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Décisions | Chambre des baux et loyers

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C/12120/2019

ACJC/116/2023 du 23.01.2023 sur JTBL/502/2021 ( OBL ) , CONFIRME

Recours TF déposé le 02.03.2023, rendu le 21.04.2023, IRRECEVABLE, 4A_139/2023, 4A_139/23
Normes : CO.257d; CO.259d
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/12120/2019 ACJC/116/2023

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 23 JANVIER 2023

 

Entre

Madame A______, domiciliée ______, appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 1er juin 2021, comparant par Me Aurélie BATTIAZ GAUDARD, avocate, Galerie Jean-Malbuisson 15, case postale 1648, 1211 Genève 1, en l'étude de laquelle elle fait élection de domicile,

et

1) Monsieur B______, p.a. Régie C______, ______, intimé, comparant par Me Jean-Philippe FERRERO, avocat, boulevard des Philosophes 13, 1205 Genève, en l'étude duquel il fait élection de domicile,

2) Monsieur D______, domicilié ______, autre intimé, comparant en personne.

 

 

 

 


EN FAIT

A. Par jugement JTBL/502/2021 du 1er juin 2021, reçu par les parties le 8 juin 2021, le Tribunal des baux et loyers a déclaré efficace et valable le congé notifié le 26 avril 2019 pour le 31 mai 2019 par B______ à A______ et D______ concernant l'appartement de trois pièces situé au cinquième étage de l'immeuble sis rue 1______ no. ______ à Genève (ch. 1 du dispositif), débouté les parties de toutes aµtres conclusions (ch. 2) et dit que la procédure était gratuite (ch. 3).

B. a. Par acte expédié le 8 juillet 2021 à la Cour de justice, A______ forme appel contre ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut, préalablement, à la tenue d'un transport sur place et, principalement, à ce que la Cour annule le jugement et, à ce que la résiliation de bail du 26 avril 2019 soit déclarée inefficace, subsidiairement annulée, à ce que le loyer soit réduit de 30% dès le 1er mai 2014, et à ce que B______ soit condamné à verser aux locataires la sommes de 11'520 fr., respectivement 14'400 fr.

A______ produit à l'appui de son appel un chargé de pièces contenant sept nouvelles pièces.

b. Dans sa réponse du 8 septembre 2021, B______ conclut à la confirmation du jugement entrepris.

Il produit cinq pièces nouvelles.

c. A______ a répliqué en date du 12 octobre 2021 et a produit deux pièces nouvelles.

d. B______ a dupliqué, persistant dans ses conclusions.

e. D______ ne s'est pas déterminé.

f. Les parties ont été avisées par la Cour le 22 octobre 2021 de ce que la cause était gardée à juger.

g. Par pli du 6 juillet 2022, A______ à produit des pièces nouvelles soit une plainte pénale et un complément de plainte déposés à l'encontre de B______.

C. Les faits pertinents suivants résultent de la procédure :

a. En date du 25 août 1994, E______, ancien propriétaire, et A______ et D______, locataires, ont signé un contrat de bail portant sur la location d'un appartement de trois pièces au cinquième étage de l'immeuble sis rue 1______ no. ______, à Genève. D______ intervient dans le bail à titre de garant. Le bail a été conclu pour une durée initiale d'un an, du 1er septembre 1994 au 31 août 1995, renouvelable ensuite tacitement d'année en année sauf résiliation respectant un préavis de trois mois. Le loyer a été fixé à 600 fr. par mois. Aucune charge n'est prévue car l'appartement est équipé d'installations individuelles de chauffage et de production d'eau chaude. L'immeuble était géré par [la régie immobilière] F______ (ci-après "l'ancienne régie") puis, dès 2010, par [la régie immobilière] G______ (ci-après "la régie").

b. A une date indéterminée, B______ est devenu propriétaire de l'immeuble.

c. Dès 2001, les locataires se sont plaints de plusieurs nuisances, notamment de coupures d'eau, de bruit venant de la plomberie et de la péjoration de l'état du mur situé au nord-ouest de l'appartement, due selon eux à des infiltrations par la toiture. Des travaux de rénovation globale de l'immeuble ont été entrepris fin 2002 - début 2003, notamment sur la toiture, les façades, le chauffage central, les installations électriques et le remplacement des colonnes de chute et des fenêtres.

d. Par requête portée le 26 juin 2003 devant le Tribunal des baux et loyers, complétée les 19 mars 2004 et 21 février 2005, les locataires ont conclu à une réduction de loyer et à la suppression des défauts suivants: suppression de la cause des infiltrations d'eau dans l'appartement, notamment assurer une étanchéité correcte des façades et de la toiture, réfection complète du logement (sols, murs, plafonds et boiseries), ancrage de la cloison située dans la grande pièce, suppression des bruits solidiens émis par le réseau des installations sanitaires, remise en état des conduites d'évacuation des fumées (les équiper d'un tubage métallique), remise en état de la tabatière.

Le Tribunal a rendu un jugement JTBL/886/2005 le 30 mai 2005 par lequel il a notamment ordonné au bailleur d'exécuter dans les règles de l'art les travaux de suppression de la cause des infiltrations d'eau et de remise en état de la tabatière située en toiture et a réduit le loyer de 20% dès le 1er mars 2004 jusqu'à l'exécution des travaux.

Il ressort du jugement que lors de l'état des lieux d'entrée, l'état général de l'appartement était vétuste, les tuyauteries devaient être isolées, l'eau coulait sur les câbles électriques et une fuite d'eau coulait le long du mur de la chambre. Lors de l'inspection locale effectuée le 3 décembre 2004 dans le cadre de cette affaire, le Tribunal a pu constater que, hormis le local borgne, l'ensemble des murs, plafonds et boiseries étaient en mauvais état. Le plâtre était fissuré dans les toilettes, la cuisine et la pièce principale et les murs de toutes les pièces étaient tachés et très défraîchis. En outre, le plafond était gondolé et en très mauvais état dans l'entrée, les toilettes, la penderie et la cuisine. Au vu de l'état de l'appartement lors de l'entrée en vigueur du bail et du bas loyer fixé, le Tribunal a toutefois retenu que les locataires avaient échoué à démontrer la réalité des défauts originels de l'appartement dont ils se plaignaient et les a déboutés de leurs conclusions en réfection complète du logement.

e. Le défaut lié à la tabatière a été réparé en juillet 2008 par l'entreprise H______ SA par la création d'un velux.

La recherche de l'origine des infiltrations d'eau a été longue et compliquée. En mars 2006, I______, ramoneur, a constaté que la cheminée côté façade condensait et était fissurée et qu'il était dès lors nécessaire de la tuber.

f. Des travaux en toiture ont été réalisés en octobre 2006. Les locataires ont estimé que les travaux effectués, à savoir l'enlèvement de la couverture autour des conduits de cheminée, n'étaient pas suffisants pour éliminer la cause des infiltrations puisque cette cause avait été identifiée dans un ou plusieurs conduits de cheminée qui étaient fissurés. L'entreprise J______ SA a ensuite posé une couche de plâtre sur le mur situé au nord-ouest de l'appartement en date du 22 mars 2007. Dès le 28 mars 2007, les locataires ont averti l'ancienne régie que ces travaux n'étaient pas à même de remédier aux infiltrations d'eau et qu'en outre, le plâtre avait été appliqué sur un mur humide et taché. Le soir même après les travaux, les problèmes d'infiltrations étaient réapparus.

g. Le bailleur a donné son accord au tubage de la cheminée en mars 2008.

h. Le 30 mai 2008, l'ancienne régie a informé les locataires que le bailleur avait donné son accord pour procéder à la remise en état de la cheminée mais des travaux "sauvages" avaient été découverts aux étages inférieurs, empêchant l'exécution des travaux. Un rendez-vous avait été organisé pour procéder à un contrôle mais les entreprises n'avaient pas pu accéder à l'appartement car les locataires n'étaient pas présents.

L'accès aux appartements était souvent compliqué, la régie se heurtant au refus des occupants, notamment de la locataire, également lorsqu'elle demandait elle-même l'exécution de travaux, comme l'a confirmé le témoin K______, directeur de l'ancienne régie.

i. Les locataires ont dénoncé le cas à la Police du feu qui, le 24 octobre 2008, a interpellé l'ancienne régie au sujet des travaux auxquels le bailleur avait été condamné, travaux qui n'avaient, à sa connaissance, toujours pas été exécutés.

Le 23 avril 2009, l'ancienne régie a expliqué en détail à la Police du feu l'historique du dossier et l'état d'avancement des travaux.

j. Des travaux de tubage des cheminées ont été exécutés le 22 septembre 2009 par l'entreprise L______ SA, qui a procédé au tubage des cheminées des appartements situés au rez-de-chaussée et au deuxième étage.

Le 12 octobre 2010, les locataires ont informé la régie que le tubage effectué en septembre 2009 avait mal été exécuté, l'eau s'étant infiltrée à la suite de ces travaux dans un autre appartement. Le tubage avait alors été enlevé par les locataires de cet appartement en décembre 2009 et les infiltrations avaient ainsi repris chez eux.

De nouveaux travaux de tubage ont été effectués courant janvier 2013 par l'entreprise M______.

k. A la suite de plusieurs échanges entre la régie et la Police du feu, cette dernière a déclaré être satisfaite d'apprendre que les travaux d'assainissement de l'appartement avaient été exécutés en bonne et due forme, l'appartement répondant désormais aux normes de salubrité. Elle a ainsi clos le dossier par courrier du 7 février 2013.

l. Par courrier du 10 juillet 2014, les locataires ont informé la nouvelle régie qu'à la suite du gainage du conduit de cheminée effectué le 14 janvier 2013, les infiltrations d'eau se poursuivaient sur le mur nord-ouest. Dès lors, il ne pouvait être considéré que les travaux ordonnés par le Tribunal avaient été effectués dans les règles de l'art. En outre, ils ont fait part à la régie d'autres infiltrations par d'autres conduits et par la toiture pourtant rénovée en 2003, d'un carreau cassé au grenier, de leur boîte aux lettres détériorée et de sifflements dans les canalisations.

m. La Police du feu a rouvert le dossier le 8 août 2014 à la suite de nouvelles plaintes des locataires.

Après avoir rencontré des difficultés pour accéder au logement, la régie l'a visité le 13 octobre 2014. Elle a écrit à la Police du feu qu'elle n'avait constaté aucune infiltration ni aucun bruit.

La Police du feu s'est également rendue sur place le 14 avril 2015 et a constaté que les pièces de vie étaient sèches et aérées et que le réduit situé vers la cuisine, comportait des présences d'humidité modérée avec possibilité d'ouverture pour aérer. Tenant compte de l'ancienneté de l'immeuble, la Police du feu a considéré l'aspect de salubrité du dossier comme résolu par courrier du 28 avril 2015. Elle a toutefois précisé à la régie qu'elle devait procéder à un contrôle de la toiture et condamner les installations communes qui n'étaient pas utilisées afin de prévenir tout risque d'incendie.

n. Le 18 août 2015, la Police du feu a confirmé à la régie être satisfaite d'apprendre que les travaux d'assainissement en toiture avaient été réalisés dans les règles de l'art et a clôturé le dossier.

o. Par courriel du 29 août 2015, la locataire a confirmé qu'un réajustement du loyer à 600 fr. s'avérait opportun, la Police du feu ayant jugé que le problème des infiltrations était réglé.

p. Le 27 février 2017, la locataire a averti la régie que de récurrentes odeurs désagréables, vraisemblablement liées à des émanations, envahissaient la cage d'escaliers et son appartement. Ces odeurs avaient pour conséquence des maux aux membres inférieurs et aux articulations et des sensations de brûlures, une accélération du rythme cardiaque et une modification des dispositions psychiques. Elle avait mandaté le Service de toxicologie de l'environnement bâti pour évaluer la situation.

q. Le 30 juin 2017, les locataires ont à nouveau informé la régie de la présence notamment d'infiltrations, de brunissements et de fissures sur les murs et plafonds de l'appartement, le fait que le thermostat du chauffe-eau électrique était hors service et que le chauffe-eau lui-même suintait et d'infiltrations sur le plancher de la pièce principale installé par leurs soins.

r. Le 12 octobre 2017, la régie a averti les locataires du réajustement à 600 fr. par mois du loyer de l'appartement dès le 1er novembre 2017, le problème d'infiltration et de sécurité incendie ayant été résolu. Les locataires ont répondu le 23 octobre 2017 que les infiltrations se poursuivaient et s'aggravaient, ce dont la régie avait été informée. Ils avaient contacté N______, du Service LDTR, et la Police du feu, qui devaient venir constater les défauts. Dès lors, la réduction de loyer de 20% devait se poursuivre jusqu'à la parfaite exécution des travaux. La régie a répondu le 27 octobre 2017 que la Police du feu avait décidé, par courrier du 18 août 2015, que les travaux d'assainissement en toiture avaient été réalisés dans les règles de l'art et que le dossier était clos, ce que les locataires avaient eux-mêmes confirmé par courriel du 29 août 2015. En outre, les points soulevés dans le courrier du 30 juin 2017 étaient examinés par le bailleur et n'avaient en tous les cas aucun lien avec le jugement du Tribunal des baux et loyers du 30 mai 2005. Le 6 novembre 2017, la locataire a transmis à la régie des photos du brunissement anormal des murs de l'appartement, photos transmises également à la Police du feu.

