Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des baux et loyers

1 resultats
C/15181/2018

ACJC/1683/2021 du 20.12.2021 sur JTBL/108/2021 ( OBL ) , MODIFIE

Recours TF déposé le 01.02.2022, rendu le 12.07.2022, CONFIRME, 4A_50/2022, 4A_50/22
Normes : CPC.154; CPC.229.al3; CO.269b; CO.269d.al1; OBLF.19.al2
En fait
En droit
Par ces motifs

rŽpublique et

canton de genve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/15181/2018                                                                                  ACJC/1683/2021

ARRæT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des baux et loyers

DU LUNDI 20 DECEMBRE 2021

 

Entre

Madame A______, domiciliŽe ______ (GE), appelante et intimŽe sur appel joint d'un jugement rendu par le Tribunal des baux et loyers le 12 fŽvrier 2021, reprŽsentŽe par l'ASLOCA, rue du Lac 12, case postale 6150, 1211 Genve 6, en les bureaux de laquelle elle fait Žlection de domicile,

et

B______ AG, sise ______ (ZH), intimŽe et appelante sur appel joint, comparant par Me Serge PATEK, avocat, boulevard HelvŽtique 6, case postale, 1211 Genve 12, en l'Etude duquel elle fait Žlection de domicile.

 

 

 

 


EN FAIT

A.      Par jugement JTBL/108/2021 du 12 fŽvrier 2021, communiquŽ pour notification aux parties par le greffe le 22 fŽvrier 2021, le Tribunal des baux et loyers a dŽclarŽ irrecevables les pices produites par B______ AG ˆ l'appui de ses Žcritures du 5 novembre 2020, ainsi que les allŽguŽs de fait s'y rattachant (ch. 1 du dispositif), a fixŽ ˆ 13'344 fr., charges non comprises, ds le 1er octobre 2018, le loyer annuel de l'appartement de 4 pices n¡ 23 louŽ par A______ au 2me Žtage de l'immeuble sis 1______ˆ Genve (ch. 2), a dŽboutŽ les parties de toutes autres conclusions (ch. 3) et a dit que la procŽdure Žtait gratuite (ch. 4).

B.      a. Par acte expŽdiŽ le 25 mars 2021 ˆ la Cour de justice, A______ forme appel contre le chiffre 2 du dispositif de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation. Elle conclut, principalement, ˆ ce que la Cour dŽboute B______ AG de sa demande de hausse de loyer et constate que le loyer et les paramtres de fixation de ce dernier restent inchangŽs. Subsidiairement, elle conclut ˆ ce que la Cour dŽboute B______ AG de sa demande de hausse de loyer, constate que le loyer reste fixŽ ˆ 10'812 fr. par annŽe et constate l'existence d'une rŽserve de baisse de loyer fondŽe sur la baisse du taux hypothŽcaire de 16.58%. Plus subsidiairement, A______ conclut ˆ ce que la Cour dŽboute B______ AG de sa demande de hausse de loyer, constate que le loyer reste fixŽ ˆ 10'812 fr. par annŽe et constate l'existence d'une rŽserve de baisse de loyer fondŽe sur la baisse du taux hypothŽcaire de 4.31%. Elle se plaint aussi de ce que le Tribunal a, dans son ordonnance du 30 juin 2020, ŽcartŽ sans motivation ses allŽguŽs complŽmentaires du 28 fŽvrier 2020.

          b. Dans sa rŽponse datŽe du 12 mai 2021, dŽposŽe au greffe universel le 11 mai 2021, B______ AG conclut ˆ la confirmation du jugement entrepris. Elle forme Žgalement un appel joint contre le chiffre 2 du mme jugement dans lequel elle conclut ˆ l'annulation du jugement du 12 fŽvrier 2021 et ˆ la fixation du loyer annuel de l'appartement occupŽ par A______ ˆ 13'620 fr., charges non comprises, ds le 1er octobre 2018.

          c. La Cour a octroyŽ un dŽlai de 30 jours ˆ A______ pour rŽpondre ˆ l'appel joint.

d. En l'absence de ladite rŽponse, le greffe de la Cour a avisŽ les parties le 3 aožt 2021 de ce que la cause Žtait gardŽe ˆ juger.

