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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1709/2023

JTAPI/952/2023 du 04.09.2023 ( ICCIFD ) , IRRECEVABLE

Descripteurs : DÉLAI;DÉCISION D'IRRECEVABILITÉ;SUSPENSION DU DÉLAI
Normes : LIFD.140.al1; LPFisc.49.al1
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1709/2023 ICCIFD

JTAPI/952/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 4 septembre 2023

 

dans la cause

 

A______

 

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

 


 

EN FAIT

1.             Par décision sur réclamation datée du 31 mars 2023 et expédiée sous pli recommandé, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) a confirmé son refus d’exonérer A______ de l’ICC et de l’IFD.

2.             Selon le système du suivi des envois « Track & Trace » mis en place par la Poste suisse, cette lettre recommandée a été distribuée le 3 avril 2023.

3.             Par acte posté le 15 mai 2023, la contribuable a recouru sous la plume de son conseil contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) en concluant à l’annulation de la décision du 31 mars précédent, à ce que le tribunal constate qu’elle n’exerce pas une activité lucrative et à ce qu’il lui soit reconnu le statut d’association sans but lucratif.

4.             Dans sa réponse du 17 juillet 2023, l’AFC-GE a conclu à l’irrecevabilité du recours pour cause de tardiveté.

5.             Par réplique du 25 juillet 2023, la recourante a conclu à la recevabilité de son recours et a demandé qu’un délai lui soit accordé pour répliquer sur le fond.

En substance, son recours se rapportait à une question de constatation de droit, à savoir la reconnaissance de son statut de personne morale à but idéal. Cette « action en constatation de droit » n’entrait donc pas dans le champ de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17), de sorte qu’elle bénéficiait de la suspension des délais.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 49 LPFisc ; art. 140 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11).

2.             Aux termes des art. 140 al. 1 LIFD et 49 al. 1 LPFisc, le contribuable peut s'opposer à la décision sur réclamation de l'autorité de taxation en s'adressant au tribunal dans les trente jours à compter de la notification de la décision attaquée. Ce délai commence à courir le lendemain de la notification. Il est considéré comme respecté si le recours est remis à l'autorité de recours, à un office de poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse à l'étranger le dernier jour ouvrable du délai au plus tard (art. 133 al. 1 LIFD ; art. 41 al. 1 LPFisc).

Selon les art. 133 al. 3 LIFD et 41 al. 3 LPFisc, un recours tardif n'est recevable que si le contribuable établit que par suite de service militaire, de service civil, de maladie, d'absence du pays ou pour d'autres motifs sérieux, il a été empêché de présenter son acte en temps utile et qu'il l'a déposé dans les 30 jours après la fin de l'empêchement.

3.             Les conditions pour admettre un empêchement sont très strictes. La restitution du délai suppose que le contribuable n'a pas respecté le délai légal en raison d'un empêchement imprévisible, dont la survenance ne lui est pas imputable à faute (arrêt du Tribunal fédéral 2C_40/2018 du 8 février 2018 consid. 5.1 et 5.2). Celui-ci peut résulter d'une impossibilité objective ou subjective. Il doit être de nature telle que le respect des délais aurait exigé la prise de dispositions que l'on ne peut raisonnablement attendre de la part d'un homme d'affaires avisé (ATA/463/2018 du 8 mai 2018).

4.             Aux termes de l’art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), les délais en jours fixés par la loi ou par l’autorité ne courent pas du septième jour avant Pâques au septième jour après Pâques inclusivement. Cette règle ne s’applique toutefois pas dans les procédures soumises aux règles de la LPFisc (art. 63 al. 2 let. e LPA).

Selon la jurisprudence, ni la LIFD (arrêt du Tribunal fédéral 2C_89/2015 du 23 octobre 2015 consid. 6.3), ni la LPFisc (ATA/1699/2019 du 19 novembre 2019) ne prévoient de suspension des délais.

5.             Sur le plan cantonal, l’exonération des personnes morales poursuivant des buts de service public ou d’utilité publique est réglée, quant au fond, par l’art. 9 al. 1 let. f de la loi sur l’imposition des personnes morales du 23 septembre 1994 (LIPM - D 3 15). S’agissant de la procédure, l’art. 9 al. 3 LIPM renvoie aux titres IV à VI de la deuxième partie de la LPFisc.

En droit fédéral, l’art. 56 let. g LIFD énonce les conditions de fond de l’exonération. Toutefois, la LIFD ne règle pas la procédure. Les cantons sont donc compétents, dans le cadre des dispositions générales de procédure de la LIFD (art. 104 al. 3) pour régler la procédure de constatation de l’exonération subjective (ou de son refus) et l’étendue de l’exonération dans le cadre des normes de droit matériel (Marco GRETER, Alexander GRETER, Bundesgesetz über die direkte Bundessteuer, 4ème édition, 2022, art. 56, n. 2, p. 1083).

6.             En l’espèce, la recourante soutient que son recours, dans lequel elle conclut à ce que le tribunal constate qu’elle n’exerce pas d’activité lucrative et à ce qu’il lui soit reconnu le statut d’association sans but lucratif, constitue une action en constatation de droit, non soumise à la LPFisc. De ce fait, elle bénéficierait de la suspension des délais.

L’intéressée ne peut être suivie, dès lors que son acte du 15 mai 2023 constitue, d’après son libellé, un recours à l’encontre de la décision du 31 mai 2023 et non une action en constatation de droit. Par ailleurs, la recevabilité de ses conclusions constatatoires paraît douteuse, dès lors qu’elle a également conclu valablement à l’annulation de la décision susmentionnée. En effet, selon un principe général de procédure, les conclusions en constatation de droit ne sont recevables que lorsque des conclusions condamnatoires ou formatrices sont exclues. Sauf situations particulières, les conclusions constatatoires ont donc un caractère subsidiaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_543/2017 du 1er février 2018 consid. 1.3). Au surplus, la question de savoir si la contribuable peut être qualifiée d’association sans but lucratif constitue une question de fond, qui doit être examinée dans le cadre de la procédure d’exonération.

S’agissant de savoir si la recourante peut être exonérée de l’IFD et de l’ICC, il convient de se référer à la LIFD et à la LIPM, la procédure étant réglementée par la LPFisc. La LIFD (art. 140 et ss.) et la LPFisc (art. 44 et ss.) règlent la procédure applicable devant le tribunal, étant précisé qu’aucune de ces deux lois ne connaissent de suspension des délais.

Or, la décision sur réclamation du 31 mars 2023 a été distribuée à la contribuable le 3 avril 2023. La précitée a interjeté recours devant le tribunal le 15 mai suivant, soit au-delà du délai légal de trente jours, étant rappelé que ce délai ne peut être suspendu. Elle ne se prévaut d’aucun empêchement qui l’aurait empêchée de recourir en temps utile. Partant, le présent recours doit être déclaré irrecevable pour cause de tardiveté.

7.             En application des art. 144 al. 1 LIFD, 52 al. 1 LPFisc, 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

 


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare irrecevable le recours interjeté le15 mai 2023 par A______ contre la décision sur réclamation de l'administration fiscale cantonale du 31 mars 2023 ;

2.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

3.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

4.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Yuri KUDRYAVTSEV et Jean-Marc WASEM, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière