du commerce, A______ SA, dont le numéro d'identification des entreprises (ci-après : IDE) est CHE-14______, a été inscrite le ______ 2015. Selon une inscription du même jour, sous la rubrique "Apports en nature, reprises de biens, avantages particuliers", la société envisageait la reprise des actifs et passif relatifs à l'exploitation de "Entreprise A______ SA (CHE-15______)".

ENTREPRISE A______ SA, inscrite le ______ 1956 sous l'IDE CHE-15______, a changé le ______ 2015 sa raison sociale en X______ SA. Selon une inscription du même jour, sous la rubrique "Transferts de patrimoine", la société a transféré, par contrat du 4 mai 2015, des actifs et des passifs à "A______ SA (CHE-14______)".

w. Par ordonnance du 24 janvier 2019, le Ministère public a admis N______ SA, K______ et A______ SA en qualité de parties plaignantes, constatant que leurs créances respectives avaient été définitivement admises à l'état de collocation de SI F______ SA.

Après avoir pris connaissance de cette ordonnance, C______ et W______ LTD ont annoncé renoncer à recourir contre celle-ci, mais se réserver le droit de revenir ultérieurement sur cette question, en fonction des développements de la procédure.

x. Le 1er mai 2019, Me B______ a annoncé au Ministère public le décès de son mandant et mari, K______. Elle reprenait l'intégralité des droits de procédure de ce dernier, par application de l'art. 121 al. 1 CPP cum 110 al. 1 CP.

C. a. Dans ses ordonnances querellées, au contenu identique, le Ministère public relève que D______ et C______ n'étaient ni organes, ni associés, ni collaborateurs de SI F______ SA (art. 29 let. a à c CP). Il résultait de l'instruction que D______ avait été mis en oeuvre par C______ lorsque celui-ci avait décidé de sortir de l'investissement qu'il avait concédé au travers de SI F______ SA, société dont il apparaissait comme actionnaire. Ces éléments ne permettaient pas de soupçonner que G______ était un simple homme de paille et que SI F______ SA était en réalité dirigée par D______ et C______, de sorte que la qualité de débitrice de la société ne pouvait leur être imputée.

b. Le 4 juin 2019, le Ministère public a également refusé d'étendre l'instruction à l'encontre de I______.

Cette décision n'a pas fait l'objet d'un recours.

c. Par avis de prochaine clôture du même jour, le Ministère public a informé les parties qu'une ordonnance de classement serait prochainement rendue et qu'il entendait prononcer une créance compensatrice d'un montant de CHF 504'664.-, sans toutefois l'allouer aux lésés, les conditions de l'art. 73 CP n'étant pas remplies.

D. a. À l'appui de son recours, A______ SA soutient, à la forme, que l'ordonnance du 24 janvier 2019, par laquelle le Ministère public avait constaté qu'elle avait la qualité de partie plaignante, n'avait pas été contestée par C______ et s'imposait donc à ce dernier. En tant que créancière de SI F______ SA, admise à l'état de collocation et titulaire d'un acte de défaut de biens après faillite, elle était directement touchée par l'infraction prévue à l'art. 164 CP reprochée à C______, lequel avait indûment prélevé, entre 2006 et 2007, CHF 42 millions sur le prix payé par N______ SA, empêchant ainsi les entreprises adjudicataires des travaux - dont elle faisait partie - d'être payées.

b. Le 4 juillet 2019, C______ a déposé des observations spontanées, dans lesquelles il concluait à l'irrecevabilité du recours. A______ SA ne pouvait avoir été lésée par l'infractions dénoncée, car elle avait été créée postérieurement à la période pénale pertinente, à la faillite de SI F______ SA et à sa radiation du Registre du commerce. La recourante était tout au plus créancière cessionnaire des droits de la masse en faillite, ensuite du contrat de transfert de patrimoine qu'elle avait conclu début mai 2015 avec ENTREPRISE A______ SA. Or, il était de jurisprudence constante que la qualité de lésé ne passait ni au créancier cessionnaire, ni à la société reprenante dans le cadre d'une fusion.

c. La recourante et l'intimé ont ensuite spontanément réservé à la Chambre de céans des copies de courriers échangés entre elles, respectivement avec le Ministère public.

Il en ressort que A______ SA soutenait provenir de la scission de l'ancienne ENTREPRISE A______ SA en deux entités, l'autre étant X______ SA. Or, si le Tribunal fédéral, dans l'ATF 140 IV 162, avait jugé que la fusion n'impliquait pas une subrogation légale selon l'art. 121 al. 2 CPP, il avait en revanche "clairement" considéré qu'il n'en allait pas de même dans le cas d'une scission au sens de l'art. 29 let. b de la Loi sur la Fusion (LFus ; RS 221.301).

Pour sa part, C______ contestait l'existence d'une scission, opération qui n'était appuyée par aucune pièce justificative et était contredite par des extraits de la Feuille officielle suisse du commerce (ci-après : FOSC), faisant état d'un transfert de patrimoine. Au demeurant, le type d'opération - scission ou transfert de patrimoine - importait peu, car celle-ci reposait dans tous les cas sur un acte volontaire, soit un contrat, ce qui ne suffisait pas à la transmission des droits du lésé. Enfin, A______ SA proposait, pour justifier sa qualité de lésée, une lecture incomplète et erronée d'un arrêt du Tribunal fédéral.

d. Le Ministère public a conclu au rejet du recours, renvoyant à son ordonnance querellée.

e. Dans ses observations, C______ persiste à conclure à l'irrecevabilité du recours. L'Office des faillites lui avait récemment confirmé que le pli du 16 novembre 2018 - soit le courrier de l'Office des faillites à Me François MEMBREZ, produit par A______ SA à l'appui de sa constitution de partie plaignante (let. B.u. supra) - concernait une autre société, ENTREPRISE A______ SA, laquelle avait à l'époque été admise à l'état de collocation. Toujours selon l'Office, il n'y avait a priori pas eu de cession entre cette dernière société et la recourante. En outre, parmi les pièces justificatives déposées auprès du Registre du commerce figurait un contrat, intitulé transfert de patrimoine, conclu le 4 mai 2015 entre ENTREPRISE A______ SA (société transférante) et A______ SA (société reprenante). L'article premier de ce contrat (intitulé "Objet de la vente - Inventaire") faisait expressément référence aux art. 69 et suivants LFus, traitant du transfert de patrimoine. En annexe se trouvait enfin une liste détaillée des actifs et passifs transférés, qui ne mentionnait aucune créance contre SI F______ SA.

E. a. À l'appui de son recours, B______, veuve et seule héritière de K______, reproche au Ministère public d'avoir ignoré de multiples éléments à charge démontrant que G______ et I______ avaient, à tour de rôle ou simultanément, été dirigés par C______, à tout le moins lors de l'opération par laquelle ce dernier était sorti en 2006 de l'actionnariat de SI F______ SA, vidant celle-ci de sa substance. Le prix des actions soi-disant achetées par I______ n'avait aucunement été fixé selon la réelle situation financière de la société, mais uniquement en fonction des CHF 50 millions prétendument investis par C______, chiffre que ce dernier n'avait jamais été en mesure de prouver. I______ n'avait aucun intérêt propre économique à acquérir les actions à un tel prix, fixé de manière totalement arbitraire. G______ avait expressément désigné C______ comme organe de fait de la société dans son pli du 20 février 2011 à l'Office des faillites, et il représentait ce dernier lors de la signature de la convention du 30 août 2006. D______, homme de main de C______ à Genève, avait pour sa part signé cette même convention ainsi que les quatre ordres de paiement successifs ayant vidé SI F______ SA de ses actifs. G______ et D______ ne pouvaient ignorer que I______ ne disposait pas de la surface financière pour assumer les obligations découlant de l'acquisition des actions de la société. Tous ces éléments pointaient vers la même direction : à défaut d'être ancrée dans une quelconque réalité économique, la convention du 30 août 2006 ne pouvait qu'être considérée comme une simulation, ayant permis à C______ de récupérer les actifs de SI F______ SA en défaveur de tous les autres créanciers de celle-ci. Enfin, les auditions de E______ et de D______, déjà requises précédemment, étaient de prime importance pour l'instruction du dossier, au vu du "rôle actif assumé par ces derniers tout au long de l'opération, ainsi qu'au vu de leur proximité avec les différents acteurs".

b. Le Ministère public a conclu au rejet du recours, renvoyant à son ordonnance querellée.

c. Dans ses observations, C______ conclut au rejet du recours. Son rôle dans SI F______ SA s'était limité à mettre à disposition de la société des fonds nécessaires à son développement, en faisant confiance à ses administrateurs pour la gestion des affaires sociales. Il n'avait jamais exercé de compétences durables, a fortiori dans une position typique d'organe. Cela était vrai non seulement pour la période pendant laquelle il en était actionnaire, mais à plus forte raison pour celle postérieure à sa sortie de l'actionnariat, intervenu le 30 août 2006, date à partir de laquelle il avait cessé tout contact avec G______ et I______. Les actes d'instructions sollicités par la recourante étaient dénués de pertinence.

EN DROIT :

1.             Les recours seront joints, dans la mesure où ils sont dirigés contre deux ordonnances au contenu identique, portent sur un même complexe de faits et développent des griefs comparables, à tout le moins sur le fond.

2.             2.1. Les recours ont été déposés selon la forme et dans le délai prescrits - faute de notification conforme à l'art. 85 al. 2 CPP - (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP). Ils concernent tous deux une ordonnance par laquelle le Ministère public a refusé d'étendre l'instruction à d'autres prévenus (art. 311 al. 2 CPP a contrario), soit une décision s'apparentant à une non-entrée en matière (art. 310 CPP ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1276/2019 du 27 février 2020 consid. 3.1), sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP).

2.2.       Seule une partie qui a un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée a qualité pour recourir contre celle-ci (art. 382 al. 1 CPP).

2.2.1. La partie plaignante a qualité de partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP).

On entend par partie plaignante le lésé qui déclare expressément vouloir participer à la procédure pénale comme demandeur au pénal ou au civil (art. 118 al. 1 CPP). L'art. 115 al. 1 CPP définit le lésé comme étant toute personne dont les droits ont été touchés directement par une infraction. Selon la jurisprudence, est atteint directement dans ses droits le titulaire du bien juridique protégé par la norme, même si ce bien n'est pas unique (ATF 139 IV 78 consid. 3.3.3 p. 81 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_307/2019 du 13 novembre 2019 destiné à la publication, consid. 2.2.1).

