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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3736/2023

JTAPI/198/2024 du 07.03.2024 ( DOMPU ) , REJETE

Descripteurs : AMENDE;ORDURE MÉNAGÈRE
Normes : LGD.43.al1; RGD.17; règlement LC 21 911.23; règlement LC 21 911.30; règlement LC 21 911.31
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3736/2023 DOMPU

JTAPI/198/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 mars 2024

 

dans la cause

 

A______ Sàrl

 

contre

VILLE DE GENÈVE

 


EN FAIT

1.             A______ Sàrl est une société inscrite au registre du commerce de Genève. Elle a notamment pour but tous services et conseil dans les domaines du sport, de la santé et du bien-être, en particulier le coaching de sportifs de tous niveaux, individuellement ou par groupe. Monsieur B______ en est l'associé gérant avec signature individuelle.

2.             Par décision du 9 octobre 2023, la Ville de Genève (ci-après : la ville), soit pour elle son service voirie-ville propre, a infligé à A______ Sàrl une amende administrative de CHF 400.- en raison du fait que, le lundi 21 août 2023 à 11h15, il avait été constaté, un dépôt illicite de déchets à côté de l’écopoint situé ______[GE], contrevenant aux dispositions légales sur la gestion des déchets.

3.             Par acte du 10 novembre 2023, A______ Sàrl, agissant par M. B______, a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, principalement, à l’annulation de l’amende et, subsidiairement, au prononcé d’un avertissement en lieu et place ou à la réduction de son montant à CHF 200.-, s’agissant d’une première infraction de cette nature.

Le 21 août 2023, souhaitant éliminer des canettes en aluminium, il s’était rendu aux alentours de 06h00 du matin à l’écopoint afin de les jeter dans le conteneur spécialement conçu pour les recueillir. Trouvant le processus de dépôt des cannettes individuelles dans l’ouverture du conteneur en question particulièrement fastidieux, ce d’autant que ces canettes se trouvaient dans un sac qui pourrait facilement être lancé dans le camion de collecte, il avait décidé de déposer ledit sac, pas n’importe où mais soigneusement, à côté dudit conteneur. Il était alors persuadé que sa démarche était respectueuse de l’environnement et des règles en vigueur.

4.             Dans ses observations du 10 juillet 2023, la ville a conclu au rejet du recours.

L'amende était fondée sur un constat d'infraction opéré le lundi 21 août 2023 à 11h15, aux termes duquel un sac poubelle de 110 litres provenant d'une salle de sport gérée par la recourante avait été déposé à même le sol hors des réceptacles sur le centre de tri de la ______[GE].

Les bases légales et réglementaires invoquées figuraient sur ladite amende, étant rappelé que les conditions d'utilisation étaient affichées sur les écopoints et que le dépôt de déchets en dehors des horaires définis et hors des réceptacles était strictement interdit. Les explications données par M. B______ étaient peu convaincantes et encore moins pertinentes. Enfin, le fait qu'il s'agisse d'une première infraction n'était pas de nature à permettre la révision de l'amende administrative en cause, son service ne dispensant jamais d'avertissement dans le domaine des infractions à la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999
(LGD - L 1 20). Ni cette loi ni le règlement de la ville sur la gestion des déchets du 18 décembre 2019 (ci-après : règlement LC 21 911) ne prévoyaient au demeurant la notification d'un avertissement à un contrevenant préalablement à la sanction par l'amende. En tout état, l'infraction avait été dûment constatée et n'était pas contestée. L'amende querellée était ainsi fondée tant en fait qu'en droit et son montant, très proche du minimum légal, correspondait au montant plancher appliqué pour les sociétés.

Elle a joint le constat et les photographies de l'infraction. Il ressort en particulier dudit constat que M. B______ avait reconnu les faits.

5.             Invitée à répliquer, par courrier du tribunal du 12 janvier 2024, la recourante n’a pas donné suite.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par la ville en application de la loi sur la gestion des déchets du 20 mai 1999 (LGD - L 1 20 ; art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 50 LGD).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La LGD a pour but de régler la gestion de l'ensemble des déchets résultant d’activités déployées sur le territoire du canton ou éliminés à Genève, à l'exclusion des déchets radioactifs ; elle constitue la loi d'application des dispositions prévues en matière de déchets par la loi fédérale sur la protection de l'environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et de ses ordonnances d'applications
(cf. art. 1 LGD).

Les communes définissent l’infrastructure de collecte et fixent la fréquence des levées en fonction des besoins (art. 12 al. 2 LGD). Elles peuvent édicter des règlements particuliers (art. 16 al. 4 LGD).

À teneur de l’art. 5 al. 1 du règlement d'application de la loi sur la gestion des déchets du 28 juillet 1999 (RGD - L 1 20.01), les communes sont tenues d’informer la population sur les emplacements et les horaires des collectes sélectives et sur les modes d’élimination des déchets ménagers en vigueur sur leur territoire. À cet effet, elles sont habilitées à édicter des règlements ou directives communaux
(art. 5 al. 2 RGD).

Selon l'art. 17 RGD, les communes peuvent édicter des règlements communaux sur le bon fonctionnement de leurs infrastructures de collecte et sur leur gestion des déchets ménagers (al. 1), ces règlements pouvant prévoir les sanctions et les mesures prévues dans la loi (al. 2).

4.             Le règlement LC 21 911 fixe les modalités de la collecte, du transport et de l’élimination des déchets urbains sur son territoire (art. 1 al. 1). Il s'applique à tous les détenteurs de déchets urbains du territoire de la commune (art. 1 al. 2).

5.             Selon son art. 23, le service en charge de la collecte des déchets met des écopoints à disposition des ménages et des entreprises. Il s’agit d’installations de tri des déchets équipées de réceptacles destinés à la collecte des déchets recyclables, cas échéant des ordures ménagères et assimilées (al. 1).

Il existe 2 types d’écopoints :

a) l'écopoint de base : permet la collecte des déchets recyclables. Il vient compléter les installations de collecte des immeubles (conteneurs à ordures ménagères,
papier-carton et déchets organiques);

b) l’écopoint de quartier : réunit en un seul endroit les installations de collecte des ordures ménagères et des déchets recyclables (al. 2).

Les conditions d’utilisation sont affichées sur les écopoints. Ceux-ci sont utilisables du lundi au samedi de 7h30 à 22h00, et les dimanches et jours fériés de 10h00 à 18h00 (al. 3).

Le dépôt de déchets hors des réceptacles est strictement interdit (al. 4).

Le dépôt de déchets tels que les déchets encombrants, les déchets spéciaux (à l’exception des piles), les déchets de métaux et ferraille, est strictement interdit (al. 5).

6.             Enfin, l’art. 30 al. 1 LC 21 911 stipule qu’il est interdit d’éliminer ou de déposer des déchets sur le territoire de la ville hors des emplacements et des installations aménagées à cet effet et en dehors des horaires définis par le service en charge de la collecte des déchets.

7.             Selon les art. 43 al. 1 LGD et 31 du règlement LC 21 911, est passible d’une amende administrative de CHF 200.- à CHF 400'000.- tout contrevenant :

- à la LGD ;

- aux règlements et arrêtés édictés en vertu de la LGD ;

- aux ordres donnés par l’autorité compétente dans la limite de la LGD et des règlements et arrêtés édictés en vertu de celle-ci.

Les amendes peuvent être infligées tant à des personnes morales qu'à des personnes physiques (art. 43 al. 2 LGD). Il est tenu compte, dans la fixation de l'amende, du degré de gravité de l'infraction et/ou des antécédents du contrevenant (art. 31 al. 2 du règlement LC 21 911).

Les amendes sont infligées par le service compétent de la ville, sans préjudice de plus fortes peines en cas de crimes, délits ou contraventions prévus par la LPE et de tous dommages-intérêts éventuels (art. 31 al. 3 du règlement LC 21 911 ; cf. aussi art. 44 al. 2 LGD). Les contraventions sont constatées par les agents de la force publique et tous autres agents ayant mandat de veiller à l’observation de la loi
(art. 44 al. 1 LGD).

8.             Les amendes administratives prévues sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C'est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/968/2020 du 29 septembre 2020 ; ATA/440/2020 du 16 avril 2019).

En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006
(LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (ATA/968/2020 précité ; ATA/440/2019 précité).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute (ATA/1100/2020 du 3 novembre 2020 consid. 6b; ATA/440/2019 précité et les références citées).

9.             Selon la jurisprudence constante, l'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende (ATA/403/2019 du 9 avril 2019 consid. 7c ; ATA/1277/2018 du 27 novembre 2018 consid. 6d). Le juge ne la censure qu'en cas d'excès (ATA/403/2019 précité ; ATA/1277/2018 précité). Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité garanti par l'art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101) (ATA/968/2020 précité ; ATA/440/2019 précité).

10.         En l'espèce, la recourante ne remet pas en cause, à juste titre, le fait qu'un déchet, soit en l'occurrence un sac poubelle de 110 l, rempli de cannettes en aluminium, a été déposé au niveau de l'écopoint situé ______[GE] en dehors du réceptacle prévu à cet effet. Il ressort du constat d’infraction que son associé-gérant a reconnu les faits. Il est donc manifeste qu'une infraction à la LGD a été commise ce qui justifie, en soi, le prononcé d'une amende administrative à l'encontre de son auteur.

Pour le surplus, la recourante ne saurait valablement tirer argument du fait que le processus de dépôt des cannettes individuelles dans l’ouverture du conteneur en question était fastidieux, que les canettes se trouvaient dans un sac qu’il aurait été facile de lancer dans le camion de collecte, et que ledit sac n’avait pas été déposé n’importe où mais soigneusement à côté dudit conteneur. En effet, il est clairement indiqué dans le LC 21 911 et signalé sur les écopoints qu'il est interdit de déposer des déchets hors des réceptacles. Le fait que l’élimination des canettes serait fastidieuse ne la dispensait ainsi pas de respecter la loi.

Le montant de l'amende de CHF 400.- apparaît enfin proportionné par rapport à l'infraction commise et à la faute de la recourante, dès lors qu'il se situe dans le bas de la fourchette fixée par la loi. Comme le tribunal a déjà eu l'occasion de le relever, il n'est pas nécessaire d'examiner le bien-fondé de la pratique de l'autorité consistant à appliquer un montant d'amende différent selon que la violation de la LGD est le fait d'une personne morale ou d'un particulier (cf JTAPI/1273/2013 du 25 novembre 2013, JTAPI/912/2013 du 23 août 2013). Pour le surplus, la recourante, qui n'a pas jugé utile de répliquer, n’a pas démontré qu’elle aurait des difficultés pécuniaires particulières l'empêchant de s'acquitter d'un tel montant. Elle pourrait, cas échéant, demander un arrangement de paiement à la ville.

11.         Au vu de ce qui précède, l’amende sera confirmée, tant dans son principe que sa quotité et le recours sera rejeté.

12.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 250.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée
(art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 10 novembre 2023 par A______ Sàrl contre la décision de la Ville de Genève du 9 octobre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourant un émolument de CHF 250.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Diane SCHASCA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

Le greffier