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Décisions | Chambre civile

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C/14117/2013

ACJC/154/2017 du 10.02.2017 sur JTPI/8719/2016 ( OO ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : CONDITION DE RECEVABILITÉ ; DOMMAGE IRRÉPARABLE ; NOUVEL EXAMEN(EN GÉNÉRAL) ; APPEL EN CAUSE
Normes : CPC.59; CPC.60; CPC.82; CPC.319;
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/14117/2013 ACJC/154/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 10 FEVRIER 2017

 

Entre

A______, ayant son siège ______, recourante contre un jugement rendu par la 16ème chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 29 juin 2016, comparant par Me Michel Bergmann, avocat, 8-10, rue de Hesse, case postale 5715, 1211 Genève 11, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

et

1) B______, ayant son siège ______, intimée, comparant par Me Jean-Marc Siegrist, avocat, 23, quai des Bergues, 1201 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile.

2) Monsieur C______, p. a. D______, ayant son siège ______, autre intimé, comparant par Me Yves Magnin, avocat, 2, rue de la Rôtisserie, case postale 3809, 1211 Genève 3, en l'étude duquel il fait élection de domicile.

 

 


EN FAIT

A. a. Par jugement JTPI/8719/2016 du 29 juin 2016, notifié aux parties le 5 juillet 2016, le Tribunal de première instance a déclaré irrecevable la requête formée par A______ tendant à ce qu'il soit à nouveau statué sur la recevabilité de l'appel en cause formé par C______ à son encontre (ch. 1 du dispositif). Le sort des frais judiciaires a été réservé (ch. 2 du dispositif) et les parties déboutées de toutes autres conclusions (ch. 3 du dispositif).

Le Tribunal a considéré qu'il ne pouvait à nouveau se prononcer sur la recevabilité de l'appel en cause susmentionné au motif qu'il avait déjà statué sur cette question par jugement du 13 octobre 2014, lequel, faute d'avoir fait l'objet d'un recours, était entré en force. Il a en outre précisé que le fait que, postérieurement à ce jugement, le Tribunal fédéral avait jugé que les conclusions d'un appel en cause devaient, sous peine d'irrecevabilité, être chiffrées ne justifiait pas qu'il soit procédé à une nouvelle évaluation juridique d'un état de fait demeuré inchangé, la jurisprudence n'ayant pas vocation à s'appliquer de manière rétroactive.

Le jugement mentionnait qu'il pouvait faire l'objet d'un recours dans les 30 jours suivant sa notification.

b. Par acte déposé le 5 septembre 2016 au greffe de la Cour de justice, A______ a recouru contre ce jugement, concluant à son annulation, à ce que l'appel en cause formé par C______ à son encontre soit déclaré irrecevable et à ce que ce dernier ainsi que la société B______ soient condamnés aux frais judiciaires et dépens de la procédure et déboutés de toutes leurs conclusions.

c. Tant la société B______ que C______ ont conclu au rejet du recours, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation de A______ aux frais judiciaires et dépens de la procédure.

d. A______ a répliqué et C______ a dupliqué, persistant tous les deux dans leurs conclusions respectives.

La société B______ n'a pas exercé son droit de dupliquer.

B. Les faits, tant notoires que retenus par le Tribunal de première instance, sont les suivants :

a. Le 30 octobre 2013, la société B______ a déposé auprès du Tribunal de première instance une demande en paiement à l'encontre de D______ tendant à ce que cette entreprise soit condamnée à lui verser la somme de 250'000 fr. à titre de réduction du prix d'un ouvrage dont elle lui avait confié la réalisation.

D______ est une entreprise individuelle active dans la création et l'entretien de parcs et jardins d'agrément et la culture de pépinière, dont le siège se situe à ______. C______ en est le titulaire avec signature individuelle.

b. Par mémoire de réponse du 14 février 2014, D______ a conclu au rejet de la demande en paiement. Elle a en outre déposé un appel en cause à l'encontre de A______, concluant à ce que cette dernière société soit condamnée à la relever de toute condamnation en paiement qui pourrait être prononcée contre elle dans le cadre de la présente procédure.

