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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1249/2020

ATAS/853/2021 du 23.08.2021 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1249/2020 ATAS/853/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 23 août 2021

10ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à ONEX, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Thierry STICHER

 

 

recourant

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l'assuré, l'intéressé ou le recourant), né le ______ 1969, est arrivé à Genève, en provenance de Thaïlande, en qualité de réfugié le 13 juillet 1984. D'origine cambodgienne, naturalisé suisse le 9 septembre 2002, il s'est remarié le ______ 2019 (3ème mariage); il est père de deux filles issues de son premier mariage, nées respectivement en 1993 et en 2003. Il avait obtenu un CFC de monteur-électronicien à Genève le 25 juin 1992.

2.        L'assuré a déposé une première demande de prestations auprès de l'office de l'assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l'OAI, l'office ou l'intimé) le 5 juillet 2006, pour intolérance respiratoire aux vapeurs de soudure, douleurs chroniques du dos et dépression nerveuse. Il était assisté par l'Hospice général (ci-après : l'hospice). Il avait été en incapacité totale de travail du 1er décembre 2004 au 30 juin 2006, et à 50 % dès le 1er juillet 2006. Précédemment, il avait été au chômage de février 2002 à février 2004. Il était suivi par le docteur B______, FMH en médecine interne, pour ses affections somatiques, et dès 2003 par la doctoresse C______, FMH en psychiatrie et psychothérapie, pour son atteinte psychique. Antérieurement, il avait déjà été suivi sur le plan psychiatrique, depuis 1996. Il demandait un reclassement professionnel et/ou un placement.

3.        Par décision du 7 octobre 2008, l'OAI avait rejeté la demande de reclassement, étant précisé que sur demande écrite et motivée, l'OAI pourrait étudier le droit éventuel à une aide au placement dans le but d'un soutien actif pour une recherche d'un emploi approprié. Cette décision était entrée en force, sans avoir fait l'objet de recours.

4.        Par décision du 4 février 2009, l'OAI lui avait accordé une rente simple entière de décembre 2005 à juin 2006, et une demi-rente de juillet à décembre 2006; la rente était supprimée dès le 1er janvier 2007, le degré d'invalidité étant fixé dès cette date à 30 %. Cette décision était notamment fondée sur une expertise pluridisciplinaire rhumato-psychiatrique complétée par un volet pneumologique, confiée au Bureau Romand d'expertise médicale (ci-après : BREM), effectuée par les doctoresses D______, FMH en médecine interne et rhumatologie, E______, psychiatre et psychothérapeute FMH, et le docteur F______, FMH en médecine interne et maladies respiratoires (rapport d'expertise du 28 mars 2008). À noter que cette expertise retenait que le patient se plaignait de maux de tête depuis environ dix ans; jusqu'en 2004-2005, il présentait des cauchemars relatifs au Cambodge, sans flashback, pensée intrusive ou idée récurrente. Il ne présentait pas d'attaques de panique, ni de symptômes compatibles avec un trouble obsessionnel compulsif, un état de stress post-traumatique (ci-après : ESPT ou PTSD), psychose ou trouble affectif bipolaire évoqué; pas de sentiment de culpabilité évoqué. Les diagnostics incapacitants retenus étaient un trouble dépressif récurrent, épisode actuel léger, sans syndrome somatique (F33.00), présent depuis 1996, et hyperréactivité bronchique avec asthme pollinique et des soudeurs en électronique (J.45.0) - asthme dans l'enfance, réactivé en 2002 dans un contexte professionnel; sans répercussion sur la capacité de travail (ci-après : CT) : dorsalgies fonctionnelles, troubles douloureux chronique associés à des tendinomyogéloses, chondropathie rotulienne et dyslipidémie avec hypertriglycéridémie et hypercholestérolémie.

Cette décision était entrée en force, n'ayant pas fait l'objet d'un recours.

5.        À la suite d'un signalement pour détection précoce du 6 février 2017, l'assuré a déposé une nouvelle demande de prestations AI (rente/mesures professionnelles), reçue par l'OAI le 13 septembre 2017. Il était suivi par le docteur G______, spécialiste FMH en médecine interne ayant succédé au Dr B______, et toujours par la Dresse C______, sur le plan psychiatrique.

Dans un rapport motivé du 30 mai 2017, la Dresse C______ (ci-après : la psychiatre traitante), soutenue dans ses conclusions par le Dr G______ (ci-après : le généraliste traitant), a rappelé qu'en son temps, l'OAI avait « accepté le principe d'une invalidité à 30 % pour ce patient ». Depuis dix ans, l'assuré avait entrepris plusieurs formations et fait de très nombreux stages. À aucun moment il ne lui avait été possible d'obtenir un emploi fixe, surtout en raison de dépression et anxiété. Ces troubles semblaient remonter à l'âge de 15 ans, période où sa famille (ses parents, instituteurs) avait été assassinée par les Khmers Rouges. Il avait pu fuir en Thaïlande, dans un camp de réfugiés (en octobre 1984); la psychiatre observait qu'en général, à cette période de l'année, son état s'aggravait. Après le camp, il avait pu venir en Suisse où il avait suivi une formation d'électricien avec CFC après plusieurs échecs dans d'autres domaines. Il semblait aujourd'hui que les séquelles des traumatismes vécus étaient plus importantes, profondes et dommageables qu'il n'y paraissait au premier abord. On se trouvait face à un ESPT invalidant; toutes les tentatives de réinsertion échouaient, essentiellement en raison de moments d'angoisse paroxystique et de dépression. Les reviviscences du massacre de ses proches devenaient envahissantes et ne lui permettaient plus de se concentrer. Il présentait des troubles du sommeil, et la fatigue importante qui en découlait ne permettait pas une activité professionnelle performante. Dans son histoire professionnelle, on retrouvait fréquemment des impossibilités de poursuivre une activité, en raison de troubles du sommeil (hospitalisé vers 1996-97 pour investigations) et de difficultés de concentration. C'était cette pathologie qui rendait aujourd'hui son activité professionnelle difficile. Il avait de la peine à se concentrer et présentait une sensibilité importante au stress. Sous réserve d'épisodes de tachycardie ayant peut-être une origine émotionnelle, il serait donc physiquement et intellectuellement capable d'activités; mais pas émotionnellement. Actuellement, au terme de ces années de tentatives de réinsertion, de recherches d'emploi sans suites, de formations diversifiées, il ne semblait plus apte à travailler.

6.        Dans un rapport du 20 octobre 2017, la psychiatre traitante situait le début de la longue maladie à 2001, considérait que la CT était nulle (0 %), tant dans l'activité habituelle que dans une activité adaptée, en raison de limitations psychiques. Elle retenait les diagnostics incapacitants de dépression, anxiété, modification de la personnalité après PTSD, troubles du sommeil. Anamnestiquement, son patient était réfugié du génocide cambodgien, sa famille ayant été exécutée, alors qu'il était enfant. Il souffrait d'une anxiété majeure, de dépression, et de reviviscences traumatiques. Le pronostic était mauvais. Le traitement actuel consistait en une thérapie de soutien une à deux fois par mois, et la prescription d'Effexor 75 mg/j. Les restrictions à l'exercice d'une activité professionnelle étaient d'ordre psychique : troubles de l'attention, de la concentration, de la mémoire; fatigabilité; anxiété anticipatrice. Une activité adaptée n'était pas possible, et les restrictions énumérées ne pouvaient être réduites par des mesures médicales. Elle remarquait enfin qu'actuellement, toutes ses tentatives infructueuses sur le plan professionnel l'avaient gravement déprimé.

7.        Le Dr G______ a établi un rapport le 13 novembre 2017 : outre les diagnostics psychiatriques incapacitants, du ressort de la psychiatre traitante, il retenait, sur le plan somatique, des troubles incapacitants de somatisations, hyperactivité bronchique, syndrome rhino-bronco-asthmatiforme occasionnel, réaction asthmatique aux vapeurs de soudure depuis 2002 et, sans effet sur la CT : troubles cardiaques fonctionnels - tachycardie et hypotension (docteur Q______) -, diabète NIR depuis 2011, hypercholestérolémie, troubles statiques lombaires, (Morphée ? Melesma ?) au niveau du dos, hypertrophie des glandes mammaires droites, début de cataracte de l'œil gauche dès 2013, presbytie, acouphènes chroniques. Il suivait le patient depuis le 1er octobre 2010. Le dernier contrôle remontait au 3 novembre 2017. Il énumérait une importante médication, et recommandait pour la future thérapie, la poursuite du suivi psychiatrique; du point de vue médical, l'activité exercée en tant qu'informaticien électronicien et mécanicien n'était plus exigible (0 %), les restrictions physiques étant la limitation en raison de l'asthme et de sa fragilité émotionnelle; elles se manifestaient au travail par un rendement actuellement nul et une quasi-impossibilité de trouver un emploi fixe (malgré plusieurs postes de travail temporaires depuis qu'il le connaissait). Anamnestiquement, le patient souffrait d'importantes limitations en raison de son état dépressif et un probable PTSD. Il avait travaillé comme électronicien et mécanicien durant quelques années lors de son suivi; il s'agissait toujours de travaux temporaires; le patient restait relativement discret lorsqu'il s'agissait de parler de son affect; sur ce plan, il était probablement mieux évalué par sa psychiatre. Il le consultait régulièrement pour des problèmes somatiques variés (céphalées, acouphènes, lombalgies, asthénie, difficultés de concentration, sentiment vertigineux); sentiment de dévalorisation et parfois de découragement car il ne trouvait pas de travail. L'état actuel du patient était relativement stable depuis qu'il le connaissait; mais il (le médecin) sous-estimait probablement la composante psychique. Subjectivement, le patient indiquait une asthénie, une thymie triste, et des douleurs lombaires occasionnelles. Le pronostic était peu favorable.

8.        Répondant à un questionnement spécifique de l'OAI, la Dresse C______ a précisé, par courrier du 5 juillet 2018, que, sur le plan psychiatrique, les atteintes à la santé qui l'empêchaient de travailler étaient les suivantes : anxiété permanente parasitant la réflexion et entraînant des retards aux performances; sentiment d'insuffisance, accentué et renforcé par l'impossibilité de trouver ou de maintenir un emploi, créant ainsi un état de dépression; troubles de la concentration et de l'attention. Ces éléments tenaient à une baisse de la rapidité de réflexion et d'action; les anticipations étaient anxiogènes et on se trouvait dans un cercle vicieux quasi-paralysant. Le patient signalait d'importants troubles du sommeil et une fatigabilité permanente. L'anamnèse était traumatique : elle rappelait les éléments de l'histoire du patient au Cambodge avant son arrivée en Suisse et remarquait que les remémorations de ces périodes étaient très douloureuses et les cauchemars fréquents; les troubles de la personnalité qu'il présentait actuellement étaient, de l'avis de la psychiatre, clairement à mettre en relation avec son histoire et étaient peu modifiables par une psychothérapie et/ou par des médicaments. Journée-type : selon les informations fournies par le patient, il semblait qu'outre les tâches ménagères et les courses quotidiennes, une importante partie de son temps se passait à rechercher des emplois, et il se consacrait aussi beaucoup à des formations : en ligne dans le domaine de l'informatique; cours de français à l'IFAGE, en vue d'obtenir le niveau C1. Il finançait lui-même certains de ses cours; son souhait était de se perfectionner suffisamment pour qu'un employeur puisse l'engager. Les apprentissages étaient difficiles et sa capacité de retenir de nouvelles informations était faible. Il avait besoin de beaucoup de temps pour intégrer les données et les reformuler. Il cherchait un domicile et passait beaucoup de temps à son administration (sa lenteur à effectuer les démarches était sûrement à mettre en relation avec sa mauvaise capacité de concentration). Il ne pratiquait pas d'activités sportives ou culturelles. Dans les activités quotidiennes de la vie courante, le patient ne semblait pas trop affecté, excepté que sa vie sociale était extrêmement réduite et que ses loisirs paraissaient inexistants; il passait du temps avec ses deux filles. Réseau social : le patient n'en avait quasiment pas; son frère était reparti vivre au Cambodge; son dernier mariage (2ème) s'était soldé par un échec quasi immédiat. Son inhibition et son anxiété ne favorisaient pas les rencontres; il ne semblait pas en mesure d'adhérer à une association, un cercle ou une société. Son aptitude à la communication était médiocre (anxiété ?); hors d'un cadre très rassurant et familier, le patient ne s'exprimait pas beaucoup. Elle n'était pas capable de préciser, du point de vue strictement psychiatrique, s'il existait des diagnostics non incapacitants. Les atteintes à la santé ayant un impact sur la CT étaient les parasites de la réflexion : lenteur, hésitations. Dans son activité habituelle, l'incapacité de travail était entière depuis plusieurs années. S'agissant d'une CT dans une activité adaptée, elle indiquait que dans une activité non stressante, non performante, en milieu rassurant, peut-être qu'une capacité de 50 % aurait été envisageable. Actuellement, la démoralisation de n'avoir jamais retrouvé d'emploi pesait sur le pronostic; l'élément dépressif était un facteur aggravant. En termes d'évolution de l'état de santé, celle-ci avait malheureusement été médiocre, car le non-retour à l'emploi avait créé une situation de déception chronique, finissant par entraîner des idées d'incapacité, de perte de confiance en soi, défaitisme etc. Observance thérapeutique : traitement antidépresseur d'Effexor (75 mg/jour); des doses plus élevées avaient entraîné des troubles du rythme cardiaque; les autres tentatives de traitement psychotrope n'avaient pas été concluantes. Il avait en réserve du Lexotanil 1.5 mg à prendre en cas de crise d'angoisse. Elle n'avait pas de raison de penser que le patient ne suivait pas très scrupuleusement son traitement.

9.        Le service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : SMR) a émis un avis en date du 24 juillet 2018 : résumant les pièces médicales versées au dossier (Dresse C______ et Dr G______), il retenait que celles-ci mettaient en avant une situation stable sur le plan somatique; sur le plan psychique, la situation semblait aggravée selon la psychiatre traitante; toutefois, l'assuré présentait de nombreuses limitations et symptômes déjà présents lors de la précédente expertise pluridisciplinaire (2008). La situation actuellement décrite par la psychiatre traitante ne permettait pas de constater une aggravation significative de l'état de santé psychique, notamment en raison d'une absence de description claire de l'intensité et de la fréquence des symptômes présentés par l'assuré. Une expertise psychiatrique était nécessaire, pour déterminer si l'assuré avait présenté une aggravation significative de son état de santé psychique depuis l'expertise de 2008, cas échéant, pour préciser le moment et la nature exacte de l'aggravation ainsi que ses répercussions sur la CT dans les activités habituelles ou dans une activité adaptée.

10.    Cette expertise a été confiée au docteur H______, médecin interne au département de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), lequel a établi son rapport le 3 décembre 2018. L'expertise était basée sur trois entretiens avec l'expertisé, (durée totale de 190'), le dernier (40'), en présence de la doctoresse I______, superviseur; entretiens téléphoniques avec les médecins traitants (20' avec la psychiatre, et 15' avec l'interniste), et sur l'étude du dossier. Après avoir consigné une anamnèse détaillée, les plaintes de l'expertisé et ses propres constatations, (status psychiatrique et examens complémentaires), l'expert a retenu les diagnostics de trouble de stress post-traumatique (F43.10), de trouble à symptomatologie somatique (F45.1), et mentionné ceux d'asthme, de diabète de type 2 et d'hypothyroïdie asymptomatique. En réponse aux questions posées, il a retenu une CT de 0 % dans l'activité habituelle; une reprise d'activité, même dans une activité adaptée, n'était pas possible actuellement; globalement, la CT de l'assuré était nulle (0 %) dans une activité adaptée sur le marché ordinaire du travail, précisant au sujet de l'évolution de la CT dans le temps, que la persévérance dans la recherche d'un emploi et la précarité d'emplois temporaires risqueraient d'aggraver l'état psychique déjà fragile de l'expertisé. Mesures médicales et thérapie ayant un impact sur la CT : la thérapie menée depuis plusieurs années était adaptée aux troubles présentés, en l'absence de possibilité de modifier le traitement pharmacologique, compte tenu des essais déjà effectués; une augmentation des séances de psychothérapie n'aurait pas d'influence significative. La thérapie actuelle permettait de maintenir la stabilité présente; un changement aurait au mieux une influence négligeable et au pire pourrait déstabiliser le patient et aggraver sa symptomatologie. Enfin, l'expert s'était interrogé sur la pertinence d'une expertise supplémentaire, après consultation du dossier et prise en compte des différents rapports médicaux s'y trouvant, et dont il partageait les conclusions.

11.    Le SMR s'est prononcé sur ce rapport d'expertise par un avis du 17 janvier 2019. Selon le docteur J______ (médecin de la permanence du SMR), si l'expert retenait un ESPT totalement incapacitant selon lui, le status ne mettait pas en évidence des éléments de sévérité, et aucun élément en faveur d'un ESPT n'était mentionné. Dans l'évaluation médicale, l'expert évoquait une modification durable de la personnalité, sans la retenir comme diagnostic. La diminution de la concentration mentionnée dans les limitations fonctionnelles n'était pas décrite au status. L'expert ne se positionnait pas par rapport à l'expertise du 28 mars 2008 qui ne retenait pas le diagnostic d'ESPT. Le Dr H______ attestait d'une CT nulle, sans préciser le début de l'incapacité de travail. Le Dr J______ a dès lors interrogé l'expert, par rapport aux observations susmentionnées.

12.    L'expert a pris position par courrier non daté mais reçu à l'office le 22 mars 2019. En ce qui concerne les atteintes à la santé : après avoir repris ses constatations et les éléments indiqués dans l'expertise, il indiquait que l'expertisé présentait une anxiété sévère, corroborée par l'échelle clinique HAMMA effectuée. Il présentait des troubles du sommeil avec une pratique diurne associée, une baisse de thymie liée aux éléments précédents ainsi qu'un sentiment de dévalorisation. L'anxiété exacerbée de l'assuré pouvait se manifester par des substrats somatiques, notamment des troubles algiques. Son état s'était même dégradé en comparaison de la précédente expertise, ceci malgré une thérapie conduite dans les règles de l'art; il maintenait sa position concernant le diagnostic d'ESPT, en se basant sur les éléments anamnestiques, notamment les violences subies en période de guerre et de déportation. Le traumatisme causé par ces événements était retranscrit dans des cauchemars répétitifs provoquant des attitudes d'évitement avec des insomnies ayant une répercussion sur sa qualité de vie en général, notamment une altération de sa cognition, plus précisément sa capacité de concentration et de maintien de l'attention, ainsi que sur sa thymie. Ceci pouvait, par continuité, se manifester par une symptomatologie somatique exacerbée. Les limitations fonctionnelles étaient notamment une diminution de la capacité de concentration et de maintien de l'attention, qui avaient pu être observées au cours des différents entretiens. L'incapacité était aussi physique, par la recrudescence de la symptomatologie algique dans un contexte de péjoration de l'angoisse de l'expertisé, en corrélation avec son ESPT. La CT dans une activité habituelle était actuellement nulle. La persistance à la reprise d'une activité habituelle ou adaptée aurait pour risque de contribuer à la péjoration de son état. Ce n'était pas faute par l'assuré d'avoir mis en œuvre les démarches nécessaires à la reprise d'activité depuis 2013, année de son dernier contrat; force était de constater que cela avait eu une influence négative sur sa santé. Le patient bénéficiait d'un suivi psychothérapeutique adapté, dans lequel il s'impliquait, et d'un traitement antidépresseur qui n'avait pas montré d'évolution significative. Plusieurs essais de modification de traitement ou d'augmentation de posologie avaient été menés de manière adaptée, dans les règles de l'art, en respectant les indications. Le patient présentait des effets secondaires importants à chaque changement, avec une exacerbation de somatisation et d'anxiété, ayant conduit soit au changement du traitement ou à la réduction de la posologie. Actuellement, l'expertisé supportait bien son traitement, malgré une faible efficacité thérapeutique. Compte tenu des différents essais de traitement et des réactions indésirables, l'expert ne voyait pas d'autre alternative au traitement actuel. Ce dernier permettait toutefois de maintenir la stabilité de l'état actuel, avec un pronostic non favorable à une amélioration permettant une reprise d'activité.

13.    Dans un avis du 23 avril 2019, le SMR, commentant le complément d'expertise susmentionné, persistait à considérer, en ce qui concerne l'ESPT totalement incapacitant retenu par l'expert, que le status psychiatrique ne mettait pas en évidence d'éléments d'une atteinte sévère. Sur le plan des plaintes subjectives, rapportées (p. 5 du rapport principal), l'expertisé se plaignait d'un état de tension interne avec des phases de recrudescence d'angoisses associées, sans évoquer de reviviscences envahissantes, de souvenirs intenses. Le SMR rappelait que la première experte, (2008), avait écarté ce diagnostic. En conclusion, et au vu des discordances entre les conclusions des deux expertises, le SMR a considéré qu'il était nécessaire de mettre en place une nouvelle expertise psychiatrique afin de clarifier les atteintes à la santé, leur sévérité et les limitations fonctionnelles notamment.

14.    L'OAI a désigné le docteur K______, FMH en psychiatrie à Lausanne. L'expert a déposé son rapport le 26 décembre 2019, après avoir entendu l'expertisé lors d'un entretien de 2h15, le 30 août 2019, et avoir ensuite interrogé par écrit la psychiatre traitante, notamment sur la fréquence des entretiens, la nature, la date et l'efficacité clinique des traitements prescrits, la situation actuelle de l'expertisé, en référence au fait qu'il avait rencontré une fiancée au Cambodge, qu'il s'y était rendu déjà trois à quatre semaines au début 2019, qu'il envisageait à terme un nouveau mariage, se rendait quotidiennement à la bibliothèque, faisait des exercices physiques et avait un ami éthiopien. Il demandait à la psychiatre traitante si elle était au courant des nombreuses démarches et activités de son patient.

En substance, et s'agissant des diagnostics, l'expert a inventorié, du point de vue psychopathologique, les différents diagnostics ressortant du dossier, soit, pour l'expertise du 28 mars 2008, un trouble dépressif récurrent, léger au moment de l'expertise, alors que la psychiatre traitante parlait de séquelles de traumatismes, probablement plus importants et dommageables que ce qui semblait de prime abord; l'expertise du 3 décembre 2018 retenait un ESPT, et un trouble à symptomatologie somatique. Partant de chacun des diagnostics susmentionnés, il les a examinés en fonction des critères du DSM-5 (au besoin comparés à ceux de la CIM-10) :

-          en ce qui concerne le trouble dépressif, l'expert n'a retenu qu'un trouble dépressif récurrent, actuellement subclinique à léger, relevant que l'ensemble de l'analyse ne mettait en évidence aucun élément en faveur d'une aggravation, ces dernières années. Il était probable que des suites du prononcé du divorce en octobre 2016, l'expertisé ait présenté une exacerbation réactionnelle transitoire;

-          s'agissant de l'état de stress post-traumatique (ESPT), l'expert indiquait qu'à l'examen clinique, l'expertisé déclarait ne pas se rappeler de ses rêves; si tant est qu'il eût parfois des cauchemars, ceux-ci n'avaient pas un caractère envahissant; il n'y avait d'autre part aucun flash-back dans la journée, ni évitement de situations suggérant le traumatisme antérieur; à ce titre on ne comprendrait pas bien pour quelles raisons l'assuré serait capable de se rendre régulièrement au Cambodge depuis des années, et ceci sans évoquer la moindre réticence ou réaction anxieuse, s'il existait un ESPT clairement significatif. L'expertisé n'était pas non plus dans un état d'alerte constant, ni d'ailleurs transitoire. Enfin, les troubles cognitifs et attentionnels relevés étaient des plaintes relativement atypiques qui ne sauraient être reliées de manière univoque, y compris en état dépressif, à un trouble anxieux ou à un ESPT. À ce titre, l'expertisé n'était pas en reste de formations continues, puisqu'il réalisa entre 2017 et 2019 une formation MS Windows Server 2012, 2016 et MS office 2013, 2016, 2019, tout comme une formation en 2016 de technicien en informatique. Cela allait à l'encontre de troubles cognitifs significatifs. En conclusion, il a écarté ce diagnostic;

-          quant au trouble général de la personnalité, l'expert a conclu qu'il n'y avait pas d'indice en faveur d'un trouble majeur de la personnalité, si ce n'était des traits anxieux et dépendants.

En conclusion, l'expert n'a retenu aucun diagnostic ayant une répercussion sur la CT, et les diagnostics sans répercussion sur la CT de trouble dépressif récurrent, actuellement subclinique à léger, et de personnalité avec des traits anxieux et dépendants.

Évaluant la cohérence et la plausibilité, l'expert a considéré que les symptômes ou les pertes de fonctionnalités dont se plaignait l'assuré étaient cohérents et plausibles; quant à la discussion et l'appréciation des éventuelles informations divergentes ressortant du dossier, ainsi que des appréciations spécialisées antérieures disponibles, l'expert a indiqué qu'il n'avait pas d'appréciations divergentes avec l'expertise bi-disciplinaire du 28 mars 2008, respectivement par rapport au volet psychiatrique (Dresse E______) qui ne parlait pas d'ESPT, mais à l'époque d'un trouble dépressif récurrent léger, sans syndrome somatique. S'agissant de la psychiatre traitante, si elle mentionnait que les traumatismes influençaient probablement le comportement de l'assuré, également dans ses recherches d'emploi, elle ne mentionnait pas un ESPT lege artis. Quant à l'expertise du 3 décembre 2018 (Drs H______ et I______), elle mentionnait les plaintes indiquées par l'assuré; il était conclu à un état anxieux lié à une modification durable de la personnalité due à un ESPT, sans que l'on en trouvât la moindre description dans l'ensemble du rapport d'expertise. On ne notait aucune description précise permettant de soutenir l'hypothèse d'un ESPT : l'observation clinique était sommaire, voire inexistante, et se contentait d'une observation relative au comportement et à la pensée extérieure, et de la compréhension linguistique; il était fait référence à des tests psychométriques : en d'autres termes, contradictoirement, après avoir évoqué une modification durable de la personnalité au point 4.1, il était mentionné cette fois-ci une personnalité anxieuse évitante, ce qui n'était pas la moindre des contradictions. Cette expertise donnait des indications cliniques largement insuffisantes et n'apportait aucun élément en faveur d'un ESPT. On pouvait aussi s'étonner que la symptomatologie dépressive ne soit pas mentionnée. Pourtant c'était celle-ci qui était le fil conducteur de l'ensemble du dossier médical. Quant au complément du Dr H______, du 22 mars 2019, il reprenait le diagnostic d'ESPT : il se basait sur la notion anamnestique de violences subies en période de guerre et de déportation. Dans les faits, le patient ne l'évoquait pas spontanément, même si ses conditions de vie étaient particulièrement précaires. Les cauchemars répétitifs, des attitudes d'évitement, avec des insomnies, ainsi qu'une altération des cognitions et de la concentration n'étaient en rien des critères suffisants, ni nécessaires pour retenir un tel diagnostic. Le Dr H______ allait chercher une morbidité au-delà de la médecine basée sur la preuve, en faisant de pures hypothèses qui n'étaient pas soutenues par les ouvrages nosographiques de référence (CIM-10 et DSM-5). L'appréciation de la CT se basant sur un diagnostic erroné et fondant sa justification apparemment sur les plaintes physiques et les problèmes d'attention et de concentration, n'était pas corroborée non plus par des éléments objectifs. On savait que l'expertisé réalisait depuis 2016 de nombreuses formations en informatique. Comme le commandait le simple bon sens, ce type d'activité mobilisait beaucoup d'énergie psychique, d'attention et de concentration. Enfin, on notait que son fonctionnement extra-professionnel n'était pas aussi limité que le dossier le laissait entendre. Ainsi avait-il de nombreuses activités, gérait son ménage et avait la disposition suffisante pour rechercher une nouvelle partenaire. À ce titre, il se rendait depuis des années au Cambodge, ce qui s'opposait aussi à l'existence d'un ESPT qui devrait engendrer en théorie lors du retour sur le lieu du traumatisme un état d'anxiété ou au moins des conduites d'évitement. L'expertisé évoquait son histoire personnelle sur un mode narratif, sans aucune manifestation émotionnelle ni neurovégétative.

Selon l'expert, le tableau clinique s'était peu modifié depuis le dernier rapport d'expertise du 23 mars 2008. Subjectivement : quelques problèmes de sommeil, fatigue occasionnelle, et légers troubles attentionnels.

L'expert a également procédé à l'appréciation des capacités, ressources et difficultés : le détail de ses appréciations sera repris dans les considérants, dans la mesure utile.

Le Dr K______ a enfin répondu à toutes les questions posées : s'agissant de la CT dans l'activité exercée jusqu'ici, il estimait qu'il n'y avait aucune évidence d'une aggravation de longue durée cliniquement significative depuis le rapport d'expertise du 28 mars 2008 (Dresse E______), et estimait en substance qu'elle était à tout le moins de 70 % et pourrait même être de 100 % dans une activité adaptée à ses compétences, sans diminution de rendement. Pour le détail, les réponses de l'expert seront développées dans la mesure utile dans les considérants.

15.    Le SMR a brièvement commenté le résultat de l'expertise du Dr K______ : après une anamnèse minutieuse, un status psychiatrique et des tests psychométriques, l'expert ne retenait aucun diagnostic incapacitant, et, sans effet sur la CT, un trouble dépressif récurrent actuellement subclinique à léger, et une personnalité avec des traits anxieux et dépendants. Il ne retenait pas de limitation fonctionnelle significative. Il n'y avait aucune évidence d'une aggravation de longue durée cliniquement significative depuis le rapport d'expertise de 2008. Une CT de 70 % était attestée, et pourrait même être de 100 % dans une activité adaptée aux compétences de l'assuré. En conclusion, le SMR retenait que l'assuré ne présentait pas d'atteinte à la santé sévère. L'examen du rapport d'expertise montrait une cohérence entre l'anamnèse, le status psychiatrique et les diagnostics retenus. Les discussions étaient claires et étayées, l'expert motivant clairement les raisons pour lesquelles il s'écartait de l'expertise du 3 décembre 2018, de sorte que le SMR ne retenait pas de modification notable de l'état de santé depuis la décision du 4 février 2009.

16.    Dans une note statut du 31 janvier 2020, l'OAI retenait que l'assuré, aujourd'hui âgé de 50 ans, divorcé, deux enfants nés en 1993 et 2003, était remarié depuis le 20 novembre 2019. Il avait obtenu un certificat MCP d'administrateur-système en 2014, était au bénéfice d'un CFC de monteur électricien obtenu en 1992. Selon les informations du dossier, la dernière activité en tant que monteur électromécanicien remontait à 2013. L'assuré était financièrement soutenu par l'hospice depuis le 1er décembre 2013. Lors de la précédente demande, un statut d'actif avait été retenu : il n'y avait aucune raison de s'écarter de la précédente évaluation.

17.    L'OAI a établi un projet de décision de refus de rente d'invalidité et de mesures d'ordre professionnel, le 6 février 2020. Le droit à une rente d'invalidité n'était pas ouvert; des mesures d'ordre professionnel n'étaient pas indiquées. Rappelant les termes de la décision en force du 4 février 2009, l'OAI a retenu qu'au terme de l'instruction de la nouvelle demande du 12 septembre 2017, il n'existait pas de modification notable de l'état de santé depuis la dernière décision en force, et considérait que la CT s'élevait toujours à 70 %, et ce dans toute activité professionnelle confondue. Ainsi, le taux d'invalidité résiduel s'élevait toujours à 30 % et n'ouvrait pas le droit à des prestations sous forme de rente, des mesures d'ordre professionnel n'étant pas indiquées.

18.    Par courrier du 25 février 2020, l'assuré a contesté ce projet de décision : sa santé s'était aggravée depuis la décision en force de 2009. Ses médecins traitants l'avaient indiqué par courrier des 30 mai et 24 octobre 2017 (Dresse C______) et du 14 juin 2017 (Dr G______). Il joignait à son courrier un avis de sa nouvelle psychiatre, la doctoresse L______, psychiatre et psychothérapeute FMH au Centre médical des Charmilles. Selon cette dernière, il convenait d'ajouter aux diagnostics précédemment retenus ceux de syndrome d'Asperger, asociabilité et de modification durable de la personnalité, suite à un vécu de catastrophe. L'assuré invitait dès lors l'OAI à réexaminer sa position.

19.    Par avis du 10 mars 2020, le SMR s'est prononcé sur l'avis de la Dresse L______ : l'avis de cette psychiatre était dépourvu d'éléments médicaux objectivant une modification significative de l'état de santé, en l'absence d'un status psychiatrique. Dans son expertise, le Dr K______ avait effectué une anamnèse complète, et un status psychiatrique. Il n'avait pas mis en évidence une atteinte à la santé sévère. Le SMR persistait donc dans les conclusions de son rapport du 16 janvier 2020.

20.    Par décision du 17 mars 2020, l'OAI a retenu que le droit à une rente d'invalidité n'était pas ouvert et que des mesures d'ordre professionnel n'étaient pas indiquées : reprenant les motifs retenus dans son projet de décision, l'OAI, se fondant sur l'avis du SMR du 10 mars 2020, a conclu que les éléments médicaux produits à l'appui de la contestation ne permettaient pas de modifier sa précédente appréciation.

21.    Par mémoire du 27 avril 2020, l'assuré, représenté par son conseil qui s'était préalablement constitué auprès de l'OAI, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans ou la CJCAS) d'un recours contre la décision de l'OAI du 17 mars 2020. En substance, il reprochait préalablement à l'OAI de ne lui avoir transmis qu'une partie de son dossier, soit celle concernant uniquement la demande de prestations en cours (dès 2017), et non pas la précédente, pourtant déterminante dès lors que le sort de la nouvelle demande dépendait d'une aggravation par rapport à l'état antérieur. Il concluait par conséquent et préalablement à ce que l'OAI adresse une copie intégrale de son dossier à son conseil. Il concluait principalement à l'annulation de la décision entreprise, qu'il soit dit et constaté que le recourant avait droit à une rente entière d'invalidité, le tout avec suite de frais et dépens. Il reprochait à l'intimé de ne pas avoir instruit du tout la question du syndrome d'Asperger : selon lui, l'OAI aurait dû solliciter un rapport détaillé et complet de la nouvelle psychiatre traitante (il produisait un rapport de la Dresse L______ du 22 avril 2020); il faisait aussi grief à l'OAI de n'avoir instruit que l'aspect psychiatrique alors qu'il souffrait également de problèmes somatiques attestés par son médecin traitant (rapport du Dr G______ du 18 juillet 2011, produit); il appartenait ainsi à l'OAI de solliciter du médecin traitant des compléments d'information, notamment sur les limitations somatiques; les problématiques somatiques et psychiatriques prises ensemble influençaient en effet de manière négative la CT de l'assuré. Il reprochait ensuite à l'OAI, respectivement au SMR, d'avoir ignoré les divergences ressortant de son dossier au sujet des « diagnostics sur la capacité de travail de l'assuré » : les médecins traitants et les experts des HUG – désignés par l'OAI - aboutissaient à une CT nulle, y compris dans une activité adaptée, laquelle risquerait même d'aggraver ses différents symptômes psychiatriques (rapport d'expertise du 3 décembre 2018). Plutôt que de prendre en compte ces avis convergents, le SMR avait préféré désigner un nouvel expert, le Dr K______, qui n'avait pas abordé cette problématique et les effets négatifs que pourrait avoir la reprise ou la tentative de reprise d'une activité lucrative. En cela, son expertise n'était pas probante. L'expert n'a pas relevé non plus la présence d'une problématique en lien avec le syndrome d'Asperger, pourtant relevée par la Dresse L______. Cet aspect nécessitait aussi un complément d'instruction, afin de clarifier définitivement cette question. Il découlait donc, selon le recourant, que son invalidité étant de 100 %, il avait droit à une rente entière d'invalidité, la décision entreprise devant dès lors être modifiée en ce sens.

22.    Par courriel du 7 mai 2020, l'OAI a indiqué à la chambre de céans avoir transmis une copie complète de son dossier au conseil du recourant.

23.    L'intimé a répondu au recours par courrier du 18 mai 2020. Il concluait à son rejet. L'OAI, rappelant les dispositions et principes applicables, et les conclusions de l'expertise du BREM, pleinement probantes, ayant abouti à la décision - entrée en force – du 4 février 2009, observait que dans le cadre de la nouvelle demande de prestations, du 13 septembre 2017, le SMR avait estimé que les documents médicaux versés au dossier mettaient en avant une situation stable sur le plan somatique, alors que sur le plan psychique, les éléments apportés ne permettaient pas de fonder une appréciation claire sur la CT du recourant, de sorte qu'il avait préconisé la mise en place d'une expertise, effectuée aux HUG par les Drs H______ et I______ (rapport du 3 décembre 2018). De l'avis du SMR, du 23 avril 2019, les conclusions de cette expertise n'avaient pas pu être suivies, et avaient ainsi été écartées, faute de pouvoir constituer un moyen de preuve adéquat pour évaluer la CT du recourant. Une nouvelle expertise avait dès lors été confiée au Dr K______ (rapport du 26 décembre 2019), qui considérait en particulier qu'il n'y avait à l'évidence aucune aggravation de l'état de santé de longue durée cliniquement significative depuis le rapport d'expertise du 28 mars 2008. Il motivait également de manière circonstanciée les raisons pour lesquelles il s'écartait des conclusions de l'expertise des HUG du 3 décembre 2018. Ce rapport d'expertise (Dr K______) était plus détaillé que les autres pièces du dossier et se fondait sur une étude attentive de celui-ci. Il réunissait toutes les conditions pour se voir reconnaître une pleine valeur probante. L'OAI avait d'ailleurs tenu compte de l'ensemble des documents médicaux du dossier pour fonder son appréciation sur la CT du recourant, et les différents rapports médicaux avaient été discutés. Il n'y avait ainsi pas lieu de retenir une modification notable de l'état de santé du recourant depuis le 4 février 2009. S'agissant des nouvelles pièces médicales (produites à l'appui du recours), celles-ci avaient été soumises au SMR (avis du 14 mai 2020) : le rapport médical de la Dresse L______ du 22 avril 2020, retenant les diagnostics de syndrome d'Asperger avec asociabilité, et modification durable de la personnalité suite à vécu de catastrophe, ne faisait que les énoncer sans description anamnestique, status ou motivation selon des critères diagnostiques. Ce rapport n'apportait aucun élément objectif permettant de s'éloigner des conclusions de l'expertise motivée du Dr K______ du 26 décembre 2019; certificat médical du 18 juillet 2011 du Dr G______ : ce médecin estimait, sans motivation diagnostique ni clinique, que l'assuré était limité dans le port de charges, à 5 kg, dans l'exercice de son activité professionnelle. Le SMR rappelait à ce sujet que lors de l'expertise rhumatologique du 28 mars 2008, aucune limitation somatique n'avait été retenue. Le médecin traitant n'avançait pas de raison pour motiver la limitation de poids, de sorte qu'en l'absence d'éléments objectifs, il n'y avait pas lieu de reconnaître cet avis. En conclusion, les documents nouveaux n'apportaient aucun élément objectif susceptible de remettre en question sa dernière appréciation. L'OAI, qui adhérait aux conclusions de son service médical, considérait ainsi qu'aucun élément objectivement vérifiable - de nature clinique ou diagnostique - qui aurait été ignoré dans le cadre de l'expertise, qui serait suffisamment pertinent pour remettre en cause le bien-fondé des conclusions de l'expert ou établir le caractère incomplet de son ouvrage, n'avait été apporté. Il ne suffisait pas de soutenir que l'expert aurait dû conclure différemment. En conclusion, l'instruction du dossier permettait de statuer en pleine connaissance de cause sur l'état de santé et la CT du recourant, de sorte que la mise en œuvre de mesures d'investigations complémentaires, notamment une expertise judiciaire, s'avérait inutile. La décision entreprise devait être confirmée.

24.    Le recourant a brièvement répliqué par courrier de son conseil du 10 juin 2020. Il persistait intégralement dans les conclusions de son recours. Dans sa réponse, l'intimé estimait en substance, avec le SMR, que les nouveaux éléments médicaux produits ne seraient pas suffisants pour démontrer l'aggravation de son état de santé. L'assuré avait dès lors sollicité des rapports médicaux complémentaires de ses médecins traitants, qu'il produisait en annexes : rapports de la Dresse L______ du 3 juin 2020, et du Dr G______ du 1er juin 2020. En substance, le médecin traitant somaticien venait confirmer les limitations fonctionnelles, notamment le port de charges supérieures à 5 kg : le port d'un poids supérieur entraînait l'apparition de tendinites; quant à la psychiatre traitante, elle confirmait que la personnalité du recourant relevait de l'autisme, justifiant de manière détaillée son diagnostic, éléments qui n'avaient pourtant jamais été pris en compte par l'OAI, ceci de manière contraire au droit, et à son devoir d'instruction. Le détail des rapports médicaux susmentionnés sera repris dans la mesure utile, dans les considérants.

25.    L'intimé a dupliqué par courrier du 24 juin 2020. Il persistait dans ses conclusions. Les pièces médicales nouvelles avaient été soumises au SMR (avis du 22 juin 2020) : le rapport du Dr G______ du 1er juin 2020 n'amenait pas de nouveaux éléments objectifs permettant de reconnaître une affection incapacitante ou des limitations fonctionnelles, d'un point de vue somatique. Il indiquait que l'assuré présentait mensuellement des dorsalgies et des douleurs para-cervicales droites, avec parfois des vertiges. Il avait présenté des tendinites des coudes, par le passé, lors d'un travail avec port de charges lourdes. Il présentait des épisodes de tachycardie, mais le spécialiste cardiologue n'avait pas mis en évidence d'arythmies graves. Le généraliste décrivait que le diabète était bien réglé. Il estimait que l'assuré pouvait porter des charges de plus de 10 kg, mais pas régulièrement. Il pensait que la problématique principale était d'ordre psychique; il était suivi par une psychiatre. La psychiatre traitante (rapport du 3 juin 2020) reprenait l'anamnèse de l'enfance de l'assuré. Elle retenait les diagnostics de trouble dépressif récurrent et de modification de la personnalité après expérience de catastrophe, troubles du développement psychologique, séquelles d'un trouble envahissant du développement, sans précision, et décrivait que l'assuré n'avait jamais réussi à maintenir une activité professionnelle; il présentait des difficultés d'interaction et de communication sociale. Elle estimait que l'incapacité de travail était totale et définitive. L'histoire de l'enfance de l'assuré au Cambodge était connue des experts de 2008 et du Dr K______, en 2020. Ils avaient décrit que l'assuré avait été témoin de violences dans son pays d'origine; toutefois, ils ne reconnaissaient pas le diagnostic de modification de la personnalité après expérience de catastrophe : l'assuré ne présentait pas de critères pour un trouble de la personnalité; en effet, il avait pu s'adapter à un nouveau pays, apprendre une nouvelle langue, obtenir un CFC, se marier et avoir des enfants. De plus, comme l'avait argumenté le dernier expert, l'assuré ne décrivait pas de cauchemars envahissants, ne présentait pas de flash-backs durant la journée, n'effectuait pas d'évitement de situations, retournant d'ailleurs régulièrement au Cambodge, et ne présentait pas un état d'alerte constant ou transitoire. S'agissant du trouble dépressif récurrent, ce diagnostic avait été retenu par le Dr K______, qu'il évaluait d'intensité légère. La psychiatre traitante ne précisait pas le degré de gravité de ce trouble; elle ne parlait pas pour une aggravation de l'état de santé de l'assuré depuis l'expertise de janvier 2020, ni depuis celle de 2008. La psychiatre traitante évoquait en outre un trouble envahissant du développement, en se basant sur l'anamnèse personnelle et familiale, ainsi que sur la présence de difficultés d'interaction et de communication sociale. Si l'on se référait à la CIM-10, un trouble envahissant du développement se présentait par des altérations qualitatives des interactions sociales réciproques et des modalités de communication, et un répertoire d'intérêts et d'activités restreint, stéréotypé et répétitif; ces anomalies infiltraient l'ensemble du fonctionnement du sujet, quelles que soient les situations. Dans la plupart des cas, le développement était anormal dès la petite enfance, avant cinq ans. Or, chez cet assuré, il n'avait pas été mis en évidence la présence d'activités restreintes, répétitives et stéréotypées, ni de difficultés d'interactions et de communication sociale. Malgré l'histoire difficile de son enfance, l'assuré avait réussi à apprendre une nouvelle langue, à obtenir un CFC en électricité puis en électronique, avait travaillé quelques années, s'était marié deux fois, et il avait une nouvelle fiancée au Cambodge. Il avait déclaré avoir plusieurs amis cambodgiens, jouer avec eux fréquemment au tennis et au ping-pong; ce qui allait à l'encontre de troubles des relations sociales. En décembre 2018, lors de l'expertise psychiatrique, il déclarait aussi voir régulièrement ses amis. Par ailleurs, il avait contribué à l'éducation de ses deux filles (qui faisaient des études supérieures), alors qu'il était divorcé. Il se rendait régulièrement au Cambodge; avec un ami, il avait eu un projet immobilier dans ce pays, il y a quelques années, et réfléchissait à un retour dans son pays d'origine. Tous ces éléments ne parlaient pas en faveur d'un trouble envahissant du développement : les interactions sociales étaient présentes (filles, fiancée); il avait des centres d'intérêt (sport, intérêts scientifiques); les activités n'étaient pas décrites comme répétitives et stéréotypées. Ainsi, selon le SMR, ces rapports médicaux n'amenaient pas de nouveaux éléments objectifs permettant de remettre en question la précédente appréciation du cas.

26.    Par courrier du 15 juillet 2020, le recourant a produit un nouvel avis de la psychiatre traitante (rapport du 9 juillet 2020). Il persistait dans ses conclusions. Dans ce rapport, la psychiatre traitante, sans vouloir remettre en cause la qualité des expertises de ses collègues, soulignait toutefois la difficulté, voire l'incapacité du patient à se faire entendre et comprendre : elle évoquait à cet égard les problèmes de communication, qu'il avait également eus dans sa langue maternelle, avec sa première femme par exemple, et qui étaient source de malentendus, de conflits et de violences conjugales de la part de son épouse. Les points qu'elle souhaitait reprendre du point de vue psychiatrique relevaient de la temporalité des événements et aussi de la relecture anamnestique et clinique psychiatrique de son dossier OAI, dans lequel tous les éléments à disposition figuraient déjà. Elle ne revenait pas sur les éléments diagnostiques, ni spécialement sur les symptômes toujours présents comme les cauchemars, à thème de torture, de poursuite et de menaces à son encontre, les flash-backs, comme des images, par récit interposé, de sa mère encore en vie avec un sac en plastique sur la tête, ou les scènes violentes de torture dont il avait été témoin dans une maison de son village aménagée à cet effet. Il avait voulu revoir cette maison lors de ses voyages au Cambodge et s'était senti très mal, après. Il retournait au Cambodge pour revoir ses tantes paternelle et maternelle, mais aussi pour retourner de temps en temps au village, pour bénévolement enseigner le français et l'informatique aux enfants pauvres, tout comme ses parents avaient enseigné, dans ce même village, des décennies en arrière, avant leur déportation. Ces symptômes post-traumatiques, existant encore en 2018 (expertise psychiatrique des médecins des HUG), se retrouvaient également en 2020, selon son rapport précédent. La question de la temporalité de cette pathologie post-traumatique, en termes de chronicisation et d'évolution symptomatique, greffée sur une fragilité psychologique de base, démontrait que les capacités restantes ne pouvaient pas s'améliorer avec l'âge en vue d'un retour vers une CT, mais s'appauvrissaient au contraire, et se cristallisaient autour du traumatisme, rendant sa CT nulle. Les symptômes dépressifs étaient récurrents, chroniques, fluctuants; l'intensité actuelle n'était pas suffisante pour permettre à elle seule de décider d'une activité lucrative ou d'un retour potentiel sur le marché du travail, constatation confirmée par l'expertise du Dr K______, à fin 2019. Une activité adaptée, selon l'expertise de 2008, même si révolue depuis, aurait pu être tentée à l'époque, en milieu protégé probablement, si les éléments évolutifs avaient déjà été connus « (cela n'était pas possible !) », et surtout après une reconnaissance par l'AI de son invalidité du point de vue psychiatrique. En effet, les éléments cliniques psychiatriques étaient tous présents au dossier de l'OAI. Les difficultés du patient à communiquer avaient eu des répercussions sur son parcours de vie et professionnel. En conclusion, elle considérait qu'une réévaluation de la reconnaissance à long terme de l'invalidité de son patient était nécessaire et indispensable, à la lumière de toutes les preuves médicales et psychiatriques de son dossier OAI, depuis 2006.

27.    Par courrier du 17 août 2020, l'OAI a communiqué ses observations après avoir soumis au SMR le rapport de la psychiatre traitante susmentionné. Au vu de l'avis du service médical auquel il se ralliait, l'OAI persistait dans ses conclusions. En substance, le SMR estimait que ce rapport n'amenait pas de nouvel élément médical objectif : l'anamnèse de l'assuré était connue de l'expert, qui avait apprécié la CT résiduelle de l'assuré en se basant sur les diagnostics, mais surtout sur les indicateurs standards de la jurisprudence, comme détaillé dans ses précédents avis. Le fait de pouvoir retourner dans son pays, et surtout dans son village dans lequel il avait vécu des choses difficiles, et d'enseigner aux enfants, comme ses parents le faisaient, démontrait des capacités d'adaptation bien présentes chez cet assuré.

28.    La chambre de céans a entendu les parties et la Dresse L______ à l'audience de comparution personnelle et d'enquêtes du 28 septembre 2020.

Le recourant a déclaré : « Je suis arrivé en Suisse en 1984 comme réfugié. En Suisse, j'ai suivi une formation de monteur-électronicien, depuis 1987, qui a été sanctionnée, en 1992, par un CFC. J'ai ensuite travaillé pendant une année chez M______. Après cela je me suis retrouvé au chômage. En fait, mon emploi était un CDD d'une année. Nous nous situons alors environ en 1995. J'ai travaillé pour des missions temporaires. J'étais inscrit auprès d'une agence. J'ai eu des missions plus ou moins longues, notamment de 1998 à 2002. En 1997 j'ai vécu une période que je qualifie de "pic", du point de vue de ma santé; à cette époque, pendant deux semaines je n'ai pas réussi à dormir. J'ai d'ailleurs été hospitalisé. S'agissant de mes voyages de retour dans mon pays d'origine, le Cambodge, je crois que j'ai commencé à y retourner en 2000. J'y avais été pour visiter le pays et voir comment les choses avaient évolué. Je précise que la date que je viens de donner n'est plus très sûre dans mon esprit. En tout cas, je suis retourné au Cambodge pour la première fois après ma naturalisation suisse. J'y ai encore de la famille, soit des cousins, que j'ai vus à l'occasion de mon séjour. Mon premier séjour a duré environ 3 semaines. J'ai ressenti le besoin de retourner périodiquement au pays, car le régime politique est toujours sous la dictature. Dans les villes, la vie est possible, mais c'est surtout dans les campagnes que les gens souffrent. Pour ce qui est (de) mon atteinte à la santé, mes premières difficultés ayant conduit à consulter remontent (à) assez vite après mon arrivée en Suisse. Quelques années après mon arrivée dans ce pays, j'avais tenté de mettre fin à mes jours. J'étais débordé par des angoisses et par la solitude. C'est à cette époque que j'ai consulté. S'agissant de mes emplois, la dernière fois que j'ai eu un emploi fixe, c'était celui pour lequel j'ai été licencié en 2002. J'ai eu le sentiment à l'époque d'être victime de mobbing. La raison officielle de mon licenciement était un motif économique. Mon employeur fabriquait notamment des machines à destination des Etats-Unis. Après les événements du 11 septembre, j'ai eu le sentiment que la situation se dégradait au niveau des commandes. Je dois dire également qu'à cette époque les attentats du 11 septembre 2001 m'ont beaucoup marqué, parce qu'ils évoquaient pour moi les événements de guerre que j'avais vécus au Cambodge. J'ai eu une période où j'étais malade. Les choses se sont améliorées temporairement au début 2007, époque où j'ai travaillé pendant une année dans le cadre d'emplois de solidarité. Je me suis retrouvé ensuite au chômage. A partir de 2010, j'ai eu quelques emplois temporaires, placé par une agence. C'est à partir de fin 2013 que mes médecins ont considéré que j'étais totalement incapable de travailler. Depuis cette époque, je n'ai jamais retrouvé d'emploi, sinon quelques stages. Sur questions de mon conseil, je ne sais pas si j'ai évoqué avec les médecins successifs que j'ai eus, notamment la Dresse C______, ou ceux qui m'ont expertisé, la tentative de suicide que j'évoquais tout à l'heure et que je situe aux alentours de 1985-1986. Je ne me rappelle pas si j'en avais parlé au Dr K______. Si j'ai des difficultés à parler de cet événement, c'est que j'éprouve de la honte à ce sujet et à ce que j'ai vécu par le passé. Ma vie est dans la honte et dans le silence. Il est possible que j'en aie parlé une fois à la Dresse L______. J'ai consulté la Dresse L______ pour la première fois à la fin de l'année dernière ».

La Dresse L______ a déclaré : « J'ai commencé à suivre M. A______ au début de l'année 2020. En effet, j'ai pris la succession (reprise de cabinet) de la Dresse C______ qui a été son psychiatre avant moi, pendant une quinzaine d'années. J'ai eu encore récemment l'occasion de discuter de ce cas avec la Dresse C______, et elle insiste sur ce qu'elle écrit dans ses deux rapports de 2017 notamment, où elle décrit ce qui l'a amenée à considérer que M. A______ est totalement incapable de travailler dans une activité du marché du travail. Je dois vous dire que lorsque j'ai repris le mandat thérapeutique de la Dresse C______, j'ai trouvé un patient assez bien compensé sur le plan psychiatrique. Il a fallu toutefois creuser pour cerner sa problématique. En effet, ceci tient en particulier à l'instauration d'un climat de confiance dans un contexte où il a passablement de difficultés à communiquer avec les autres et à parler de lui-même. J'ai observé que ce n'est que dans des moments de surcharge émotionnelle qu'il arrive à parler de son vécu d'une façon générale et au Cambodge en particulier. Je peux dire avoir constaté une différence significative entre "l'avant" et "l'après", c'est-à-dire, avant son arrivée en Suisse et son vécu depuis son arrivée dans ce pays. La période antérieure est morcelée, dans son récit, alors que les événements vécus depuis son arrivée en Suisse sont beaucoup plus structurés et il est capable de les restituer dans la chronologie. Et dans ce contexte, apparaissent malgré tout, ceci souvent par association d'idées, des événements de son passé. A titre d'exemple, il y a environ deux séances (c'est le lieu de préciser que le rythme des séances actuelles est de une fois toutes les deux semaines), nous avons évoqué la question de savoir si son incapacité à pouvoir travailler durablement tenait à un phénomène de lenteur dans son attitude et surtout dans son origine psychique. Sur le moment il est un élément qu'il n'avait pas évoqué, mais qui est sorti tout à coup deux semaines plus tard, soit à la séance suivante : lorsqu'il s'est retrouvé au "camp de riz", à l'époque de son adolescence, il était interdit de repas, parce qu'il n'arrivait pas à terminer son travail, parce qu'il était plus lent que les autres. J'ai dès lors voulu rechercher si l'on était en présence d'un phénomène de dyspraxie à mettre en lien avec un problème neurologique, via des tests, mais ce n'était pas le cas. Ce ne serait pas à moi de le faire si l'on avait suspecté une telle problématique, au niveau du dessin et de l'écriture. Au début du suivi, j'ai tenté de réunir les éléments que j'associais à la problématique Asperger; si j'en ai parlé dans mon rapport du 22 avril, je suis revenue plus en détails sur ces questions dans mon rapport suivant, du 3 juin 2020, après avoir repris de façon plus approfondie le détail anamnestique. J'ai ainsi pu notamment observer une différence marquée entre le comportement de mon patient et celui de son frère, pendant leur enfance respectivement leur adolescence. Son frère aîné est d'un naturel beaucoup plus ouvert. Il était plus expansif, sortait beaucoup plus que lui, pour prendre ces exemples. Son frère aîné a ainsi travaillé pendant une vingtaine d'années chez N______. Vous me demandez comment je peux expliquer que personne avant que je ne pose ce diagnostic (Asperger) n'y ait pensé. Si l'on prend en particulier le suivi de la Dresse C______, qui a eu l'occasion de voir M. A______ dans une longue période chargée d'émotivité, elle a aussi pris ce patient en charge à un moment où la situation se chronicisait déjà, dans un contexte où son atteinte psychique avait tendance à évoluer de manière fluctuante mais permanente. Lorsque j'ai repris ce suivi, je n'ai pas eu accès tout de suite à tout cela, mais c'est à force d'approfondir l'histoire du patient que j'ai pu déceler l'origine de cet état, remontant à peu après sa naissance. La complexité de M. A______, notamment dans son mode de communication avec les autres, fait que dans l'interaction il est capable de donner le change. Ceci peut avoir pour conséquence que dans le contexte de certains diagnostics, par exemple celui de modification durable de la personnalité, il y aura dans son discours des éléments trompeurs, qui notamment échapperont à certains experts, comme ce fut le cas pour moi au début. J'ai assez rapidement détecté des signes me faisant penser au diagnostic d'Asperger, mais il faut savoir que les symptômes associés à ce diagnostic se retrouvent souvent liés à d'autres problématiques, notamment aux troubles envahissants du développement, ce qui m'est apparu au fil des discussions. J'ai ainsi pu remonter aux traumatismes vécus dans la prime enfance et qui n'ont jamais pu être discutés; qui ont été enfouis et qui ont ressurgi, selon ce que décrit M. A______ à l'époque où il a vécu les attentats du 11 septembre 2001, qui ont provoqué chez lui la résurgence de ce qu'il avait vécu au Cambodge, notamment l'explosion de la bombe dans son école, épisode que son propre frère n'a pas vécu, car il n'était pas dans la même école notamment. M. A______ a ainsi éprouvé une sensibilité beaucoup plus grande que celle de son frère. En relation avec le diagnostic de trouble dépressif récurrent que j'ai notamment évoqué dans mon rapport du 3 juin 2020, vous me faites observer que je n'évoque pas l'intensité de ce trouble : s'agissant d'un trouble, il y a la notion de chronicité et donc l'évolution fluctuante. Je peux dire qu'actuellement, ce qui veut dire depuis quelques semaines voire quelques mois, cet aspect n'est pas au premier plan, c'est-à-dire que l'on peut considérer une intensité légère; mais il y a eu des périodes où la situation était beaucoup plus sévère (je ne l'ai pas beaucoup vu, car pendant ces périodes, M. A______ se cache, reste au lit). D'une manière générale, M. A______ ne s'exprime pas spontanément sur ces aspects, mais il répond et en parle si on le sollicite. Nous avons aussi évoqué la relation avec ses troubles somatiques, comme ses maux de tête, vertiges : il a lui-même fait le lien entre ses douleurs et les événements de 2001, et les réminiscences qu'ils ont provoquées; il semble selon ce qu'il explique que cela soit devenu récurrent depuis qu'il en pris conscience. Pour répondre à une question de l'intimé, M. A______ n'a jamais manqué un rendez-vous, mais il est arrivé qu'en raison de son état, décrit précédemment l'empêchant de se déplacer, il ait pris contact pour déplacer les rendez-vous. Sur question du conseil du recourant qui me demande si mon patient a eu l'occasion de me parler d'une tentative de mettre fin à ses jours, dans le courant des années 85-86. Je n'ai pas en tête cet élément, mais je ne peux pas l'exclure, mais pour cela il faudrait que je reprenne mes notes. Dans le contexte de ce patient, je confirme que ce genre d'épisode et de passage à l'acte auto-agressif se retrouve souvent chez des sujets qui ont vécu des traumatismes de guerre et encore actuellement malgré tout le travail qui a été fait sur le plan psychiatrique, le risque de réitération n'est pas nul. Le fait que M. A______ ne parle pas nécessairement de ce genre d'événement, et que l'on ne trouve au dossier aucun rapport médical ou rapport d'expertise où il en serait question peut s'expliquer à la fois par la notion d' "enfouissement", dont je parlais tout à l'heure, mais aussi comme le suggère le conseil du recourant en relation avec les déclarations en comparution personnelle avec le sentiment de honte qu'il décrit; il est fréquent d'ailleurs que des sujets qui ont vécu ce genre de traumatisme éprouvent ce genre de sentiments, notamment en raison du fait qu'ils vivent alors que leurs proches n'ont pas survécu ».

Madame O______, pour l'OAI, est intervenue : « Par rapport à l'évocation de cet épisode au dossier, j'ai noté que cet événement figure dans la première expertise de 2008, page 12, et il est précisé que cela s'est déroulé en 1985 ».

La Dresse L______ a repris : « Pour répondre au conseil du recourant qui me demande si la connaissance d'un événement comme le tentamen dont il a été question est un élément important pour pouvoir se prononcer sur la capacité actuelle de travail du patient, je réponds que cela peut en effet avoir une importance, dans la mesure où il existe un risque que si l'on pousse l'intéressé au-delà de ses limites, il serait susceptible de donner comme réponse une réaction du même type. Ceci peut se concevoir aussi bien dans un milieu protégé comme celui des EPI, que dans un contexte du monde du travail ordinaire. Sur question du conseil du recourant, le fait que puisse être apparue récemment une incertitude quant à l'âge exact de mon patient, il m'a en effet parlé de cela récemment, mais ceci n'a aucune importance par rapport à son histoire de vie, ni par rapport à une question touchant sa propre appréciation de son identité ».

29.    Sur quoi, un délai a été octroyé à l'office AI pour détermination notamment du SMR au sujet des déclarations de la Dresse L______ et du recourant en comparution personnelle, la suite de la procédure étant réservée.

30.    L'intimé s'est déterminé par courrier du 5 octobre 2020. Le procès-verbal d'audience avait également été soumis au SMR qui, dans un avis du 1er octobre 2020, considérait qu'il ne ressortait aucun élément nouveau anamnestique qui n'ait pas été connu à lecture du dossier, notamment l'ancien tentamen, déjà cité dans le rapport d'expertise du 28 mars 2008, et dont il avait été tenu compte par les experts dans leur appréciation. Quant à l'audition de la psychiatre traitante, qui précisait suivre le patient depuis 2020, elle permettait de confirmer que le trouble dépressif récurrent était d'intensité légère. La question du diagnostic du syndrome d'Asperger et/ou de troubles envahissants du développement avait déjà été commentée dans l'avis du SMR du 22 juin 2020; la psychiatre traitante n'apportait pas de nouvel argument. Le SMR précisait en outre que, en ce qui concerne les événements du 11 septembre 2001 (attentats aux USA), qui auraient ravivé certains souvenirs traumatisants chez le recourant, l'expert psychiatre en 2008 (plus proche de 2001 qu'actuellement), ne retenait aucune symptomatologie permettant de retenir un syndrome d'ESPT, ou une modification de la personnalité après expérience de catastrophe.

31.    Par courrier du 14 octobre 2020, le recourant a persisté dans ses conclusions. Au regard de l'audience du 8 (recte : 28) septembre 2020 et de la dernière détermination de l'OAI et du SMR, il apparaissait en particulier indispensable de procéder à une expertise médicale, pour les raisons suivantes : suite à la nouvelle demande de prestations (2017), l'assuré avait été soumis à une première expertise, des médecins des HUG, soit en milieu universitaire : les experts avaient clairement fait état d'une incapacité de travail totale, dans toute activité, et avaient mentionné le risque que la recherche d'emploi par l'assuré et la précarité des postes à pourvoir, aggravent son état psychique. Il estimait que, pour des raisons assez confuses, le SMR n'avait pas été satisfait de la première expertise psychiatrique et avait choisi de confier une nouvelle expertise à un médecin probablement plus à même d'aller dans son sens. Les conclusions de ce dernier étaient diamétralement opposées à celles, tant des médecins traitants que des experts universitaires. On se trouvait donc en présence de deux expertises, sans que l'une ou l'autre puisse être préférée en raison d'un motif objectif suffisant. Ainsi pour ce seul motif, le doute auquel la chambre de céans était confrontée devait manifestement conduire à la mise sur pied d'une expertise judiciaire. Revenant sur la question du tentamen évoqué lors de l'audience du 28 septembre 2020, si cette tentative de suicide était mentionnée dans l'expertise de 2008, elle ne l'était plus dans les expertises les plus récentes, car le recourant, empreint d'un sentiment de honte, n'en faisait généralement pas état. Il en déduisait que les expertises les plus récentes omettaient un élément essentiel pour apprécier la situation de l'assuré, comme mentionné par la psychiatre traitante. En outre, le SMR ne contestait pas le caractère important de cette information, révélée par la psychiatre traitante; il se contentait d'affirmer que les experts en auraient tenu compte, dès lors que cet élément était au dossier depuis 2008. Or, il ne suffisait pas qu'un élément soit mentionné dans un dossier AI depuis de nombreuses années, pour qu'il en soit systématiquement tenu compte par la suite. Il était donc contestable et contesté de considérer qu'un expert aurait tenu compte d'un élément important, qu'il aurait toutefois omis de mentionner dans son rapport. Le sentiment de honte exprimé par le recourant était fréquent selon sa psychiatre. Or, il paraissait ainsi essentiel, pour un expert, d'être informé de la manière dont le patient s'exprime, ou plutôt ne s'exprime pas, procédant par enfouissement et « donnant le change », selon les propos de sa psychiatre traitante. Il estimait au demeurant qu'en tout état, on ne saurait se fonder sur l'avis du Dr K______, dès lors que ce dernier avait d'une part été choisi par le SMR car la première expertise n'allait pas dans son sens, et que d'autre part, il ne connaissait pas l'élément important que constituait la tentative de suicide de l'assuré, ni son mode de communication, tel que décrit par sa psychiatre traitante, élément essentiel à connaître pour pouvoir se prononcer.

32.    Sur quoi, les parties ont été informées que la cause serait gardée à juger, à trois semaines.

33.    Les parties ne se sont plus manifestées.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l’entrée en vigueur de la LPGA; il n’en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 343 consid. 3).

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA. Le recours reste cependant soumis à l'ancien droit, dès lors qu'au 1er janvier 2021, il était déjà pendant devant la chambre de céans (cf. art. 83 LPGA; RO 2020 5137; FF 2018 1597).

3.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, compte tenu de la suspension des délais du 7ème jour avant Pâques au 7ème jour après Pâques inclusivement (art. 38 al. 4 let. a LPGA et art. 89C let. a LPA), le recours est recevable, d'autant qu'en 2020, Pâques tombait le 12 avril, et que cette année-là, en raison de la crise sanitaire due au coronavirus, le Conseil fédéral avait adopté l’ordonnance sur la suspension des délais dans les procédures civiles et administratives pour assurer le maintien de la justice en lien avec le coronavirus (COVID-19) du 20 mars 2020, qui stipulait à son art. 1 que, lorsqu'en vertu du droit fédéral ou cantonal de procédure applicable, les délais légaux ou les délais fixés par les autorités ou par les tribunaux ne couraient pas pendant les jours qui précédaient et suivaient Pâques, leur suspension commençait dès l'entrée en vigueur de la présente ordonnance et durerait jusqu'au 19 avril 2020 inclus (al. 1); les effets de la suspension étaient régis par le droit de procédure applicable (al. 2) et la suspension s’appliquait aussi aux délais fixés par les autorités ou par les tribunaux avec comme échéance une date précise entre l'entrée en vigueur de la présente ordonnance et le 19 avril 2020 (al. 3). Cette ordonnance était entrée en vigueur le 21 mars 2020 à 0h00 et avait déployé ses effets jusqu’au 19 avril 2020.

4.        Le litige porte sur le droit du recourant aux prestations de l'AI, plus particulièrement à une rente, et singulièrement sur la question de savoir si l'état de santé du recourant s'est aggravé depuis la dernière décision en force rendue par l'OAI en date du 4 février 2009.

5.        a. Pour l’établissement des faits pertinents, il y a lieu d’appliquer les principes ordinaires régissant la procédure en matière d’assurances sociales, à savoir, en particulier, la maxime inquisitoire, ainsi que les règles sur l’appréciation des preuves et le degré de la preuve.

b. La maxime inquisitoire signifie que l’assureur social et, en cas de litige, le juge, établissent d’office les faits déterminants, avec la collaboration des parties, sans être liés par les faits allégués et les preuves offertes par les parties, en s’attachant à le faire de manière correcte, complète et objective afin de découvrir la réalité matérielle (art. 43 LPGA; art. 19 s., 22 ss, 76 et 89A LPA; Ghislaine FRÉSARD FELLAY/ Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, Droit suisse de la sécurité sociale, vol. II, 2015, p. 499 s.). Les parties ont l’obligation d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués; à défaut, elles s’exposent à devoir supporter les conséquences de l’absence de preuve (art. 28 LPGA; ATF 125 V 193 consid. 2; 122 V 157 consid. 1a; 117 V 261 consid. 3b et les références).

c. Comme l’administration, le juge apprécie librement les preuves administrées, sans être lié par des règles formelles (art. 61 let. c LPGA). Il lui faut examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les pièces du dossier et autres preuves recueillies permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. Il lui est loisible, sur la base d’une appréciation anticipée des preuves déjà disponibles, de refuser l’administration d’une preuve supplémentaire au motif qu’il la tient pour impropre à modifier sa conviction (ATF 131 III 222 consid. 4.3; ATF 129 III 18 consid. 2.6; arrêt du Tribunal fédéral 4A_5/2011 du 24 mars 2011 consid. 3.1).

d. Une preuve absolue n’est pas requise en matière d’assurances sociales. L’administration et le juge fondent leur décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; 126 V 353 consid. 5b; 125 V 193 consid. 2 et les références). Il n’existe pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a; Ghislaine FRÉSARD- FELLAY / Bettina KAHIL-WOLFF / Stéphanie PERRENOUD, op. cit., p. 517 s.). Reste réservé le degré de preuve requis pour la notification de décisions, l’exercice d’un moyen de droit, le contenu d’une communication dont la notification est établie (ATF 124 V 400; 121 V 5 consid. 3b; 119 V 7 consid. 3c/bb; ATAS/286/2018 du 3 avril 2018 consid. 3; ATAS/763/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4 et 5c).