s. Le 28 février 2018, la locataire a écrit à la régie que le bailleur n'avait pas remédié aux infiltrations décrites dans le jugement du Tribunal des baux et loyers et qu'un réajustement du loyer était dès lors prématuré.

t. Le 8 mars 2018, la régie a informé les locataires que l'entreprise O______ avait contrôlé le chauffe-eau le 23 février 2018 à la suite de la plainte du 30 juin 2017 et avait constaté de nombreuses défectuosités. La régie était donc surprise de l'état déplorable de cette installation remplacée en fin d'année 2014, détériorée par les locataires. Elle leur demandait de remettre en état l'installation.

u. Le 27 mars 2018, les locataires se sont adressés directement au bailleur et l'ont prié de remédier aux défauts suivants, qui s'étaient sensiblement aggravés depuis 2015, ce dont la régie avait été informée, photos à l'appui :

- Notable intensification des infiltrations relevées dès 2002, plus particulièrement dans les murs recelant des cheminées, amenant à l'éclatement du plâtre par endroit; les infiltrations sur le mur situé au nord-ouest de l'appartement avaient mené au jugement du Tribunal du 30 mai 2005; les travaux entrepris en 2010 (mur de plâtre) et en 2015 (toiture) n'avaient pas résolu le problème;

- Tuyaux ouverts dans les courettes intérieures sur lesquelles donnait l'appartement (tuyaux troués et corrodés);

- Forte odeur résultant d'émanations portant atteinte à la santé;

- Fissures aux plafonds et sur les murs;

- Petits trous dans le faux-plafond de la pièce principale, dont certains étaient auréolés de brun;

- Brunissement anormal des murs et plafonds;

- Infiltrations notables dans le plancher de la pièce principale;

- Désolidarisation du cadre de la porte palière et grippage de la fermeture d'une fenêtre;

- Eau coulant de manière impromptue dans la cuisine;

- Panne du chauffe-eau électrique depuis mi-février 2018, les locataires donnant des explications sur son état relevé par [l'entreprise] O______ en niant leur responsabilité;

- Communications électroniques et accès aux programmes télévisés déficients;

- Boîte aux lettres endommagée.

v. Le 28 mars 2018, la locataire a demandé au Service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (SABRA) d'effectuer un contrôle de la qualité de l'air car elle était selon elle victime d'émanations vraisemblablement toxiques venant des tuyaux ouverts, troués et corrodés.

Le 12 mai 2018, le SABRA a rendu une analyse de l'air intérieur du logement. Les résultats ont mis en évidence des composés organiques volatils classiquement rencontrés dans l'air intérieur. La qualité de l'air observée était donc normale et aucune substance toxique n'a été relevée. Le SABRA a donc conclu que la situation actuelle ne présentait aucun risque.

w. Le 12 juin 2018, N______ du Service LDTR de l'Office cantonal du logement, a rendu un rapport non signé à la suite de ses visites de l'appartement. Il en ressort que le logement n'était pas rénové, que l'état des finitions et des équipements était vétuste, dégradé et minimum, qu'un grand nombre de fissures était visible, que les plâtres étaient brunis et qu'il régnait des odeurs nauséabondes provenant probablement des conduites qui étaient soit disjointes soit coupées.

x. Le 14 juin 2018, les locataires ont informé la régie que les émanations semblaient s'intensifier depuis l'emménagement de nouveaux locataires, que leur alimentation en courant électrique était variable et que le chauffe-eau émettait des bruits et serait prochainement enlevé.

y. Le 6 septembre 2018, la société P______ a fait parvenir à la locataire, à la suite de sa demande, les résultats d'analyse d'échantillons des murs, plafonds, sols et tuyaux de l'appartement, desquels il ressort des taux de présence d'argent et de cuivre inférieurs aux moyennes tolérables.

Le 19 septembre 2018, le SABRA a confirmé que ces résultats correspondaient à la médiane des valeurs mesurées dans les logements et lieux publics du canton et que d'un point de vue statistiques, les résultats étaient normaux.

z. Parallèlement, le 15 janvier 2018, la Police du feu a à nouveau interpellé la régie et lui a demandé des contrôles de plusieurs installations, notamment les conduits d'extraction de fumée, la toiture et les installations sanitaires. La régie a ainsi commandé auprès des entreprises les différents contrôles sollicités. Il en est résulté :

- Pour les conduits de cheminée, que le conduit de fumée collectif à l'appartement des locataires et un autre étaient à rénover avec un crépi et que les deux conduits en aluminium dans les appartements au troisième étage étaient à remplacer par un conduit de fumée neuf, travaux confiés à l'entreprise Q______ et effectués du 26 au 28 février 2019;

- Pour la toiture, que cette dernière était en bon état d'entretien ce qui a été confirmé par l'entreprise H______ SA dans son rapport;

- Pour les installations sanitaires communes et individuelles, qu'elles étaient aux normes, étant précisé que certains appartements n'avaient pas pu être visités, dont celui des locataires, car ces derniers en avaient refusé l'accès à l'entreprise; bien qu'aux normes, l'entreprise a noté que plusieurs écoulements étaient en mauvais état.

aa. Le 8 février 2019, la régie est revenue auprès des locataires sur les échanges des 23 et 27 octobre 2017 relatifs au réajustement du loyer à compter du 1er novembre 2017. Elle les a mis en demeure de lui verser la somme de 1'800 fr. (à savoir la différence entre le loyer dû de 600 fr. et le loyer payé de 480 fr. pendant quinze mois) dans un délai de trente jours, sous menace de résiliation du bail.

Le 7 mars 2019, la régie a à nouveau mis en demeure les locataires de lui verser la somme de 2'630 fr. (3'000 fr. représentant les loyers de 600 fr. de novembre 2018 à mars 2019 + 110 fr. de frais de rappel - un acompte de 480 fr.) dans un délai de trente jours, sous menace de résiliation du bail.

bb. Par lettres des 8 et 29 mars 2019 à la régie, les locataires ont soutenu que les travaux d'assainissement n'avaient jamais été exécutés en bonne et due forme et que dès lors, la réduction de loyer continuait à s'appliquer, en invoquant à titre subsidiaire en compensation une réduction de loyer de 30% due depuis à tout le moins 2009, compte tenu de l'insalubrité du logement et vu les graves défauts affectant l'appartement (fissures, brunissement, odeurs...).

cc. Par avis officiels du 26 avril 2019, la régie a résilié le bail pour le 31 mai 2019.

dd. Le 10 mai 2019, la locataire a envoyé à la régie deux photos montrant une trace d'infiltration sèche bordée de marron sur le mur de la pièce principale, autour du tuyau de gaz, ces émanations allant jusqu'à faire fondre des gants en plastique selon elle. Elle a également fait part de fuite du tuyau du gaz alimentant précédemment le chauffage à gaz.

