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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/474/2022

ATAS/624/2022 du 30.06.2022 ( CHOMAG ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/474/2022 ATAS/624/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 30 juin 2022

2ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié au PETIT-LANCY, représenté par Syndicat UNIA

 

recourant

 

contre

SYNA CAISSE DE CHÔMAGE, Administration Suisse Romande, sise Route du Petit-Moncor 1a, VILLARS-GLÂNE 1

 

 

intimée

 


EN FAIT

 

A. a. Le 2 septembre 2021, Monsieur A______ (ci-après: l'assuré, l'intéressé ou le recourant) a déposé une demande d'indemnités de chômage, avec effet dès le 26 août 2021, auprès de Syna Caisse de chômage (ci-après: la caisse ou l'intimée).

b. La caisse a instruit la question des motifs de la résiliation des rapports de travail par l'ancien employeur signifiée le 16 août 2021 pour le 24 août suivant, auprès de cet employeur comme auprès de l'intéressé, lequel s'est, en particulier par courriel du 5 octobre 2021, déterminé sur la question de savoir si le chômage était ou non imputable à une faute de sa part (compte tenu des reproches qui lui avaient été faits par l'employeur).

B. a. Par décision du 1er novembre 2021, la caisse a infligé à l'assuré une suspension de son droit à l'indemnité de chômage pour une durée de 22 jours à partir du 25 août 2021, au motif que le chômage découlait de sa faute.

b. Par écrit du 1er décembre 2021, l'intéressé, représenté par Unia Genève (ci-après: le syndicat), a formé opposition contre cette décision.

c. Par pli du 3 décembre 2021, la caisse a accusé réception de cette opposition et a informé l'assuré que, dès la fin de l'instruction de ladite opposition et dans les meilleurs délais, une décision sur opposition serait rendue et lui parviendrait sous pli recommandé.

d. Par décision sur opposition rendue le 23 décembre 2021, la caisse a rejeté l'opposition du 1er décembre 2021 et a confirmé la décision du 1er novembre 2021.

Selon le suivi des envois de La Poste, cette décision sur opposition a été envoyée en recommandé le 23 décembre 2021, le syndicat – mandataire de l'intéressé – a été avisé le 24 décembre 2021 dans la case postale pour retrait au guichet, et ledit envoi a été retourné à l'expéditeur le 3 janvier 2022 comme "non réclamé".

e. Par pli en courrier A du 5 janvier 2022, la caisse a communiqué au syndicat ladite décision sur opposition du 23 décembre 2021, avec la mention qu'elle lui avait été adressée par courrier recommandé le même jour mais avait été retournée non réclamée à l'expéditeur.

C. a. Par acte daté du 4 février 2022 et expédié le même jour au greffe de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après: la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), l'assuré, sous la plume du syndicat, a interjeté recours contre cette décision sur opposition, qui lui avait selon lui été notifiée le 6 janvier 2022, concluant à son annulation et, cela fait, principalement à l'annulation de la sanction, subsidiairement à la diminution de cette dernière.

b. Par écrit du 16 février 2022, corrigé le 18 février suivant, l'intimée a répondu à la question de la chambre des assurances sociales posée le 9 février 2022 et relative à la preuve de la date de réception de la décision sur opposition par le destinataire, avec en particulier la production du suivi des envois concernant la notification de cette décision.

c. Par réponse du 11 mars 2022, la caisse a conclu à l'irrecevabilité du recours pour tardiveté, subsidiairement à son rejet.

d. Par réplique du 19 mai 2022 – transmise le 24 mai suivant à l'intimée pour information –, le recourant a conclu notamment à la recevabilité de son recours.

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Est au préalable litigieuse la question de savoir si le recours interjeté contre la décision sur opposition querellée est ou non recevable sous l'angle du respect du délai de recours.

3.              

3.1 Aux termes de l'art. 60 al. 1 LPGA, le recours doit être déposé dans les trente jours suivant la notification de la décision sujette à recours.

L'art. 38 al. 1 LPGA, applicable par analogie en vertu de l'art. 60 al. 2 LPGA, dispose que si le délai, compté par jours ou par mois, doit être communiqué aux parties, il commence à courir le lendemain de la communication.

Conformément à l’art. 38 al. 2bis LPGA – et aussi à l’art. 62 al. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) –, la décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution.

Selon l'art. 38 al. 4 let. c LPGA, les délais en jours ou en mois fixés par la loi ou par l’autorité ne courent pas, notamment, du 18 décembre au 2 janvier inclusivement.

En vertu de l'art. 39 al. 1 LPGA, également applicable par analogie (art. 62 al. 2 LPGA), les écrits doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai à l'assureur ou, à son adresse, à La Poste suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (al. 1). Lorsqu’une partie s’adresse en temps utile à un assureur incompétent, le délai est réputé observé (al. 2).

3.2 La notification d’un acte soumis à réception, comme un jugement, une décision ou une communication de procédure, est réputée faite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 3ème éd., 2011, n. 2.2.8.3 p. 353 s). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 137 III 308 consid. 3.1.2 ; ATF 118 II 42 consid. 3b ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1).

Selon la jurisprudence, la preuve de la notification d’un acte et de la date de celle-ci incombe en principe à l’autorité qui entend en tirer une conséquence juridique. L’autorité qui veut contrer le risque d’un échec de la preuve de la notification peut communiquer ses décisions par pli recommandé. En tel cas, lorsque le destinataire de l’envoi n’est pas atteint et qu’un avis de retrait est déposé dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, l’envoi est considéré comme notifié au moment où il est retiré. Si le retrait n’a pas eu lieu dans le délai de garde – de sept jours –, il est réputé notifié le dernier jour de celui-ci, pour autant que le destinataire devait s’attendre à recevoir ledit pli (ATF 134 V 49 consid 4 ; ATF 130 III 396 consid. 1.2.3).

De jurisprudence constante, celui qui se sait partie à une procédure administrative ou judiciaire et qui doit dès lors s'attendre, selon une certaine vraisemblance, à recevoir des actes de l'autorité, est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins. Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 141 II 429 consid. 3.1 ; ATF 139 IV 228 consid. 1.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_174/2016 du 24 août 2016 consid. 2.1). Ce devoir procédural ne naît toutefois qu'avec l'ouverture d'un procès et vaut pendant toute la durée de la procédure, étant précisé que par ce terme « procès », il faut entendre une procédure administrative ou judiciaire déjà pendante qui conduit à ce que l’administré – ou l’assuré – doive compter avec la notification d’un ou des actes de l’autorité (ATF 138 III 225 consid. 3.1 ; ATF 130 III 396 consid. 1.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_174/2016 précité consid. 2.1 et 2.2).

Dans le cas de la pose dans la boîte aux lettres ou dans la case postale d’un avis de retrait d’un pli recommandé, comme d’un courrier "A+", une erreur dans la notification par voie postale ne saurait être d’emblée exclue. Pareille erreur ne peut toutefois pas non plus être présumée et ne peut être retenue que si des circonstances particulières la rendent plausible. L’allégation d’un justiciable selon laquelle il est victime d’une erreur de notification par voie postale et par conséquent sa bonne foi ne peuvent être prises en considération que si la présentation qu’il fait des circonstances entourant la notification en cause est concevable et repose sur une certaine vraisemblance (ATF 142 III 599 consid. 2.4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_382/2015 du 21 mai 2015 consid. 5.2 et 2C_570/2011 du 24 janvier 2012 consid. 4.3, et les références citées).

3.3 Lorsque l'autorité procède à une nouvelle notification, celle-ci est - sauf circonstances particulières, telles que la protection de la bonne foi - sans effet juridique (ATF 117 V 131 consid. 4a; ATF 111 V 99 consid. 2b; arrêts du Tribunal fédéral 2C_140/2022 du 11 février 2022 consid. 2.1 et 2C_806/2021 du 25 octobre 2021 consid. 2.1 et les références citées).

4.              

4.1 En l'espèce, dans sa réplique, concernant la question du respect du délai de recours, le recourant expose qu'en cas d'absence d'avis de retrait d'un courrier recommandé dans la boîte aux lettres ou la case postale, le recommandé n'est pas réputé reçu. En l'occurrence, toujours selon les explications de l'intéressé, son mandataire – le syndicat – a une case postale. Lorsque des recommandés sont adressés au syndicat, La Poste "dépose un document interne à la poste sur lequel il est indiqué que des recommandés doivent être récupérés. Toutefois, aucune indication sur la provenance ou le nombre de recommandés n'est fournie". Ainsi, le 3 janvier 2022, lorsque les recommandés ont été récupérés – par le syndicat –, il était impossible de savoir qu'un recommandé de l'intimée avait été reçu et retourné. Rien ne permettait dès lors au destinataire de prendre connaissance de la décision sur opposition et de savoir que cette dernière était entrée dans sa sphère de pouvoir. Le recours n'était donc pas tardif, mais recevable.

4.2 Cela étant, l'assuré ne conteste pas le contenu du suivi des envois émis par La Poste concernant la notification en recommandé de la décision sur opposition du 23 décembre 2021, ni, partant, le fait que le syndicat a été avisé de cet envoi le lendemain 24 décembre 2021 (vendredi) dans sa case postale. Ce mandataire n'est pas allé chercher l'enveloppe recommandée au guichet postal dans le délai de garde de sept jours après ce jour-là, soit jusqu'au vendredi 31 décembre 2021, de sorte que ledit envoi a été retourné à la caisse, le lundi 3 janvier 2022.

L'envoi recommandé contenant la décision sur opposition du 23 décembre 2021 est réputé avoir été notifié le dernier jour du délai de garde, soit le 31 décembre 2021.

À cet égard, conformément à la jurisprudence rappelée plus haut, l'intéressé, représenté par le syndicat, ayant formé une opposition, devait, à tout le moins dans la seconde partie du mois de décembre 2021, s'attendre à recevoir une décision sur opposition et il devait prendre toutes les dispositions nécessaires pour que celle-ci lui parvienne et qu'elle puisse faire l'objet d'un recours de sa part. Le fait que son mandataire a laissé tous les avis de retrait de recommandés dans sa case postale et ne les a cherchés que le lundi 3 janvier 2022, ne pouvant ainsi pas connaître les expéditeurs (vu que le délai de garde de sept jours était déjà terminé), ne lui est d'aucun secours et n'empêche en rien que la décision sur opposition querellée est réputée lui avoir été notifiée le 31 décembre 2021.

Le délai de recours de trente jours n'a pas couru jusqu'au 2 janvier 2022 conformément à l'art. 38 al. 4 LPGA, mais seulement à partir du 3 janvier 2022, et il est arrivé à échéance le mardi 1er février 2022.

Partant, le recours, posté le 4 février 2022, est en principe tardif.

4.3 Une deuxième notification à laquelle procède une autorité ou un assureur social étant sans effets juridiques (cf. la jurisprudence énoncée plus haut), le fait que la caisse a, le 5 janvier 2022, renvoyé une copie de sa décision sur opposition à l'assuré sous pli simple n'a pas fait courir un nouveau délai de recours (dans ce sens, notamment ATAS/252/2021 du 25 mars 2021 consid. 4).

Certes, c'est au lendemain de la réception de ce courrier A (prioritaire) le 6 janvier 2022, soit dès le 7 janvier suivant, que l'intéressé fait partir le délai de recours. Ceci n'est toutefois aucunement de nature à remettre en question le fait que la décision sur opposition lui a été notifiée dans le cadre du premier envoi, recommandé, lequel est seul valable pour le début du délai de recours. Ce délai a commencé à courir, comme retenu ci-dessus, le 3 janvier 2022. Au surplus, le recourant ne soutient – à juste titre – pas, sous l'angle du principe de la bonne foi, qu'il aurait été trompé concernant le début du délai de recours par le pli simple de l'intimée du 5 janvier 2022.

Au demeurant et par surabondance, en recevant le 6 janvier 2022 ce courrier A du 5 janvier 2022, l'assuré avait le temps, avant l'échéance du délai de recours le 1er février 2022, de s'informer auprès de la caisse au sujet de la date de la première notification de la décision sur opposition litigieuse, ledit courrier A mentionnant l'existence de l'envoi recommandé le 23 décembre 2021 et le retour de cet envoi comme non réclamé. Même à défaut de se renseigner sur ce point, il était parfaitement en mesure, par prudence, de compter les jours du délai de recours à partir du 3 janvier 2022, lendemain du dernier jour de la suspension des délais selon l'art. 38 al. 4 LPGA.

4.4 Pour le reste, le recourant n'invoque aucun motif de restitution du délai – légal – de recours au sens de de l'art. 41 LPGA (applicable par analogie par renvoi de l'art. 62 al. 2 LPGA), à teneur duquel, si le requérant ou son mandataire a été empêché, sans sa faute, d'agir dans le délai fixé, celui-ci est restitué pour autant que, dans les trente jours à compter de celui où l'empêchement a cessé, le requérant ou son mandataire ait déposé une demande motivée de restitution et ait accompli l'acte omis.

4.5 Vu ce qui précède, au regard de la tardiveté du recours et de l'absence de motif de restitution de délai, le recours de l'intéressé est – manifestement – irrecevable, ce qu'il y a lieu de constater dans le dispositif du présent arrêt.

5.             La procédure est gratuite (art. 89H al. 1 LPA et vu l'art. 61 let. fbis LPGA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

1.        Déclare le recours irrecevable.

2.        Dit que la procédure est gratuite.

3.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

 

Blaise PAGAN

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le