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Décisions | Chambre civile

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C/23164/2017

ACJC/354/2020 du 25.02.2020 sur JTPI/7224/2019 ( OS ) , MODIFIE

Normes : CC.277
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/23164/2017 ACJC/354/2020

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du MARDI 25 FEVRIER 2020

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, Genève, appelant d'un jugement rendu par la 13ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 16 mai 2019, comparant par Me Annette Micucci, avocate, rue du Général-Dufour 15, case postale 5556, 1211 Genève 11, en l'étude de laquelle il fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, ______ (Grande-Bretagne), intimé, comparant par Me Vincent Hertig, avocat, avenue du Grand St-Bernard 35, case postale 407, 1920 Martigny (GE), en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTPI/7224/2019 rendu le 16 mai 2019, le Tribunal de première instance, statuant par voie de procédure simplifiée, a condamné B______ à verser en mains de A______, à titre de contribution à son entretien, par mois et d'avance, allocations familiales ou d'études non comprises, un montant de 350 fr. dès le 1er octobre 2016 et jusqu'à la fin de ses études sérieuses et régulières (chiffre 1 du dispositif), a arrêté les frais judiciaires à
1000 fr., mis à la charge des parties par moitié chacune (ch. 2) et dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 3).

B. a. Par acte posté le 19 juin 2019, A______ forme appel de ce jugement, qu'il a reçu le 20 mai 2019. Il conclut, sous suite de frais, à son annulation et à ce que B______ soit condamné à lui verser une contribution d'entretien mensuelle de 2'500 fr.

b. Dans sa réponse du 12 septembre 2019, B______ conclut au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris, sous suite de frais judiciaires et dépens.

c. Aux termes de sa réplique, A______ persiste dans ses conclusions.

d. Les parties ont été informées par avis du greffe du 11 novembre 2019 de ce que la cause était gardée à juger, B______ n'ayant pas fait usage de la faculté de dupliquer.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. A______, né le ______ 1997 à Genève est le fils de C______, née le ______ 1953, et de B______, né le ______ 1950.

C______ et B______ n'ayant jamais été mariés, ce dernier a reconnu son fils A______.

B______, qui vit en Angleterre, a trois autres enfants. Il n'a eu que très peu de contacts avec son fils depuis sa naissance.

b.a. En juin 2000, C______ a soumis à B______ un arrangement portant sur les contributions d'entretien pour A______, ayant la teneur suivante : "you pay the following amounts as a pension for your son A______: CHF 1'300.- until the age of 5, CHF 1'500.- until the age of 10,
CHF 1'600.- until the age of 15, CHF 1'700.- until the age of 18, i.e. A______'s majority, it being understood that in case A______ continued serious studies to complete a professionnal training, this amount would have to be paid until the age of 25 or until the end of his studies. (...). Please note that these pensions are payable every month and in advance".

b.b. B______ a répondu, en septembre 2000, ce qui suit : "I confirm that I agree, without prejudice to the financial terms that you have set out in your letter dated 29th June 2000, subject to my income and circumstances at the time", traduit librement en "je confirme mon accord, sans préjudice des termes financiers que vous avez dressés dans votre lettre du 29 juin 2000, consentis en fonction de mon revenu et des circonstances de l'époque".

b.c. Le 16 mai 2012, C______, par la voix de son conseil, a informé B______ de ce qu'il lui devait un montant de 89'900 fr. à titre d'arriérés de contribution à l'entretien de A______, selon les termes de leur accord, soit
12'000 fr. pour la période du 1er octobre 2002 à septembre 2007 (1'500 fr. x
60 mois = 90'000 fr., sous déduction des montants versés, soit 1'300 fr. x 60 mois = 78'000 fr.) et 77'900 fr. du 1er octobre 2007 au 31 mai 2012 (1'600 fr. x 56 mois = 89'600 fr., sous déduction des montant versés soit 1'300 fr. x 9 mois =
11'700 fr.).

b.d. B______ ne s'étant pas acquitté du montant dû, C______ a déposé, le 9 janvier 2014, une requête en séquestre auprès du Tribunal du lieu de situation de l'immeuble dont l'intéressé était propriétaire à D______, (VS) pour un montant de 90'400 fr.

b.e. A______, représenté par sa mère, a ensuite agi en paiement à l'encontre de son père, par requête déposée le 25 mars 2015 auprès du Tribunal de première instance de Genève.