A______ s'est opposée audit appel en cause.

c. Par jugement du 13 octobre 2014, le Tribunal de première instance a déclaré recevable l'appel en cause formé par D______, estimant que les conditions à son admissibilité étaient réunies.

Il a notamment considéré que D______ avait rendu vraisemblable qu'elle pouvait faire valoir des conclusions récursoires à l'encontre de l'appelée en cause.

Ce jugement n'a pas fait l'objet d'un recours.

d. Consécutivement à ce jugement, D______ a déposé, le 27 février 2015, des "déterminations" relativement au bien-fondé de son appel en cause. S'en sont suivis plusieurs échanges d'écritures entre les parties.

e. Par courrier du 11 mai 2016, A______ a demandé au Tribunal de déclarer l'appel en cause formé par D______ à son encontre irrecevable au motif que le Tribunal fédéral avait jugé, dans l'arrêt 4A_375/2015 du 26 janvier 2016 rendu postérieurement au jugement du 13 octobre 2014, qu'un appel en cause devait être chiffré sous peine d'irrecevabilité.

f. D______ et B______ ont conclu au déboutement de A______ de sa requête.

C. L'argumentation des parties devant la Cour sera reprise ci-après dans la mesure utile à la solution du litige.

EN DROIT

1. Le recours est notamment dirigé contre l'entreprise individuelle D______, également mentionnée en qualité de partie dans le jugement entrepris. Une entreprise inscrite au Registre du commerce en raison individuelle ne dispose toutefois pas de la personnalité juridique (Meier/Hayoz/Forstmoser, Schweizerisches Gesellschaftsrecht, 1998, pp. 593-597; ACJC/1207/2014 du 10 octobre 2014 consid. 3.2), soit de la jouissance et de l'exercice des droits civils, et ne peut en conséquence être partie dans une procédure (ACJC/159/2014 du 7 février 2014 consid. 1.3; ACJC/1329/2013 du 8 novembre 2013 consid. 4; ACJC/1117/2013 du 13 septembre 2013 consid. 2). Cela étant, il est aisément identifiable que la partie réellement visée est C______, dès lors que son nom est expressément mentionné dans la raison individuelle de l'entreprise, qu'il en est le titulaire et qu'il a représenté ladite entreprise lors des audiences qui se sont déroulées devant le Tribunal. La Cour rectifiera ainsi d'office la désignation de cette partie dans le présent arrêt (cf. ATF 131 I 57 consid. 2.2; Bohnet, in CPC, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/Schweizer/Tappy [éd.], 2011, n. 74 ad art. 59 CPC et n. 24 ad art. 132 CPC).

2. 2.1 La Cour examine d'office si les conditions de recevabilité d'un recours sont réunies (art. 59 et 60 CPC; Reetz, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2010, n. 50 ad Vorbemerkungen zu den Art. 308-318 ZPO; Tappy, Les voies de droit du nouveau Code de procédure civile, in JdT 2010 III p. 115 ss, p. 141; Chaix, Introduction au recours de la nouvelle procédure civile fédérale, in SJ 2009 II p. 257 ss, p. 259).

Aux termes de l'art. 319 let. b CPC, les autres décisions et ordonnances d'instruction de première instance peuvent faire l'objet d'un recours dans les cas prévus par la loi (ch. 1) ou lorsqu'elles peuvent causer un préjudice difficilement réparable (ch. 2).

Par définition, les décisions visées à l'art. 319 let. b CPC ne sont ni finales, ni partielles, ni incidentes, ni provisionnelles. Il s'agit de décisions d'ordre procédural par lesquelles le tribunal détermine le déroulement formel et l'organisation matérielle de l'instance (Jeandin, in CPC, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/Schweizer/Tappy [éd.], 2011, n. 11 ad art. 319 CPC; Freiburghaus/Afheldt, Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 2013, n. 11 ad art. 319 CPC).

