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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/795/2022

ACJC/422/2022 du 25.03.2022 sur JTBL/164/2022 ( SBL )

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/795/2022 ACJC/422/2022

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

du VENDREDI 25 MARS 2022

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, recourante contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 3 mars 2022, représentée par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6, en les bureaux de laquelle elle fait élection de domicile,

et

SOCIETE IMMOBILIERE B______ SA, sise c/o C______, Agence Immobilière, ______, intimée, comparant par Me Gabriel RAGGENBASS, avocat, place de Longemalle 1, 1204 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

 


Vu, EN FAIT, le contrat de bail conclu par les parties, portant sur la location d'un appartement de 3,5 pièces au 1er étage de l'immeuble sis 1______, à Genève;

Que le bail a été résilié, par plis officiels adressés aux époux A______/D______, de manière ordinaire, le 21 décembre 2020 pour le 30 novembre 2021, en raison de plaintes du voisinage concernant le comportement des occupants dudit logement;

Que les congés n'ont pas été contestés;

Que D______ a quitté l'appartement au mois de mars 2020;

Que les locaux n'ont pas été restitués par A______;

Que, par requête adressée le 19 janvier 2022 au Tribunal des baux et loyers, la bailleresse a requis l'évacuation de la précitée, assortie de mesures d'exécution directes du jugement d'évacuation;

Qu'à l'audience du 3 mars 2022 devant le Tribunal, la bailleresse a persisté dans ses conclusions; qu'elle a déclaré que les plaintes du voisinage persistaient et que la situation empirait, pièces à l'appui; qu'elle a indiqué que les indemnités pour occupation illicite étaient réglées; qu'elle s'est opposée à l'octroi de tout sursis humanitaire, les autres habitants de l'immeuble étant excédés;

Que la locataire a exposé vivre dans l'appartement en cause avec ses deux enfants âgés de 15 et 17 ans; qu'elle a admis rencontrer des problèmes avec son fils aîné, une procédure de placement à l'extérieur du domicile étant en cours; qu'elle a déclaré que sa situation financière était délicate; qu'elle était par ailleurs en formation; qu'elle a conclu à l'octroi d'un sursis humanitaire de douze mois;

Que la cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience;

Que, par jugement JTBL/164/2022 rendu le 3 mars 2022, le Tribunal a condamné la locataire à évacuer de sa personne et de ses biens et de toute autre personne faisant ménage commun avec elle l'appartement en cause (ch. 1 du dispositif), a autorisé la bailleresse à requérir l'évacuation par la force publique de la locataire dès le 1er juin 2022 (ch. 2), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 4);

Vu le recours déposé le 18 mars 2022 à la Cour de justice par A______ contre ce jugement;

Qu'elle a conclu à ce qu'il soit sursis à l'exécution de l'évacuation jusqu'au 31 janvier 2023;

Que A______ a préalablement requis la suspension du caractère exécutoire des mesures d'exécution ordonnées par le Tribunal des baux et loyers;

Qu'invitée à se déterminer, la bailleresse a, par écritures du 24 mars 2022, conclu au rejet de la requête d'effet suspensif;

Que les parties ont été avisées par plis du greffe du 25 mars 2022 de ce que la cause était gardée à juger sur effet suspensif;

Considérant, EN DROIT, que seule la voie du recours est ouverte contre les mesures d'exécution (art. 309 let. a et 319 let. a CPC);

Que le recours ne suspend pas la force de chose jugée, l'instance d'appel pouvant suspendre le caractère exécutoire (art. 325 al. 1 et 2 CPC);

Que l'instance de recours est habilitée à décider d'office ou sur requête de suspendre le caractère exécutoire (cf. Jeandin, in Commentaire Romand, Code de procédure civile 2ème éd., n. 6 ad art. 325 CPC);

Qu'en la matière, l'instance d'appel dispose d'un large pouvoir d'appréciation (ATF
137 III 475 consid. 4.1; arrêts du Tribunal fédéral 5A_403/2015 du 28 août 2015 consid. 5; 5A_419/2014 du 9 octobre 2014 consid. 7.1.2);

Que, selon les principes généraux, l'autorité procède à une pesée des intérêts en présence et doit se demander, en particulier, si la décision est de nature à provoquer une situation irréversible; qu'elle prend également en considération les chances de succès du recours (arrêts du Tribunal fédéral 4A_337/2014 du 14 juillet 2014 consid. 3.1; 4D_30/2010 du 25 mars 2010 consid. 2.3);

Que selon l'art. 30 al. 4 LaCC, le Tribunal peut, pour des motifs humanitaires, surseoir à l'exécution du jugement d'évacuation dans la mesure nécessaire pour permettre le relogement du locataire ou du fermier lorsqu'il est appelé à statuer sur l'exécution d'un jugement d'évacuation d'un logement, après audition des représentants du département chargé du logement et des représentants des services sociaux ainsi que des parties;

Que, s'agissant des motifs de sursis, différents de cas en cas, ils doivent être dictés par des "raisons élémentaires d'humanité"; que sont notamment des motifs de ce genre la maladie grave ou le décès de l'expulsé ou d'un membre de sa famille, le grand âge ou la situation modeste de l'expulsé; qu'en revanche, la pénurie de logements ou le fait que l'expulsé entretient de bons rapports avec ses voisins ne sont pas des motifs d'octroi d'un sursis (ACJC/422/2014 du 7 avril 2014 consid. 4.2; ACJC/187/2014 du 10 février 2014 consid. 5.2.1; arrêt du Tribunal fédéral du 20 septembre 1990, in Droit du bail 3/1990 p. 30 et réf. cit.);

Que le juge ne peut pas différer longuement l'exécution forcée et, ainsi, au détriment de la partie obtenant gain de cause, éluder le droit qui a déterminé l'issue du procès; que le délai d'exécution ne doit notamment pas remplacer la prolongation d'un contrat de bail à loyer lorsque cette prolongation ne peut pas être légalement accordée à la partie condamnée (arrêts du Tribunal fédéral 4A_232/2018 du 23 mai 2018 consid. 7; 4A_389/2017 du 26 septembre 2017 consid. 8; 4A_207/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.1);

Considérant que seules les mesures d'exécution ont été remises en cause par la recourante, de sorte que seule la voie du recours est ouverte;

Qu'il ne se justifie pas de suspendre le caractère exécutoire du chiffre 2 du jugement entrepris;

Qu'en effet, le recours est, prima facie et sans préjudice de l'examen au fond, dénué de chance de succès;

Que par ailleurs, le délai humanitaire requis par la recourante reviendrait à lui accorder une prolongation de bail qu'elle n'est pas fondée à obtenir, dès lors qu'elle n'a pas contesté le congé qui lui a été notifié ni requis l'octroi d'une prolongation de bail;

Qu'en conséquence, la requête de la recourante sera rejetée.

* * * * *



PAR CES MOTIFS,
La Présidente de la Chambre des baux et loyers :

Rejette la requête de suspension du caractère exécutoire du chiffre 2 du dispositif du jugement JTBL/164/2022 rendu le 3 mars 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/795/2022-7-SD.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE











 

 

 

 

 

 

 

 

Indications des voies de recours :

 

La présente décision, incidente et de nature provisionnelle (137 III 475 consid. 1) est susceptible d'un recours en matière civile, les griefs pouvant être invoqués étant toutefois limités (art. 98 LTF), respectivement d'un recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 à 119 et 90 ss LTF). Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.