C.      Les faits pertinents suivants rŽsultent de la procŽdure :

          a. B______ AG est propriŽtaire de l'immeuble sis 1______ˆ Genve, construit en 1920, comprenant 24 appartements.

b. B______ AG et A______ ont conclu, le 13 avril 1983, un contrat de bail ˆ loyer portant sur la location d'un appartement de 4 pices n¡ 23 au 2me Žtage de l'immeuble en question.

Le bail a ŽtŽ conclu pour une durŽe initiale de 15 mois, du 1er juillet 1983 au 30 septembre 1984, renouvelable ensuite tacitement d'annŽe en annŽe, sauf rŽsiliation signifiŽe trois mois avant l'ŽchŽance.

A______ Žtait locataire de l'appartement depuis 1967.

c. Par avis de majoration de loyer du 22 fŽvrier 2012, B______ AG a dŽclarŽ porter le loyer annuel de l'appartement de 10'812 fr. ˆ 12'012 fr., charges non comprises, ds le 1er octobre 2012 et a proposŽ une nouvelle ŽchŽance du bail au 30 septembre 2017. L'avis officiel est motivŽ comme suit :

Ç Adaptation aux loyers usuels du quartier selon art. 269a CO - Proposition d'un nouveau bail de 5 ans au loyer indexŽ (art. 269B CO) renouvelable de 5 ans en 5 ans indice janvier 2012 base 2010. En cas de prestations supplŽmentaires au sens des art. 269A lettre b) CO et 14 OBLF, le bailleur se rŽserve expressŽment le droit de majorer le loyer en cours de bail, en sus de l'adaptation de celui-ci ˆ l'Žvolution de l'ISPC. Il est pris note entre les parties que le locataire peut rŽsilier son bail ds la 2me annŽe, moyennant un prŽavis de rŽsiliation de 3 mois pour une ŽchŽance annuelle. En annexe : clause d'indexation. È

d. Suite ˆ la contestation de cette hausse par la locataire par-devant la Commission de conciliation en matire de baux et loyers, le loyer annuel a ŽtŽ fixŽ, par procs-verbal de conciliation du 23 mai 2012, ˆ 10'812 fr., ds le 1er octobre 2012, montant auquel s'ajoutaient les provisions pour chauffage et eau chaude de 1'380 fr. par annŽe. Le taux hypothŽcaire de rŽfŽrence pris en compte Žtait de 2,5%. Le bail, conclu pour cinq ans jusqu'au 30 septembre 2017, renouvelable de cinq ans en cinq ans, Žtait indexŽ ˆ l'Indice suisse des prix ˆ la consommation (ISPC), l'indice de rŽfŽrence Žtant celui de janvier 2012. Pour le surplus, les clauses du bail liant les parties restaient inchangŽes.

e. Le 25 fŽvrier 2015, l'Office des autorisations de construire a dŽlivrŽ ˆ la bailleresse une autorisation de construire portant sur la rŽnovation de l'immeuble de logement et des installations sanitaires de 24 appartements et la crŽation d'un exutoire de fumŽe, le loyer des 24 appartements (75 pices) ne devant pas excŽder aprs travaux 300'876 fr. l'an, pour une durŽe de cinq ans ˆ dater de la remise en location aprs la fin des travaux.

f. Les travaux de rŽnovation de l'immeuble concernŽ se sont dŽroulŽs du 24 aožt 2015 au 30 novembre 2016 et ont consistŽ plus particulirement en la rŽnovation des cuisines, des sanitaires et des colonnes sanitaires de l'immeuble.

Il a notamment ŽtŽ procŽdŽ aux travaux suivants :

- Contr™le gŽnŽral des installations de ventilation des logements;

- RŽnovation des conduites eau froide, eau chaude, eaux usŽes;

- Remplacement des stores ˆ lamelles;

- Remplacement de 24 vannes de radiateurs;

- Pose de carrelage en grs cŽrame dans les WC, salles de bains et cuisines;

- Pose de parquet en bois (mosa•que);

- Ponage et vitrification des parquets;

- Revtement de paroi en fa•ence dans la cuisine;

- Revtement de paroi en cŽramique dans les WC et salles de bains;

- Pose de plinthes Ramin teintŽ chne;

- Pose de peinture de type Žmail dans les salles de bains, cuisines et chambres;

- Installation d'armoires ˆ pharmacie;

- Installation de baignoires en acier;

- Installation de porte-serviettes;

- Installation de porte-savons;

- Installation de porte-verres;

- Remplacement des prises et interrupteurs existants dans les WC, salles de bains et cuisines et installation de prises pour lave-linges et sche-linges;

- Remplacement de l'agencement des cuisines existant, notamment mise en place d'un plan de travail en stratifiŽ et d'Žviers et Žgouttoirs en inox;

- RŽvision de l'interphone de chaque appartement;

- Mise en conformitŽ des installations Žlectriques;

- DŽsamiantage;

- Nettoyage des colonnes de l'immeuble.

S'agissant de l'appartement de la locataire, le sŽjour, la salle ˆ manger et la chambre ont ŽtŽ laissŽs en l'Žtat, que ce soit au niveau de la peinture ou du sol (parquet). Le remplacement des stores ˆ lamelles et des vannes de radiateurs n'a pas non plus ŽtŽ effectuŽ. Dans la cuisine, le carrelage prŽcŽdemment posŽ par la locataire a ŽtŽ remplacŽ par un nouveau carrelage.

g. Le dŽcompte final Žtabli par la bailleresse le 25 octobre 2017 laisse appara”tre un cožt total du chantier de 2'498'247 fr. 70.

h. Par avis de majoration du 1er juin 2018, la bailleresse a dŽclarŽ porter le loyer annuel de l'appartement ˆ 13'620 fr., charges de 1'680 fr. non comprises, ds le 1er octobre 2018. L'avis officiel est motivŽ comme suit : Ç DCTI selon art. 269A CO let. B prestations supplŽmentaires du bailleur È.

i. La hausse de loyer a ŽtŽ contestŽe le 28 juin 2018 par la locataire devant la Commission de conciliation en matire de baux et loyers. SimultanŽment, elle a sollicitŽ une baisse de loyer, le ramenant ˆ 8'124 fr. par an ds le 1er octobre 2018 en raison de la baisse du taux hypothŽcaire.

j. Non conciliŽe le 9 janvier 2019, la demande de hausse a ŽtŽ portŽe devant le Tribunal le 7 fŽvrier 2019, la bailleresse concluant ˆ la fixation du loyer annuel de l'appartement concernŽ ˆ 13'620 fr., charges non comprises, ds le 1er octobre 2018.

A l'appui de ses conclusions, la bailleresse a notamment exposŽ avoir entrepris dans le courant des annŽes 2000 des travaux d'entretien consistant en la rŽfection des faades, l'application d'un nouveau crŽpi, le changement des stores et des portes-fentres, la pose d'une isolation pŽriphŽrique, le remplacement de l'installation de production de chaleur ˆ mazout, la pose de compteurs de chaleur et de vannes thermostatiques dans les logements, ainsi que des travaux de modernisation de l'ascenseur. Elle a par ailleurs produit, entre autres, l'Žtat locatif de l'immeuble au 31 juillet 2015, lequel s'Žlevait ˆ 349'920 fr.

k. Non conciliŽe le 9 janvier 2019, la demande de baisse a ŽtŽ portŽe devant le Tribunal le 8 fŽvrier 2019 par la locataire, laquelle a conclu ˆ ce que le loyer annuel de l'appartement soit fixŽ ˆ 8'124 fr., ds le 1er octobre 2018.

l. Dans sa rŽponse du 6 juin 2019 ˆ la demande de baisse, B______ AG a conclu, prŽalablement, ˆ tre autorisŽe ˆ complŽter ses Žcritures et ˆ verser des pices complŽmentaires concernant les loyers usuels pratiquŽs dans le quartier et, principalement, au dŽboutement de la locataire de toutes ses conclusions.

A l'appui de ses conclusions, elle a opposŽ ˆ la demande de baisse de loyer formŽe par la locataire l'augmentation de l'ISPC, d'une part, et les loyers usuels du quartier, d'autre part.

m. Dans sa rŽponse du 10 juin 2019 ˆ la demande de hausse, rectifiŽe sur deux points par Žcriture du 11 juillet 2019, la locataire a conclu, prŽalablement, ˆ ce qu'il soit ordonnŽ ˆ B______ AG de produire le premier contrat de bail, datant de 1966, et les dŽcomptes de charges courants d'entretien des annŽes 2012 ˆ 2017, et, principalement, au dŽboutement de B______ AG de toutes ses conclusions et ˆ la fixation du loyer ˆ 8'124 fr. ds le 1er octobre 2018.

A l'appui de ses conclusions, elle a notamment allŽguŽ que les travaux de rŽnovation des colonnes d'eaux Žtaient indispensables au vu de la vŽtustŽ des installations et de leur dysfonctionnement rŽcurrent, le changement des carrelages catelles et Žquipements sanitaires ayant quant ˆ lui ŽtŽ rendu nŽcessaire par les travaux de dŽmolition effectuŽs pour accŽder aux colonnes d'eaux. Le nouvel agencement de cuisine posŽ ne prŽsentait pas de fonctionnalitŽ supplŽmentaire, aucun Žquipement ŽlectromŽnager n'ayant par ailleurs ŽtŽ installŽ. Il en allait de mme pour les nouveaux Žquipements sanitaires.

n. Lors de l'audience du 3 septembre 2019 du Tribunal, le conseil de B______ AG a notamment produit des exemples de loyer comparatif de cinq appartements, tous situŽs 2______et appartenant ˆ une propriŽtaire identique.

Le conseil de A______ a contestŽ que le critre des loyers comparatifs soit applicable et a sollicitŽ l'audition de la locataire en lien avec les travaux effectuŽs dans son appartement ainsi que l'Žtat de celui-ci et de l'immeuble.

Pour le surplus, les parties ont dŽclarŽ ne pas souhaiter complŽter leurs allŽgations et leur offre de preuves et ont persistŽ dans leurs conclusions respectives.

o. Lors de l'audience du 21 fŽvrier 2020, le Tribunal a procŽdŽ ˆ l'interrogatoire de A______.

A______ a exposŽ que depuis son arrivŽe, la salle de bain avait ŽtŽ rŽnovŽe en 1969 et des ŽlŽments de cuisine avaient ŽtŽ posŽs. Par la suite, les fentres avaient ŽtŽ changŽes et des stores ˆ lamelles avaient alors ŽtŽ installŽs. En 2016, le carrelage qu'elle avait posŽ avait ŽtŽ remplacŽ par un carrelage de moindre qualitŽ.

Le conseil de A______ a sollicitŽ la production des comptes d'entretien de l'immeuble des vingt annŽes prŽcŽdentes, ce ˆ quoi le conseil de B______ AG s'est opposŽ au motif que ce n'Žtait possible que pour les dix annŽes prŽcŽdentes.

p. Par pli du 28 fŽvrier 2020, A______ a prŽcisŽ les dŽclarations faites lors de son audition du 21 fŽvrier 2020. Les canalisations de l'immeuble avaient ŽtŽ refaites en 2016, ce qui avait impliquŽ une rŽnovation des cuisines, toilettes et salles de bains, y compris en matire de peinture et d'ŽlectricitŽ. Aucune rŽfection n'avait par contre ŽtŽ faite dans les autres pices (parquets, plafonds, plinthes, peintures, etc.).

q. Par ordonnance du 30 juin 2020, le Tribunal a ŽcartŽ le courrier de A______ du 28 fŽvrier 2020 et a cl™turŽ la phase d'administration des preuves.

r. Par Žcritures du 31 aožt 2020, B______ AG a persistŽ dans ses conclusions et a produit un chargŽ de pices complŽmentaire comprenant notamment une liste des travaux effectuŽs dans l'appartement concernŽ, Žtablie par ses soins.

s. Par Žcritures du 20 octobre 2020, A______ a persistŽ dans ses prŽcŽdentes conclusions.

t. B______ AG a rŽpliquŽ le 5 novembre 2020 et produit des pices complŽmentaires.

u. Par Žcritures du 12 novembre 2020, A______ a rŽpliquŽ.

v. Le Tribunal a gardŽ la cause ˆ juger.

EN DROIT

1.       Pour des raisons de clartŽ, la locataire, qui a formŽ appel, sera dŽsignŽe ci-aprs comme l'appelante, alors que la bailleresse sera dŽsignŽe comme l'intimŽe, quand bien mme elle a formŽ un appel joint.

1.1 L'appel est recevable contre les dŽcisions finales et les dŽcisions incidentes de premire instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier Žtat des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fŽdŽral, les contestations portant sur l'usage d'une chose louŽe sont de nature pŽcuniaire (arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_388/2016 du 15 mars 2017 consid. 1).

Lorsque l'action ne porte pas sur le paiement d'une somme d'argent dŽterminŽe, le Tribunal dŽtermine la valeur litigieuse si les parties n'arrivent pas ˆ s'entendre sur ce point ou si la valeur qu'elles avancent est manifestement erronŽe (art. 91 al. 2 CPC). La dŽtermination de la valeur litigieuse suit les mmes rgles que pour la procŽdure devant le Tribunal fŽdŽral (RŽtornaz in : ProcŽdure civile suisse, Les grands thmes pour les praticiens, Neuch‰tel, 2010, p. 363; SpŸhler, Basler Kommentar, Schweizeriche Zivilprozessordnung, 3me Ždition, 2017, n. 9 ad art. 308 CPC).

La valeur litigieuse est dŽterminŽe par les conclusions restŽes litigieuses devant l'autoritŽ prŽcŽdente (art. 91 al. 1 CPC); si la durŽe de prestations pŽriodiques est indŽterminŽe, le montant annuel est multipliŽ par vingt (art. 92 al. 2 CPC). La valeur litigieuse correspond ˆ la diffŽrence entre l'augmentation proposŽe et le montant acceptŽ par le locataire par mois, annualisŽe et capitalisŽe sur vingt ans (arrt du Tribunal fŽdŽral 4A_484/2011 du 2 novembre 2011 consid. 1).

En l'espce, le dernier loyer annuel du logement, charges non comprises, s'Žlve ˆ 10'812 fr. L'augmentation proposŽe porterait le loyer annuel du logement, ˆ 13'620 fr., soit une diffŽrence annuelle de 2'808 fr.

En prenant en compte ces montants, la valeur litigieuse est largement supŽrieure ˆ 10'000 fr. (2'808 fr. x 20 = 56'160 fr.).

La voie de l'appel est donc ouverte.

1.2 Selon l'art. 311 CPC, l'appel, Žcrit et motivŽ, est introduit auprs de l'instance d'appel dans les trente jours ˆ compter de la notification de la dŽcision, laquelle doit tre jointe au dossier d'appel.

L'appel a ŽtŽ interjetŽ dans le dŽlai et suivant la forme prescrits par la loi (art. 130, 131, 311 al. 1 CPC). Il est ainsi recevable. Il en va de mme de l'appel joint (art. 130, 131, 313 al. 1 CPC).

1.3 La Cour revoit la cause avec un plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC; Hohl, ProcŽdure civile, tome II, 2me Žd. 2010, n. 2314 et 2416; Retornaz, op. cit., p. 349 ss, n. 121).

1.4 Selon l'art. 243 al. 2 let. c CPC, la procŽdure simplifiŽe s'applique aux litiges portant sur des baux ˆ loyer d'habitations et de locaux commerciaux en ce qui concerne la consignation du loyer, la protection contre les loyers abusifs, la protection contre les congŽs ou la prolongation du bail. La maxime inquisitoire sociale rŽgit la procŽdure (art. 247 al. 2 let. a CPC).

2.       L'appelante fait tout d'abord grief au Tribunal d'avoir ŽcartŽ sans motif son courrier du 28 fŽvrier 2020 dans l'ordonnance du 30 juin 2020.

2.1 L'ordonnance querellŽe est une ordonnance d'instruction statuant sur l'opportunitŽ et les modalitŽs de l'administration des preuves (art. 154 CPC). Elle entre ainsi dans la catŽgorie des autres dŽcisions et ordonnances d'instruction de premire instance (art. 319 let. b CPC), par nature exclue du champ de l'appel (ACJC/1435/2015 du 23 novembre 2015 consid. 1). Si l'ordonnance ne cause pas de prŽjudice difficilement rŽparable ou n'est pas contestŽe dans l'immŽdiat, elle peut tre attaquŽe avec la dŽcision finale sur le fond (ACJC/652/2018 du 28 mai 2018 consid. 2.2; ACJC/1435/2015 du 23 novembre consid. 2.1 et les rŽfŽrences citŽes). Le grief formulŽ par l'appelante est par consŽquent recevable.

L'art. 229 al. 3 CPC prŽvoit que lorsqu'il doit Žtablir les faits d'office (art. 247 al. 2 CPC), le tribunal admet les faits et moyens de preuve nouveaux jusqu'aux dŽlibŽrations. Ni le texte lŽgal, ni les travaux prŽparatoires ne prŽcisent ce qu'il faut entendre exactement par "jusqu'aux dŽlibŽrations". Il faut comprendre par lˆ non le dŽbut effectif des dŽlibŽrations, qui peut dŽpendre de l'organisation interne du tribunal et n'est pas nŽcessairement portŽ ˆ la connaissance des parties, mais la cl™ture des dŽbats principaux (aprs lesquels ces dŽlibŽrations peuvent commencer), soit la fin des plaidoiries orales lorsqu'il y en a, ou l'ŽchŽance du dŽlai, le cas ŽchŽant prolongŽ, pour dŽposer des plaidoiries Žcrites. Les faits et l'ensemble des moyens de preuve ˆ disposition des parties doivent en effet tre portŽs ˆ la connaissance du juge avant la cl™ture des dŽbats principaux, puisque c'est en se basant sur son apprŽciation des faits et des preuves qu'il appliquera - dans le cadre des dŽlibŽrations - le droit aux faits constatŽs et rendra sa dŽcision (ATF 138 III 788 consid. 4.2).

Selon la doctrine, le lŽgislateur a visŽ tous les litiges soumis ˆ la maxime inquisitoire, que celle-ci soit renforcŽe ou attŽnuŽe. Il a estimŽ qu'il fallait en effet privilŽgier la "vŽritŽ matŽrielle", plut™t que de respecter la "rigueur de la procŽdure". Ainsi, les parties sont admises ˆ apporter au procs, jusqu'aux dŽlibŽrations, tous les faits utiles ˆ l'issue du litige, qu'il s'agisse de novas proprement dits, de novas improprement dits, voire de faits qu'elles ont omis, mme fautivement, d'invoquer auparavant (Chaix, L'apport des faits au procs, in ProcŽdure civile suisse, Les grands thmes pour les praticiens, Neuch‰tel, 2010, n. 39, 40 et 42, p. 130-131; ACJC/508/2014 du 28 avril 2014 consid. 1.2.1).

2.2 En l'espce, l'appelante a adressŽ un courrier au Tribunal le 28 fŽvrier 2020 dans le but de complŽter sa comparution personnelle qui avait eu lieu quelques jours auparavant. Le Tribunal, sans motivation, a ŽcartŽ ce courrier de la procŽdure par ordonnance du 30 juin 2020. Dans la mme ordonnance, un dŽlai au 31 aožt 2020 a ŽtŽ fixŽ aux parties pour le dŽp™t des plaidoiries finales. Ainsi, l'on ne voit pas pour quel motif le courrier du 28 fŽvrier 2020, adressŽ au Tribunal plusieurs mois avant la cl™ture de la phase d'administration des preuves et le dŽp™t des plaidoiries finales devrait tre ŽcartŽ.

Par consŽquent, les ŽlŽments contenus dans le courrier du 28 fŽvrier 2020 doivent tre admis ˆ la procŽdure. Il en a ŽtŽ tenu compte dans la mesure de leur pertinence dans la partie en fait du prŽsent arrt.

3.       Dans un second grief, l'appelante reproche au Tribunal d'avoir violŽ le droit en ne tenant pas compte des rgles applicables aux hausses de loyer dans le cadre de baux indexŽs.

3.1 Il convient ds lors d'examiner la validitŽ de l'avis de majoration de loyer du 1er juin 2018.

DestinŽes ˆ prŽserver la valeur de la chose louŽe, les clauses d'indexation sont des dispositions contractuelles prŽvoyant que le loyer net sera adaptŽ aux variations d'un indice officiel. Elles ont pour but de garantir au bailleur que le loyer suivra l'Žvolution du cožt de la vie. Pour le locataire, les baux indexŽs, d'un minimum de cinq ans, offrent la sŽcuritŽ d'une longue durŽe (ACJC/1547/2015 du 14 dŽcembre 2015 consid. 4.1; Dietschy, Droit du bail ˆ loyer, Commentaire pratique, B‰le, 2010, No 3 ad art. 269b CO; Lachat/Grobet Thorens/Rubli/Stastny, Le bail ˆ loyer, Lausanne 2019, p. 643).

A une exception prs, l'indexation est un mode exclusif de fixation du loyer (Dietschy, op. cit., Nos 3 et 27 ad art. 269b CO). Les parties prŽsument que l'adaptation du loyer ˆ l'augmentation de l'indice suffira ˆ couvrir l'Žvolution des charges et des autres facteurs de fixation du loyer. Par consŽquent, les parties renoncent ˆ se prŽvaloir de ces facteurs pendant toute la durŽe du bail. Ce n'est qu'ˆ l'ŽchŽance du bail indexŽ que les parties pourront ˆ nouveau invoquer, ˆ la hausse ou ˆ la baisse, les critres lŽgaux de fixation du loyer (ACJC/1547/2015 du 14 dŽcembre 2015 consid. 4.1; Lachat/Grobet Thorens/Rubli/Stastny, op. cit., p. 644).

Toute majoration de loyer notifiŽe en vertu d'une clause d'indexation doit tre communiquŽe sur la formule officielle prŽvue par l'art. 269d al. 1 CO (art. 19 al. 2 OBLF). Le bailleur doit respecter le dŽlai minimum de 30 jours pour la fin d'un mois (art. 17 al. 3 OBLF). Le bailleur ne peut pas anticiper l'Žvolution de l'indice. Il doit attendre sa publication officielle (art. 19 al. 2 OBLF) (Dietschy, op. cit., No 23 ad art. 269b CO; Lachat/Grobet Thorens/Rubli/Stastny, op. cit., p. 652).

Il est licite de prŽvoir dans le contrat que la hausse pourra exceptionnellement tre supŽrieure ˆ l'Žvolution de l'indice suisse des prix ˆ la consommation, lorsque le bailleur fournit une prestation supplŽmentaire. Il faut toutefois que le contrat prŽvoie expressŽment cette hypothse (ATF 124 III 57, consid. 3a; SJ 1994, p. 487; Dietschy, op. cit., No 28 ad art. 269b CO; Lachat/Grobet Thorens/Rubli/Stastny, op. cit., p. 649).

Le cumul de l'indice suisse des prix ˆ la consommation et de la prestation supplŽmentaire du bailleur prŽsuppose que le locataire puisse contester, en dehors des limites strictes de l'art. 270c CO, l'incidence de la prestation supplŽmentaire sur le loyer et qu'il puisse rŽsilier le bail avant terme (ACJC/1547/2015 du 14 dŽcembre 2015 consid. 4.1; Lachat/Grobet Thorens/Rubli/Stastny, op. cit., p. 649).

Lorsque, en sus de l'indexation, le bailleur se prŽvaut de prestations supplŽmentaires (art. 269a let. b CO), le bailleur doit motiver et chiffrer sa prŽtention (art. 20 OBLF; Dietschy, op. cit., No 31 ad art. 269b CO). Le locataire peut contester le principe mme de la majoration liŽe ˆ cette plus-value, si le contrat ne comporte aucune clause l'autorisant. Il peut aussi contester la quotitŽ de la hausse liŽe ˆ la plus-value. On doit Žgalement reconna”tre au locataire le droit de se dŽpartir de manire anticipŽe du bail s'il n'entend pas accepter ou contester la hausse (ACJC/1547/2015 du 14 dŽcembre 2015 consid. 4.1; Lachat/Grobet Thorens/Rubli/Stastny, op. cit., p. 649).

3.2 En l'espce, le 1er juin 2018, l'intimŽe a dŽclarŽ porter le loyer annuel de l'appartement ˆ 13'620 fr., charges de 1'680 fr. non comprises, ds le 1er octobre 2018. L'avis officiel Žtait motivŽ comme suit : Ç DCTI selon art. 269A CO let. B prestations supplŽmentaires du bailleur È.

L'avis de majoration du loyer est fondŽ uniquement sur des prestations supplŽmentaires du bailleur et non sur la hausse de l'indice suisse des prix ˆ la consommation.

Le bail reconduit par-devant la Commission de conciliation le 23 mai 2012 Žtait un bail indexŽ courant pour une durŽe de cinq ans, renouvelable de cinq ans en cinq ans. Il a couru du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2017, puis, faute de rŽsiliation par les parties, a ŽtŽ renouvelŽ pour une nouvelle pŽriode de cinq ans, jusqu'au 30 septembre 2022.

Ni les clauses du bail du 13 avril 1983, ni celles contenues dans l'accord de reconduction du bail conclu par-devant la Commission de conciliation le 23 mai 2012 ne rŽservent la facultŽ, pour l'intimŽe, de notifier une hausse de loyer fondŽe sur les prestations supplŽmentaires. Les parties sont ainsi convenues que l'unique motif d'augmentation ou de diminution du loyer pendant la durŽe du bail serait l'Žvolution, ˆ la hausse ou ˆ la baisse, de l'indice suisse des prix ˆ la consommation.

Ainsi, faute de reposer sur une disposition contractuelle et de respecter les conditions fixŽes par le droit, la hausse de loyer du 1er juin 2018 n'est pas valable.

Le chiffre 2 du dispositif du jugement sera rŽformŽ en ce sens. Compte tenu de l'analyse qui prŽcde, il ne se justifie pas d'examiner les autres griefs de l'appelante, subsidiaires et liŽes ˆ d'autres mŽthodes d'augmentation du loyer inadmissibles en l'espce. Il en ira de mme des prŽcisions de faits et arguments prŽsentŽs par l'intimŽe et relatifs ˆ la nature des travaux entrepris et au taux hypothŽcaire de rŽfŽrence, l'ensemble de ces ŽlŽments Žtant dŽsormais dŽpourvus d'objet.

          L'intimŽe sera pour sa part et pour les motifs qui prŽcdent, dŽboutŽe de ses conclusions sur appel joint.

4.       A teneur de l'art. 22 al. 1 LaCC, il n'est pas prŽlevŽ de frais dans les causes soumises ˆ la juridiction des baux et loyers (ATF 139 III 182 consid. 2.6).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des baux et loyers :

A la forme :

DŽclare recevables l'appel interjetŽ le 25 mars 2021 par A______ contre le chiffre 2 du dispositif du jugement JTBL/108/2021 rendu le 12 fŽvrier 2021 par le Tribunal des baux et loyers dans la cause C/15181/2018, ainsi que l'appel joint interjetŽ le 11 mai 2021 par B______ AG contre le mme chiffre dudit jugement.

Au fond :

Annule le chiffre 2 de ce jugement.

Et, statuant ˆ nouveau :

Dit que l'avis de majoration de loyer du 1er juin 2018 n'est pas valable.

Dit que le loyer annuel de l'appartement de 4 pices au 2me Žtage de l'immeuble sis 1_____ [ˆ] Genve est de 10'812 fr., charges non comprises.

Confirme le jugement attaquŽ pour le surplus.

Dit que la procŽdure est gratuite.

DŽboute les parties de toutes autres conclusions.

SiŽgeant :

Madame Nathalie LANDRY-BARTHE, prŽsidente; Madame Sylvie DROIN, Monsieur Laurent RIEBEN, juges; Monsieur Nicolas DAUDIN, Madame ZoŽ SEILER, juges assesseurs; Madame Ma•tŽ VALENTE, greffire.

 

La prŽsidente :

Nathalie LANDRY-BARTHE

 

La greffire :

Ma•tŽ VALENTE

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

ConformŽment aux art. 72 ss de la loi fŽdŽrale sur le Tribunal fŽdŽral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le prŽsent arrt peut tre portŽ dans les trente jours qui suivent sa notification avec expŽdition complte (art. 100 al. 1 LTF) par devant le Tribunal fŽdŽral par la voie du recours en matire civile.

Le recours doit tre adressŽ au Tribunal fŽdŽral, 1000 Lausanne 14.

Valeur litigieuse des conclusions pŽcuniaires au sens de la LTF supŽrieure ou Žgale ˆ 15'000 fr.