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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2857/2024

JTAPI/691/2025 du 24.06.2025 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2857/2024

JTAPI/691/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 24 juin 2025

 

dans la cause

 

 

Monsieur M. A______, représenté par CSP-CENTRE SOCIAL PROTESTANT, mandataire avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur M. A______, né le ______ 1971, est ressortissant du Kosovo.

2.             Il est entré pour la première fois en Suisse le 8 octobre 1991 en tant que requérant d’asile. Sa demande d’asile a été rejetée par décision du 23 août 1993 et son renvoi de Suisse prononcé. L’exécution dudit renvoi n’étant pas raisonnablement exigible, il a été mis au bénéfice d’une admission provisoire.

3.             Le 27 novembre 1995, il a été mis au bénéfice d’une autorisation de séjour pour regroupement familial suite à son mariage le ______ 1995 avec une ressortissante suisse.

4.             Le 11 février 2000, il a divorcé.

5.             Le ______ 2001, il a épousé Madame Mme B______ (née C______) à D______ (Kosovo).

6.             Deux enfants, aujourd’hui majeurs, sont nés de cette union, soit Mme B______ le ______ 2003 et E______ le ______ 2004. Ils disposent de la nationalité suisse et résident à Genève.

7.             Le 28 août 2003, Mme B______ et son fils Mme B______ sont entrés en Suisse et ont été mis au bénéfice d’une autorisation de séjour pour regroupement familial.

8.             Par décision du 20 mai 2009, l’ancien Office fédéral des migrations (aujourd’hui le secrétariat d’État aux migrations ; ci-après : SEM) a refusé d’approuver la prolongation de l’autorisation de séjour de M. A______ et a prononcé son renvoi de Suisse, notamment compte tenu des dix condamnations pénales dont il avait fait l’objet entre 1993 et 2007, dont en dernier lieu une peine privative de liberté de 18 mois avec sursis et délai d’épreuve de trois ans par jugement de la Cour suprême du canton de Berne du 9 août 2007. Cette décision a été confirmée par le Tribunal administratif fédéral le 18 mars 2011.

9.             Le 8 octobre 2011, M. A______ a quitté la Suisse et est retourné vivre au Kosovo.

10.         Le 25 octobre 2013, Mme B______ et ses deux enfants ont été mis au bénéfice d’une autorisation d’établissement.

11.         Par décision du 30 octobre 2015, le SEM a refusé d’approuver l’octroi d’une autorisation d’entrée en Suisse et de séjour au titre du regroupement familial en faveur de M. A______, dite autorisation ayant préalablement été acceptée par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM).

Il a considéré, en substance, que M. A______ avait été condamné pénalement à dix reprises au cours de son précédent séjour en Suisse, pour des délits de plus en plus graves, le cumul des deux dernières condamnations représentant une peine privative de liberté de 30 mois. Bien que les faits remontent à 2006, l’intéressé ne s’était pas suffisamment amendé et l’intérêt public à son éloignement l’emportait sur son intérêt privé à rejoindre sa famille en Suisse. Le SEM était toutefois disposé à réexaminer la situation à l’issue d’un « délai d’épreuve de cinq ans », soit à partir d’octobre 2016, pour autant qu’aucun élément défavorable n’ait été porté à sa connaissance dans l’intervalle.

12.         M. A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral.

13.         Par courrier du 22 février 2017 faisant suite à l’invitation dudit tribunal à se déterminer sur le recours, le SEM a reconsidéré sa décision du 30 octobre 2015 et l’a annulée. M. A______ avait en effet quitté la Suisse depuis plus de cinq ans et n’avait fait l’objet d’aucune condamnation durant cette période. Il entretenait par ailleurs des liens étroits avec son épouse et leurs deux enfants.

14.         Le 12 avril 2017, le SEM a approuvé l’octroi d’une autorisation d’entrée et de séjour pour regroupement familial en faveur de M. A______. En raison du passé délictueux du précité, la validité de ladite autorisation était toutefois limitée à une année, délai à l’issue duquel la situation serait réexaminée par l’autorité cantonale. M. A______ était dès lors invité à adopter un comportement irréprochable.

15.         À la suite de l’approbation du SEM, l’OCPM a délivré l’autorisation susmentionnée le 20 juin 2017 à M. A______ et l’a renouvelée jusqu’au 16 mai 2021.

16.         Par jugement du 22 novembre 2019, le Tribunal de première instance de Genève a autorisé les époux A______ et B______ à vivre séparés, a attribué à Mme B______ la jouissance exclusive du logement familial et a ordonné à M. A______ de quitter celui-ci d’ici au 15 décembre 2019.

17.         Par formulaire K daté du 30 avril 2021 et réceptionné par l’OCPM le 4 mai 2021, M. A______ a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.

18.         Dans le cadre de l’instruction de cette demande, les documents médicaux suivants ont été versés au dossier :

-          Un rapport médical établi le 8 août 2022 à l’attention du SEM par le F______, psychiatre et psychothérapeute FMH, , selon lequel M. A______ souffrait d’un trouble dépressif récurrent moyen avec syndrome somatique (F33.11). Il bénéficiait d’un traitement à base de Sertraline (200 mg/j) et de Bupropion (300 mg/j) et était au bénéfice d’une rente de l’assurance-invalidité à 50% en lien avec ce trouble.

-          Deux rapports médicaux du G______ des 27 septembre 2022 et 7 décembre 2023, selon lesquels M. A______ souffrait des affections suivantes : maladie coronarienne de l’artère IVA traitée par stent ; hypercholestérolémie ; trouble dégénératif de la colonne vertébrale avec discopathie étagée ; arthrose tibio-talienne du pied gauche ; épicondylite chronique du coude gauche ; état dépressif sévère. Depuis 2006, il suivait un traitement à base d’aspirine cardio, d’Etezimib-Rosuvast, de Trittico, de Sertraline, de Dalmadorm, de physiothérapie et d’infiltrations. Un suivi cardiologique régulier était indispensable au maintien de ses facteurs de risques cardio-vasculaires. Un suivi psychiatrique était également essentiel compte tenu de son état psychique insatisfaisant. Sans traitement, le pronostic était très mauvais, tandis qu’avec traitement il était meilleur mais restait réservé.

-          Une attestation médicale du 20 novembre 2023 dans laquelle le Dr F______ et Madame H______, psychothérapeute FSP, constataient que l’état psychique de M. A______ s’était nettement dégradé depuis trois ans en raison de troubles dépressifs récurrents sévères, lesquels avaient récemment nécessité une hospitalisation psychiatrique afin de diminuer le risque d’autolyse dans le contexte d’un trouble de la personnalité. M. A______ présentait également des troubles cognitifs et de la concentration, une agitation ou un ralentissement selon les moments avec impulsivité et intolérance à la frustration, persistants et en aggravation malgré une bonne compliance au traitement.

-          Une attestation médicale du 3 juillet 2024 du Dr F______ certifiant que M. A______ bénéficiait d’un suivi psychiatrique et psychologique régulier en raison de troubles dépressifs récurrents. Le Dr F______ soutenait vivement la demande de son patient de poursuivre ses soins afin d’éviter une rupture du lien thérapeutique qui aurait des effets négatifs sur sa santé. La prise en charge multidisciplinaire en réseau, comme celle dont il bénéficiait actuellement en Suisse, n’existait pas au Kosovo.

-          Deux courriers des 11 et 12 juin 2024 par lesquels le I______, spécialiste FMH en cardiologie, informait le Dr G______ que l’examen cardiologique et le test d’effort de M. A______ étaient tout à fait rassurants. Le patient était stable et asymptomatique. Son taux de cholestérol devait être vérifié et un suivi cardiologique annuel devait être effectué.

19.         Par décision du 5 mai 2023, l’Office cantonal de l’assurance-invalidité de Genève (ci-après : OCAI) a reconnu que M. A______ présentait un degré d’invalidité de 55%, lui donnant droit à une rente ordinaire mensuelle d’invalidité de CHF 790.- à compter du 1er avril 2022, puis de CHF 810.- à partir du 1er janvier 2023. Le droit à des mesures professionnelles était refusé.

20.         Par courriels des 11 et 22 janvier 2024, l’Ambassade de Suisse à K______ (Kosovo) a informé l’OCPM que les patients souffrant de maladies cardiaques pouvaient être traités au Kosovo, même s’ils avaient un stent. A l’hôpital public, le contrôle et l’opération étaient gratuits, mais les conditions n’étaient pas forcément bonnes. Des traitements tels que la physiothérapie, les infiltrations et la psychothérapie y étaient disponibles, ainsi que dans les cliniques privées. L’aspirine était disponible dans toutes les pharmacies au prix de 2 euros. On ne trouvait pas d’Etezimib-Rosuvast mais du Rosamib (10mg/10mg) au prix de 14.90 euros. Le Trittico était disponible pour 6,50 euros. La Sedraline (50mg) coûtait 4 euros et la Sertraline (100mg) coûtait 10 euros. Les médicaments étaient à la charge des patients mais les personnes indigentes pouvaient demander l’aide sociale (limitée à 100 euros par mois) au Ministère des affaires sociales. Les critères d’octroi n’étaient pas connus.

21.         Par jugement du 16 février 2024, le Tribunal de première instance a prononcé le divorce entre les époux A______ et B______.

22.         Selon l’extrait du registre des poursuites de l’Office cantonal des poursuites de Genève du 25 avril 2024, M. A______ faisait l’objet, à la date précitée, de 22 actes de défaut de biens pour un total de CHF 56'396.-.

23.         Selon l’extrait du casier judiciaire daté du 5 juin 2024 destiné aux autorités, M. A______ a été condamné par ordonnance pénale du Ministère public du 19 décembre 2019 à une amende de CHF 540.- et à une peine pécuniaire de 90 jours-amende avec sursis et délai d’épreuve de trois ans pour violation grave des règles de la loi fédérale sur la circulation routière.

