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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/4288/2020

JTAPI/452/2021 du 10.05.2021 ( ICC ) , REJETE

Descripteurs : DONATION;PRINCIPE DE LA BONNE FOI;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT;CHANGEMENT DE PRATIQUE
Normes : LDE.163.al1; LDE.163.al2; LDE.166.al2; Cst.8
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4288/2020 ICC

JTAPI/452/2021

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 10 mai 2021

 

dans la cause

 

Monsieur A______

 

contre

 

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

 


 

EN FAIT

1.             Le 19 mars 2020, Monsieur A______ a transmis à l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) six déclarations de donations effectuées en faveur de proches, portant chacune sur un montant de CHF 50’000.-.

2.             Le 5 mai 2020, l’AFC-GE lui a notifié les bordereaux de droits d’enregistrement. Pour chacun d’eux, les droits dus, calculés en quatrième catégorie, s’élevaient à CHF 12’738,25, à savoir CHF 9’922,50 pour les donations en tant que telles, CHF 2’807,35 pour les donations découlant de la prise en charge, par le donateur, des droits d’enregistrement découlant des donations de CHF 50’000.-, et enfin CHF 8,40 à titre d’autres actes et opérations.

3.             Le 14 mai 2020, le contribuable a élevé réclamation contre ces bordereaux.

4.             Par décision du 29 mai 2020, l’AFC-GE l’a rejetée, indiquant qu’en vertu de l’art. 163 al. 2 de la loi sur les droits d’enregistrement du 9 octobre 1969 (LDE - D 3 30), les droits de donations étaient supportés par le donataire. Ainsi, si le donateur prenait volontairement en charge le paiement des droits de donation, en lieu et place du donataire, cela constituait une seconde donation à concurrence des droits, taxable à ce titre.

5.             Le 24 juin 2020, le contribuable a interjeté recours contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal). Il s’est référé à une publication de la chambre des notaires, qui figurait sur le site internet de l’AFC-GE à la date des donations, ainsi qu’à une donation antérieure de sa part, imposée sans considération quant à l’auteur du paiement des droits.

6.             Le 1er octobre 2020, l’AFC-GE lui a remis des avis de taxation rectificatifs : calculés en quatrième catégorie, les droits dus s’élevaient à CHF 9’930,90 par opération, soit CHF 9’922,50 pour les donations en tant que telles et la somme de CHF 8,40 à titre d’autres actes et opérations. Le montant des droits contestés, en CHF 2’807,35, était remboursé. L’AFC-GE a précisé que la prise en charge par le donateur des droits dus sur les donations allait faire l’objet d’une taxation séparée.

7.             Le recours interjeté le 24 juin 2020 a ainsi été retiré.

8.             Le 22 octobre 2020, l’AFC-GE a notifié au contribuable des bordereaux relatifs aux droits supplémentaires, chacun en CHF 2’807,35, motivés par sa prise en charge, en sa qualité de donateur, des droits d’enregistrement.

9.             Le 12 novembre 2020, le contribuable a formé une réclamation, reprenant les arguments de son recours du 24 juin 2020 et ajoutant que la LDE ne contenait pas une disposition applicable au donateur payant les droits dus.

10.         Le 19 novembre 2020, l’AFC-GE a rejeté cette réclamation. Cette taxation était conforme à un changement de pratique intervenu dès le mois de mars 2020 qui était motivé par le fait que lorsque les droits de donation étaient volontairement payés par le donateur, il s’agissait d’une nouvelle donation à concurrence du montant de l’impôt. Si la pratique antérieure ne faisait pas de distinction pour le paiement des droits, ce changement était motivé par une meilleure interprétation de la loi et restait conforme à celle-ci dans la mesure où toutes les donations devaient être obligatoirement enregistrées (art. 11 LDE). Le supplément de droits était de plus clairement spécifié puisque le formulaire de donation mobilière avait été modifié afin de rendre attentif le donateur au fait que la prise en charge des droits pouvait donner lieu à une taxation supplémentaire. La chambre des notaires avait également été avisée de ce changement. Par conséquent, en signant la déclaration de donation, le donateur ne pouvait ignorer que la donation donnerait lieu à un supplément de droits de donation.

11.         Par acte du 16 décembre 2020, le contribuable a recouru contre cette décision sur réclamation auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à ne pas devoir verser les droits d’enregistrement requis.

Il prenait acte du changement de pratique de l’AFC-GE, qui n’avait pas été porté à la connaissance alors qu’il aurait dû lui être communiqué. Il ne pouvait connaître cette nouvelle pratique, n’ayant pas utilisé le nouveau formulaire - dont la formulation était au demeurant ambigüe et sujette à interprétation - pour effectuer ses déclarations de donation et l’autorité intimée n’ayant pas exigé que lesdites déclarations soient effectuées par le biais de ce formulaire. En outre, le texte édité par la chambre des notaires n’était pas retiré du site internet de l’AFC-GE à la date des donations en cause, n’ayant été supprimé que postérieurement. Ses donations ne devaient donc pas être concernées par cette nouvelle pratique, ayant été faites dans les mêmes conditions que celles qui prévalaient jusqu’alors.

Il a produit diverses pièces à l’appui de ses allégations, dont un extrait de la revue financière Bilan non daté.

12.         Dans sa réponse du 18 février 2021, l’AFC-GE a conclu au rejet du recours.

Au début de l’année 2020, elle avait décidé de rétablir une pratique conforme à l’art. 163 al. 2 LDE et de s’assurer qu’elle soit dorénavant appliquée de manière uniforme. Conformément à cette disposition, le donateur qui prenait à sa charge le paiement des droits de donation à la place du donataire effectuait une seconde donation à concurrence du montant de l’impôt. Cette donation dite secondaire, relative aux droits pris en charge par le donateur, ne se réalisait matériellement qu’après réception et paiement des droits relatifs à la donation dite primaire et était taxée dans un deuxième temps, dans le cadre d’un calcul dissocié.

Le 3 mars 2020, l’AFC-GE avait ainsi adopté et mis en ligne sur son site internet une nouvelle version de son formulaire de déclaration de donation mobilière mis à la disposition des contribuables ; il y était demandé au donateur effectuant une donation de préciser, en cochant la case ad hoc, qui de lui-même ou du donataire prenait en charge le montant des droits d’enregistrement dus, alors qu’auparavant, l’annonce de l’identité de la personne s’acquittant des droits d’enregistrement dans le cadre d’une donation n’était pas formellement exigée. De plus, la teneur dudit formulaire n’était pas inexacte. En effet, des impôts supplémentaires étaient dus si les droits étaient pris en charge par le donateur, à l’exception des situations où cette prise en charge n’avait pas d’impact.

Lors d’une séance du 6 mars 2020, elle avait informé la chambre des notaires de Genève de sa nouvelle pratique. Le fait que cette information n’ait pas été relayée simultanément par cette association professionnelle ne saurait lui être reproché, étant relevé que le recourant n’avait pas fait appel aux services d’un notaire. Au surplus, l’AFC-GE n’était pas liée par les publications de la chambre des notaires, ni d’ailleurs par celle de la revue Bilan. Elle n’avait ni à informer personnellement le recourant de son changement de pratique ni à exiger que lui soit remis son nouveau formulaire. En outre, on ne se trouvait pas à proprement parler ici dans le cas d’un changement de pratique, mais bien plus d’une volonté d’appliquer la loi de manière plus juste.

Le recourant n’avait pas prouvé l’existence de cas similaires au sien qui auraient été imposés sans considération de l’auteur du paiement des droits. Depuis début mars 2020, toutes les donations annoncées faisant état du paiement des droits par le donateur étaient traitées de manière identique.

13.         Malgré l’invitation du tribunal, le recourant n’a pas répliqué.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions sur réclamation de l’administration fiscale cantonale (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 179 LDE).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 63 al. 1 et 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Les droits d’enregistrement sont un impôt qui frappe toute pièce, constatation, déclaration, condamnation, convention, transmission, cession et en général toute opération ayant un caractère civil ou judiciaire, dénommées dans la présente loi : « actes et opérations », soumises soit obligatoirement soit facultativement à la formalité de l’enregistrement (art. 1 al. 1 LDE).

Selon l’art. 3 let. h LDE, sont soumis obligatoirement à l’enregistrement les donations et autres avantages semblables que les dispositions du titre IV (donations entre vifs) assujettissent à cette obligation, sous réserve des donations faites aux personnes morales ayant leur siège en Suisse qui sont exonérées des impôts sur le bénéfice et sur le capital, en raison de leur but de service public, d’utilité publique, cultuel, à la Confédération, aux cantons, aux communes et à leurs établissements. Les donations de biens mobiliers faits postérieurement à la constitution de l’institution de prévoyance en faveur du personnel ne sont également soumis à aucun droit.

Ainsi, sous réserve des exceptions susmentionnées, toute disposition entre vifs par laquelle une personne physique ou morale cède, sans contrepartie correspondante, à une autre personne physique ou morale, tout ou partie de ses biens ou de ses droits, en propriété, en nue-propriété ou en usufruit, est, en tant que donation, soumise obligatoirement aux droits d’enregistrement (art. 11 al. 1 LDE).

4.             En vertu de l’art. 163 al. 1 LDE, les droits afférents à tous actes et opérations comportant translation de la propriété, de la nue-propriété ou de l’exercice de l’usufruit de biens meubles ou immeubles sont supportés par les nouveaux propriétaires ou titulaires. Les droits afférents à une soulte dans les actes d’échange sont à la charge du débiteur de celle-ci.

L’alinéa 2 de cette disposition énonce que les droits afférents à tous les autres actes et opérations sont supportés par les parties auxquelles ces actes et opérations profitent.

En matière de donations, le donateur est subsidiairement responsable du paiement des droits, intérêts et frais (art. 166 al. 2 LDE).

5.             La prise en charge de l’impôt sur les donations par le donateur lui-même constitue explicitement une donation dans de nombreux cantons et augmente l’impôt dans un calcul itératif (art. 99 al. 3 StG AI ; art. 144 al. 6 StG AR ; art. 24 al. 2 LSucc NE ; § 18 al. 3 ESchG TG ; § 151 al. 5 StG SG ; art. 10 ESchG SH ; § 181 al. 3 StG ZG ; § 24 al. 3 ESchG ZH). Il convient toutefois de distinguer le paiement involontaire de l’impôt sur les donations en raison d’une responsabilité. Dans ce cas, d’une part, l’intention nécessaire de faire une donation fait défaut ; d’autre part, la partie responsable a une prétention correspondante à transmettre l’impôt (même si cela risque d’être difficile à mettre en œuvre dans la plupart des cas de responsabilité) (Roman SIEBER/Markus OEHRLI, Kommentar zum Schweize-rischen Steuerrecht Erbschafts- und Schenkungssteuerrecht, 2020, n. 25, p. 150).

6.             Conformément aux dispositions précitées, le donateur qui prend volontairement à sa charge le paiement des droits de donation à la place du donataire effectue une seconde donation à concurrence du montant de l’impôt, étant précisé qu’il ne s’agit dans ce cas pas d’une situation de responsabilité solidaire du donateur pour le paiement des droits au sens de l’art. 166 al. 2 LDE. La nouvelle pratique de l’autorité intimée est ainsi conforme à la LDE, ce qui n’est en soi pas contesté.

7.             Le recourant requiert toutefois que cette nouvelle pratique ne lui soit pas appliquée.

8.             La notion de pratique administrative désigne la répétition constante et régulière dans l’application d’une norme par les autorités administratives. De cette répétition peuvent apparaître, comme en ce qui concerne la jurisprudence, des règles sur la manière d’interpréter la loi ou de faire usage d’une liberté d’appréciation. Elle vise notamment à résoudre de manière uniforme des questions de fait, d’opportunité ou d’efficacité. Cette pratique ne peut être source de droit et ne lie donc pas le juge, mais peut néanmoins avoir indirectement un effet juridique par le biais du principe de l’égalité de traitement (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2901/2019 du 2 avril 2020 consid. 8.1 ; ATA/1174/2020 du 24 novembre 2020 consid. 8a).

Un changement de pratique administrative doit reposer sur des motifs sérieux et objectifs, c’est-à-dire rétablir une pratique conforme au droit, mieux tenir compte des divers intérêts en présence ou d’une connaissance plus approfondie des intentions du législateur, d’un changement de circonstances extérieures, de l’évolution des conceptions juridiques ou des mœurs. Les motifs doivent être d’autant plus sérieux que la pratique suivie jusqu’ici est ancienne. À défaut, elle doit être maintenue (ATF 145 II 270 consid. 4.5.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_28/2019 du 23 décembre 2019 consid. 5.1 ; ATA/1174/2020 du 24 novembre 2020 consid. 8b et les références citées).

Lorsque ces motifs sont donnés et pour autant que la nouvelle pratique s’applique de façon générale à tous le cas non encore traités au moment de son adoption, un changement de pratique ne contrevient ni à la sécurité du droit, ni à l’égalité de traitement et ce, bien qu’il en résulte inévitablement une différence de traitement entre les cas anciens et les cas nouveaux (cf. ATF 125 II 152 consid. 4c/aa ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_283/2010 du 17 décembre 2010 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2901/2019 du 2 avril 2020 consid. 8.1).

De jurisprudence constante, un changement de pratique non fondé sur une modification de la loi doit s’appliquer immédiatement à tous les cas pendants (ATF 122 I 57 consid. 3c ; arrêt du Tribunal fédéral I 411/06 du 4 décembre 2006 consid. 4.1.1). Cela étant, si un changement de pratique justifié vaut en général immédiatement et pour toutes les procédures pendantes, le droit à la protection de la bonne foi, qui découle de l’art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), doit néanmoins être pris en considération et peut s’opposer à l’application immédiate de la nouvelle pratique lorsque celle-ci est défavorable à l’administré. Ainsi, selon les cas, la nouvelle pratique ne peut être appliquée qu’après avoir été préalablement annoncée ; il en va ainsi en matière de droits des parties dans la procédure (arrêt du Tribunal administratif fédéral A-2901/2019 du 2 avril 2020 consid. 8.2).

9.             Valant pour l’ensemble de l’activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l’administration doit s’abstenir de toute attitude propre à tromper l’administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_18/2015 du 22 mai 2015 consid. 3). Il protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration (ATF 137 II 182 consid. 3.6.2). 

10.         Aux termes de l’art. 8 al. 1 Cst., tous les êtres humains sont égaux devant la loi. Une décision ou un arrêté viole cette garantie lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou qu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances. Il y a notamment inégalité de traitement lorsque l’État accorde un privilège ou une prestation à une personne, mais les dénie à une autre qui se trouve dans une situation comparable (ATF 140 I 201 consid. 6.5.1 ; ATA/1174/ 2020 du 24 novembre 2020 consid. 8d et les références citées).

La protection de l’égalité et celle contre l’arbitraire (art. 9 Cst.) sont étroitement liées. Une décision ou un arrêté est arbitraire lorsqu’il ne repose sur aucun motif sérieux et objectif ou n’a ni sens ni but. L’inégalité de traitement apparaît comme une forme particulière d’arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l’être de manière semblable ou inversement (ATF 141 I 235 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_28/2019 du 23 décembre 2019 consid. 6.1).

11.         Le principe de la légalité de l’activité administrative (art. 5 al. 1 Cst.) prévaut en principe sur celui de l’égalité de traitement. L’administré ne peut ainsi, en règle générale, pas se prétendre victime d’une inégalité de traitement lorsque la loi est correctement appliquée à son cas, alors qu’elle l’aurait été faussement, voire pas appliquée du tout dans d’autres cas semblables. Cela présuppose cependant, de la part de l’autorité dont la décision est attaquée, la volonté d’appliquer correctement à l’avenir les dispositions légales en question ; le citoyen ne peut prétendre à l’égalité dans l’illégalité que s’il y a lieu de prévoir que l’administration persévérera dans l’inobservation de la loi (ATF 139 II 49 consid. 7.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_467/2019 du 24 janvier 2020 consid. 5.2 ; 1C_28/2019 du 23 décembre 2019 consid. 6.1 ; ATA/508/2020 du 26 mai 2020 consid. 6c).

12.         En l’espèce, comme vu ci-devant sous consid. 6, le tribunal constate que par son « changement de pratique » instituée au début du mois de mars 2020, l’AFC-GE ne fait que se conformer à la législation en vigueur.

Ce changement de pratique administrative repose donc sur des motifs sérieux et objectifs, puisqu’il rétablit une pratique conforme au droit. Partant, il doit valoir immédiatement, même pour les procédures pendantes, ce qui n’est d’ailleurs pas le cas du recourant, celui-ci n’ayant effectué les donations avec prise en charge des droits d’enregistrement qu’une quinzaine de jours après la décision de changer la pratique en cause.

Au surplus, le grief du recourant selon lequel ce changement de pratique viole les principes d’égalité de traitement et le principe de la bonne foi doit être rejeté.

D’une part, l’AFC-GE a confirmé appliquer sa nouvelle pratique de manière systématique depuis son adoption, et aucun élément ne permet de mettre en doute cette affirmation. Le fait que des donations antérieures à l’application de la nouvelle pratique aient été traitées selon l’ancienne pratique, chose en soi logique, n’implique aucune inégalité de traitement selon la jurisprudence, et cela même si un changement de pratique entraîne inévitablement une différence de traitement entre les cas anciens et les cas nouveaux.

D’autre part, il ne résulte pas des éléments au dossier que l’AFC-GE aurait donné au recourant des assurances ou une promesse concrète quant au fait qu’il ne serait pas taxé sur la donation résultant de la prise en charge des droits d’enregistrement. À cet égard, le fait que la chambre des notaires, informée par l’AFC-GE de ce changement de pratique, n’ait pas communiqué avec célérité cette information ne peut être reproché à l’autorité intimée, laquelle n’est d’ailleurs pas tenue par les informations délivrées par cette association professionnelle. Il en va de même pour la revue Bilan, qui a certes publié une information correcte à l’époque, mais qui n’a, semble-t-il, pas informé ses lecteurs du changement de pratique intervenue début mars 2020.

Enfin, une annonce, certes indirecte, a eu lieu par la mise à disposition d’un nouveau formulaire. Cette « déclaration de donation mobilière », que l’on peut trouver en ligne sur Internet, est formulée de la manière suivante : « La prise en charge des droits par le donateur peut également donner lieu à un supplément de droits de donation ». Certes, sa formulation manque de clarté car il ne s’agit en réalité pas d’un « supplément » de droits de donation mais d’un nouvel impôt ; par ailleurs, elle laisse penser que le « supplément de droits de donation », ou « nouvel impôt », en cas de prise en charge des droits d’enregistrement par le donateur n’est qu’une possibilité. L’autorité intimée est ainsi invitée à modifier la rédaction de cette formule. Ce qui précède n’est toutefois pas relevant dans notre cas puisque, comme il le reconnaît, ses déclarations de donation n’ont pas été opérées par le biais de ce formulaire - dont il ignorait l’existence. Il n’y a au demeurant pas lieu de s’interroger si la nouvelle pratique pouvait être appliquée sans avoir été préalablement annoncée, puisqu’elle a été adoptée et est entrée en vigueur alors que les donations en cause n’avaient pas encore eu lieu. Au vu de ce qui précède, le changement de pratique de l’AFC-GE étant justifié et le recourant n’ayant pas démontré que le principe de l’égalité de traitement n’avait pas été respecté, le recours sera rejeté.

13.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 700.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

 

1.             déclare recevable le recours interjeté le 16 décembre 2020 par Monsieur A______ contre la décision sur réclamation de l’administration fiscale cantonale du 19 novembre 2020 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 700.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant: Michèle PERNET, présidente, Pascal DE LUCIA et Philippe FONTAINE, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Michèle PERNET

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière