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Décisions | Chambre civile

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C/17836/2014

ACJC/1252/2015 du 16.10.2015 sur JTPI/6712/2015 ( SDF ) , CONFIRME

Descripteurs : PROTECTION DE L'UNION CONJUGALE; DROIT DE GARDE
Normes : CC.176.3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/17836/2014 ACJC/1252/2015

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre civile

du VENDREDI 16 OCTOBRE 2015

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, Genève, appelante d'un jugement rendu par la 21ème Chambre du Tribunal de première instance de ce canton le 10 juin 2015, comparant par Me Karin Baertschi, avocate, 41, rue du 31-Décembre, 1207 Genève, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile aux fins des présentes,

et

Monsieur B______, domicilié ______, Genève, intimé, comparant par Me Monica Bertholet, avocate, 14, rue Marignac, case postale 504, 1211 Genève 12, en l'étude de laquelle il fait élection de domicile aux fins des présentes.

 


EN FAIT

A. a. Les époux A______, née le ______ 1977, et B______, né le ______ 1961, se sont mariés le ______ 2001.

Ils ont deux filles, à savoir C______, née le ______ 2001, et D______, née le ______ 2006.

Ils n'ont pas conclu de contrat de mariage.

b. Le 1er septembre 2014, A______ a déposé au Tribunal de première instance une requête de mesures protectrices de l'union conjugale. Elle a conclu à ce que les époux soient autorisés à vivre séparés, à ce que la garde des deux enfants lui soit attribuée, à ce qu'une contribution équitable soit mise à la charge de son époux pour l'entretien de la famille, et à ce que la liquidation du régime matrimonial soit réservée.

c. Lors de l'audience du Tribunal du 6 novembre 2014, A______ a persisté dans ses conclusions, avec la précision que la vie commune avait pris fin. B______, qui s'était installé dans le studio que les époux louent ______ à Genève, a conclu à l'attribution à lui-même de la garde des enfants et de la jouissance exclusive du domicile conjugal, un appartement de quatre pièces et demi situé ______ à Genève.

Le Tribunal a ordonné l'établissement d'un rapport d'évaluation sociale par le Service de protection des mineurs (SPMi), avec l'audition de C______.

d. Le SPMi a rencontré B______ les 6 et 8 janvier 2015 et A______ les 17 décembre 2014 et 29 janvier 2015 et a auditionné C______ le 4 mars 2015. Il s'est entretenu téléphoniquement le 18 mars 2015 avec le pédiatre des enfants, le 23 mars 2015 avec l'enseignante de D______ à l'école primaire E______ et le 24 mars 2015 avec l'enseignant de C______ au cycle d'orientation de F______.

Dans son rapport du 25 mars 2015, le SPMi résume les propos de chaque parent - au sujet de sa situation personnelle, de sa relation avec l'autre parent et avec les enfants, de la reconnaissance des capacités parentales de l'autre parent, de son propre engagement dans la prise en charge des enfants et de l'évolution de ceux-ci - ainsi que ceux des professionnels.

B______ a indiqué au SPMi qu'il s'occupait de la prise en charge et du suivi scolaire des enfants. Il faisait les trajets tous les jours pour les accompagner et les chercher à l'école, signait les carnets d'élèves, suivait les devoirs à domicile et assistait aux réunions des parents d'élèves. Depuis le début de la crise conjugale, en 2012, il avait adapté ses horaires de travail pour pouvoir continuer à assumer cette charge que la mère lui avait déléguée, préférant mener ses activités personnelles. Il s'était toujours chargé également de l'organisation des activités culturelles et des sorties de week-end avec les enfants. La mère s'était désolidarisée de ses activités, choisissant de rester seule à la maison ou de sortir de son côté.

A______ a admis que son époux s'occupait bien des enfants, assurait bien leur suivi scolaire, participait aux réunions des parents d'élèves, aidait les enfants dans leurs devoirs et s'occupait également d'elles durant les week-ends.

