Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/392/2025

ATA/882/2025 du 19.08.2025 ( PROF ) , REJETE

Descripteurs : PERSONNEL INFIRMIER;RETRAIT DE L'AUTORISATION;AUTORISATION D'EXERCER;MESURE DISCIPLINAIRE;DROIT D'ÊTRE ENTENDU;PROPORTIONNALITÉ;PRINCIPE DE LA BONNE FOI;DÉBAT DU TRIBUNAL
Normes : CEDH.6; Cst; Cst; Cst; LS.42
Résumé : Interdiction de pratiquer sous sa propre responsabilité en qualité d'infirmière pour une durée de trois mois en raison d'un vol de CHF 60'000.- commis au domicile de sa patiente. Violation grave
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/392/2025-PROF ATA/882/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 août 2025

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Annette MICUCCI, avocate

contre

DÉPARTEMENT DE LA SANTÉ ET DES MOBILITÉS intimé



EN FAIT

A. a. A______ bénéficie d'une autorisation d'exercer la profession d'infirmière dans le canton de Genève depuis le 26 octobre 2021.

b. Par arrêté du 16 octobre 2023, le département de la santé et des mobilités (ci‑après : le département) l'a autorisée à facturer à la charge de l'assurance obligatoire des soins dans l'exercice de la profession d'infirmière sous sa propre responsabilité.

c. Le 30 novembre 2023, la brigade de répression des cambriolages et vols (ci‑après : BRCV) de la police judicaire a transmis à la direction générale de la santé (ci-après : DGS) un rapport d'informations, duquel il ressortait que A______ était mise en cause dans le cadre d'une affaire de vol d'une enveloppe contenant CHF 60'000.- au domicile d'une de ses patientes gravement atteinte dans sa santé.

Il ressort du rapport établi par la BRCV que les faits remontaient au 6 septembre 2023 et que l'intéressée avait reconnu les faits lors de son audition sans pouvoir pour autant justifier son geste.

d. Le 15 décembre 2023, la DGS a informé A______ avoir été informée par la BRCV des faits susmentionnés et que, dans l'hypothèse où ceux-ci étaient avérés, elle ne remplirait plus l'une des conditions requises pour être autorisée à exercer sa profession d'infirmière dans le canton de Genève, en application de l'art. 12 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les professions de la santé du 30 septembre 2016 (LPSan - RS 811.21), la requérante devant en particulier être digne de confiance pour être autorisée à exercer une profession de la santé. Par ailleurs, les faits étaient susceptibles d'aboutir à l'application des mesures et sanctions prévues aux art. 14 et 19 LPSan, respectivement 125A ss de la loi sur la santé du 7 avril 2006 (LS - K 1 03).

e. Le 31 janvier 2024, A______ a formulé ses observations.

Une procédure pénale demeurait en cours et aucune condamnation n'avait été prononcée à ce stade. Elle avait admis les faits qui lui avaient été reprochés et exprimé ses sincères regrets pour ses agissements. Elle ne tentait pas de minimiser son erreur mais cet épisode constituait un évènement isolé, tout à fait exceptionnel. Elle n'avait par ailleurs pas d'antécédent. Aussi, les faits évoqués ne sauraient totalement remettre en cause l'honnêteté et la fiabilité au sens de l'art. 12 al. 1 let. b LPSan.

Sous l'angle de la proportionnalité, il convenait de prendre en considération que l'infraction porterait sur une tentative de vol et non sur un vol consommé, que la gravité des faits devait être relativisée et que l'intérêt public était sauvegardé. Une décision de retrait de son autorisation aurait des conséquences désastreuses pour les patients qu'elle suivait et porterait grandement atteinte à sa liberté économique.

f. Par ordonnance pénale du 7 février 2024, le Ministère public a déclaré A______ coupable de vol, infraction qui avait été commise à réitérées reprises, soit envers la patiente précitée, B______, mais également envers deux autres plaignants au sein de l'EMS C______ pour des faits remontant à 2020.

g. Le 19 mars 2024, l'office cantonal de la santé (ci-après : OCS) l'a informée de son intention de s'adresser au Ministère public afin de compléter les faits portés à sa connaissance par la BRCV. Il l'invitait à se déterminer à ce sujet dans un délai échéant le 27 mars 2024.

h. Par courrier du 27 mars 2024, A______ a indiqué ne pas avoir « de détermination à faire valoir en l'état ».

i. Le 17 avril 2024, I'OCS a formellement demandé au Ministère public l'accès au dossier pénal de A______.

j. Par ordonnance du 24 avril 2024, le Ministère public a autorisé I'OCS à consulter le dossier de la procédure pénale P/1______/2021.

k. Par arrêt du 30 mai 2024 (ACPR/403/2024), la Chambre pénale de recours de la Cour de justice (ci-après : CPR) a rejeté le recours de A______ formé à l'encontre de cette ordonnance.

l. Le 9 août 2024, I'OCS a obtenu le n'empêche du Tribunal de police et a pu consulter le dossier le 13 août 2024.

m. Par jugement du 19 novembre 2024, faisant suite à l'opposition formée par A______ à l'encontre de l'ordonnance du 7 février 2024, le Tribunal de police l'a l'acquittée des faits concernant les deux autres plaignants et l'a déclarée coupable de vol au sens de l'art. 139 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'agissant des faits concernant B______.

B. a. Par arrêté du 23 décembre 2024, le Conseiller d'État en charge du DSM a prononcé à l'encontre de A______ une interdiction de pratiquer sous sa propre responsabilité en qualité d'infirmière pour une durée de trois mois.

Elle avait reconnu les faits tant dans le cadre de la procédure administrative que dans le cadre de la procédure pénale, concernant le vol d'une enveloppe contenant CHF 60'000.- au domicile d'une patiente, ce qui constituait une violation grave des devoirs professionnels lui incombant. Un tel acte constituait un abus manifeste de la position de soignante exerçant à domicile, au chevet d'une personne dépendante et diminuée physiquement. Un tel acte était incompatible avec le devoir d'exercer la profession d'infirmière avec soin et conscience professionnelle. Aussi, quand bien même elle n'avait pas fait usage de la somme soustraite, il n'en demeurait pas moins que le lien de confiance entre elle et sa patiente avait été irrémédiablement rompu, ce qui avait mis fin à la prise en charge de la patiente concernée par l'intéressée. De plus, en agissant de la sorte, elle avait généré une souffrance supplémentaire à cette patiente, qui se trouvait déjà dans une situation de vulnérabilité, et cela pour des motifs éthiquement condamnables.

b. Par acte mis à la poste le 3 février 2025, A______ a recouru contre cet arrêté auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), concluant à son annulation.

Ainsi qu'il ressortait de la procédure pénale et du jugement du Tribunal de police, elle avait reconnu les faits s'agissant de B______ et restitué l'argent.

Son droit d'être entendue avait été violé en tant que le DSM avait rendu l'arrêté querellé sans l'interpeller afin qu'elle puisse s'exprimer sur la sanction envisagée. Elle n'avait par ailleurs pas été informée qu'il avait consulté le dossier pénal ni qu'il avait l'intention de prononcer une interdiction de pratiquer, soit l'une des mesures disciplinaires les plus strictes. Enfin, entre l'arrêt de la CPR du 3 mai 2024 et l'arrêté, elle n'avait eu aucune nouvelle de la part du DSM. Elle avait été laissée des mois durant sans nouvelles au point qu'elle avait imaginé qu'il avait renoncé au prononcé de toute sanction. Elle n'avait pas non plus été invitée à produire le cas échéant les pièces utiles sur sa situation professionnelle et financière.

Le DSM avait constaté les faits de manière arbitraire en se fondant sur les déclarations des parties plaignantes, lesquelles se révélaient infondées et n'avaient pas été retenues dans le cadre du jugement du Tribunal de police. L'arrêté querellé ne prenait pas en compte le fait qu'elle avait été accusée à tort s'agissant des faits relatifs à l'EMS C______. Enfin, en retenant qu'elle semblait minimiser l'importance de la situation, le DSM retenait à sa charge un argument juridique plaidé dans le cadre du procès pénal (soit la tentative de vol en lieu et place de l'infraction de vol consommée) et qui relevait exclusivement d'une analyse juridique de l'infraction retenue.

Sa liberté économique avait été violée en tant que le DSM n'avait pas procédé à une analyse de sa situation financière.

Enfin, sous l'angle de la proportionnalité, le DSM n'avait pas pris en compte ses observations du 31 janvier 2024 ni les éléments produits dans ce cadre, à savoir les intérêts de ses patients qui nécessitaient des soins réguliers, un lien de confiance particulier et une régularité dans les traitements. Il avait totalement ignoré ses aveux spontanés, ses remords exprimés et son engagement à indemniser intégralement la partie plaignante pour ses frais d'avocat. Enfin, elle avait déjà été punie pénalement.

c. Dans sa réponse du 6 mars 2025, le DSM a conclu au rejet du recours.

A______ avait expressément été invitée à exercer son droit d'être entendue avant le prononcé d'une éventuelle mesure ou sanction, par son courrier du 15 décembre 2023. Il ressortait de ses observations du 31 janvier 2024 qu'elle s'était expressément déterminée sur les faits qui lui étaient reprochés, sur l'éventualité d'une mesure d'interdiction d'exercer et sur la question d'un retrait de l'autorisation. Elle avait par ailleurs été expressément interpellée par l'OCS le 19 mars 2024 s'agissant de sa volonté de consulter le dossier pénal et aucun motif ne s'opposait à cette consultation après l'entrée en force de l'arrêt de la CPR. Enfin, le DSM ne lui avait jamais laissé entendre qu'il avait renoncé à rendre une décision à son encontre, étant relevé que son arrêté avait été rendu quatre mois après qu'il avait pu consulter le dossier pénal.

Il s'était fondé sur les aveux de la recourante dans le cadre de la procédure pénale, laquelle avait reconnu avoir volé l'enveloppe contenant les CHF 60'000.-. Il avait par ailleurs examiné le comportement de la recourante à la lumière des éléments pertinents relevant du droit disciplinaire, qui ne se confondaient pas avec les éléments ressortant de la procédure pénale. Il avait tenu compte du comportement professionnellement répréhensible qui avait conduit à la rupture du lien de confiance avec la patiente et à l'interruption de la relation thérapeutique existante, mais également de son comportement durant la procédure administrative, afin de déterminer la sanction la plus apte à éviter la réalisation future de tels actes. Ce faisant, il avait relevé que la recourante semblait minimiser l'importance de la situation s'agissant des manquements à ses devoirs professionnels.

Il avait pris toute la mesure des conséquences économiques et professionnelles de la sanction prononcée dans la mesure où, dans ses déterminations du 31 janvier 2024, la recourante avait dressé une liste détaillée de ses patients et que dans le cadre de la procédure pénale, elle avait déclaré ses revenus.

Enfin, il avait respecté le critère de la nécessité et le principe de proportionnalité dans le choix de la sanction prononcée. Les agissements de la recourante avaient eu des répercussions immédiates sur le quotidien de sa patiente et constituaient une violation grave du droit des patients à recevoir des soins dans le respect de leur dignité. Le vol d'un tel montant ne pouvait être banalisé comme le faisait la recourante et le choix d'une sanction limitée à trois mois était proportionné au regard de la gravité des faits.

d. Dans sa réplique, la recourante a persisté dans ses conclusions.

e. Dans sa duplique, le DSM a persisté dans ses conclusions. Il s'est référé au Code de déontologie du Conseil international des infirmières (CII), ainsi qu'à des décisions du Conseil de discipline de l'ordre des infirmiers du Québec pour souligner que le vol touchait à l'essence même de la profession d'infirmier et qu'il s'agissait d'un acte objectivement grave.

f. Le 5 mai 2025, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

g. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les allégués et pièces produites par les parties.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             La recourante conclut préalablement à une audience de comparution personnelle des parties répondant aux critères de l'art. 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101).

2.1 Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le droit d’être entendu n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_83/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.2 ; ATA/412/2025 du 15 avril 2025 consid. 4.1 et les arrêts cités).

2.2 L’art. 6 § 1 CEDH donne à toute personne le droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien‑fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Il peut être renoncé à une audience publique dans les cas prévus par l’art. 6 § 1 2e phr. CEDH, lorsque la demande est abusive, chicanière, ou dilatoire, lorsqu’il apparaît clairement que le recours est infondé, irrecevable ou, au contraire, manifestement bien-fondé ou encore lorsque l’objet du litige porte sur des questions hautement techniques (ATF 141 I 97 consid. 5.1 ; 136 I 279 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2019 du 4 juin 2020 consid. 3.2.2). L'obligation d'organiser des débats publics fondée sur l'art. 6 § 1 CEDH et sous réserve de règles procédurales particulières, suppose cependant une demande formulée de manière claire et indiscutable (ATF 134 I 331 consid. 2.3). Une requête de preuve (demande tendant à la comparution personnelle, à l'interrogatoire des parties, à l'audition de témoins ou à une inspection locale) ne suffit pas à fonder une telle obligation (ATF 122 V 47 consid. 3a).

La Cour européenne des droits de l’homme (ci-après : CourEDH) a également rappelé que l’art. 6 CEDH, en dehors des limitations expressément prévues par cette disposition, n’exige pas nécessairement la tenue d’une audience dans toutes les procédures. Cela est notamment le cas pour les affaires ne soulevant pas de question de crédibilité ou ne suscitant pas de controverse sur les faits qui auraient requis une audience, et pour lesquelles les tribunaux peuvent se prononcer de manière équitable et raisonnable sur la base des conclusions présentées par les parties et d’autres pièces (ACEDH Mutu et Pechstein c. Suisse du 2 octobre 2018, req. n° 40575/10, § 177 ; arrêt du Tribunal fédéral 8D_5/2019 précité consid. 3.2.2).

2.3 En l'espèce, la recourante a choisi de se limiter à demander la tenue d'une audience de comparution personnelle, ce que le droit ne protège pas, et sans exposer en quoi les éléments qu'elle entend exprimer ne pourraient l'être par écrit. Elle a eu l’occasion de faire valoir sa détermination à plusieurs reprises, tant dans la procédure non contentieuse, que devant la chambre de céans. Elle n’a par ailleurs pas de droit à une audition orale, l’art. 6 CEDH ne trouvant pas application, les faits n'étant pas controversés dans une affaire ne soulevant pas de question de crédibilité. De plus, le recours est manifestement mal fondé.

La chambre de céans considère être en possession d’un dossier complet lui permettant de trancher le litige.

Il ne sera par conséquent pas fait droit à la requête de la recourante.

3.             La recourante invoque plusieurs violations de son droit d’être entendue.

3.1 Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. comprend également le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 142 III 48 consid. 4.1.1; ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1 ; ATA/758/2025 du 8 juillet 2025 consid. 4.6). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_66/2022 du 8 décembre 2022 consid. 3.2) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_31/2021 du 16 juillet 2021 consid. 2.1 ; ATA/758/2025 précité consid. 4.6). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/758/2025 précité consid. 4.6 ; ATA/949/2021 du 14 septembre 2021 consid. 5b et les références).

3.2 La recourante reproche tout d'abord à l'autorité intimée d'avoir rendu l'arrêté querellé sans qu'elle ait pu s'exprimer sur la sanction envisagée, alors qu'à la suite de ses déterminations du 31 janvier 2024, le DSM avait indiqué qu'il lui apparaissait nécessaire de compléter les faits portés à sa connaissance. Elle n'avait par ailleurs pas été informée qu'il avait consulté le dossier pénal ni qu'il avait l'intention de prononcer une interdiction de pratiquer, soit l'une des mesures disciplinaires les plus strictes. Le DSM ne pouvait simplement se fonder sur la consultation du dossier pénal sans lui permettre de connaître les griefs retenus contre elle dans la procédure administrative et de se déterminer à leur sujet. Il lui reprochait son comportement dans la procédure administrative en se référant à cette unique détermination écrite, sans qu'aucune véritable instruction n'ait eu lieu ni d'échange contradictoire.

Il ressort du dossier que le DSM a expressément invité la recourante à exercer son droit d'être entendue avant le prononcé d'une éventuelle mesure ou sanction, par son courrier du 15 décembre 2023. Il y avait expressément indiqué que si les faits portés à sa connaissance par la BRCV étaient avérés, elle ne remplirait plus l'une des conditions requises pour être autorisée à exercer sa profession d'infirmière dans le canton de Genève, en application de l'art. 12 al. 1 let. b LPSan, la requérante devant en particulier être digne de confiance pour être autorisée à exercer une profession de la santé. Il a également exposé que les faits étaient susceptibles d'aboutir à l'application des mesures et sanctions prévues aux art. 14 et 19 LPSan, respectivement 125A ss LS, et donc notamment l'éventualité d'une interdiction de pratiquer. Dans ses observations du 31 janvier 2024, la recourante s'est expressément déterminée sur les faits qui lui étaient reprochés, sur l'éventualité d'une mesure d'interdiction d'exercer, ainsi que celle d'un retrait de l'autorisation.

Il ressort de ce qui précède que la recourante a pu exercer son droit d'être entendue sur tous les éléments qui, pour reprendre la jurisprudence précitée, étaient de nature à influer sur l'arrêté querellé et aucun fait nouveau n'est intervenu sur lequel elle n'a pas pu se prononcer. Quoiqu'il en soit, une éventuelle violation de son droit d'être entendue aurait été réparée devant la chambre de céans puisqu'elle a pu à plusieurs reprises se déterminer sur les faits pertinents. Le grief d'ordre formel dont se prévaut la recourante, non déterminant, sera dès lors écarté.

La recourante avait par ailleurs été expressément interpellée par l'OCS le 19 mars 2024 s'agissant de sa volonté de consulter le dossier pénal, accès qu'il avait formellement demandé au Ministère public et qui avait définitivement été autorisé après l'entrée en force de l'arrêt de la CPR. L'autorité intimée n'avait donc pas d'obligation d'informer d'office la recourante, assistée d'une avocate, qu'une copie du dossier pénal lui avait été transmise à la suite de l'entrée en force dudit arrêt.

3.3 La recourante reproche à l'autorité intimée de ne pas l'avoir invitée à produire le cas échéant les pièces utiles sur sa situation professionnelle et financière.

Or, à l'instar de l'autorité intimée, il convient de retenir qu'il ressort de la procédure pénale, notamment de l'ordonnance pénale du 7 février 2024 et du procès-verbal d'audience du Tribunal de police du 9 novembre 2024, qu'elle y a indiqué le montant de ses revenus, pensions pour ses enfants inclues. Dans ses déterminations du 31 janvier 2024 à l'autorité intimée, elle donne par ailleurs une liste détaillée de ses patients, pour étayer son propos sur les conséquences économiques d'une éventuelle interdiction de pratiquer.

Au vu de ce qui précède, ce grief sera également rejeté.

4.             La recourante fait également valoir une violation de son droit d’être entendue du fait qu'entre l'arrêt de la CPR du 3 mai 2024 et l'arrêté querellé, elle n'avait eu aucune nouvelle de la part du DSM. Elle avait été laissée des mois durant sans nouvelles au point qu'elle avait imaginé qu'il avait renoncé au prononcé de toute sanction. Ce grief doit plutôt être examiné sous l'angle du principe de la bonne foi.

4.1 L’art. 5 al. 3 Cst. oblige les organes de l’État et les particuliers à agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. L’art. 9 Cst. confère à toute personne le droit d’être traitée par les organes de l’État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi. Le principe de la bonne foi exige que l’administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. L’administration doit s’abstenir de tout comportement propre à tromper l’administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d’une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 143 V 95 consid. 3.6.2 ; 137 II 182 consid. 3.6.2). Le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu’il met dans les assurances reçues des autorités, lorsqu’il a réglé sa conduite d’après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l’administration, étant précisé qu’un renseignement ou une décision erronés de l’administration peut, selon les circonstances, intervenir tacitement ou par actes concluants (ATF 146 I 105 consid. 5.1.1 ; 143 V 341 consid. 5.2.1).

4.2 Le DSM a exposé qu'à aucun moment il n'avait laissé entendre à la recourante qu'il aurait renoncé à rendre une décision à son encontre, ce qui n'est pas contesté. Par ailleurs, l'arrêté a été rendu quatre mois seulement après la consultation du dossier pénal. La recourante ne saurait reprocher à l'autorité intimée d'avoir attendu l'issue de la procédure pénale et de s'assurer que les faits incriminés étaient établis dans le cadre de cette procédure pour prononcer l'arrêté querellé.

Ce grief tombe également à faux.

5.             Le litige porte sur l'interdiction prononcée à l'encontre de la recourante de pratiquer sous sa propre responsabilité en qualité d'infirmière dans le canton de Genève pour une durée de trois mois.

5.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), hypothèse non réalisée en l’espèce.

Constitue un abus du pouvoir d’appréciation le cas où l’autorité reste dans le cadre fixé par la loi, mais se fonde toutefois sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire et de l’inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 ; ATA/1317/2024 du 12 novembre 2024 consid. 2.1; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 515). Il y a excès du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité dépasse le cadre de ses pouvoirs. En outre, celle-ci doit exercer son libre pouvoir d’appréciation conformément au droit, ce qui signifie qu’elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d’inégalité de traitement et appliquer le principe de la proportionnalité. Si elle ne respecte pas ces principes, elle abuse de son pouvoir (ATA/1317/2024 précité consid. 2.1 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, 3e éd., 2012, p. 743 ss et les références citées).

5.2 Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 Cst., lorsqu’elle est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable (ATF 141 I 70 consid. 2.2 ; 141 I 49 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_68/2016 du 2 juin 2017 consid. 5.1). De plus, il ne suffit pas que les motifs de la décision attaquée soient insoutenables, encore faut-il que cette dernière soit arbitraire dans son résultat (ATF 141 I 49 consid. 3.4 ; 140 I 201 consid. 6.1).

S'agissant de l'appréciation des preuves et des constatations de fait, il y a arbitraire lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des constatations insoutenables (ATF 140 III 264 consid. 2.3 ; ATA/332/2022 précité consid. 4b).

5.3 La LPSan régit la profession d'infirmiers sous leur propre responsabilité professionnelle (art. 2 al. 1 let. a et al. 2 let. d).

Selon l'art. 16 LPSan, les personnes exerçant une profession de la santé sous leur propre responsabilité professionnelle doivent notamment exercer leur activité avec soin et conscience professionnelle (let. a) ; respecter les droits des patients ou des clients (let. d) et défendre, dans leur collaboration avec d’autres professions de la santé, exclusivement les intérêts des patients ou des clients indépendamment des avantages financiers (let. h).

Selon l'art. 12 al. 1 let. b LPSan, l’autorisation d’exercer une profession de la santé sous propre responsabilité professionnelle est octroyée si le requérant est digne de confiance et présente tant physiquement que psychiquement les garanties nécessaires à un exercice irréprochable de la profession.

5.4 L'art. 42 LS prévoit que toute personne a droit aux soins qu’exige son état de santé à toutes les étapes de la vie, dans le respect de sa dignité et, dans la mesure du possible, dans son cadre de vie habituel.

Le département chargé de la santé est compétent pour prononcer l’interdiction de pratiquer une profession de la santé, à titre temporaire, pour 6 ans au plus (art. 6 al. 1 et 127 let. b LS).

6.             Premièrement, la recourante reproche au DSM d'avoir constaté les faits de manière inexacte et d'avoir versé dans l'arbitraire. Elle avait fondé son arrêté sur les déclarations des parties plaignantes selon lesquelles elle n'aurait exprimé des remords qu'après le « coup de bluff » de la partie plaignante s'agissant des caméras présentes dans l'appartement. Or, ces déclarations étaient infondées et n'avaient pas été retenues dans le cadre du jugement du Tribunal de police. Deuxièmement, l'arrêté querellé ne prenait pas en compte le fait qu'elle avait été accusée à tort s'agissant des faits relatifs à l'EMS C______. Enfin, en retenant qu'elle semblait minimiser l'importance de la situation, le DSM retenait à sa charge un argument juridique plaidé dans le cadre du procès pénal (soit la tentative de vol en lieu et place de l'infraction de vol consommée) et qui relevait exclusivement d'une analyse juridique de l'infraction retenue.

6.1 Il ressort expressément de l'arrêté querellé qu'il est reproché à la recourante d'avoir volé une enveloppe contenant CHF 60'000.-, ce qu'elle avait reconnu tant dans le cadre de la procédure administrative que la procédure pénale. Le DSM a exposé avoir tenu compte du comportement professionnellement répréhensible qui avait conduit à la rupture du lien de confiance avec la patiente et à l'interruption de la relation thérapeutique existante, mais également de son comportement durant la procédure administrative.

S'agissant de la rupture du lien de confiance, celui-ci ressort expressément des déclarations du 21 septembre 2023 faites par B______ dans le cadre de la procédure pénale : « En plus du vol, il y a eu les mensonges qui ont suivi. La confiance en prend un sacré coup. D'autant plus dans le domaine médical…Et être volé par quelqu'un qui soigne votre mère, c'est très choquant et déstabilisant, ça fait mal. Ce sont des personnes qui sont censées vous faire du bien et là, elle vous vole. […] nous voulions créer une atmosphère d'harmonie, d'amour et de confiance autour de ma mère qui en a besoin et elle a tout cassé. […]. A______ m'a déjà dit que les personnes dont elle s'occupe sont très dépendantes d'elle. En fait, elle essaie d'instaurer un climat de confiance et de dépendance et finalement elle fait cela. Ça fait d'autant plus mal ».

Aussi, quand bien même elle n'avait pas fait usage de la somme soustraite, il n'en demeurait pas moins que le lien de confiance entre elle et sa patiente avait été irrémédiablement rompu, ce qui avait mis fin à la prise en charge de la patiente concernée par l'intéressée. De plus, en agissant de la sorte, elle avait généré une souffrance supplémentaire à cette patiente, qui se trouvait déjà dans une situation de vulnérabilité, et cela pour des motifs éthiquement condamnables. À l'instar de l'autorité intimée, il convient de retenir que ceci constitue une violation grave des devoirs professionnels incombant à la recourante et qu'un tel acte constitue un abus manifeste de la position de soignante, exerçant à domicile, au chevet d'une personne dépendante et diminuée physiquement.

S'agissant du grief de la recourante relatif au fait que le DSM aurait retenu à sa charge un argument juridique plaidé dans le cadre du procès pénal (soit la tentative de vol en lieu et place de l'infraction de vol consommée), il est important de relever que la recourante l'avait également plaidé devant le DSM dans sa détermination du 31 janvier 2024. Il ressort de ce qui précède qu'aucun fait retenu à l'encontre de la recourante dans l'arrêté querellé ne diverge du dossier pénal ou des observations faites par la recourante dans le cadre de la procédure administrative.

Le grief tiré de l’arbitraire dans l’établissement des faits sera écarté.

7.             La recourante invoque une violation de sa liberté économique au motif que le DSM n'avait pas procédé à une analyse de sa situation financière avant de prononcer un retrait de son autorisation de pratiquer la profession d'infirmière à titre indépendant d'une durée de trois mois. Il s'agissait de son unique profession et elle ne serait plus en droit de la poursuivre, avec le risque que cela comporte sur sa réputation auprès des médecins qui la référaient volontiers, les patients qui lui accordaient une grande confiance et sa situation financière. Elle invoque également une violation du principe de proportionnalité en tant que le DSM n'aurait pas pris en compte ses observations du 31 janvier 2024 ni les éléments produits dans ce cadre, à savoir les intérêts de ses patients qui nécessitaient des soins réguliers, un lien de confiance particulier et une régularité dans les traitements. Il avait totalement ignoré ses aveux spontanés, ses remords exprimés et son engagement à indemniser intégralement la partie plaignante pour ses frais d'avocat. Il s'était contenté de prendre en compte exclusivement les intérêts de la plaignante. Enfin, elle avait déjà été punie pénalement.

7.1 L'art. 27 Cst. garantit la liberté économique, qui comprend notamment le libre choix de la profession, le libre accès à une activité économique privée et son libre exercice et protège toute activité économique privée, exercée à titre professionnel et tendant à la production d’un gain ou d’un revenu (ATF 135 I 130 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_138/2015 du 6 août 2015 consid. 4.1).

Comme tout droit fondamental, elle peut être restreinte aux conditions fixées à l'art. 36 Cst. La restriction doit ainsi reposer sur une base légale, plus particulièrement une loi au sens formel si la restriction est grave, être justifiée par un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité (ATF 148 I 33 consid. 5.1 ; 147 I 393 consid. 5.1.1).

7.2 Le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 Cst. se compose des règles d’aptitude, qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé, de nécessité, qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, l’on choisisse celui qui porte l’atteinte la moins grave aux intérêts privés, et de proportionnalité au sens étroit, qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public (ATF 151 I 3 consid. 7.7 ; 149 I 191 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2024 du 29 avril 2025 consid. 7.1 ; ATA/278/2025 du 18 mars 2025 consid. 5.6.3). En outre, ce principe interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 145 I 297 consid. 2.4.3.1 et les références citées).

7.3 Conformément au principe de proportionnalité applicable en matière de sanction disciplinaire, le choix de la nature et de la quotité de la sanction doit être approprié au genre et à la gravité de la violation des devoirs professionnels et ne pas aller au‑delà de ce qui est nécessaire pour assurer les buts d’intérêt public recherchés. À cet égard, l’autorité doit tenir compte en premier lieu d’éléments objectifs, à savoir des conséquences que la faute a entraînées sur le bon fonctionnement de la profession en cause, et de facteurs subjectifs, tels que la gravité de la faute, ainsi que les mobiles et les antécédents de l’intéressé (arrêt du Tribunal fédéral 2C_922/2018 précité consid. 6.2.2 et les références citées). Les autorités compétentes disposent d’un large pouvoir d’appréciation dans la fixation d’une sanction disciplinaire (arrêt du Tribunal fédéral 2C_451/2020 du 9 juin 2021 consid. 12.2 ; ATA/1448/20242 du 10 décembre 2024 consid. 4.6).

7.4 Les mesures disciplinaires infligées à un membre d'une profession libérale soumise à la surveillance de l'État ont principalement pour but de maintenir l'ordre dans la profession, d'en assurer le fonctionnement correct, d'en sauvegarder le bon renom et la confiance des citoyens envers cette profession, ainsi que de protéger le public contre ceux de ses représentants qui pourraient manquer des qualités nécessaires. Les mesures disciplinaires ne visent pas, au premier plan, à punir le destinataire, mais à l'amener à adopter à l'avenir un comportement conforme aux exigences de la profession et à rétablir le fonctionnement correct de celle-ci (ATF 149 II 109 consid. 9.1 ; 143 I 352 consid. 3.3). Le prononcé d'une sanction disciplinaire tend uniquement à la sauvegarde de l'intérêt public (ATF 148 I 1 consid. 12.1).

7.5 Selon l'art. 19 LPSan, relatif aux mesures disciplinaires, en cas de violation de la présente loi ou de ses dispositions d’exécution, l’autorité cantonale de surveillance peut prononcer: a) un avertissement ; b) un blâme ; c) une amende de CHF 20'000.- au plus ; d) une interdiction de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle pendant six ans au plus ; e) une interdiction définitive de pratiquer sous propre responsabilité professionnelle pour tout ou partie du champ d’activité.

7.6 Comme on l'a déjà vu avant, le DSM connaissait avant de prononcer l'arrêté querellé les revenus de la recourante ainsi que la liste détaillée de ses patients, qu'elle lui avait transmise pour étayer son propos sur les conséquences économiques d'une éventuelle interdiction de pratiquer. Le DSM a ainsi pris toute la mesure des conséquences économiques et professionnelles de la sanction prononcée à l'encontre de la recourante. Celle-ci aurait d'ailleurs eu l'occasion dans le cadre de la présente procédure d'étayer ses allégations et fournir d'autres éléments à cet égard, ce qu'elle n'a pas fait. Le grief sera ainsi écarté.

7.7 En outre, l'autorité intimée a exposé que pour déterminer la sanction la plus apte à éviter la réalisation future de tels actes, elle avait pris en considération que le vol avait été commis au domicile de la patiente de la recourante et que ses agissements avaient eu des répercussions immédiates sur le quotidien de sa patiente puisque les soins infirmiers avaient immédiatement été arrêtés. Ils constituaient une violation grave du droit des patients à recevoir des soins dans le respect de leur dignité. Le lien de confiance avait irrémédiablement été rompu et le vol d'un tel montant ne pouvait être banalisé comme le faisait la recourante.

Cette appréciation ne souffre d'aucune critique, les professionnels de la santé devant, pour se voir autorisés à pratiquer leur profession, être dignes de confiance. La sanction est apte à faire prendre conscience à la recourante de la gravité de ses manquements et à adapter son comportement à ce qui est attendu d'elle. L'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en prononçant la sanction querellée. Contrairement à ce que soutient la recourante dans sa réplique, il n'y a pas besoin de présumer un risque de réitération pour prononcer une telle mesure.

Tant dans son principe que dans sa quotité, la sanction est donc conforme au principe de proportionnalité.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

8.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 février 2025 par A______ contre l'arrêté du Conseil d'État chargé du département de la santé et des mobilités du 23 décembre 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Annette MICUCCI, avocate de la recourante, au département de la santé et des mobilités, ainsi qu'à l'office fédéral de la santé publique.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Michèle PERNET, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :