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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3430/2024

ATAS/33/2025 du 21.01.2025 ( LAMAL ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3430/2024 ATAS/33/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 janvier 2025

Chambre 10

 

En la cause

A______ et B______

représentées par Jean GAUTIER

 

 

recourantes

 

contre

CSS ASSURANCE SA

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Les mineures A______ et B______ (ci-après : les enfants) sont nées d’une mère porteuse à Edmonton, Canada, le ______ 2022.

b. Selon leurs extraits d’acte de naissance délivrés le 3 octobre 2023 par le Ministère des affaires étrangères de la République française, elles sont les filles de Monsieur C______ (ci-après : l’intéressé), né le ______ 1986, et de Monsieur D______, né le ______ 1988, lesquels se sont mariés le ______ 2021 à Anthy-sur-Léman, France, et sont domiciliés à Genève.

c. Il ressort de la base de données Calvin de l'office cantonal de la population et des migrations que D______ est lié par un partenariat enregistré à C______, lequel est inscrit, pour sa part, comme « célibataire ». D______ est désigné comme étant le père des enfants.

B. a. Le 26 mars 2022, CSS ASSURANCE SA (ci-après : l’assurance) a établi une police d’assurance n° 1______ pour A______ et n° 2______ pour B______, valables dès le 19 mars 2022, concernant l’assurance obligatoire des soins, ainsi que des assurances complémentaires.

b. Le 16 août 2023, l’intéressé a transmis à l’assurance, pour remboursement, des factures reçues de l’hôpital canadien où les filles sont nées (ci-après : l’hôpital).

c. Se sont ensuivis des échanges de correspondances entre l’intéressé, d’une part, et l’assurance, respectivement Allianz Assistance et le service « Medical Assistance » d’Allianz, d’autre part.

d. Par décisions du 17 mai 2024, l’assurance a refusé la prise en charge des coûts au titre de l’assurance obligatoire des soins. Elle a considéré que la maternité de substitution, qui incluait l’accouchement et la prise en charge des nouveau-nés à l’étranger, était un traitement planifié à l’étranger qui n’autorisait pas la prise en charge des coûts au titre de l’assurance obligatoire. Les coûts des prestations à l’étranger pour cause de maladie découlant d’accouchements prématurés pour les enfants assurés auprès d’elle faisaient partie de « l’accouchement par maternité de substitution à l’étranger » et devaient être considérés comme un traitement planifié. La maternité de substitution était interdite en Suisse et un acte à l’étranger interdit en Suisse ne pouvait donner lieu à aucune obligation d’allouer des prestations selon la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10). Enfin, elle a relevé ne pas avoir été informée, dans le cadre de leurs échanges antérieurs à l’établissement des polices d’assurance, qu’il s’agissait d’une maternité de substitution.

e. Le 30 mai 2024, l’intéressé a formé opposition à l’encontre de ces décisions. Il a souligné que les faits relatés dans la décision étaient incomplets, voire erronés, et rappelé que ses filles étaient assurées auprès de l’assurance depuis le
19 mars 2022 et que le remboursement des frais médicaux sollicités était explicitement pris en charge par leurs polices d’assurance. Rendre une décision fondée uniquement sur le type de conception était discriminatoire et contraire à l’intérêt supérieur de l’enfant. En outre, la maternité de substitution était dans leur cas réglementée par un contrat canadien et ne violait par les lois suisses. Il a sollicité que soit rendue une nouvelle décision dans un délai raisonnable, en prenant en compte la nature imprévisible et urgente de la situation médicale survenue le 19 mars 2022 et l’adhésion à l’assurance avec la garantie que des soins médicaux urgents seraient couverts, indépendamment du lieu de l’accouchement.

f. Le 19 juillet 2024, l’assurance a rendu une décision de jonction de cause des deux litiges relatifs à la prise en charge des frais de traitement des enfants.