Selon l'analyse d'un morceau de gaine de tuyau faite le 8 janvier 2019 par la société R______ à la demande de la locataire, les éléments de la gaine étaient composés de carbone et d'oxygène.

ee. Le 27 mai 2019, les locataires ont mis en demeure le bailleur de remédier aux défauts suivants, sous menace de consignation du loyer :

- Suppression de toutes les causes des infiltrations d'eau, de gaz ou autres entraînant la dégradation progressive et continue de l'appartement;

- Suppression des infiltrations provenant des conduits de cheminée;

- Suppression des causes entraînant des odeurs nauséabondes;

- Remplacement de tous les tuyaux de l'appartement et de l'immeuble;

- Réfection des murs, plafonds et sols;

- Réparation de la porte palière et du robinet de la cuisine;

- Installation d'une nouvelle boîte aux lettres.

ff. Par requêtes déposées le 27 mai 2019 par-devant la Commission de conciliation en matière de baux et loyers, déclarées non conciliées lors de l'audience de la Commission du 10 juillet 2019 et portées devant le Tribunal le 29 août 2019, les locataires ont conclu, principalement, à ce que le Tribunal déclare inefficace, subsidiairement annulable, le congé, dise que le loyer était réduit de 30% dès le 1er mai 2014 et condamne le bailleur à leur verser la somme de 8'640 fr., subsidiairement de 12'000 fr. Les numéros de cause C/12120/2019 et C/12121/2019 ont été attribués aux affaires.

gg. Par ordonnance du 16 septembre 2019, le Tribunal a joint les deux causes sous le numéro de procédure C/12120/2019.

hh. Par mémoire réponse du 21 novembre 2019, le bailleur a conclu à ce que le Tribunal déboute les locataires de toutes leurs conclusions.

ii. Le 20 janvier 2020, les locataires ont produit un chargé de pièces complémentaires dont des photos de l'appartement et une analyse du sang de la locataire datée du 27 septembre 2019 dans laquelle de l'aluminium, de l'arsenic, du plomb, du mercure et du méthyl mercure avaient été détectés, à des valeurs biologiques tolérables.

jj. Lors de l'audience du Tribunal du 21 janvier 2020, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

La locataire a déclaré que, les travaux ordonnés par le Tribunal n'avaient jamais été effectués et les défauts s'aggravaient, notamment sur les murs. L'appartement était certes vétuste au début de la location mais il était aujourd'hui insalubre. Elle n'a pas contesté que la tabatière avait été remise en état et a précisé que seuls les travaux liés aux infiltrations n'avaient pas été réalisés conformément au jugement du Tribunal. Lorsqu'elle avait envoyé le courriel en août 2015 indiquant que les travaux avaient été exécutés et que le loyer pouvait à nouveau être augmenté, elle se fiait au fait que des travaux avaient été effectués en toiture. Toutefois, cette intervention n'avait pas réglé le problème car l'origine des infiltrations provenait des conduits de cheminée. Elle était ainsi dans l'erreur et lorsqu'elle l'avait remarqué, elle avait envoyé un courrier un mois plus tard pour indiquer que les infiltrations continuaient. Au jour de l'audience les problèmes suivants affectaient l'appartement : des infiltrations dans les murs provenant des conduits de cheminée et des émanations de gaz dont l'origine restait à déterminer et qui endommageaient le plancher et faisaient fondre le caoutchouc. Elle s'est référée à l'analyse de son sang dans lequel des métaux lourds avaient été détectés tout en précisant que le médecin ne lui avait pas indiqué la provenance de ces valeurs. Ces défauts étaient similaires à ceux invoqués à l'époque de la première procédure intentée mais il y avait moins d'odeurs nauséabondes, moins d'infiltrations et moins d'émanations.

Le bailleur a déclaré qu'en 2015, les travaux visés par le jugement avaient tous été effectués et aucun nouveau problème n'était survenu par la suite. Il n'avait jamais eu l'intention de laisser le loyer à 480 fr. Lorsqu'il avait informé la locataire que le loyer allait être augmenté à nouveau à 600 fr., cette dernière avait formulé de nouvelles plaintes (odeurs, émanations, bruits, infiltrations) de sorte qu'il avait dû mener de nouvelles investigations, raison pour laquelle la mise en demeure n'avait été envoyée qu'en février 2019.

Le représentant de la régie a déclaré que la locataire élevait sans cesse de nouvelles revendications. Il avait toujours été difficile d'accéder à son appartement pour que les entreprises interviennent. Le Service du feu avait confirmé que les travaux avaient été effectués à satisfaction. Dès lors, le loyer pouvait être augmenté.

kk. Le 20 août 2020, le bailleur a produit un rapport d'intervention du 30 avril 2020 de S______ SA qu'il avait mandatée à la suite de l'inondation survenue dans l'appartement. Il ressort de ce rapport qu'aucune fuite ni traces d'humidité n'avaient été constatées dans l'appartement des locataires. Toutefois, il n'y avait aucune étanchéité autour de la baignoire et le tablier était inexistant, la batterie de bains n'était pas fixée au mur et l'écoulement de la baignoire était sous dimensionné et rafistolé avec du scotch, ces trois points ayant selon l'entreprise probablement été effectués par les locataires. Selon l'entreprise, l'infiltration était certainement liée à ces différents défauts d'étanchéité.

ll. Lors de l'audience du Tribunal du 1er septembre 2020, le témoin T______, ami de la locataire se rendant régulièrement dans l'appartement, la dernière fois en octobre ou novembre 2019, a déclaré que la locataire avait refait la salle de bains et la peinture elle-même et avait installé un chauffage à bois. Des travaux avaient été mal exécutés par des entreprises sur un mur, les WC et de la tuyauterie apparente qui suintait. La cuisine était délabrée. Il avait constaté des traces brunes sur le mur gauche en entrant dans la cuisine, traces qui pour lui avaient toujours été là. Il avait également constaté des tâches d'humidité partout côté salle de bains et cuisine.

Le témoin N______, architecte auprès du Département du territoire, a déclaré qu'il avait visité plusieurs fois l'immeuble d'un point de vue LDTR. Il s'était rendu dans l'appartement à la suite d'une fuite d'eau qui avait inondé le plafond du logement en-dessous, due à son souvenir à une baignoire installée sans respect des règles de l'art dans l'appartement de la locataire. Lors de ces visites, il avait relevé des odeurs persistantes provenant selon lui de la tuyauterie. L'appartement était initialement sans confort, sans chauffage central ni eau chaude et mal isolé. L'immeuble n'était de manière générale pas bien entretenu, et il existait notamment des problèmes de tuyauterie, d'électricité et de ventilation dans l'appartement qui, sans être insalubre, était en mauvais état. Il avait constaté des traces d'infiltrations sur les murs. Il s'agissait d'anciennes coulures. Tous les murs étaient jaunis et salis.

Le témoin U______, ami de la locataire depuis 40 ans environ et se rendant occasionnellement chez elle, a déclaré que sur le mur gauche en entrant dans la cuisine, il avait constaté des traces et des salissures, qui étaient présentes depuis qu'il se rendait dans l'appartement. Cet appartement était dans un état d'insalubrité avec des fissures. Il soupçonnait des infiltrations par le toit. Il n'avait constaté aucune odeur particulière.

mm. Lors de l'audience du Tribunal du 13 octobre 2020, le témoin V______, responsable technique auprès de la régie jusqu'en août 2019, a confirmé que des travaux de toiture, façades et fenêtres avaient été entrepris sur l'immeuble avant son arrivée à la régie en novembre 2012. Les problèmes d'humidité dans l'appartement, qui pouvait être décrit comme bien défraîchi, existaient avant ces travaux. Pour lui, les travaux listés dans le jugement avaient été entièrement effectués avant son arrivée à la régie et la Police du feu avait clos le dossier en août 2015. Les traces d'infiltrations apparaissant sur les photos produites étaient des traces anciennes, déjà présentes lors de son arrivée à la régie, devant dater d'avant la réfection de la toiture.

Le témoin K______, en charge de la gestion de l'immeuble durant deux ans en 2008-2010, a déclaré que l'intervention sur le conduit de cheminée avait mis fin à la problématique des infiltrations, ce qui avait été constaté par l'ensemble des intervenants, y compris la Police du feu et la locataire. A son souvenir, la locataire adressait d'innombrables demandes à la régie, non justifiées, ayant mené à la procédure à l'issue de laquelle elle avait été déboutée de l'ensemble de ses demandes à l'exception de la tabatière et des infiltrations.

A l'issue de l'audience, le conseil des locataires a persisté à solliciter une inspection locale et l'audition de deux policiers.

nn. Par ordonnance du 16 novembre 2020, le Tribunal a, par appréciation anticipée des preuves, clôturé la phase d'administration des preuves et fixé un délai au 17 décembre 2020, prolongé au 15 janvier 2021, pour le dépôt des plaidoiries finales.

oo. Par mémoire de plaidoiries finales du 13 janvier 2021, le bailleur a persisté dans ses conclusions.

Par mémoire de plaidoiries finales du 15 janvier 2021, les locataires ont persisté dans leurs conclusions, amplifiant leurs conclusions en paiement à 11'520 fr., respectivement 14'400 fr.

Les locataires ont produit une pièce complémentaire à savoir un constat d'huissier daté du 17 décembre 2020, duquel il ressortait que les murs et plafonds de l'appartement étaient tachés, défraîchis, troués et pour certains moisis.

pp. Les 4 et 5 février 2021, les parties ont déposé des observations sur les mémoires de plaidoiries finales.

qq. La cause a été gardée à juger par le Tribunal en date du 5 février 2021.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Dans une contestation portant sur la validité d'une résiliation de bail, la valeur litigieuse est égale au loyer de la période minimum pendant laquelle le contrat subsiste nécessairement si la résiliation n'est pas valable, période qui s'étend jusqu'à la date pour laquelle un nouveau congé peut être donné ou l'a effectivement été. Lorsque le bail bénéficie de la protection contre les congés des art. 271 ss CO, il convient, sauf exceptions, de prendre en considération la période de protection de trois ans dès la fin de la procédure judiciaire qui est prévue par l'art. 271a al. 1 let. e CO (ATF 137 III 389 consid. 1.1; 136 III 196 consid. 1.1; arrêt du Tribunal fédéral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

1.2 En l'espèce, le loyer annuel du logement, s'élève à 7'200 fr. En prenant en compte une durée de trois ans, la valeur litigieuse est largement supérieure à 10'000 fr. (7'200 fr. x 3 = 21'600 fr.).

S'agissant des conclusions en paiement, celles-ci sont également supérieures à 10'000 fr. La voie de l'appel est donc ouverte.

1.3 L'appel a été interjeté dans le délai et suivant la forme prescrite par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable.

1.4 L'appel peut être formé pour violation du droit (art. 310 let. a CPC) et constatation inexacte des faits (art. 310 let. b CPC). L'instance d'appel dispose ainsi d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit; en particulier, le juge d'appel contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF 138 III 374 consid. 4.3.1).

2. Les deux parties ont produit de nouvelles pièces et fait valoir des faits nouveaux.

2.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

A partir du début des délibérations, les parties ne peuvent plus introduire de nova, même si les conditions de l'art. 317 al. 1 CPC sont réunies. La phase des délibérations débute dès la clôture des débats, s'il y en a eu, respectivement dès que l'autorité d'appel a communiqué aux parties que la cause a été gardée à juger (ATF 142 III 413 consid. 2.2.3 à 2.2.6; arrêt du Tribunal fédéral 5A_456/2016 du 28 octobre 2016 consid. 4.1.2).

2.2 En l'espèce, les photographies de l'appartement litigieux prises en juin 2021 et le relevé d'analyses sanguines, également daté de juin 2021, produits par l'appelante, sont irrecevables. Celle-ci n'explique en effet pas pour quel motif elle ne pouvait pas prendre ces photographies ni effectuer ces analyses avant la fin de l'instruction devant le Tribunal. Les copie des plaintes pénales déposées par l'appelante contre B______ produites le 6 juillet 2022, soit après que la cause ait été gardée à juger par la Cour, sont également irrecevables.

Les pièces nouvelles déposées par B______, qui portent sur des faits postérieurs à la date à laquelle le Tribunal a gardé la cause à juger, sont quant à elles recevables. Elles sont cependant dénuées de pertinence pour l'issue du litige.

3. Le Tribunal a retenu que les conditions formelles de la validité de la résiliation pour défaut de paiement étaient réalisées, puisque l'appelante n'avait pas payé le montant réclamé par B______ dans le délai comminatoire. Sur le fond, l'appelante n'était pas en droit de retenir 20% du loyer car la cause des infiltrations d'eau avait été éliminée, conformément à l'injonction contenue dans le jugement du Tribunal du 30 mai 2005, au plus tard le 18 août 2015, date à laquelle la Police du feu avait clos le dossier. Les parties s'accordaient à dire que la cause des infiltrations d'eau était le mauvais état des conduits de cheminée qui devaient être tubés. Ces travaux avaient été faits en septembre 2009, en sus des travaux en toiture, et complétés en janvier 2013. A la suite de ces derniers travaux, la Police du feu avait confirmé que l'appartement répondait désormais aux normes de salubrité, constat confirmé les 28 avril 2015 et 18 août 2015. Le jugement du 30 mai 2005 obligeait B______ à supprimer la cause des infiltrations, mais non leurs conséquences. L'existence de taches sur les murs ne permettait donc pas de retenir que les défauts subsistaient. Il ne ressortait pas des photographies produites que les taches avaient évolué après août 2015. Le mur nord-ouest avait été plâtré en mars 2007 de sorte que la présence de taches sur ce mur ne démontrait pas que les défauts subsistaient après août 2015. Tous les témoins avaient confirmé que les taches avaient toujours été là et qu'il s'agissait d'anciennes coulures. La Police du feu avait constaté que l'appartement était sec en avril 2015. Rien n'établissait que l'intervention de B______ sur les conduites de cheminée en 2018 était en lien avec des infiltrations d'eau et non avec l'entretien régulier du bâtiment. L'appelante n'était dès lors pas en droit de retenir une partie du loyer au motif que la cause des infiltrations d'eau n'avait pas été éliminée.

L'appelante fait valoir que les photographies produites par ses soins et le constat d'huissier du 17 décembre 2020 établissent que les taches sur le mur nord-ouest liées aux infiltrations ont évolué, de sorte que c'est à tort que le Tribunal a retenu que la cause de celles-ci avait été supprimée. Elle requiert que la Cour procède à un transport sur place, mesure d'instruction refusée à tort par le Tribunal.

3.1.1 Selon l'article 257d al. 1 CO, lorsque le locataire d'un bail d'habitation ou de locaux commerciaux est en retard dans le paiement de loyers ou frais accessoires échus, le bailleur peut lui fixer par écrit un délai, de 30 jours au moins, et lui signifier qu'à défaut de paiement dans ce délai, il résiliera le bail. En cas de non-paiement dans le délai, il peut, moyennant un délai de congé de 30 jours pour la fin d'un mois, résilier le bail en application de l'article 257d al. 2 CO.

3.1.2 Selon l'article 259d CO, la réduction de loyer en lien avec un défaut peut être exigée à partir du moment où le bailleur a eu connaissance du défaut et jusqu'à l'élimination complète de ce dernier. Ainsi, le droit à la réduction du loyer cesse lorsque le bailleur a procédé aux réparations nécessaires ou quand le défaut prend fin de lui-même (Lachat/Rubli, Le bail à loyer, 2019, p. 319).

3.1.3 Aux termes de l'art. 157 CPC, le tribunal établit sa conviction par une libre appréciation des preuves administrées.

L'instance d'appel, qui dispose d'un plein pouvoir d'examen de la cause en fait et en droit, contrôle librement l'appréciation des preuves effectuée par le juge de première instance (art. 157 CPC en relation avec l'art. 310 let. b CPC) et vérifie si celui-ci pouvait admettre les faits qu'il a retenus (ATF138 III 374 consid. 4.3.1).

3.1.4 Conformément à l'art. 316 al. 3 CPC, l'instance d'appel peut librement décider d'administrer des preuves : elle peut ainsi ordonner que des preuves administrées en première instance le soient à nouveau devant elle, faire administrer des preuves écartées par le Tribunal de première instance ou encore décider l'administration de toutes autres preuves. Cette disposition ne confère toutefois pas à l'appelant un droit à la réouverture de la procédure probatoire et à l'administration de preuves. L'autorité d'appel peut rejeter la requête de réouverture de la procédure probatoire et d'administration d'un moyen de preuve déterminé présentée par l'appelant si celui-ci n'a pas suffisamment motivé sa critique de la constatation de fait retenue par la décision attaquée, si la preuve n'a pas été régulièrement offerte, dans les formes et les délais prévus par le droit de procédure, ou si elle ne porte pas sur un fait pertinent pour l'appréciation juridique de la cause (ATF 133 III 189 consid. 5.2.2; 129 III 18 consid. 2.6 et les références); elle peut également refuser une mesure probatoire en procédant à une appréciation anticipée des preuves, lorsqu'elle estime que le moyen de preuve requis ne pourrait pas fournir la preuve attendue ou ne pourrait en aucun cas prévaloir sur les autres moyens de preuve déjà administrés par le Tribunal de première instance, à savoir lorsqu'il ne serait pas de nature à modifier le résultat de l'appréciation des preuves qu'elle tient pour acquis (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 et les arrêts cités).

3.2 En l'espèce, il ressort du jugement du 30 mai 2005 que, lors de l'entrée de l'appelante dans l'appartement en 1994, celui-ci était vétuste, ce qui avait été accepté par l'appelante, le loyer étant fixé en conséquence. Il y avait déjà des fuites d'eau dans plusieurs pièces. Deux défauts admis par le Tribunal subsistaient encore au moment du jugement de mai 2005, à savoir des infiltrations d'eau endommageant le mur nord-ouest et un problème en lien avec l'obturation d'une tabatière. La réduction de loyer de 20% a été allouée jusqu'à réfection de ces deux défauts. L'intimé n'a par contre pas été condamné à supprimer les conséquences des infiltrations d'eau sur le mur en question. Il n'est pas contesté que le défaut lié à la tabatière a été résolu en 2008.

Il ressort de ce qui précède que, dans la mesure où la réduction de loyer de 20% tenait compte de deux défauts, dont l'un a été supprimé en 2008, l'appelante n'était en tout état de cause pas en droit de retenir l'intégralité du montant alloué au titre de réduction de loyer après 2008.

A cela s'ajoute que l'appelante n'a pas établi que la fuite d'eau sur le mur nord-ouest a perduré postérieurement à août 2015. Les photographies qu'elle a produites le 29 août 2019 n'établissent pas que les taches sur ledit mur se sont aggravées après cette date, étant rappelé que B______ n'était pas tenu de procéder à la réfection du mur en question. Ces photographies sont floues et non concluantes. La date exacte à laquelle chacune d'elle a été prise n'est en outre pas établie, de sorte qu'il n'est pas possible de faire une comparaison entre l'état du mur à une date ou une autre.

Le constat d'huissier du 17 septembre 2020 n'est pas non plus déterminant. Il ne démontre pas qu'il existe des traces d'humidité sur le mur nord-ouest de l'appartement qui ont été causée par des infiltrations postérieures à août 2015.

Les témoins N______, U______, T______ et V______ ont en outre tous relevé que les traces d'infiltration sur les murs provenaient de coulures anciennes et qu'elles existaient depuis de nombreuses années.

L'appelante fait valoir qu'une inspection locale est nécessaire pour que la Cour "puisse se rendre compte de visu de l'état des infiltrations dans son appartement, qui démontre que les travaux effectués n'ont pas été réalisés dans les règles de l'art, ni de nature à supprimer la cause desdites infiltrations comme ordonné par le Tribunal des baux et loyers le 30 mai 2005". Cette argumentation ne saurait être suivie. En effet, dans la mesure où B______ n'a pas été condamné à éliminer les conséquences des infiltrations précitées, ni à procéder à la réfection du mur endommagé, l'on voit mal comment la Cour pourrait, sur la base d'une simple inspection visuelle, déterminer si d'éventuelles taches présentes sur le mur nord-ouest de l'appartement sont postérieures ou antérieures à août 2015.

Comme l'a retenu le Tribunal, une inspection locale n'est dès lors ni appropriée, ni nécessaire in casu, les nombreuses pièces produites et les témoignages recueillis étant suffisants pour établir à satisfaction de droit tous les faits pertinents pour l'issue du litige.

Il résulte de ce qui précède que c'est à juste titre que le Tribunal a considéré que la cause des infiltrations d'eau ayant partiellement motivé la baisse de loyer octroyée par jugement du 30 mai 2005 avait été éliminée dès août 2015.

L'appelante n'était ainsi pas en droit de retenir 20% du loyer pour ce motif après cette date.

4. Le Tribunal a considéré que le fait que B______ n'ait pas réclamé l'entier du loyer entre août 2015 et octobre 2017 ne pouvait pas être interprété comme une volonté de celui-ci d'appliquer de manière définitive la réduction de loyer de 20% prévue par jugement du 30 mai 2005; il s'agissait probablement d'un oubli. Le laps de temps écoulé entre la réclamation du 12 octobre 2017 et la mise en demeure du 8 février 2019 s'expliquait quant à lui par les nombreuses nouvelles réclamations de l'appelante et l'intervention subséquente de la Police du feu.

L'appelante fait valoir que en omettant de réclamer le solde de loyer pendant une longue période, B______ avait manifesté son intention de renoncer à définitivement à une partie du loyer convenu. Le principe de la confiance permettait de lui imputer les conséquences de son comportement.

4.1 Aucune forme n'étant légalement prescrite pour la conclusion d'un contrat de bail, sa modification ultérieure n'est en principe soumise à aucune exigence de forme, et ce même si les parties avaient convenu de la forme écrite pour sa conclusion. Demeurent réservés les cas où la loi exige expressément la forme écrite ou l'utilisation d'une formule officielle, essentiellement par le bailleur. Le locataire qui prend l'initiative d'une modification consensuelle ou bilatérale du contrat n'est tenu à aucune forme (ATF 40 II 614 consid. 1). Sauf lorsqu'elle porte sur des points précis prévus par la loi, la modification du contrat de bail à loyer peut donc se faire oralement ou par acte concluant.

Une manifestation de volonté est faite par actes concluants lorsqu'elle n'exprime pas directement une certaine volonté mais qu'elle permet néanmoins à son destinataire de déduire l'existence de cette volonté. Une telle manifestation de volonté ressort le plus souvent d'un comportement actif. Par exemple, une acheteuse dépose de la marchandise sur le tapis roulant à la caisse d'un magasin; la banque priée de donner un renseignement ne répond pas expressément qu'elle accepte de le faire, mais se contente de délivrer ce renseignement. Le silence vaut comme manifestation de volonté expresse lorsque les parties ont décidé conventionnellement de lui donner une telle portée, par exemple en s'entendant sur le fait que l'offre de l'une d'elle sera considérée comme acceptée si l'autre ne la conteste pas dans les vingt-quatre heures. En l'absence d'une convention sur la portée du silence d'une des parties, un comportement purement passif ne vaut en principe pas comme manifestation de volonté par acte concluant, sauf si le principe de la confiance permet exceptionnellement de lui donner un tel sens et d'imputer ainsi une manifestation de volonté à son auteur (Morin, Commentaire romand, n. 10 et 11 ad art. 1 CO).

Pour que l'on puisse admettre la conclusion d'un contrat par actes concluants (art. 1 al. 2 CO), il est nécessaire que les parties aient adopté une attitude dépourvue d'ambiguïté, un comportement dont l'interprétation ne suscite raisonnablement aucun doute (ATF 113 II 522, JdT 1988 I 354).

A teneur de l'art. 18 al. 1 CO, pour apprécier la forme et les clauses d'un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s'arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention.

Le juge doit rechercher, dans un premier temps, la réelle et commune intention des parties (interprétation subjective), le cas échéant empiriquement, sur la base d'indices; si elle aboutit, cette démarche conduit à une constatation de fait. S'il ne parvient pas à déterminer cette volonté, ou s'il constate qu'une partie n'a pas compris la volonté manifestée par l'autre - ce qui ne ressort pas déjà du simple fait qu'elle l'affirme en procédure, mais doit résulter de l'administration des preuves -, il doit recourir à l'interprétation normative (ou objective). Le juge doit rechercher, par l'interprétation selon la théorie de la confiance, quel sens les parties pouvaient ou devaient donner, de bonne foi, à leurs manifestations de volonté réciproques (principe de la confiance); il s'agit d'une question de droit. Le principe de la confiance permet ainsi d'imputer à une partie le sens objectif de sa déclaration ou de son comportement, même s'il ne correspond pas à sa volonté intime (ATF
142 III 671 consid. 3.3; 140 III 134 consid. 3.2; 136 III 186 consid. 3.2.1;
135 III 295 consid. 5.2; arrêt du Tribunal fédéral 4A_290/2017 du 12 mars 2018 consid. 5.1).

Constituent des indices permettant de déterminer la réelle et commune intention des parties non seulement la teneur des déclarations de volonté, écrites ou orales, mais encore le contexte général, soit toutes les circonstances permettant de découvrir la volonté réelle des parties, qu'il s'agisse de déclarations antérieures à la conclusion du contrat ou de faits postérieurs à celle-ci, en particulier le comportement ultérieur des parties établissant quelles étaient à l'époque les conceptions des contractants eux-mêmes. L'appréciation de ces indices concrets par le juge, selon son expérience générale de la vie, relève du fait (arrêt du Tribunal fédéral 4A_643/2020 du 22 octobre 2021 consid. 4.2).

Selon le principe de la subsidiarité de l'interprétation objective, il est exclu de procéder à l'interprétation du contrat selon le principe de la confiance si la volonté réelle des parties a pu être établie, que ce soit dans le sens d'un accord de fait ou d'un désaccord patent (arrêt 4A_58/2018 du 28 août 2018 consid. 3.4).

4.2 En l'espèce, aucun élément du dossier ne permet de retenir que B______ avait réellement l'intention de diminuer le loyer de 20% de manière permanente. Comme l'a relevé à bon droit le Tribunal, le fait qu'il n'ait pas immédiatement adressé de nouveaux bulletins de versements de 600 fr. après la réfection des défauts en août 2015 résulte probablement d'une erreur de sa part. En octobre 2017, B______ a fait savoir à l'appelante que le loyer serait réajusté à 600 fr. par mois dès le 1er novembre 2017, ce qui atteste du fait qu'il n'avait pas accepté de procéder à une réduction de loyer pour une durée indéterminée et que, dès la date précitée, il considérait que l'entier du montant initialement convenu était dû.

Dans la mesure où B______ a renoncé à réclamer l'arriéré de loyer pour la période d'août 2015 à octobre 2017, il convient de retenir qu'il a accepté par actes concluant de renoncer à 20% du loyer pour la période précitée, mais uniquement pour celle-ci.

Par la suite, dans la mesure où l'appelante contestait la disparition des défauts visés par le jugement du 30 mai 2005 et alléguait que de nouveaux défauts étaient survenus, il était légitime que B______ attende que la situation soit éclaircie avant d'adresser une mise en demeure à l'appelante pour le paiement du loyer. Ce qui précède est corroboré par le fait qu'il a entrepris des investigations supplémentaires suite aux nouvelles revendications de l'appelante.

En application du principe de la confiance, l'appelante ne pouvait pas de bonne foi comprendre de l'attitude de B______ que celui-ci avait renoncé définitivement à percevoir l'intégralité du loyer convenu. Elle n'a d'ailleurs pas allégué devant le Tribunal que tel était le cas.

Au contraire, l'appelante pouvait et devait comprendre de la mise en demeure qui lui a été adressé le 12 octobre 2017 et des courriers qui ont suivi que, dès novembre 2017, B______ entendait toucher l'entier du loyer, puisque les défauts visés par le jugement du 30 mai 2005 avaient été éliminés.

Le Tribunal a dès lors considéré à bon droit que le montant du loyer dû par l'appelante était de 600 fr. par mois dès le 1er novembre 2017.

5. 5.1 En vertu de l'art. 311 al. 1 CPC, il incombe à l'appelant de motiver son appel. Selon la jurisprudence, il doit démontrer le caractère erroné de la motivation de la décision attaquée et son argumentation doit être suffisamment explicite pour que l'instance d'appel puisse la comprendre, ce qui suppose une désignation précise des passages de la décision qu'il attaque et des pièces du dossier sur lesquelles repose sa critique. Même si l'instance d'appel applique le droit d'office (art. 57 CPC), le procès se présente différemment en seconde instance, vu la décision déjà rendue. L'appelant doit donc tenter de démontrer que sa thèse l'emporte sur celle de la décision attaquée. Il ne saurait se borner à simplement reprendre des allégués de fait ou des arguments de droit présentés en première instance, mais il doit s'efforcer d'établir que, sur les faits constatés ou sur les conclusions juridiques qui en ont été tirées, la décision attaquée est entachée d'erreurs. Il ne peut le faire qu'en reprenant la démarche du premier juge et en mettant le doigt sur les failles de son raisonnement. A défaut, l'appel est irrecevable (arrêt du Tribunal fédéral 4A_621/2021 du 30 août 2022 consid. 3.1).

5.2 En l'espèce, le Tribunal a considéré que l'appelante n'était pas en droit d'opposer en compensation à B______ une créance en lien avec de nouveaux défauts et avec l'aggravation des anciens. La compensation d'une telle créance n'était pas admise du fait que la loi offrait au locataire la possibilité de consigner le loyer. Si l'appelante souhaitait faire valoir une créance en compensation elle aurait dû consigner le loyer, ce qu'elle n'avait pas fait. Le Tribunal a de plus examiné les allégations de l'appelante en lien avec chacun des défauts pout en conclure que celle-ci n'avait pas établi l'existence de défaut lui donnant droit à une baisse de loyer.

L'appelante ne critique pas de manière motivée le raisonnement circonstancié du Tribunal, contrairement aux exigences posées par l'art. 311 al. 1 CPC. Elle se borne à faire valoir, sans se référer à des éléments de preuve concrets qu'elle a « démontré l'existence de défauts » et « leurs conséquences sanitaires » et à reprendre l'argumentation exposée en première instance, ce qui n'est pas suffisant. A cela s'ajoute qu'elle n'expose pas dans son acte d'appel quel serait le montant de la réduction de loyer à laquelle chacun de ces prétendus défauts lui donneraient droit, ni pour quelle période.

Ses griefs à cet égard sont dès lors irrecevables.

6. 6.1 Selon l'article 271a al. 1 let. a CO, parmi d'autres cas spécialement énumérés par cette disposition, le congé est annulable lorsqu'il est donné par le bailleur parce que le locataire fait valoir de bonne foi des prétentions fondées sur le bail. Cette disposition vise à permettre au locataire d'exercer librement ses droits - par exemple, réclamer la suppression de défauts de la chose louée - sans avoir à craindre un congé en représailles.

Il incombe au locataire de prouver qu'il existe un rapport de cause à effet entre la prétention qu'il a élevée et la résiliation. Le bailleur a le droit d'apporter la contre-preuve en démontrant que le congé répond à un autre motif. Le juge constate alors le véritable motif du congé selon l'impression objective qui résulte de toutes les circonstances; le congé-représailles est d'autant plus vraisemblable qu'il survient plus rapidement après que le locataire a élevé une prétention (arrêt du TF 4A_210/2014 du 17 juillet 2014).

6.2 En l'espèce, le Tribunal a considéré que l'appelante n'avait pas démontré que le congé avait été donné en représailles à sa réclamation concernant de nouveaux défauts dès février 2017. Le congé était intervenu plus de deux ans après lesdites réclamation et des investigations avaient été entreprises à ce sujet par B______. Il n'était dès lors pas annulable en application de l'art. 271a al. 1 let. a CO.

L'appelante ne critique pas ce raisonnement détaillé de manière motivée, contrairement aux exigences posées par l'art. 311 al. 1 CPC. Elle se borne à faire valoir, sans se référer à des éléments de preuve concrets, que « la procédure liée à la résiliation du bail est en lien direct avec la demande des locataires ». Cette critique, insuffisamment motivée est dès lors irrecevable.

En tout état de cause, aucun élément du dossier ne permet de retenir que le congé aurait été donné pour un autre motif que celui communiqué par B______, à savoir le fait que l'appelante ne s'est pas acquittée du loyer convenu.

7. Il résulte de ce qui précède que le Tribunal a considéré à bon droit que les conditions d'une résiliation du bail pour défaut de paiement du loyer étaient réalisées. Le congé notifié le 26 avril 2019 pour le 31 mai 2019 est dès lors valable et le jugement querellé sera confirmé.

8. A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prélevé de frais dans les causes soumises à la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :


A la forme :

Déclare recevable l'appel interjeté le 8 juillet 2021 par A______ contre le jugement JTBL/502/2021 rendu le 1er juin 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/12120/2019.

Au fond :

Confirme le jugement querellé.

Dit que la procédure est gratuite.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Siégeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, présidente; Madame Pauline ERARD et Madame Fabienne GEISINGER-MARIETHOZ, juges; Monsieur
Jean-Philippe ANTHONIOZ et Monsieur Stéphane PENET, juges assesseurs;
Madame Maïté VALENTE, greffière.

 

La présidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffière :

Maïté VALENTE

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000 fr.