Par jugement du 16 août 2016, le Tribunal a condamné B______ à payer à A______ un montant de 22'070 fr., avec intérêts à 5 % dès le
10 septembre 2014.

En substance, le Tribunal a considéré qu'à défaut d'avoir été ratifié par l'autorité de protection de l'enfant, l'accord passé en 2000 entre les parents de A______ n'était pas susceptible d'exécution forcée. Fixée en équité, la contribution d'entretien que B______ devait verser à son fils jusqu'à sa majorité, en septembre 2015, s'élevait à 1'300 fr. par mois.

S'agissant de la situation financière de B______, le Tribunal a retenu que celui-ci avait vécu de sa fortune de 2005 à octobre 2015, date depuis laquelle il était retraité. Il avait notamment touché un capital de 719'737 fr. 30 en 2010. B______ avait transféré à son épouse les propriétés qu'il possédait en Angleterre et dans lesquelles il vivait avec sa famille, et était propriétaire d'un chalet à D______ (VS) et d'une villa à Zurich. Quand bien même il n'avait pas des revenus mensuels fixes, il disposait largement des moyens de contribuer à l'entretien de son fils, vu le montant de sa fortune. Il pouvait ainsi être condamné à contribuer à l'entretien de son fils à hauteur de 1'748 fr. par mois. Toutefois, dans la mesure où A______ n'avait pas établi le montant de ses besoins mensuels, la contribution mensuelle était fixée en équité à 1'300 fr.

Ce jugement n'a pas fait l'objet d'un appel.

c. Par requête expédiée le 7 mai 2018, après tentative échouée de conciliation, A______ a saisi le Tribunal d'une demande tendant à la condamnation de B______ à lui verser, d'avance et par mois, allocations familiales non comprises, dès le 4 octobre 2016, une contribution d'entretien de 2'525 fr. 70 jusqu'à la fin de ses études régulièrement menées, avec clause d'indexation usuelle.

A______ a exposé avoir débuté des études ______ et ______ à l'Université de Genève à l'automne 2016, avec l'intention d'obtenir un Bachelor puis un Master, au plus tôt en septembre 2021. Ses charges mensuelles s'élevaient à 3'269 fr. 35 et n'étaient que partiellement couvertes par la rente de 2ème pilier ainsi que les allocations familiales qu'il percevait. Le déficit, en 2'525 fr. 70, devait être supporté par son père.

d. Dans sa réponse, B______ a conclu à ce que la requête soit rejetée.

D'une part, son fils n'avait pas maintenu des relations personnelles avec lui. D'autre part, le précité était en mesure de couvrir ses charges, inférieures à celles avancées, dans la mesure où il pouvait travailler à côté de ses études.

e. Par ordonnance du 12 novembre 2018, le Tribunal a notamment imparti à B______ un délai pour produire toutes pièces utiles en vue d'établir sa situation financière.

e.a. A l'audience du 30 janvier 2019, A______ a précisé qu'il poursuivait ses études à l'Université de Genève en 3ème année, après avoir effectué une année d'études à ______ [Chine], dans le cadre d'un programme d'échange.

Il avait essayé de conserver des relations personnelles avec son père, mais le numéro de téléphone que ce dernier lui avait communiqué ne fonctionnait pas. De plus, B______ n'avait pas répondu à ses courriels.

e.b. B______ a affirmé qu'il avait écrit à son fils, après la dernière audience, mais n'avait jamais reçu de réponse, en particulier par courriel. Le numéro de téléphone qu'il avait communiqué à A______ fonctionnait.

B______ a indiqué, sur questions, qu'il était toujours propriétaire d'un chalet à D______ (VS), qu'il ne louait pas. Il n'avait en revanche jamais possédé une maison dans le canton de Zurich. Il percevait une rente de retraite depuis octobre 2015, ce qui avait conduit à l'augmentation de ses revenus. Il a précisé qu'il n'était pas imposé sur sa fortune en Grande-Bretagne. Sa situation financière n'avait pas changé depuis 2016.

f. Aux termes de leurs plaidoiries finales écrites, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

f.a. A______ a précisé que la contribution d'entretien était due à compter du 4 octobre 2016, l'action alimentaire ayant été déposée le 6 octobre 2017. Il a maintenu avoir essayé, en vain, d'établir une relation avec son père par le biais de courriels et de cartes postales.

A______ contestait être en mesure de travailler, puisqu'il consacrait son temps et son énergie à ses études. Dans la mesure où sa mère, qui s'était toujours occupée de lui, assurait déjà son entretien par les soins et l'éducation, il appartenait à B______ de contribuer financièrement à son entretien.

f.b. B______ a maintenu que l'absence de relations personnelles était imputable à son fils, lequel pouvait au demeurant réaliser un revenu mensuel de l'ordre de 1'000 fr. par mois lui permettant de couvrir le solde de ses charges mensuelles incompressibles.

g. A teneur du jugement entrepris, la situation financière des parties est la suivante :

g.a. Les charges de A______, telles que retenues par le premier juge, se composent du minimum vital OP, en 1'020 fr., d'une participation de 20% au loyer de sa mère, de 2'112 fr., soit 422 fr., de sa prime d'assurance maladie LAMal en 447 fr., des taxes universitaires (83 fr.), des ouvrages et fournitures scolaires
(45 fr.), et des frais de transport (41.65 fr.). Elles s'élèvent à 2'058 fr. 65. Déduction faite des allocations familiales, en 400 fr., et de la rente de 2ème pilier (343 fr. 65) perçues par A______, le Tribunal a arrêté ses besoins mensuels à 1'315 fr.

g.b. Les revenus mensuels de B______, retraité, tels que retenus par le premier juge, s'élèvent, sous déduction des impôts perçus en Angleterre et en Suisse, à 2'260 fr. (27'124 fr./12) en 2016, à 3'753 fr. 50 (45'042 fr./12) en 2017 et à 3'825 fr. (45'900 fr./12) en 2018. Le solde disponible a été arrêté à 882 fr. en 2016, à 2'375 fr. en 2017 et à 2'447 fr. en 2018, sans tenir compte de la fortune de l'intéressé.

g.c. Le Tribunal a considéré que C______ avait perçu, en 2017, une rente AVS de 8'676 fr., une rente de 2ème pilier de 41'236 fr. et un revenu mobilier de
25'572 fr., soit un total de 75'484 fr, correspondant à 6'920 fr. par mois. Au
31 décembre 2017, sa fortune brute mobilière était de 1'442'876 fr.

Sous déduction des charges alléguées, comprenant 2/3 du loyer (1'408 fr.), la prime d'assurance maladie (650 fr.) et le minimum vital OP (1'350 fr.), soit un total de 3'408 fr., son solde mensuel disponible s'élevait à 2'882 fr.

h. Dans le jugement entrepris, le Tribunal a écarté la prime de l'assurance-maladie complémentaire (69 fr.), de même que les frais de téléphone (59 fr.), de repas
(200 fr.), d'habillement (300 fr.) et de loisirs (300 fr.) allégués.

Un revenu hypothétique de 670 fr. par mois, correspondant à une activité lucrative exercée pendant la formation universitaire à raison de 20%, a en outre été imputé à A______. Le Tribunal s'est fondé sur la grille horaire de l'Université de Genève pour un étudiant en Bachelor en ______ et ______, à teneur de laquelle le nombre hebdomadaire d'heures de cours se situait entre 24 et 30. Cela laissait suffisamment de temps à l'étudiant pour travailler en fin de journée, le samedi ou pendant les vacances scolaires, à raison de 8 heures par semaine en moyenne.

Après déduction des allocations familiales et de la rente de 2ème pilier perçue par A______, le Tribunal a arrêté ses besoins mensuels à un montant arrondi de 700 fr.

Dans la mesure où les deux parents étaient en mesure de pourvoir à l'entretien du majeur, ses besoins mensuels devaient être répartis équitablement entre eux, à raison de 350 fr. chacun.

EN DROIT

1. 1.1. L'appel est recevable contre les décisions finales de première instance
(art. 308 al. 1 let. a CPC) dans les causes patrimoniales dont la valeur, au dernier état des conclusions de première instance, est de 10'000 fr. au moins (art. 308
al. 2 CPC).

La cause, qui concerne les contributions d'entretien en faveur d'un enfant majeur, est de nature patrimoniale. La valeur capitalisée de celles-ci au sens de
l'art. 92 CPC est en l'espèce supérieure à 10'000 fr., compte tenu des montants litigieux devant le premier juge. La voie de l'appel est dès lors ouverte.

1.2. La procédure simplifiée s'applique aux procédures indépendantes, à savoir celles qui ne portent que sur les prétentions de l'enfant relevant du droit de la famille, y compris la prétention en aliments de l'enfant majeur (art. 295 CPC; Jeandin, in CPC, Code de procédure civile commenté, Bohnet/ Haldy/Jeandin/ Schweizer/Tappy [éd.], 2011, n. 2 ad art. 295 CPC et la référence citée).

Le juge établit les faits d'office, il n'est pas lié par les conclusions des parties (maximes inquisitoire et d'office, art. 296 CPC). Il apprécie librement les preuves (art. 280 al. 1 et 2 CC). La maxime inquisitoire ne dispense cependant pas les parties de collaborer activement à la procédure et d'étayer leurs propres thèses; il leur incombe ainsi de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuve disponibles (ATF 128 III 411 consid. 3.2.1).

2. 2.1.1. Les père et mère doivent pourvoir à l'entretien de l'enfant et assumer, par conséquent, les frais de son éducation, de sa formation et des mesures prises pour le protéger (art. 276 al. 1 CC); l'entretien est assuré par les soins et l'éducation ou, lorsque l'enfant n'est pas sous la garde de ses père et mère, par des prestations pécuniaires (art. 276 al. 2). Les père et mère sont déliés de leur obligation d'entretien dans la mesure où l'on peut attendre de l'enfant qu'il subvienne à son entretien par le produit de son travail ou par ses autres ressources (art. 276
al. 3 CC).

L'art. 285 al. 1 CC dispose, quant à lui, que la contribution d'entretien doit correspondre aux besoins de l'enfant ainsi qu'à la situation et aux ressources des père et mère; il est tenu compte de la fortune et des revenus de l'enfant ainsi que de la participation de celui des parents qui n'a pas la garde de l'enfant à la prise en charge de ce dernier.

2.1.2. Aux termes de l'art. 277 CC, l'obligation d'entretien des père et mère dure jusqu'à la majorité de l'enfant (al. 1); si à sa majorité, l'enfant n'a pas encore de formation appropriée, les père et mère doivent, dans la mesure où les circonstances permettent de l'exiger d'eux, subvenir à son entretien jusqu'à ce qu'il ait acquis une telle formation, pour autant qu'elle soit achevée dans les délais normaux (al. 2).

Le caractère exceptionnel de l'entretien d'un majeur a été atténué respectivement relativisé à la suite de l'abaissement de l'âge de la majorité de 20 à 18 ans.

2.1.3. L'obligation d'entretien dépend de l'ensemble des circonstances et notamment des relations personnelles entre les parties (arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2016 du 7 février 2017 consid. 4.1). Si l'inexistence de celles-ci est attribuée au seul comportement du demandeur d'aliments, il est justifié de refuser toute contribution d'entretien.

2.1.4. L'obligation de subvenir à l'entretien de l'enfant qui n'a pas achevé sa formation à sa majorité doit constituer une solution d'équité entre ce qu'on peut raisonnablement exiger des parents, en fonction de l'ensemble des circonstances, et ce qu'on peut raisonnablement attendre de l'enfant, en ce sens qu'il pourvoie à ses besoins par le produit de son propre travail ou par d'autres moyens (ATF 111 II 410 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 5C.205/2004 du 8 novembre 2004, consid. 6.1, in : FamPra.ch. 2005 p. 414; Meier/Stettler, Droit de la filiation vol II, Effets de la filiation, 5ème éd., 2014, n. 1090). Si la demande n'est dirigée qu'à l'encontre de l'un des parents, il faut veiller à ce que les facultés du débiteur soient mises à contribution de façon équilibrée par rapport à celles de l'autre parent (ATF 107 II 406 consid. 2c; arrêt du Tribunal fédéral 5A_685/2008 du
18 décembre 2008, consid. 3.2; Hegnauer, Commentaire bernois, 3ème éd.,
n. 108 ad art. 277 CC; Hegnauer/Meier, Droit suisse de filiation et de la famille, 4ème éd., n. 21.15, p. 139). Suivant les circonstances, il est possible d'exiger du parent gardien qu'il contribue à l'entretien de l'enfant, en sus des soins et de l'éducation, par des prestations en argent (ATF 120 II 285 consid. 3a/cc).

2.1.5. L'enfant majeur n'a plus besoin d'entretien en nature et le devoir de subvenir à ses besoins se concentre sur une contribution financière à sa subsistance à la charge de ses deux parents selon leur capacité économique. Il n'y a pas de responsabilité solidaire des parents (arrêt du Tribunal fédéral 5A_179/2015 du 29 mai 2015 consid. 6.1).

Le soutien financier des père et mère ne peut se justifier que dans le cas où l'enfant ne dispose pas lui-même des ressources nécessaires pour assumer ses besoins courants et les frais engendrés par sa formation (Meier/Stettler, Droit de la filiation, 2014, n° 1210, p. 794).

Dans la mesure du raisonnable, c'est-à-dire qui soit compatible avec sa formation, l'enfant majeur doit épuiser toutes les possibilités pour assumer son propre entretien et un revenu hypothétique peut lui être imputé (arrêts du Tribunal fédéral 5A_129/2019 du 10 mai 2019 consid. 9.3 et 5C.150/2005 du 11 octobre 2005 consid. 4.4). Ces deux jurisprudences ont été rendues dans le cadre d'enfants majeurs ayant agi contre l'un de leurs parents en paiement de contributions d'entretien après leur majorité, parce que celles-ci avaient pris fin à l'avènement de leur majorité.

Selon Meier/Stettler, s'il est certainement salutaire pour l'enfant d'être déjà intégré au monde du travail pendant sa formation, l'autonomie financière exigible de l'enfant majeur trouve sa limite dans le temps qu'il doit consacrer en priorité à sa formation, soit dans la mesure du conciliable avec les études entreprises
(op. cit., no 1606, p. 1046).

Il appartient au débirentier de préciser dans quel domaine précis l'enfant majeur pourrait travailler et quelles seraient les qualifications professionnelles nécessaires que celui-ci disposerait à cet effet (ACJC/1329/2016 du 7 octobre 2016
consid. 2.5).

2.1.6. La loi ne prescrit pas de méthode de calcul particulière pour arrêter la contribution d'entretien en faveur de l'enfant (ATF 128 III 411 consid. 3.2.2). Sa fixation relève de l'appréciation du juge, qui jouit d'un large pouvoir d'appréciation et applique les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC; ATF 127
III 136 consid. 3a).

Pour apprécier la capacité contributive des parents et les besoins concrets de l'enfant, la jurisprudence admet, comme l'une des méthodes possibles, celle dite du minimum vital. Les besoins de l'enfant et la capacité contributive du débirentier sont déterminés en ajoutant à leurs montants de base admis par le droit des poursuites leurs charges incompressibles respectives (loyer, assurance maladie, frais de transport) (ATF 137 III 59 consid. 4.2.2, in SJ 2011 I 221; arrêt du Tribunal fédéral 5A_533/2010 du 24 novembre 2010 consid. 2.1; Bastons Bulletti, L'entretien après le divorce : Méthodes de calcul, montant, durée et 0limites, in SJ 2007 II 77, p. 86 et 102). Seules les charges effectives, dont le débirentier ou le crédirentier s'acquitte réellement doivent être prises en compte (ATF 140 III 337 consid. 4.2.3, arrêt du Tribunal fédéral 5A_65/2013 du
4 septembre 2013 consid. 3.2.1). Le minimum vital du débirentier doit en principe être préservé (ATF 137 III 59 consid. 4.2).

Le montant de base correspond aux dépenses indispensables pour l'alimentation, les vêtements et le linge y compris leur entretien, les soins corporels et de santé, l'entretien du logement, les assurances privées, les frais culturels, ainsi que les dépenses pour l'éclairage, le courant électrique ou le gaz pour cuisiner (art. I Normes d'insaisissabilité pour l'année 2019 - E 3 60.04 - NI-2019). Dans le cadre de la méthode du minimum vital, les charges d'un enfant, tout comme celles de ses parents, comprennent un montant de base selon les normes d'insaisissabilité, une participation aux frais du logement (la participation de l'enfant au loyer du parent gardien peut être fixée à 15% du loyer lorsqu'ils sont deux enfants), sa prime d'assurance-maladie de base et les frais de transports publics (arrêt du Tribunal fédéral 5A_533/2010 du 24 novembre 2010 consid. 2.1; Bastons Bulletti,
op. cit., p. 102). Lorsque la situation financière des parties le permet, il est justifié d'ajouter au minimum vital du droit des poursuites certains suppléments, tels que les impôts et certaines primes d'assurances non obligatoires (RC privée, ménage, complémentaires d'assurance-maladie), pour autant que leur versement régulier soit établi par pièces et ne dépasse pas une mesure raisonnable eu égard aux revenus du débiteur (Bastons Bulletti, op. cit., p. 90, 91 et 102).

2.1.7. Dans la mesure où les prestations pour l'entretien de l'enfant intègrent une participation aux frais de logement, le coût de celui-ci doit être réparti entre le parent gardien et l'enfant, de sorte que le loyer imputé à l'époux attributaire doit être diminué dans cette mesure (arrêts du Tribunal fédéral 5A_464/2012 du
30 novembre 2012 consid. 4.6.3; 5P.370/2004 du 5 janvier 2005 consid. 4; 5C.277/2001 du 19 décembre 2002 consid. 3.2). Pour ce faire, il est possible de prendre en considération 20% du loyer raisonnable pour un enfant et 30% pour deux enfants (Bastons Bulletti, op. cit., p. 85 et 102 n. 140).

2.2. En l'espèce, avec le premier juge, il convient de constater que la rupture des relations personnelles entre l'appelant et son père n'est pas imputable au seul comportement du premier. Ce point n'est d'ailleurs plus litigieux en appel. Il n'est pas non plus contesté que l'appelant poursuit des études sérieuses et régulières et qu'il achèvera, à teneur du dossier, sa formation dans des délais normaux.

Quand bien même il est retraité, l'intimé, de par sa fortune, dispose largement des moyens de contribuer à l'entretien de son fils, ainsi que l'avait constaté le Tribunal de première instance dans son jugement du 16 août 2016. L'intimé a du reste admis, à l'audience du 30 janvier 2019, que sa situation financière n'avait pas changé depuis 2016. Du reste, bien qu'invité à fournir toute pièce utile à cet égard l'intéressé n'a fourni aucun renseignement sur l'ampleur de son patrimoine, le résumé de sa taxation 2016-2017 n'étant pas pertinent dès lors qu'il n'est pas imposé sur sa fortune en Angleterre, selon ses propres déclarations.

2.3. Compte tenu des conclusions prises par les parties au sujet du montant de la contribution mensuelle d'entretien en cause, celle-ci se situe entre 350 fr. selon l'intimé, qui n'a pas contesté le jugement dont est appel, et 2'500 fr., selon l'appelant.

2.3.1. L'appelant estime en premier lieu que sa participation au loyer de sa mère, en 2'112 fr., devrait se monter à 704 fr. par mois et non pas à 422 fr., comme retenu par le Tribunal.

A cet égard, le calcul du premier juge, qui a pris en considération une participation du majeur au loyer de sa mère de 20%, ne prête pas le flanc à la critique et correspond à la pratique en la matière.

Vu la situation financière confortable des parents, il se justifie d'inclure dans le minimum vital de l'appelant la prime de l'assurance-maladie complémentaire, de 69 fr. par mois, mais pas les frais de téléphone, déjà compris dans le minimum vital OP, ni les autres frais (habillements, loisirs, repas) pour lesquels l'appelant n'a fourni aucune pièce. Aussi, les charges admissibles de l'appelant se montent à 2'127 fr. 65 (2058 fr. 65 + 69 fr).

Après déduction des allocations familiales (400 fr.) et de la rente de 2ème pilier, en 343 fr. 65, les besoins mensuels de l'intéressé s'élèvent à 1'384 fr.

L'appelant conteste le raisonnement du premier juge selon lequel il pourrait réaliser un revenu hypothétique de 670 fr. par mois.

Quand bien même le nombre hebdomadaire d'heures de cours universitaires suivis par l'appelant se situe entre 24 et 30, fait non contesté, c'est à raison que celui-ci relève qu'il doit consacrer un investissement en temps important pour préparer les cours, pour les réviser et pour se présenter aux examens. Il serait en effet illusoire de considérer que la formation universitaire se limite à la seule présence aux heures de cours. Or, en admettant que l'appelant doive consacrer entre 10 et
20 heures par semaine au travail personnel, il ne pourrait pas consacrer ce temps à l'exercice d'une activité lucrative.

L'intimé, qui s'est limité à affirmer que son fils pouvait réaliser un revenu correspondant à 20% de ses besoins, n'a apporté aucun élément concret concernant le temps à disposition de celui-ci pour travailler à côté des études. Il n'a pas non plus davantage précisé dans quel domaine l'appelant pourrait travailler, de sorte qu'il n'a pas démontré que son fils pourrait exercer une activité lucrative en parallèle de ses études.

Le grief soulevé par l'appelant concernant l'imputation d'un revenu hypothétique sera ainsi admis, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner si c'est en violation de son droit d'être entendu que le premier juge a fait référence à la grille horaire de l'université de Genève publiée sur Internet.

Compte tenu de la situation financière confortable de la mère, c'est à juste titre que le Tribunal a estimé que celle-ci pouvait également contribuer financièrement à l'entretien de son fils, quand bien même celui-ci loge chez elle.

Eu égard à ce qui précède, les besoins personnels de l'appelant se montent à
1'384 fr. 65 par mois, dont la moitié est à la charge de l'intimé, soit un montant arrondi de 700 fr.

Le chiffre 1 du dispositif du jugement entrepris sera dès lors modifié dans ce sens.

4. 4.1. Lorsque la Cour de céans statue à nouveau, elle se prononce sur les frais fixés par l'autorité inférieure (art. 318 al. 3 CPC).

En l'espèce, le montant des frais judiciaires de première instance fixé à 1'000 fr., ainsi que leur répartition par moitié entre les parties, de même que le refus d'octroyer des dépens, n'ont pas été critiqués par les parties. Ils seront donc confirmés.

4.2. Les frais judiciaires de l'appel seront arrêtés à 1'250 fr. (art. 95 al. 2 et 105
al. 1 CPC; art. 32 et 35 RTFMC).

Vu la nature familiale et l'issue du litige, ces frais seront mis à charge de chacune des parties, à parts égales (art. 106 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC), et seront compensés avec l'avance de frais de même montant fournie par l'appelant, qui reste acquise à l'Etat (art. 111 al. 1 CPC).


 

L'intimé sera condamné à payer 625 fr. à l'Etat de Genève et la somme de 625 fr. sera restituée à l'appelant.

Compte tenu de l'issue de la procédure et de la nature familiale du litige, chaque partie conservera à sa charge ses propres dépens d'appel (art. 95 al. 1 let. b et al. 3, 104 al. 1, 105 al. 2 et 107 al. 1 let. c CPC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté par A______ contre le chiffre 1 du dispositif du jugement JTPI/7224/2019 rendu le 16 mai 2019 par le Tribunal de première instance dans la cause C/23164/2017.

Au fond :

Annule le chiffre 1 du dispositif de ce jugement et, cela fait, statuant à nouveau :

Condamne B______ à payer à A______ la somme de 700 fr. à titre de contribution à son entretien, par mois et d'avance, allocations familiales ou d'études non comprises, dès le 1er octobre 2016 et jusqu'à la fin de ses études sérieuses et régulières.

Confirme le jugement entrepris pour le surplus.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 1'250 fr., les met à la charge de A______ et de B______ à raison de la moitié chacun.

Compense la part de A______ de 625 fr. avec l'avance fournie, qui demeure acquise à l'Etat de Genève.

Condamne B______ à payer 625 fr. à l'Etat de Genève.

Invite les Services financiers du Pouvoir judiciaire à rembourser 625 fr. à A______.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE, présidente; Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, juges; Madame Jessica ATHMOUNI, greffière.

La présidente :

Jocelyne DEVILLE-CHAVANNE

 

La greffière :

Jessica ATHMOUNI

 


 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.