Les art. 163 ss CP, qui répriment les infractions dans la faillite et la poursuite pour dettes tendent à protéger, d'une part, les créanciers et, d'autre part, la poursuite pour dettes elle-même, en tant que moyen d'assurer le respect des droits. Dès lors, les créanciers individuels directement touchés sont légitimés à se constituer partie plaignante dans la procédure pénale (ATF 140 IV 155 consid. 3.3.2 p. 58 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_507/2018 du 24 septembre 2018 consid. 2.2 et l'arrêt cité).

2.2.2. Celui qui succède à une partie lésée dans ses droits n'est qu'indirectement atteint et ne peut pas, sous réserve des cas prévus à l'art. 121 CPP, se voir reconnaître la qualité de partie plaignante (ATF 140 IV 162 consid. 4 p. 164 ss). Ainsi, le transfert des actifs et passifs prévu, dans le cadre d'une fusion, par l'art. 22 al. 1 LFus ne confère pas (per se) à la société reprenante la qualité de partie dans la procédure pénale (ATF 140 IV 162 consid. 4.4 p. 166). De la même manière, une cession de créance ne confère en principe pas la qualité de lésé au cessionnaire (cf. ACPR/633/2018 du 5 novembre 2018 consid. 5.3, pour un cas de transfert de patrimoine). Il en va toutefois différemment lorsque les faits litigieux concernent une période postérieure à dite cession ; dans un tel cas, le créancier, même cessionnaire, est directement touché par d'éventuelles infractions dans la faillite commises seulement après l'acquisition de sa qualité de créancier (arrêt du Tribunal fédéral 6B_507/2018 du 24 septembre 2018 consid. 2.3).

2.2.3. L'art. 121 CPP permet, dans certaines hypothèses, la transmission des droits de la partie plaignante. Ainsi, si le lésé décède sans avoir renoncé à ses droits de procédure, ceux-ci passent à ses proches au sens de l'art. 110 al. 1 CP, dans l'ordre de succession (al. 1). Par ailleurs, la personne qui est subrogée de par la loi aux droits du lésé n'est habilitée qu'à introduire une action civile et ne peut se prévaloir que des droits de procédure qui se rapportent directement aux conclusions civiles (al. 2).

Le premier alinéa ne s'applique qu'aux personnes physiques, dès lors qu'une société ne "meurt" pas et n'a pas de "proches" qui seraient ses héritiers. En cas de fusion notamment, la société reprenante n'exerce pas la fonction de "proche" à l'égard de la société transférante et dissoute (ATF 140 IV 162 consid. 4.7.1 et 4.9.1 p. 167 ss). En tant que les conditions ressortant de l'art. 121 al. 1 CPP sont remplies, les proches sont alors autorisés à participer à la procédure comme parties plaignantes en agissant à choix sur les plans pénal et civil, cumulativement ou alternativement (cf. art. 119 al. 2 CPP; ATF 142 IV 82 consid. 3.2 p. 84 ss).

Le second alinéa règle les effets de la subrogation, autrement dit du transfert de par la loi de droits déterminés à des personnes qui ne sont pas elles-mêmes des lésés. Cette disposition ne vise que les cas de subrogation légale, à l'exclusion du transfert volontaire (par ex. la cession de créances et la reprise de dettes [art. 164 ss et 757 al. 2 CO, art. 260 LP] ou encore le transfert d'actifs par contrat de transfert ou de fusion [art. 69 ss LFus]). Même si la fusion de sociétés prévue par l'art. 22 LFus en lien avec l'art. 3 LFus entraîne la succession dite universelle des actifs et passifs (contrairement à la scission selon l'art. 29 let. b LFus ou au transfert de patrimoine selon les art. 69 ss LFus), elle se fonde en premier lieu sur un acte volontaire, de sorte qu'elle ne tombe pas sous le coup de l'art. 121 al. 2 CPP (ATF 140 IV 162 consid. 4.9.5 p. 171 et l'arrêt cité).

2.3.       En l'espèce, la qualité pour recourir doit être examinée pour chacune des recourantes séparément.

2.3.1. B______ est la veuve de K______, lui-même créancier de SI F______ SA, admis à ce titre à l'état de collocation et au bénéfice d'un acte de défaut de biens après faillite. Directement touché par d'éventuelles infractions commises dans la faillite de SI F______ SA, ce dernier revêtait la qualité de lésé, et donc de partie plaignante.

La recourante est ainsi une proche du lésé décédé au sens de l'art. 121 al. 1 CPP, respectivement de l'art. 110 al. 1 CP. En l'absence d'ascendants, elle est également, en tant que conjointe survivante, son unique héritière (cf. art. 462 ch. 3 CC). Ainsi, conformément à la règle de l'art. 121 al. 1 CPP, la recourante est légitimée à se constituer partie plaignante dans la procédure préliminaire (art. 118 al. 1 CPP) et est donc fondée à demander la poursuite et la condamnation de l'intimé et à faire valoir dans ce cadre les conclusions civiles de son mari décédé (art. 119 al. 2 CPP). Dans cette mesure, elle peut justifier d'un intérêt juridiquement protégé au sens de l'art. 382 al. 1 CPP à l'annulation de l'ordonnance querellée. L'intimé ne le conteste au demeurant pas dans ses observations.

Il s'ensuit que le recours de B______ est recevable.

