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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/26940/2020

ACJC/1225/2023 du 25.09.2023 sur JTBL/495/2022 ( OBL ) , CONFIRME

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/26940/2020 ACJC/1225/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 25 SEPTEMBRE 2023

 

Entre

Monsieur A______, domicilié ______, appelant d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 23 juin 2022, comparant par Me Pascal JUNOD, rue de la Rôtisserie 6, 1204 Genève, en l'Etude duquel il fait élection de domicile,

et

Monsieur B______, domicilié ______, intimé, comparant en personne.

 


EN FAIT

A.           a. Par jugement JTBL/495/2022 du 23 juin 2022, notifié le 27 juin 2022 à A______, le Tribunal des baux et loyers (ci-après : le Tribunal) a déclaré irrecevables les conclusions en paiement prises par B______ à l'encontre de A______ (chiffre 1 du dispositif), constaté la validité du congé notifié à ce dernier par B______ par avis officiel du 21 décembre 2020 pour le 31 janvier 2021, concernant la villa sise chemin 1______ no. ______ à C______ [GE] (ch. 2), condamné A______ à évacuer immédiatement de sa personne et de ses biens ainsi que de toute autre personne faisant ménage commun avec lui la villa précitée (ch. 3), annoncé transmettre la cause, à l'expiration du délai d'appel contre le jugement entrepris, au Tribunal siégeant dans la composition prévue à l'art. 30 LaCC, pour statuer sur les mesures d'exécution sollicitées (ch. 4), débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5) et dit que la procédure était gratuite (ch. 6).

b. En résumé, le Tribunal a statué dans un premier temps sur la recevabilité des conclusions reconventionnelles prises par B______ (ci-après également le bailleur) d'une part en évacuation de A______ (ci-après également le locataire) et d'autre part en paiement à l'encontre de ce dernier. Dans la mesure où les conclusions précitées relevaient respectivement de deux procédures distinctes, seules les premières ont été déclarées recevables.

Dans un deuxième temps, le Tribunal a tranché la question de savoir si le contrat de bail liant A______ à B______ était de durée indéterminée. Il a considéré que, compte tenu de la conclusion successive de contrats de bail de durée déterminée et du fait que A______ était demeuré dans la maison postérieurement à l'échéance du bail en date du 31 janvier 2020 sans protestation de B______, les parties étaient liées par un contrat de durée indéterminée.

Pour cette dernière raison, le Tribunal a considéré que les conditions d'application de l'art. 257d CO étaient remplies, dans la mesure où A______ n'avait procédé qu'à un versement partiel du loyer et avait dès lors été mis en demeure de verser le solde en mains de B______. Même si le montant figurant dans la mise en demeure n'était pas clair, le locataire n'avait pas eu l'intention de payer le moindre loyer, de sorte qu'il était de mauvaise foi lorsqu'il invoquait le manque de clarté pour s'opposer à la résiliation. La résiliation qui lui avait dès lors été notifiée était valable et le congé subséquent efficace.

L'annulation du congé précité aux termes de l'art. 271 CO n'était pour le surplus pas envisageable dans la mesure où son application en cas de congé donné pour demeure du locataire n'était possible qu'à titre exceptionnel.

Aucune prolongation de bail ne pouvait être envisagée de sorte que le Tribunal a prononcé l'évacuation de A______, demeuré dans la villa sans titre valable depuis le 1er février 2021.

B. a. Par acte expédié à la Cour de justice le 29 août 2022, A______ a formé appel du jugement précité et conclu principalement au fond, sous suite de frais et dépens, à ce qu'il soit annulé et, cela fait, à ce que B______ soit débouté de toutes ses conclusions. Subsidiairement, il a conclu à l'annulation du jugement entrepris et au renvoi de la cause au Tribunal pour une nouvelle décision dans le sens des considérants de l'arrêt de la Cour.

b. A______ a allégué des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

c. En substance, il a reproché au Tribunal d'avoir, d'une part, constaté les faits de manière inexacte et, d'autre part, d'avoir violé le droit.

c.a S'agissant de la constatation inexacte des faits, A______ se plaint de ce que le Tribunal aurait retenu par erreur que les parties étaient convenues que le locataire serait informé de l'avancement de la commercialisation du projet de construction d'un habitat groupé à la place de la villa litigieuse. Cela n'avait pas été le cas selon A______.

Ce dernier se plaint également du fait que le Tribunal a retenu qu'un rappel pour le paiement de la somme de 13'000 fr. lui avait été adressé. Il ne s'agissait en aucun cas d'un rappel. C'était la première fois que le bailleur lui réclamait ce montant à titre de loyers.

Le Tribunal aurait également omis de préciser que A______ avait été empêché d'accéder au logement par la faute de B______.

Par ailleurs, il serait erroné de considérer que B______ avait conclu un troisième contrat de bail avec D______ dans la mesure où ce dernier aurait toujours refusé de procéder par contrat écrit.

Finalement, le Tribunal aurait retenu à tort que l'eau avait été rétablie dans la villa et que l'existence d'un arriéré de loyer à concurrence de 15'000 fr. avait suffisamment été établie.

c.b A______ soutient que le Tribunal aurait violé le droit en retenant que la réduction unilatérale du loyer à hauteur de 400 fr. n'avait pas été acceptée par le bailleur par actes concluants. Alors qu'un montant d'arriérés de loyers, à concurrence de 15'000 fr. avait été réclamé, A______ n'aurait eu accès au détail du décompte qu'une année après.

Tant la sommation que la résiliation du bail seraient en conséquence inefficaces.

De plus, A______ alléguant avoir été empêché d'accéder à la maison litigieuse par la faute de B______ depuis le mois de juillet 2020, la condition de la possession du locataire de la chose louée - aux termes de l'art. 257d CO - ne serait pas réalisée.

d. Par réponse du 23 septembre 2022, B______ a déclaré contester l'intégralité des arguments soulevés par A______ dans la mesure où le jugement rendu par le Tribunal était exhaustif.

e. A______ a répliqué le 11 novembre 2022.

f. Par courrier du 9 novembre 2022, déposé le 18 novembre 2022, B______ a repris en substance les conclusions auxquelles le Tribunal était parvenu et conclu à ce que le jugement attaqué soit confirmé.

g. Les parties ont été informées par plis séparés de ce que la cause avait été gardée à juger en date du 8 décembre 2022.

C. Les faits pertinents de la cause sont les suivants :

a. B______ est le propriétaire d'une maison sise chemin 1______ no. ______ à C______.

Le 14 septembre 2016, il a donné procuration à E______ pour le représenter et agir en son nom, entreprendre toute démarche administrative, juridique et financière qu'il jugerait utile, choisir et désigner tout mandataire dans le cadre du projet relatif à cette maison (projet de construction d'un habitat groupé). Il pouvait ainsi signer tout document et toute pièce ayant trait au projet susmentionné.

b. Dans un premier temps, le 15 avril 2016, B______, bailleur, représenté par E______, et F______ et A______, locataires, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location de la maison précitée, pour une durée déterminée d'une année et 10 jours, soit du 20 avril 2016 au 30 avril 2017.

Les locaux étaient destinés à l'usage d'habitation et le loyer annuel, charges non comprises, a été fixé à 30'000 fr.

Le contrat de bail précisait qu'un permis de démolition de la maison ainsi qu'un permis de construire avaient été délivrés le 16 novembre 2015 et que la maison était louée en l'état.

La part de loyer assumée par A______ pour un studio indépendant dans la maison était fixée à 1'100 fr., charges non comprises.

c. Dans un second temps, en date du 7 avril 2017, B______, bailleur, représenté par E______, et A______, locataires, ont conclu un contrat de bail à loyer portant sur la location de la maison litigieuse, pour une durée déterminée de 9 mois, du 1er mai 2017 au 31 janvier 2018.

Les locaux étaient destinés à l'usage d'habitation et le loyer annuel, charges non comprises, a été fixé à 30'000 fr.

Le contrat de bail précisait qu'un permis de démolition de la maison ainsi qu'un permis de construire avaient été délivrés le 16 novembre 2015 et que la maison était louée en l'état.

Ce contrat venait en complément de celui signé par A______ en date du 15 avril 2016 concernant le studio indépendant.

d. Le 13 décembre 2018, les parties ont conclu un nouveau contrat de bail portant sur la location de la maison précitée, annulant et remplaçant le bail précédent.

Le contrat a été conclu pour une durée déterminée de 18 mois, du 1er janvier 2018 au 30 juin 2019, et le loyer annuel, charges non comprises, fixé à 30'000 fr.

Le contrat de bail précisait qu'un permis de démolition de la maison existante ainsi qu'un permis de construire pour un habitat groupé avaient été délivrés le 16 novembre 2015 et que le permis de construire était en force. La maison était louée en l'état.

e. Le 23 juin 2019, A______ a conclu un contrat de sous-location avec G______ portant sur la location d'une chambre située au 1er étage de la maison litigieuse avec jouissance conjointe d'une salle de douche et des pièces communes, pour un sous-loyer de 1'000 fr. par mois, chauffage, électricité et wifi compris, et une durée de quatre mois, soit du 1er juin 2019 au 30 septembre 2019.

f. Les parties au contrat principal ont signé le 26 juin 2019 un avenant au contrat de bail du 13 décembre 2018, aux termes duquel la date d'échéance du bail non renouvelable était reportée d'un commun accord au 31 janvier 2020.

Le locataire était informé que la parcelle litigieuse était au bénéfice d'une autorisation de construire en force pour un habitat groupé et qu'au plus tard le 31 janvier 2020 la maison devrait être entièrement vidée et libre de tout occupant.

A teneur de cet avenant, les parties sont convenues que le locataire serait régulièrement informé de l'avancement de la commercialisation du projet. En fonction de la situation, la date de la libération de la maison pourrait - d'un commun accord - être reportée de 30 jours en 30 jours, moyennant un préavis de 30 jours de la part du bailleur pour la fin du mois, et ce à compter du 31 janvier 2010 (recte : 2020). L'absence de notification écrite de la part du bailleur datée - au plus tard - du 30 décembre 2019 équivaudrait à une confirmation de la date de libération de la maison convenue entre les parties, à savoir le 31 janvier 2020.

g. Par pli du 17 juillet 2020, reçu par A______ le 20 juillet 2020, B______ a mis en demeure ce dernier de mettre un terme aux divers contrats de sous-location dans un délai de 30 jours au vu des conditions de sous-location abusives pratiquées. Le locataire était prié de réintégrer la maison dans le même délai.

h. Un contrôle OIBT des installations électriques de la maison a été effectué dans le courant du mois d'août 2020 et plusieurs défauts ont été constatés à cette occasion.

i. Par avis du 18 août 2020, B______ a résilié le bail pour le 30 septembre 2020 au motif que les points mentionnés dans la mise en demeure du 17 juillet 2020 n'avaient pas été respectés.

Dans son courrier explicatif du même jour, non produit dans son intégralité, le bailleur a rappelé au locataire que celui-ci lui était redevable d'une somme de 13'000 fr. relatifs à des loyers impayés, somme que le locataire devait payer dans un délai de 20 jours, faute de quoi une procédure de poursuite normale, voire pénale, serait introduite à son encontre.

j. A______ a répondu le 19 août 2020, contestant les conditions abusives des contrats de sous-location établis depuis le début de sa location et dont le bailleur avait été informé. Il était par ailleurs dans l'incapacité de réintégrer la maison, exposant qu'un des sous-locataires, H______, avait pris possession de force de sa chambre, ce qui avait fait l'objet d'une plainte pénale du 23 juillet 2020, et que G______ avait emménagé de son autorité, et sans son autorisation, dans la chambre que devait occuper H______. Ces deux individus avaient la conviction d'être chez eux et pensaient ne plus avoir de compte à lui rendre dans la mesure où le bailleur les avait convaincus de lui verser directement l'argent qu'ils recevaient de l'Hospice général pour leur logement. Le locataire avait résilié les contrats de sous-location de H______ et G______ le 11 août 2020.

k. Le 26 août 2020, B______ a conclu deux contrats de bail portant sur la location de la maison litigieuse : le premier avec H______ d'une durée de six mois, soit du 1er septembre 2020 au 28 février 2021, pour un loyer annuel de 9'600 fr. et le second avec G______ d'une durée de six mois, soit du 1er septembre 2020 au 28 février 2021, pour un loyer annuel de 12'000 fr.

Le 28 août 2020, le bailleur a conclu un troisième contrat de bail avec D______ portant sur la maison litigieuse d'une durée de six mois, soit du 1er septembre 2020 au 28 février 2021, pour un loyer annuel de 7'800 fr.

Figurent à la procédure des reçus manuscrits de paiement du loyer par D______ pour les mois de septembre à décembre 2020.

l. A______ a contesté le congé du 18 août 2020 par requête du 31 août 2020. Cette procédure est actuellement suspendue et porte le numéro de cause C/2______/2020.

m. Par pli du 19 novembre 2020, B______ a indiqué à A______ que l'arriéré de loyer s'élevait à 15'000 fr. en date du 30 septembre 2020. Le locataire était ainsi mis en demeure de verser cette somme dans un délai de 30 jours dès réception du pli, faute de quoi son bail serait résilié avec effet immédiat en application de l'art. 257d CO. Cette résiliation était subsidiaire à celle notifiée le 19 août 2020 et le locataire restait redevable d'une indemnité pour occupation illicite équivalente au montant du loyer tant qu'il n'aurait pas libéré la maison de tous biens.

n. A______ a répondu le 9 décembre 2020, sollicitant que lui soit fourni le calcul par lequel le bailleur parvenait au montant de 15'000 fr., attendu que le loyer mensuel était de 2'500 fr. et qu'au mois d'août 2020, il était fait état d'un montant de 13'000 fr. Un rapport attestant de l'insalubrité de la villa datant du 20 août 2020 était indiqué comme annexé, le locataire relevant qu'à ce titre, aucun loyer n'était dû, d'autant plus que les travaux, notamment ceux visant à remettre la chaudière en état de marche, avaient été demandés en mars 2020. Par ailleurs, le bailleur percevait des loyers de G______ (depuis le 1er septembre 2020), H______ (depuis le 1er août 2020) et D______ (depuis le 1er septembre 2020), pour un total de 1'450 fr. par mois, pour le même objet. Le locataire a conclu en informant le bailleur qu'il ne serait pas donné suite à la mise en demeure.

Le bailleur conteste avoir reçu ce courrier recommandé, dont il a été avisé pour retrait le 10 décembre 2020 et qu'il n'a pas retiré dans le délai de garde postal.

o. Par courriel du 14 décembre 2020, A______ s'est adressé à la régie en charge de la promotion prévue sur la parcelle sur laquelle se situe la maison litigieuse. Il lui a indiqué qu'avant de s'être entretenu avec son avocat, il n'allait pas exiger sur le champ de la régie le retrait du projet « I______ » de la vente, mais qu'il l'engageait vivement à avertir ses clients que tous les frais (notariaux, bancaires, autres) qu'ils engageaient pour l'achat d'un appartement dans ce projet risquaient d'être dépensés à fonds perdus. Par ailleurs, sans son autorisation expresse, personne, y compris le bailleur et E______, n'avait le droit de mettre un pied sur les 1'732 m2 de la maison dont « il était le seul et unique locataire légal ». Enfin, il a informé la régie être « tombé amoureux » de cette villa et qu'il était persuadé que le bailleur tomberait en faillite avant d'avoir pu le déloger. Le locataire comptait alors acheter la maison.

p. Considérant que la somme réclamée n'avait pas été intégralement acquittée dans le délai imparti, B______, représenté par E______, a, par avis officiel du 21 décembre 2020, résilié le bail pour le 31 janvier 2021.

Le courrier explicatif du même jour ajoutait que la maison serait démolie en début d'année et qu'elle devait être libérée le 31 janvier 2021.

q. A______ a contesté ce deuxième congé par devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers par requête du 29 décembre 2020, concluant à la constatation de sa nullité, subsidiairement à son annulation et plus subsidiairement à l'octroi d'une prolongation du bail.

Déclarée non conciliée à l'audience de conciliation du 16 mars 2021, l'affaire a été portée devant le Tribunal le 29 avril 2021.

Le locataire a principalement conclu, sous suite de frais et dépens, à ce que soit constatée l'insalubrité de la maison litigieuse et, cela fait, à ce qu'il soit dit et constaté que les loyers n'étaient pas dus et à ce que soit constatée la nullité de la résiliation du bail. Subsidiairement, le locataire a pris les mêmes conclusions en concluant cette fois-ci à l'annulation de la résiliation du bail. Encore plus subsidiairement, il a conclu à ce qu'il soit constaté que la maison litigieuse était insalubre, cela fait à ce qu'il soit dit et constaté que les loyers n'étaient pas dus, à ce que soit ordonnée la remise en état de la maison et à ce qu'une première prolongation de bail de 24 mois lui soit accordée.

Le locataire a allégué à l'appui de sa demande que la chaudière de la maison était tombée en panne en février 2020 et qu'il avait cherché à entrer en contact avec E______ afin qu'il soit remédié à ce problème, mais en vain. Par ailleurs, il avait fait établir un rapport sur le système électrique de la maison, dont les conclusions étaient catastrophiques, aucune des pièces de la maison ne répondant aux normes de sécurité. Le bien loué était ainsi privé de toute valeur locative, de sorte qu'aucun loyer ne pouvait être réclamé pour la période concernée. Par ailleurs, le montant de 15'000 fr. figurant dans la mise en demeure n'avait pas été justifié par le bailleur, de sorte que ladite mise en demeure était nulle faute de précision sur le montant exigé. Le congé pour non-paiement du loyer n'était en outre qu'un prétexte pour le faire sortir à tout prix de la maison. Enfin, l'avis de résiliation était signé par E______ qui ne justifiait par aucun document son pouvoir de représentation.

r. Le 26 mars 2021, à la demande de B______, Me J______, huissier judiciaire, s'est rendu à l'adresse de la maison litigieuse. Un ultime délai échéant le même jour avait été imparti au bailleur pour la remise du rapport de sécurité à son exploitant réseau avant la démolition de la villa. Le locataire refusant l'accès aux locaux, le bailleur était dans l'obligation de procéder à une ouverture forcée de la maison afin de respecter cet ultime délai.

Sur place, l'huissier judiciaire a constaté que, de manière générale, l'intérieur de la maison était insalubre, sale et en très mauvais état. La plupart des biens se trouvant dans la maison étaient sales et/ou en mauvais état, l'ensemble donnant une impression très négligée. La cuisine était insalubre et inexploitable en l'état.

Lors de cette visite, les compteurs d'eau et d'électricité ont été enlevés. A______ a ensuite fait installer un nouveau compteur électrique, qui avait été oublié sur place, lequel a à nouveau été enlevé par l'électricien.

Le locataire a porté plainte le 18 mai 2021 à l'encontre de B______ des chefs notamment de violation de domicile et de dommages à la propriété.

Le Ministère public a rendu le 11 octobre 2021 une ordonnance de non-entrée en matière, retenant en substance qu'au moment où le bailleur avait pénétré dans la maison, le locataire n'y habitait plus, ce dernier ayant sous-loué la maison à des tiers et vivant chez sa compagne depuis le mois de juillet 2020.

s. Par jugement du 31 mai 2021, le Tribunal a déclaré irrecevables les conclusions de A______ en constatation d'insalubrité et du fait que les loyers n'étaient pas dus.

t. Le 30 juillet 2021, le locataire a déposé à l'encontre de B______ et des SIG une requête de mesures superprovisionnelles et provisionnelles tendant à ce qu'il soit donné ordre au bailleur de prendre en charge les frais afférents à l'installation d'un nouveau compteur d'eau et d'un nouveau compteur d'électricité, à ce qu'il soit fait interdiction au bailleur de procéder à un nouvel enlèvement des compteurs précités, à ce qu'il soit fait interdiction au bailleur de se rendre à l'adresse de l'objet loué et à ce qu'une interdiction de démolition de la maison louée soit prononcée (cause C/2______/2020).

La requête de mesures superprovisionnelles a été rejetée par ordonnance du Tribunal du 30 juillet 2021.

u. Une nouvelle requête de mesures provisionnelles et superprovisionnelles a été déposée devant le Tribunal le 6 août 2021 par le locataire à l'encontre du bailleur. La requête de mesures superprovisionnelles, dont les conclusions ne ressortent pas de la présente procédure, a été rejetée par ordonnance du 6 août 2021 (cause C/2______/2020).

Les requêtes de mesures provisionnelles ont été admises par ordonnances du 29 octobre 2021. Le 25 août 2022, A______ a saisi le Tribunal d'une action en validation des mesures provisionnelles.

v. Entre-temps, dans sa réponse du 16 août 2021 à la demande du 29 avril 2021, B______ a pris les conclusions suivantes, sous suite de frais et dépens :

Sur demande principale :

- Débouter le locataire de toutes ses conclusions :

- Constater que le congé notifié le 21 décembre 2020 est valable;

- N'accorder aucune prolongation au locataire;

- Condamner le locataire à lui verser la somme mensuelle de 2'500 fr. dès le 1er février 2021 et jusqu'à la date de libération des locaux, avec intérêts à 5% l'an dès chaque échéance mensuelle à titre d'indemnité pour occupation illicite du bien;

- Condamner le locataire à lui verser la somme de 25'000 fr. avec intérêts à 5% l'an dès le 31 janvier 2021, à titre d'arriérés de loyer.

Sur demande reconventionnelle :

- Ordonner au locataire de libérer de tous biens et de toutes personnes avec effet immédiat la maison litigieuse et lui ordonner de remettre les clés de l'objet loué au bailleur, sous la menace de la peine d'amende prévue par l'art. 292 CP;

- Dire que faute d'exécution dans les 10 jours dès l'entrée en force de la décision, l'autorité chargée de l'exécution y procéderait avec l'assistance de l'autorité compétente (art. 343 al. 1 let. d et al. 3 CPC).

Le bailleur a admis avoir eu connaissance de la sous-location liant A______ et G______, lesquels percevaient tous deux des indemnités de l'Hospice général. En juillet 2020, il avait eu connaissance d'autres contrats de sous-location conclus par le locataire pour des sous-loyers excédant le loyer principal, alors que le locataire habitait également la maison. Il s'agissait de H______ pour un loyer de 800 fr., G______ pour 1'000 fr., D______ pour 650 fr., K______ pour 430 fr. et un cinquième sous-locataire présent sporadiquement. Les sous-loyers d'un total supérieur à 2'880 fr. par mois étaient versés à A______ depuis avril 2020, étant précisé que l'Hospice général s'acquittait au titre de loyer mensuel du locataire d'un montant de 1'100 fr. auprès du bailleur. Le locataire ne s'acquittait toutefois plus du loyer de la maison, nonobstant le fait qu'il possédait toujours cette qualité. L'arriéré s'élevait à 15'000 fr. en date du 30 septembre 2020 et à 25'000 fr. au 31 janvier 2021, soit à la fin du contrat. A______ n'habitait plus la maison et vivait chez sa compagne. Le locataire avait toutefois fait réinstaller l'eau, l'électricité ainsi que les fenêtres qui avaient été « coupées », respectivement enlevées en mars 2021 afin de procéder à l'ouverture du chantier.

w. A______ a conclu au rejet de la demande reconventionnelle par écritures du 18 octobre 2021, contestant avoir des dettes de loyer et précisant n'avoir jamais reçu de justificatifs des prétendus arriérés de loyer réclamés. Par ailleurs, il avait été empêché d'accéder à la maison de juillet 2020 à fin février 2021, soit durant les mois qui faisaient l'objet de la mise en demeure.

x. Lors de l'audience qui s'est tenue le 3 décembre 2021, B______ a déposé un chargé de pièces complémentaire comprenant notamment un document établi par lui-même intitulé « Historique des loyers dus par M. A______ au 30/09/2020 » indiquant les loyers versés directement par l'Hospice en 2020 pour le locataire (soit 1'100 fr. de janvier 2020 à septembre 2020), G______ (soit 1'000 fr. de janvier à mars 2020 et de juillet à décembre 2020), H______ (soit 800 fr. de juillet à décembre 2020) et « D______ [prénom] » (soit 650 fr. de septembre à décembre 2020). Des montants de 4'800 fr. étaient indiqués comme étant dus pour les années 2018 et 2019, ainsi qu'un montant de 5'400 fr. pour 2020, soit un total de 15'000 fr.

Les parties se sont ensuite prononcées sur les mesures d'instruction, le locataire sollicitant l'audition de témoins à laquelle le bailleur s'est opposé, et ont persisté dans leurs conclusions dans le cadre des premières plaidoiries.

Interrogé concernant le montant de 15'000 fr. figurant dans la mise en demeure, B______ a répondu par l'intermédiaire de son conseil que ce montant correspondait à 400 fr. par mois de janvier 2018 à mars 2020, puis à 1'400 fr. par mois d'avril à juin 2020. A la question de savoir à quel moment le détail des montants réclamés avait été communiqué au locataire, il a été répondu que celui-ci l'avait toujours su.

A la question de savoir comment le locataire pouvait savoir quels montants avaient été payés directement par l'Hospice général pour MM. G______, H______ et D______, le bailleur a répondu que celui-ci le savait parce qu'il avait encaissé de l'argent de la part de l'Hospice général lorsque ces personnes étaient sous-locataires. Son conseil a ajouté que le locataire n'était pas concerné par les versements faits directement par l'Hospice général pour MM. G______, H______ et D______, car ils concernaient une période postérieure à celle visée par la mise en demeure.

A______ a déclaré avoir commencé à payer 400 fr. de moins par mois lorsque la chaudière avait cessé de fonctionner. Le bailleur et E______ avaient accepté qu'il réduise le loyer, car ils ne réparaient pas la chaudière. Il n'avait jamais consigné le loyer. Suite à la réception de la mise en demeure du 19 novembre 2020, il n'avait procédé à aucun paiement. Il avait payé une caution de 2'000 fr. à E______, précisant avoir une preuve du versement de cette garantie de loyer.

Le conseil du bailleur a contesté le versement de la caution de 2'000 fr. alléguée par le locataire et s'est référé, s'agissant de la réduction de 400 fr. alléguée, à l'avenant du 26 juin 2019 qui ne modifiait pas le montant du loyer, ainsi qu'aux clauses particulières du bail qui mentionnaient que la maison était louée en l'état.

y. Par ordonnance du 28 février 2022, le Tribunal a clôturé la phase d'administration des preuves, ordonné les plaidoiries finales et imparti à cet effet aux parties un délai au 1er avril 2022 pour le dépôt de leurs plaidoiries, délai prolongé jusqu'au 25 avril 2022.

z. Par plaidoiries finales du 25 avril 2022, B______ a persisté dans ses conclusions, ajoutant une conclusion dans sa demande reconventionnelle tendant à être autorisé à requérir l'évacuation par la force publique de A______ dès l'entrée en force du jugement entrepris. Il a ajouté que le locataire avait consigné le loyer à hauteur de 1'100 fr. depuis le mois de décembre 2021. Il a également soulevé pour la première fois que, quand bien même quelques mois supplémentaires d'occupation des lieux avaient été accordés au locataire postérieurement au 31 janvier 2020, le contrat de bail liant les parties n'avait pas été transformé en bail à durée indéterminée, la maison étant vouée à la démolition et l'échéance du bail fixée à 30 jours. Ainsi, la simple expiration de l'échéance du bail faisait que A______ n'était plus locataire de la maison et devait la quitter. En tout état, le locataire avait cessé de payer le loyer de la maison dès le mois d'août 2020 et n'avait jamais contesté devoir le montant réclamé.

Par plaidoiries finales du 25 avril 2022, A______ a persisté dans ses conclusions et a produit des pièces nouvelles, notamment un reçu signé le 28 avril 2017 par E______ relatif à un versement de 2'000 fr. à titre de caution, ainsi qu'un contrat conclu le 1er mars 2021 entre B______ et H______ pour une durée d'un mois, soit jusqu'au 31 mars 2021.

Le bailleur a répliqué le 9 mai 2022, concluant à l'irrecevabilité des pièces nouvelles.

Le locataire a dupliqué le 13 mai 2022.

Le bailleur s'est encore prononcé le 30 mai 2022, après quoi le Tribunal a gardé la cause à juger.

EN DROIT

1.             1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

La valeur litigieuse est déterminée par les dernières conclusions de première instance (art. 91 al. 1 CPC; JEANDIN in Commentaire Romand, Code de procédure civile, 2e éd. 2019, N 13 ad art. 308 CPC; arrêt du Tribunal fédéral 4A_594/2012 du 28 février 2013).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, le loyer annuel pour le studio indépendant, charges non comprises, a été fixé en dernier lieu à 1'100 fr. et celui - en complément - relatif à la villa a été fixé à 30'000 fr. par an.

Ainsi, la valeur litigieuse est manifestement supérieure à 10'000 fr., de sorte que la voie de l'appel est ouverte.

1.3 Interjeté dans le délai prescrit et selon la forme requise par la loi, l'appel est recevable (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC).

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1); en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2. L'appelant allègue des faits nouveaux et produit des pièces nouvelles.

Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b). Les deux conditions sont cumulatives (JEANDIN, op. cit., N 6 ad art. 317 CPC).

En l'espèce, l'appelant a produit une plainte pénale datée du 4 mars 2021, ainsi qu'un procès-verbal d'audience et un mandat d'amener datés du 13 mai 2022.

Dans la mesure où toutes ces pièces sont antérieures à la mise en délibération de la présente cause par-devant le Tribunal - en date du 30 mai 2022 - elles sont irrecevables.

En revanche, la demande en validation de mesures provisionnelles, formée le 25 août 2022, est recevable en tant qu'elle est postérieure à la mise en délibération du 30 mai 2022.

3. Dans un premier grief, l'appelant se plaint d'une constatation inexacte des faits au motif que le Tribunal aurait d'une part ignoré certains faits pertinents et d'autre part en aurait retenu d'autres par erreur.

Dans un second grief, il soulève une violation du droit dans la mesure où les parties auraient modifié le contrat de bail qui les unissait par actes concluants et qu'aucun arriéré de loyer n'était en réalité dû, contrairement à ce qui a été retenu par les premiers juges.

Il reproche également au Tribunal d'avoir violé l'art. 257d CO au motif que les conditions d'application exigeraient que le locataire ait la possession de l'objet loué, alors qu'il avait été empêché d'accéder à la villa par le bailleur.

4. 4.1 La « constatation inexacte des faits » mentionnée à l'art. 310 let. b habilite l'instance supérieure à revoir les faits sans restriction, ce qui découle de la nature ordinaire de la voie de l'appel, en vertu de laquelle le litige se continue pour ainsi dire devant l'instance supérieure (JEANDIN, op. cit., N 6 ad art. 310).

4.2 S'agissant de l'information qui devait être transmise au locataire quant à la commercialisation du projet immobilier, l'appelant estime qu'aucun accord n'avait été conclu en ce sens. Cependant, les contrats de bail successivement conclus faisaient bien état d'un permis de démolition et d'un permis de construire délivrés et subséquemment entrés en force. Il ressort également explicitement de l'avenant au contrat de bail du 26 juin 2019 que le locataire allait être informé de la commercialisation du projet précité.

L'appelant soutient que le courrier du 18 août 2020 ne constituerait pas un rappel adressé au locataire de la somme due. Cela n'a toutefois pas d'influence sur l'issue du litige, dans la mesure où seule la mise en demeure du 19 novembre 2020 est pertinente. Ce dernier courrier faisait pour le surplus expressément référence au défaut de paiement de loyers et partant à la demeure du locataire pour la somme réclamée.

S'agissant de la conclusion d'un contrat de bail avec D______, les dispositions régissant la conclusion d'un contrat de bail prévoient la possibilité de conclure valablement un tel contrat oralement (ATF 119 III 78 consid. 3c, JdT 1995 II 114). Les reçus signés par l'intimé attestent de l'accord intervenu entre les parties tant sur l'objet que sur le montant du loyer.

Dès lors, la question de savoir si un contrat avait effectivement fait l'objet d'une conclusion écrite est sans pertinence pour l'issue du litige, de même que l'existence d'un cinquième locataire ainsi que la question de raccordement de la villa au réseau de distribution d'eau.

5. 5.1 Dans un second grief, l'appelant reproche au Tribunal d'avoir violé le droit, en tant que le contrat de bail du 13 décembre 2018 aurait en réalité été modifié par actes concluants et que partant, la sommation serait invalide et le congé inefficace en raison également de l'empêchement du locataire d'accéder au bien loué par la faute du bailleur.

5.2
5.2.1
La conclusion d'un contrat de bail et sa modification ultérieure ne sont en principe soumises à aucune exigence de forme, et ce même si les parties étaient convenues de la forme écrite pour sa conclusion. Demeurent réservés les cas où la loi exige expressément la forme écrite ou l'utilisation d'une formule officielle, essentiellement par le bailleur (ACJC/116/2023 du 23 janvier 2023 consid. 4.1).

Le bail peut être exceptionnellement conclu de manière tacite, par actes concluants (art. 1 al. 2 CO). Il en est ainsi lorsque le bailleur remet les clés au locataire, que celui-ci emménage et qu'il paie le loyer, sans que le bailleur ne proteste (LACHAT, Le bail à loyer, 2019, p. 210 N 4.5.1).

Cependant, le silence opposé par l'une des parties à réception d'une offre de l'autre partie, ne vaut, en principe, pas acceptation et n'entraîne pas la conclusion tacite d'un contrat (arrêt du Tribunal fédéral 4A_188/2012 du 1er mai 2012 consid. 3.1; ACJC/864/2020 du 22 juin 2020 consid. 3.1; ACJC/765/2016 du 6 juin 2016 consid. 4.1; LACHAT, op. cit., p. 210 N 4.5.2).

5.2.2 Aux termes de l'art. 1 CO, le contrat est parfait lorsque les parties ont réciproquement et d'une manière concordante manifesté leur volonté (al. 1). Cette manifestation peut être expresse ou tacite (al. 2).

Une manifestation de volonté est faite par actes concluants lorsqu'elle n'exprime pas directement une certaine volonté mais qu'elle permet néanmoins à son destinataire de déduire l'existence de cette volonté. Une telle manifestation de volonté ressort le plus souvent d'un comportement actif. Par exemple, une acheteuse dépose de la marchandise sur le tapis roulant à la caisse d'un magasin; la banque priée de donner un renseignement ne répond pas expressément qu'elle accepte de le faire, mais se contente de délivrer ce renseignement (MORIN, in Commentaire romand, Code des Obligations, 3e éd. 2021, N 10 ad art. 1 CO).

Contrairement à ce qu'indique l'art. 1 al. 2 CO, en opposant manifestation de volonté expresse et tacite, le silence vaut comme manifestation de volonté expresse lorsque les parties ont décidé conventionnellement de lui donner une telle portée, par exemple en s'entendant sur le fait que l'offre de l'une d'elles sera considérée comme acceptée si l'autre ne le conteste pas dans les 24 heures. En l'absence d'une convention sur la portée du silence d'une des parties, un comportement purement passif ne vaut en principe pas comme manifestation de volonté par acte concluant, sauf si le principe de la confiance permet exceptionnellement de lui donner un tel sens et d'imputer ainsi une manifestation de volonté à son auteur (MORIN, op. cit., N 11 ad art. 1 CO).

5.2.3 Selon l'art. 257d CO, lorsque le locataire a reçu la chose louée et qu'il tarde à s'acquitter d'un terme ou de frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai de paiement et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail; ce délai doit être d'au moins trente jours pour les baux d'habitations ou de locaux commerciaux (al. 1).

A défaut de paiement dans le délai fixé, le bailleur peut résilier le contrat avec effet immédiat; les baux d'habitations ou de locaux commerciaux peuvent être résiliés avec un délai de congé minimum de trente jours pour la fin d'un mois (al. 2).

Pour que cette disposition soit applicable, il suffit que le bailleur ait remis la chose louée au locataire ou, si celui-ci ne l'occupe pas, que le bailleur la tienne à sa disposition (ATF 127 III 548).

Selon la jurisprudence, la résiliation fondée sur l'art. 257d al. 2 CO n'est contraire aux règles de la bonne foi, et donc annulable sur la base de l'art. 271 al. 1 CO, que dans des circonstances particulières. L'annulation entre en considération lorsque le bailleur a réclamé une somme largement supérieure à celle en souffrance, alors qu'il n'était pas certain du montant effectivement dû (ATF 120 II 31 consid. 4b). L'annulation entre aussi en considération lorsque l'arriéré est insignifiant, ou lorsque ce montant a été réglé très peu de temps après l'expiration du délai comminatoire, alors que, auparavant, le locataire s'était toujours acquitté à temps du loyer, ou encore lorsque le bailleur ne résilie le contrat que longtemps après l'expiration de ce même délai (arrêts du Tribunal fédéral 4A_472/2008 du 26 janvier 2009 consid. 5.3.1 et 4C_430/2004 du 8 février 2005 consid. 3.1, SJ 2005 I p. 310/311).

Le bailleur est libre de choisir les termes de son avis comminatoire. Il faut cependant que son avertissement soit clair : le locataire doit pouvoir reconnaître que le bailleur possède contre lui une créance exigible encore impayée et qu'il est mis en demeure; il doit en outre comprendre que le paiement doit être effectué dans un laps de temps donné; enfin la déclaration doit indiquer que le non-paiement dans le délai fixé rendra possible l'extinction du bail par résiliation extraordinaire. Le bailleur doit ainsi préciser le montant de la créance qu'il réclame, son échéance, le point de départ et la durée du sursis octroyé et le risque d'une résiliation anticipée du bail. Pour simplifier, l'avertissement du bailleur ne doit porter que sur les postes qui font partie du loyer. Il n'est pas indispensable d'indiquer le montant de la créance en souffrance de manière chiffrée (CdB 4/00, p. 107 ss; arrêt du Tribunal fédéral du 14 juin 2000 = MRA 2/01, p. 47 ss); il est cependant conseillé, en cas de doute, de rendre la créance suffisamment déterminable pour éviter d'éventuelles confusions (BURKHALTER/MARTINEZ-FAVRE, in Commentaire SVIT du droit du bail, 2011, N 26 ad art. 257d CO).

Les résiliations de bail qui respectent les exigences légales de forme mais pour lesquelles une condition matérielle, légale ou contractuelle fait défaut sont inefficaces. L'inefficacité est une forme de nullité. Elle peut être soulevée en tout temps, sauf abus manifeste de droit, même à l'occasion de la procédure d'expulsion et doit être constatée d'office par le juge (LACHAT, op.cit., p. 951; LACHAT, in Commentaire romand Code des obligations I, 3e éd. 2021, N 3 ad art. 266o CO, qui précise alors que le juge doit soulever l'inefficacité ou la nullité d'office).

Le bailleur n'est toutefois pas obligé de résilier le bail. Il peut aussi maintenir les rapports contractuels et continuer d'exiger l'exécution du contrat, malgré l'inobservation du délai comminatoire (LACHAT, Le bail à loyer, op. cit., p. 669; Message concernant l'initiative populaire « pour la protection des locataires », la révision du droit du bail à loyer et du bail à ferme dans le code des obligations et la loi fédérale instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif du 27 mars 1985, p. 1409). Il renonce ainsi à l'exercice de son droit de résiliation et peut tenter de récupérer son arriéré par la mise en poursuite de son locataire (BURKHALTER/MARTINEZ-FAVRE, op. cit., N 33 ad art. 257d CO).

Lorsque le congé est nul ou inefficace, il ne déploie dès l'origine aucun effet (MONTINI, in Droit du bail à loyer et à ferme, 2e éd. 2017, N 10 ad art. 266o CO).

5.2.4 Pour empêcher le congé extraordinaire de l'art. 257d CO, le locataire en demeure peut invoquer en compensation à la créance de loyers une autre créance qu'il a lui-même contre le bailleur.

La compensation présuppose une déclaration de compensation (art. 124 al. 1 CO). La possibilité d'opposer en compensation une contre-créance contestée existe aussi pour le locataire mis en demeure de payer un arriéré de loyer (art. 257d CO); la déclaration de compensation doit toutefois intervenir avant l'échéance du délai de grâce (ATF 119 II 241 consid. 6b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 4C_212/2006 du 28 septembre 2006 consid. 3.1.1, in CdB 2007 22).

5.2.5 Lorsqu'il le considère justifié, le locataire a la possibilité d'obtenir une réduction de loyer prévue à l'art. 259d CO.

Lorsque la chose présente un défaut d'une certaine importance, le locataire peut exiger une diminution proportionnelle du loyer (art. 259d CO). S'il le fait en même temps qu'apparaît le défaut, il n'y a pas compensation mais exercice d'un droit formateur en modification du contrat (SCHMID, ZK, 2020, N 29 ad art. 254/5 aCO). Si, en revanche, le locataire paie le loyer entier alors qu'il avait droit à une diminution, il peut compenser sa créance en la déduisant du loyer suivant (BURKHALTER/MARTINEZ-FAVRE, op. cit., N 18 ad art. 257d CO).

La doctrine majoritaire considère que le locataire qui prétend à une réduction de son loyer ne doit pas nécessairement s'adresser au juge. Il lui suffit d'envoyer au bailleur une déclaration unilatérale de réduction du loyer (autoréduction) et de cesser de payer celui-ci à due concurrence. Par ce biais, le locataire exerce un droit formateur, qui déploie ses effets sitôt la déclaration parvenue dans la sphère d'influence du bailleur (LACHAT, Le bail à loyer, op. cit., p. 320).

La question d'une « autoréduction » du loyer ne se pose vraiment que lorsque le locataire continue à occuper les locaux qui sont affectés d'un défaut irréparable. Dans le cas où le défaut est réparable, le locataire doit en exiger la réparation et consigner le loyer. L'« autoréduction » n'est pas une alternative à la consignation du loyer (arrêt du Tribunal fédéral 4A_472/2008 du 26 janvier 2009 consid. 4.2.3; LACHAT, Le bail à loyer, op. cit., p. 320, N 156).

Le locataire qui prétend avoir une créance en réduction de loyer ou en dommages-intérêts pour cause de défauts de l'objet loué n'est pas en droit de retenir toute ou partie du loyer échu; il n'a en principe que la possibilité de consigner le loyer, l'art. 259g CO étant une lex specialis par rapport à l'art. 82 CO. Il est donc dans son tort s'il retient le loyer, ce qui a même conduit une fois le Tribunal fédéral à exclure la possibilité d'opposer en compensation une créance fondée sur les défauts de la chose louée (arrêt du Tribunal fédéral 4A_472/2008 du 26 janvier 2009 consid. 4.2.3). Si le locataire passe outre, il peut toujours, à réception de l'avis comminatoire, éviter la résiliation du bail en payant le montant dû ou en le consignant et ainsi éviter le congé et la procédure judiciaire en contestation de ce congé. S'il se décide néanmoins à compenser avec une contre-créance contestée, il fait ce choix à ses risques et périls (arrêt du Tribunal fédéral 4A_140/2014, 4A_250/2014 du 6 août 2014 consid. 5.2 et les références citées).

5.2.6 L'art. 259g CO prévoit également la possibilité pour le locataire de consigner le montant du loyer auprès d'un office cantonal désigné lorsque la chose louée est affectée d'un défaut dont il est requis réparation auprès du bailleur.

La consignation du loyer est une institution conçue comme un moyen de pression qui doit permettre au locataire de faire valoir plus efficacement ses prétentions en remise en état de la chose, en réduction du loyer et en dommages-intérêts (Message concernant l'initiative populaire « pour la protection des locataires », la révision du droit du bail à loyer et du bail à ferme dans le code des obligations et la loi fédérale instituant des mesures contre les abus dans le secteur locatif du 27 mars 1985, 1418; TERRAPON, Les défauts de la chose louée et la consignation du loyer, 8e Séminaire droit du bail, 1994, p. 2).

La doctrine admet que le « droit spécial du locataire de consigner le loyer le prive désormais de la faculté de réduire directement le loyer » (WESSNER, Le nouveau droit du bail, Les dispositions générales, 6e Séminaire sur le droit du bail, Neuchâtel 1990, p. 9; TERRAPON, op. cit., p. 9).

Le locataire peut consigner la totalité du loyer dû, indépendamment de la gravité du défaut à éliminer et du montant de ses prétentions (coût des travaux, réduction de loyer, dommages-intérêts) (ATF 124 III 201 consid. 2d, in JdT 1999 I 367).

Une telle règle est justifiée : la consignation est un moyen de pression; il faut éviter les complications d'un double paiement. L'abus de droit ne saurait être invoqué, vu la volonté clairement exprimée par le législateur de permettre la consignation de tout le loyer. Bien évidemment, rien n'interdit au locataire de procéder à une consignation partielle et de verser le solde en main du bailleur (LACHAT, Le bail à loyer, op. cit., p. 340).

5.3
5.3.1
En l'espèce, les parties ont conclu un contrat de bail sous la forme écrite le 13 décembre 2018, prévoyant la mise à disposition de la maison litigieuse pour un loyer annuel de 30'000 fr. charges non comprises, soit 2'500 fr. par mois.

L'appelant a unilatéralement décidé de réduire le loyer mensuel à concurrence de 400 fr., sans en avertir l'intimé, à compter du mois de janvier 2020.

L'appelant soutient que la réduction précitée aurait été acceptée par actes concluants par l'intimé, dans la mesure où il ne s'y serait pas expressément opposé. Cependant, la jurisprudence applicable en la matière prévoit que seul un comportement actif peut être constitutif d'un acte concluant.

Tel que cela a été confirmé par l'appelant, l'intimé n'a pas adopté un comportement actif et n'a pas manifesté son acceptation de la réduction de loyer précitée. Le comportement du bailleur était purement passif et équivalait à un silence.

A cet égard, il ne ressort pas du contrat de bail du 13 décembre 2018 que les parties auraient souhaité conférer une signification particulière au silence de l'une d'elles. En conséquence, si l'intimé est demeuré passif, son silence ne peut être interprété en tant que manifestation de volonté en faveur d'une modification du contrat.

Compte tenu de ce qui précède, il ne peut être retenu que le contrat de bail liant les parties aurait été modifié par actes concluants en raison du silence de l'intimé sur ce point. L'appelant a ainsi unilatéralement décidé de modifier le contrat et de réduire le loyer à concurrence de 400 fr., sans acceptation subséquente de l'intimé.

5.3.2 Compte tenu de sa décision unilatérale, l'appelant n'a versé qu'une partie du loyer dû et violé en conséquence ses obligations à l'égard du bailleur qui l'a dès lors mis en demeure par avis comminatoire du 19 novembre 2020.

Dans la mesure où l'intimé a chiffré sa créance exigible à hauteur de 15'000 fr. à l'égard de l'appelant, imparti un délai à ce dernier pour rectifier la situation et attiré son attention sur le risque de se voir résilier son contrat de bail à défaut de règlement, les exigences jurisprudentielles précitées ont été respectées.

Il a par ailleurs été relevé par l'appelant que l'intimé avait initialement indiqué un arriéré à concurrence de 13'000 fr. en août 2020, soit cinq mois auparavant. Le montant de la créance était compréhensible pour l'appelant dans la mesure où ce montant correspond à la réduction de loyer opérée de son propre chef à hauteur de 400 fr. à compter du mois de janvier 2018. L'appelant ne peut dès lors valablement soutenir n'avoir pas pu appréhender le montant réclamé.

L'application de l'art. 257d CO n'étant pour le surplus conditionnée qu'à la mise à disposition de la chose louée en faveur de l'appelant, même si l'appelant n'a pas personnellement occupé le logement - puisqu'il vivait chez sa compagne - la maison litigieuse a été tenue à sa disposition conformément aux exigences de la disposition précitée, l'appelant ayant pu en particulier sous-louer les locaux.

Le comportement des sous-locataires, auxquels l'appelant avait lui-même cédé la possession des locaux, ne saurait être imputé à l'intimé. Ce dernier ne s'est d'ailleurs lié contractuellement avec les sous-locataires qu'à compter du mois de septembre 2020.

Finalement, le règlement des montants dus par les sous-locataires directement en mains de l'intimé par les soins de l'Hospice Général ne suffit pas à démontrer que l'appelant n'avait pas accès à la villa par la faute de l'intimé.

En effet, si la possession d'un logement était la condition d'application sine qua non de l'applicabilité de l'art. 257d CO, il ne pourrait y avoir de résiliation pour demeure de l'appelant en cas de sous-location notamment.

Malgré l'avis comminatoire notifié en date du 19 novembre 2020, l'appelant ne s'est pas acquitté de la somme en souffrance dans le délai comminatoire. L'appelant avait lui-même indiqué qu'il ne serait pas donné suite à la mise en demeure précitée. Or, un locataire diligent ne se serait pas simplement opposé à tout versement, mais aurait excipé à tout le moins de compensation, afin de ne pas risquer une résiliation de son contrat de bail.

Le droit du bail confère en effet à la partie faible liée par la relation contractuelle, soit le locataire, une protection légale résidant dans la possibilité soit d'exciper de compensation dans le délai comminatoire, soit de faire valoir ses droits en consignant le loyer, même partiellement.

Dans une optique de protection des locataires, le Message du Conseil fédéral avait expressément indiqué que des mesures avaient été adoptées afin de permettre au locataire d'obtenir une réduction du loyer, sans procéder à une réduction unilatérale, et ainsi se placer en porte-à-faux face au bailleur. La possibilité pour le locataire d'exiger la réparation d'un défaut, ainsi que le mécanisme de consignation de loyers avaient ainsi été adoptés dans ce but.

Le corollaire de la protection du locataire conférée par l'art. 259g CO réside dans le fait que le locataire ne peut en conséquence pas réduire, respectivement, retenir selon sa propre initiative, une partie du loyer dû.

Cependant, il ne ressort pas du dossier que l'appelant aurait excipé de compensation durant le délai comminatoire. Il n'a pas non plus procédé à la consignation partielle du loyer à concurrence du montant litigieux de 400 fr.

Aucun mécanisme prévu par la loi n'ayant été utilisé par l'appelant en sa qualité de locataire, il a procédé en violation de ses obligations contractuelles à l'égard du bailleur.

Il sera pour le surplus relevé que l'appelant n'avait manifestement pas l'intention de payer le moindre montant quel que soit le délai imparti, de telle sorte qu'il peut être considéré qu'il procède de mauvaise foi (arrêt du Tribunal fédéral 4A_664/2018 du 12 mars 2019 consid. 6).

Ainsi, à échéance du délai comminatoire, l'intimé a valablement résilié le contrat de bail du 13 décembre 2018 par avis du 21 décembre 2020 pour le 31 janvier 2021.

Au vu de ce qui précède, c'est à juste titre que le Tribunal a considéré que la résiliation du contrat de bail était efficace.

Le jugement entrepris sera dès lors confirmé.

6. En application de l'art. 22 al. 1 LaCC, il ne sera pas perçu de frais judiciaires et il ne sera pas alloué de dépens.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


A la forme
 :

Déclare recevable l'appel interjeté le 29 août 2022 par A______ contre le jugement JTBL/495/2022 rendu le 23 juin 2022 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/26940/2020.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie RAPP, présidente; Madame Pauline ERARD et Madame
Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Madame Nevana PULJIC et Monsieur Serge PATEK, juges assesseurs; Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie RAPP

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours : 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.