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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/2691/2020

DCSO/145/2021 du 15.04.2021 ( PLAINT ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : minimum vital; saisie; nouveau calcul
Normes : lp.112; lp.93
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2691/2020-CS DCSO/145/21

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 15 AVRIL 2021

 

Plainte 17 LP (A/2691/2020-CS) formée en date du 3 septembre 2020 par A______, élisant domicile en l'étude de Me Arnaud MOUTINOT, avocat.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du ______ à :

-       A______

c/o Me MOUTINOT Arnaud

Etude de Me J.-M. Crettaz

Boulevard des Philosophes 17

1205 Genève.

- B______

c/o Mme RUFFIEUX Gwendoline

rue de Graman 101B

1241 Puplinge.

- Etat de Genève, Administration fiscale cantonale

Service du contentieux
Rue du Stand 26
Case postale 3937
1211 Genève 3.


 

 

- Confédération suisse IFD
p.a. Administration fiscale cantonale

Service du contentieux
Rue du Stand 26
Case postale 3937
1211 Genève 3.

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. a. B______ fait l'objet de la poursuite n° 1______ engagée par A______ en recouvrement d'une somme de 4'882 fr. 85, plus intérêts, réclamée au titre de contributions d'entretien impayées.

b. Le 2 janvier 2020, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a dressé un procès-verbal de saisie, valant acte de défaut de biens au sens de l'art. 115 LP. Les revenus de B______, à hauteur de 5'248 fr. 80 par mois, étaient insaisissables, compte tenu de ses charges, lesquelles comprenaient notamment 2'200 fr. par mois de contributions à l'entretien de ses deux filles (1'100 fr. par enfant) et 484 fr. 40 par mois au titre de pension alimentaire en faveur de son ex-épouse.

c. A la suite d'une plainte de A______, l'Office a procédé à un nouvel examen de la situation financière du poursuivi et à un nouveau calcul de son minimum vital, après audition de l'intéressé. Les charges mensuelles de B______ étaient notamment composées d'un montant de 2'491 fr. 80 figurant dans la rubrique "Autre" de la feuille de calcul, correspondant aux contributions à l'entretien de ses deux filles (1'100 fr. chacune) et de son ex-épouse (291 fr. 80).

d. L'Office ayant annulé le procès-verbal de saisie du 2 janvier 2020, la Chambre de céans a déclaré la plainte de A______ sans objet par décision du 23 avril 2020 (DCSO/199/2020).

B. a. Le 20 avril 2020, l'Office a établi un nouveau procès-verbal de saisie, qu'il a notifié au conseil de A______.

Selon le calcul du minimum vital de B______ annexé, le débiteur réalisait des revenus de 5'107 fr. par mois et supportait des charges à hauteur de 4'804 fr. 45, soit 1'200 fr. d'entretien de base, 1'100 fr. de loyer, 12 fr. 65 de prime d'assurance-maladie et 2'491 fr. 80, ce dernier montant figurant dans la rubrique "Autre" et correspondant aux contributions d'entretien.

La quotité mensuelle disponible se montait à 302 fr. 55 par mois (5'107 fr.
- 4'804 fr. 45) et l'Office a ordonné la saisie de toute somme supérieure à 4'810 fr.

b. Par courrier du 7 mai 2020 adressé au conseil de A______, l'Office a précisé, à la demande de l'avocat, que les charges mentionnées dans la rubrique "Autre" (du procès-verbal de saisie du 20 avril 2020) correspondaient aux contributions d'entretien, soit deux fois 1'100 fr. (entretien en faveur des enfants) et 291 fr. 80 concernant la pension due à l'épouse (calculée sur une moyenne de 10 mois).

C. a. Par procès-verbal de saisie du 20 août 2020, l'Office a déclaré B______ insaisissable à compter du mois de juillet 2020, au motif que la quotité mensuelle saisissable était prélevée directement par le SCARPA.

Les charges du débiteur mentionnées dans la rubrique "Autre" passaient de 2'491 fr. 80 à 2'795 fr. (différence de 303 fr. correspondant à la quotité saisissable).

D. a. Par acte du 3 septembre 2020, A______ a formé plainte contre le procès-verbal de saisie du 20 août 2020, reçu par son conseil le 24 août 2020, dont elle a requis l'annulation, la cause devant être renvoyée à l'Office pour qu'il procède aux investigations utiles à l'établissement de la situation financière du débiteur.

Le calcul du minimum vital était incompréhensible, dès lors que le poste le plus important des charges du poursuivi figurait dans la rubrique "Autre", sans autre précision.

A______ contestait en outre l'affirmation selon laquelle le SCARPA saisissait directement la quotité saisissable.

Enfin, le procès-verbal de saisie ne contenait pas les énonciations prévues par l'art. 112 al. 1 LP ainsi que par la Directive de l'Office (06-15).

b. Aux termes de son rapport du 8 octobre 2020, l'Office a conclu au rejet de la plainte.