C. a. Par actes du 16 octobre 2024, l’intéressé, au nom de chacune de ses enfants, a interjeté deux recours pour déni de justice auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de Justice, enregistrés sous les numéros de cause A/3430/2024 et A/3431/2024. Il a conclu, sous suite de frais et dépens, à ce qu’il soit ordonné à l’intimée de rendre une décision sur opposition motivée sur sa demande de remboursement dans un délai de 30 jours. En substance, il a fait valoir qu’il sollicitait depuis plusieurs mois le remboursement de frais médicaux urgents survenus au Canada, lesquels étaient couverts par les polices d’assurance de ses filles. Depuis presqu’une année, l’intimée indiquait que des investigations supplémentaires étaient nécessaires, mais ses réponses demeuraient identiques à chaque missive, ce qui traduisait une approche dilatoire. Elle avait également tardé à communiquer les bases légales sur lesquelles elle se fondait et à rendre une décision formelle sujette à contestation. Chaque jour de retard dans le traitement de son opposition aggravait sa situation financière, étant rappelé les importants coûts dont il était question. Enfin, en rendant une décision de jonction des causes alors que les dossiers étaient communs jusqu’alors, l’intimée semblait chercher à gagner du temps.

À l’appui du recours, l’intéressé a notamment produit les missives échangées avec l’intimée entre les 31 octobre 2023 et 2 mai 2024.

b. Dans sa réponse du 14 novembre 2024, l’intimée a conclu au rejet des recours, sous suite de frais et dépens à la charge des recourantes. Elle a exposé avoir demandé l’avis de l’office fédéral de la santé publique (ci-après : OFSP) quant à la prise en charge des frais médicaux litigieux, par courriel du 30 juillet 2024. La question de la prise en charge des frais médicaux des enfants suite à la naissance par mère porteuse à l’étranger n’avait encore jamais été tranchée par le Tribunal fédéral et le recours à une mère porteuse était interdit en Suisse, ce qui la contraignait à une analyse juridique approfondie. Le 11 novembre 2024, elle avait demandé à l’intéressé de lui faire parvenir un acte officiel constatant la filiation entre le père biologique et les enfants. Ce document était décisif, car il permettrait de savoir à partir de quelle date l’un des pères avait obtenu l’autorité parentale, laquelle permettait d’affiler les enfants à la LAMal. Elle pourrait ensuite analyser la question de savoir si les prestations étaient couvertes ou non. Elle avait donc instruit le dossier avec la diligence requise dans un délai raisonnable.

L’intimée a transmis ses échanges avec l’OFSP, dont la réponse du 19 août 2024 de cet office, en allemand.

c. Dans sa réplique du 4 décembre 2024, l’intéressé a persisté. Il a contesté que la situation présentait une complexité exceptionnelle, étant rappelé que les frais réclamés concernaient uniquement ses filles en tant qu’assurées, et non la mère porteuse. Qu’un enfant soit né d’une mère porteuse ou non n’affectait en rien l’obligation légale de l’assurance maladie de couvrir les frais médicaux dès le moment de son affiliation. Dans un cas similaire impliquant un couple hétérosexuel et des faits identiques, l’intimée aurait probablement pris en charge ces frais sans invoquer de telles justifications. La situation juridique et factuelle entourant la filiation aurait pu être connue de l’assurance dès le mois de mars 2022 déjà. Que l’intimée alléguait désormais qu’un document établissant le lien de filiation était nécessaire pour statuer sur l’affiliation des enfants démontrait sa négligence d’agir avec la célérité requise, puisque cette question aurait pu être tranchée en 2022. Attendre 2024 pour soulever cette problématique révélait un manque de diligence manifeste. De même, une demande d’éclaircissement aurait pu être adressée à l’OFSP dès la naissance. Partant, les retards observés ne résultaient pas de la complexité du cas ou d’une instruction approfondie, mais bien d’un manquement initial de l’intimée qui n’avait pas posé les bonnes questions ni demandé les pièces nécessaires au moment opportun.

Il a produit les actes de naissance des enfants, ainsi qu’un courrier adressé à l’intimée le 4 décembre 2024 afin de lui transmettre lesdits documents.

d. Le 10 décembre 2024, l’intéressé a adressé à la chambre de céans copie d’un courrier reçu de l’intimée le 6 décembre 2024 lui demandant des informations complémentaires, notamment concernant les nationalités et domiciles de tous les membres de la famille, et si les documents transmis étaient reconnus en Suisse, si des démarches avaient été effectuées en ce sens, et à partir de quelle date la paternité avait été reconnue. Elle sollicitait en outre la transmission du jugement et de l’ordonnance cités dans les extraits de naissance.