2.3.2. Pour sa part, A______ SA s'est d'abord prévalue de sa qualité de créancière directe de SI F______ SA, également admise à ce titre à l'état de collocation et titulaire d'un acte de défaut de biens. Elle a ensuite affirmé être issue en réalité de la scission de l'ancienne ENTREPRISE A______ SA en deux entités, l'autre étant X______ SA, afin de bénéficier de l'art. 121 al. 2 CPP.

Force est toutefois de constater qu'aucune de ces deux hypothèses n'est rendue ne serait-ce que vraisemblable par la recourante.

En premier lieu, les documents fournis à l'appui de sa constitution de partie plaignante ne prouvent pas qu'elle était effectivement créancière de SI F______ SA. Au contraire, l'acte de défaut de biens date du 24 juin 2014, soit une époque où elle n'existait pas encore. Ainsi, la mention, dans ce même document, de "A______ SA" en tant que créancier se rapporte selon toute vraisemblance à ENTREPRISE A______ SA. Les pièces produites par l'intimé dans ses observations permettent également d'infirmer les allégués de la recourante à cet égard : l'Office des faillites y confirme que le créancier admis à l'état de collocation était bien ENTREPRISE A______ SA, laquelle n'avait ensuite a priori pas cédé sa créance à la recourante.

En second lieu, la recourante ne saurait valablement affirmer provenir de la scission (au sens des art. 29 ss LFus) d'ENTREPRISE A______ SA en deux entités. Les informations disponibles au Registre du commerce mentionnent explicitement un transfert du patrimoine de cette dernière société à la recourante. L'existence d'une telle opération est encore confirmée par le contrat conclu le 4 mai 2015 entre les deux sociétés - par ailleurs mentionné sous la rubrique "Transferts de patrimoine" de l'extrait du Registre du commerce pour X______ SA, nouvelle raison sociale d'ENTREPRISE A______ SA -, dont l'intitulé (transfert de patrimoine) et l'article premier (qui renvoie explicitement aux art. 69 ss LFus) sont dénués de toute ambiguïté. On relèvera également que si, comme le prétend la recourante, l'ancienne ENTREPRISE A______ SA avait été scindée en deux nouvelles entités, alors chacune d'elles aurait dû se voir attribuer un nouveau IDE (cf. art. 116 al. 5 ORC). Or, ENTREPRISE A______ SA a uniquement modifié sa raison sociale, tout en conservant le même IDE, ce qui, ici aussi, tend à confirmer l'existence d'un transfert de patrimoine de la part de cette dernière.

De tout ce qui précède, il résulte que la recourante ne pouvait elle-même être créancière originaire de SI F______ SA, puisqu'elle n'existait pas encore au moment de la faillite de celle-ci. Tout au plus aurait-elle pu acquérir cette qualité ensuite d'un transfert de patrimoine, équivalent à une cession de créance, ce qui ne suffit toutefois pas, selon la jurisprudence (cf. consid. 2.2.2. supra), à la faire apparaître comme un lésé direct, à tout le moins pour des faits litigieux - le transfert de CHF 42 millions entre 2006 et 2007 - antérieurs à cette opération.

Pour le surplus, l'argumentation de la recourante liée à l'art. 121 al. 2 CPP, lequel serait applicable en cas de scission, ne porte pas. Outre que l'existence d'une telle opération est, on l'a vu, contredite par l'ensemble des pièces du dossier, elle ne correspond dans tous les cas pas à une subrogation légale, seule hypothèse couverte par cette disposition. À l'instar de la fusion, la scission se fonde en effet avant tout sur un acte volontaire, à savoir un contrat (de scission, cf. art. 36 LFus), de sorte que la solution dégagée dans l'ATF 140 IV 162 doit y être transposée. La recourante ne peut tirer un quelconque argument de cet arrêt, qu'elle cite d'ailleurs de manière tronquée : la scission y est certes opposée à la fusion, mais uniquement en tant que celle-ci entraîne, contrairement à celle-là, la succession universelle des actifs et passifs des sociétés concernées. Or, si même une telle succession universelle ne suffit pas à reléguer à l'arrière-plan le caractère avant tout volontaire d'une fusion de sociétés, on ne voit pas comment il pourrait en aller autrement pour d'autres types de restructurations qui dépendent également d'un contrat entre les parties, sans toutefois entraîner le transfert de l'ensemble des actifs et passifs des entités concernées, à l'instar de la scission (par séparation, au sens de l'art. 29 let. b LFus) ou du transfert de patrimoine.

Enfin, le fait que le Ministère public ait admis - à tort - la qualité de partie plaignante de la recourante au cours de l'instruction ne permet pas à cette dernière d'affirmer que cette décision s'imposerait désormais à l'intimé. En tant que condition de recevabilité, la qualité pour recourir au sens de l'art. 382 CPP s'examine d'office par l'autorité de recours (cf. M. DEMARMELS, Die Legitimation zur Beschwerde im kantonalen Strafverfahren (Art. 381 f. StPO), thèse Zurich 2018, p. 75 et 92). Peu importe dès lors que l'intimé ait préféré ne pas recourir contre l'ordonnance du 24 janvier 2019, qui ne saurait lier la Chambre de céans dans le cadre du présent recours.

Il s'ensuit que A______ SA ne revêt pas la qualité de lésée, et donc de partie plaignante pour les faits dénoncés, de sorte que son recours doit être déclaré irrecevable.

3.             B______ reproche au Ministère public d'avoir refusé d'étendre l'instruction, menée du chef de violation de l'art. 164 CP, à C______.

3.2.1. Conformément à l'art. 311 al. 2 CPP, le ministère public peut étendre l'instruction à d'autre prévenus et à d'autres infractions, l'art. 309 al. 3 CPP étant alors applicable. La partie plaignante est fondée à formuler une requête tendant à une telle extension de l'instruction (cf. art. 109 al. 1 CPP). Si cette requête peut être assimilée à une plainte (art. 303 CPP et 304 CPP), il appartient alors au ministère public de rendre une décision formelle en procédant, mutatis mutandis, conformément aux art. 309 CPP et 310 CPP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1276/2019 précité consid. 3.1 et les références citées).

Selon l'art. 310 al. 1 let. a CPP, le ministère public rend immédiatement une ordonnance de non-entrée en matière s'il ressort de la dénonciation ou du rapport de police que les éléments constitutifs de l'infraction ou les conditions à l'ouverture de l'action pénale ne sont manifestement pas réunis. Cette disposition doit être appliquée conformément à l'adage "in dubio pro duriore". Celui-ci découle du principe de la légalité (art. 5 al. 1 Cst. et art. 2 al. 2 CPP en relation avec les art. 319 al. 1 et 324 al. 1 CPP) et signifie qu'en principe une non-entrée en matière ne peut être prononcée par le ministère public que lorsqu'il apparaît clairement que les faits ne sont pas punissables ou que les conditions à la poursuite pénale ne sont pas remplies. Le ministère public dispose, dans ce cadre, d'un pouvoir d'appréciation. La procédure doit se poursuivre lorsqu'une condamnation apparaît plus vraisemblable qu'un acquittement ou lorsque les probabilités d'acquittement et de condamnation apparaissent équivalentes, en particulier en présence d'une infraction grave. En effet, en cas de doute s'agissant de la situation factuelle ou juridique, ce n'est pas à l'autorité d'instruction ou d'accusation mais au juge matériellement compétent qu'il appartient de se prononcer (ATF 143 IV 241 consid. 2.2.1 p. 243).

3.2.2. L'infraction de diminution effective de l'actif au préjudice des créanciers, prévue à l'art. 164 ch. 1 CP, vise notamment le débiteur qui, de manière à causer un dommage à ses créanciers, aura diminué son actif en cédant des valeurs patrimoniales à titre gratuit ou contre une prestation de valeur manifestement inférieure (al. 2). L'art. 164 ch. 1 CP n'est applicable que si le débiteur a été déclaré en faillite ou si un acte de défaut de biens a été dressé contre lui.

Cette disposition réprime un délit propre, qui ne peut être commis que par le débiteur. Cependant, si le débiteur est une personne morale ou une société, l'art. 29 CP est applicable : les personnes physiques mentionnées par cette disposition sont punissables en tant qu'auteurs si elles ont agi, en l'une des qualités décrites, pour la personne morale ou la société (arrêt du Tribunal fédéral 6B_438/2019 du 28 mai 2019 consid. 3.1 in fine).

3.2.3. L'art. 29 CP vise notamment le dirigeant effectif qui n'est ni un organe ou un membre d'un organe, ni un associé ou un collaborateur de la personne morale (let. d). Par dirigeant effectif, on entend la personne qui dirige en fait la société en utilisant comme hommes de paille des membres de l'administration statutaire, des directeurs ou des fondés de pouvoirs (arrêt du Tribunal fédéral 6B_920/2018 du 23 novembre 2018 consid. 2.1 et la référence citée). L'utilisation d'un homme de paille n'est toutefois pas une condition indispensable pour admettre la qualité de dirigeant effectif ; celle-ci doit au contraire être reconnue déjà à celui qui exerce une influence décisive sur la gestion et la direction de l'activité du débiteur, de la même manière que le ferait un organe au sens formel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_635/2010 du 19 avril 2011 consid. 3.3.2 et les références citées).

La jurisprudence n'hésite pas à s'inspirer de la notion (civile) d'organe de fait, qui désigne les personnes ayant la compétence durable de prendre des décisions excédant l'accomplissement des tâches quotidiennes, dont le pouvoir de décision apparaît comme propre et indépendant et qui sont ainsi en mesure d'empêcher la survenance du dommage (ATF 136 III 14 consid. 2.4 p. 21 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 4A_455/2018 du 9 octobre 2019 destiné à la publication, consid. 6.1). L'accomplissement d'actes isolés ou la simple assistance dans la prise de décisions ne suffit en revanche pas (ATF 128 III 29 consid. 3c p. 33 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_300/2016 du 7 novembre 2016 consid. 4.4.1 et les références citées).

Selon cette définition, l'organe de fait doit agir de manière autonome, dans une position typique d'organe, ce qui exclut les personnes qui peuvent certes avoir une influence sur la volonté sociale, mais dont les actes visent à protéger leurs intérêts légitimes (par exemple les créanciers, fournisseurs, banques ; M.-N. ZEN-RUFFINEN / M. BAUEN, Le conseil d'administration, 2e éd., Zurich 2017, n. 836 p. 324 s.). Ainsi, suivre de près l'évolution d'un débiteur, exiger des comptes provisoires, une cession de créances, des mesures d'assainissement, des versements et procéder à une mise en demeure ne sont que des mesures par lesquelles un créancier tend à se protéger lui-même ; on ne peut y voir une immixtion dans la gestion de la société impliquant un statut d'organe de fait (ATF 136 III 14 consid. 2.4 p. 21). Il en ira autrement lorsqu'un bailleur de fonds important contribue à la conduite des affaires au plus haut niveau de la personne morale, par exemple en participant activement aux délibérations du conseil d'administration et en intervenant dans les décisions de gestion (R. ROTH / L. MOREILLON (éds), Commentaire romand, Code pénal I, Bâle 2009, n. 25 ad art. 29 CP).

