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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/27423/2019

ACJC/1665/2023 du 18.12.2023 sur JTBL/702/2022 ( OBL ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 01.02.2024, 4A_68/23
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/27423/2019 ACJC/1665/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 18 DECEMBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______ et Monsieur B______, p.a. et représentés par la régie C______, ______, appelants d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 26 septembre 2022, tous deux représentés par Me Pascal PETROZ, avocat, rue du Mont-Blanc 3, 1201 Genève,

et

1) Monsieur D______ et Madame E______, domiciliés ______, intimés, tous deux représentés par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genève 6,

2) VILLE DE GENEVE, rue de l'Hôtel-de-Ville 4, case postale 3983, 1211 Genève 3, autre intimée.

Le présent arrêt est communiqué aux parties par plis recommandés du 19.12.2023.

 

 

 

 

 

 

 

 

 



EN FAIT

A. Par jugement JTBL/702/2022 du 26 septembre 2022, communiqué aux parties par pli du 3 octobre 2022, le Tribunal des baux et loyers a déclaré recevables les pièces produites par E______ et D______ le 13 juin 2022 (ch. 1 du dispositif), a donné acte à la VILLE DE GENEVE de ce qu'elle avait accepté la dénonciation d'instance (ch. 2), a dit que le jugement était opposable à la VILLE DE GENEVE (ch. 3), a réduit de 15% du 17 septembre 2018 au 12 décembre 2019 et de 5% du 13 décembre 2019 au 30 avril 2020 le loyer de l'appartement de 7 pièces situé au ______ème étage de l'immeuble sis plateau de Champel no. ______ à Genève (ch. 4), a condamné A______ et B______ à verser à E______ et D______ le trop-perçu en découlant, à savoir 11'064 fr. 20 avec intérêts à 5% dès le 15 février 2021 (ch. 5), a réduit le loyer de l'appartement de 8.1% dès le 1er février 2020 (ch. 6), a condamné A______ et B______ à verser à E______ et D______ le trop-perçu découlant de la baisse de loyer octroyée sous chiffre 6 (ch. 7), a débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 8) et a dit que la procédure était gratuite (ch. 9).

B. a. Par acte expédié le 3 novembre 2022 au greffe de la Cour de justice, A______ et B______ (ci-après également : les bailleurs) forment appel contre ce jugement, dont ils sollicitent l'annulation des chiffres 1 et 4 à 8 de son dispositif et sa confirmation pour le surplus.

Ils produisent, comme pièce nouvelle, le jugement JTBL/835/2021 rendu par le Tribunal le 5 octobre 2021 (pièce n° 2).

b. Dans leur réponse du 6 décembre 2022, E______ et D______ (ci-après également : les locataires) concluent, préalablement, à ce que soit écartée la pièce n° 2 produite par les bailleurs et, principalement, au rejet de l'appel et à la confirmation du jugement entrepris.

c. Dans sa réponse du 7 décembre 2022, la VILLE DE GENEVE conclut à son adhésion aux conclusions des appelants, soit à la confirmation des chiffres 2, 3 et 9 et à l'annulation des chiffres 1 et 4 à 8 du dispositif du jugement.

d. Par réplique du 23 décembre 2022 et duplique du 14 respectivement 16 février 2023, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

e. Les parties ont été avisées le 21 mars 2023 par le greffe de la Cour de ce que la cause était gardée à juger.

C. Il résulte du dossier les faits pertinents suivants :

a. Le 17 janvier 2013, à E______ et D______, locataires, et A______ et B______, bailleurs, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location d'un appartement de sept pièces situé au ______ème étage de l'immeuble sis Plateau de Champel no. ______ à Genève (ci-après : également l'immeuble).

Le contrat a été conclu pour une durée initiale de cinq ans, du 1er février 2013 au 31 janvier 2018, renouvelable tacitement d'année en année, sauf résiliation respectant un préavis de trois mois pour la fin d'un mois.

Le loyer annuel, charges non comprises, a été échelonné et fixé à 43'200 fr. du 1er février 2013 au 31 janvier 2016, 54'000 fr. du 1er février 2016 au 31 janvier 2017 et 57'000 fr. dès le 1er février 2017.

Selon l'article 1 des clauses particulières du bail, cet échelonnement a été prévu pour prendre en compte les nuisances engendrées par le chantier du CEVA. En outre, les locataires ne pouvaient prétendre à aucune réduction de loyer ou indemnité supplémentaire.

Cette clause n'a pas fait l'objet de discussions entre les parties.

L'avis de fixation du loyer initial précise que le loyer se situe dans les limites usuelles dans la localité ou dans le quartier et que l'ancien loyer s'élevait à 48'000 fr. depuis le 1er juillet 2007.

A cette époque, les travaux de percement du tunnel ferroviaire et de construction de la gare réalisés par les CFF étaient en cours, avant que l'aménagement du Plateau de Champel par la VILLE DE GENEVE ne soit réalisé.

Les bailleurs n'ont pas allégué avoir fourni de renseignements relatifs au chantier du CEVA aux locataires.

b. Un avenant au bail a été conclu le 26 octobre 2015 repoussant le premier échelon d'une année et l'échéance du bail au 31 janvier 2019.

Un deuxième avenant a été conclu le 21 octobre 2016 repoussant le premier échelon d'une année supplémentaire. Ainsi, l'échelon portant le loyer à 54'000 fr. devait prendre effet le 1er février 2018 et celui fixant le loyer à 57'000 le 1er février 2019.

c. Un dernier avenant a été conclu le 7 décembre 2017 supprimant le second échelon, le loyer annuel restant ainsi fixé à 54'000 fr.

Selon les locataires, la suppression de cet échelon n'était pas motivée par les nuisances du chantier mais par le fait que le loyer de leur appartement se situait déjà dans les loyers usuels du quartier.

Selon la régie, l'échelon avait été supprimé en raison des nuisances du chantier.

d. En septembre 2018, la VILLE DE GENEVE a avisé les riverains qu'elle allait réaménager les espaces publics autour de la gare du futur Léman Express sur le plateau de Champel, conformément à l'autorisation de construire obtenue le 23 novembre 2017.

Ces travaux devaient se faire en parallèle du chantier du CEVA qui se poursuivait en sous-sol.

Le chantier débuterait le 17 septembre 2018 et durerait jusqu'au printemps 2020. Cependant, la plus grande partie des aménagements devait être terminée pour la mise en service du Léman Express en décembre 2019.

Les travaux auraient lieu en plusieurs étapes. Les premières semaines, ils se dérouleraient dans le périmètre du chantier alors en cours, ainsi que sur la parcelle située de l'autre côté de l'avenue de Champel (devant les numéros 35 à 41).

Puis, des interventions auraient lieu sur les avenues Alfred-Bertrand et de Champel et feraient l'objet d'autres feuilles d'information.

Les travaux seraient les suivants :

-                Travaux de terrassement et de remblayage;

-                Réalisation de canalisations pour la récolte des eaux de pluie;

-                Réalisation des différents réseaux d'arrosage pour les futurs arbres;

-                Réalisation des réseaux pour l'éclairage public;

-                Réalisation d'îlots végétalisés;

-                Mise en place d'enrobés bitumeux.

La VILLE DE GENEVE, consciente des désagréments occasionnés par ces travaux, remerciait le public et les riverain-e-s de leur patience et de leur compréhension.

e. Les travaux ont débuté le 17 septembre 2018. Les horaires d'hiver étaient de 07h30 à 17h00 avec une pause de 12h00 à 13h00. En été, le chantier débutait à 07h00.

f. Le chantier s'est déroulé en plusieurs étapes. Fin 2018, une dizaine d'arbres ont été abattus. Puis, il a été procédé à la mise en séparation des canalisations sur le plateau devant l'immeuble, nécessitant de creuser des tranchées de plus de quatre mètres de profondeur, à environ huit mètres de l'immeuble. Ces travaux ont duré entre deux et trois mois avec une interruption à Noël. Début 2019, les travaux d'aménagement côté rue de Miremont ont débuté et en été 2019 ont commencé ceux des îlots depuis la rue de Miremont en direction de l'immeuble. Ces aménagements ont nécessité le sciage d'un certain nombre de bordures en béton, engendrant du bruit, avec l'utilisation d'un brise-roche. Beaucoup de terre a dû être amenée sur le chantier pour mettre à niveau le terrain et du bitume a dû être enlevé.

g. Des engins habituels pour ce genre de travaux ont été utilisés pendant toute la durée du chantier, à savoir des pelles, des camions, des chargeuses et des rouleaux notamment. Des marteaux-piqueurs ont été utilisés par moment ainsi que des plaques vibrantes pour compresser le sol. Certaines de ces machines ont provoqué des vibrations mais ont été utilisées de manière ponctuelle à raison de quelques heures par jour et pas quotidiennement. Les machines étaient toutes équipées de filtres à particules. Les supports secs étaient arrosés pour limiter la production de poussière. Durant tout le chantier, les accès aux immeubles ont été garantis, notamment au moyen de plans élaborés par l'Office cantonal du transport, par des passerelles métalliques provisoires et des planches en bois d'environ 1m50 de large.

h. La VILLE DE GENEVE a fait parvenir plusieurs bulletins d'information aux riverains au cours du chantier :

- En janvier 2019, elle a informé les riverains que le chantier s'étendrait sur l'avenue Alfred-Bertrand, sur le tronçon situé entre l'avenue Peschier et le temple de Champel, pour la rénovation de la chaussée et des trottoirs, du 14 janvier 2019 jusqu'à fin février 2019, sous réserve de conditions météorologiques favorables.

- En février 2019, les riverains ont été avisés que les travaux se poursuivraient sur le deuxième tronçon de l'avenue Alfred-Bertrand situé entre le temple de Champel et l'avenue Dumas, du 4 mars 2019 jusqu'à fin avril 2019, sous réserve de conditions météorologiques favorables.

- En avril 2019, les riverains ont été avisés que les travaux se poursuivraient sur le troisième tronçon de l'avenue Alfred-Bertrand situé entre l'avenue Dumas et l'avenue Miremont, du 8 avril 2019 jusqu'à fin juin 2019, sous réserve de conditions météorologiques favorables.

i. Des coupures d'eau ont eu lieu dans le bâtiment des locataires les mercredi 3 avril 2019 de 13h00 à 17h00 et jeudi 4 avril 2019 de 9h00 à 16h00. Les locataires s'en sont plaints auprès de la régie en charge de l'immeuble.

j. Durant les nuits du 4 au 7 juin 2019, des travaux sur les lignes aériennes des TPG ont eu lieu à l'avenue de Champel Gare CEVA, pouvant occasionner des nuisances sonores selon l'information aux riverains. Les locataires s'en sont plaints auprès de la régie.

k. Les travaux sur le grand plateau se sont terminés le 12 décembre 2019, lors de l'inauguration du CEVA et les travaux sur le petit plateau situé en face ont été terminés en avril 2020. Les containers de chantier ont été évacués entre le 13 et le 18 juin 2020.

l. Les 10 octobre 2018, 7 novembre 2018 et 13 décembre 2018, les locataires se sont plaints auprès de la régie des nuisances occasionnées par les travaux, à savoir de la poussière sur les meubles du balcon, du bruit, des tremblements, des difficultés à accéder à l'immeuble à cause des barrières de chantier, et ont sollicité une nouvelle réduction de loyer.

m. La régie a répondu le 19 décembre 2018 que les propriétaires avaient déjà consenti à des réductions de loyer supplémentaires en repoussant l'entrée en vigueur du premier échelon et en supprimant le second échelon de 57'000 fr.

n. Le 23 décembre 2018, les locataires ont répondu que lors de la signature du bail, il leur avait été également promis oralement que les réductions de loyer seraient octroyées jusqu'à la fin des travaux. Les nuisances subies par les travaux de la VILLE DE GENEVE étaient pires que celles engendrées par les travaux du CEVA. Le fait d'avoir supprimé le dernier échelon n'était pas lié aux nuisances de chantier mais au fait que le loyer de leur appartement était conforme aux loyers du quartier. Ils étaient au courant que d'autres locataires avaient obtenu de nouvelles réductions en lien avec les travaux.

o. Le 10 janvier 2019, la régie leur a fait connaître que les réductions étaient traitées au cas par cas, en fonction du loyer initial et de l'importance et du nombre d'échelons prévu dans le bail. Plusieurs locataires s'étaient vus refuser un report d'échelon. En comparaison avec les loyers des locataires entrés les cinq années précédentes, à savoir depuis le début des travaux réalisés par la VILLE DE GENEVE, leur loyer se situait dans la fourchette basse et correspondait aux loyers usuels pratiqués dans le quartier.

p. Par pli non signé du 12 février 2019, des résidents de l'immeuble sis Plateau de Champel no. ______ se sont plaints auprès de la régie en charge de l'immeuble des nuisances liées au bruit, des émissions de carburant et de la poussière dues aux travaux exécutés en face et à côté de leur bâtiment. Depuis quatre semaines, la rue était impraticable. Ils devaient vivre les fenêtres fermées, une habitante avait changé de chambre, une autre était dans l'impossibilité de travailler depuis chez elle, un bébé de 10 mois n'arrivait plus à dormir et il n'était plus possible de se faire livrer des marchandises dans l'immeuble. Une réduction de loyer de 30% avec effet rétroactif au 17 septembre 2018 était demandée.

q. Parallèlement à la problématique des nuisances, les locataires ont, le 28 octobre 2019, sollicité une baisse de loyer de 8.26% en raison de la baisse du taux hypothécaire.

La régie a répondu le 5 novembre 2019 que seule une baisse de 2.10% serait accordée à cause de la variation des charges immobilières de 2012 à 2018 de 6%.

r. Le loyer de l'appartement de six pièces situé au ______ème étage de l'allée d'à côté (no. ______ Plateau de Champel) a été réduit pendant les travaux de 62'400 fr. (en vigueur depuis le 16 avril 2011) à 58'800 fr. dès le 1er mai 2018, puis à 54'000 fr. à partir du 1er mai 2019.

s. Par requêtes déposées le 3 décembre 2019 devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, déclarées non conciliées à l'audience de conciliation du 29 janvier 2020 puis portées devant le Tribunal le 3 février 2020, les locataires ont conclu à une réduction de loyer de 30% dès le 17 septembre 2018 jusqu'à la fin des travaux, avec remboursement du trop-perçu de loyer (C/27423/2019), et à une baisse de loyer de 8.1% dès le 1er février 2020 (C/27424/2019).

t. Le 20 mars 2020, les bailleurs ont informé la VILLE DE GENEVE qu'ils lui avaient officiellement dénoncé l'instance concernant la procédure les opposant aux locataires.

Le 24 mars 2020, la VILLE DE GENEVE a confirmé qu'elle interviendrait en faveur de la partie qui avait dénoncé l'instance, sans autre condition et sans procéder à sa place.

u. Par ordonnance du 18 février 2020, le Tribunal a ordonné la jonction des causes sous le numéro de procédure C/27423/2019.

v. Par mémoire réponse et dénonciation d'instance du 13 mai 2020, les bailleurs ont conclu, préalablement, à ce qu'il leur soit donné acte de ce qu'ils avaient dénoncé l'instance à la VILLE DE GENEVE le 20 mars 2020, principalement, au déboutement des locataires de leurs conclusions et, subsidiairement, à ce qu'il leur soit donné acte de ce que le loyer était réduit de 15% dès le 17 septembre 2018 jusqu'à la fin des travaux.

w. Le 13 juillet 2020, la VILLE DE GENEVE a conclu au déboutement des locataires de leurs conclusions.

x. Des audiences se sont tenues au Tribunal les 26 janvier, 27 avril et 19 octobre 2021 et 11 janvier, 3 mai et 14 juin 2022.

Les locataires ont produit des photos et des vidéos du chantier sur lesquelles on peut constater la proximité des machines stockées dans l'enceinte du chantier au pied de l'immeuble, l'accès difficile à ce dernier et l'ampleur des travaux sur le plateau de Champel.

Ils ont déclaré qu'à la signature du bail, il avait été convenu oralement que des réductions de loyer seraient accordées jusqu'à la fin des travaux. La locataire travaillait à l'extérieur toute la journée mais partait plus tôt le matin par peur de subir des vibrations. Le locataire travaillait habituellement deux jours par semaine depuis son appartement, ce qui était devenu difficile durant les travaux, malgré les fenêtres fermées et l'achat d'un casque anti-bruit. La fille des locataires était à l'école la journée. L'appartement était traversant et deux chambres, dont celle de leur fille, alors âgée de 10 ans, un salon et un petit balcon donnaient côté chantier, une autre chambre, une pièce et la cuisine donnant sur l'avenue Peschier. Selon le locataire, les travaux commençaient parfois à 6h00 et se terminaient parfois à 21h/22h et avaient été entrepris durant quelques samedis.

F______, gérant auprès de la régie, a déclaré que chaque demande de réduction de loyer en lien avec le CEVA avait été traitée au cas par cas, à savoir que certaines fois, une réduction avait été accordée et d'autres fois non. Selon lui, le deuxième échelon avait été supprimé à cause des nuisances liées au CEVA.

G______, dont les bailleurs ont accepté que ses déclarations faites dans le cadre de la procédure parallèle C/1______/2019 soient apportées à la présente procédure, a déclaré qu'il avait habité l'immeuble de fin 2016 à l'été 2020 au ______ème étage. Il avait obtenu une réduction de loyer d'environ 10% lors de son emménagement en 2016 en raison du chantier et cette réduction avait été prolongée pendant toute la durée où il avait habité l'immeuble, à savoir jusqu'à l'été 2020. Le chantier était assez calme au début mais après un an, les nuisances avaient augmenté, notamment l'accès à l'immeuble, le bruit, l'odeur de gaz des machines de chantier et la poussière. Il y avait eu ponctuellement des petites vibrations. Les travaux débutaient entre 7h00 et 8h00 du matin. En 2019, il avait eu une allergie à la poussière qui avait disparu quand il avait déménagé. Il devait fermer les fenêtres de sa chambre la nuit.

y. Les locataires ont produit, à la dernière audience devant le Tribunal, des déclarations d'autres locataires de l'immeuble, faites dans le cadre de procédures parallèles, à savoir H______, I______ et J______, K______ et L______, ainsi que les déclarations de M______, garde d'enfants habitant chez un locataire de l'immeuble, N______, garde d'enfants au service d'autres locataires mais n'habitant pas sur place, et O______, amie d'un couple de locataires.

Toutes les personnes ayant signé un bail pendant les travaux ont indiqué que la régie leur avait dit que les travaux touchaient à leur fin. Elles ont confirmé que les nuisances liées au CEVA s'étaient calmées fin 2017 et qu'elles avaient repris en septembre 2018 avec le début des travaux de la VILLE DE GENEVE. Toutes ont décrit du bruit toute la journée, parfois mais rarement, le weekend et la nuit, de la poussière, des vibrations et tremblements, des coupures d'eau, des odeurs de carburants et un accès restreint et difficile à l'immeuble. Elles ont fait état de beaucoup de camions et de machines de chantier stockées à proximité immédiate de l'immeuble. Les nuisances ont perduré jusqu'à décembre 2019 pour H______, voire mai 2020 pour N______. P______ a déclaré que les nuisances étaient fortes jusqu'en novembre 2019 et que par la suite, elles étaient acceptables. Selon K______, les deux derniers mois, les travaux avaient consisté en la plantation d'arbres et les nuisances étaient moins intenses.

Q______, habitant au ______ème étage de l'immeuble sis no. ______, plateau de Champel [soit dans l'immeuble d'à côté] depuis 2008, et R______, habitant le même immeuble depuis novembre 2018, ont déclaré ne pas avoir été vraiment dérangées par les travaux, la première travaillant à T______ [VD] toute la journée, précisant que les travaux avaient tout de même généré du bruit, de la poussière et des tremblements, surtout au début. S______, ______ ayant son cabinet dans l'immeuble, a déclaré que le bruit demandait parfois des interruptions de quelques secondes dans la conversation et qu'il évitait d'ouvrir les fenêtres côté chantier. Il a ajouté ne pas avoir constaté de péjoration des nuisances ou de changement d'intensité des travaux en 2018.

z. A la fin de la dernière audience, les locataires ont précisé leurs conclusions, à savoir une réduction de loyer de 30% du 18 septembre 2018 au 30 avril 2020, soit 26'325 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 15 février 2021, la fixation du loyer mensuel à 4'135 fr. dès le 1er février 2020 et la condamnation des bailleurs à leur rembourser le trop-perçu de 365 fr. par mois depuis le 1er février 2020.

Les parties ont ensuite procédé aux plaidoiries finales. Les bailleurs ont conclu à l'irrecevabilité des déclarations des témoins et des autres locataires des procédures parallèles déposées par les locataires lors de la dernière audience. Pour le surplus, les parties ont persisté dans leurs conclusions, puis la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louée sont de nature pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC; JEANDIN, Commentaire Romand, Code de procédure civile 2ème éd., 2019, n. 13 ad art. 308 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).

1.2 En l'espèce, la valeur litigieuse s'élève à 26'325 fr., en ne prenant en compte que la somme à laquelle ont conclu en dernier lieu les locataires devant le Tribunal en ce qui concerne la réduction de loyer en raison des travaux. Elle est donc supérieure à 10'000 fr.

La voie de l'appel est ainsi ouverte.

1.3 Selon l'art. 311 al. 1 et 2 CPC, l'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision, laquelle doit être jointe au dossier.

L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131 et 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; HOHL, Procédure civile, tome II, 2ème éd., 2010, n. 2314 et 2416; RETORNAZ in : Procédure civile suisse, Les grands thèmes pour les praticiens, Neuchâtel, 2010, p. 349 ss, n. 121).

2. 2.1 Les appelants ont produit à l'appui de leur appel, comme pièce nouvelle, le jugement JTBL/835/2021 rendu par le Tribunal le 5 octobre 2021.

2.2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuves nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (JEANDIN, Code de procédure civile commenté, Bâle, 2011, n. 6 ad art. 317 CPC).

Les faits notoires sont ceux dont l'existence est certaine au point d'emporter la conviction du juge, qu'il s'agisse de faits connus de manière générale du public ou seulement du juge, qui ne doivent pas être prouvés (art. 151 CPC).

2.2.2 En l'espèce, le jugement du Tribunal JTBL/835/2021 concernant d'autres parties n'est pas notoire, de sorte qu'il aurait dû être produit devant le Tribunal. En outre, les appelants ne soutiennent pas qu'ils n'auraient pas été en mesure de le produire auparavant. Ce jugement est donc irrecevable, ainsi que les faits qu'il contient.

2.3 Les appelants font griefs aux premiers juges d'avoir intégré à la procédure les déclarations non datées des autres locataires et des témoins des procédures connexes produites par les locataires.

Ils soutiennent qu'outre le fait que ces déclarations auraient été déposées tardivement, elles ne seraient pas pertinentes, dans la mesure où elles ne seraient pas objectives, les intérêts de tous les locataires convergeant à l'obtention d'une réduction du loyer.

2.4 Selon l'art. 229 al. 3 CPC, lorsqu'il doit établir les faits d'office (art. 247 al. 2 CPC), le tribunal admet des faits et moyens de preuve nouveaux jusqu'aux délibérations.

Le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées (art. 157 CPC). Ce faisant, le tribunal décide d'après sa conviction subjective personnelle si les faits se sont produits ou non, c'est-à-dire s'ils sont prouvés ou non (HOHL, Procédure civile, Tome I, 2001, n. 1105). Le juge forge sa conviction sur la base de sa seule appréciation de toutes les preuves qui auront été réunies au cours de la phase probatoire (ATF 132 III 109 consid. 2; JEANDIN, L'administration des preuves, in Le Code de procédure civile, aspects choisis, 2011, p. 93).

L'appréciation des preuves par le juge consiste, en tenant compte du degré de la preuve exigé, à soupeser le résultat des différents moyens de preuves administrés et à décider s'il est intimement convaincu que le fait s'est produit, et partant, s'il peut le retenir comme prouvé (arrêt du Tribunal fédéral 5A_812/2015 du 6 septembre 2015 consid. 5.2).

2.5 En l'espèce, les premiers juges ont considéré que le dépôt des déclarations des autres procédures connexes par les locataires n'était pas tardif, car effectué avant les plaidoiries finales orales, et que celles-ci étaient utiles pour trancher la cause puisqu'elles apportaient des précisions sur l'étendue des nuisances subies par les autres habitants de l'immeuble.

Ce raisonnement est conforme aux principes rappelés ci-dessus. Le Tribunal a conservé son pouvoir d'appréciation quant au contenu et à la force probante des déclarations faites par les autres locataires qui ont également demandé des réductions de loyer dans le cadre d'autres procédures. Les appelants ne soutiennent pas par des éléments concrets que le Tribunal aurait mésusé de son pouvoir d'appréciation.

Par conséquent, le grief n'est pas fondé.

3. Les appelants font griefs au Tribunal d'avoir constaté inexactement les faits et d'avoir violé les art. 9 Cst, 4 CC, 256, 259a et 259d CO.

3.1 Aux termes de l'art. 256 al. 1 CO, le bailleur est tenu de délivrer la chose louée à la date convenue, dans un état approprié à l'usage pour lequel elle est louée, et l'entretenir dans cet état.

La chose louée est défectueuse lorsqu'elle ne présente pas une qualité que le bailleur avait promise ou lorsqu'elle ne présente pas une qualité sur laquelle le locataire pouvait légitimement compter en se référant à l'état approprié à l'usage convenu (ATF 135 III 345 consid. 3.2).

Le bailleur répond en principe des défauts qui lui sont imputables même en cas de méconnaissance ou de comportement irréprochable, puisqu'il assume une obligation de garantie (BOHNET/MONTINI, Droit du bail à loyer, 2011, ad art. 256 CO n. 1).

De manière générale, les parties peuvent convenir, pour autant qu'elles le fassent expressément, d'un usage inférieur à la norme. Dans un tel cas, la chose ne disposera pas, au moment de sa remise, de toutes les propriétés requises pour un usage "normal". Mais alors le loyer doit tenir compte de cet élément (BOHNET/MONTINI, op. cit., n. 19, ad art. 256 CO).

Un usage de la chose inférieur à la norme doit trouver son reflet, de manière reconnaissable et proportionnelle, dans la fixation du loyer ou dans le calcul d'une indemnité à charge du bailleur (THEVENOZ/WERRO, Commentaire romand du Code des obligations I, ad art. 256, §10).

La responsabilité du bailleur n'est pas engagée pour les défauts que le preneur connaissait lors de la conclusion du contrat ou qu'il aurait dû connaître en déployant l'attention commandée par les circonstances existant à l'époque de la conclusion initiale du contrat (arrêt du Tribunal fédéral du 24 septembre 1985, SJ 1986 p. 195; jugement du Tribunal des baux du canton de Vaud du 23 janvier 2003 = Cahier du bail 2004, p. 58).

La doctrine n'est pas unanime quant aux conséquences à donner à la connaissance du défaut par le locataire lors de la conclusion du bail. Le fait décisif est de savoir si le locataire était suffisamment renseigné au moment de la signature du bail au sujet des atteintes qui ont finalement justifié une réduction de loyer. Sauf modification considérable des circonstances, une demande en réduction de loyer devrait donc dans ce cas lui être refusée, au risque sinon de constituer un abus de droit (BOHNET/MONTINI, op. cit. n. 32 ad art. 259d CO). Cependant, le fait qu'un locataire connaisse un défaut ne signifie pas forcément qu'il l'accepte dans toutes ses conséquences (art. 258 al. 2 CO). Une réduction de loyer est due s'il ne ressort ni du contrat ni des circonstances, que les parties aient tenu compte des nuisances pour fixer le loyer (BOHNET/MONTINI, op. cit., n. 32 ad art. 256 CO, n. 41 et ad art. 259d CO). Dans une telle hypothèse, afin qu'une telle convention soit valable, le locataire doit être conscient de l'étendue des travaux, des désagréments ainsi que de la moins-value qui s'en suit (qui correspond à la prétention en réduction de loyer); la renonciation est alors concrète et non abstraite; elle ne concerne toutefois pas ce qui dépasserait l'ampleur des travaux prévus (arrêt du Tribunal fédéral 4A_269/2009 du 19 août 2009 consid. 2.1).

3.2 En l'espèce, les premiers juges ont retenu à raison que les locataires étaient en droit de réclamer une réduction de loyer.

Ils ont considéré que la réduction de loyer convenue ne portait que sur les travaux du CEVA, à l'exclusion de ceux réalisés par la VILLE DE GENEVE. En outre, les locataires avaient renoncé à demander une réduction supplémentaire du loyer uniquement dans le cadre des travaux CEVA.

Il ne peut pas être déduit de l'article 1 des clauses particulières du bail l'acceptation par les locataires d'un usage des locaux inférieur à la norme en ce qui concerne les travaux d'aménagement extérieur de la gare réalisés par la VILLE DE GENEVE, ni une réduction de loyer en conséquence.

Les locataires n'ont pas été suffisamment informés au moment de la conclusion du contrat et ladite clause ne peut pas être interprétée comme une renonciation de leur part à se prévaloir d'une baisse de loyer s'agissant des travaux de la VILLE DE GENEVE.

Partant, les locataires sont fondés à obtenir une réduction de loyer pour la période entre le 17 septembre 2018 et le 30 avril 2020 conformément à leurs conclusions.

3.3 La réduction du loyer se calcule sur le loyer net, sans les frais accessoires (LACHAT, Le bail à loyer, Lausanne 2019, p. 316). Pour le calcul de la réduction du loyer, on procède en principe selon la méthode dite "proportionnelle". On compare l'usage de la chose louée, affectée de défauts, avec son usage conforme au contrat, exempt de défauts. En d'autres termes, il s'agit de réduire le loyer dans un pourcentage identique à la réduction effective de l'usage des locaux, de rétablir l'équilibre de prestations des parties (ATF 130 III 504 consid. 4.1; 126 III 388 consid. 11c; LACHAT, op. cit. p. 315).

Lorsqu'un calcul concret de la diminution de valeur de l'objet entaché du défaut n'est pas possible, notamment lorsque l'intensité des nuisances est variable et se prolonge sur une longue période, de sorte que les preuves de l'intensité des nuisances et de l'entrave à l'usage ne peuvent être fournies au jour le jour, le tribunal procède à une appréciation en équité, par référence à l'expérience générale de la vie, au bon sens et à la casuistique (ATF 130 III 504 consid. 4.1; ACJC/1016/2017 du 28 août 2017 consid. 3.1; BURKHALTER/MARTINEZ-FAVRE, Le droit suisse du bail à loyer, 2011, p. 244; arrêt du Tribunal fédéral 4C_219/2005 du 24 octobre 2005 consid. 2.3 et 2.4).

A cet égard, le juge doit apprécier objectivement la mesure dans laquelle l'usage convenu se trouve limité, en tenant compte des particularités de chaque espèce, au nombre desquelles la destination des locaux prévus dans le contrat joue un rôle important (arrêt du Tribunal fédéral 4A_582/2012 du 28 juin 2013 consid. 3.2 et 3.3).

3.4 En matière de défauts liés à des nuisances provenant d'un chantier, les taux de réduction de loyer sont en général compris selon la casuistique entre 10% et 25%. Les cas où les nuisances sonores ont conduit à des réductions de loyer de 5% à 10% sont plutôt des situations de bruits intermittents qui, bien que gênants, n'empiètent généralement pas sur la période nocturne. Une réduction de 15% a également été retenue dans le cadre d'un chantier relatif à la construction d'un complexe de quatre immeubles à proximité de l'objet loué, en raison du bruit, de la poussière, des trépidations engendrées par ce type de travaux, ce qui représentait une moyenne entre les périodes objectivement les plus pénibles et celles plus calmes (ACJC/550/2015 du 11 mai 2015 consid. 4.1; ACJC/202/2013 du 18 février 2013 consid. 6.1).

En matière de baux d'habitation, la Cour a confirmé une diminution de loyer à hauteur de 20%, pris en tant que taux moyen, pendant une année et demie à l'occasion d'importants travaux entrepris sur des voies et ses quais situés à 30 mètres du logement de la locataire et effectués momentanément 24 heures sur 24 ou le week-end. S'y étaient ajouté le chantier du CEVA et la construction d'une nouvelle ligne de tramway également à proximité de l'immeuble. La Cour a notamment retenu que le bruit généré par les chantiers était sensiblement plus gênant que celui de la circulation routière et ferroviaire auquel l'appartement était exposé. Durant la période concernée, le repos des habitants du quartier avait été particulièrement affecté par des travaux effectués pendant la nuit ou le week-end (ACJC/578/2009 du 11 mai 2009 consid. 4.2).

Dans un arrêt du 2 avril 2007 (ACJC/377/2007), la Cour a accordé une réduction du loyer de 15% durant 18 mois, en lien avec la construction de la troisième voie de chemin de fer entre Genève et Coppet, à des locataires occupant une villa située en bordure de cette voie de chemin de fer. Elle a retenu l'importance du chantier, comportant des travaux de nuit, ainsi qu'un loyer relativement élevé, mais aussi les nuisances préexistantes inhérentes à une habitation en bordure d'une voie ferrée très fréquentée.

Enfin, dans un arrêt du 3 octobre 2022 (ACJC/1277/2022) relatif au chantier du CEVA, la Cour a considéré que ne violait pas le droit la fixation de la réduction de loyer faite par le Tribunal des baux et loyers fixée en équité à 15%, face à l'impossibilité de déterminer précisément l'ampleur de chaque nuisance et la temporalité de celles-ci et en particulier s'agissant de locaux dans lesquels était exercée une activité professionnelle.

3.5 En l'espèce, le Tribunal a accordé à juste titre une réduction de 15% du 17 septembre 2018 au 30 juin 2019.

Cette réduction correspond aux travaux d'aménagement extérieur de la gare réalisés par la VILLE DE GENEVE, ayant provoqué des nuisances au-delà de ce qui était tolérable en milieu urbain.

Les premiers juges ont retenu à raison que ces travaux ont généré beaucoup de bruit entre 07h00/07h30 et 17h00 à raison de plusieurs heures par jour. De nombreux engins de chantier ont été utilisés et des tranchées de trois ou quatre mètres de profondeur creusées en vue des travaux de canalisations, générant des nuisances, notamment sonores.

Plusieurs habitants de l'immeuble ont indiqué que ces travaux avaient généré de la poussière, les forçant à fermer les fenêtres en permanence, les empêchant de jouir de leur balcon en semaine, certains habitants ayant développé des allergies qui ont disparues suite à leur déménagement. Ils ont également ressenti de fortes vibrations et tremblements et subi plusieurs coupures d'eau pendant le chantier.

Certains travaux ont eu lieu à proximité immédiate de l'immeuble des locataires créant une impression d'enfermement, avec la présence de machines, barrières de chantier et mouvements de camions, étant précisé que deux chambres, dont celle de la fille des locataires âgée alors de 10 ans, un salon et un petit balcon de l'appartement des locataires donnaient côté chantier. Enfin, l'accès à l'immeuble se faisait par des planches provisoires et étroites.

Cela étant, les nuisances n'ont pas été constantes, les travaux n'ayant pas toujours lieu au même endroit et pas toujours à proximité immédiate de l'immeuble. Les machines causant des vibrations n'ont pas été utilisées tous les jours et uniquement quelques heures dans la journée. Elles étaient conçues spécialement pour fonctionner en milieu urbain. Les nuisances ont été atténuées dans la mesure du possible, en arrosant par exemple la terre. Enfin, les travaux n'ont pas eu lieu la nuit et durant quelques samedis mais pas de manière constante les week-ends.

S'agissant de la réduction de 5% accordée par le Tribunal pour la période du 13 décembre 2019 au 30 avril 2020, elle correspond principalement dans la plantation de nombreux arbres, générant des nuisances moins importantes.

Contrairement aux allégations des bailleurs, les premiers juges n'ont pas constaté inexactement les faits, ni violé les dispositions légales sur les défauts de la chose louée. La Cour confirmera le jugement entrepris sur ces points.

4. Les appelants font grief aux premiers juges de ne s'être pas référés au taux hypothécaire de référence de décembre 2018 pour le comparer avec celui de février 2020 dans le calcul de la réduction du loyer consécutivement à la baisse du taux hypothécaire.

4.1 En vertu de l'art. 270a al. 1 CO, le locataire peut contester le montant du loyer et en demander la diminution pour le prochain terme de résiliation, s'il a une raison d'admettre que la chose louée procure au bailleur un rendement excessif au sens des art. 269 et 269a CO, à cause d'une notable modification des bases de calcul, résultant en particulier d'une baisse des frais.

La baisse de loyer doit être demandée pour le prochain terme de résiliation (ATF 119 II 32 c.3.c.aa). Si le bail est indexé ou échelonné, le locataire ne peut demander une baisse de loyer que pour l'échéance contractuelle (LACHAT/ STASTNY, Le bail à loyer, Lausanne, 2019, p. 661).

4.2 L'échelonnement peut résulter d'une clause insérée dans le contrat de bail, d'une convention ultérieure entre les parties, d'une transaction judiciaire ou extra-judiciaire ou encore d'un avis de majoration (BOHNET/CARRON/MONTINI, Droit du bail à loyer, Bâle, 2010, n. 7 ad. art. 269c CO).

En application de la méthode relative, la date de référence pour le calcul du nouveau loyer est celle de l'expiration de la clause d'échelonnement, que celle-ci résulte du contrat, d'un avis de majoration ou d'une transaction judiciaire (ATF 121 III 397 consid. 2b/bb et c). Le Tribunal fédéral considère en effet que le loyer échelonné couvre l'ensemble des frais pour toute la durée du bail, les parties ayant anticipé la variation des facteurs de fixation du loyer. Toutefois, lorsque la conclusion de la clause d'échelonnement ne visait pas l'anticipation de l'évolution des critères de fixation du loyer mais un autre but, tel celui d'accorder un rabais au locataire ou d'arriver progressivement à un loyer procurant un rendement suffisant, la date de référence à prendre en compte peut être celle de la conclusion de la clause d'échelonnement, si telle semble avoir été la volonté des parties au moment de sa conclusion et pour peu que la convention d'échelonnement précise deux points : d'une part, le but de l'échelonnement (qui ne doit pas être l'anticipation des coûts) et, d'autre part, les bases de calcul du loyer échelonné (taux hypothécaire, IPC, etc.). En outre, pour le taux hypothécaire, l'application de l'article 13 al. 4 OBLF doit également être réservée (BOHNET/CARRON/MONTINI, op. cit. n. 38 ad. art. 269c CO; LACHAT/STASTNY, op. cit., p. 668s).

Lorsque les parties ont laissé le bail se reconduire tacitement à la fin de la période d'échelonnement, chacune d'elles peut fonder une demande d'adaptation ultérieure du loyer, à son choix, sur la méthode absolue ou relative. Si l'une des parties se prévaut de la méthode relative, on appréciera le nouveau loyer en fonction de l'évolution des critères relatifs à compter de la date d'expiration de la période d'échelonnement. On doit admettre une dérogation à cette dernière règle, et permettre aux parties de remonter au-delà de cette date, quand la clause d'échelonnement n'avait pas pour but d'anticiper l'évolution probable des coûts (LACHAT/STASTNY, op. cit., p. 668).

4.3 En l'espèce, les premiers juges ont retenu à juste titre le taux en vigueur au 1er février 2013, soit la date de la conclusion de la clause d'échelonnement, pour le comparer avec celui du 1er février 2020.

Ils ont considéré à raison que le loyer avait été échelonné pour tenir compte des nuisances engendrées par le chantier du CEVA et non pour anticiper les coûts. Bien que le bail n'indiquât pas les bases de calcul du loyer échelonné et en application de l'art. 13 al. 4 OBLF, c'était bien la date de la conclusion de la clause d'échelonnement qui devait être prise en compte.

Le grief des appelants sera donc rejeté.

Le jugement entrepris sera confirmé dans son intégralité.

5. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers, étant rappelé que l'art. 116 al. 1 CPC autorise les cantons à prévoir des dispenses de frais dans d'autres litiges que ceux visés à l'art. 114 CPC (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


A la forme
:

Déclare recevable l'appel interjeté le 3 novembre 2022 par A______ et B______ contre le jugement JTBL/702/2022 rendu le 26 septembre 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/27423/2019-6-OSD.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Sylvie DROIN et Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Madame Zoé SEILER et Monsieur
Nicolas DAUDIN, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr. cf. consid. 1.2.