Il a également produit sa réponse à l’intimée du 10 décembre 2024, relevant le caractère inadéquat des demandes précitées, qui relevaient davantage de considérations liées à l’état civil que de compétences en matière
d’assurance-maladie. Cela étant, dans un élan constructif et pour dissiper toute ambigüité, copie était remise de l’acte de mariage.

Il a encore précisé à la chambre de céans que les enfants étaient de nationalité franco-canadienne, que son époux et lui étaient de nationalité française et que toute la famille vivait à Genève où il travaillait. Enfin, il ressortait de la demande d’information de l’intimée du 11 novembre 2024 que les dernières investigations de cette dernière remontaient au 29 août 2024.

e. Par duplique du 17 décembre 2024, l’intimée a persisté dans ses conclusions, soutenant que les circonstances de la naissance des enfants avaient toute leur pertinence sur la prise en charge des prestations. Ces naissances avaient été planifiées au Canada, qu’il s’agisse d’une naissance prématurée ou pas. L’orientation sexuelle des parents d’intention n’avait rien à voir avec le litige. Lorsque l’intéressé avait souhaité faire les démarches afin d’affilier les enfants dès leur naissance, il n’avait jamais indiqué qu’il s’agirait de naissance par mère porteuse au Canada. Elle devait déterminer si les enfants avaient le droit d’être affiliées à l’assurance-maladie obligatoire, à quelle date et quel droit s’appliquait au vu du contexte international. Les questions posées et les pièces sollicitées répondaient à son devoir d’instruction.

f. Copie de cette écriture a été transmise aux recourantes le 18 décembre 2024 et la cause gardée à juger.

 

EN DROIT

 

1.              

1.1 Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ; RS E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-maladie, du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

1.2 En vertu de la LPGA, un recours peut être formé lorsque l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition
(art. 56 al. 2 LPGA).

Selon l’art. 4 al. 4 de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision.

Conformément à l’art. 62 al. 6 LPA, une partie peut recourir en tout temps pour déni de justice ou retard non justifié si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4.

1.3 En l’espèce, le recours pour déni de justice, interjeté par-devant l’autorité compétente (art. 58 al. 1 LPGA), est recevable.

1.4 Les recours A/3430/2024 et A/3431/2022 seront joints sous la cause A/3430/2024, en application de l’article 70 LPA.

2.             Aux termes de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.

2.1 Le droit de recours de l'art. 56 al. 2 LPGA sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 Cst. Le retard injustifié à statuer, également prohibé par l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), qui n'offre à cet égard pas une protection plus étendue que la disposition constitutionnelle (ATF 103 V 190 consid. 2b), est une forme particulière du déni de justice formel (ATF 119 Ia 237 consid. 2).

L’art. 29 al. 1 Cst. consacre notamment le principe de la célérité ou, en d'autres termes, prohibe le retard injustifié à statuer. L'autorité viole cette garantie constitutionnelle lorsqu'elle ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prescrit par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 144 I 318 consid. 7.1 et les références ; 131 V 407 consid. 1.1 et les références). Entre autres critères sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes (ATF 143 IV 373 consid. 1.3.1 et les références) mais aussi la difficulté à élucider les questions de fait (expertises, par exemple ; arrêt du Tribunal fédéral C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2.2), mais non des circonstances sans rapport avec le litige, telle une surcharge de travail de l'autorité
(ATF 130 I 312 consid. 5.2 ; 125 V 188 consid. 2a). À cet égard, il appartient au justiciable d'entreprendre certaines démarches pour inviter l'autorité à faire diligence, notamment en incitant celle-ci à accélérer la procédure ou en recourant pour retard injustifié. Si on ne peut reprocher à l'autorité quelques « temps
morts », celle-ci ne saurait en revanche invoquer une organisation déficiente ou une surcharge structurelle pour justifier la lenteur de la procédure ; il appartient en effet à l'État d'organiser ses juridictions de manière à garantir aux citoyens une administration de la justice conforme aux règles (ATF 130 I 312 consid. 5.1 et 5.2 et les références). Dans le cadre d'une appréciation d'ensemble, il faut également tenir compte du fait qu'en matière d'assurances sociales le législateur accorde une importance particulière à une liquidation rapide des procès (ATF 126 V 244 consid. 4a). Peu importe le motif qui est à l’origine du refus de statuer ou du retard injustifié ; ce qui est déterminant, c’est le fait que l’autorité n’ait pas agi ou qu’elle ait agi avec retard (ATF 124 V 133 ; 117 Ia 117 consid. 3a et 117 Ia 197 consid. 1c ; arrêts du Tribunal fédéral I 819/02 du 23 avril 2003 consid. 2.1 et
C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2).

2.2 Il y a notamment un retard injustifié si l'autorité reste inactive pendant plusieurs mois, alors que la procédure aurait pu être menée à son terme dans un délai beaucoup plus court. Des périodes d'activités intenses peuvent cependant compenser le fait que le dossier a été laissé momentanément de côté en raison d'autres affaires et on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure ; lorsqu'aucun d'eux n'est d'une durée vraiment choquante, c'est l'appréciation d'ensemble qui prévaut. Un certain pouvoir d'appréciation quant aux priorités et aux mesures à prendre pour faire avancer l'instruction doit aussi être reconnu à l'autorité. Selon la jurisprudence, apparaissent comme des carences choquantes une activité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction ou encore un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis à l'autorité de recours (arrêt du Tribunal fédéral 8C_162/2022 du 9 août 2022 consid. 5.1 et les références).

2.2.1 À titre d’exemples, un déni de justice a été admis par la chambre de céans ou antérieurement par le tribunal cantonal des assurances sociales dans un cas où : la décision de l'OAI était intervenue cinq mois après son arrêt, lequel rétablissait simplement la rente que l'OAI avait supprimée, car aucune instruction complémentaire n'était nécessaire de la part de l'administration, hormis l'envoi d'un formulaire de compensation (ATAS/859/2006 du 2 octobre 2006) ; aucune décision formelle n’avait été rendue neuf mois après la demande en ce sens de l’assuré, faute de mesures d’instruction durant six mois (ATAS/711/2015 du
23 septembre 2015) ; aucune décision n’avait été rendue dans un délai de plus de quinze mois depuis la date du rapport d’expertise alors que la demande de précision faite au SMR au sujet de la divergence entre celui-ci et l’expert quant à la capacité de travail du recourant aurait pu être formée plus de six mois auparavant et que le SMR n’avait répondu qu’au bout de huit mois (ATAS/788/2018 du 10 septembre 2018) ; un recourant qui était sans nouvelle de l’OAI vingt et un mois après le dépôt d’une demande de révision (ATAS/860/2006 du 2 octobre 2006).

En revanche, elle a nié l’existence d’un déni de justice dans un cas où : la caisse cantonale de compensation n’avait pas rendu de décision un peu plus de quatre mois après l’opposition de l’assuré, soit dans un délai qui ne violait pas le principe de célérité, ce d’autant plus que le cas ne pouvait pas être qualifié de simple (ATAS/1035/2018 du 7 novembre 2018) ; la caisse-maladie n’avait pas rendu de décision neuf mois après l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral pour instruction complémentaire afin d’établir le tarif hospitalier du canton de Bâle, dès lors que l’instruction n’était pas terminée et qu’elle n’avait cessé d’interpeller l’Hôpital universitaire de Bâle à ce sujet (ATAS/1502/2012 du 19 décembre 2012) ; l’assurance-accidents n’avait pas versé de prestations à la suite d’une rechute annoncée quinze mois auparavant étant donné que les parties avaient échangé des courriers pendant treize mois dans le but d’aboutir à une solution transactionnelle (ATAS/264/2014 du 5 mars 2014).

2.2.2 De son côté, le Tribunal fédéral a nié l’existence d'un retard injustifié notamment dans les cas où : l’OAI n’avait pas rendu de nouvelle décision un peu moins de onze mois après un arrêt de renvoi pour nouveau calcul du montant de la rente ; il a admis que les prétentions en compensation du service social devaient faire l'objet d'une instruction complémentaire et que se posait également une problématique de chevauchement des indemnités journalières avec le droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral I 241/04 du 15 juin 2006) ; il s'était écoulé environ quinze mois entre le moment où l'assurée avait requis la prise en charge de son reclassement professionnel et la décision de la Caisse suisse de compensation ; pendant ce laps de temps, cette autorité avait procédé à une trentaine d'interventions, qui s'étaient échelonnées à un rythme soutenu d'une à plusieurs mesures par mois (envoi de questionnaires, production de pièces, consultation du dossier de l'assurance accident, soumission du cas au médecin-conseil, examen de divers problèmes: capacité résiduelle, comparaison des revenus, éventuel droit à une rente) ; la cause revêtait en outre une certaine complexité en raison de la nationalité et du domicile de l'assurée ainsi que de l'application d'une convention internationale de sécurité sociale ; le Tribunal fédéral avait rappelé que l'exigence de célérité ne pouvait l'emporter sur la nécessité d'une instruction complète et considéré que, tout au plus, on aurait pu reprocher à la Caisse de compensation d'avoir mené ses investigations de façon peu systématique ; il était ainsi étonnant qu'il ait fallu cinq mois pour constituer un dossier complet à l'intention du médecin-conseil ; une étude préalable et approfondie du cas aurait permis d'éviter les démarches ultérieures en complément d'informations et production de radiographies et, partant, de gagner un certain temps ; ces atermoiements n'avaient cependant, à ce stade, pas retardé de façon intolérable la procédure, ce d'autant plus qu'ils étaient en partie imputables à l'assurée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 consid. 4.2) ; il y avait eu un intervalle d'environ vingt mois entre le moment où l’OAI avait été en mesure de statuer, soit dans les semaines qui avaient suivi la réception de l'avis du SMR, jusqu'au dépôt du recours ; il a considéré que l’OAI avait activement mené son instruction, ainsi que cela ressortait des rapports médicaux régulièrement versés au dossier jusqu'au dépôt du recours pour déni de justice et que les investigations mises en œuvre n'apparaissaient pas superflues au point de constituer un déni de justice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 ) ; il s’était écoulé un délai de quelque vingt-six mois entre le dépôt du recours et le prononcé de l’arrêt ; le litige, qui avait pour objet le bien-fondé du refus des prestations complémentaires au motif que le recourant ne bénéficiait pas d’un statut de séjour légal en Suisse, était certes une affaire sans grandes particularités, ni difficultés excessives en matière de prestations complémentaires ; la solution du litige nécessitait cependant une appréciation des différentes pièces du dossier familial du recourant constitué par le service de la population en temps réel, d’où un possible allongement temporel de la procédure d’instruction (arrêt du Tribunal fédéral 9C_220/2022 du 11 août 2022 consid. 2.5 et 2.6).

En revanche, il a admis un déni de justice dans un cas où : il s'était écoulé un délai de vingt-quatre mois entre la fin de l'échange d'écritures devant la juridiction cantonale et le dépôt du recours pour déni de justice devant le Tribunal fédéral dans un litige qui avait uniquement pour objet le taux d'invalidité du recourant et où celui-ci avait circonscrit son argumentation à deux questions ne présentant pas de difficultés particulières (arrêt 8C_613/2009 du 22 février 2010) ; un tribunal cantonal avait laissé s'écouler vingt-cinq mois entre la fin de l'échange d'écritures et le dépôt du recours pour déni de justice devant le Tribunal fédéral, respectivement plus de trois ans depuis le dépôt du recours cantonal, dans une affaire sans difficultés excessives en matière d'assurance-accidents (arrêt du Tribunal fédéral 8C_176/2011 du 20 avril 2011).

3.             En l’espèce, les recourantes reprochent à l’intimée de tarder à rendre une décision sujette à opposition et de ne pas avoir sollicité plus tôt les informations qu’elle juge désormais nécessaires, relevant qu’elle aurait pu s’enquérir de la situation juridique et factuelle entourant la filiation des enfants dès le mois de mars 2022.

3.1 La chambre de céans constate tout d’abord qu’il s’est écoulé quatre mois et demi seulement entre, d’une part, le moment de l’opposition formée le
30 mai 2024 à la suite de la décision de l’intimée du 17 mai 2024 et, d’autre part, l’introduction du recours pour déni de justice le 16 octobre 2024.

Un tel laps de temps ne saurait constituer un délai déraisonnable et violer le principe de célérité, ce d’autant plus que l’intimée a mené des investigations durant cet intervalle, étant rappelé qu’elle a saisi l’OFSP le 30 juillet 2024 afin de lui demander un avis juridique sur la question litigieuse. En outre, après avoir obtenu cette prise de position le 19 août 2024, elle a demandé à l’intéressé, le
11 novembre 2024 de lui communiquer un acte officiel constatant la filiation entre le père biologique et les enfants afin de savoir à partir de quelle date l’un des pères avait obtenu l’autorité parentale, laquelle permettait d’affiler les enfants à la LAMal. Les extraits des actes de naissance français communiqués par l’intéressé ne précisant pas cette date, l’intimée a sollicité des informations complémentaires, notamment la production des documents cités dans lesdits extraits et s’est enquis de la reconnaissance en Suisse des documents étrangers, le 6 décembre 2024.

Contrairement à ce que soutiennent les recourantes, ces demandes de renseignements, fondées sur la détermination de l’OFSP, ne sauraient être considérées comme inadéquates ou dénuées de pertinence. En outre, si l’OFSP aurait effectivement pu être sollicité avant le prononcé de la décision, il ne saurait être reproché à l’intimée de ne pas l’avoir interpellé plus tôt. Cette démarche, effectuée dans le cadre de la procédure d’opposition, tendait à obtenir un avis juridique supplémentaire sur une question complexe, dès lors que les frais médicaux concernent des soins dispensés au Canada suite à la naissance des enfants dans le cadre d’une maternité de substitution, laquelle est interdite en Suisse. L’intimée n’a donc pas prolongé de façon intolérable la procédure ni procédé à une étude préalable du dossier lacunaire.

3.2 Les recourantes se plaignent en réalité surtout du temps pris par l’intimée pour rendre sa décision formelle.

Il ressort des pièces produites que, durant les neuf mois qui se sont écoulés entre la demande de remboursement du 16 août 2023 et le prononcé de la décision formelle du 17 mai 2024, l’intéressé a effectivement régulièrement demandé une prise de position formelle, priant expressément l’intimée de motiver son refus de prise en charge et de lui préciser les bases légales sur lesquelles elle se fondait
(cf. correspondances des 23 novembre et 7 décembre 2023, 13 février 2024). À réitérées reprises, celle-ci lui a répondu qu’elle procédait à l’examen de son dossier (cf. courriels des 24 novembre et 18 décembre 2023, 25 mars et
2 mai 2024). Cela étant, dans toutes ses correspondances, elle s’est contentée d’indiquer que la naissance par mère porteuse ne donnait pas droit à des prestations de l’assurance de base, faisant référence au contrat de gestation confidentiel (cf. message du 9 novembre 2023), puis également à l’interdiction de maternité de substitution en Suisse (cf. courriel du 1er décembre 2023 et courrier du 7 février 2024). Malgré l’étude du dossier alléguée, l’intimée n’a pas fait valoir de nouveaux éléments ni n’a argumenté juridiquement sa position, et ce jusqu’au prononcé de la décision du 17 mai 2024, dans laquelle elle a cité les art. 32 et
34 LAMal, et l’art. 36 al. 2 de l’ordonnance sur l'assurance-maladie du
27 juin 1995 (OAMal - RS 832.102).

Cela étant, il était loisible aux recourantes de saisir la chambre de céans d’un recours pour déni de justice si elles estimaient que l’intimée tardait à statuer de façon injustifié, ce qu’elles n’ont pas fait.

4.             Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

 

Statuant

À la forme :

1.        Déclare les recours en déni de justice recevables.

Préalablement :

2.      Joint les causes A/3430/2024 et A/3431/2024 sous la cause A/3430/2024.

Au fond :

3.      Rejette les recours.

4.      Dit que la procédure est gratuite.

5.      Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente

 

 

 

Joanna JODRY

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le