Elle a indiqué au SPMi que, pour sa part, elle s'occupait de toute la prise en charge quotidienne des enfants durant la semaine, des repas, des soins corporels, du suivi chez le pédiatre et qu'elle assurait une présence relationnelle rassurante. Elle a précisé que le père partait souvent en voyage professionnel, parfois une semaine complète, et qu'il ne pourrait ainsi pas s'occuper des enfants à plein temps. Elle a précisé que le père était parti en voyage à H______ le week-end des 21 et 22 mars 2015 et avait confié la garde des enfants à des amis de la famille. Elle a expliqué qu'elle-même ne pouvait pas garder les enfants, puisqu'elle devait sortir et que c'était au père de s'en occuper.

B______ a indiqué au SPMi que son épouse savait remplir son rôle de mère de manière adéquate quand elle était à la maison. Elle donnait aux filles toute sa tendresse. Elle savait comment prendre en charge les enfants, même s'il ne partageait pas toujours les mêmes valeurs qu'elle sur la notion de respect, qu'à son avis elle ne transmettait pas suffisamment.

Le pédiatre des enfants a une bonne collaboration avec chacun des parents. En revanche, dans le suivi scolaire, la collaboration avec les enseignants se fait essentiellement avec le père.

Il résulte du compte-rendu d'audition de C______, que l'enfant s'entend très bien avec ses deux parents et qu'elle aimerait ne plus les entendre se disputer. Elle souhaite une garde alternée, puisqu'elle aime ses deux parents et voudrait les voir l'un autant que l'autre. Un changement de domicile une semaine sur deux ne lui poserait aucun problème. Elle ne souhaite pas être séparée de sa sœur.

Le SPMi parvient à la conclusion qu'il est conforme à l'intérêt des enfants d'attribuer leur garde au père, de réserver un large droit de visite à la mère - s'exerçant d'entente entre les parents, mais au minimum un week-end sur deux, du vendredi après l'école à 18 heures au dimanche à 18 heures, un jour et une nuit par semaine, du mardi soir au mercredi à 18 heures, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires - et d'exhorter les parents à entreprendre une médiation.

Dans son examen de l'intérêt des enfants, le SPMi relève que la mère, du fait de sa situation personnelle, sans emploi régulier, devrait être disponible pour les enfants. Les informations portées à la connaissance du SPMi démontrent des sorties régulières de la mère pour s'adonner à des activités privées, pendant que le père, qui travaille toute la semaine, s'occupe des enfants tous les soirs au domicile et doit également s'en occuper tous les week-ends. La mère reconnaît que le père remplit bien son rôle, notamment le suivi scolaire, la prise en charge quotidienne durant la semaine et durant les week-ends. Le père, en assurant une présence parentale régulière auprès des enfants au domicile conjugal, cherche à répondre à leurs besoins. Il arrive à organiser son emploi du temps pour être disponible. Il entretient de bonnes relations éducatives avec les enfants, ce qui est aussi reconnu par la mère.

Sa profession de journaliste lui permet de gérer son emploi du temps et de s'occuper des enfants. Il peut certes être amené à des déplacements, mais son activité professionnelle n'empêche pas l'exercice d'une garde pour des enfants âgés de 8 ans et demi et de 13 ans. En termes d'engagement et de disponibilités pour les enfants, le père manifeste beaucoup plus de capacités d'organisation. Il a initié la démarche de contacter le SPMi, s'inquiétant de la situation des enfants, et souhaite entreprendre un suivi thérapeutique pour C______, dans le cadre des difficultés parentales et de la séparation.

La mère a aussi des capacités parentales, reconnues par le père, et est apte à s'occuper des enfants quand elle est présente. Il faut permettre aux enfants de continuer à entretenir les mêmes relations avec leur mère de manière large, afin de leur éviter de rentrer dans un conflit de loyauté. Il faut également tenir compte du désir des enfants, notamment de C______, de garder ses relations de manière équilibrée avec chacun des parents.

Selon le SPMi une médiation est souhaitable, afin de permettre aux parents de mieux collaborer dans la prise en charge des enfants, mais la mère la refuse.

e. Lors de l'audience du Tribunal du 7 mai 2015, A______ a déclaré qu'elle ne contestait pas les conclusions du SPMi et qu'elle acceptait ainsi que la garde des enfants soit confiée au père, avec un large droit de visite en sa faveur, notamment du mardi soir au mercredi soir, ainsi que durant un week-end sur deux et la moitié des vacances scolaires.

Les époux ont indiqué qu'une médiation n'était pas utile, dès lors qu'ils parvenaient désormais à communiquer au sujet de leurs filles. Ils avaient discuté et convenu que le domicile conjugal serait attribué à B______ et que l'épouse s'installerait dans le studio, dès le lendemain.

A______ envisageait de solliciter l'aide de l'Hospice général après le déménagement.

B______ a renoncé à toute contribution à l'entretien des enfants.

Seule demeurait litigieuse la contribution à l'entretien de l'épouse.

f. Lors de l'audience de plaidoiries du Tribunal du 4 juin 2015, A______ a conclu à ce qu'une contribution mensuelle de 1'000 fr. à son entretien soit mise à la charge de son époux, ce à quoi ce dernier s'est opposé.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

g. La situation personnelle et financière des époux, non contestée en appel, a été établie comme suit par le Tribunal:

g.a A______ a cessé de travailler régulièrement lors de la naissance des enfants. Depuis quelques années, elle effectue épisodiquement des missions temporaires dans le domaine de l'accueil notamment. Elle n'a pas fait état de problèmes de santé.

Le loyer du studio qu'elle occupe est de 730 fr. par mois.

g.b Depuis juillet 2014, B______ est employé à 80 % par G______, moyennant un salaire net de 3'444 fr., plus 1'000 fr. de frais fixes, soit un total de 4'444.-, payable douze fois par an. Parallèlement, il exerce une activité de journaliste indépendant, dont le produit s'est élevé à un montant oscillant entre 0 fr. et 332 fr. 25 au total entre mars et décembre 2014 et entre 155 fr. 90 et 488 fr. 25 au total entre janvier et mai 2015.

Ses charges mensuelles s'élèvent à 5'722 fr., comprenant 2'496 fr. de loyer, les primes de l'assurance maladie obligatoire de 479 fr. 90 pour lui-même et de 107 fr. pour chacune des enfants, les primes de l'assurance complémentaire de 24 fr. 90 pour C______ et de 12 fr. 50 pour D______, les bases mensuelles OP (1'350 fr., 600 fr. et 400 fr), ainsi que 150 fr., montant estimé ex aequo et bono pour le restaurant scolaire et le parascolaire de l'enfant cadette.

B. Par jugement JTPI/6712/2015 du 10 juin 2015, reçu par les parties le 17 juin 2015, le Tribunal a donné acte aux époux A______ et B______ de ce qu'ils s'étaient déjà constitués des domiciles séparés (chiffre 1 du dispositif), attribué à B______ la garde sur les enfants C______ et D______ (ch. 2) réservé à A______ un droit aux relations personnelles sur les enfants, à exercer d'entente entre les parties et, à défaut d'entente, au minimum un week-end sur deux, du vendredi en fin de journée jusqu'au dimanche à 18 heures, du mardi en fin de journée jusqu'au mercredi à 18 heures, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires (ch. 3), attribué à B______ la jouissance exclusive du domicile conjugal sis ______ Genève (ch. 4), attribué à A______ la jouissance exclusive de l'appartement sis ______ Genève (ch. 5), donné acte à B______ de sa renonciation à toute contribution de la part d'A______ pour l'entretien des enfants (ch. 6), constaté que B______ n'était pas en mesure de verser une contribution à l'entretien d'A______ (ch. 7), prononcé la séparation de biens des parties avec effet au 1er septembre 2014 et réservé la liquidation du régime matrimonial antérieur (ch. 8), prononcé les mesures pour une durée indéterminée (ch. 9), arrêté les frais judiciaires à 200 fr., compensés avec l'avance effectuée et laissés à la charge d'A______ (ch. 10), dit qu'il n'était pas alloué de dépens (ch. 11), condamné les parties à respecter et à exécuter les dispositions du jugement (ch. 12) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 13).

Le Tribunal a ratifié l'accord des parents au sujet de la garde des enfants et du droit de visite, lequel suivait le préavis du SPMi.

Il a donné acte au père de sa renonciation à toute contribution financière de la mère à l'entretien des enfants et a considéré que B______ ne bénéficiait d'aucun solde disponible à allouer à son épouse pour son entretien.

C. a. Par acte expédié au greffe de la Cour de justice le 29 juin 2015, A______ appelle dudit jugement et requiert l'annulation des chiffres 2 à 5 de son dispositif.

Elle conclut à ce que la Cour lui attribue la garde des enfants C______ et D______, réserve au père un large droit de visite devant s'exercer au minimum du mardi en fin de journée au mercredi à 18 heures, durant un week-end sur deux, ainsi que durant la moitié des vacances scolaires, lui attribue la jouissance exclusive du domicile conjugal sis ______ (Genève), attribue à son époux celle de l'appartement sis ______ (Genève), condamne B______ au versement d'une contribution d'entretien équitable pour chacune des filles, confirme le jugement attaqué pour le surplus et compense les dépens, vu la qualité des parties.

L'appelante allègue que lors de l'audience du Tribunal du 7 mai 2015, elle a accepté le préavis du SPMi "de guerre lasse". Après permutation des domiciles et exercice effectif de la garde des enfants par le père, elle a réalisé que cette situation la "pénalisait grandement". Elle allègue qu'elle s'occupe principalement des filles, dans la mesure où le père les lui confie durant les deux voyages professionnels d'une semaine chacun qu'il effectue chaque mois, et que dans la mesure où elle n'a pas officiellement la garde des enfants, elle ne peut bénéficier d'aucune aide de la part des services sociaux.

b. B______ conclut à la confirmation du jugement, dépens compensés vu la qualité des parties.

L'intimé conteste la fréquence de ses voyages professionnels alléguée par l'appelante. Il admet qu'il visite chaque année, depuis 25 ans, le salon de H______ durant une semaine à fin mars. Pour le reste, il s'est déplacé à trois reprises pour des raisons professionnelles en 2015 et a confié la garde des enfants à la mère, à la demande de celle-ci, du 20 au 21 avril 2015 et du 21 au 24 mai 2015, et aux grands-parents paternels du 22 au 24 juin 2015. Il allègue que le dialogue entre les parents est à nouveau rompu, que l'appelante ne respecte pas le droit de visite fixé par le Tribunal, qu'elle n'a pris les enfants aucun week-end et qu'elle décide unilatéralement de ses visites, qui sont aléatoires, durent une journée, voire une nuit et exceptionnellement deux nuits. Il se voit contraint de se soumettre à la situation pour permettre aux enfants de voir la mère. Par ailleurs, il allègue que l'appelante a refusé de prendre en charge les enfants durant le mois de vacances d'été qui lui était réservé, en invoquant sa situation financière.

c. L'appelante n'a pas fait usage de son droit de répliquer dans le délai de dix jours qui lui a été imparti le 28 juillet 2015 et les parties ont été informées le 25 août 2015 de ce que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les jugements de mesures protectrices de l'union conjugale, qui doivent être considérés comme des décisions provisionnelles au sens de l'art. 308 al. 1 let. b CPC (ATF 137 III 475 consid. 4.1), dans les causes non patrimoniales, comme en l'espèce (art. 308 al. 2 CPC).

Les mesures protectrices étant régies par la procédure sommaire selon l'art. 271 let. a CPC, le délai d'introduction de l'appel est de 10 jours (art. 314 al. 1 CPC).

1.2 En l'espèce, l'appel a été formé en temps utile et selon la forme prescrite par la loi (art. 130 al. 1 et 311 al. 1 CPC). Il est donc recevable.

2. 2.1 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen, tant en fait qu'en droit (art. 310 CPC).

La cognition du juge est cependant limitée à la simple vraisemblance des faits et à un examen sommaire du droit, dès lors que les mesures protectrices de l'union conjugale sont ordonnées à la suite d'une procédure sommaire, avec administration restreinte des moyens de preuve et limitation du degré de la preuve (art. 271 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 5A_442/2013 du 24 juillet 2013 consid. 2.1 et 5.1; ATF 127 III 474 consid. 2b/bb). Ainsi, l'exigence de célérité est privilégiée par rapport à celle de sécurité (Vetterli, Das Eheschutzverfahren nach der Schweizerischen Zivilprozessordnung, in FamPra.ch 2010, p. 787; Hohl, Procédure civile, 2ème éd., 2010, n° 1901; Haldy, La nouvelle procédure civile suisse, 2009, p. 71).

