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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/26884/2018

CAPH/26/2023 du 07.03.2023 sur JTPH/80/2022 ( OO ) , REFORME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26884/2018-5 CAPH/26/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud’hommes

DU LUNDI 6 MARS 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______ [GE], appelant d’un jugement rendu par le Tribunal des prud’hommes le 17 mars 2022 (JTPH/80/2022), comparant par
Me Sara GIARDINA, avocate, Avocats-Romands Sàrl, Route de Divonne 44,
1260 Nyon, en l’Étude de laquelle il fait élection de domicile,

 

et

Madame B______, domiciliée ______, France, intimée, comparant par
Me Marc LIRONI, avocat, LIRONI AVOCATS SA, Boulevard Georges-Favon 19, Case postale 423, 1211 Genève 4, en l’Étude duquel elle fait élection de domicile,

 


EN FAIT

A.           a. Par jugement JTPH/80/2022 du 17 mars 2022, le Tribunal des prud’hommes, groupe 5, a, à la forme, déclaré recevables la demande formée le 1er mars 2019 par B______ contre A______ (ch. 1 du dispositif), ainsi que la demande reconventionnelle formée le 12 juillet 2019 par A______ contre B______ (ch. 2).

Statuant au fond, le Tribunal a condamné A______ à payer à B______ la somme brute de fr. 3’433,30, plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er juillet 2018, sous déduction des charges sociales et légales (ch. 3 et 4) ; il a condamné A______ à payer à B______, en outre, la somme nette de fr. 59’645,20 plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le 1er juillet 2018 (ch. 5), et débouté A______ de ses conclusions (ch. 6).

Statuant sur les frais, le Tribunal a arrêté les frais de procédure à fr. 1’070.- (ch. 7), les a répartis à hauteur de fr. 430.- à charge de B______ et de fr . 640.- à charge de A______ (ch. 8) ; il les a compensés avec l’avance de frais de fr. 1’070.- effectuée par B______ restant acquis à l’Etat de Genève (ch. 9), condamné A______ à verser à B______ la somme de fr. 640.- (ch. 10), dit qu’il n’était pas alloué de dépens (ch. 11) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 12).

b. Ce jugement a été notifié aux parties, en leurs domiciles élus respectifs, par plis recommandés du 17 mars 2022 et reçus des destinataires le 18 mars 2022 (dossier judiciaire).

B.            a. Par acte expédié le 29 avril 2022 à la Cour de justice et réceptionné au Greffe le 30 avril 2022, A______ a formé appel contre le jugement précité dont il requiert l’annulation des chiffres 5, 6, 8 et 10 du dispositif, sa confirmation pour le surplus, et déboutement de B______ de toutes ses conclusions, et à la mise à la charge de l’intimée des frais arrêtés sous ch. 7 du jugement (liasse I).

L’acte d’appel était accompagné d’un chargé comprenant le jugement entrepris (liasse Ia).

b. Dans sa réponse du 10 juin 2022, B______ a conclu au déboutement de A______ de toutes ses conclusions et à la condamnation de l’appelant en tous les frais et dépens ; elle a, en outre, formé appel joint et conclu à la réforme du jugement dans la mesure où il ne donnait pas pleinement droit aux conclusions qu’elle avait prises en première instance ; en conséquence, elle a conclu à ce que A______ fût condamné à lui payer la somme nette de fr. 29’250.—à titre d’indemnité pour tort moral, plus intérêts à 5% dès le 30 juin 2018, et à ce que l’appelant fût condamné, en outre, à lui payer la somme nette de fr. 9’750.— [sic] avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 2018, à titre d’indemnité pour licenciement abusif, soit en sus du montant retenu (i. e. fr. 19'500.--) à ce titre dans le jugement ; pour le surplus, B______ a conclu à la confirmation du jugement (liasse II).

L’intimée a joint à sa réponse un chargé de pièces comprenant, outre la procuration, une Ordonnance de classement du Ministère public de Genève du 2 juin 2022 dans la procédure P/1______/2020 (liasse II a).

c. Par acte du 15 juillet 2022, A______ fourni une « Réponse à l’appel joint et réplique ». Il a conclu au déboutement de B______ de toutes ses conclusions, tant de celles prises en guise de réponse à l’appel, que de celles prises dans le cadre de l’appel joint (liasse III). L’acte était accompagné d’une copie d’un courrier du Ministère public du 2 juin 2022, adressé à B______ dans la cause P/1______/2020, intitulé « Ordonnance de non-entrée en matière ».

d. Par pli du 13 septembre 2022, B______ a fait parvenir à la Cour une écriture intitulée « Mémoire duplique et Réplique sur appel joint » (liasse IV).

e. Par pli du 14 octobre 2022, A______ a adressé à la Cour une « Duplique sur l’appel joint » (V).

f. B______ a encore, par lettre du 26 octobre 2022, exercé son droit inconditionnel à la réplique (liasse VII).

g. Par pli du 15 novembre 2022, la Cour a informé les parties que la cause était gardée à juger (dossier judiciaire).

C.           La Cour retient, sur le vu du dossier et des conclusions prises en appel, les éléments de faits pertinents suivants :

a.                      Par contrat de travail écrit du 13 janvier 2015, A______, ophtalmologue, a engagé B______, née le ______ 1982, ressortissante française, frontalière, domiciliée à D______, en qualité d’assistante à 80% (sans autre précision) à compter du 1er février 2015, pour un salaire annuel brut de fr. 41’600.-, treizième salaire inclus, versé en 12 mensualités (pièce 3 dem).

Le contrat ne précisait pas le lieu du travail, mais, pour les parties, il était clair que le lieu de travail habituel était à Genève, à no. ______, rue 2______.

Les rapports de travail ont commencé le 1er février 2015.

b.                      En sus de son cabinet au centre de Genève (rue 2______), A______ exerçait son activité dans trois différents cabinets en France voisine, c’est-à-dire à F______ et G______ (Département de I______), et à J______ (K______). Il exploitait le cabinet à J______ au travers d’une Société d’Exercice Libéral à Responsabilité Limitée (SELARL), de droit français, dont il était l’administrateur unique et ayant-droit unique.

c.                       B______ était appelée, dès février 2015, à suivre – avec son véhicule privé - le médecin lorsqu’il devait recevoir des clients en ses cabinets en France.

d.                      Par avenant du 30 juin 2015, le taux d’activité de B______ a été augmenté à 100% (sans autre précision) pour un salaire annuel brut de fr. 52'000.-, treizième inclus, soit fr. 4'333,33 brut par mois, dès le 1er juin 2015, puis, par un avenant du 12 juin 2017, à fr. 4'875.—brut, treizième inclus, à compter du 1er mai 2017 (pièces 3b et 3c dem).

e.                       Par e-mail du 3 mai 2017 adressé à A______, B______ a sollicité la « revalorisation » de son salaire à hauteur de « fr. 5'500.- net [sic] /mois (pièce 22 dem).

Cette augmentation se justifiait, selon elle, « au regard de [s]es compétences, des missions demandées (avec frais de déplacements engagés, non remboursées à ce jour, de la charge de travail, de [s]on investissement irréprochable, et du marché ».

f.                       B______ tenait, de février 2015 jusqu’à fin 2017 un relevé minutieux de ses déplacements professionnels, effectués avec son véhicule privé (pièce-liasse 13 dem).

Il en ressort qu’elle avait effectué 216 déplacements professionnels de son domicile à J______, 167 déplacements de son domicile à F______ 45 déplacements de son domicile à G______, et un déplacement à L______ (cf. pièces 1 dem et pièce-liasse 13 dem).

Elle remettait, à son employeur, à intervalles réguliers, des « Notes de frais de déplacements (véhicule privé) » mensuelles, lesquelles indiquaient, entre autres, le kilométrage (ventilé selon destination, et comportant le total mensuel) parcouru pour les déplacements, aller-retour, de son domicile à Genève, à F______, à G______ et à J______ (pièce-liasse 13 dem).

Ces notes de frais, exprimées, à partir du 1er janvier 2016, en francs suisses, se fondaient sur une indemnité kilométrique de fr. 0,70, y indiquée.

Dans la période considérée, elle avait, selon ces relevés, parcouru un total de 51'701 km (pièce-liasse 13 dem), ce qui débouchait, au tarif kilométrique mentionné, sur un montant de fr. 36'190,7 (et selon ses calculs à elle, à fr. 37'267,70 (Demande, p. 36).

Ces notes de frais, bien que non contestés dans leur principe, ne lui ont pas été réglées.

Un montant de Fr. 174,74 lui avait cependant été versé, à titre de « frais », sans autre précision, en sus du salaire (net) du mois de mai 2015, qui s’élevait à Fr. 2'984,80 net, et ce, directement sur son compte auprès de M______ (relevé de compte du 1. 5 – 31. 5. 2015 = pièce 19 dem p. 2).

A______ re-facturait, moyennant une indemnité kilométrique forfaitaire de 0,574 euros, les déplacements professionnels de B______ de D______ à J______ à sa société, N______ Selarl – laquelle lui réglait, à lui, les montants y afférents (pièce – liasse 17 dem).

B______ s’était rendu compte qu’une autre employée « de A______ » - recte : une employée de sa société N______ Selarl (cf. pièce 20 dem), à savoir O______ - , s’était vu, elle, rembourser ses notes de frais déplacements professionnels.

g.                      En date du 18 janvier 2018, les parties ont eu un entretien de travail au cours duquel ont été évoquées les conditions pour la poursuite de la collaboration. B______ avait refusé de continuer d’effectuer les déplacements sur les sites en France tant qu’elle n’était pas défrayée pour ses frais de déplacement, entre autres (cf. pièce 5 dem, p. 11).

A______ a évoqué des modifications concernant le poste de travail de B______, relatives notamment à son taux d’activité, pour diminuer ses frais (pièces 26 et 29 dem).

h.                      B______ a été en incapacité de travail pour cause de maladie du 24 janvier 2018 au 19 avril 2018 (pièces-liasse 3d à 3f dem).

i. Le 7 février 2018, A______ a fait parvenir, par sa fiduciaire, à B______, en pièce jointe à un e-mail, « comme convenu » une proposition d’avenant au contrat de travail (pièce 26 dem).

Selon cette proposition d’avenant, le taux d’activité de l’employée serait ramené à 50%, « soit 21 heures par semaine », pour un salaire mensuel brut de fr. 2'438.- (treizième inclus), et cela avec effet au 1er février 2018 (pièces 26, 26bis dem).

Par e-mail – réponse du 7 mai 2018 toujours, B______ a signifié à A______ que « rien n’avait été convenu », et qu’elle attendait toujours, par écrit, « les différentes propositions [qu’il] lui avait faites lors de l’entretien du 18 janvier 2018 (pièce 26 dem). L’envoi de sa fiche de salaire pour le mois de décembre 2017 ainsi que de son certificat de salaire 2017 était également requis.

j.                        Par courrier du 9 février 2018, A______ a réclamé de son employée la restitution de certains documents, ainsi que des moyens de paiement en sa possession (chéquiers, documents administratifs, divers éléments comptables) (pièce 27 dem).

Il était précisé que si B______ ne s’exécutait pas dans un délai de sept jours, les « mesures nécessaires » seraient prises en vue de récupérer ce qui appartenait à l’entreprise.

Par courrier du 22 février 2018, B______ a renvoyé le chéquier de l’entreprise à son employeur, en le priant, une nouvelle fois, de lui transmettre son certificat de salaire 2017, ainsi que ses fiches de salaire pour les mois de décembre 2017 et janvier 2018 (pièce 27bis dem).

Par courrier du 2 mars 2018, B______ a mis son employeur en demeure de lui verser son salaire du mois de février 2018 (pièce 28 dem). Une relance aura été adressée à ce dernier en date du 7 mars 2018 (pièce 28bis dem).

k.                      En date du 25 avril 2018, A______, référençant un « entretien de ce jour », a résilié le contrat de travail de B______ avec effet au 30 juin 2018 (pièce 4 dem).

Par lettre manuscrite du 3 mai 2018, B______ a demandé à A______ « de bien vouloir me justifier par écrit vos motifs de licenciement qui ne figurent pas dans votre courrier » (pièce 30 dem).

Elle a réclamé son salaire du mois d’avril 2018 et elle lui a également donné acte de ce que, selon « l’entretien du 25 avril 2018 », elle était libérée de ses obligations (pièce 30 dem).

l. Par courrier du 22 mai 2018 adressé à B______, A______ a indiqué que les motifs du licenciement étaient liés à la restructuration de l’entreprise ; celle-ci « ne peut malheureusement plus supporter la charge financière d’une assistante privée à plein temps. De plus, la restructuration a provoqué une répartition des tâches différente et rendu ce poste obsolète » (pièce 30bis dem).

m.                    Par lettre du 30 mai 2018, « remise en main propre », B______ a adressé à A______ les lignes suivantes (pièce 8 dem) :

« Docteur,

Je fais suite à votre courrier remis en main propre le 24/05/2018 dans lequel vous m’énoncez les motifs de mon licenciement.

Par la présente, je conteste ces motifs. »

La suite de ce courrier concerne des souhaits de voir modifier le certificat de travail. Il devait énoncer comme tâches assumées les suivantes : Gestion de projet, Gestion de personnel, Gestion de la patientèle, Assistance juridique, Gestion comptable, Gestion administrative, Gestion communication/marketing et Assistance personnelle . La lettre se termine par la phrase « En vous remerciant d’avance de votre retour avec les corrections. Bien cordialement ».

n.                      Par un courrier détaillé de son conseil du 24 août 2018, B______ a mis en demeure A______ d’exécuter diverses prestations chiffrées en lien avec leurs rapports contractuels, en particulier le remboursement des frais professionnels encourus durant sa période de travail (frais téléphoniques, kilométriques, de parking, montants avancés pour le cabinet), dès lors qu’à partir du mois de mai [sic] 2015, elle avait dû se rendre, à sa demande, à de nombreuses reprises sur des sites en France avec son véhicule personnel. Elle a également fait valoir que le congé était abusif puisqu’il était consécutif à son refus de se rendre sur les sites français tant que les frais professionnels qu’elle avait engagés depuis le début des rapports de travail ne lui seraient pas remboursés (pièce 5 dem).

PROCEDURE

A.           En date du 5 novembre 2018, B______ a déposé au greffe du Tribunal des prud’hommes une Requête en conciliation à l’encontre de A______, concluant au paiement d’un montant total de fr. 106'764,66 pour diverses créances salariales, ainsi qu’à titre d’indemnité pour tort moral et résiliation abusive.

Une audience de conciliation a eu lieu le 13 décembre 2018, sans succès et l’autorisation de procédé a été délivrée le jour même.

B.            Par demande déposée au greffe du Tribunal des prud’hommes le 1er mars 2019, B______ a assigné A______ en paiement d’une somme totale de fr. 106'764,66 plus intérêts moratoires à 5% l’an dès le « 30 » juin 2018, avec suite de frais et dépens. Ladite somme se décompose comme suit :

-          fr. 1'733,40 brut, à titre de solde de salaire de juin et juillet 2015 ;

-          fr. 1'344,84 brut, à titre de solde de salaire pour le mois de juin 2018 ;

-          fr. 4'214,61 net, à titre de remboursement de ses frais téléphoniques professionnels ;

-          fr. 36'267,70 net, à titre de remboursement de ses frais kilométriques professionnels ;

-            fr. 2'270,19 net, à titre de remboursement de ses frais de parking professionnels ;

-            fr. 1'089,08 brut, à titre d’indemnisation des heures de travail supplémentaires effectuées ;

-            fr. 1'344,84 brut, à titre d’indemnisation des jours fériés et dimanches travaillés ;

-            fr. 29'250.- net, à titre d’indemnité pour tort moral ;

-            fr. 29'250.- net, à titre d’indemnité pour licenciement abusif.

Le total des prétentions (valeur litigieuse) s’élevait ainsi à Fr. 106'764,66.

La demanderesse a également conclu à la délivrance d’un certificat de travail conforme à sa pièce 8 dem, d’un certificat de salaire pour l’année 2018, ainsi que d’un bulletin de salaire exact pour le mois de juin 2018.

En substance, la demanderesse a allégué que l’avenant au contrat de travail qu’elle avait signé avec effet au 1er juin 2015 prévoyait un salaire mensuel brut de fr. 4'333,35. Or, elle n’avait reçu que fr. 3'466,65 brut pour les mois de juin et juillet 2015. Un solde de fr. 1'733,40 lui restait donc dû. S’agissant du mois de juin 2018, elle avait constaté que six jours de congé lui avaient été retenus, diminuant d’autant son salaire, alors qu’elle n’avait pris aucun jour de vacances en 2018. Par conséquent, un solde de fr. 1'344,84 lui était dû.

S’agissant du remboursement des frais professionnels, en sus de ses tâches au sein du cabinet situé à Genève, le défendeur avait exigé d’elle qu’elle se rende régulièrement sur les sites des trois autres cabinets ouverts en France, respectivement à F______, à G______ et à J______. Elle avait eu pour tâches de superviser l’ouverture et l’organisation interne des quatre cabinets et devait se déplacer rapidement d’un site à l’autre. Il était également arrivé que le défendeur lui demande de se déplacer à Genève pour ses affaires personnelles.

Faute de voiture de fonction, elle n’avait eu d’autres choix que d’utiliser quotidiennement son véhicule personnel, car même lorsqu’elle se rendait sur son lieu de travail à Genève, le défendeur comptait sur elle pour, si besoin, se déplacer rapidement d’un cabinet à un autre. Par conséquent, elle avait dû parquer son véhicule à Genève pour pouvoir l’utiliser en cas de besoin.

Dès le mois de mai 2015, elle avait en outre joué un rôle central dans la création et le lancement du cabinet N______ Selarl à J______. Elle avait assumé seule l’intégralité des frais kilométriques et de parking sans recevoir de remboursement de son employeur, lequel avait pourtant facturé à cette société, qui lui appartenait, ses interventions à elle, sur la base de Euros 60.-/heure ainsi que les frais kilométriques. S’agissant des frais de déplacement à J______ la concernant, le défendeur avait perçu Euros 13'215,77, soit Fr. 15'025,70 à tout le moins. Selon la méthode de calcul en vigueur, elle avait, durant son contrat de travail, assumé seule des frais kilométriques à hauteur de fr. 36'267,70, ainsi que de fr. 2'270,19 de frais de parking.

A l’appui de ses allégués, la demanderesse a notamment produit les pièces et pièces-liasses suivantes (classeur fédéral gris) :

-          un tableau récapitulatif des frais professionnels encourus durant les rapports de travail, faisant état notamment de fr. 36'267,70 à titre de frais kilométriques, fr. 2'270.- de frais de parking et fr. 4'214,61 de frais d’abonnement téléphonique (pièce 1 dem) ;

-          des relevés de présence pour notamment les mois de mars et avril 2017, à teneur desquels l’on relève 43,75 heures de travail du 13 au 18 mars 2017, 55,75 heures du 3 au 8 avril 2017, et 48,75 heures du 10 au 15 avril 2017 (pièce 9 dem) ;

-          un e-mail adressé au défendeur le 2 décembre 2015, à teneur duquel elle sollicitait le remboursement des frais kilométriques encourus dans le cadre de l’accomplissement de son travail pour la période de mai à fin novembre 2015, ce qui représentait un total de fr. 5'759,60 (soit 8'228 km X fr. 0,70/km) (pièce 18 dem) ;

-          des « notes de frais de déplacements » pour la période allant de février 2015 à décembre 2017 sur lesquelles figurent notamment la date et le lieu de déplacement, le nombre de kilomètres parcourus, ainsi que les frais de parking/autoroute et repas. S’agissant des lieux de déplacements, il s’agit de « 2______/Genève », « F______ » et « G______ » (pièces-liasse 13 dem) ;

-          ses relevés de compte bancaire (Q______) pour la période de février 2015 à décembre 2017, dont il ressort qu’elle a dû assumer mensuellement des frais d’essence substantiels, ainsi que des tickets du parking R______, à Genève, pour la période de juillet à décembre 2016 (pièces 14 à 16 dem) ;

-          ses relevés de compte auprès de M______ allant de mars 2016 à avril 2017, attestant qu’elle avait déboursé mensuellement des frais de parking à Genève s’élevant à plusieurs dizaines de francs à chaque fois (pièce 19 dem) ;

-          des relevés de frais mensuels établis par A______ à l’attention de sa société N______ Selarl, pour la période allant de mai 2015 à décembre 2017, attestant qu’il avait facturé mensuellement à sa société des « frais de déplacements » de son employée à hauteur de Euros 0,574 le kilomètre (pièce 17 dem) ;

-          des extraits de divers échanges de conversation via WhatsApp entre elle et le défendeur, dont il ressort que des échanges à caractère professionnel avaient lieu en dehors des heures de travail, en particulier le soir, ainsi que les week-ends (pièce 10 dem).

Concernant les frais téléphoniques, la demanderesse a allégué qu’elle s’était vu contrainte, afin d’éviter des frais de « hors forfait » exorbitants, de souscrire un abonnement téléphonique international, afin de pouvoir être joignable tout au long de la journée. Le défendeur lui avait écrit et téléphoné durant les rapports de travail sur ce téléphone personnel afin de lui donner diverses instructions. Les frais encourus à ce titre se sont élevés à fr. 4'214,61.

S’agissant des heures supplémentaires, elle a allégué qu’il avait été convenu oralement qu’elle ne travaillerait pas plus de 40 heures par semaine, conformément aux horaires usuels d’ouverture des cabinets médicaux. Durant la semaine du 20 mars 2017, elle avait dû effectuer 3,5 heures supplémentaires pour les besoins du cabinet, suite à l’ouverture d’un nouveau centre de consultation. En avril 2017, ses heures supplémentaires s’étaient élevées à 27,59 heures. Elle avait donc droit au paiement de 31,09 heures, majorées d’un quart du salaire au minimum, soit fr. 1'089,08. En outre, elle avait travaillé le dimanche 10 mai 2015, sur le site du cabinet N______, ainsi que les jours fériés des 14 mai 2015, 10 septembre 2015 et 8 septembre 2016. Partant, elle avait droit au paiement de trois jours fériés et d’un dimanche, majoré de 50%, soit fr. 1'344,84.

Par ailleurs, le défendeur n’a pas protégé sa personnalité dans la mesure où il n’avait jamais daigné lui rembourser le moindre centime de ses frais professionnels, alors même que ceux-ci avaient été remboursés par sa société N______ Selarl à hauteur de fr. 15'205,70. En outre, elle avait constaté que les frais professionnels d’une autre employée « du défendeur » - O______ – étaient, eux, remboursés.

A partir de décembre 2017, après avoir annoncé au défendeur qu’elle ne pourrait pas revenir travailler sur les sites français, tant que ses frais kilométriques ne lui seraient pas remboursés, ce dernier avait tout mis en œuvre pour qu’elle ne puisse plus travailler. Il avait notamment annoncé aux responsables des sites de J______ et de G______ qu’elle n’interviendrait dorénavant plus en France. Il avait également écrit à S______ afin de l’informer de sa destitution et de lui donner l’ordre de ne dorénavant plus correspondre avec elle.

Enfin, le licenciement qui lui avait été notifié découlait, à l’évidence, de son refus de travailler en France tant que ses frais professionnels resteraient impayés. Le motif du congé était donc abusif.

C.           Dans son mémoire de réponse du 12 juillet 2019, le défendeur a conclu, principalement, au déboutement de la demanderesse de toutes ses conclusions, avec suite de frais et dépens. Sur demande reconventionnelle, il a conclu à la restitution immédiate des clés du cabinet N______ Selarl à J______, de tous document et des talons de chèques au nom de cette société, ainsi que des talons de chèques à son nom, sous la menace de la peine d’amende prévue par l’art. 292 CPS.

En substance, le défendeur a admis que la demanderesse avait été amenée à se déplacer dans le cadre de son emploi en qualité d’assistante, étant précisé que les parties avaient également une relation amicale et que certains services rendus l’avaient été à ce titre. Elle avait notamment été appelée à se rendre sporadiquement sur le site de F______ qui n’était qu’à 8,2 km de son lieu de travail.

Lorsqu’en mai 2015, il avait ouvert son cabinet N______ à J______, la demanderesse avait dû se rendre sur le site au début des travaux, et à l’ouverture, pour l’assister sur les questions administratives – J______ se trouvant à 44,9 km du lieu de travail. Dès ce mois, une autre assistante, T______ avait été chargée de la gestion quotidien et administrative du cabinet à J______.

Suite à la charge de travail plus élevée sur ce site, les parties avaient conclu l’avenant du 30 juin 2015, modifiant le taux d’activité et le salaire de la demanderesse. Elles n’avaient pas convenu d’une rémunération forfaitaire au kilomètre pour l’utilisation du véhicule privé de la demanderesse.

A J______, en décembre 2015, O______ avait succédé à T______ en qualité d’assistante. Dans les mois qui avaient suivi, des tensions étaient nées entre celle-ci et la demanderesse qui avait tendance à vouloir s’attribuer beaucoup de pouvoir. Il lui avait donc demandé de ne plus se rendre sur le site de J______, sauf nécessité. Afin d’éviter qu’elle ne s’y rende, il lui avait transmis les codes bancaires afin qu’elle puisse donner ses ordres de paiement, par son compte à lui, voire en son nom, pour le cabinet N______.

Les frais dont la demanderesse réclamait le remboursement n’étaient pas justifiés par l’exécution du contrat.

En sa qualité d’assistante, la demanderesse n’avait pas tenu de « rôle central » et « d’encadrement du projet » dans l’ouverture du cabinet à J______. Elle ne disposait d’aucune qualification pour travailler dans un cabinet ophtalmologique et avait pour tâches principales de gérer l’agenda du défendeur et de l’assister personnellement dans les tâches administratives de tous les jours. Elle disposait d’un bureau, d’un ordinateur ainsi que d’un téléphone fixe à Genève. Elle n’avait dès lors aucune nécessité et encore moins l’obligation de souscrire un abonnement téléphonique international. Elle pouvait également travailler depuis chez elle, le défendeur lui laissant beaucoup de liberté dans ses horaires et lieux de travail. La présence de la demanderesse n’était pas utile lorsque le défendeur était lui-même occupé à des consultations ou des opérations de patients.

D.           Le 18 décembre 2019, la demanderesse a déposé des déterminations sur le mémoire de réponse et la demande reconventionnelle. Elle a précisé que les communications avec le défendeur se faisaient par l’intermédiaire de son smartphone personnel, ce qui rendait nécessaire la conclusion d’un abonnement international. Elle avait en outre des contacts avec une partie de la clientèle, notamment pour fixer des rendez-vous avec le défendeur ou organiser les interventions chirurgicales. Par ailleurs, elle se rendait sur les sites où opérait le défendeur, notamment pour aider l’équipe des secrétaires à expliquer aux patients ce qui allait se passer et les rassurer. En particulier, elle se rendait sur le site de F______ plusieurs fois par semaine, à la demande du défendeur.

A l’appui de ses motifs, elle a produit l’un de ses plannings annuels sur les différents sites (pièce 45 dem). Le 8 janvier 2020, le défendeur a adressé sa duplique.

E.            Lors de l’audience de débats d’instruction du 11 juin 2020, les parties ont confirmé leurs conclusions respectives.

La demanderesse a déposé six clés qui étaient encore en sa possession ainsi qu’une petite télécommande. Elle a par ailleurs renoncé aux témoins 12 à15 de sa liste.

F.            Lors de l’audience de débats principaux du 13 septembre 2021, la demanderesse a déclaré que le défendeur avait déposé une plainte pénale à son encontre en date du 27 janvier 2020, pour « soustraction d’un relevé bancaire du compte privé du défendeur auprès de U______ pour la période du 18 juillet 2016 au 13 juillet 2017, et pour avoir produit ce document dans le cadre de la procédure prud’homale ». Elle a déposé copie de cette plainte pénale, ainsi que du procès-verbal de l’audience du Ministère public du 17 août 2021 (liasses 31 et 32).

Le défendeur s’est engagé à fournir à la demanderesse un certificat de travail, conforme au texte reproduit en pièce 8 dem et daté du 30 juin 2018.

Partant, la demanderesse a renoncé à sa conclusion en production de certificat de travail. Elle a également renoncé à sa conclusion en paiement de fr. 1'733,40 en paiement de la différence de salaire d’u pour les mois de juin et juillet 2015.

La demanderesse a confirmé qu’elle utilisait son téléphone portable tant à des fins privées que professionnelles et ce, en Suisse comme en France. Elle savait que le défendeur disposait d’un abonnement téléphonique suisse incluant le roaming en France et elle l’avait informé que, vu son domicile en France, elle allait prendre un abonnement français. Elle n’avait pas discuté d’un quelconque partage de frais avec le défendeur, mais cela allait de soi puisqu’elle travaillait pour ce dernier tant en Suisse qu’en France.

S’agissant de ses déplacements, la demanderesse a expliqué qu’elle essayait de remplir régulièrement ses notes de frais (cf. pièce 13 dem)., car elle les envoyait au comptable français de manière à valider les frais que le défendeur facturait à sa société N______ Selarl. Cependant, dans le cadre de la présente procédure, elle réclamait également le remboursement des kilomètres effectués à F______ et à G______.

Le défendeur a déclaré que les déplacements indiqués sur les notes de frais produites par la demanderesse lui semblaient plausibles. En effet, cette dernière devait être présente là où il était et elle se déplaçait avec son véhicule privé. Il a confirmé que les factures qu’elle établissait concernaient son activité de médecin suisse à J______. Il avait remboursé certains frais, mais n’excluait pas que certains lui aient échappé. Cependant, chaque déplacement de la demanderesse à J______ n’était pas forcément justifié puisqu’il n’avait pas forcément besoin d’elle lorsqu’il opérait, la demanderesse venant de son propre chef pour discuter avec ses collègues ou « boire un café ».

La demanderesse a déclaré que tous les frais qu’elle avait avancés dans le cadre de l’exécution de son travail lui étaient remboursés ([sic] ; PV 13. 9. 2021 p. 3). Cependant, a-t-elle ajouté, s’agissant des frais kilométriques, seule une infime partie lui avait été remboursée, soit env. fr. 500.-, ce qui était insignifiant par rapport aux montants qui lui étaient dus. Elle a précisé ne jamais avoir reçu de remboursement de frais sur son compte salaire suisse. Elle n’était plus en possession des justificatifs de frais qui lui avaient été remboursés, car elle les avait donnés au comptable.

O______, témoin, responsable du cabinet N______ Selarl, a déclaré qu’elle était salariée « du défendeur » depuis décembre 2015. A ce titre, elle a collaboré avec la demanderesse qui était l’assistant du défendeur pour la partie suisse de son activité. S’agissant de N______, la demanderesse gérait le règlement des factures du cabinet ainsi que le planning du défendeur. Techniquement, la demanderesse pouvait travailler depuis son domicile, mais il était convenu qu’elle le suive où il allait. Sur une semaine de travail le défendeur était un jour en Suisse et les autres en France. Il se rendait sur différents sites et la demanderesse le suivait. Ainsi, quand le défendeur allait sur le site de F______, la demanderesse y allait, etc. Elle a précisé que G______ avait remplacé F______. Elle a ajouté qu’il lui était arrivé à elle de devoir aller travailler sur ce dernier site et que, dans ce cas, ses frais de déplacement lui étaient remboursés.

Le témoin savait que la demanderesse devait être atteignable téléphoniquement pendant les heures de travail, qu’elle se trouve en Suisse ou en France. Lorsque la demanderesse venait à J______, c’était avec son propre véhicule.

V______, témoin, a déclaré avoir travaillé pour le défendeur de novembre 2017 à juillet 2020 pour le cabinet de G______, en qualité d’adjointe du responsable pour le premier cabinet.

Elle a déclaré que le défendeur venait entre trois et quatre fois par semaine à G______. Selon elle, il partageait son temps entre la Suisse (un jour, un jour et demi), et à parts égales entre G______ et J______. La demanderesse s’occupait des affaires personnelles du défendeur et du cabinet suisse. En outre, elle le suivait dans ses déplacements puisqu’il travaillait en Suisse, à G______ et à J______. La demanderesse se rendait à G______ avec sa voiture.

G.           Lors de l’audience de débats principaux du 20 septembre 2021, W______, témoin, a déclaré être décoratrice d’intérieur et avoir fait la connaissance de la demanderesse dans le cadre d’un chantier à G______. Elle avait été beaucoup en contact avec celle-ci au début du chantier. La demanderesse s’occupait des aspects administratifs et de la facturation. Elle l’avait vue à plusieurs reprises à G______, mais communiquait également avec elle par téléphone.

H.           X______, témoin, a déclaré être réceptionniste au sein du Centre médico-chirurgical de 2______, dont faisait partie le Centre médical de 3______ où avait collaboré le défendeur. C’est ainsi qu’elle avait fait la connaissance de la demanderesse. Comme cette dernière avait beaucoup de travail, il lui arrivait d’aller à 3______ même si la demanderesse était présente, notamment pour lui amener des dossiers. La demanderesse suivait le défendeur partout où il allait. Lorsqu’elle prenait des vacances, elle les calquait sur les absences du défendeur. La demanderesse faisait également des examens spécifiques, comme par exemple de prise de tension oculaire.

A l’issue de l’audience, la demanderesse a déclaré qu’elle retirait sa conclusion en délivrance d’un certificat de travail dans la mesure où celui qui lui avait été remis lui convenait. Sur ce, les parties ont plaidé et le Tribunal a gardé la cause à juger.

I.              a. Dans son jugement du 17 mars 2022, le Tribunal a considéré, en substance, et s’agissant de la conclusion de la demanderesse en remboursement de Fr. 36'267,70 au titre de frais kilométriques professionnels, que celle-ci, sous déduction d’un montant de Fr. 500.- qu’elle avait reconnu avoir reçu, était parfaitement fondée.

En effet, les enquêtes et pièces produites ont montré que la demanderesse suivait le défendeur dans tous ses déplacements, que ce soit à F______, à G______ ou à J______, et ce avec son véhicule privé. Du reste, le défendeur avait reconnu lui-même que la demanderesse devait être là où il était présent et il a confirmé qu’elle se déplaçait avec son véhicule privé. Quant à la fréquence des déplacements du défendeur, il était établi que ce dernier partageait son temps entre la Suisse (un jour, un jour et demi) et à parts égales entre G______ et J______.

Se fondant sur les notes de frais de déplacement mensuels produits par la demanderesse, et les kilométrages y indiqués, et reprenant l’indemnité kilométrique de fr. 0,70 y référencée, le Tribunal aura alloué à la demanderesse un montant de Fr. 35'767,70 net (jugement, p. 15 – 16).

Concernant les frais de parking de fr. 2'270,19, tous documentés par pièces, le Tribunal a considéré que ceux-ci étaient en corrélation avec les frais de déplacement, et il les a également alloués (jugement, p. 16).

Enfin, s’agissant des frais téléphoniques professionnels de fr. 4'214,61, corroborés par pièces, en lien avec l’abonnement international, le Tribunal les a partagés, considérant que, dès lors que la demanderesse utilisait son portable également à des fins privées. Il lui a donc alloué de ce chef un montant de fr. 2'107,30 (jugement p. 16-17).

Au total, le Tribunal aura condamné le défendeur à rembourser à la demanderesse un montant total de fr. 40'145,19 net, soit fr. 35'767,70 + fr. 2'107,30 + fr. 2'270,19, au titre du remboursement de ses frais professionnels. Ce montant est implicitement contenu dans celui figurant au ch. 5 du dispositif du jugement (jugement, p. 26).

b. Le Tribunal a également condamné le défendeur au paiement d’un montant de Fr. 3'433,30 brut (jugement, dispositif, ch. 3), ce poste comprenant les montants de fr. 1'344,80 brut au titre de solde salaire juin 2018 (jugement p. 13 – 14), de fr. 743,70 brut dus à titre d’indemnisation de 31,09 heures supplémentaires (jugement, p. 26 – 27), de fr. 1'344,80 brut également, mais titre d’indemnité pour trois jours fériés et un dimanche (jugement, p. 27 – 28).

c. Statuant ensuite sur la conclusion en paiement d’une indemnité de fr. 29'250.- net (= six salaires mensuels) pour licenciement abusif, le Tribunal y a fait partiellement droit, en allouant à la demanderesse un montant de fr. 19'500.- net, équivalent à quatre salaires mensuels (jugement, p. 24).

Pour ce faire, le Tribunal a considéré que la demanderesse « a valablement fait opposition à son congé par son courrier adressé au défendeur le 30 mai 2018 » (jugement p. 23). Enfin, le congé donné relevait, à son avis, comme l’a soutenu la demanderesse, d’une mesure de représailles consécutive à la demande d’augmentation de salaire censée tenir compte des frais professionnels importants encourus et de son refus d’accepter l’avenant prévoyant une baisse importante de son taux d’activité (ibid, p. 24).

Dans le dispositif de son jugement, le Tribunal a réuni tous les montants nets alloués, soit le montant de fr. 2'270,19 (frais de parking), de Fr. 2'107,30 (frais de téléphone), de Fr. 35'767,70 (indemnité kilométrique) et de fr. 19'500.- (indemnité pour licenciement abusif) dans un seul poste totalisant un montant de Fr. 59'645,19 net (jugement, dispositif, ch. 5).

d. En revanche, la Tribunal a rejeté la prétention de la demanderesse en paiement de Fr. 29'500.- net à titre de réparation pour tort moral (art. 49 CO), considérant que les conditions pour l’application de cette norme n’étaient pas réunies, faute de gravité objective de l’atteinte alléguée (jugement, p. 20 – 21). Le refus, par l’employeur, de rembourser les frais kilométriques constituant certes, une violation des obligations contractuelles et légales de l’employeur, mais n’était pas constitutif d’une atteinte à la personnalité de la demanderesse.

e. S’agissant de la demande reconventionnelle, le Tribunal a constaté qu’elle a perdu son objet du fait que la demanderesse avait, en cours de procédure, restitué ce que le défendeur lui avait demandé de rendre (jugement, p. 24).

f. Considérant que, sur une valeur litigieuse de près de Fr. 107'000.-, la demanderesse s’était vu adjuger un montant de Fr. 63'078,50, soit un peu plus de la moitié de la somme réclamée, le Tribunal a réparti les frais, fixés à fr. 1'070.-, à raison de 60%, soit fr. 640.-, à charge du défendeur, et à hauteur de 40%, soit fr. 430.-, à charge de la demanderesse (jugement, p. 25).

J.             Dans ses griefs, l’appelant reproche au Tribunal d’avoir a. donné suite, sans fondement, à la prétention de l’intimée en paiement de ses frais kilométriques allégués, et b. d’avoir retenu un licenciement abusif, et sous ce titre, avoir alloué à cette dernière un montant équivalent à quatre salaires.

Il ne remet plus en question en appel sa condamnation, par le Tribunal, au paiement de Fr. 1‘344,84 brut à titre de solde salaire juin 2018, de fr. 743,70 brut à titre d’indemnisation des heures supplémentaires, et de fr. 1'344,84 brut à titre d’indemnisation de trois jours fériés et d’un dimanche (liasse I).

a.                      L’appelant relève que le Tribunal, dans la computation des kilomètres professionnels parcourus par l’intimée, avec son véhicule privé, dans la période du 1er février 2015 au 31 décembre 2017, a commis deux erreurs : il a, à tort, pris en considération les déplacements (aller – retour) du lieu du domicile de l’intéressée au lieu travail convenu (D______–Genève, soit 26 km), alors que ce type de déplacements ne saurait appeler une indemnisation kilométrique ; il a ensuite méconnu un autre principe : si le travailleur se rend directement de son domicile en un lieu différent de son lieu habituel de travail, seuls les frais supplémentaires par rapport à ceux engendrés par le trajet jusqu’au lieu habituel de travail doivent être indemnisés.

L’appelant considère que les relevés kilométriques mensuels produits ne prouvent ni la réalité ni la nécessité des déplacements allégués (liasse I, p. 7-8). Il conteste, par ailleurs, et le principe et le montant d’une « indemnité forfaitaire calculée au kilomètre » - une telle convention n’aurait jamais été conclue (liasse I, p. 9).

Enfin, l’appelant estime – pour la première fois - que, dans la mesure où l’intimée fait valoir des créances en euros, elle ne pouvait, compte tenu de l’art. 84 al. 1 CO, conclure qu’en paiement dans cette monnaie – et non pas en francs suisses. Le juge ne saurait allouer une prestation pécuniaire due en monnaie étrangère si la demande porte (à tort) sur une prestation en francs suisses. En passant outre de ce principe, le juge allouerait un aliud, ce qui est prohibé (liasse I p. 10).

Ce point mis à part, l’appelant n’émet pas de critique quant au bien-fondé des frais téléphoniques et de parking allégués.

b.                      S’agissant du licenciement abusif, l’appelant soulève – pour la première fois également - l’absence d’une opposition au sens de l’art. 336 b CO. Il estime qu’il n’y a pas d’opposition si le travailleur ne conteste que les motifs du congé. Or, en l’espèce, l’intimée s’était contentée de ne contester que les motifs du congé, et non pas le congé en lui-même. Pour le surplus, et à titre subsidiaire, il estime qu’en l’espèce le congé ne serait pas abusif, car il aurait été donné par suite d’une restructuration (liasse I, p.13 – 14).

K.           a. Dans sa réponse, l’intimée rappelle, s’agissant de la monnaie dans laquelle ses conclusions avaient été prises, qu’elle était fondée de conclure en francs suisses, c’est-à-dire dans la monnaie du contrat de travail (liasse II, p. 11).

b. S’agissant de la question de savoir si le congé avait fait ou non l’objet d’une opposition, l’intimée considère, premièrement, que l’on ne saurait poser des exigences trop élevées à la formulation de l’opposition écrite ; à son avis, le simple fait d’avoir contesté les motifs suffit pour valoir opposition au sens de l’art. 336 b CO ; deuxièmement, l’appelant avait omis de soulever le point en première instance ; troisièmement, la survenance d’une opposition constitue un fait implicite dès lors que la cause avait été introduite ; elle n’avait pas à avoir être alléguée explicitement. Ce fait implicite ne doit être formellement allégué et prouvé que s’il est contesté. Elle se réfère à l’arrêt CAPH/197/2020 du 13 novembre 2020 dont elle cite de longs passages (liasse II, p. 12 – 15).

c. Dans son appel joint, l’intimée fait grief au Tribunal de l’avoir déboutée de sa prétention en allocation d’une indemnité de Fr. 29'500.- net à titre de réparation du tort moral subi. Ce tort moral, elle affirme l’avoir subi du fait, d’abord, d’avoir été traitée de manière discriminatoire ; l’appelant aurait défrayé sa collègue de travail O______ en totalité pour ses déplacements, alors qu’elle-même n’a jamais rien reçu à ce titre ; ensuite, du fait d’avoir fait l’objet d’une tentative de modification inadmissible de son contrat de travail, et enfin, du fait également d’avoir fait l’objet d’une plainte pénale en rapport avec cette procédure (liasse II, p 17 - 19).

d. Toujours dans son appel joint, l’intimée fait encore grief au Tribunal de s’être bornée à ne lui allouer, au titre d’indemnité pour licenciement abusif, qu’un montant équivalent à quatre salaires mensuels. La gravité de l’abus eût justifié l’octroi de l’indemnité maximale prévue à l’art. 336 a CO. Le Tribunal aurait, du reste, dû également prendre en considération le comportement procédural de l’appelant, et le fait qu’il avait déposé une plainte pénale, classée par la suite (liasse II, p. 20 – 22).

L.            Dans leurs écritures subséquentes, les parties ont persisté dans leurs moyens et conclusions respectives (liasses III à VI).

M.          Par décision du 2 mai 2022, la Cour a fixé à l’appelant un délai au 18 mai 2022 pour verser une avance de frais de Fr. 300.--. Ce montant aura été versé dans le délai imparti (dossier judiciaire). L’intimée, qua appelante incidente, n’a pas été invité à effectuer une avance de frais.


 

EN DROIT

1.      Recevabilité

1.1.            Interjeté contre une décision finale (art. 308 al. 1 let. a CPC) auprès de l’autorité compétente (art. 124 let. a LOJ) dans le délai utile de 30 jours et selon la forme prescrite par la loi (art. 142 al. 1 et 3 et art. 311 CPC), l’appel est recevable. Est également recevable l’appel joint formé par l’intimée.

1.2.            L’appel peut être formé pour a. violation du droit et/ou b. constatation inexacte des faits (art. 310 CPC). Ces mêmes règles s’appliquent à l’appel joint.

1.3.            Le juge d’appel dispose d’un pouvoir d’examen complet et il revoir librement les questions de fait comme les questions de droit (art. 310 CPC). Il n’est pas lié à l’état de faits dressé par l’instance précédente (ATF 144 III 394 consid. 4.1.4. = JdT 1019 II 147 ; Seiler, Die Berufung nach ZPO, Zurich, 2013, p. 206). Il contrôle librement l’appréciation des preuves effectuée par le Tribunal et il vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu’il a retenus (art. 157 CPC ; ATF 138 III 374 consid. 4.3.1. ; TF 4A_153/2014 du 28 août 2014 consid. 2.2.3). Il peut retenir des faits notoires.

1.4.            Il incombe à la partie appelante, respectivement, en cas d’appel joint, à la partie intimée, de motiver la démarche, et notamment, la ou les conclusion(s) prise(s) (cf. art. 311 al. 1 CPC). Elles doivent indiquer pourquoi et dans quelle mesure, le jugement entrepris doit être annulé ou modifié (ATF 142 III 413 consid. 2.2.4 ; 138 III 374 consid. 4.3.1).

1.5.            La valeur encore litigieuse, en appel, s’élève à fr. 99'767,70 (2 X fr. 29'500.- + Fr. 40'145,19). Dès lors qu’elle dépasse le seuil de Fr. 30'000.-, la présente procédure est soumise aux maximes de débats et de disposition (art. 55 al. 1 CPC cum art. 247 al. 1 let. b. ch. 2 CPC a contrario, et art. 58 CPC). La procédure ordinaire est applicable (art. 219 et art. 243 CPC).

 

2.             Indemnité kilométrique

2.1. A teneur de l’art. 327 a al. 1 CO, l’employeur rembourse au travailleur tous les frais imposés par l’exécution du travail. Et l’art. 327 b al. 1 CO d’ajouter que « si d’entente avec l’employeur, le travailleur utilise pour son travail son propre véhicule à moteur ( ) il a droit au remboursement des frais courants d’usage et d’entretien, dans la mesure où le véhicule sert à l’exécution du travail. ( ) ». Ces normes sont relativement impératives, c’est-à-dire il ne peut être y dérogé au détriment du travailleur (cf. art. 362 CO).

2.1.1. Les parties peuvent convenir d’une indemnité kilométrique – cette solution est fréquente et tient compte de la difficulté de déterminer exactement les montants que doit rembourser l’employeur (Danthe, in : Dunand/Mahon, Commentaire du contrat de travail, 2e éd, Berne, 2022, N. 12 ad art. 327 b CO ; Probst, in : Etter/ Facincani/Sutter, Arbeitsvertrag, Bern, 2021, N. 7 ad art. 327 b CO).

2.1.2. Point n’est besoin que l’indemnisation forfaitaire, dans son principe et dans son montant, soit convenue par écrit – elle peut reposer sur un accord tacite – pour autant que l’indemnité corresponde à l’usuel. L’indemnité kilométrique, telle que fixée par l’Administration fiscale fédérale, recommandée par le TCS et la FER, et référencée par la doctrine, correspond, pour un véhicule privé de classe moyenne, à fr. 0,7 /km (Ordonnance DFF sur les frais professionnels du 10. 2. 1993, appendice [version en vigueur depuis le 1. 1. 2016]  RS 642.118.1 ; www.tcs.ch ; FER, Modèle pour le remboursement des frais de déplacement professionnels en véhicule privé, version du 1. 1. 2009 (www.fer.ch); Carruzzo, La rémunération du travailleur et le remboursement des frais, Genève, 2007, p. 260 ; Probst, op. cit, N. 7 ad art. 327 b CO).

2.2. L’appelant conteste la valeur probante de la pièce-liasse 13 dem (résumée dans la pièce 1 dem).

2.2.1. La première critique de l’appelant concerne la fréquence et la nécessité des déplacements y allégués. Cette critique est infondée.

2.2.1.1. A l’instar du Tribunal, la Cour est convaincue que cette pièce-liasse 13 dem reflète la réalité de la fréquence et des destinations des déplacements professionnels, en véhicule privé, de l’intimée. Par ailleurs, il ressort des enquêtes que l’intimée était tenue de suivre l’appelant en tous ses déplacements à F______, G______ et J______. En conséquence, la Cour est également convaincue que ces déplacements étaient nécessaires.

2.2.1.2. Un examen minutieux de cette pièce-liasse 13 dem montre que l’intimée a effectué, dans la période de février 2015 à fin 2017, 216 déplacements de son domicile à D______, à J______, 167 à F______, 45 à G______, et un à L______ (cf. tableau ci-après).

2.2.2. La deuxième critique de l’appelant concerne le fait que l’intimée, dans son décompte des kilomètres parcourus, avait pris en considération également compté les déplacements (aller-retour) domicile privé – lieu du travail à Genève.

2.2.2.1. Ce moyen est fondé. Le trajet domicile privé – lieu de travail (aller-retour) ne saurait compter comme déplacement professionnel. Les frais en découlant sont à charge du travailleur (Danthe, op. cit, . 9 ad art. 327 a CO ; Streiff/Von Kaenel/Rudolph, Arbeitsvertrag, Zurich, 2012, N. 2 ad art. 327 a CO p. 488). Ce point a échappé au Tribunal. Il convient donc d’écarter du calcul kilométrique de l’intimée les 26 km (distance kilométrique non contestée) que représentent les trajets domicile – Genève/2______ (cf. tableau ci-après).

2.2.3. La troisième critique de l’appelant vise le fait que le Tribunal n’avait pas déduit des calculs, pour les déplacements domicile à F______, G______ et J______, présentés par l’intimée les 26 km domicile – lieu de travail qu’elle aurait de toute façon dû assumer à ses frais.

2.2.3.1. Ce moyen est également fondé. En effet, lorsque le travailleur se déplace directement de son domicile en un lieu différent de son lieu habituel de travail, seuls les frais supplémentaires par rapport à ceux engendrés par le trajet jusqu’au lieu habituel de travail doivent être indemnisés (« Zusatzkosten für den Mehrweg » ; Wyler/Heinzer, Droit du travail, Berne, 2019, p. 377 ; Danthe, op. cit. N. 10 ad art. 327 a OR ; Streiff/Von Kaenel/Rudolph, op. cit. N. 2 ad art. 327 a CO p. 489). La Cour en tiendra compte (cf. tableau ci-après).

2.2.4. Appliquant le droit d’office, il incombe à la Cour de relever un point qui relève de faits notoires. Dans son décompte kilométrique (cf. pièces-liasse 13 dem), l’intimée retient systématiquement une distance entre son domicile à D______ et F______ (aller-retour) de 124 km.

2.2.4.1. Il suffit de se reporter sur les sites de calculs de distances kilométrique du TCS et de Michelin pour se rendre compte que la distance alléguée par l’intimée pour le trajet D______–F______ est exagérée. Ainsi, même en admettant le contournement autoroutier de Genève, la distance séparant D______ d’avec F______ est, aller-retour, de 80 km.

2.2.4.2. L’on peut, en revanche, retenir les distances alléguées s’agissant des trajets aller-retour D______–G______ (90 km) et D______–J______ (90 km).

2.2.4.3. La Cour mettra en compte, dans ses propres calculs, les distances conformes (cf. tableau ci-après).

2.2.5. L’appelant conteste enfin l’existence d’un accord portant sur l’indemnisation kilométrique forfaitaire, au taux de fr. 0,7 km.

2.2.5.1. Ce moyen est infondé – pour les raisons précédemment exposées.

2.3. Au final, et comme il découle du tableau ci-après, il reste à l’appelant à indemniser à l’intimée un total de 25'874 km au tarif de 0,7 /km, soit un montant de fr. 18'111,80 net. Le jugement sera donc réformé en conséquence.

 

mois année

km alllégués

km retenus

 

 

total retenu

 

 

J______ 90

F______ 80

G______ 90

km

 

 

nombre de

nombre de

nombre de

 

 

 

fois

fois

fois

 

févr.15

726

3

2

430

mars.15

742

1

4

410

avr.15

886

2

4

500

mai.15

2032

22

1980

juin.15

1850

20

1800

juil.15

1680

17

1

1610

août.15

1080

7

3

870

sept.15

1988

16

4

1760

oct.15

1342

11

2

1150

nov.15

1232

10

1

980

déc.15

1064

9

1

890

janv.16

1282

7

4

950

févr.16

1522

6

2

3

970

mars.16

1344

5

5

1

940

avr.16

1034

4

4

770

mai.16

1014

3

4

1

680

juin.16

1556

2

7

2

920

juil.16

1318

8

4

1040

août.16

896

3

4

590

sept.16

1924

11

5

1

1480

oct.16

1002

1

5

490

nov.16

1428

6

6

1020

déc.16

1344

5

5

1

940

janv.17

1393

3

5

2

850

févr.17

1781

6

6

3

1290

mars.17

1928

7

9

1350

avr.17

1957

2

14

1300

mai.17

1728

3

11

1150

juin.17

1378

2

9

1

990

juil.17

1216

3

7

830

août.17

968

3

5

670

sept.17

2258

17

1360

oct.17

1712

6

7

1

1190

nov.17

2786

1

17

1620

déc.17

2310

1

12

1170

Total

51701

216

167

45

36940

 

 

 

 

 

 

L______ 88

1 fois

 

 

 

88

 

 

 

 

 

37028

Total nombre de fois: 216 + 167 + 45 + 1 = 429

 

 

 

 

 

429 X 26 km =

 

 

 

 

-11154

Solde (total km à indemniser au taux de 0,7 CHF)

 

 

 

 

25874

 

 

 

 

 

 

Montant total dû: 0,7 X 25'874

 

 

 

CHF

18'111,8

 

3.             Frais de parking et d’abonnement téléphonique

3.1. L’appelant fait grief au Tribunal pour l’avoir condamné à verser à l’intimée les montants de fr. 2'270,19 net pour frais de parking et de fr. 2'170,30 pour frais de téléphone (½ de l’abonnement international).

3.1.2. Sa critique se limite cependant au fait qu’à teneur de la jurisprudence relative à l’art. 84 CO, une dette exprimée en euros aurait dû fait l’objet d’une conclusion en paiement en euros ; le Tribunal aurait dû, dès lors, rejeter la conclusion de l’intimée tendant au remboursement de ces montants en francs suisses (cf. mémoire-appel, p. 10 ss).

3.1.3. Cette critique est infondée.

3.1.3.1. Certes, dans l’ATF 134 III 151, cité par l’appelant, le Tribunal fédéral a jugé, en se fondant sur l’art. 84 al. 1 CO, que le créancier demandeur titulaire d’une créance due contractuellement en euros doit prendre des conclusions en euros (consid. 2). En effet, si l’art. 84 al. 2 CO donne au débiteur la faculté de s’acquitter de sa dette en francs suisses, le créancier ne dispose pas de ce choix (ATF 134 II 151 consid. 2.1. 2.2) selon la jurisprudence, lorsque la dette a été contractée en monnaie étrangère, le créancier ne peut faire valoir qu’une prétention en cette monnaie et le juge ne peut admettre la créance que dans cette monnaie également ; si le créancier requiert à tort une condamnation en francs suisses, la demande vise un aliud et doit être rejetée (ATF 137 III 158 = JdT 2013 II 283 ; plus récemment : TF 4A_381/2015 du 1. 10. 2015 consid. 3 et TF 4A_298/2021 du 8. 11. 2022 consid. 5. 1. 1).

3.1.3.2. Il se trouve qu’en l’espèce les parties sont concernées par les arts. 327 a et 327 b CO. Il s’agit – on l’a vu – de normes relativement impératives. L’interaction entre ces dispositions et l’art 84 CO n’a, à ce jour, jamais fait l’objet d’une jurisprudence ou d’un examen doctrinal. Quel serait l’intérêt d’un travailleur engagé en Suisse, envoyé en mission à l’étranger, de se voir rembourser, à son retour en Suisse, p. ex. en rials saoudiens, yens japonais ou pesos argentins – et non pas dans leur contrevaleur en francs suisses au jour de l’exigibilité ? Il n’aurait d’usage ici pour ces devises étrangères.

3.1.3.2. Ensuite, il convient de tenir compte du fait qu’en l’espèce l’employeur est domicilié en Suisse ; la travailleuse – certes frontalière – avait formellement son lieu de travail en Suisse.

3.1.3.3. Enfin – c’est central – les parties n’ont pas convenu – pour reprendre un passage clé de l’ATF 134 II 150 consid. 2.2. - que les frais fussent remboursés, par l’employeur, en euros ; elles n’ont pas convenu d’une « Fremdwährungsschuld ». A teneur du contrat de travail le salaire devait être payé en francs suisses (cf. pièce 3 dem, art. 3). Il était payable en Suisse (auprès d’un compte chez M______). Dès lors, l’on voit mal que, s’agissant d’éventuels frais encourus dans l’exécution du contrat, la solution serait différente et que ces frais fussent remboursables à l’intimée en euros. En d’autres termes, l’appelant ne saurait vouloir soutenir que l’intimée serait titulaire d’une créance contractuellement due en euros.

3.1.3.4. Pour le surplus, l’appelant ne conteste pas le taux de conversion appliqué par l’intimée.

3.2. Par conséquent, le jugement sera confirmé sur ce point.

4.             Licenciement abusif.

4.1 L’appelant fait grief au Tribunal, à titre principal, d’avoir retenu l’existence d’une opposition; il relève que l’intimée n’avait contesté que les motifs du congé ; à titre subsidiaire, il lui reproche d’avoir retenu un licenciement abusif et l’avoir condamné à une pénalité de fr. 19'500.- net, soit l’équivalent de quatre salaires mensuels. L’intimée de son côté, considère, dans sa réponse, avoir valablement formé opposition au congé, et elle reproche au Tribunal, dans son appel joint, de ne pas avoir lui alloué le maximum prévu par l’art. 336 a CO, c’est-à-dire fr. 29'250.-, soit l’équivalent de six salaires mensuels.

4.2. En vertu de l’art. 336 b al. 1 CO, norme absolument impérative (cf. art. 361 CO), le travailleur qui entend demander une indemnité pour licenciement abusif (art. 336 et 336a CO) doit faire opposition au congé par écrit auprès de l’employeur, au plus tard jusqu’à la fin du délai de congé, sous peine de péremption du droit. Il ne faut pas poser des exigences trop élevées à la formulation de cette opposition écrite. Il suffit que son auteur y manifeste à l’égard de l’employeur qu’il n’est pas d’accord avec le congé qui lui a été notifié (ATF 136 III 96 consid. 2 ; 123 III 246 consid. 4c). L’opposition a pour but de permettre à l’employeur de prendre conscience que son employé conteste le licenciement et le considère comme abusif.

4.3. Il n’y a pas d’opposition lorsque le travailleur s’en prend seulement à la motivation de la résiliation, ne contestant que les motifs invoqués dans la lettre de congé, respectivement, dans la lettre motivation du congé, à l’exclusion de la résiliation elle-même (TF 4A_320/2014 du 8. 9. 2014 consid. 3.1 = ARV/DTA 2015 p. 32  = JAR 2015 p. 177; TF 4A_571/2008 du 5. 3. 2009 consid. 4.1.2 ; TF 4C.29/2004 du 8. 4. 2004 consid. 2.4 ; TC VD, 16. 5. 2020 consid. 4. 4. 1 in : JAR 2020 p. 616 ; CAPH GE 4. 12. 1989 in : JU-TRAV 1990 p 28 ; Wyler/Heinzer, op. cit. p. 836 ; Streiff/Von Kaenel/Rudolph, op. cit., N. 3 ad art. 336 b CO p. 1064; Facincani/Bazzell, in: Etter/Facincani/Sutter, op. cit, N. 3 ad art. 336 b CO ; Portmann/Rudolph, in : Basler Kommentar OR I, 7e éd., 2020, N. 1b ad art. 336b CO ; Bruchez/ Mangold/ Schwaab, Commentaire du contrat de travail, Berne, USS, 2019, N. 4 ad art. 336 b CO ; Guyot Unger et alii, Le deroit du traail au quotidien, Genève, FER, 2020, p. 618 ; Perrenoud, in : Commentaire Romand, CO I, vol. 2, 3e éd., 2021, N. 6 ad art 336 b CO ; Dunand/ Lempen/ Perdaems, Droit du travail, Bâle, 2020, p. 294 ; Favre Moreillon, Les différents types de licenciements en droit du travail, Bâle, 2019, p. 172 ; Emmel, in : Handkommentar zum Schweizerischen Privatrecht, 2e éd., Zurich, 2012, N. 1 ad art. 336 b CO ; avis différent : Bruehwiler, , Einzelarbeitsvertrag, Bâle, 2014, N. 1 ad art. 336 b CO).

4.3.1. En l’espèce, il n’y pas place pour un doute quant à la volonté réelle (art. 18 CO) de l’intimée lorsque, par courrier à son employeur du 30 mai 2018, elle s’était explicitement bornée à ne contester que les motifs du congé, à l’exclusion du congé lui-même (cf. pièce 8 dem).

4.3.2. Il n’y a donc pas eu – contrairement à ce qu’elle soutient en procédure – opposition au congé au sens de l’art. 336 b CO.

4.4. Il incombe au juge de relever d’office l’existence d’une opposition au sens de l’art. 336 b CO. Il s’agit d’un point exigé par le droit matériel, et le juge, faut-il le rappeler, applique le droit d’office (cf. art. 57 CPC). Il importe peu, à cet égard, que l’employeur, défendeur à l’action, ait invoqué ce point déjà en première instance et que le Tribunal ne l’ait examiné (Schaller, Einwendungen und Einreden im schweizerischen Schuldrecht, Zurich, 2010, p. 266).

4.4.1. L’intimée fait valoir, dans sa réponse à l’appel, qu’il eût incombé à l’appelant de se prévaloir dudit moyen déjà en première instance – ce qu’il aurait omis de faire. Il serait forclos à le faire, pour la première fois, en appel. A cet effet, elle se réfère à l’arrêt CAPH/197/2020 du 13 novembre 2020 consid. 3.2 = JAR 2021 p. 482, pour soutenir qu’en l’espèce, le juge ne devait vérifier les prescriptions de forme, prévues par l’art. 336 b al. 1 CO que si la péremption de l’action a été invoquée par l’employeur, car la non-péremption d’un droit serait un fait implicite, qui ne doit être formellement allégué et prouvé que s’il est contesté par l’adversaire.

4.4.2. L’invocation dudit arrêt de la Chambre de céans ne lui est d’aucun secours.

4.4.2.1. Dans le cas jugé dans CAPH/197/2020, le travailleur, demandeur à l’action, avait parfaitement formé opposition par écrit et dans le délai de congé. Par inadvertance, son conseil avait omis de mentionner ce courrier dans la demande et de le produire dans le chargé demandeur ; il s’en était aperçu suite à une question du Tribunal lors au début des débats principaux. Sa tentative de produire cette pièce – pourtant mentionnée dans son bordereau – avait été rejetée, pour tardiveté dans la production d’une pièce. Considérant dès lors que le demandeur n’avait pas établi avoir formé opposition, le Tribunal l’a débouté de sa demande en paiement d’une indemnité pour licenciement abusif. Sur appel, Chambre de céans aura, à juste titre, annulé ce jugement, en considérant que, compte tenu des circonstances du cas concret, l’on avait affaire à un fait implicite, et que, dans ce cas, il incombait à l’employeur de contester d’avoir reçu un courrier d’opposition. Ce qu’il avait omis de faire.

4.4.4.2. Or, dans le cas d’espèce, la situation est bien différente. Il n’y a pas eu d’opposition. L’absence d’opposition ne saurait être guérie par un moyen tiré de la procédure civile. La théorie des « faits implicites » - propre au droit de la procédure civile – est impropre à suppléer à une condition de fond stipulée par le droit matériel.

4.4.4.3. Du reste, l’intimée était manifestement consciente de ce problème. Aussi a-t-elle tenté d’obtenir l’indemnité pour licenciement abusif – soit fr. 29'250.- net , en réclamant ce même montant – soit également fr. 29'250.—net, à titre de réparation pour tort moral (cf. ci-après). Cette façon de faire constitue une tentative de contourner les exigences de l’art. 336 b CO, ce qui est inadmissible (cf. TF 4A_607/2011 du 10 novembre 2011 consid. 3 ; Streiff/Von Kaenel/Rudolph, op. cit. N. 5 ad art. 336 b CO, p. 1066).

4.5. En conséquence, il n’y a pas lieu d’examiner la question du caractère abusif ou non du licenciement de l’intimée. Le jugement sera donc annulé sur ce point et l’intimée déboutée de son appel joint.

4.6. La Cour est consciente du fait qu’il est fréquent qu’un travailleur licencié hésite à formuler une opposition, ou à la formuler avec suffisamment de clarté ; il ne souhaite pas, de par une opposition au congé, formulée avant la fin des rapports de travail, irriter l’employeur et courir le risque que ce dernier, fâché, refuse de régler le dernier salaire, ou refuse de délivrer un bon certificat de travail. - Cette considération ne saurait cependant délester le travailleur de son incombance de s’exprimer clairement s’il entend contester le congé.

5.             Tort moral

5.1. Comme sus-évoqué, l’intimée conteste, dans son appel joint, également le fait que le Tribunal lui ait refusé d’allouer un montant de fr. 29'250.- net à titre de réparation de son tort moral.

5.2. Le travailleur victime d’une atteinte – illicite, et partant contraire au contrat - à sa personnalité du fait de l’employeur ou de ses auxiliaires peut prétendre à une indemnité pour tort moral, pour autant que la gravité de l’atteinte le justifie (cf. art. 49 CO ; ATF 137 III 303 consid. 2.2 Barela c/ Xamax FC ; Lempen, in : CR CO I, vol. 2, 3ème éd. 2021, N. 8 ad art. 328 CO).

5.2.1. Pour justifier l’allocation d’une indemnité pour tort moral fondée sur l’art. 49 al. 1 CO, il ne suffit pas que le juge constate une violation de l’art. 328 CO ; il faut encore que l’atteinte ait une certaine gravité objective et qu’elle ait été ressentie, par la victime, subjectivement, comme une souffrance morale suffisamment forte pour qu’il apparaisse légitime qu’une personne dans ces circonstances s’adresse au juge pour obtenir réparation (ATF 130 III 699 cons 3.1 ; 102 II 211 consid. 9).

5.2.1. Les conditions de la réparation du tort moral en droit du travail sont les suivantes : la violation du contrat constitutive d’une atteinte illicite à la personnalité (art. 328 CO), un tort moral, une faute et un lien de causalité naturelle et adéquate entre la violation du contrat et le tort moral, l’absence d’autre formes de réparations).

5.3. En l’espèce, l’intimée qua appelante jointe, fonde sa prétention sur trois arguments : a. elle considère avoir fait l’objet d’un traitement discriminatoire re remboursement des frais professionnels par rapport à celui dont avait bénéficié O______ ; b. elle soutient avoir fait l’objet d’un congé-modification inadmissible ; c. elle rappelle avoir fait l’objet d’une plainte pénale – certes, après la fin des rapports de travail – mais néanmoins survenu en violation des obligations de protection de la personnalité post-contractuelles de l’employeur.

5.3.1. Le premier argument est infondé, dès lors que O______ n’était pas, juridiquement parlant, la collègue de travail de l’intimée. Elle était salariée de la société N______ Selarl (cf. pièce 20 dem) ; certes, l’appelant associé gérant unique et ayant droit économique de ladite entité. Cela n’enlève cependant rien au bien-fondé d’un engagement d’une employée, domiciliée en France, pour un travail à effectuer en France, par une société sise en France. Il n’y a pas lieu d’envisager un Durchgriff. Cette société était, juridiquement parlant, libre d’accorder à sa salariée un traitement différent (p. ex. une diligence meilleure en matière de remboursement des frais professionnels) que celui accordé par l’appelant, employeur physique de l’intimée, en Suisse.

5.3.2. Le deuxième argument ne porte pas davantage : l’intimée n’a jamais fait l’objet d’un congé-modification, mais d’une simple proposition d’avenant à son contrat ; la communication de celle-ci n’était pas assortie d’un congé ordinaire, prononcé sous condition suspensive de non-acceptation de la proposition dans un délai imparti.

5.3.3. Le troisième argument paraît également inconsistant. Certes, un dépôt de plainte pénale par pure chicane peut causer un tort moral et justifier une réparation. En l’espèce, l’appelant avait été confronté, en cette procédure, à la production de pièces qu’il avait considérées, à tort ou à raison, lui avoir été enlevées sans droit ; il visait, apparemment, que cela conduise à ce que ces éléments ne soient pas pris en considération par le juge prud’homal. La démarche, pour violente qu’elle ait pu apparaître, visait dès lors un but raisonnable, et le moyen mis en œuvre respectait le principe de la proportionnalité. Le fait qu’après une instruction préalable, le Parquet ait classé cette plainte, ne constitue pas une preuve de l’illicéité ou du caractère abusif, et partant, attentatoire à la personnalité, de la démarche.

5.4. Par conséquent, la Cour confirme le jugement sur ce point.

6. Récapitulation.

6.1. Vu ce qui précède, la Cour allouera à la demanderesse un montant de fr. 18'111,80 net à titre d’indemnité kilométrique pour l’emploi de son véhicule privé ; d’un montant de fr. 2'270,19 net à titre de frais de parking, et d’un montant de fr. 2'107,30 net à titre de frais d’abonnement téléphonique – le tout avec intérêts moratoires à 5% l’an à compter du 1er juillet 2018.


 

7. Frais

7.1. Au terme de la procédure, les frais judiciaires seront arrêtés, pour les deux instances, à fr. 1'670.-- ; ce montant totalise le montant de frais fixé par le Tribunal, à savoir fr. 1'070.-- et les frais d’appel, présentement fixés à fr. 600.--. (art. 71 RTFMC).

7.2. L’intimée, demanderesse à l’action, n’obtient, en définitive, qu’environ 20% de ses conclusions prises en première et deuxième instance ; inversement l’appelant, défendeur à l’action, obtient gain de cause sur environ 80% de ses conclusions en déboutement. Les frais judiciaires des deux instances, totalisant un montant de fr. 1'670.- (soit fr. 1'070.-[Tribunal] et fr. 600.- [Cour]) sont partiellement compensés avec les avances versées (Fr. 1'070.—versés par la demanderesse, et Fr. 300.—par l’appelant) ; ces avances restent acquises à l’Etat (art.111 al. 1 CPC) .

7.3. Ces frais de Fr. 1'670.-- seront répartis entre les parties comme suit : l’intimée en assume un montant de fr. 1’336.- ( = 8/10ème de fr. 1’670.-), et l’appelant un montant de fr. 344.-- (= 2/10ème de fr. 1'670.-).

7.4. En conséquence, l’intimée sera condamnée à verser à l’Etat le solde des frais judiciaires, non couverts par les avances effectuées par les parties, soit fr. 300.- (fr. 1'670.- - fr. 1'370) 

7.5. La procédure prud’homale, à Genève est gratuite, c’est-à-dire il n’est pas alloué de dépens (art. 22 al. 2 La CC).

* * * * *

 



PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud’hommes, groupe 5 :

 

A la forme :

1.      Déclare recevable l’appel interjeté le 29 avril 2022 par A______ contre le jugement JTPH/80/2022 rendu le 17 mars 2022 dans la cause C/26884/2018-5 ;

2.      Déclare recevable l’appel joint interjeté le 10 juin 2022 par B______ contre ce même jugement ;-

Au fond :

Annule les chiffres 5, 8, 9 et 10 du jugement entrepris ;

Cela fait et statuant à nouveau :

3.      Condamne A______ à payer à B______ le montant de Fr. 18'111,80 net, à titre d’indemnité kilométrique, avec intérêts à 5% l’an à compter du 1er juillet 2018 ;

4.      Condamne A______ à payer à B______ le montant de Fr. 2'270,19 net à titre de frais de parking, avec intérêts à 5% l’an à compter du 1er juillet 2018 ;

5.      Condamne A______ à payer à B______ le montant de Fr. 2'107.- net à titre de frais d’abonnement téléphonique, avec intérêts à 5% l’an à compter du 1er juillet 2018 ;

6.      Confirme le jugement querelle pour le surplus.

7.      Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais des deux instances :

1.      Fixe les frais de justice pour les deux instances à fr. 1'670.-- , partiellement compensés avec le montant de Fr. 1'370.—versés à titre d’avances qui restent acquises à l’Etat ;

2.      Met à la charge de B______ les 8/10ème de ces frais, soit Fr. 1'336.-, et à la charge de A______ un montant les 2/10ème de ces frais, soit Fr. 344.-

3.      Condamne B______ à verser à l’Etat la somme de fr. 300.- à titre des soldes des frais judiciaires, non couverts par les avances des parties ;

4.      Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.


 

Siégeant :

Monsieur Werner GLOOR, président ; Madame Anne-Christine GERMANIER, juge employeur ; Monsieur Willy KNOPFEL, juge salarié ; Monsieur Javier BARBEITO, greffier.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000.- fr.