L'Office avait adressé le 7 mai 2020 au conseil de la plaignante un courrier par lequel il expliquait que les charges mentionnées dans la rubrique "Autre" (du procès-verbal de saisie du 20 avril 2020) correspondaient aux contributions d'entretien, soit deux fois 1'100 fr. (entretien en faveur des enfants) et 291 fr. 80 concernant la pension due à l'épouse (calculée sur une moyenne de 10 mois).

B______ avait par ailleurs conclu un accord avec le SCARPA, qui ne s'occupait plus de la famille A______/B______ depuis le 1er octobre 2020, portant sur un versement de 76 fr. 70 par mois pour son ex-épouse et leur fille "ce qui rendait le débiteur insaisissable".

c. Dans sa réplique du 19 octobre 2020, A______ a critiqué le calcul de l'Office, qui admettait dans les charges de B______ les contributions d'entretien sans s'assurer du paiement effectif de celles-ci. Elle a aussi observé que les cotisations sociales prélevées sur le salaire de B______ se rapportaient à un salaire supérieur à 7'500 fr., alors que le salaire brut de l'intéressé était largement inférieur.

d. Par courrier du 27 octobre 2020, B______ a fait savoir qu'il avait suivi les indications reçues du SCARPA.

Pour ce qui était des charges sociales, elles étaient calculées sur un salaire à 100% et non pas sur le salaire à 50% qu'il percevait, ce qui était correct, dès lors que son employeur était au bénéfice du système de réduction de l'horaire de travail (RHT) en raison de la pandémie de COVID-19. Concernant ses revenus, il avait fourni à l'Office toutes les informations utiles.

e. Dans sa détermination du 19 novembre 2020, l'Office a précisé que vérification faite, le SCARPA ne pouvait pas directement ordonner des saisies sur salaire, sauf à obtenir l'autorisation du Tribunal de première instance, selon la procédure d'avis aux débiteurs, qui n'avait pas été utilisée en l'espèce. Le SCARPA avait en revanche demandé à B______ de lui verser 76 fr. 70 par mois et d'en demander le remboursement à l'Office. Pour ce qui était des charges sociales, il était exact que pour les employés en RHT, elles étaient prélevées sur un salaire à 100%.

f. Par courrier du 20 janvier 2021, A______ a transmis à la Chambre de céans copie d'un courrier qu'elle adressait le jour-même à l'Office, concernant des changements dans la situation financière de B______.

g. B______ s'est déterminé sur cette écriture, par courrier du 1er février 2021.

EN DROIT

1. 1.1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'Office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP). La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

Le délai de plainte est un délai péremptoire et son observation une condition de recevabilité qui doit être vérifiée d'office par l'autorité de surveillance (ATF
102 III 127, JdT 1978 II 44; Gilliéron, Commentaire LP, n. 222-223 ad art. 17).

1.1.2 Lorsque l'Office omet d'indiquer les éléments à la base du calcul de la quotité saisissable des revenus du débiteur et que le créancier entend contester cette dernière, plainte doit être déposée dans le délai de dix jours suivant la communication du procès-verbal; il s'agit en effet d'une contestation portant sur l'ampleur de la saisie si bien que le plaignant ne saurait faire correspondre le dies a quo du délai de l'art. 17 al. 2 LP avec la réception d'hypothétiques renseignements complémentaires, sous peine de forclusion (Jeandin/Sabeti, op. cit., n. 19 ad art. 112 LP et l'arrêt cité).

1.2.1 En l'espèce, en tant que le procès-verbal de saisie du 20 août 2020 reprend les éléments du calcul du minimum vital du débiteur annexé au procès-verbal de saisie du 20 avril 2020, il ne constitue pas une nouvelle décision. La plaignante aurait dû contester ce calcul à réception du procès-verbal de saisie du 20 avril 2020, ce qu'elle n'a pas fait. Elle ne saurait ainsi remettre en cause, à l'occasion d'une plainte contre un nouveau procès-verbal de saisie, des faits précédemment arrêtés et non contestés.

Aussi, la plainte est irrecevable dans la mesure où elle vise les revenus de l'intimé, en 5'107 fr., ainsi que les charges admises dans le calcul annexé à la décision du 20 avril 2020, notamment les contributions d'entretien en faveur des deux enfants (1'100 fr. par mois et par enfant) et une partie de la contribution due à son ex-épouse (en 291 fr. 80) et figurant dans la rubrique "Autre".

1.2.2 La décision du 20 août 2020 a déclaré le débiteur insaisissable à compter du mois de juillet 2020, motif pris que le SCARPA aurait directement saisi la quotité mensuelle disponible - précédemment arrêtée -, correspondant à 302 fr. 55 par mois. En tant qu'elle vise ce point, la plainte est recevable.

2. 2.1.1 Pour fixer le montant saisissable - en fonction des circonstances de fait existant lors de l'exécution de la saisie (ATF 115 III 103 consid. 1c) - l'Office doit d'abord tenir compte de toutes les ressources du débiteur; puis, après avoir déterminé le revenu global brut, il évalue le revenu net en opérant les déductions correspondant aux charges sociales et aux frais d'acquisition du revenu; enfin, il déduit du revenu net les dépenses nécessaires à l'entretien du débiteur et de sa famille, en s'appuyant pour cela sur les directives de la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse (BlSchK 2009, p. 196 ss), respectivement, à Genève, sur les Normes d'insaisissabilité édictées par l'autorité de surveillance (ci-après : NI-2019; Ochsner, Le minimum vital (art. 93 al. 1 LP), in SJ 2012 II p. 119 ss, 123; Collaud, Le minimum vital selon l'article 93 LP, in RFJ 2012 p. 299 ss, 303; arrêt du Tribunal fédéral 5A_919/2012 du 11 février 2013 consid. 4.3.1).

2.1.2 L'avis au débiteur, prévu aux articles 132, 177 et 291 CC, est une mesure d'exécution forcée privilégiée sui generis (ATF 137 III 193 consid. 1.1, JdT 2012 II 147). Une fois qu'il déploie ses effets, dit avis prime les saisies en cours opérées par l'Office tendant au recouvrement de prétentions de quelque nature que ce soit, de même que les saisies à venir. Si la saisie a lieu après l'avis au débiteur, l'Office doit tenir compte dans la détermination du minimum vital du débiteur saisi, et partant dans la détermination de la quotité saisissable de ses revenus, du montant faisant l'objet de cet avis qui constitue une charge de celui-ci. Si une saisie était déjà en cours d'exécution au moment où l'avis au débiteur déploie ses effets, il s'agit d'un fait nouveau justifiant une demande de révision tendant à la réduction, voire à la suppression de la saisie (cf. DCSO/76/2013 du 14 mars 2013).

2.1.3 Lorsqu'elle est saisie d'une plainte, il appartient à l'autorité de surveillance de vérifier uniquement si le calcul que l'Office a effectué est conforme aux faits déterminant la quotité saisissable des revenus du débiteur, compte tenu des circonstances existant au moment de l'exécution de cette mesure (ATF 121 III 20 consid. 3, JdT 1997 II 163). Si le plaignant souhaite invoquer des faits nouveaux, il lui appartient de les faire valoir par la voie de la révision de la saisie auprès de l'Office et non par la voie de la plainte (art. 93 al. 3 LP; ATF 108 III 10; Vonder Mühll, in BSK SchKG I, n. 54 ad art. 93 LP; DCSO/243/2015 du 20 août 2015 consid. 2.2 et 2.3).

 

2.2.1 En l'espèce, dans la décision attaquée, l'Office a supprimé la saisie de revenu opérée précédemment, au motif que la quotité mensuelle saisissable aurait été prélevée directement par le SCARPA. Or, aucun jugement d'avis aux débiteurs n'ayant été prononcé en l'espèce, l'Office n'avait pas de raison de revoir le montant de la saisie.

En tant qu'elle reproche à l'Office d'avoir supprimé la saisie, la plainte est ainsi bien fondée.

2.2.2 Il n'y a pas lieu de statuer sur les "éléments nouveaux" communiqués par la plaignante par courrier du 20 janvier 2021. Il appartiendra à l'Office, s'il ne l'a pas déjà fait, d'élucider ces faits et de se prononcer sur une éventuelle révision du montant de la saisie. La décision de l'Office à cet égard pourra ensuite faire l'objet d'une plainte au sens de l'art. 17 LP, aussi bien de la part de la plaignante que du débiteur poursuivi.

2.2.3 La plaignante ne poursuit aucun but concret sur le plan de l'exécution forcée lorsqu'elle critique le fait que le procès-verbal de saisie querellé ne contiendrait pas les énonciations exigées par l'art. 112 al. 1 LP et par la Directive de l'Office correspondante, de sorte que ce grief est irrecevable (cf. ATF 139 III 384 consid. 2.1; 138 III 219 consid. 2.3; 120 II 5 consid. 2a).

3. La procédure de plainte est gratuite (art. 20a al. 2 ch. 5 LP et art. 61 al. 2 let. a OELP) et il ne peut être alloué aucuns dépens dans cette procédure (art. 62 al. 2 OELP).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 3 septembre 2020 par A______ contre le procès-verbal de saisie du 20 août 2020, dans la poursuite n° 1______.

Au fond :

L'admet partiellement.

Annule le procès-verbal de saisie du 20 août 2020 en tant qu'il retient que B______ est insaisissable à compter du mois de juillet 2020.

Confirme en tant que de besoin le procès-verbal de saisie du 20 avril 2020 dans la mesure où il fixe la quotité saisissable à toute somme supérieure à 4'810 fr.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseur(e)s; Madame Christel HENZELIN, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Christel HENZELIN

 

Voie de recours :

Le recours en matière civile au sens de l'art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.