En outre, il fait actuellement l’objet des procédures pénales suivantes :

-          une procédure depuis le 17 juin 2020 auprès du Tribunal de police de Genève pour menaces et violation de domicile ;

-          une procédure depuis le 21 juillet 2022 auprès du Ministère public de l’arrondissement de La Côte, Morges, pour conduite d’un véhicule automobile malgré le refus, le retrait ou l’interdiction de l’usage du permis au sens de la LCR ;

-          une procédure depuis le 27 décembre 2022 auprès du Tribunal d’arrondissement de La Côte, Nyon, pour violation grave des règles de la circulation au sens de la LCR ;

-          une procédure depuis le 30 avril 2024 auprès du Ministère public du canton de Genève pour empêchement d’accomplir un acte officiel.

24.         Par courrier A+ daté du 7 juin 2024, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser sa demande de renouvellement d’autorisation de séjour et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai de 30 jours lui était imparti pour faire valoir son droit d’être entendu.

25.         Par courrier du 4 juillet 2024, M. A______ a fait valoir qu’il avait vécu durant 28 années en Suisse ce qui représentait plus de la moitié de sa vie. Lorsqu’il était rentré au Kosovo en 2011, il n’avait pas réussi à se réintégrer et n’avait plus de famille proche sur place. Ses enfants, son épouse et ses amis vivaient à J______ (GE) et et il ne s’imaginait pas pouvoir les quitter.

26.         Par décision du 8 août 2024, l’OCPM a refusé de prolonger l’autorisation de séjour de M. A______ et a prononcé son renvoi de Suisse ainsi que des Etat-membres de l’Union européenne et des Etat associés Schengen. Un délai au 8 novembre 2024 lui était imparti pour quitter la Suisse et les États précités.

M. A______ ne pouvait pas prétendre à la prolongation de son autorisation de séjour en vertu de l’art. 50 al. 1 let. a LEI, dès lors que son séjour en Suisse à la suite de son mariage avec son épouse avait duré moins de trois ans. Il ne pouvait pas non plus se fonder sur l’art. 50 al. 1 let. b LEI étant donné qu’aucun élément du dossier ne permettait de constater qu’un renvoi au Kosovo le placerait dans une situation de rigueur. Il était arrivé en Suisse à l’âge de 36 ans (recte : 46 ans) et était maintenant âgé de 53 ans de sorte qu’il avait passé son enfance, sa jeunesse et une grande partie de sa vie d’adulte dans son pays d’origine. Il ne pouvait pas se prévaloir d’une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée en Suisse. Sa situation personnelle ne se distinguait guère de celle de bon nombre de ses concitoyens connaissant les mêmes réalités au Kosovo. Son comportement n’était pas exempt de tout reproche au vu de sa condamnation par le Ministère public du canton de Genève en date du 19 décembre 2019 et des quatre procédures pénales en cours à son encontre. À teneur des courriels de la représentation diplomatique suisse à K______ (Kosovo), les traitements et les médicaments que nécessitait le traitement de ses différentes pathologies étaient disponibles au Kosovo. Il serait en mesure de les financer à l’aide de sa rente ordinaire mensuelle d’invalidité de CHF 810.-, exportable au Kosovo, et de l’aide sociale kosovare. L’art. 8 CEDH ne lui était d’aucun secours puisque ses enfants étaient majeurs et ne souffraient d’aucun handicap.

Son autorisation de séjour ne pouvant être prolongée, son renvoi devait être prononcé. Celui-ci était possible, licite et raisonnablement exigible dès lors qu’une prise en charge médicale au Kosovo était possible.

27.         Par acte expédié le 4 septembre 2024, M. A______ a formé recours contre la décision susmentionnée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), sous la plume du CSP-CENTRE SOCIAL PROTESTANT. Il a conclu à l’annulation de la décision précitée et à ce que le tribunal ordonne à l’OCPM de soumettre son dossier au SEM en vue du prononcé d’une admission provisoire en sa faveur pour inexigibilité du renvoi, en application de l’art. 83 al. 4 LEI.

Il présentait de nombreuses pathologies attestées par les documents médicaux suivants :

-          Un courrier du Dr L______ du 27 août 2024 confirmant la teneur rassurante du dernier bilan cardiologique mais soulignant le caractère impératif d’un suivi régulier.

-          Une attestation du Dr F______ et de Mme H______ du 28 août 2024 à teneur de laquelle ses troubles dépressifs persistaient malgré une prise en charge multidisciplinaire, laquelle semblait très difficile à mettre en place au Kosovo. Une interruption de cette prise en charge et une rupture du lien thérapeutique péjoreraient sévèrement son état de santé.

-          Un rapport médical du Dr G______ du 26 août 2024 confirmant les précédents diagnostics ainsi que la nécessité d’un suivi médical régulier par différents spécialistes, couplé à des hospitalisations en cliniques, à des interventions invasives et à un traitement médicamenteux. Une interruption de ce suivi à la suite d’un renvoi du patient dans son pays d’origine l’atteindrait gravement dans sa santé et mettrait sa vie en danger.

En dépit de ces éléments, la décision entreprise refusait malheureusement de renouveler son autorisation de séjour et lui fixait un délai de départ au 8 novembre 2024. Elle était dès lors arbitraire et violait le droit fédéral. Dans la mesure où il se trouvait dans une situation personnelle d’extrême gravité pour raisons médicales, il sollicitait dès lors que ladite décision soit annulée et que son dossier soit soumis au SEM en vue du prononcé d’une admission provisoire pour inexigibilité du renvoi.

28.         Dans ses observations du 8 novembre 2024, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

M. A______ n’avait pas vécu au moins trois ans en Suisse aux côtés de son épouse de sorte que la première condition de l’art. 50 al. 1 let. a LEI n’était pas réalisée. En outre, il ne démontrait pas, ni même n’alléguait, que des raisons personnelles majeures au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI justifieraient la prolongation de son autorisation de séjour.

Il n’apparaissait pas non plus que son renvoi serait inexigible ou illicite (art. 83 al. 3 et 4 LEI). De jurisprudence constante, le Kosovo disposait des infrastructures nécessaires pour assurer des soins somatiques et psychiatriques, ce qui était notamment attesté par un rapport du SEM du 25 octobre 2016 intitulé « Focus Kosovo Behandlungsangebote bei psychischen Erkrankungen ». Des traitements psychothérapeutiques ainsi que des médicaments, tels que des antidépresseurs, antidouleurs et somnifères, étaient disponibles sur le marché kosovar. L’Ambassade de Suisse au Kosovo avait même attesté que les soins et traitements nécessaires à M. A______ étaient disponibles et accessibles sur place. Celui-ci pourrait enfin exporter sa rente d’invalidité dans ce pays dès lors que son taux d’invalidité était supérieur à 50%.

29.         M. A______ a répliqué par courrier du 3 décembre 2024.

Il a produit une nouvelle attestation du Dr F______ du 27 novembre 2024 dans laquelle ce médecin exposait que même si des structures de soins existaient au Kosovo, les prestations offertes n’étaient très probablement pas comparables avec celles qui étaient disponibles en Suisse. La rupture du lien thérapeutique allait en outre certainement avoir un effet néfaste sur son fonctionnement psychique. Une dégradation rapide de son état psychique, voire un passage à l’acte auto-agressif, compte tenu du trouble de la personnalité dont il souffrait, étaient par conséquent à craindre. Il regrettait en outre de plus en plus les problèmes juridiques qui lui étaient reprochées et se remettait en question par rapport à ses dérapages passés (refus d’obtempérer, bagarre sur l’autoroute).

Il a également produit un rapport médical complémentaire du Dr G______ daté du 2 décembre 2024 qui confirmait les éléments contenus dans les précédents rapports.

Contrairement à l’avis de l’OCPM, ses problèmes de santé nécessitaient une prise en charge pluridisciplinaire qui ne serait certainement pas accessible au Kosovo compte tenu des infrastructures disponibles et du coût des traitements. Ces circonstances constituaient une situation personnelle d’extrême gravité au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI. Alternativement, elles justifiaient de transmettre son dossier au SEM en vue du prononcé d’une admission provisoire.

30.         Par courrier du 12 décembre 2024, l’OCPM a informé le tribunal que la réplique susmentionnée n’était pas de nature à modifier sa position. Par formulaire D daté du 24 novembre 2024, M. A______ avait par ailleurs annoncé son départ définitif de la Suisse à destination du Kosovo en date du 5 janvier 2025. Se posait dès lors la question de l’intérêt actuel au recours.

31.         Par pli du 8 avril 2025, l’OCPM a transmis au tribunal une copie d’un rapport de police daté du 6 mars 2025, à teneur duquel M. A______ avait tenté de se soustraire à un contrôle de police le 5 mars 2025, alors qu’il avait été interpellé par une patrouille au motif qu’il roulait sans ceinture de sécurité.

32.         Selon le rapport de police susmentionné, l'attention d'une patrouille de police avait été attirée le 6 mars 2025 par M. A______, conducteur d'une voiture arrêtée à la phase rouge qui ne portait pas la ceinture de sécurité. De ce fait, l'un des policiers avait dans un premier temps, depuis le trottoir, tenté de capter son attention à l'aide d'une lampe de poche afin de l'interpeller. Il l'avait ensuite hélé verbalement. Comme M. A______ n'y prêtait toujours pas attention, le policier s'était présenté auprès de lui afin de le déclarer en infraction. « Fermé au dialogue », l'intéressé avait cependant déclaré avoir pour habitude de circuler sans le port de la ceinture, puis avait redémarré à la phase verte alors que le contrôle était en cours. De ce fait, une autre patrouille qui était de passage et avait assisté à la scène avait immédiatement intercepté l'automobiliste un peu plus loin. Lors du contrôle, M. A______ s'était montré acerbe et irascible. Après de nombreuses injonctions et en se permettant dans l'intervalle de s'offrir une cigarette en guise de provocation, il avait fini par daigner présenter ses permis de conduire et de circulation. Une fois identifié, il avait refusé de se soumettre à l'éthylotest, arguant que les appareils n'étaient pas fiables. « Après moult palabres », comme il campait sur son refus de collaborer, il avait été conduit au poste de police pour la suite de la procédure. Il fallait relever que M. A______ avait affirmé de manière vindicative qu'il n'aurait pas hésité à « vider son chargeur » en cas de possibilité.

 

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’OCPM relatives au statut d’étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Il convient en premier lieu de circonscrire l’objet du litige.

5.             L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/504/2023 du 16 mai 2023 consid. 3.2). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer. L’objet d’une procédure administrative ne peut donc pas s’étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/504/2023 précité, ibidem).

6.             L’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA). Il contient également l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve (art. 65 al. 2 1ère phr. LPA). La juridiction administrative applique le droit d’office et ne peut aller au-delà des conclusions des parties, sans pour autant être liée par les motifs invoqués (art. 69 al. 1 LPA).

Compte tenu du caractère peu formaliste de l’art. 65 LPA, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant. Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/1028/2023 du 19 septembre 2023 consid. 1.1 et les arrêts cités). Des conclusions conditionnelles sont en revanche irrecevables. Il en va de même des conclusions subsidiaires prises en dehors du délai de recours, pendant le cours de la procédure (ATA/398/2020 du 23 avril 2020 consid. 2b). Des conclusions nouvelles prises au stade de la réplique sont également irrecevables (ATA/429/2024 du 26 mars 2024 consid. 1.3 et les arrêts cités; ATA/270/2012 du 8 mai 2012 consid. 2 et l’arrêt cité).

7.             En l’espèce, le recourant a conclu, dans son recours du 4 septembre 2024, à l’annulation de la décision de l’OCPM du 8 août 2024 refusant de prolonger son autorisation de séjour et prononçant son renvoi de Suisse ainsi que des État-membres de l’Union européenne et des État associés Schengen. Il a sollicité, cela fait, que le tribunal ordonne à cet office de soumettre son dossier au SEM en vue du prononcé d’une admission provisoire. Il n’a en revanche pris aucune conclusion tendant à la prolongation de son autorisation de séjour en vertu de l’art. 50 al. 1 let. b LEI, prolongation qui lui avait pourtant été refusée par l’OCPM au terme de la décision entreprise et qui pouvait par conséquent être contestée par-devant le tribunal de céans.

Une telle conclusion ne ressort pas non plus de la motivation du recours. Bien qu’il ait exposé, dans la partie « En droit » de cette écriture, qu’il se trouvait dans une situation personnelle d’extrême gravité et qu’il sollicitait pour cette raison l’annulation de la décision entreprise, le recourant n’a formulé ce grief que dans la perspective d’une transmission de son dossier au SEM, en vue du prononcé d’une admission provisoire pour inexigibilité du renvoi. Force est dès lors de constater que le recourant, représenté par un mandataire professionnellement qualifié rompu au droit des étrangers, a expressément limité ses conclusions au prononcé de l’admission provisoire susmentionnée, renonçant ainsi implicitement à soumettre la question de la prolongation de son autorisation de séjour au tribunal de céans.

Cette absence de conclusion tendant à la prolongation de ladite autorisation ne pouvait au surplus être corrigée par le recourant dans le cadre de sa réplique du 3 décembre 2024. À supposer que la phrase selon laquelle ses problèmes de santé « constituaient une situation personnelle d’extrême gravité au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI » puisse être interprétée comme une conclusion tendant à une telle prolongation, celle-ci devrait être déclarée irrecevable pour cause de tardiveté, conformément à la jurisprudence rappelée plus haut.

8.             Au demeurant, quand bien même le recourant aurait valablement conclu à la prolongation de son autorisation de séjour dans le cadre du présent recours, force serait de constater que les conditions d’une telle prolongation ne seraient pas réunies, l’intéressé ne pouvant se prévaloir de « raisons personnelles majeures » imposant la poursuite de son séjour en Suisse au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI.

En effet, bien que des motifs médicaux puissent, suivant les circonstances, conduire à la reconnaissance d’une raison personnelle majeure (cf. parmi plusieurs : ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_861/2015 du 11 février 2016 consid. 4.2), ils ne sauraient justifier, à eux seuls, la reconnaissance d’un cas de rigueur. L’aspect médical ne constitue en effet que l’un des éléments, parmi d’autres (durée du séjour, intégration socioprofessionnelle et formations accomplies en Suisse, présence d’enfants scolarisés en Suisse et degré de scolarité atteint, attaches familiales en Suisse et à l’étranger, etc.), à prendre en considération dans le cadre de l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur (cf. notamment arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6545/2010 du 25 octobre 2011 consid. 6.4 et les arrêts cités).

Or, s'il a invoqué ses liens familiaux en Suisse dans le cadre de son courrier à l'OCPM du 4 juillet 2024, il n'y a plus fait allusion dans son recours, à teneur duquel il ne prétend pas non plus que la durée de son séjour en Suisse, son intégration socioprofessionnelle dans ce pays ou encore les attaches familiales qu’il y aurait, justifieraient de lui octroyer une telle autorisation, et ce malgré sa situation financière obérée, la condamnation pénale prononcée à son encontre en 2019 et les nombreuses procédures pénales dont il continue de faire l’objet. À ces différents éléments s'ajoutent encore les renseignements découlant du rapport de police du 6 mars 2025, dont il ressort que même pendant la procédure devant le tribunal de céans, le recourant persiste à démontrer un comportement extrêmement problématique dans son rapport à la loi et à l'autorité. Au vu de ces éléments, une hypothétique conclusion tendant à un renouvellement de son autorisation de séjour pour raisons personnelles majeures ne pourrait qu’être rejetée.

9.             Ces questions préliminaires étant résolues, il reste à déterminer si c’est à bon droit que l’OCPM a considéré que le renvoi du recourant était possible, licite et raisonnablement exigible, l'intéressé mettant de son côté en avant ses problèmes médicaux et le fait que ceux-ci feraient obstacle à l’exécution de son renvoi au sens de l’art. 83 al. 4 LEI.

10.         Conformément à l’art. 83 al. 1 LEI, le SEM décide d’admettre provisoirement l’étranger si l’exécution du renvoi ou de l’expulsion n’est pas possible, n’est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée. Ces trois conditions susceptibles d’empêcher l’exécution du renvoi sont de nature alternative : il suffit que l’une d’elles soit réalisée pour que le renvoi soit inexécutable (arrêt du Tribunal administratif fédéral D-6776/2023 du 15 décembre 2023).

Les étrangers admis provisoirement en Suisse bénéficient d’un statut précaire, qui assure leur présence dans le pays aussi longtemps que l’exécution du renvoi n’est pas possible, n’est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée (ATF 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2012 du 13 février 2013 consid. 1.2.1). L’admission provisoire constitue en d’autres termes une mesure qui se substitue, en principe pour une durée limitée, à la mise en œuvre du renvoi, lorsque celui-ci s’avère inexécutable. Elle coexiste donc avec la mesure de renvoi entrée en force, dont elle ne remet pas en cause la validité. L’admission provisoire n’équivaut pas à une autorisation de séjour, mais fonde un statut provisoire, qui réglemente la présence en Suisse de l’étranger tant et aussi longtemps que l’exécution de son renvoi apparaîtra comme impossible, illicite ou non raisonnablement exigible (ATF 141 I 49 précité, ibidem ; 138 I 246 précité, ibidem ; 137 II 305 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1001/2019 du 3 décembre 2019 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5915/2007 du 18 février 2009 consid. 6 ; ATA/675/2014 du 26 août 2014 consid. 7 et les références citées).

L’admission provisoire est de la seule compétence du SEM ; elle ne peut être que proposée par les autorités cantonales (art. 83 al. 6 LEI ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1001/2019 précité, ibidem). Les intéressés n’ont, pour leur part, aucun droit à ce que le canton demande au SEM une admission provisoire en leur faveur sur la base de l’art. 83 al. 6 LEI (ATF 141 I 49 précité consid. 3.5.3 ; 137 II 305 précité consid. 3.2). Néanmoins, l’existence même de l’art. 83 LEI implique que l’autorité cantonale de police des étrangers, lorsqu’elle entend exécuter la décision de renvoi, statue sur la question de son exigibilité (ATA/675/2014 précité, ibidem).

11.         Aux termes de l’art. 83 al. 4 LEI, l’exécution de la décision de renvoi peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi de l’étranger dans son pays d’origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale.

Selon une jurisprudence constante, l’exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse ne devient inexigible que dans la mesure où, à leur retour dans leur pays d’origine ou de provenance, elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d’existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d’urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. Cette définition des soins essentiels tend en principe à exclure les soins avancés relativement communs et les soins coûteux, les soins devant consister en principe en des actes relativement simples, limités aux méthodes diagnostiques et traitements de routine relativement bon marché ; les soins vitaux ou permettant d’éviter d’intenses souffrances demeurent toutefois réservés. En effet, l’art. 83 al. 4 LEI est une disposition exceptionnelle tenant en échec une décision d’exécution du renvoi et ne saurait être interprété comme une norme qui comprendrait un droit de séjour lui-même induit par un droit général d’accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que les structures de soins et le savoir-faire médical dans le pays d’origine ou de destination de l’intéressé n’atteignent pas le standard élevé que l’on trouve en Suisse. Ce qui compte, ce sont, d’une part, la gravité de l’état de santé et, d’autre part, l’accès à des soins essentiels. Ainsi, l’exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible, si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s’ils ne sont pas tels que, en l’absence de possibilités de traitement adéquat, l’état de santé de l’intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d’une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable et notablement plus grave de son intégrité physique à son retour au pays. De même, l’exécution du renvoi est raisonnablement exigible si l’accès à des soins essentiels, au sens défini ci-dessus, est assuré dans le pays d’origine ou de provenance. Il pourra s’agir, le cas échéant, de soins alternatifs à ceux prodigués en Suisse, qui – tout en correspondant aux standards du pays d’origine – sont adéquats à l’état de santé de l’intéressé, fussent-ils d’un niveau de qualité, d’une efficacité de terrain (ou clinique) et d’une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse ; en particulier, des traitements médicamenteux (par exemple constitués de génériques) d’une génération plus ancienne et moins efficaces peuvent, selon les circonstances, être considérés comme adéquats (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6559/2018 du 3 octobre 2019 consid. 3.6 et les références citées).

12.         Il ressort de la jurisprudence que le Kosovo dispose de structures de soins et des médicaments nécessaires au traitement des maladies tant physiques que psychiques (arrêt du Tribunal administratif fédéral 2011/50 du 2 mai 2011 consid. 8.8.2). Le système de santé est ainsi en mesure d’offrir des prestations médicales correctes, y compris des traitements psychothérapeutiques (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.8). Cela est notamment le cas dans les domaines de la physiothérapie, de la pneumologie, de l’urologie et de la cardiologie (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3505/2018 du 20 novembre 2018 consid. 3.3.2).

La jurisprudence a également retenu qu’il existait au Kosovo sept centres de traitement ambulatoire pour les maladies psychiques (Centres Communautaires de Santé Mentale), que certains hôpitaux généraux disposaient d’espaces réservés à la neuropsychiatrie pour le traitement des cas de psychiatrie aiguë, et que grâce à la coopération internationale, de nouvelles structures appelées « Maisons de l’intégration » avaient vu le jour dans certaines villes. Ces établissements logeaient des personnes atteintes de troubles mineurs de la santé mentale dans des appartements protégés et leur proposaient un soutien tant thérapeutique que socio-psychologique (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6397/2018 du 22 janvier 2019 ; ATA/1852/2021 du 24 mai 2022 consid. 8f ; ATA/821/2021 du 10 août 2021 consid. 3f et les arrêts cités, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_671/2021 du 15 février 2022 consid. 8.2 et les références citées).

La jurisprudence a en outre confirmé à plusieurs reprises que le Kosovo disposait de structures adaptées dans le domaine des soins psychiatriques.

Ainsi, le Tribunal administratif fédéral a jugé dans un arrêt rendu en 2017 qu’un recourant souffrant de schizophrénie paranoïde ne présentait pas un trouble d’une gravité telle que l’exécution de son renvoi serait illicite. Son traitement, pouvait être poursuivi au Kosovo, même si celui-ci, de nature essentiellement médicamenteuse (prise de neuroleptiques) et la qualité de l'encadrement offerts étaient inférieurs aux standards suisses. Il lui appartiendrait, avec l’aide de ses thérapeutes, de mettre en place les conditions adéquates lui permettant d'appréhender son retour au pays, et de préparer avec eux la poursuite de son traitement dans le cadre des structures médicales kosovares (arrêt du Tribunal administratif fédéral D-1462/2017 du 20 mars 2017).

Il en est allé de même dans un arrêt rendu en 2014 à l’encontre d’un recourant d’origine kosovare qui souffrait d’un stress post-traumatique complexe. Selon cet arrêt, le pays disposait des infrastructures médicales nécessaires pour la prise en charge d’un tel trouble, même si les soins donnés et les médicaments prescrits ne correspondaient pas toujours aux standards élevés de qualité prévalant en Suisse. Il appartiendrait aux thérapeutes et à l’entourage familial du recourant de prendre les mesures adéquates pour le préparer à la perspective d’un retour, et aux autorités d’exécution de vérifier le besoin de mesures particulières que requerrait son état lors de l’organisation du renvoi (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5631/2013 du 5 mars 2014 consid. 5.3.4).

En 2019, la chambre administrative a également admis qu’un recourant souffrant de schizophrénie paranoïde continue, laquelle nécessitait un traitement serré et la prise quotidienne de médicaments, et qui était stabilisée sans toutefois que des décompensations futures ne puissent être exclues, pourrait bénéficier au Kosovo d’un suivi psychiatrique adapté. Elle a dès lors ordonné à l’OCPM de prendre les mesures de coordination nécessaires avec les autorités compétentes (notamment le service de l’application des peines et des mesures) et les médecins en Suisse et au Kosovo afin que les autorités kosovares compétentes en matière de suivi de personnes présentant un danger pour leur propre intégrité corporelle et/ou celle de tiers du fait de troubles mentaux soient effectivement informées de la situation et du traitement médical du recourant ainsi que du risque important que représenterait un arrêt de son traitement et qu’elles s’assurent que celui-ci ait un accès à un encadrement médical adéquat pour, notamment, qu’il prenne ses médicaments quotidiennement (ATA/1279/2019 du 27 août 2019 consid. 8 ; cf. également ATA/1852/2021 du 24 mai 2022 consid. 8f et ATA/357/2018 du 17 avril 2018 consid. 9e, dans lesquels la chambre administrative a retenu qu’un recourant souffrant d’un trouble de la personnalité émotionnellement labile et d’une dépendance aux toxiques, respectivement une recourante souffrant d’un état anxieux et dépressif, pourraient tous deux bénéficier de soins psychiatriques adéquats au Kosovo, y compris dans un appartement protégé si nécessaire).

13.         Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l’établissement des faits ; il incombe à celles-ci d’étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l’art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l’étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 précité, ibidem ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.3.1).

Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l’administration de démontrer l’existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b).

14.         En l’espèce, il ressort des documents médicaux versés au dossier que le recourant souffre tout d’abord de problèmes cardiaques ayant nécessité la pose d’un stent. Les derniers examens cardiologiques effectués au mois de juin 2024 sont toutefois rassurants – le recourant étant décrit comme stable et asymptomatique – et se limitent à lui prescrire un suivi régulier ainsi qu’un contrôle de son taux de cholestérol, soit des traitements médicaux que la jurisprudence considère comme disponibles au Kosovo.

S’agissant des rapports médicaux établis par le Dr G______ en 2022, 2023 et 2024, ceux-ci font état d’un trouble dégénératif de la colonne vertébrale avec discopathie étagée, d’une arthrose tibio-talienne du pied gauche et d’une épicondylite chronique du coude gauche. Sans vouloir minimiser ces affections somatiques, force est de constater que les rapports précités ont un contenu presque similaire et ne mettent en évidence aucune dégradation de l’état de santé du recourant. En outre, bien que ces rapports mentionnent que ces affections nécessitent des consultations auprès de spécialistes, voire des hospitalisations et des « interventions invasives », et indiquent qu’une interruption des suivis en cours « atteindrait gravement le recourant dans sa santé et mettrait sa vie en danger », ils n’affirment à aucun moment que les prestations médicales susmentionnées ne seraient pas disponibles au Kosovo. Tel ne semble du reste pas être le cas dès lors que ce pays dispose, conformément à la jurisprudence, des infrastructures permettant de traiter de manière adéquate un large spectre de pathologies. Partant, il ne saurait être retenu que les affections précitées pourraient faire échec à l’exécution du renvoi du recourant, étant ici rappelé que le fait que la qualité des soins au Kosovo ne soit pas la même qu’en Suisse ne saurait être considéré comme un obstacle insurmontable au retour dans ce pays (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_193/2020 du 18 août 2020 consid. 4.2 et l’arrêt cité).

Sur le plan psychique, le recourant présente depuis plusieurs années un état dépressif sévère ayant nécessité une hospitalisation en 2023 et persistant malgré une prise en charge « multidisciplinaire », dont la nature n’a toutefois pas été décrite. Selon le dernier certificat médical versé au dossier, le Dr F______ craint qu’en cas de rupture du lien thérapeutique consécutive à un renvoi au Kosovo, le recourant ne connaisse une dégradation rapide de son état psychique, voire un passage à l’acte auto-agressif, compte tenu du trouble de la personnalité dont il souffre.

Cependant, compte tenu de la jurisprudence restrictive en la matière, et sans vouloir amoindrir les difficultés que pourrait rencontrer le recourant en cas de retour dans son pays d’origine, il y a lieu de considérer que de telles affections psychiques ne sauraient justifier qu’il soit renoncé à son renvoi. Ainsi que le Tribunal administratif fédéral et la chambre administrative l’ont retenu dans plusieurs décisions, le Kosovo dispose depuis plusieurs années d’une infrastructure offrant une prise en charge adéquate des maladies psychiques telles que l’anxiété, la dépression, la schizophrénie ou encore le stress post-traumatique. L’Ambassade de Suisse à Pristina a en outre confirmé à l’OCPM que les médicaments consommés par le recourant sont disponibles sur le marché kosovar. Partant, l’affirmation du recourant selon laquelle les traitements dont il aurait besoin ne seraient pas garantis au Kosovo ne saurait être suivie. Il en va de même de la prétendue inaccessibilité de ces traitements, étant rappelé que la prise en charge est gratuite à l’hôpital public, que la rente d’invalidité dont bénéficie le recourant pourra lui être versée au Kosovo et que celui-ci pourra encore percevoir l’aide sociale en cas d’indigence.

Le fait que la prise en charge dont bénéficiera le recourant dans ce pays n'atteint pas le même niveau qualitatif qu’en Suisse ne constitue pas non plus un motif permettant de renoncer au renvoi. Quant à la rupture du lien thérapeutique avec le Dr F______ et à son effet néfaste sur le fonctionnement psychique du recourant, aucun élément du dossier ne permet de retenir que cet obstacle ne pourrait être surmonté par la prise de mesures en amont permettant de garantir que l’intéressé disposera d’un encadrement médical adéquat dès son arrivée au Kosovo. Le cas échéant, l’OCPM devra tenir compte de ce besoin de coordination lorsqu’il impartira au recourant un nouveau délai de départ pour quitter la Suisse.

Sous réserve de ce qui précède, il convient de retenir que l’exécution du renvoi du recourant est raisonnablement exigible au sens de l’art. 83 LEI, de sorte que l’OCPM n’avait pas à proposer l’admission provisoire du précité au SEM.

Le recours s’avère par conséquent infondé. Il sera dès lors rejeté et la décision attaquée confirmée.

15.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais du même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

16.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 4 septembre 2024 par Monsieur M. A______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 8 août 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière