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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/461/2022

ACJC/951/2024 du 24.07.2024 sur JTBL/828/2023 ( OBL ) , CONFIRME

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/461/2022 ACJC/951/2024

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU MERCREDI 24 JUILLET 2024

 

Entre

Monsieur A______, p.a régie B______, ______ [GE], appelant contre un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 10 octobre 2023, représenté par C______ [services juridiques], ______ [GE],

et

Madame D______, domiciliée ______ [GE], intimée, représentée par l’ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6.

 


EN FAIT

A.                Par jugement JTBL/828/2023, communiqué aux parties par pli du 11 octobre 2023, le Tribunal des baux et loyers a annulé le congé signifié le 21 décembre 2021 pour le 30 juin 2022 à D______ par A______ concernant l’appartement de quatre pièces et demie situé au 4ème étage de l’immeuble sis rue 1______ no. ______ à Genève (ch. 1 du dispositif), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 2) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

B.                a. Par acte expédié le 10 novembre 2023 au greffe de la Cour de justice, A______ (ci-après également: le bailleur) forme appel contre ce jugement, dont il sollicite l’annulation. Cela fait, il conclut à la validité du congé notifié le 21 décembre 2021, au refus d’une prolongation de bail et à l’évacuation de D______ de l’appartement.

b. D______ (ci-après également: la locataire) conclut à la confirmation du jugement entrepris.

c. Par réplique et duplique des 31 janvier et 1er mars 2024, les parties ont persisté dans leurs conclusions puis ont été avisées le 27 mars 2024, par le greffe de la Cour, de ce que la cause était gardée à juger.

C. Il résulte du dossier les faits pertinents suivants:

a. D______, locataire, loue depuis 1993 à A______, bailleur, un appartement de quatre pièces et demie au 4ème étage de l’immeuble sis rue 1______ no. ______ à Genève.

b. Un nouveau contrat a été conclu le 10 juin 2009 pour une durée initiale d’une année, du 1er juillet 2009 au 30 juin 2010, renouvelable ensuite tacitement d’année en année, sauf résiliation respectant un préavis de trois mois.

c. Le loyer annuel a été fixé par le contrat à 11'304 fr. et les charges à 2'040 fr. par an.

d. D______ a vécu dans l’appartement dans un premier temps avec son ex-mari.

Depuis 15 ans, elle y vit avec son compagnon, E______.

e. Le 3 décembre 2021, une altercation a eu lieu entre E______, des voisins du deuxième étage et les époux F______/G______, habitant l’immeuble.

F______ a déposé une plainte pénale à l’encontre de E______ pour voies de fait et injure et ce dernier des plaintes pénales contre F______ pour diffamation et contre l’épouse de celui-ci pour injure, toutes trois enregistrées sous n° de procédure P/2______/2021.

Il ressort notamment des rapports de police figurant à la procédure pénale que E______ a reproché à des voisins d’avoir bloqué l’ascenseur. G______ s’était interposée et E______ lui avait demandé de « fermer sa bouche » en utilisant des termes grossiers. Cette dernière l’avait alors traité d’antisémite. F______ était ensuite allé frapper à la porte de E______. La situation s’était envenimée et F______ avait accusé E______ de l’avoir frappé au visage et de l’avoir insulté.

Dans le cadre de la médiation que la police a tenté de mener, E______ avait dit que s’il avait insulté et frappé quelqu’un, il s’en excusait. Il avait toutefois farouchement nié avoir insulté et frappé qui que ce soit. Les policiers ont constaté une marque rouge sur le visage de F______ et ont pris une photo.

H______, mari de la femme interpellée par E______ vers l’ascenseur, avait assisté au début de l’altercation mais n’avait pas entendu d’injure ni vu de coups échangés, précisant avoir quitté les lieux avant que la situation ne dégénère.

Le soir-même de l’altercation, F______ s’est rendu à la clinique I______ pour faire établir un constat de lésions traumatiques, à savoir un hématome maxillofacial gauche, compatible avec le fait d’avoir reçu un coup de poing.

Lors de leurs auditions, G______ et F______ ont tous deux déclaré n’avoir jamais vu E______ avant cette altercation.

E______ a été reconnu coupable de voies de fait par ordonnance pénale du 25 janvier 2022. Tandis qu’une décision de non-entrée en matière a été prononcée concernant l’infraction d’injure, il a formé opposition contre cette ordonnance, avant de la retirer, ce dont le Tribunal de police a pris acte par jugement du 16 avril 2023.

G______ a été condamnée pour injure par ordonnance pénale du 25 janvier 2022. Le même jour, une ordonnance de non-entrée en matière a été rendue relative à la plainte déposée par E______ contre F______.

f. Le 10 décembre 2021, J______, habitant l’immeuble, a signalé à la régie qu’elle ne se sentait plus en sécurité en quittant son appartement, sachant qu’elle pouvait rencontrer E______. Elle a demandé d’agir pour l’expulser de l’immeuble et ajouté qu’un ancien locataire avait déjà quitté l’immeuble à cause du comportement de celui-ci.

g. Par avis officiel du 21 décembre 2021, la régie a résilié le bail de la locataire pour le 30 juin 2022, le congé étant motivé par l’altercation du 3 décembre 2021 et par différents incidents relayés à la régie.

h. Par requête du 13 janvier 2022, déclarée non conciliée à l’audience de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers du 19 mai 2022 puis portée devant le Tribunal le 16 juin 2022, la locataire a conclu, principalement, à l’annulation du congé et, subsidiairement, à l’octroi d’une prolongation de bail de quatre ans et à la possibilité de résilier le bail pendant la prolongation moyennant un préavis de 15 jours pour le 15 ou la fin d’un mois.

i. Par mémoire de réponse et demande reconventionnelle du 30 septembre 2022, le bailleur a conclu à la validité du congé, au refus d’une prolongation de bail et à l’évacuation de la locataire.

j. Le 11 novembre 2022, la locataire a conclu à l’irrecevabilité de la demande reconventionnelle, subsidiairement au déboutement du bailleur de ses conclusions, au motif que le bailleur n’avait aucun intérêt actuel et concret à demander son évacuation.

k. La locataire a produit devant le Tribunal des attestations de sept voisins confirmant entretenir de bons rapports avec elle et son compagnon E______, un certificat médical attestant de sa santé fragile et des conséquences néfastes d’un éventuel déménagement sur son état de santé, ainsi que des preuves de recherches de logement.

Elle a déclaré au Tribunal qu’elle n’avait jamais rencontré de problème avec son voisinage depuis qu’elle avait emménagé une trentaine d’années auparavant. Son compagnon, qui vivait avec elle depuis une quinzaine d’années, n’avait pas non plus rencontré de problème. La régie ne lui avait jamais envoyé, ni à elle, ni à celui-ci, un quelconque avertissement depuis qu’elle habitait l’immeuble.

E______ a contesté avoir frappé F______ le 3 décembre 2021 tout en admettant l’avoir menacé avec son poing fermé. Devant les policiers, il n’avait pas reconnu avoir donné un coup mais il avait parlé au conditionnel pour apaiser la situation. Il entretenait de bons rapports de voisinage. Il était monté à une reprise chez K______, ancien locataire de l’immeuble, à cause du bruit répétitif qui émanait de son logement tous les vendredis et samedis soirs, voire les dimanches, en lui disant qu’il n’y aurait pas de prochaine fois dans ce sens qu’il ferait alors appel à la police. Sa compagne était quant à elle montée à plusieurs reprises pour les mêmes nuisances.

J______, entendue comme témoin, habitant au premier étage de l’immeuble, a déclaré qu’elle avait appelé la police après que F______ lui avait indiqué qu’il avait reçu un coup, sans qu’elle n’ait vu E______ l’asséner. Ce dernier ne s’était jamais montré agressif envers elle mais elle ne se sentait pas totalement en sécurité lorsqu’elle le croisait. C’était psychologique dès lors qu’elle avait appris qu’il était capable de frapper des femmes, l’ayant entendu le dire à deux femmes avec qui il avait eu une altercation à l’entrée de l’immeuble.

K______, entendu comme témoin, ayant habité l’immeuble dans un appartement de quatre pièces et demie avec son épouse et ses trois enfants, a déclaré qu’il avait quitté son appartement à fin décembre 2017 à cause de la taille dudit logement et de la peur engendrée à l’occasion d’un repas un vendredi soir entre amis avec des enfants qui faisaient du bruit après 22 heures. E______ était venu tambouriner à sa porte en lui disant d’arrêter le vacarme qui l’empêchait de dormir, tout en précisant que la prochaine fois, il le tuerait en lui montrant la cicatrice qu’il avait sur l’abdomen. Le témoin avait informé la régie de cet épisode. Il avait quitté l’appartement une année, voire une année et demie après cette altercation et avait vécu dans la terreur dans l’intervalle.

H______, entendue comme témoin, habitant au 2ème étage de l’immeuble, a déclaré que son épouse avait reçu des menaces verbales de la part de E______ lors de l’altercation du 3 décembre 2021 lors de laquelle il avait crié sur sa femme en lui reprochant d’avoir maintenu la porte de l’ascenseur bloquée. Ce dernier avait dit qu’il était capable de battre un homme comme une femme. Depuis cet incident, ni lui-même ni son épouse n’avait recroisé E______. Il n’avait pas vu donner le coup de poing que F______ se plaignait avoir reçu.

l. Par mémoires de plaidoiries finales du 2 juin 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

La locataire a produit une photo de l’abdomen de E______ pour démontrer qu’il n’avait aucune cicatrice contrairement aux déclarations de K______.

m. Le 13 juin 2023, le bailleur a répliqué, à la suite de quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC ; JEANDIN, Commentaire Romand, Code de procédure civile 2ème éd., 2019, n. 13 ad art. 308 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, le loyer annuel de l’appartement, charges comprises, a été fixé par le contrat à 13'344 fr.

En prenant en compte la durée de protection de trois ans et le montant du loyer, charges comprises, la valeur litigieuse est supérieure à 10'000 fr. (13'344 fr. x 3 ans = 40'032 fr.).

La voie de l’appel est ainsi ouverte.

1.3 Selon l’art. 311 CPC, l’appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l’instance d’appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier d’appel.

L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, n. 2314 et 2416; Rétornaz in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

2. Le bailleur fait grief aux premiers juges de n’avoir pas retenu que la résiliation ordinaire du bail n’était pas contraire à la bonne foi. A plusieurs reprises, mais en tous cas le 3 décembre 2021, E______ s’était montré violent et menaçant envers d’autres locataires et il faisait régner une atmosphère de peur dans l’immeuble concerné. Le bailleur devait, selon lui, préserver la sécurité dans son immeuble et protéger les locataires.

2.1 Le congé est annulable lorsqu'il contrevient aux règles de la bonne foi (art. 271 al. 1 CO). Pour que le congé soit annulable, il n'est pas nécessaire que l'attitude de la partie qui résilie puisse être qualifiée d'abus manifeste de droit au sens de l'art. 2 al. 2 CC.

Toute résiliation qui ne repose sur aucun intérêt digne de protection, qui consacre une attitude déloyale, qui résulte d’une disproportion manifeste entre les intérêts en présence ou dont le motif est manifestement un prétexte, tombe sous le coup de l'art. 271 al. 1 CO (LACHAT, Le bail à loyer, Lausanne, 2019, p. 958ss).

Le but de la réglementation des art. 271 et 271a CO est uniquement de protéger le locataire contre des résiliations abusives et n'exclut pas un congé même si l'intérêt du locataire au maintien du bail paraît plus important que celui du bailleur à ce qu'il prenne fin; seule une disproportion manifeste des intérêts en jeu, due au défaut d'intérêt digne de protection du bailleur, peut rendre une résiliation abusive (ACJC/1292/2008 du 3 novembre 2008; arrêt du Tribunal fédéral 4A.322/2007 du 12 novembre 2007 consid. 6; LACHAT, Commentaire romand, no 6 ad art. 271 CO). La notion de bonne foi ne se confond pas avec les justes motifs des art. 257f ou 266g CO (BARBEY, Commentaire du droit du bail, nos 30-39); il s'agit plutôt d'une référence à un ensemble de valeurs extra juridiques déduites de la sociologie et de la morale, auxquelles le droit ne permet pas qu'il soit dérogé. Pour les appréhender, le juge doit partir des normes généralement admises par la société puis, parmi elles, sélectionner celles qui sont pertinentes à la lumière des règles morales que l'ordre juridique entend consacrer (BARBEY, op. cit., no 43b).

Est contraire aux règles de la bonne foi une résiliation qui ne correspond à aucun intérêt digne de protection et apparaît comme une chicane, ainsi qu’un congé qui consacre une attitude déloyale (ATF 135 III 162 consid. 3.3.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_247/2021 du 4 mai 2022 consid. 3.1.2; LACHAT, op. cit., p. 959). La motivation du congé ne constitue pas une condition de sa validité; l'absence de motivation véridique ou complète peut toutefois constituer un indice que le motif réel du congé est contraire à la bonne foi (ATF 125 III 231 consid. 4b; BARBEY, op. cit., nos 290 et 319; Commentaire USPI, no 26 ad art. 271 CO). S'il est par contre admis que le motif réel de la résiliation, qui seul entre en considération, était légitime, le congé ne peut être annulé, puisque seul le mensonge qui masque un dessein abusif justifie l'application de l'art. 271 al. 1 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4C.85/2006 du 24 juillet 2006 consid. 2.1.2).

Le locataire est tenu d’user de la chose avec le soin nécessaire (art. 257f al. 1 CO). S’agissant du soin à apporter aux locaux et des égards envers les voisins, le locataire répond non seulement de ses propres actes, mais également des actes des personnes avec lesquelles il vit, de ses employés, de ses clients et de tous autres auxiliaires, des animaux qu’il détient ainsi que des actes de ses sous-locataires (LACHAT, op. cit., p. 886).

La motivation du congé a pour but de permettre au destinataire du congé de décider en toute connaissance de cause s'il entend requérir, ou non, l'annulation du congé ou la prolongation du bail, et de soupeser ses chances de succès. La partie qui résilie le bail fournira de préférence spontanément et d'emblée les motifs du congé; ils seront mentionnés sur la formule officielle ou sur la lettre de congé (LACHAT, op. cit., p. 953). La motivation doit être donnée dans le respect des règles de la bonne foi. En particulier, les motifs doivent être vrais (LACHAT, op. cit., p. 955; BOHNET/MONTINI, Droit du bail à loyer, Commentaire pratique, Bâle, 2010, no 22 ad art. 271 CO). Si le motif du congé cesse d'exister par la suite, la résiliation n'en demeure pas moins valable (arrêt du Tribunal fédéral 4A_545/2013 du 28 novembre 2013 consid. 3.2.3).

Le bien-fondé de la résiliation doit être apprécié au moment où son auteur manifeste sa volonté de mettre un terme au contrat (ATF 148 III 215 consid. 3.1.4; 142 III 91 consid. 3.2.1; DB 2006 p. 42; LACHAT, Commentaire romand, no 12 ad art. 271 CO).

C'est au destinataire du congé qu'il incombe de démontrer que celui-ci contrevient aux règles de la bonne foi, en particulier que le motif invoqué par le bailleur n'est qu'un prétexte (ATF 120 II 105 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 4C.411/2006 du 9 février 2007 consid. 2.2). Toutefois, la partie qui a résilié le bail a le devoir de contribuer loyalement à la manifestation de la vérité en fournissant tous les éléments en sa possession, nécessaires à la vérification du motif invoqué par elle (arrêt du Tribunal fédéral 4A.472/2007 du 11 mars 2008 consid. 2.1). Il n'appartient pas au bailleur de démontrer sa bonne foi car cela reviendrait à renverser le fardeau de la preuve (ACJC/334/2002 du 18 mars 2002; BARBEY, op. cit., no 202).

2.2 En l’espèce, le motif du congé réside dans le comportement reproché au compagnon de la locataire du 3 décembre 2021.

Les premiers juges ont retenu que E______ avait fait opposition à sa condamnation pour voies de fait par ordonnance pénale, l’affaire étant pendante devant le Tribunal de police. Quant à l’infraction d’injure à son encontre, une ordonnance de non-entrée en matière avait été rendue.

G______ a été condamnée pour injure envers E______.

Au vu de ce qui précède, le Tribunal a considéré que les circonstances de l’altercation n’étaient pas claires et que le déroulement de celle-ci était flou, des propos ayant été tenus de part et d’autre, dont certains avaient été probablement exagérés.

De plus, personne n’avait été témoin de coup ni n’avait entendu d’injures échangées entre F______ et E______.

Au vu des circonstances, les premiers juges ont retenu que le bailleur aurait dû contacter E______ afin d’entendre sa version des faits et le mettre en garde avant de résilier le bail.

Le bailleur n’ayant pas formulé de reproche par le passé contre la locataire et son compagnon depuis 30 ans, respectivement 15 ans, il ne pouvait pas se fonder uniquement sur la version des faits de certains habitants de l’immeuble, contrairement à ce que soutient à tort le bailleur, ce qui est corroboré par le fait que sept autres voisins ont attesté n’avoir rencontré aucun problème avec eux.

Le seul autre incident figurant à la procédure est la menace de mort qu’aurait proférée E______ à l’encontre de K______ en raison du bruit des enfants dans l’appartement de ce dernier après 22 heures.

Si K______ a témoigné avoir été terrorisé puis avoir déménagé en raison de cet incident, il n’en demeure pas moins qu’il a quitté l’immeuble plus d’un an après cet événement, également pour le motif de la taille de son logement. Sa déclaration selon laquelle E______ lui aurait montré une cicatrice sur son abdomen pour l’intimider est sujette à caution, puisqu’à teneur de la photo, ce dernier n’en aurait pas.

Enfin, tous les voisins entendus par le Tribunal ont confirmé ne pas avoir rencontré de problème avec la locataire ou son compagnon, hormis les deux épisodes susmentionnés. Bien que J______ ait déclaré ne pas se sentir en sécurité depuis l’altercation du 3 décembre 2021, elle a confirmé n’avoir jamais eu de problème avec E______. Les époux F______/G______ ont par ailleurs déclaré à la police ne jamais avoir vu celui-ci avant cette altercation. H______ a déclaré au Tribunal ne pas l’avoir vu après celle-ci.

Les faits de l’arrêt cité par le bailleur (ACJC/720/2020) à l’appui de son appel ne sont pas comparables au cas d’espèce, du fait que cette procédure avait établi des actes d'une gravité certaine, à savoir l'existence d’insultes, d’un coup porté au visage, ainsi que des menaces au moyen d'une arme blanche.

La Cour retiendra à l’instar du Tribunal que la procédure a établi que E______ n’a pas causé de problème à son voisinage, à l’exception de l’épisode du 3 décembre 2021, pour lequel il a été reconnu coupable de la seule infraction de voies de fait.

Même s’il n’appartient ni au Tribunal ni à la Cour d’établir la culpabilité pénale du compagnon de la locataire, comme le soutient à raison le bailleur, il n’en demeure pas moins que le congé est inutilement rigoureux et n’est donc pas digne de protection. Le jugement entrepris sera par conséquent confirmé.

3. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


 

PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

Déclare recevable l’appel interjeté le 10 novembre 2023 par A______ contre le jugement rendu le 10 octobre 2023 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/461/2022-15-OSB.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF;RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2