Selon l'art. 82 al. 4 CPC, la décision d'admission de l'appel en cause peut faire l'objet d'un recours. Il a en outre été jugé que, malgré la formulation de cette disposition, la décision de refus d'appel en cause devait également être attaquée par la voie du recours (arrêt du Tribunal fédéral 5A_191/2013 du 1er novembre 2013 consid. 3.1; ACJC/188/2016 du 12 février 2016 consid. 1.2).

2.2 En l'espèce, le jugement entrepris statue sur la recevabilité d'une requête déposée par la recourante tendant à ce que l'appel en cause formé par C______, déclaré recevable par jugement du 13 octobre 2014, soit déclaré irrecevable. S'agissant d'une décision d'ordre procédural, il entre dans la catégorie des "autres décisions et ordonnances d'instruction", lesquelles sont uniquement attaquables par la voie du recours.

Dans la mesure où ce jugement ne se prononce pas sur l'admissibilité de l'appel en cause formé par C______, question qui a déjà été tranchée dans une précédente décision, mais sur la recevabilité d'une requête déposée par la recourante tendant à ce qu'il soit à nouveau statué sur cette question, aucun recours n'est prévu dans la loi contre un tel jugement.

Le jugement entrepris ne peut ainsi faire l'objet d'un recours immédiat que pour autant qu'il soit susceptible de causer un préjudice difficilement réparable à la recourante.

3. 3.1 La notion de "préjudice difficilement réparable" au sens de l'art. 319 let. b ch. 2 CPC est plus large que celle de "préjudice irréparable" au sens de l'art. 93 al. 1 let. a LTF (cf. ATF 137 III 380 consid. 2, in SJ 2012 I 73; 138 III 378 consid. 6.3).

Ainsi, elle ne vise pas seulement un inconvénient de nature juridique, mais toute incidence dommageable, y compris financière ou temporelle, pourvu qu'elle soit difficilement réparable. Il y a toutefois lieu de se montrer exigeant, voire restrictif, avant d'admettre la réalisation de cette condition, sous peine d'ouvrir le recours à toute décision ou ordonnance d'instruction, ce que le législateur a clairement exclu (Jeandin, op. cit., n. 22 ad art. 319 CPC; Hohl, Procédure civile, Tome II, 2ème éd., 2010, n. 2485, p. 449; Blickenstorfer, Kommentar Schweizerische Zivilprozessordnung, 2011, n. 39 ad art. 319 CPC).

Une simple prolongation de la procédure ou un accroissement des frais ne constitue pas un préjudice difficilement réparable (Spühler, in Basler Kommentar ZPO, 2ème éd., 2013, n. 7 ad art. 319 CPC; Hoffmann-Nowotny, ZPO-Rechtsmittel, Berufung und Beschwerde, 2013, n. 25 ad art. 319 CPC). En outre, à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, les décisions concernant l'appel en cause n'occasionnent pas de préjudice irréparable (ATF 132 I 13 consid. 1.1).

Il appartient au recourant d'alléguer et d'établir la possibilité que la décision concernée lui cause un préjudice difficilement réparable, à moins que cela ne fasse d'emblée aucun doute (par analogie ATF 134 III 426 consid. 1.2 et 133 III 629 consid. 2.3.1).

Si la condition du préjudice difficilement réparable n'est pas remplie, la partie doit attaquer ladite décision avec le jugement au fond (Message du Conseil fédéral relatif au CPC, FF 2006 p. 6984; ACJC/1510/2016 du 17 novembre 2016 consid. 2.1; Brunner, in Kurzkommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung ZPO, 2ème éd., 2014, n. 13 ad art. 319 CPC; Oberhammer, in Kurzkommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung ZPO, 2014, n. 13 ad art. 319 CPC).

3.2 En l'espèce, la recourante n'indique pas les motifs pour lesquels le jugement entrepris serait susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable.

L'existence d'un tel préjudice n'est par ailleurs, au regard des éléments figurant au dossier, pas d'emblée manifeste. En effet, à supposer que le jugement au fond soit défavorable à la recourante, celle-ci conservera la possibilité de critiquer le refus du premier juge de statuer à nouveau sur la recevabilité de l'appel en cause formé à son encontre par le biais de la voie de droit ouverte contre ce jugement. Il n'apparaît ainsi pas que ce refus engendrera chez cette dernière d'autres inconvénients qu'une prolongation de la procédure et un accroissement des frais exposés, ce qui, à teneur des principes susmentionnés, ne constitue pas un préjudice difficilement réparable. L'ampleur de ces inconvénients sera de surcroît limitée puisque l'instruction de la procédure, qui a débuté il y a plus de deux ans, est déjà bien avancée.

Ainsi, faute pour la recourante d'avoir démontré que le jugement querellé est susceptible de lui causer un préjudice difficilement réparable, son recours sera déclaré irrecevable.

4. A supposer que le recours devrait être déclaré recevable, il serait infondé pour les raisons qui suivent.

4.1 La nature de la décision sur l'admissibilité de l'appel en cause n'est pas tranchée de façon unanime dans la doctrine.

Selon la majorité des auteurs de doctrine, la décision sur l'admissibilité de l'appel en cause constitue une ordonnance d'instruction (prozessleitende Verfügung; Schwander, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd., 2016, n. 24 ad art. 82 CPC; Göksu, in Schweizerische Zivilprozessordnung (ZPO) Kommentar, 2ème éd., 2016, n. 13 ad art. 82 CPC; Gasser/Rickli, ZPO Kurzkommentar, 2ème éd., 2014, n. 8 ad art. 82 CPC; Domej, KuKo-ZPO, 2ème éd., 2014, n. 9 ad art. 82 CPC; Frei, Basler Kommentar ZPO, 2ème éd., 2013, n. 17 ad art. 82 CPC). Seul un auteur qualifie cette décision d'autre décision au sens de l'art. 319 let. b ch. 1 CPC (Jeandin, op. cit., n. 15 ad art. 319 CPC).

Les ordonnances d'instruction ne déploient ni autorité ni force de chose jugée et peuvent en conséquence être modifiées, complétées ou annulées en tout temps jusqu'au prononcé du jugement définitif (Jeandin, op. cit., n. 14 ad art. 319 CPC; Frei, Berner Kommentar ZPO, 2012, n. 16 ad art. 124 CPC). Une modification n'est toutefois pas possible lorsqu'elle affecte la sécurité du droit ou porte atteinte au statut juridique des parties ou de tiers, remettant en question des droits reconnus, à moins que la loi prévoie expressément une telle possibilité. Ne sont également pas modifiables les ordonnances d'instruction qui sont, selon la loi, attaquables indépendamment du fond. Une modification de celles-ci doit intervenir dans le cadre de la procédure de recours, sous réserve qu'un changement de circonstances ne justifie une nouvelle appréciation ou un réexamen par l'autorité qui a précédemment statué (Frei, Berner Kommentar ZPO, 2012, n. 16 ad art. 124 CPC et les réf. citées; dans le même sens : Kaufmann, in Schweizerische Zivilprozessordnung (ZPO) Kommentar, 2ème éd., 2016, n. 24 ad art. 124 CPC; Staehelin, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung, 3ème éd., 2016, n. 6 ad art. 124 CPC).

Ne sont en particulier pas modifiables les décisions admettant une intervention accessoire (Frei, Berner Kommentar ZPO, 2012, n. 17 ad art. 124 CPC; Kaufmann, op. cit., n. 24 ad art. 124 CPC; Staehelin, op. cit., n. 6 ad art. 124 CPC).

Les "autres décisions" marquent quant à elles définitivement le cours des débats et déploient - dans cette seule mesure - autorité et force de chose jugée à l'encontre des parties ou des tiers concernés (Jeandin, op. cit., n. 15 ad art. 319 CPC).

4.2 La recevabilité d'un appel en cause est soumise aux conditions particulières des art. 81 et 82 CPC. En outre, les conditions générales de recevabilité de l'art. 59 CPC, qui valent pour toutes les demandes, doivent être respectées dont notamment celle du chiffrement des conclusions lorsque l'action tend au paiement d'une somme d'argent (art. 84 al. 2 CPC; ATF 142 III 102 consid. 3; 139 III 67 consid. 2.4).

Le Tribunal doit examiner la recevabilité de l'appel en cause dans une procédure incidente et rendre une décision susceptible de recours sur cette question. Ce n'est qu'ensuite, après la décision admettant la recevabilité, que la demande d'appel en cause proprement dite est introduite et qu'a lieu l'échange d'écritures à son égard (ATF 139 III 67 consid. 2.3 = JdT 2014 II 320; arrêt du Tribunal fédéral 4A_341/2014 du 5 novembre 2014 consid. 2.1).

Les conclusions de la demande d'appel en cause doivent, tout comme celles de la requête d'admission de l'appel en cause, être chiffrées (ATF 142 III 102 consid. 6).

4.3 Le tribunal saisi examine d'office si les conditions de recevabilité d'une demande sont remplies (art. 60 CPC). Bien que l'examen des conditions de recevabilité doive avoir lieu aussitôt que possible et avant d'entrer en matière sur le fond de la cause, aucune règle légale, mises à part quelques exceptions, ne précise le moment où le tribunal doit y procéder (ATF 140 III 159 consid. 4.2.4). Il n'existe ainsi pas de droit à un examen préalable des conditions de recevabilité de la demande (arrêt du Tribunal fédéral 5A_73/2014 du 18 mars 2014 consid. 2.3).

4.4 En l'espèce, par jugement du 13 octobre 2014, le Tribunal de première instance a statué sur la recevabilité de la requête d'admission de l'appel en cause formée par C______, qu'il a admise.

Dans la mesure où le prononcé d'une décision sur cette question impliquait d'examiner que tant les conditions générales de recevabilité de l'art. 59 CPC que celles particulières des art. 81 et 82 CPC étaient respectées, il convient d'admettre que l'examen de cette autorité a porté sur l'ensemble de ces conditions, bien que certains points de recevabilité, dont notamment celui du chiffrement des conclusions, n'ait pas fait l'objet d'une motivation particulière. Si la recourante estimait que certaines des conditions de recevabilité de la requête d'admission de l'appel en cause n'avaient pas été examinées, il lui appartenait de s'en plaindre immédiatement en formant un recours contre le jugement du 13 octobre 2014.

La question de savoir si le Tribunal était autorisé à revenir sur ledit jugement ou si celui-ci est entré en force dépend de la nature de ce jugement. Ainsi, contrairement à ce que soutient la recourante, le fait que le point sur lequel elle aimerait qu'il soit à nouveau statué relève des conditions de recevabilité, lesquelles doivent être examinées d'office et en tout temps, ne permet pas de conclure que le Tribunal était autorisé à modifier la décision qu'il a précédemment rendue sur l'admissibilité de l'appel en cause.

Or, quelle que soit la qualification donnée au jugement du 13 octobre 2014 (ordonnance d'instruction ou "autre décision" au sens de l'art. 319 let. b CPC; cf. consid. 4.1), une modification de celui-ci par le Tribunal n'était pas possible.

D'une part, à teneur des principes susmentionnés, une "autre décision" au sens de l'art. 319 let. b CPC a autorité et force de chose jugée sur les points qu'elle tranche, de sorte qu'elle ne peut être modifiée.

D'autre part, la modification d'une ordonnance d'instruction n'est pas possible lorsqu'elle a pour conséquence de remettre en cause des droits reconnus. Or, en admettant l'appel en cause formé par C______, le Tribunal lui a reconnu le droit de faire valoir des prétentions à l'égard d'un tiers dans le cadre d'une procédure où celui-ci n'était pas partie. Il ne pouvait ainsi revenir sur le jugement du 13 octobre 2014 sans prétériter la position juridique de C______, ce qui exclut toute possibilité de modification sous réserve de l'existence d'une base légale le permettant, condition non réalisée en l'espèce.

La modification d'une ordonnance d'instruction n'est de surcroît également pas possible lorsque celle-ci peut être attaquée séparément de la décision au fond, ce qui était le cas du jugement du 13 octobre 2014. En effet, s'agissant d'une décision d'admission de l'appel en cause, il pouvait, à teneur de l'art. 82 al. 4 CPC, faire l'objet d'un recours immédiat. Certes, l'existence d'un changement de circonstances peut justifier qu'une modification soit néanmoins opérée par l'autorité qui a statué. Toutefois, le fait que le Tribunal fédéral ait considéré que la pratique consistant à admettre que les conclusions d'un appel en cause ne soient pas chiffrées était inexacte ne saurait constituer un changement de circonstances, dès lors que le caractère erroné de cette pratique aurait pu être soulevé dans le cadre d'un recours contre le jugement du 13 octobre 2014.

Partant, c'est à juste titre que le premier juge a considéré qu'il n'était pas autorisé à statuer à nouveau sur l'admissibilité de l'appel en cause formé par C______.

Autre est la question de la recevabilité de la demande d'appel en cause déposée le 27 février 2015 par C______ après le prononcé du jugement du 13 octobre 2014 statuant sur sa requête d'admission de l'appel en cause. Cette question, qui n'a pas encore été tranchée, devra faire l'objet d'un examen par le Tribunal avant qu'il ne statue sur le fond du litige. La recourante ne disposant toutefois pas d'un droit à ce que cet examen soit fait à titre préalable, le Tribunal n'était pas tenu de statuer sur cet objet dans le cadre du jugement entrepris.

5. Les frais judiciaires du recours seront arrêtés à 1'200 fr. (art. 13 et 41 du Règlement fixant le tarif des frais en matière civile [RTFMC]) et mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront entièrement compensés avec l'avance de frais, laquelle reste acquise à l'Etat de Genève (art. 111 al. 1 CPC).

La recourante sera également condamnée à s'acquitter des dépens de recours de ses parties adverses. Un montant de 3'000 fr., débours et TVA inclus, sera accordé à C______ (art. 84, 85, 87 et 90 RTFMC, art. 25 et 26 al. 1 LaCC) et de 500 fr. à la société B______ (art. 84, 85, 87 et 90 RTFMC, art. 23 al. 1, 25 et 26 al. 1 LaCC), qui n'a produit que de brèves déterminations (courrier d'une page).

* * * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

Préalablement :

Rectifie la qualité de la partie D______, qui devient C______.

A la forme :

Déclare irrecevable le recours interjeté par A______ contre le jugement JTPI/8719/2016 rendu le 29 juin 2016 par le Tribunal de première instance dans la cause C/14117/2013-16.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires du recours à 1'200 fr., les met à la charge de A______ et dit qu'ils sont entièrement compensés avec l'avance de frais, qui reste acquise à l'Etat de Genève.

Condamne A______ à verser à C______ la somme de 3'000 fr. à titre de dépens de recours.

Condamne A______ à verser à B______ la somme de 500 fr. à titre de dépens de recours.

Siégeant :

Madame Florence KRAUSKOPF, présidente; Monsieur Ivo BUETTI, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Camille LESTEVEN, greffière.

 

La présidente :

Florence KRAUSKOPF

 

La greffière :

Camille LESTEVEN

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.