Enfin, l'actionnaire, même majoritaire ou unique, n'assume en principe pas de responsabilité personnelle s'il n'exerce aucun pouvoir de gestion dans la société. On pourra cependant le qualifier d'organe de fait s'il "tire les ficelles en coulisse", par le biais d'instructions données aux administrateurs qu'il a nommés (à titre fiduciaire). La réponse dépendra en définitive de la marge d'autonomie laissée aux administrateurs (cf. P. TERCIER / M. AMSTUTZ / R. TRIGO TRINDADE (éds), Commentaire romand, Code des obligations II, 2e éd., Bâle 2017, n. 8 et 15 ad art. 754 CO ; M.-N. ZEN-RUFFINEN / M. BAUEN, op. cit., n. 842 p. 326).

3.3.       En l'espèce, il n'est pas contesté que l'intimé a acquis en 2001 le capital-actions de SI F______ SA et a procédé à divers investissements - dont le montant exact n'a pas pu être déterminé - dans cette société, permettant à celle-ci d'acquérir plusieurs parcelles à Genève et J______ (GE). Il en était dès lors l'actionnaire unique, mais apparaît également, au regard des apports en liquidités consentis, comme son bailleur de fonds.

La recourante estime toutefois que le rôle de l'intimé ne s'est pas limité à celui d'investisseur, mais qu'il a en outre agi comme dirigeant effectif de la société, à tout le moins lors de l'opération par laquelle il était sorti de son actionnariat en 2006, de sorte qu'il revêtait la qualité de débiteur sur la base de l'art. 29 let. d CP.

Cette opinion ne peut être suivie.

Il ressort en effet du dossier que si l'intimé a certes décidé d'investir, au travers de SI F______ SA, dans divers projets immobiliers, il n'a cependant jamais activement pris part aux activités de cette dernière. Bien au contraire, il s'est dès le départ fié à divers conseillers et connaissances qu'il avait à Genève, dont E______, une employée de sa banque, et I______, un bijoutier dont il était client, lesquels lui ont vanté la possibilité d'investir dans des immeubles commerciaux et l'ont présenté à G______, au bénéfice d'une solide expérience dans ce domaine. Ce dernier est décrit par l'ensemble des protagonistes interrogés durant l'instruction comme étant à l'initiative du projet ; c'est d'ailleurs lui qui a organisé, en mai 2001, l'entrée de C______ dans l'actionnariat de SI F______ SA, en lui vendant les actions acquises de son précédent propriétaire peu de temps auparavant. Depuis lors et jusqu'à la faillite de la société, G______ a fonctionné comme administrateur de celle-ci et paraît en avoir été le véritable animateur, prenant en son nom les décisions importantes, notamment la vente des immeubles à N______ SA, gérant - au travers de sa propre société O______ SA - la bonne exécution du contrat d'entreprise conclu avec N______ SA, mandatant Me H______, ancien administrateur, pour représenter la société dans diverses procédures l'opposant à ses créanciers - dont feu le mari de la recourante - ou encore échangeant seul avec l'organe de révision.

Dans ce cadre, l'intimé - qui ne parle ni français, ni anglais - n'a joué qu'un rôle secondaire, n'excédant pas celui d'un actionnaire ou d'un créancier qui se contente d'apporter les fonds nécessaires à la société. Les éléments tous généraux qu'il a su donner sur les projets immobiliers en cours lors de ses auditions ne permettent pas de retenir qu'il se serait immiscé dans la gestion de SI F______ SA. Il paraît au contraire s'en être entièrement remis à l'expertise de G______ en la matière, admettant d'ailleurs ne l'avoir rencontré qu'à deux reprises, la première pour décider d'investir dans le projet, la seconde pour en sortir. Ce dernier a tenu des déclarations similaires, relevant le peu de contacts qu'il avait avec l'intimé, dont il ne possédait même pas le numéro de téléphone. L'audition de I______ va également dans le sens d'un faible niveau d'implication personnelle de l'intimé au moment de souscrire au projet immobilier proposé par G______. Ces éléments ne plaident pas en faveur d'une position de dirigeant effectif au sein de SI F______ SA.

Ce constat s'impose également s'agissant des versements litigieux de 2006 et 2007, qui font suite à la décision de l'intimé de se retirer du projet, et donc de récupérer les montants investis. Les mesures alors concrètement prises par ce dernier, à savoir tenir une réunion à Genève, y réclamer - cas échant avec véhémence - un remboursement rapide et s'entourer d'une personne de confiance vivant sur place pour l'aider à y parvenir, ne dépassent pas celles qu'on peut attendre d'un créancier désireux de protéger ses intérêts ; elles ne le font en tout cas pas apparaître comme le décisionnaire de la société.

La solution ensuite mise en place pour permettre à l'intimé de récupérer les fonds investis a été, une fois de plus, l'oeuvre de G______. C'est ce dernier qui représentait l'intimé lors de la vente de ses actions à I______, puis a trouvé un acheteur intéressé par les immeubles détenus par SI F______ SA, et enfin négocié et signé les contrats de vente et d'entreprise y relatifs. Il avait d'ailleurs un intérêt personnel dans l'affaire, puisqu'il a perçu dans ce cadre diverses rémunérations et rétrocessions, au travers de sa propre société O______ SA. En outre, il a conservé ses fonctions d'administrateur au-delà de la vente des immeubles. Ces éléments ne permettent pas de le qualifier d'homme de paille, placé par l'intimé et dirigé par ce dernier, mais dénotent une activité typique d'organe formel de la société.

Quant aux quatre transferts litigieux, ils ont tous été ordonnés par G______, qui était seul titulaire d'un pouvoir de signature sur le compte bancaire de SI F______ SA et qui a seul fait l'objet de l'instruction du Ministère public. Le fait que D______, l'homme de confiance de l'intimé, ait contresigné deux - et non quatre, comme le prétend la recourante - ordres de transfert et requis de G______ qu'il en exécute un troisième est certes révélateur d'un certain contrôle opéré sur le bon déroulement des opérations. Ce contrôle s'est toutefois limité à certains actes isolés et visait, en définitive, à protéger les intérêts de l'intimé. Questionné sur le rôle de D______ dans ce cadre, G______ a d'ailleurs déclaré que ce dernier lui faisait comprendre qu'il fallait "faire avancer les choses", parfois de manière insistante, ce qui démontre bien, ici aussi, qu'il se limitait à agir de l'extérieur, en exigeant des remboursements, à l'instar d'un bailleur de fonds, mais que la décision finale revenait bien à l'administrateur de la société.

En toute hypothèse, avant d'imputer les actions de D______ à l'intimé, il aurait fallu démontrer que le premier n'était qu'un instrument dans les mains du second, se contentant d'exécuter ses décisions prises en amont. Tel n'est toutefois pas le cas en l'espèce. D______ paraît au contraire avoir joui d'une grande autonomie dans l'exécution de sa mission, se contentant d'assurer à C______ qu'il allait être intégralement payé. Ce dernier n'a d'ailleurs pas su dire quelles démarches il entreprenait concrètement. En outre, l'intimé n'a, semble-t-il, jamais exigé lui-même des explications, s'en remettant une nouvelle fois à autrui pour gérer ses affaires. Les quelques précisions qu'il a pu donner sur les montants effectivement perçus montrent qu'il n'avait effectivement qu'une vague idée de la situation : il a d'abord déclaré que les CHF 42 millions avaient été versés en une seule fois (et non en quatre), sans qu'il puisse dire de qui ni comment. Le transfert lui avait simplement été annoncé a posteriori. Enfin, il dit n'avoir appris la faillite de SI F______ SA qu'au travers de la procédure pénale, espérant jusqu'alors toujours percevoir le solde de sa créance.

Dans ce contexte, le courrier du 20 février 2011, adressé par G______ à l'Office des faillites, n'a pas la portée que la recourante entend lui donner. Outre que son contenu est pour le moins contradictoire - G______ y affirme d'abord avoir "exclusivement" agi sur instructions de I______, puis dit, au paragraphe suivant, avoir également agi sur ordre de l'intimé, représenté par D______ -, ce pli semble avoir essentiellement eu pour but de minimiser l'implication de l'administrateur dans la faillite de la société. Entendu par le Ministère public, G______ n'a pas tenu de propos similaires. Les seules instructions dont il a alors fait état sont celles qu'il tenait de I______, relatives aux paiements litigieux à l'intimé. Il a alors reconnu qu'il n'aurait pas dû les exécuter, ce qui confirme, encore une fois, qu'il avait seul la conduite effective de SI F______ SA, ou à tout le moins une marge de manoeuvre suffisamment importante dans ce cadre.

Ce dernier élément est en l'occurrence décisif, en tant qu'il exclut l'hypothèse selon laquelle l'intimé aurait endossé le rôle de dirigeant effectif de la société, en lieu et place, voire à côté de l'administrateur de celle-ci.

Quant à la convention du 30 août 2006, par laquelle l'intimé a vendu ses actions à I______, si la recourante estime qu'elle a été simulée et a permis le transfert des actifs de SI F______ SA au détriment des autres créanciers, elle n'expose pas en quoi cette circonstance permettrait de reconnaître à l'intimé - qui a déclaré n'avoir jamais vu ce contrat, signé en son nom par G______ et D______ - une position d'organe au sein de la société.

En définitive, faute pour l'intimé d'avoir revêtu la position de dirigeant effectif de SI F______ SA, il n'existe pas contre lui de prévention suffisante d'infraction à l'art. 164 CP, de sorte que le Ministère public était fondé à refuser d'étendre l'instruction à son encontre.

3.4.       Enfin, si on peut certes regretter que l'ordonnance querellée ne traite pas des mesures d'instruction précédemment requises par la recourante, force est de constater que ces dernières n'apparaissent pas susceptibles de révéler une quelconque responsabilité pénale de l'intimé.

E______ a certes agi comme intermédiaire au moment de présenter G______ à l'intimé en 2001 ; elle ne semble toutefois plus être intervenue activement durant la période litigieuse, l'intimé reconnaissant d'ailleurs lui-même ne s'être jamais adressé à elle dans ce cadre, G______ admettant pour sa part avoir moins été en contact avec elle à cette époque. Quant à l'audition de D______, elle pourrait tout au plus apporter des précisions sur son implication exacte dans les versements litigieux. La recourante ne remet toutefois pas en cause le refus du Ministère public d'étendre l'instruction à ce dernier. Cela étant, on ne voit pas ce que cette audition pourrait apporter de nouveau sur le rôle joué par l'intimé, seul mis en cause par la recourante à ce stade, déjà suffisamment entendu au cours de l'instruction.

Ces mesures d'instruction doivent dès lors être rejetées, par appréciation anticipée des preuves (cf. ACPR/12/2020 du 7 janvier 2020, consid. 3.2).

4.             Justifiée, l'ordonnance querellée sera donc confirmée.

5.             Les recourantes, qui succombent, supporteront, conjointement et solidairement, les frais envers l'État, arrêtés à CHF 1'800.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

6.             C______ conclut à ce que les recourantes soient condamnées au paiement de ses dépens pour les procédures de recours, chiffrés à CHF 8'000.- au total.

6.2.1.  En vertu de l'art. 436 al. 1 CPP, les prétentions en indemnité dans les procédures de recours sont régies par les art. 429 à 434 CPP.

6.2.2.  L'art. 429 al. 1 let. a CPP prévoit que si le prévenu est acquitté totalement ou en partie ou s'il bénéficie d'une ordonnance de classement, il a droit à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. Selon l'art. 429 al. 2 CPP, l'autorité pénale examine d'office les prétentions du prévenu. Elle peut enjoindre à celui-ci de les chiffrer et de les justifier.

Cette disposition s'applique également en cas de non-entrée en matière (ATF 139 IV 241 consid. 1 p. 242).

Dans tous les cas, l'indemnité n'est due qu'à concurrence des dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable des droits de procédure du prévenu (Message relatif à l'unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1303, p. 1313). Le juge ne doit ainsi pas avaliser purement et simplement les notes d'honoraires qui lui sont le cas échéant soumises, mais, au contraire, examiner si l'assistance d'un conseil était nécessaire puis, dans l'affirmative, apprécier objectivement la pertinence et l'adéquation des activités facturées, par rapport à la complexité juridique et factuelle de l'affaire et, enfin, dire si le montant des honoraires réclamés, même conforme au tarif pratiqué, est proportionné à la difficulté et à l'importance de la cause, c'est-à-dire raisonnable au sens de la loi (ACPR/140/2013 du 12 avril 2013).

6.2.3.  Enfin, l'indemnité de l'art. 429 al. 1 let. a CPP est en principe à la charge de l'État. La jurisprudence a certes admis que les frais de défense du prévenu pouvaient, dans certaines configurations, être mis à la charge de la partie plaignante. Cette jurisprudence doit toutefois être interprétée restrictivement ; elle ne s'applique pas au cas du recours interjeté par la partie plaignante à l'encontre d'une décision de classement ou de non-entrée en matière (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1267/2019 du 13 mars 2020 consid. 2.2.1 ; 6B_105/2018 du 22 août 2018 consid. 4).

6.3.       En l'espèce, l'intimé, mis en cause, obtient gain de cause et a droit à une indemnité pour ses frais de défense.

Il conclut à cet égard à l'allocation d'une indemnité de CHF 4'000.- pour chacune des deux procédures de recours, soit CHF 8'000.- au total, correspondant à 18 heures de travail (9 heures par procédure) au tarif horaire de CHF 450.-.

Compte tenu toutefois de l'ampleur de ses écritures (15 pages pour ses observations au recours de B______, 19 pour celles au recours de A______ SA), lesquelles contiennent des parties en fait pour l'essentiel similaires et développent des arguments juridiques quasi identiques (hormis ceux liés à l'irrecevabilité du recours de A______ SA), l'indemnité réclamée par l'intimé paraît excessive. Elle sera ainsi ramenée à CHF 4'500.- au total, correspondant à dix heures d'activité (cinq heures par procédure de recours) au tarif horaire de CHF 450.- appliqué par la Cour de justice à l'avocat chef d'étude (ACPR/279/2014 du 27 mai 2014).

La TVA n'est pas due, l'intimé étant domicilié à l'étranger (ACPR/402/2012 du 27 septembre 2012 consid. 3).

Cette indemnité sera mise à la charge de l'État, conformément à la jurisprudence précitée.

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Joint les recours.

Déclare le recours de A______ SA irrecevable.

Rejette celui de B______.

Condamne A______ SA et B______, conjointement et solidairement, aux frais de la procédure de recours, fixés en totalité à CHF 1'800.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées.

Alloue à C______, à la charge de l'État, une indemnité de CHF 4'500.-, sans TVA.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à A______ SA, B______ et C______, soit pour eux leurs conseils respectifs, ainsi qu'au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Julien CASEYS, greffier.

 

Le greffier :

Julien CASEYS

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).


 

P/5137/2014

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

30.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

     

- délivrance de copies (let. b)

CHF

     

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'695.00

-

CHF

     

Total (Pour calculer : cliquer avec bouton de droite sur le montant total puis sur « mettre à jour les champs » ou cliquer sur le montant total et sur la touche F9)

CHF

1'800.00