6.        Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70 % au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60 % au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40 % au moins.

7.        Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

8.        a. Lorsque la rente a été refusée parce que le degré d’invalidité était insuffisant - ou, comme dans le cas d'espèce, n'a été allouée que partiellement et pour une durée limitée dans le temps -, la nouvelle demande ne peut être examinée que si l’assuré rend plausible que son invalidité ou son impotence s’est modifiée de manière à influencer ses droits (art. 87 al. 2 et 3 du règlement sur l’assurance-invalidité du 17 janvier 1961 [RAI - RS 831.201]). Cette exigence doit permettre à l’administration qui a précédemment rendu une décision de refus de prestations entrée en force, d’écarter sans plus ample examen de nouvelles demandes dans lesquelles l’assuré se borne à répéter les mêmes arguments, sans alléguer une modification des faits déterminants (ATF 130 V 64 consid. 5.2.3; ATF 125 V 412 consid. 2b; ATF 117 V 198 consid. 4b ainsi que les références; arrêt du Tribunal fédéral 9C_137/2018 du 3 septembre 2018 consid. 2.2).

b. Lorsqu’elle est saisie d’une nouvelle demande, l’administration doit commencer par examiner si les allégations de l’assuré sont, d’une manière générale, plausibles. Si tel n’est pas le cas, l’affaire est liquidée d’entrée de cause et sans autres investigations par un refus d’entrée en matière (ATF 117 V 198 consid. 3a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_137/2018 précité consid. 2.2). Le juge ne doit examiner comment l’administration a tranché la question de l’entrée en matière que lorsque ce point est litigieux, c’est-à-dire quand l’administration a refusé d’entrer en matière en se fondant sur l’art. 87 RAI et que l’assuré a interjeté recours pour ce motif. Ce contrôle par l’autorité judiciaire n’est en revanche pas nécessaire lorsque l’administration est entrée en matière sur la nouvelle demande (ATF 109 V 114 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_316/2011 du 20 février 2012 consid. 3.2).

c. L'exigence relative au caractère plausible ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent alors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir (Damien VALLAT, La nouvelle demande de prestations AI et les autres voies permettant la modification de décisions en force, RSAS, 2003, p. 396 ch. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 724/99 du 5 octobre 2001 consid. 1c/aa).

Lors de l'appréciation du caractère plausible d'une modification déterminante des faits influant sur le droit aux prestations, on compare les faits tels qu'ils se présentaient au moment de la décision administrative litigieuse et les circonstances prévalant à l'époque de la dernière décision d'octroi ou de refus des prestations (ATF 130 V 64 consid. 2; ATF 109 V 262 consid. 4a).

d. Lorsque l’administration entre en matière sur une nouvelle demande de prestations, elle doit examiner la cause au plan matériel - soit en instruire tous les aspects médicaux et juridiques - et s’assurer que la modification du degré d’invalidité rendue vraisemblable par l’assuré est effectivement survenue (arrêt du Tribunal fédéral 9C_142/2012 du 9 juillet 2012 consid. 4). Selon la jurisprudence, elle doit procéder de la même manière que dans les cas de révision au sens de l’art. 17 al. 1 LPGA (ATF 133 V 545 consid. 6), c’est-à-dire comparer les circonstances existant lorsque la nouvelle décision est prise avec celles qui existaient lorsque la dernière décision reposant sur un examen matériel du droit à la rente est entrée en force (ATF 133 V 108 consid. 5; ATF 130 V 71 consid. 3.2.5) pour apprécier si dans l’intervalle est intervenue une modification sensible du degré d’invalidité justifiant désormais l’octroi d’une rente. Si elle constate que les circonstances prévalant lors de la dernière décision entrée en force et reposant sur un examen matériel du droit à la rente (cf. ATF 133 V 108 consid. 5.3.2) ne se sont pas modifiées jusqu’au moment de la nouvelle décision, et que le degré d’invalidité n’a donc pas changé, elle rejette la nouvelle demande. Dans le cas contraire, elle est tenue d’examiner s’il y a désormais lieu de reconnaître un taux d’invalidité ouvrant le droit à une prestation ou augmentant celle-ci. En cas de recours, le même devoir d’examen matériel incombe au juge (ATF 117 V 198 consid. 3a et ATF 109 V 114 consid. 2a et b; arrêt du Tribunal fédéral 9C_721/2014 du 16 juin 2015 consid. 3.1).

9.        En l'occurrence, l'administration étant entrée en matière, ce point n'est pas litigieux, de sorte que la chambre de céans n'a pas à examiner comment l'OAI a tranché cette question. Au vu de la jurisprudence citée précédemment, il s'agit de déterminer, si dans le cas particulier, l'OAI a bien instruit tous les aspects médicaux et juridiques pour s’assurer que la modification du degré d’invalidité rendue vraisemblable par l’assuré était effectivement survenue, ceci en comparant les circonstances existant lorsque la nouvelle décision a été prise, avec celles qui existaient lorsque la dernière décision reposant sur un examen matériel du droit à la rente (6 juillet 2010) est entrée en force, pour apprécier si dans l’intervalle une modification sensible du degré d’invalidité justifiant désormais l’octroi d’une rente était intervenue.

Comme rappelé précédemment, l'exigence relative au caractère plausible ne renvoie pas à la notion de vraisemblance prépondérante usuelle en droit des assurances sociales. Les exigences de preuves sont, au contraire, sensiblement réduites en ce sens que la conviction de l'autorité administrative n'a pas besoin d'être fondée sur la preuve pleinement rapportée qu'une modification déterminante est survenue depuis le moment auquel la décision refusant les prestations a été rendue. Des indices d'une telle modification suffisent alors même que la possibilité subsiste qu'une instruction plus poussée ne permettra pas de l'établir. Ainsi, le fait d'admettre comme plausible une possible aggravation de l'état de santé de l'assuré depuis la dernière décision en force n'exclut pas qu'aux termes de l'instruction plus poussée, que l'administration doit entreprendre après être entrée en matière, celle-ci aboutisse en définitive à la conclusion que la modification (ici l'aggravation) de l'état de santé depuis la dernière décision en force ne soit en réalité, - et ceci au degré de la vraisemblance prépondérante exigée en matière d'assurances sociales -, pas survenue.

L’art. 17 al. 1 LPGA dispose que si le taux d’invalidité du bénéficiaire de la rente subit une modification notable, la rente est, d’office ou sur demande, révisée pour l’avenir, à savoir augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée. Il convient ici de relever que l’entrée en vigueur de l’art. 17 LPGA, le 1er janvier 2003, n’a pas apporté de modification aux principes jurisprudentiels développés sous le régime de l’ancien art. 41 LAI, de sorte que ceux-ci demeurent applicables par analogie (ATF 130 V 343 consid. 3.5). Tout changement important des circonstances, propre à influencer le degré d’invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l’art. 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3; ATF 130 V 343 consid. 3.5). Tel est le cas lorsque la capacité de travail s'améliore grâce à une accoutumance ou à une adaptation au handicap (ATF 141 V 9 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_622/2015 consid. 4.1). Il n'y a pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; ATF 112 V 371 consid. 2b; ATF 112 V 387 consid. 1b). Un motif de révision au sens de l'art. 17 LPGA doit clairement ressortir du dossier. La réglementation sur la révision ne saurait en effet constituer un fondement juridique à un réexamen sans condition du droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 111/07 du 17 décembre 2007 consid. 3 et les références).

10.    a. Les atteintes à la santé psychique peuvent, comme les atteintes physiques, entraîner une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible (ATF 127 V 294 consid. 4c; ATF 102 V 165 consid. 3.1; VSI 2001 p. 223 consid. 2b; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 786/04 du 19 janvier 2006 consid. 3.1).

La reconnaissance de l’existence d’une atteinte à la santé psychique suppose la présence d’un diagnostic émanant d’un expert (psychiatre) et s’appuyant selon les règles de l’art sur les critères d’un système de classification reconnu, tel le CIM ou le DSM-IV (ATF 143 V 409 consid. 4.5.2; ATF 141 V 281 consid. 2.1 et 2.1.1; ATF 130 V 396 consid. 5.3 et 6).

b. Dans l’ATF 141 V 281, le Tribunal fédéral a revu et modifié en profondeur le schéma d'évaluation de la capacité de travail, respectivement de l'incapacité de travail, en cas de syndrome douloureux somatoforme et d'affections psychosomatiques comparables. Il a notamment abandonné la présomption selon laquelle les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets pouvaient être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 141 V 281 consid. 3.4 et 3.5) et introduit un nouveau schéma d'évaluation au moyen d'un catalogue d'indicateurs (ATF 141 V 281 consid. 4). Le Tribunal fédéral a ensuite étendu ce nouveau schéma d'évaluation aux autres affections psychiques (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Aussi, le caractère invalidant d'atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 3 et les références).

Le Tribunal fédéral a en revanche maintenu, voire renforcé, la portée des motifs d'exclusion définis dans l'ATF 131 V 49, aux termes desquels il y a lieu de conclure à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit aux prestations d'assurance, si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, et ce même si les caractéristiques d'un trouble au sens de la classification sont réalisées. Des indices d'une telle exagération apparaissent notamment en cas de discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, de grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psycho-social intact (ATF 141 V 281 consid. 2.2.1 et 2.2.2; ATF 132 V 65 consid. 4.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 9C_16/2016 du 14 juin 2016 consid. 3.2).

c. L'organe chargé de l'application du droit doit, avant de procéder à l'examen des indicateurs, analyser si les troubles psychiques dûment diagnostiqués conduisent à la constatation d'une atteinte à la santé importante et pertinente en droit de l'assurance-invalidité, c'est-à-dire qui résiste aux motifs dits d'exclusion tels qu'une exagération ou d'autres manifestations d'un profit secondaire tiré de la maladie (cf. ATF 141 V 281 consid. 2.2; arrêt du Tribunal fédéral 9C_756/2018 du 17 avril 2019 5.2.2 et la référence).

d. Pour des motifs de proportionnalité, on peut renoncer à une appréciation selon la grille d’évaluation normative et structurée si elle n’est pas nécessaire ou si elle est inappropriée. Il en va ainsi notamment lorsqu’il n’existe aucun indice en faveur d’une incapacité de travail durable ou lorsque l’incapacité de travail est niée sous l’angle psychique sur la base d’un rapport probant établi par un médecin spécialisé et que d’éventuelles appréciations contraires n’ont pas de valeur probante du fait qu’elles proviennent de médecins n’ayant pas une qualification spécialisée ou pour d’autres raisons (arrêt du Tribunal fédéral 9C_101/2019 du 12 juillet 2019 consid. 4.3 et la référence; arrêt du Tribunal fédéral 9C_724/2018 du 11 juillet 2019 consid. 7). En l’absence d’un diagnostic psychiatrique, une telle appréciation n’a pas non plus à être effectuée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_176/2018 du 16 août 2018 consid. 3.2.2).

11.    Selon la jurisprudence, en cas de troubles psychiques, la capacité de travail réellement exigible doit être évaluée dans le cadre d'une procédure d'établissement des faits structurée et sans résultat prédéfini, permettant d'évaluer globalement, sur une base individuelle, les capacités fonctionnelles effectives de la personne concernée, en tenant compte, d'une part, des facteurs contraignants extérieurs incapacitants et, d'autre part, des potentiels de compensation (ressources) (ATF 141 V 281 consid. 3.6 et 4). L'accent doit ainsi être mis sur les ressources qui peuvent compenser le poids de la douleur et favoriser la capacité d'exécuter une tâche ou une action (arrêt du Tribunal fédéral 9C_111/2016 du 19 juillet 2016 consid. 7 et la référence). 

Il y a lieu de se fonder sur une grille d’analyse comportant divers indicateurs qui rassemblent les éléments essentiels propres aux troubles de nature psychosomatique (ATF 141 V 281 consid. 4).

-          Catégorie « Degré de gravité fonctionnel » (ATF 141 V 281 consid. 4.3)

A.    Complexe « Atteinte à la santé » (consid. 4.3.1)

Expression des éléments pertinents pour le diagnostic (consid. 4.3.1.1), succès du traitement et de la réadaptation ou résistance à cet égard (consid. 4.3.1.2), comorbidités (consid. 4.3.1.3).

B.     Complexe « Personnalité » (diagnostic de la personnalité, ressources personnelles; consid. 4.3.2) 

C.     Complexe « Contexte social » (consid. 4.3.3)

-          Catégorie « Cohérence » (aspects du comportement; consid. 4.4) 

Limitation uniforme du niveau d'activité dans tous les domaines comparables de la vie (consid. 4.4.1), poids des souffrances révélé par l'anamnèse établie en vue du traitement et de la réadaptation (consid. 4.4.2).

Les indicateurs appartenant à la catégorie « degré de gravité fonctionnel » forment le socle de base pour l’évaluation des troubles psychiques (ATF 141 V 281 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2019 du 16 mars 2020 consid. 8.2).

12.    Selon la jurisprudence rendue jusque-là à propos des dépressions légères à moyennes, les maladies en question n'étaient considérées comme invalidantes que lorsqu'on pouvait apporter la preuve qu'elles étaient « résistantes à la thérapie » (ATF 140 V 193 consid 3.3; arrêts du Tribunal fédéral 9C_841/2016 du 8 février 2017 consid. 3.1 et 9C_13/2016 du 14 avril 2016 consid. 4.2).

Dans l'ATF 143 V 409 consid. 4.2, le Tribunal fédéral a rappelé que le fait qu'une atteinte à la santé psychique puisse être influencée par un traitement ne suffit pas, à lui seul, pour nier le caractère invalidant de celle-ci; la question déterminante est en effet celle de savoir si la limitation établie médicalement empêche, d'un point de vue objectif, la personne assurée d'effectuer une prestation de travail. À cet égard, toutes les affections psychiques doivent en principe faire l'objet d'une procédure probatoire structurée au sens de l'ATF 141 V 281 (ATF 143 V 418 consid. 6 et 7 et les références). Ainsi, le caractère invalidant des atteintes à la santé psychique doit être établi dans le cadre d'un examen global, en tenant compte de différents indicateurs, au sein desquels figurent notamment les limitations fonctionnelles et les ressources de la personne assurée, de même que le critère de la résistance du trouble psychique à un traitement conduit dans les règles de l'art (ATF 143 V 409 consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 9C_142/2018 du 24 avril 2018 consid. 5.2).

Dans les cas où, au vu du dossier, il est vraisemblable qu'il n'y a qu'un léger trouble dépressif, qui ne peut déjà être considéré comme chronifié et qui n'est pas non plus associé à des comorbidités, aucune procédure de preuve structurée n'est généralement requise (arrêt du Tribunal fédéral 9C_14/2018 du 12 mars 2018 consid 2.1).

13.    Des traits de personnalité signifient que les symptômes constatés ne sont pas suffisants pour retenir l’existence d’un trouble spécifique de la personnalité. Ils n'ont, en principe, pas valeur de maladie psychiatrique et ne peuvent, en principe, fonder une incapacité de travail en droit des assurances au sens des art. 4 al. 1 LAI et 8 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2019 du 17 mars 2020 consid. 5.3 et les références).

14.    Les principes jurisprudentiels développés en matière de troubles somatoformes douloureux sont également applicables à la fibromyalgie (ATF 132 V 65 consid. 4.1), au syndrome de fatigue chronique ou de neurasthénie (ATF 139 V 346; arrêt du Tribunal fédéral 9C_662/2009 du 17 août 2010 consid. 2.3 in SVR 2011 IV n° 26 p. 73), à l'anesthésie dissociative et aux atteintes sensorielles (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 9/07 du 9 février 2007 consid. 4 in SVR 2007 IV n° 45 p. 149), à l’hypersomnie (ATF 137 V 64 consid. 4) ainsi qu'en matière de troubles moteurs dissociatifs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_903/2007 du 30 avril 2008 consid. 3.4), de traumatisme du type « coup du lapin » (ATF 141 V 574 consid. 5.2 et ATF 136 V 279 consid. 3.2.3) et d’état de stress post-traumatique (ATF 142 V 342 consid. 5.2). En revanche, ils ne sont pas applicables par analogie à la fatigue liée au cancer (cancer-related Fatigue) (ATF 139 V 346 consid. 3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_73/2013 du 2 septembre2013 consid. 5).

15.    a. Pour pouvoir calculer le degré d'invalidité, l'administration (ou le juge, s'il y a eu un recours) a besoin de documents que le médecin, éventuellement aussi d'autres spécialistes, doivent lui fournir (ATF 122 V 157 consid. 1b). Pour apprécier le droit aux prestations d’assurances sociales, il y a lieu de se baser sur des éléments médicaux fiables (ATF 134 V 231 consid. 5.1). La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. Dans le cas des maladies psychiques, les indicateurs sont importants pour évaluer la capacité de travail, car - en tenant compte des facteurs incapacitants externes d’une part et du potentiel de compensation (ressources) d’autre part -, ils permettent d’estimer la capacité de travail réellement réalisable (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_286/2020 du 6 août 2020 consid. 4 et la référence).

b. Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3). Il faut en outre que le médecin dispose de la formation spécialisée nécessaire et de compétences professionnelles dans le domaine d’investigation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_555/2017 du 22 novembre 2017 consid. 3.1 et les références).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

c. Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

Le fait qu'une expertise psychiatrique n'a pas été établie selon les nouveaux standards - ou n'en suit pas exactement la structure - ne suffit cependant pas pour lui dénier d'emblée toute valeur probante. En pareille hypothèse, il convient bien plutôt de se demander si, dans le cadre d'un examen global, et en tenant compte des spécificités du cas d'espèce et des griefs soulevés, le fait de se fonder définitivement sur les éléments de preuve existants est conforme au droit fédéral. Il y a lieu d'examiner dans chaque cas si les expertises administratives et/ou les expertises judiciaires recueillies - le cas échéant en les mettant en relation avec d'autres rapports médicaux - permettent ou non une appréciation concluante du cas à l'aune des indicateurs déterminants. Selon l'étendue de l'instruction déjà mise en oeuvre, il peut s'avérer suffisant de requérir un complément d'instruction sur certains points précis (ATF 141 V 281 consid. 8; ATF 137 V 210 consid. 6; arrêts du Tribunal fédéral 9C_808/2019 du 18 août 2020 consid. 5.2. et 9C_109/2018 du 15 juin 2018 consid. 5.1).

d. Un rapport du SMR a pour fonction d'opérer la synthèse des renseignements médicaux versés au dossier, de prendre position à leur sujet et de prodiguer des recommandations quant à la suite à donner au dossier sur le plan médical. En tant qu'il ne contient aucune observation clinique, il se distingue d'une expertise médicale (art. 44 LPGA) ou d'un examen médical auquel il arrive au SMR de procéder (art. 49 al. 2 RAI; ATF 142 V 58 consid. 5.1; arrêt du Tribunal fédéral 9C_542/2011 du 26 janvier 2012 consid. 4.1). De tels rapports ne sont cependant pas dénués de toute valeur probante, et il est admissible que l'office intimé, ou la juridiction cantonale, se fonde de manière déterminante sur leur contenu. Il convient toutefois de poser des exigences strictes en matière de preuve; une expertise devra être ordonnée si des doutes, même faibles, subsistent quant à la fiabilité ou à la pertinence des constatations effectuées par le SMR (ATF 142 V 58 consid. 5; ATF 135 V 465 consid. 4.4 et 4.6; arrêt du Tribunal fédéral 9C_371/2018 du 16 août 2018 consid. 4.3.1). 

e. En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). S'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1).

f. On ajoutera qu'en cas de divergence d’opinion entre experts et médecins traitants, il n'est pas, de manière générale, nécessaire de mettre en œuvre une nouvelle expertise. La valeur probante des rapports médicaux des uns et des autres doit bien plutôt s'apprécier au regard des critères jurisprudentiels (ATF 125 V 351 consid. 3a) qui permettent de leur reconnaître pleine valeur probante. À cet égard, il convient de rappeler qu'au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral I 514/06 du 25 mai 2007 consid. 2.2.1, in SVR 2008 IV Nr. 15 p. 43), on ne saurait remettre en cause une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contradictoire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expert (arrêt du Tribunal fédéral 9C_369/2008 du 5 mars 2009 consid. 2.2).

16.    En ce qui concerne les facteurs psychosociaux ou socioculturels et leur rôle en matière d'invalidité, ils ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé, susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Pour qu'une invalidité soit reconnue, il est nécessaire, dans chaque cas, qu'un substrat médical pertinent, entravant la capacité de travail (et de gain) de manière importante, soit mis en évidence par le médecin spécialisé. Plus les facteurs psychosociaux et socioculturels apparaissent au premier plan et imprègnent l'anamnèse, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique tels, par exemple, une dépression durable au sens médical ou un état psychique assimilable, et non une simple humeur dépressive. Une telle atteinte psychique, qui doit être distinguée des facteurs socioculturels, et qui doit de manière autonome influencer la capacité de travail, est nécessaire en définitive pour que l'on puisse parler d'invalidité. En revanche, là où l'expert ne relève pour l'essentiel que des éléments qui trouvent leur explication et leur source dans le champ socioculturel ou psychosocial, il n'y a pas d'atteinte à la santé à caractère invalidant (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine).

17.    a. Le point de départ de l'évaluation prévue pour les troubles somatoformes douloureux (ATF 141 V 281), les troubles dépressifs (ATF 143 V 409), les autres troubles psychiques (ATF 143 V 418) et les troubles mentaux du comportement liés à l’utilisation de substances psychoactives (ATF 145 V 215) est l'ensemble des éléments médicaux et constatations y relatives. Les experts doivent motiver le diagnostic psychique de telle manière que l'organe d'application du droit puisse comprendre non seulement si les critères de classification sont remplis (ATF 141 V 281 consid. 2.1.1), mais également si la pathologie diagnostiquée présente un degré de gravité susceptible d'occasionner des limitations dans les fonctions de la vie courante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_551/2019 du 24 avril 2020 consid. 4.1 et la référence).

b. Dans un arrêt de principe du 2 décembre 2019 (ATF 145 V 361), le Tribunal fédéral, à la lumière de l'ATF 141 V 281, a notamment posé une délimitation, entre l'examen (libre), par les autorités chargées de l'application du droit, de l'admission d'une incapacité de travail par l'expert psychiatre, d'une part, et une appréciation juridique parallèle inadmissible, d'autre part.

Selon le Tribunal fédéral, dans tous les cas, l’administration et, en cas de recours, le juge, doivent examiner si et dans quelle mesure les experts ont suffisamment et de manière compréhensible étayé leur évaluation de l'incapacité de travail, en tenant compte des indicateurs pertinents (questions de preuve). À cette fin, les experts doivent établir un lien avec la partie précédente de l'expertise médico-psychiatrique (avec extraits du dossier, anamnèse, constatations, diagnostics, etc.), c'est-à-dire qu'ils doivent se référer en détails aux résultats médico-psychiatriques des examens et explorations cliniques menés dans les règles de l’art qui relèvent de leur compétence. Le médecin doit donc exposer de manière détaillée les raisons médico-psychiatriques pour lesquelles les éléments constatés sont susceptibles de restreindre la capacité fonctionnelle et les ressources psychiques en termes qualitatifs, quantitatifs et temporels (ATF 143 V 418 consid. 6). À titre d’exemple, dans le cadre de troubles dépressifs récurrents de degrés légers à modérés qui sont souvent au premier plan dans l’examen de l’invalidité au sens de l’AI, cela signifie qu’il ne suffit pas que l'expert psychiatre déduise directement de l'épisode dépressif diagnostiqué une incapacité de travail, quel qu'en soit le degré; il doit bien plutôt démontrer si et dans quelle mesure les constatations qu'il a faites (tristesse, désespoir, manque de dynamisme, fatigue, troubles de la concentration et de l'attention, diminution de la capacité d'adaptation, etc.), limitent la capacité de travail, en tenant compte - à des fins de comparaison, de contrôle et de plausibilité - des autres activités personnelles, familiales et sociales de la personne requérant une rente. Si les experts s'acquittent de cette tâche de manière convaincante, en tenant compte des éléments de preuve établis par l'ATF 141 V 281, l'évaluation des répercussions de l’atteinte psychique sera également valable du point de vue des organes chargés de l’application du droit, que ce soit l’administration ou le juge. À défaut, il se justifie, juridiquement, de s'en écarter (ATF 145 V 361 consid. 4.3 et la référence).

c. En ce qui concerne l'évaluation du caractère invalidant des affections psychosomatiques et psychiques, l'appréciation de la capacité de travail par un médecin psychiatre est soumise à un contrôle (libre) des organes chargés de l'application du droit à la lumière de l'ATF 141 V 281 (ATF 145 V 361 consid. 4.3; arrêt du Tribunal fédéral 9C_585/2019 du 3 juin 2020 consid. 2 et les références). Il peut ainsi arriver que les organes d'application du droit se distancient de l'évaluation médicale de la capacité de travail établie par l’expertise sans que celle-ci ne perde sa valeur probante (arrêt du Tribunal fédéral 9C_128/2018 du 17 juillet 2018 consid. 2.2 et les références). Du point de vue juridique, il est même nécessaire de s’écarter de l’appréciation médicale de la capacité de travail si l’évaluation n’est pas suffisamment motivée et compréhensible au vu des indicateurs pertinents, ou n’est pas convaincante du point de vue des éléments de preuve instaurés par l’ATF 141 V 281. S’écarter de l’évaluation médicale est alors admissible, du point de vue juridique, sans que d’autres investigations médicales ne soient nécessaires (arrêt du Tribunal fédéral 9C_832/2019 du 6 mai 2020 consid. 2.2). Toutefois, lorsque l’administration ou le juge, au terme de son appréciation des preuves, parvient à la conclusion que le rapport d'expertise évalue la capacité de travail en fonction des critères de médecine des assurances établis dans l'ATF 141 V 281 et qu’il satisfait en outre aux exigences générales en matière de preuves (ATF 134 V 231 consid. 5.1), il a force probante et ses conclusions sur la capacité de travail doivent être suivies par les organes d'application de la loi. Une appréciation juridique parallèle libre en fonction de la grille d'évaluation normative et structurée ne doit pas être entreprise (cf. ATF 145 V 361 consid. 4.3; arrêts du Tribunal fédéral 8C_213/2020 du 19 mai 2020 consid. 4.3 et les références).

En fin de compte, la question décisive est toujours celle des répercussions fonctionnelles d'un trouble. La preuve d'une incapacité de travail de longue durée et significative liée à l’état de santé ne peut être considérée comme rapportée que si, dans le cadre d’un examen global, les éléments de preuve pertinents donnent une image cohérente de l’existence de limitations dans tous les domaines de la vie. Si ce n'est pas le cas, la preuve d'une limitation invalidante de la capacité de travail n'est pas rapportée et l'absence de preuve doit être supportée par la personne concernée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C_423/2019 du 7 février 2020 consid. 3.2.2 et les références).

18.    Conformément au principe inquisitoire qui régit la procédure dans le domaine des assurances sociales, le juge des assurances sociales doit procéder à des investigations supplémentaires ou en ordonner lorsqu'il y a suffisamment de raisons pour le faire, eu égard aux griefs invoqués par les parties ou aux indices résultant du dossier. Il ne peut ignorer des griefs pertinents invoqués par les parties pour la simple raison qu'ils n'auraient pas été prouvés (VSI 5/1994 220 consid. 4a). En particulier, il doit mettre en œuvre une expertise lorsqu'il apparaît nécessaire de clarifier les aspects médicaux du cas (ATF 117 V 282 consid. 4a; RAMA 1985 p. 240 consid. 4; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 751/03 du 19 mars 2004 consid. 3.3). Lorsque le juge des assurances sociales constate qu'une instruction est nécessaire, il doit en principe mettre lui-même en œuvre une expertise lorsqu'il considère que l'état de fait médical doit être élucidé par une expertise ou que l'expertise administrative n'a pas de valeur probante (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4). Un renvoi à l’administration reste possible, notamment quand il est fondé uniquement sur une question restée complètement non instruite jusqu'ici, lorsqu'il s'agit de préciser un point de l'expertise ordonnée par l'administration ou de demander un complément à l'expert (ATF 137 V 210 consid. 4.4.1.3 et 4.4.1.4; SVR 2010 IV n. 49 p. 151, consid. 3.5; arrêt du Tribunal fédéral 8C_760/2011 du 26 janvier 2012 consid. 3).

19.    En l'espèce, le recourant reproche à l'intimé d'avoir fondé la décision entreprise sur l'expertise du Dr K______, laquelle n'aurait selon lui pas valeur probante. Il s'agit dès lors d'examiner, à la lumière des principes de jurisprudence rappelés précédemment au sujet des exigences requises pour que l'on puisse accorder une pleine valeur probante à un avis médical, si cette expertise en réunit les conditions.

Aussi longtemps qu'une expertise confiée à un médecin indépendant dans le cadre de la procédure administrative a été établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge des assurances sociales ne saurait les écarter si aucun indice concret ne lui permet de douter de leur bien-fondé. En l'occurrence, l'expert, spécialiste reconnu, a déposé son rapport, après avoir entendu l'expertisé lors d'un entretien de 2h15, avoir procédé à des examens complémentaires, et avoir ensuite interrogé par écrit la psychiatre traitante de l'expertisé. Ce rapport montre une pleine connaissance du dossier, l'expert ayant en particulier pris en compte l'ensemble des avis médicaux y figurant, autant ceux qui avaient abouti à la première décision, en force, de l'OAI, à l'issue de l'instruction de la première demande de prestations, que ceux réunis dans le cadre de l'instruction de la seconde demande (sous examen, du 13 septembre 2017). Cette expertise est en outre basée sur une anamnèse minutieuse qui a notamment permis à l'expert d'évaluer la situation de l'assuré sur la base de tous les indicateurs prescrits par la jurisprudence, et tient compte des plaintes du patient; avant de se déterminer sur les diagnostics pertinents, l'expert a examiné, en les confrontant aux ouvrages de référence (DSM 5 et CIM-10), chacun de ceux qui avaient été retenus - ou écartés - par les médecins (experts ou médecins traitants) qui ont eu à connaître du cas, au fil des années. Force est de constater que l'expert a examiné toutes les questions pertinentes, indiquant de façon motivée les raisons pour lesquelles il ne partageait, le cas échéant, pas l'avis de certains de ses collègues; il n'a retenu aucun diagnostic incapacitant, et les diagnostics, sans effet sur la CT, de trouble dépressif récurrent actuellement subclinique à léger, et de personnalité avec des traits anxieux et dépendants. Il a en outre répondu à toutes les questions posées : s'agissant de la CT dans l'activité exercée jusqu'ici, il estimait qu'il n'y avait aucune évidence d'une aggravation de longue durée cliniquement significative depuis le rapport d'expertise du 28 mars 2008 (Dresse E______). Il était attesté une CT de 70 %. De l'avis de l'expert, celle-ci pourrait même être de 100 % dans une activité adaptée à ses compétences. Il estimait donc la CT à 100 %, sans diminution de rendement. S'agissant de l'évolution de cette CT au fil du temps, l'expert estimait qu'elle devrait être a priori stationnaire : il n'existait aucun élément susceptible de suggérer une aggravation potentielle. S'agissant de la CT dans une activité adaptée, soit toute activité adaptée à ses compétences et à sa motivation, la CT serait de façon durable de 100 % sans limitation de rendement. Quant aux mesures médicales et thérapies susceptibles d'avoir un effet sur la CT, l'expert indiquait que l'assuré bénéficiait d'une prise en charge dans les règles de l'art. Quant aux activités de la vie quotidienne, l'expertisé n'avait aucune difficulté psychique qui puisse altérer la réalisation de tous les champs du quotidien, que ce soit l'alimentation, l'entretien du logement, les achats, les courses, la lessive etc. Il avait de bonnes relations avec ses enfants. Selon ses déclarations, l'assuré gérait son administration. Les conclusions de ce rapport sont claires, exemptes de contradictions, emportant la conviction, de sorte qu'à la forme déjà, ce rapport peut se voir conférer une pleine valeur probante.

20.    S'agissant des critiques formulées par le recourant, on ne saurait le suivre lorsqu'il prétend que le SMR, plutôt que de retenir les conclusions des experts précédemment désignés, exerçant aux HUG, aurait préféré désigner un nouvel expert (Dr K______) « probablement plus à même d'aller dans son sens ». C'est en d'autres termes suggérer que ce médecin n'aurait pas présenté toute garantie d'impartialité ou d'indépendance, ce qui en l'espèce ne repose sur aucun élément figurant au dossier, susceptible de susciter le moindre doute à ce sujet. Au demeurant, le recourant n'a jamais prétendu que le long entretien qu'il a eu avec le Dr K______ se serait mal déroulé, ni que le contenu, en particulier des éléments anamnestiques consignés dans ce rapport d'expertise et résultant évidemment des informations qu'il avait données à l'expert, ne seraient pas conformes à ce qu'il a déclaré.

Au contraire, les raisons pour lesquelles le SMR a nié la valeur probante de l'expertise du Dr H______ du 3 décembre 2018 et de son complément du 6 mars 2019 (avis SMR des 26 février et 23 avril 2019) étaient fondées, et le rapport d'expertise du Dr K______ l'a démontré de manière convaincante.

21.    Dans son recours, l'assuré remarque que les médecins traitants et les experts des HUG ont évalué la CT à 0 % (nulle) y compris dans une activité adaptée qui risquerait même d'aggraver les différents symptômes psychiatriques. Il ressortait du dossier AI que « faute d'avoir essayé (sic!), les tentatives d'emploi de l'assuré ont toutes été des échecs. À aucun moment, la motivation de l'assuré n'a été remise en cause, ni sa volonté de réinsertion. ». Il reproche au Dr K______ de ne pas avoir abordé cette problématique et les effets négatifs que pourrait avoir la reprise ou la tentative de reprise d'une activité lucrative sur les problématiques psychiatriques de l'assuré. Or cet expert n'a manifestement pas ignoré l'expertise de ses confrères des HUG, y voyant, à l'instar du SMR, de nombreuses contradictions – dont il a donné certains exemples non exhaustifs -, des lacunes, l'absence de constat objectif, le Dr H______ ne se reposant que sur les plaintes et déclarations de l'expertisé. Le Dr K______ a toutefois retenu que la CT dans une activité adaptée, soit toute activité adaptée à ses compétences et à sa motivation, serait de façon durable de 100 % sans limitation de rendement. C'est en d'autres termes ne pas partager l'opinion des précédents experts, cette conclusion devant être comprise par rapport à l'ensemble de la discussion du dossier et du cas de l'expertisé par l'expert, au contraire d'une affirmation lapidaire et non motivée.

22.    Le recourant semble reprocher à l'expert de ne pas avoir relevé non plus la présence d'une problématique en lien avec le syndrome d'Asperger, pourtant relevée par la Dresse L______ : et pour cause, puisque ce syndrome a, pour la première fois, été évoqué par la nouvelle psychiatre traitante (dont le mandat a débuté en 2020, après que l'expert ait déposé son rapport).

Ceci dit, et quelles que soient les compétences de la Dresse L______ - que la chambre de céans ne remet pas en cause -, il est tout de même assez surprenant d'imaginer qu'aucun de ses confrères, psychiatres traitants ayant suivi le recourant pendant de nombreuses années (Dresse P______ des HUG de 1996 à 2001, Dresse C______, de 2001 à fin 2019), ou ayant connu du dossier et examiné le patient dans le cadre des expertises successives mises en place par l'OAI (Dresse E______ en 2008, Dr H______ et Dresse I______ en 2018, et Dr K______ en 2019), n'aient jamais évoqué un tel diagnostic, avant qu'elle n'y songe, très rapidement après sa prise en charge du patient, succédant à la Dresse C______.

Cela étant, selon la jurisprudence rappelée précédemment, la rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l’état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 134 V 131 consid. 3; ATF 130 V 343 consid. 3.5). Il n'y a toutefois pas matière à révision lorsque les circonstances sont demeurées inchangées et que le motif de la suppression ou de la diminution de la rente réside uniquement dans une nouvelle appréciation du cas (ATF 141 V 9 consid. 2.3; ATF 112 V 371 consid. 2b; ATF 112 V 387 consid. 1b).

En l'espèce, la question litigieuse est celle de savoir si l'état de santé du recourant s'est aggravé depuis qu'a été rendue la dernière décision en force de l'OAI (4 février 2009), et surtout de savoir si, dans l'hypothèse où cette aggravation devait être avérée, elle avait une incidence sur la CT résiduelle du recourant. Il convient en effet de garder à l'esprit que l'invalidité au sens du droit des assurances sociales est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1). Plus importantes que le diagnostic lui-même, ce sont ici les conséquences concrètes qui en découlent par rapport à la CT de l'intéressé.

23.    La Dresse L______ a établi plusieurs rapports successifs, après un premier certificat, très bref, - le seul antérieur à la décision entreprise - qui se limitait à l'énumération de diagnostics complémentaires à ceux déjà évoqués par la précédente psychiatre traitante du recourant, et a finalement été entendue par la chambre de céans : il s'agit de déterminer la valeur probante de ses avis.

a. Il ressort tout d'abord du bref certificat de la Dresse L______, à l'intention de Me STICHER du 24 février 2020, que cette spécialiste avait repris le dossier de ce patient à fin 2019 et qu'au niveau diagnostic, elle rajoutait le « syndrome d'Asperger et + (asociabilité) et la modification durable de la personnalité des suites à un vécu de catastrophe ». L'avis du SMR du 10 mars 2020, au sujet dudit document – sur lequel s'est fondé l'intimé pour rendre sa décision formelle, apparaissait pertinent : selon le SMR, l'avis de cette psychiatre était dépourvu d'éléments médicaux objectivant une modification significative de l'état de santé de l'assuré, en l'absence d'un status psychiatrique. Il est en effet largement insuffisant de se limiter à énoncer des diagnostics sans la moindre justification, basée notamment sur une anamnèse et un status précis pour remettre en cause un avis d'expert, voire pour se prévaloir de cette énumération pour prétendre ensuite que l'OAI aurait basé sa décision sur une instruction incomplète, violant ainsi son devoir d'instruire d'office. Le simple énoncé d'un diagnostic (ici psychiatrique) n'est pas en soi suffisant, - ni d'ailleurs nécessaire -, pour que l'on doive présumer de son caractère incapacitant, et encore moins que le seul énoncé d'un diagnostic, qui plus est jamais évoqué dans le dossier médical jusque-là, laisse présumer d'une aggravation de l'état de santé d'un patient; l'intimé ne saurait se voir reprocher de ne pas avoir poursuivi ses investigations, sur la seule base d'un tel document, avant d'avoir rendu la décision entreprise, dès lors qu'il l'a fait en se fondant sur un dossier médical comportant notamment plusieurs expertises et divers avis médicaux (médecins traitants, SMR ), la dernière expertise étant considérée comme probante et du reste pas remise en cause par des éléments objectifs laissant supposer que l'expert se serait trompé ou aurait omis des éléments essentiels faisant douter de sa crédibilité.

b. À l'appui de son recours, l'assuré a produit un deuxième rapport de la Dresse L______ du 22 avril 2020.

La Dresse L______ y retient les diagnostics de modification durable de la personnalité suite à vécu de catastrophe et de syndrome d'Asperger, ne faisant que les énoncer sans description anamnestique, status ni motivation selon des critères diagnostiques :

-          Modification durable de la personnalité suite à vécu de catastrophe (F62.0)

Selon la CIM-10, un tel diagnostic présente les caractéristiques suivantes : modification durable de la personnalité, persistant au moins deux ans, à la suite de l'exposition à un facteur de stress catastrophique. Le facteur de stress doit être d'une intensité telle qu'il n'est pas nécessaire de se référer à une vulnérabilité personnelle pour expliquer son effet profond sur la personnalité. Le trouble se caractérise par une attitude hostile ou méfiante envers le monde, un retrait social, des sentiments de vide ou de désespoir, par l'impression permanente d'être « sous tension » comme si on était constamment menacé et par un détachement. Un état de stress post-traumatique (F43.1) peut précéder ce type de modification de la personnalité. Les exemples d'expériences catastrophiques donnés par cet ouvrage sont : une captivité prolongée avec risque d'être tué à tout moment; désastres; expériences de camp de concentration; exposition prolongée à des situations représentant un danger vital, comme le fait d'être victime du terrorisme; torture. Il est encore précisé que ce diagnostic exclut celui d'état de stress post-traumatique (F43.1).

Force est de constater que l'expertise du Dr K______ a clairement abordé et analysé la situation du recourant par rapport à un tel diagnostic qu'il n'a pas retenu, lui préférant celui de personnalité avec des traits anxieux et dépendants. Loin de démontrer en quoi les conséquences de circonstances catastrophiques (au sens de cette définition) seraient ici réunies, la psychiatre traitante se contente d'évoquer « un vécu traumatique sur une longue période dans son pays d'origine le Cambodge », ce qui est nettement insuffisant pour démontrer l'existence d'un tel diagnostic : en effet, à la suivre, - et bien sûr, sans banaliser les événements traumatisants qu'a pu vivre le recourant dans son adolescence -, toute personne qui aurait vécu les mêmes événements que le recourant, ou des événements analogues, devrait pour cette simple et unique raison, répondre au diagnostic de modification durable de la personnalité. Or, ces événements étaient connus, dès la première demande de prestations, - l'experte psychiatre de 2008 les avait clairement relevés et dûment appréciés, avant de ne pas retenir ce diagnostic. Ils ont également été pris en compte dans le cadre de l'instruction de la demande de 2017, aboutissant à la conclusion qu'aucune aggravation de l'état de santé du recourant n'était survenue depuis la dernière décision entrée en force. Or, la Dresse L______ n'évoque, dans ce rapport médical, aucune aggravation de l'état de santé, et a fortiori, n'en indique ni les causes ni le moment;

-          syndrome d'Asperger (F84.5)

Selon la CIM-10, un tel diagnostic présente les caractéristiques suivantes : trouble de validité nosologique incertaine, caractérisé par une altération qualitative des interactions sociales réciproques, semblable à celle observée dans l'autisme, associée à un répertoire d'intérêts et d'activités restreint, stéréotypé et répétitif. Il se différencie de l'autisme essentiellement par le fait qu'il ne s'accompagne pas d'un déficit ou trouble du langage, ou du développement cognitif. Les sujets présentant ce trouble sont habituellement très malhabiles. Les anomalies persistent souvent à l'adolescence et à l'âge adulte. Le trouble s'accompagne parfois d'épisodes psychotiques au début de l'âge adulte.

La Dresse L______ se borne à énumérer certaines caractéristiques de la définition qui précède, en évoque d'autres qui ne sont pas caractéristiques de cette affection, voire apparemment contradictoires, en prétendant, sans le démontrer, qu'elles seraient présentes chez son patient, sans en illustrer la réalité, ne s'appuyant que sur quelques rares éléments anamnestiques (déjà connus et appréciés par les précédents experts et autres médecins ayant eu à se prononcer sur ce cas avant elle) : elle insiste sur le fait que malgré ses compétences professionnelles, son patient n'avait jamais pu garder une place de travail au-delà de quelques semaines d'essai. En cela, elle n'apporte aucun élément qui n'ait été connu et apprécié de manière convaincante, notamment par le Dr K______, à l'instar de la manière de s'exprimer de son patient, qui est loin d'être caractéristique de la définition de ce syndrome.

Selon le service médical de l'AI, et à sa suite l'intimé, ce rapport n'apportait aucun élément objectif permettant de s'éloigner des conclusions de l'expertise motivée du Dr K______ du 26 décembre 2019. La chambre de céans parvient à une conclusion identique.

c. Au vu de l'appréciation de l'intimé dans sa réponse au recours, le recourant a produit à l'appui de sa réplique un nouveau rapport de la Dresse L______, du 3 juin 2020 : selon le recourant, sa psychiatre y confirmait que sa personnalité relèverait de l'autisme, justifiant de manière détaillée son diagnostic, éléments qui n'auraient pourtant jamais été pris en compte par l'OAI. L'intimé observait que la psychiatre traitante reprenait dans ce rapport l'anamnèse de l'enfance de son patient. Elle retenait les diagnostics de trouble dépressif récurrent et de modification de la personnalité après expérience de catastrophe, troubles du développement psychologique, séquelles d'un trouble envahissant du développement, sans précision, et décrivait que l'assuré n'avait jamais réussi à maintenir une activité professionnelle; il présentait des difficultés d'interaction et de communication sociale. Elle estimait que l'incapacité de travail était totale et définitive. Contrairement à ce qu'allègue le recourant dans sa réplique du 10 juin 2020, sa psychiatre ne justifie pas les diagnostics qu'elle retient; elle rajoute d'ailleurs, en ne faisant que le mentionner, un diagnostic supplémentaire : trouble du développement psychologique, soit séquelles d'un trouble envahissant du développement, sans précision (F84.9). L'histoire de l'enfance de l'assuré au Cambodge était connue notamment des experts de 2008 et du Dr K______, en 2020. Ils avaient décrit que l'assuré avait été témoin de violences dans son pays d'origine; toutefois, ils ne reconnaissaient pas le diagnostic de modification de la personnalité après expérience de catastrophe : l'assuré ne présentait pas de critères pour un trouble de la personnalité; en effet, il avait pu s'adapter à un nouveau pays, apprendre une nouvelle langue, obtenir un CFC, se marier et avoir des enfants. De plus, comme l'avait argumenté le dernier expert, l'assuré ne décrivait pas de cauchemars envahissants, ne présentait pas de flash-backs durant la journée, n'effectuait pas d'évitement de situations, et retournait d'ailleurs régulièrement au Cambodge et ne présentait pas un état d'alerte constant ou transitoire. S'agissant du trouble dépressif récurrent, ce diagnostic avait été retenu par le Dr K______, qu'il évaluait d'intensité légère. La psychiatre traitante ne précisait pas le degré de gravité de ce trouble; elle ne parlait pas pour une aggravation de l'état de santé de l'assuré depuis l'expertise de janvier 2020, ni depuis celle de 2008. Le SMR relève d'ailleurs au sujet du trouble envahissant du développement, que la psychiatre traitante l'évoque en se basant sur l'anamnèse personnelle et familiale, ainsi que sur la présence de difficultés d'interaction et de communication sociale. Si l'on se référait à la CIM-10, un trouble envahissant du développement se caractérise par des altérations qualitatives des interactions sociales réciproques et des modalités de communication, et un répertoire d'intérêts et d'activités restreint, stéréotypé et répétitif; ces anomalies infiltraient l'ensemble du fonctionnement du sujet, quelles que soient les situations. Dans la plupart des cas, le développement est anormal dès la petite enfance, avant cinq ans. Or, chez cet assuré, il n'avait pas été mis en évidence la présence d'activités restreintes, répétitives et stéréotypées, ni de difficultés d'interactions et de communication sociale. Malgré l'histoire difficile de son enfance, l'assuré avait réussi à apprendre une nouvelle langue, à obtenir un CFC en électricité puis en électronique, avait travaillé quelques années, s'était marié deux fois, et il avait une nouvelle fiancée au Cambodge. Il avait déclaré avoir plusieurs amis cambodgiens, jouer avec eux fréquemment au tennis et au ping-pong; ce qui allait à l'encontre de troubles des relations sociales. En décembre 2018, lors de l'expertise psychiatrique, il déclarait aussi voir régulièrement ses amis. Par ailleurs, il avait contribué à l'éducation de ses deux filles (qui faisaient des études supérieures), alors qu'il était divorcé. Il se rendait régulièrement au Cambodge; avec un ami, il avait eu un projet immobilier dans ce pays, il y a quelques années, et réfléchissait à un retour dans son pays d'origine. Tous ces éléments ne parlaient pas en faveur d'un trouble envahissant du développement : les interactions sociales étaient présentes (filles, fiancée); il avait des centres d'intérêt (sport, intérêts scientifiques); les activités n'étaient pas décrites comme répétitives et stéréotypées. Ainsi, faut-il convenir que ce rapport n'emporte pas la conviction, au-delà du fait qu'il ne peut se voir reconnaître une pleine valeur probante. Il ne saurait remettre en cause les conclusions du rapport d'expertise du Dr K______.

d. Le recourant a encore produit un nouveau rapport de sa psychiatre traitante du 9 juillet 2020. La Dresse L______ précise que, « sans vouloir remettre en cause la qualité des expertises de ses collègues », elle soulignait toutefois la difficulté, voire l'incapacité du patient à se faire entendre et comprendre : elle évoquait à cet égard les problèmes de communication, qu'il avait également eus dans sa langue maternelle, avec sa première femme par exemple, et qui étaient source de malentendus, conflits et de violences conjugales envers lui de la part de son épouse. Elle y faisait valoir que les points qu'elle souhaitait reprendre du point de vue psychiatrique relevaient de la temporalité des événements et aussi de la relecture anamnestique et clinique psychiatrique de son dossier OAI, dans lequel tous les éléments à disposition figuraient déjà. Elle dit ne pas vouloir revenir sur les éléments diagnostiques, ni spécialement sur les symptômes toujours présents comme les cauchemars, à thème de torture, de poursuite et de menaces à son encontre, les flash-backs, comme des images, par récit interposé, de sa mère encore en vie avec un sac en plastique par-dessus la tête, ou les scènes violentes de torture dont il avait été témoin dans une maison de son village aménagée à cet effet. Il avait voulu revoir cette maison lors de ses voyages au Cambodge et s'était senti très mal, après. Il retournait au Cambodge pour revoir ses tantes paternelle et maternelle, mais aussi pour retourner de temps en temps au village, pour bénévolement enseigner le français et l'informatique aux enfants pauvres, tout comme ses parents avaient enseigné, dans ce même village, des décennies en arrière, avant leur déportation. Ces symptômes post-traumatiques, existant encore en 2018 (expertise psychiatrique des médecins des HUG) se retrouvaient également en 2020, selon son rapport précédent. La question de la temporalité de cette pathologie post-traumatique, en termes de chronicisation et d'évolution symptomatique, greffée sur une fragilité psychologique de base, démontrait, selon elle, que les capacités restantes ne pouvaient pas s'améliorer avec l'âge en vue d'un retour vers une CT, mais s'appauvrissaient au contraire, et se cristallisaient autour du traumatisme, rendant sa CT nulle. Les symptômes dépressifs étaient récurrents, chroniques, fluctuants; l'intensité actuelle n'était pas suffisante pour permettre à elle seule de décider d'une activité lucrative ou d'un retour potentiel sur le marché du travail, constatation confirmée par l'expertise du Dr K______, à fin 2019. Une activité adaptée, selon l'expertise de 2008, même si révolue depuis, aurait pu être tentée à l'époque, en milieu protégé probablement, si les éléments évolutifs avaient déjà été connus « (cela n'était pas possible !) », et surtout après une reconnaissance par l'AI de son invalidité du point de vue psychiatrique. En effet, les éléments cliniques psychiatriques étaient tous présents au dossier de l'OAI. Les difficultés du patient à communiquer avaient eu des répercussions sur son parcours de vie et professionnel. En conclusion, la psychiatre considérait qu'une réévaluation de la reconnaissance à long terme de son invalidité était nécessaire et indispensable, à la lumière de toutes les preuves médicales et psychiatriques de son dossier OAI, depuis 2006. Le SMR estimait que ce rapport n'amenait pas de nouvel élément médical objectif : l'anamnèse de l'assuré était connue de l'expert, qui avait apprécié la CT résiduelle de l'assuré en se basant sur les diagnostics, mais surtout sur les indicateurs standards de la jurisprudence, comme détaillé dans les précédents avis du SMR. Le fait de pouvoir retourner dans son pays, et surtout dans son village dans lequel il avait vécu des choses difficiles, et d'enseigner aux enfants, comme ses parents le faisaient, démontrait des capacités d'adaptation bien présentes chez cet assuré. De l'avis de la chambre de céans, force est de constater que la psychiatre traitante semble proposer une lecture différente du dossier de son patient, sans sérieusement apporter d'éléments objectifs susceptibles de remettre en cause les conclusions du Dr K______; elle ne met en évidence aucun élément qui aurait été ignoré de cet expert, susceptible de susciter un doute quant à la fiabilité de ses conclusions. Au vu du parcours du recourant en Suisse, des diverses formations qu'il a pu suivre, et des certifications qu'il a pu obtenir, on ne saurait attribuer à une cause médicale le fait qu'il n'a guère pu rester à long terme dans un emploi. Les causes sont bien plutôt à rechercher dans des motifs et facteurs psychosociaux ou socioculturels; or, ceux-ci, et leur rôle en matière d'invalidité, ne figurent pas au nombre des atteintes à la santé, susceptibles d'entraîner une incapacité de gain au sens de l'art. 4 al. 1 LAI. Il a été rappelé ci-dessus (ad consid. 16) les conditions nécessaires pour qu'une invalidité soit reconnue, lorsqu'interviennent des facteurs psychosociaux et socioculturels et imprègnent l'anamnèse : plus ceux-ci apparaissent au premier plan, plus il est essentiel que le diagnostic médical précise s'il y a atteinte à la santé psychique qui équivaut à une maladie. Ainsi, il ne suffit pas que le tableau clinique soit constitué d'atteintes qui relèvent de facteurs socioculturels; il faut au contraire que le tableau clinique comporte d'autres éléments pertinents au plan psychiatrique (ATF 127 V 294 consid. 5a in fine). Tel n'est pas le cas en l'espèce.

e. La chambre de céans a enfin entendu la Dresse L______ : sa déclaration intégrale est consignée ci-dessus en fait ad ch. 28, auquel on se rapportera. En substance, elle indique avoir revu récemment la Dresse C______, qui avait été la psychiatre du recourant avant elle, pendant une quinzaine d'années : cette dernière insistait sur ce qu'elle écrivait dans ses deux rapports de 2017 notamment, où elle décrivait ce qui l'avait amenée à considérer que M. A______ était totalement incapable de travailler dans une activité du marché du travail. Or, comme on l'a vu, la Dresse C______ n'a jamais justifié sérieusement ni de manière convaincante les raisons médicales pour lesquelles le recourant serait totalement incapable de travailler dans une activité du marché du travail, à l'instar de ce qui vient d'être rappelé en relation avec le rapport de la Dresse L______ du 9 juillet 2020.

Cette dernière relève ensuite que lorsqu'elle a repris le mandat thérapeutique de la Dresse C______, elle avait trouvé un patient assez bien compensé sur le plan psychiatrique. Il lui avait toutefois fallu creuser pour cerner sa problématique, évoquant l'instauration nécessaire d'un climat de confiance dans un contexte où le patient avait passablement de difficultés à communiquer avec les autres et à parler de lui-même. Elle dit avoir observé que ce n'est que dans des moments de surcharge émotionnelle qu'il arrive à parler de son vécu d'une façon générale et au Cambodge en particulier. Elle avait constaté une différence significative entre la période précédent son arrivée en Suisse et son vécu depuis qu'il vit dans ce pays. La chambre de céans conçoit aisément que le passé du recourant au Cambodge soit plus difficile à évoquer pour lui que la période vécue en Suisse, depuis lors. Mais d'un autre côté, le fait que la psychiatre ait dû « creuser » pour parvenir à faire parler son patient de cette période, tend plutôt à conforter les observations du Dr K______ lorsqu'il analysait la problématique d'un syndrome post-traumatique qu'il n'a finalement pas retenu. La psychiatre traitante mettait en avant le mode de communication de son patient avec les autres, indiquant que dans l'interaction il est capable de donner le change. Les explications qu'elle donne ne permettent toutefois pas de remettre en cause les propres constatations de l'expert : les éléments qu'il a rapportés dans une anamnèse très complète – bien plus complète d'ailleurs que celles qui figurent dans l'ensemble des documents médicaux recueillis par l'intimé avant cette dernière expertise -, montrent que cet expert a pu réunir de très nombreux éléments qui lui ont permis de se forger une opinion solide et convaincante : il n'a jamais été allégué par le recourant que les explications données au Dr K______ et consignées dans son rapport ne seraient pas conformes à ce qu'il lui a déclaré. Et la justification qu'en donne la psychiatre pour l'expliquer – soit que dans ses interactions avec les autres son patient serait capable de « donner le change » - montre à tout le moins qu'il n'a pas autant de difficultés à communiquer avec autrui que sa thérapeute le prétend pour expliquer ce qu'elle apprécie comme l'illustration d'un syndrome d'Asperger; (de nombreux exemples l'illustrent également notamment dans le rapport du Dr K______).

Invitée par le conseil du recourant à se prononcer sur un tentamen du recourant dans le courant des années 85-86, elle n'avait pas en tête le fait qu'il en ait pu lui en parler, mais ne pouvait pas l'exclure. Elle expliquait que dans le contexte de ce patient, ce genre d'épisode et de passage à l'acte auto-agressif se retrouve souvent chez des sujets qui ont vécu des traumatismes de guerre et encore actuellement malgré tout le travail qui a été fait sur le plan psychiatrique, le risque de réitération n'était pas nul. Partant de l'affirmation que son patient ne parle pas nécessairement de ce genre d'événement, et que l'on ne trouverait au dossier aucun rapport médical ou rapport d'expertise où il en serait question, elle l'explique à la fois par la notion d' « enfouissement », mais aussi « comme le suggérait le conseil du recourant », en relation avec le sentiment de honte qu'il décrivait lors de son audition par la chambre de céans. Elle se trompait toutefois, car contrairement à ce que suggérait le conseil du recourant, l'existence de ce tentamen avait bel et bien été évoquée et prise en compte notamment par l'experte de 2008 qui le mentionnait expressément dans son rapport; il ne s'agissait donc pas d'un fait nouveau dont les précédents experts n'auraient pas tenu compte dans leurs appréciations. Répondant dès lors à la question suivante du conseil du recourant, - à savoir si la connaissance d'un événement comme le tentamen dont il a été question était un élément important pour pouvoir se prononcer sur la CT actuelle du patient -, elle affirme que cela pouvait en effet avoir une importance, dans la mesure où il existerait selon elle un risque que si l'on poussait l'intéressé au-delà de ses limites, il serait susceptible de donner comme réponse une réaction du même type, précisant que ceci pourrait se concevoir aussi bien dans un milieu protégé comme celui des EPI, que dans un contexte du monde du travail ordinaire. Cet argument ne saurait être suivi : il s'agit d'une simple conjecture. Il ressort du dossier que cet événement apparaissait en effet être isolé, remontant au début du séjour du recourant en Suisse, il y avait 35 ans; or, depuis lors, de nombreux événements étaient survenus dans sa vie personnelle et professionnelle, qui permettent de penser, au degré de la vraisemblance prépondérante, que le recourant, dont aucun médecin n'a depuis lors retenu une tendance suicidaire, ne se retrouve ni ne se retrouvera dans un contexte comparable faisant redouter un nouveau passage à l'acte. Fonder sur une telle hypothèse une incapacité totale de travailler, ni dans le marché du travail ordinaire, ni dans un milieu protégé, n'est pas sérieusement crédible.

En somme, l'audition de la psychiatre traitante n'a apporté aucun élément objectif qui n'aurait pas été connu à la lecture du dossier de l'OAI, ni pris en compte par les experts et en particulier par le Dr K______, n'en déplaise au recourant dans ses dernières écritures. On comprend certes que la psychiatre traitante, dans le rapport de confiance qui l'unit à son patient, dans le cadre de son mandat thérapeutique, se soit montrée encline à prendre parti pour son patient, ce qui dans ce contexte est tout à son honneur; il n'empêche que selon la jurisprudence, le juge doit en tenir compte dans son appréciation (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc). Ceci dit, et selon le Tribunal fédéral, s'il est vrai que la relation particulière de confiance unissant un patient et son médecin traitant peut influencer l'objectivité ou l'impartialité de celui-ci (cf. ATF 125 V 351 consid. 3a 52; ATF 122 V 157 consid. 1c et les références), ces relations ne justifient cependant pas en elles-mêmes l'éviction de tous les avis émanant des médecins traitants. Encore faut-il démontrer l'existence d'éléments pouvant jeter un doute sur la valeur probante du rapport du médecin concerné et, par conséquent, la violation du principe mentionné (arrêt du Tribunal fédéral 9C_973/2011 du 4 mai 2012 consid. 3.2.1). En l'espèce, au vu de ce qui a été dit au sujet de chacun des rapports de la Dresse L______ et de ses déclarations devant la chambre de céans, la valeur probante de l'avis/des avis de la psychiatre traitante doit d'une part être très largement relativisée : on constate en effet qu'après chaque prise de position de l'intimé, respectivement du SMR, en relation avec l'un de ses rapports censé être plus pertinent que le précédent, la Dresse L______, sollicitée par le recourant, a, à chaque fois, tenté de trouver des arguments plus convaincants dans un nouveau rapport au point même d'évoquer de nouveaux diagnostics (voir notamment son rapport du 3 juin 2020); d'autre part et surtout, la psychiatre traitante n'a apporté aucune preuve objective de ce que l'expert K______ aurait ignoré un ou plusieurs éléments pertinents susceptibles de susciter un doute sur le caractère probant de ses conclusions.

24.    Dans ses dernières écritures, le recourant, insistant en particulier sur la fameuse tentative de suicide mentionnée dans l'expertise de 2008, alors qu'elle ne l'était plus dans les expertises les plus récentes, a estimé, au vu des déclarations de la psychiatre traitante et de la dernière détermination du SMR, qu'il apparaissait indispensable de procéder à une nouvelle expertise. Il faisait valoir que les conclusions du dernier expert (Dr K______) étant diamétralement opposées à celles, tant des médecins traitants que des experts universitaires, la chambre de céans ne pourrait, entre deux avis d'experts diamétralement opposés, préférer un avis plutôt que l'autre, et n'aurait en conséquence pas d'autre choix que de désigner un expert, voire de retourner la cause à l'intimé pour complément d'instruction en ordonnant notamment une nouvelle expertise. Le recourant se trompe : il ne s'agit pas d'opposer les seuls avis contradictoires du Dr K______ et des précédents experts (des HUG), mais d'avoir à l'esprit que l'OAI, suivant l'avis de son service médical, a ordonné une nouvelle expertise (confiée au Dr K______) compte tenu notamment des contradictions existantes entre l'expert psychiatre de 2008 et celui des experts des HUG de 2018. Au vu de ce qui précède, contrairement à ce que le recourant semble croire, la chambre de céans, après avoir soigneusement étudié et apprécié les différents avis (experts, médecins traitants et SMR), et après avoir indiqué les raisons pour lesquelles elle estimait devoir se fonder sur l'avis du dernier expert plutôt que sur celui des précédents (HUG), ainsi que, comme on l'a vu, sur celui de la psychiatre traitante actuelle, considère qu'un avis d'expert psychiatre supplémentaire, ou un complément d'instruction sous la forme d'une nouvelle expertise psychiatrique qui serait diligentée par l'intimé dans le cadre d'un retour du dossier, ne se justifie pas.

25.    S'agissant enfin de l'aspect somatique, le recourant a produit, en annexe à son recours, un bref certificat médical « à qui de droit » du Dr G______, datant du 18 juillet 2011, aux termes duquel il estimait que son patient devrait bénéficier d'une place de travail où le port de charges devrait être réduit à 5 kg, pour des raisons de santé. Ce document était destiné, à l'époque, aux organes d'exécution de la loi sur l'assurance-chômage (déjà connu de l'intimé, produit par l'OCE en réponse à une interrogation de l'OAI – Doc 119 – p. 438 dossier OAI). Or le recourant, respectivement son conseil, tirait argument de ce document pour faire valoir qu'en sus d'affections psychiatriques, il souffrait également de problèmes somatiques, de sorte que, selon lui, l'OAI aurait dû solliciter des compléments d'information du généraliste traitant également, notamment sur ses limitations somatiques. Il estimait ainsi que l'instruction du dossier par l'intimé était insuffisante et violerait l'art. 46 LPGA. Il en tirera ensuite argument pour solliciter la mise en œuvre d'une expertise pluridisciplinaire, au motif que les problématiques somatiques et psychiques prises ensemble influenceraient de manière négative sa CT. Cette argumentation ne résiste pas à l'examen : si le conseil du recourant a en effet reproché à l'OAI, dans son acte de recours, de ne lui avoir communiqué qu'un dossier partiel, soit uniquement les documents qui concernaient la deuxième demande de prestations, (dès 2017), à l'exclusion de ceux relatifs à la première demande, il ne pouvait toutefois ignorer qu'à l'appui de sa nouvelle demande de prestations de 2017, il avait d'une part produit un rapport médical du 30 mai 2017 de sa psychiatre traitante : cette dernière y évoquait certes pour l'essentiel la problématique psychique, relevant que la pathologie de son patient rendait aujourd'hui son activité professionnelle difficile, en raison de la peine à se concentrer et de sa sensibilité importante au stress; mais elle constatait aussi que son patient serait donc « physiquement (sous réserve d'épisodes de tachycardie ayant peut-être une origine émotionnelle) et intellectuellement capable d'activité. Mais pas émotionnellement. » -. Mais il avait d'autre part produit une attestation à qui de droit du Dr G______, du 14 juin 2017, aux termes de laquelle le généraliste traitant indiquait : « je me permets d'appuyer la lettre de ma consœur (Dr C______) concernant la situation de Monsieur (le recourant). Les constatations de celle-ci sont exactes et son analyse est correcte. Le patient est actuellement dans l'incapacité totale de travailler pour des raisons psychologiques ».

Mais il y a plus encore : faisant grief à l'intimé de n'avoir instruit que l'aspect psychique, alors qu'il aurait, selon lui, dû interpeller le médecin traitant somatique, le recourant passait sous silence le rapport établi par le Dr G______ le 13 novembre 2017 : en substance, il retenait, sur le plan somatique, des troubles incapacitants (somatisations variées, hyperactivité bronchique, syndrome rhino-broncho-asthmatiforme occasionnel, réaction asthmatique aux vapeurs de soudure depuis 2002 [déjà connus lors de la première demande de prestations]) et, sans effet sur la CT (troubles cardiaques fonctionnels - tachycardie et hypotension (Dr Q______) -, diabète NIR depuis 2011, hypercholestérolémie, troubles statiques lombaires, hypertrophie des glandes mammaires ); mais le Dr G______ considérait que la CT dans l'activité habituelle était nulle pour des raisons psychiques (uniquement); il considérait que les limitations d'ordre somatique (asthme et fragilité émotionnelle) pouvaient être réduites par un suivi psychiatrique; l'état actuel du patient était relativement stable depuis qu'il le connaissait, mais probablement qu'il sous-estimait la composante psychique. Subjectivement, le patient indiquait une asthénie, une thymie triste, et des douleurs lombaires occasionnelles. Le SMR s'était d'ailleurs expressément prononcé sur ce rapport, dans son avis du 24 juillet 2018. Ce service médical avait constaté, en résumé, que les documents médicaux versés au dossier mettaient en avant une situation stable sur le plan somatique. Il estimait en revanche que, sur le plan psychique, il y avait lieu alors, et au vu des éléments apportés par la psychiatre traitante, pour les motifs qu'il avait retenus, de procéder à une expertise psychiatrique, afin de déterminer si l'assuré avait présenté une aggravation significative de son état de santé psychique depuis l'expertise de 2008. Cet avis avait débouché sur la première expertise psychiatrique confiée aux HUG (Drs H______ et I______).

Enfin, le rapport complémentaire du généraliste traitant, établi en cours de procédure à la demande du recourant (courrier du Dr G______ à Me STICHER du 1er juin 2020), ne dit pas autre chose, en définitive : pour lui, la problématique principale résidait sur le plan psychique. Il revenait du reste sur l'attestation qu'il avait établie à l'époque (rapport AI – recte : à l'attention de l'OCE) dans laquelle il indiquait que le patient avait de la difficulté à porter des charges de plus de 5 kg. Il expliquait à ce sujet que son patient travaillait à l'époque chez R______ et devait porter des déclencheurs électriques de moins de 10 kg en effectuant des mouvements répétitifs, ce travail ayant occasionné des tendinites des coudes très invalidantes et occasionnant de l'absentéisme. Il précisait toutefois qu'actuellement, le patient était capable de porter des objets de plus de 5 kg, mais pas de manière répétée. Il ajoutait que le patient se plaignait régulièrement d'épisodes de tachycardie occasionnant un sentiment « d'engourdissement dans sa tête » avec un sentiment de perte de connaissance. Il était toutefois suivi régulièrement par un cardiologue, qui n'avait jamais mis en évidence d'arythmie maligne; il observait enfin que le diabète était stable et bien réglé.

Au final, et contrairement à ce que soutient le recourant, les atteintes somatiques évoquées dans ce dossier ont bien été prises en compte par l'OAI, et l'on ne peut considérer que l'instruction de l'intimé ait été insuffisante sur ce plan. La décision entreprise retenait que l'état de santé du recourant ne s'était pas aggravé depuis la dernière décision en force, de sorte que sa CT s'élevait toujours à 70 % ce dans toute activité professionnelle confondue. Le généraliste traitant du recourant ne prétend du reste pas le contraire, sur le plan somatique. On relèvera en tant que de besoin que quoi qu'il en soit, la CT fixée à 70 % (respectivement une incapacité de travail de 30 %) tiendrait de toute manière largement compte des questions somatiques, au demeurant au second plan et s'étant plutôt améliorées ces dernières années, de sorte que, sous cet aspect, la décision entreprise n'était pas critiquable; aussi aucune mesure d'instruction complémentaire, notamment sous forme d'expertise judiciaire ou administrative, dans le cadre d'un retour à l'intimé pour complément instruction, ne se justifie.

26.    Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Il convient toutefois de renoncer à la perception d'un émolument, le recourant étant au bénéfice de l'assistance juridique (art. 69 al. 1bis LAI et 13 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]).

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Renonce à percevoir un émolument, dans le sens des considérants.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le