2.2 Les maximes inquisitoire et d'office illimitées s'appliquent à la garde des enfants mineurs et à la contribution à leur entretien (art. 296 al. 1 CPC) et la Cour n'est pas liée par les conclusions des parties à cet égard (art. 296 al. 3 CPC).

2.3 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

Dans les causes de droit matrimonial concernant les enfants mineurs, tous les nova sont admis en appel, selon la jurisprudence de la Cour de céans (ACJC/365/2015; dans le même sens : Trezzini, in Commentario al Codice di diritto processuale civile svizzero (CPC), 2011, p. 1394; Tappy, Les voies de droit du nouveau Code de procédure civile, JdT 2010 III p. 115 ss, p. 139).

Ainsi, les allégués nouveaux formés par les parties en appel, qui concernent la situation de leurs enfants mineurs, sont recevables.

2.4 A teneur de l'art. 317 al. 2 CPC, la demande ne peut être modifiée que si les conditions fixées à l'art. 227 al. 1 CPC sont remplies (let. a) et si la modification repose sur des faits ou des moyens de preuve nouveaux (let. b).

La prise de conclusions nouvelles en appel doit être admise restrictivement, car elle porte atteinte au principe du double degré de juridiction. Les deux conditions posées par la loi sont cumulatives (Jeandin, in CPC, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/Schweizer/Tappy [éd.], 2011, no 10 ad art. 317 CPC).

La modification des conclusions en appel doit reposer sur des faits ou moyens de preuve nouveaux (art. 317 al. 2 let. b CPC) qui doivent, de leur côté, remplir les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC pour pouvoir être allégués et présentés.

Lorsque la cause est soumise à la maxime d'office, le dépôt de conclusions nouvelles en appel est admissible jusqu'aux délibérations, les restrictions posées par l'art. 317 al. 2 CPC n'entrant pas en considération dans ce cadre (Jeandin, op. cit., n. 18 ad art. 296 CPC).

En l'espèce, les conclusions de l'appelante sont nouvelles par rapport à ses dernières conclusions prises en première instance. Celles relatives à la garde des enfants, au droit de visite et à la contribution d'entretien due par le père à l'entretien des enfants se rapportent à des aspects qui sont soumis à la maxime d'office et sont donc recevables. La conclusion relative à l'attribution de la jouissance exclusive du logement conjugal et du studio est justifiée par le fait que l'appelante revendique la garde des enfants. Elle est donc également recevable.

3. L'appelante soutient que la garde des enfants doit lui être attribuée, sur la base du rapport d'évaluation sociale du SPMi - dont il ressort que ses capacités parentales ne sont pas remises en question et que C______ souhaite une garde alternée - ainsi qu'en raison des fréquents voyages professionnels du père, lors desquels la garde de fait lui est confiée, ce qui entraîne pour elle des frais, non "compensés par une contribution équitable versée par l'intimé".

L'intimé fait valoir que l'attribution à lui-même de la garde des enfants est conforme au préavis du SPMi et à l'accord des parents intervenu devant le Tribunal, qui a jugé ceux-ci conformes aux intérêts des enfants. Les parents se sont entendus à quelques reprises pour l'élargissement du droit de visite de la mère, à l'occasion des déplacements professionnels du père, étant rappelé que le Tribunal a fixé un large droit de visite en faveur de l'appelante, devant s'exercer en premier lieu d'entente entre les parties.

3.1 En vertu de l'art. 176 al. 3 CC, lorsque les époux ont des enfants mineurs, le juge ordonne les mesures nécessaires d'après les dispositions sur les effets de la filiation (cf. art. 273 ss CC).

Lorsque le juge ordonne les mesures nécessaires concernant les enfants mineurs, le principe fondamental est l'intérêt de l'enfant, celui des parents étant relégué à l'arrière-plan. Au nombre des critères essentiels, entrent en ligne de compte les relations entre les parents et l'enfant, les capacités éducatives respectives des père et mère, leur aptitude à prendre soin de l'enfant personnellement et à s'en occuper ainsi qu'à favoriser les contacts avec l'autre parent; il faut choisir la solution qui, au regard des données de l'espèce, est la mieux à même d'assurer à l'enfant la stabilité des relations nécessaires à un développement harmonieux des points de vue affectif, psychique, moral et intellectuel (ATF 136 I 178 consid. 5.3, arrêts du Tribunal fédéral 5A_497/2011 du 5 décembre 2011 consid. 6.1; TF, FamPra 2006 p. 193 consid. 2.1; 5A_693/2007 du 18 février 2008 consid. 5.1). Le désir d'attribution exprimé par l'enfant peut jouer un rôle important s'il apparaît, sur le vu de son âge et de son développement, qu'il s'agit d'une ferme résolution de sa part et que ce désir reflète une relation effective étroite avec le parent désigné (FamPra 2006 p. 193 consid. 2.1; ATF 126 III 497 consid. 4). En matière de mesures protectrices, qui visent à maîtriser une crise conjugale, il convient d'accorder une importance primordiale aux conditions de vie et à la répartition des tâches qui existaient jusque-là; il en résulte surtout le besoin de créer au plus vite une situation optimale pour les enfants (TF, FamPra 2003, p. 700).

En cas de capacités équivalentes, la disponibilité des parents est déterminante, surtout chez les enfants en bas âge. En cas de disponibilité équivalente, la stabilité et les relations familiales sont à examiner. Ces critères peuvent être mis en balance avec d'autres, tels que la volonté d'un parent à coopérer avec l'autre ou la nécessité de ne pas séparer la fratrie (arrêt du Tribunal fédéral 5A_834/2012 du 26 février 2013 consid. 4.1).

3.2 Le juge n'est pas lié par les conclusions du SPMi; le rapport de ce service (lequel constitue une preuve au sens des art. 168 et 190 CPC) est soumis, à l'instar des autres preuves, au principe de la libre appréciation consacré par l'art. 157 CPC (Hafner, in Basler Kommentar, Schweizerische Zivilprozessordnung, Spühler/ Tenchio/Infanger [éd.], 2013, n. 4 ad art. 190 CPC; Weibel/Naegeli, in Kommentar zur Schweizerischen Zivilprozessordnung [ZPO], Sutter-Somm/ Hasenböhler/Leuenberger [éd.], 2013, n. 8 ad art. 190 CPC).

Cependant, dans le cadre d'une procédure de mesures protectrices de l'union conjugale, caractérisée, comme indiqué, par une administration restreinte des moyens de preuve et par une limitation du degré de preuve à la simple vraisemblance, le juge en est souvent réduit à apprécier les seuls éléments que sont les déclarations des parties et les pièces versées au dossier. Une portée particulière est conférée au rapport d'évaluation sociale. Celui-ci prend en compte toute une série d'éléments objectifs, basés sur les déclarations d'intervenants scolaires, médicaux ou sociaux; il contient également des appréciations subjectives, lesquelles dénotent souvent une grande expérience de la matière, mais ne sauraient remplacer le pouvoir de décision du juge (ACJC/1359/2009 consid. 2.2).

3.3 En l'espèce, les filles des parties, âgées de bientôt 14 ans et de 9 ans, vivent avec le père au domicile conjugal depuis mai 2015. L'appelante ne fait état d'aucun élément permettant de penser que cette situation compromettrait le bien des enfants. Elle se borne à relever que ses propres capacités parentales sont reconnues - ce qui n'est pas contesté par l'intimé - et qu'elle a réalisé après avoir donné son accord à l'attribution de la garde au père, que la situation la pénalisait fortement, dans la mesure où elle ne percevait aucune contribution d'entretien et où elle ne pouvait bénéficier d'aucune aide de la part des services sociaux. D'abord, il est rappelé que l'intérêt des enfants doit primer toute autre considération, celui des parents étant relégué à l'arrière-plan. Par ailleurs, les capacités parentales de la mère ont été prises en compte dans la fixation d'un large droit de visite en sa faveur.

Il résulte des constatations et de l'analyse du SPMi, non contestées par l'appelante, que celle-ci, sans emploi régulier, était, avant la séparation, moins disponible pour les enfants que l'intimé, puisqu'elle sortait régulièrement pour s'adonner à des activités privées, alors que le père, qui travaillait toute la semaine, s'occupait des enfants tous les soirs, ainsi que les week-ends. Par ailleurs, le père a toujours assumé seul le suivi scolaire des enfants. Enfin, l'intimé a initié la démarche de contacter le SPMi, s'inquiétant de la situation des enfants, et souhaitait entreprendre un suivi thérapeutique pour C______. En termes d'engagement et de disponibilité, le père manifestait ainsi beaucoup plus de capacités d'organisation que la mère.

La problématique des voyages professionnels de l'intimé, en particulier ses absences durant le salon de H______, a été prise en compte par le SPMi dans son analyse. Sa profession de journaliste permet à l'intimé de gérer son emploi du temps et de s'occuper des enfants. L'appelante n'a pas contesté les allégués nouveaux de son époux, formés en réponse aux siens, dont il résulte que les absences de celui-ci ne sont pas fréquentes, ni - sinon celle d'une semaine par année pour le salon de H______ - de longue durée, et que le père a toujours réussi à s'organiser, soit avec l'aide de la mère, soit avec celle des grands-parents paternels, ce qui relève de l'exercice usuel du droit de garde. De manière générale. l'appelante n'a fourni aucun élément concret permettant de penser qu'actuellement, elle s'occuperait de ses filles de manière prépondérante. Elle n'a d'ailleurs pas contesté les allégués contraires formés par l'intimé en appel. Enfin, elle ne prétend pas que les déplacements de l'intimé mettraient en péril le bien des enfants.

Le Tribunal a réservé à l'appelante un large droit de visite, lequel doit s'exercer principalement d'entente entre les parents et qu'ainsi ceux-ci peuvent convenir de confier les enfants à la mère aussi souvent qu'ils l'entendent, pour autant que cela ne compromette pas le bien des enfants. Dans ce contexte également, l'appelante - qui relève qu'un exercice plus large du droit de visite entraîne pour elle des frais non compensés par une contribution d'entretien - se prévaut de son intérêt personnel, qui est secondaire par rapport à celui des enfants.

Enfin, une garde alternée, telle que l'aurait souhaitée C______, n'apparaît pas conforme au bien des enfants, dans la mesure où les parents ne s'entendent pas sur ce mode de garde.

En définitive, c'est à bon droit que le Tribunal a attribué la garde des enfants au père, en se fondant sur le rapport du SPMi. L'appelante ne conteste pas les modalités du droit de visite - lesquelles sont par ailleurs conformes à l'intérêt des enfants - ni le fait que le parent attributaire de la garde doit bénéficier également de la jouissance exclusive du logement conjugal. Enfin, la renonciation par l'intimé à toute contribution de l'appelante à l'entretien des enfants est conforme à la situation financière respective des parents. Il n'est ainsi pas nécessaire d'examiner si un revenu hypothétique devrait être imputé à la mère à ce stade.

Le jugement attaqué sera ainsi entièrement confirmé.

4. Les frais d'appel, arrêtés à 800 fr. (art. 31 et 35 RTFMC), seront mis à la charge de l'appelante, qui succombe (art. 106 al. 1 CPC). Ils seront provisoirement supportés par l'Etat (art. 122 al. 1 let. b et 123 al. 1 CPC; art. 19 RAJ), l'appelante plaidant au bénéfice de l'assistance juridique.

Les parties supporteront leurs propres dépens d'appel, conformément à leurs conclusions.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre civile :

A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 29 juin 2015 par A______ contre les chiffres 2 à 5 du dispositif du jugement JTPI/6712/2015 rendu le 10 juin 2015 par le Tribunal de première instance dans la cause C/17836/2014-21.

Au fond :

Confirme le jugement attaqué.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Arrête les frais judiciaires d'appel à 800 fr., les met à la charge d'A______ et dit qu'ils sont provisoirement supportés par l'Etat de Genève.

Dit que chaque partie supporte ses propres dépens d'appel.

Siégeant :

Madame Sylvie DROIN, présidente; Monsieur Ivo BUETTI, Madame Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Marie NIERMARÉCHAL, greffière.

 

La présidente :

Sylvie DROIN

 

La greffière :

Marie NIERMARÉCHAL

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;
RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 30'000 fr.