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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3468/2023

ATA/1176/2024 du 08.10.2024 sur JTAPI/183/2024 ( PE ) , REJETE

Recours TF déposé le 20.11.2024, 2C_581/2024
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3468/2023-PE ATA/1176/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 8 octobre 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par l’Association de défense des Africains résidant en Suisse – ADARS, pour elle Sylvie HEIMO, mandataire

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 mars 2024 (JTAPI/183/2024)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1978, est ressortissant des États-Unis.

b. Le 9 décembre 2014, il a sollicité une autorisation de séjour pour études auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM). Il souhaitait suivre des études auprès de l’Université de Fribourg durant deux ans. Il habitait chez B______, ______, rue C______.

c. Le 30 juin 2017, il a épousé à Genève D______, ressortissante française au bénéfice d’un permis d’établissement.

d. Le 13 juillet 2017, il a demandé la délivrance d’une autorisation de séjour au titre de regroupement familial. Il était arrivé en Suisse la veille et était domicilié au ______, rue C______. Il produisait notamment une attestation de E______ du 13 juillet 2017 indiquant qu’il était domicilié chez elle, au ______, rue C______. Il ne s’agissait pas d’une boîte aux lettres et il y habitait physiquement.

e. Le 31 octobre 2017, B______ et E______ ont indiqué à l’OCPM que quatre personnes habitaient l’appartement du ______, rue C______, soit eux-mêmes, D______ et A______.

f. A______ a été mis au bénéfice d’un permis de séjour pour regroupement familial valable jusqu’au 7 juillet 2023.

g. Le 17 juillet 2019, il a adressé à l’OCPM un formulaire d’annonce de changement d’adresse. Il allait habiter dorénavant chez F______ au ______, chemin G______. Sous la rubrique « Le changement d’adresse concerne-t-il le conjoint(e)/ partenaire ? » était cochée la case « non » et sous celle « Si non, s’agit-il d’une séparation ? » était cochée la case « oui ». Le même jour, F______ a confirmé à l’OCPM cette domiciliation depuis le 1er juillet 2019. Il ne s’agissait pas d’une boîte aux lettres et A______ habitait physiquement à son domicile.

h. Le 28 avril 2020, A______ et D______ ont conclu une convention de divorce de laquelle il ressort qu’ils s’étaient séparés le 21 juin 2019 et que chacun des époux s’était constitué un domicile séparé. Le 22 septembre 2020, le Tribunal civil de première instance a prononcé leur divorce.

i. Le 18 juillet 2022, l’OCPM a interpellé A______ sur ses conditions de séjour et sa séparation et sollicité la production de pièces et informations. La demande a été réitérée le 16 novembre 2022, toujours sous le titre « examen des conditions de séjour - séparation ». Le 14 décembre 2022, A______ a adressé à l’OCPM les pièces sollicitées.

j. Le 24 mars 2023, l’OCPM a informé A______ de son intention de constater la caducité de son autorisation de séjour avec effet au 1er juillet 2019 et de prononcer son renvoi de Suisse, au motif que sa vie commune en Suisse suite à son mariage avec D______ avait duré moins de trois ans. A______ s’est déterminé et a produit des pièces le 29 août 2023.

k. Par décision du 21 septembre 2023, l’OCPM a refusé le renouvellement de l’autorisation de séjour de A______ et a prononcé son renvoi.

La durée de la vie commune en Suisse suite à son mariage avec D______ avait duré moins de trois ans. L’art. 50 al. 1 let. a de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) n’était pas applicable et il n’était pas nécessaire d’examiner son intégration. Aucun élément du dossier ne permettait de constater qu’un renvoi aux États-Unis le placerait dans une situation de rigueur, étant rappelé qu’il était arrivé en Suisse à l’âge de 38 ans.

Il ne pouvait se prévaloir d’une intégration sociale ou professionnelle particulièrement marquée en Suisse au point de devoir admettre qu’il ne pouvait quitter la Suisse sans être confronté à des obstacles insurmontables. Il n’avait pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables pour qu’il ne puisse plus raisonnablement envisager un retour dans son pays d’origine.

B. a. Par acte du 23 octobre 2023, A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant à son annulation et à ce que son dossier soit transmis au secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) avec un préavis positif.

Il était arrivé en Suisse le 3 octobre 2016. Suite à son mariage avec D______ le 30 juin 2017, il avait fait ménage commun avec son épouse et ses deux enfants au ______, rue C______. Ils avaient dû déménager en juillet 2019 en raison d’un différend avec le bailleur. Ils avaient eu de grandes difficultés à trouver un autre logement, raison pour laquelle un ami du couple, H______, les avait hébergés dès le mois de juillet 2019 à son domicile, ______ rue I______. Sa femme et lui avaient néanmoins dû se constituer des adresses administratives séparées du fait que plusieurs personnes étaient déjà officiellement domiciliées chez H______. Ainsi, son adresse postale avait été mise chez F______, ______, chemin G______, tandis que celle de sa femme l’avait été chez J______, ______, route K______. Ils avaient toujours fait ménage commun dans l’appartement d’H______ jusqu’à fin décembre 2020.

Son couple n’avait pas été en mesure d’avoir des enfants. Selon les convictions personnelles de son épouse, le mariage était associé à la procréation. Pour respecter ces convictions, il s’était résolu à divorcer. Le fils d’D______ avait établi sur internet une requête commune en divorce, s’en tenant aux dates et adresses formelles du couple. Ils n’avaient pas envisagé que ces indications puissent faire croire à l’OCPM qu’ils s’étaient séparés plus tôt que cela ne s’était en réalité produit. Ils avaient du reste poursuivi leur vie de couple après le prononcé du divorce. Un divorce ne signifiait pas pour eux une rupture dans leur relation. Ils avaient notamment continué à vivre ensemble chez H______ jusqu’en décembre 2020, continuant de former une communauté de lit et de toit. Bien que leurs liens se fussent distendus, ils continuaient leur relation de couple. L’art. 49 LEI devait être appliqué. Leur séparation n’avait été qu’administrative et non pas physique.

Il percevait des prestations financières depuis le 1er juin 2021. Il avait perdu son travail depuis la pandémie et avait obtenu des certifications d’expert en administration du « payroll », en assurances sociales et en gestion du personnel. Il était, depuis septembre 2023, agent de sécurité auprès de la société L______ SA (ci-après : L______). Il avait annoncé à l’Hospice général (ci-après : l’hospice) être désormais financièrement indépendant. Il n’avait ni dettes ni poursuites, et n’avait jamais fait l’objet de sanctions pénales.

b. Le 8 janvier 2024, l’OCPM a conclu au rejet du recours. Si la condition de la durée du mariage devait par hypothèse être admise, celle de l’intégration faisait défaut. Le 10 janvier 2024, il a produit une attestation de l’hospice indiquant que A______ bénéficiait de prestations d’assistance financière depuis le 1er juin 2021.

c. Le 2 février 2024, A______ a persisté dans ses conclusions.

Sa femme avait attendu un enfant mais elle l’avait malheureusement perdu dans le courant de l’année 2020. Il avait entrepris et réussi des formations complémentaires en Suisse. Il avait toujours travaillé et était très impliqué dans le cadre d’associations et de fondations. Le fait de bénéficier du soutien de l’hospice depuis l’été 2021 ne permettait certainement pas de considérer que son intégration en Suisse ne serait pas suffisante. L______ était prête à l’engager dès qu’il serait autorisé à travailler en Suisse. Si son changement de domicile avait été lié à une rupture sentimentale, D______ n’aurait assurément pas également quitté le logement jusque-là commun. Ils avaient changé d’adresse pour une pure question de difficultés rencontrées avec leurs colocataires.

d. Le 4 mars 2024, l’OCPM a produit une copie du contrat de travail de A______ avec L______ du 12 septembre 2023 et un formulaire de demande d’autorisation de séjour avec activité lucrative du 23 février 2024.

e. Par jugement du 5 mars 2024, la TAPI a rejeté le recours.

Selon le registre informatisé « Calvin » de l’OCPM, le premier fils d’D______, M______, n’avait jamais été domicilié à Genève mais résidait à P______ et N______, son second fils était arrivé à Genève à 16 septembre 2021 et résidait depuis cette date square O______ à Q______ avec sa mère.

Ce n’était qu’après avoir reçu le courrier de l’OCPM du 24 mai 2023 l’informant de son intention de constater la caducité de son autorisation de séjour du fait que sa relation conjugale avait duré moins de trois ans que A______ avait fourni de nouvelles explications sur sa situation conjugale et fait valoir que des erreurs étaient présentes dans les documents en mains de l’OCPM, affirmant avoir jusqu’en décembre 2020 continué à vivre sous le même toit que sa femme et ainsi maintenu une union conjugale, laquelle, selon ses propres dires, avait même été maintenue après le prononcé du divorce, ce dernier ne signifiant pas pour son ex-femme et lui la rupture de leur relation conjugale.

Concernant les motifs de la constitution d’un domicile séparé avec son épouse en 2019, il avait indiqué dans son recours qu’il avait vécu avec sa femme et les deux enfants de cette dernière au ______, rue C______ et qu’il leur avait été difficile de trouver un autre logement suite à un différend avec leur bailleur. Or, non seulement ils n’étaient pas locataires de l’appartement mais, selon Calvin, M______, premier fils d’D______, n’avait jamais été domicilié à Genève mais résidait à P______ et N______, son second fils était arrivé à Genève à 16 septembre 2021. Par ailleurs, le 31 octobre 2019, B______ et E______ avaient indiqué que seuls D______ et A______ habitaient avec eux, sans jamais évoquer les enfants d’D______.

La version des faits relatifs à sa situation conjugale et aux raisons qui avaient prévalu à une domiciliation séparée d’avec son épouse en 2019 avaient fortement varié et en présence de déclarations contradictoires, la préférence devait en principe être accordée à celles que la personne concernée avait données en premier lieu, alors qu'elle en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures. Il devait être retenu que les époux étaient séparés en tout cas depuis juillet 2019, soit moins de trois ans après leur mariage.

La seconde condition cumulative de l’art. 50 al. 1 let. a LEI, portant sur l’intégration, n’avait pas à être examinée.

A______ ne pouvait se prévaloir d’une intégration sociale ou professionnelle particulièrement remarquée en Suisse. Il ne soutenait pas avoir créé avec la Suisse des attaches si profondes et durables que son retour aux États-Unis ne puisse être envisagé. Rien n’indiquait que sa réintégration aux États-Unis le placerait dans une situation de rigueur.

C. a. Par acte remis à la poste le 6 avril 2024 et complété le 9 mai 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci‑après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de renouveler son autorisation de séjour.

Le jugement du TAPI retenait par erreur que le divorce avait été prononcé le 22 septembre 2022 alors qu’il avait été prononcé le 22 septembre 2020. Les époux avaient affirmé de manière concordante que le mariage avait duré du 30 juin 2017 au 22 septembre 2020, soit trois ans et trois mois. Deux documents le prouvaient : l’acte de mariage et le jugement de divorce. En ignorant ces actes et en se fondant sur un simple changement d’adresse dans un contexte COVID-19, l’OCPM et le TAPI avaient constaté les faits de manière inexacte.

Il n’était pas admissible d’inférer du changement d’adresse que le mariage n’avait duré que deux ans et un mois car l’existence d’un mariage résultait d’actes clairs telles la séparation de corps ou les mesures protectrices de l’union conjugale, qui seuls auraient pu remettre en cause le mariage. Le couple avait dû quitter son domicile car le bailleur avait accueilli sa fille et voulait éviter une trop grande promiscuité en période de pandémie. L’OCPM et le TAPI n’avaient pas tenu compte des déclarations des proches attestant que la séparation ne concernait que les adresses et non le couple et avaient ainsi violé les art. 28 al. 1 let. b et 41 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). En soutenant que le couple voulait se séparer alors que le lien conjugal persistait, ils avaient excédé et abusé de leur pouvoir d’appréciation, s’étaient livrés à l’arbitraire et avaient agi de mauvaise foi. Les art. 49 et 50 al. LEI avaient en outre été violés. A______ était parfaitement intégré. Il parlait le français, avait étudié à l’Université de Neuchâtel, n’avait pas de dettes, avait un casier judiciaire vierge et travaillait à mi-temps dans une agence de sécurité, laquelle lui donnerait la possibilité de passer les examens de sécurité lui permettant d’accéder à un emploi à plein temps dès que son titre de séjour serait renouvelé.

b. Le 3 juin 2024, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Le recourant n’a pas répliqué dans le délai qui lui avait été imparti.

d. Le 12 juillet 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les arguments et pièces produits par les parties.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a LPA).

2.             L’objet du litige porte sur la conformité au droit de la décision de l’OCPM du 21 septembre 2023, confirmée par le TAPI, refusant le renouvellement de l'autorisation de séjour du recourant.

2.1 Selon l'art. 61 LPA, le recours devant la chambre administrative peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte des faits (al. 1). En revanche, la chambre administrative ne connaît pas de l'opportunité des décisions prises en matière de police des étrangers, dès lors qu'il ne s'agit pas d'une mesure de contrainte (al. 2 ; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).

2.2 La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants des États-Unis.

2.3 Selon l'art. 50 al. 1 LEI, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 LEI (membres étrangers de la famille d’un ressortissant suisse) et 43 LEI (conjoint et enfants étrangers du titulaire d’une autorisation d’établissement) subsiste lorsque l’union conjugale a duré au moins trois ans et que les critères d’intégration définis à l’art. 58a LEI sont remplis (let. a), ou lorsque la poursuite du séjour en Suisse s’impose pour des raisons personnelles majeures (let. b). L'art. 49 LEI permet cependant de faire exception à l'exigence du ménage commun lorsque la communauté conjugale est maintenue et que des raisons majeures justifiant l'existence de domiciles séparés peuvent être invoquées (arrêt du Tribunal fédéral 2C_488/2010 du 2 novembre 2010 consid. 3.2). Celui qui se prévaut de l'art. 49 LEI doit faire valoir et, dans la mesure du possible, démontrer que la communauté familiale subsiste, même si les époux vivent séparés pour des raisons majeures (arrêt du Tribunal fédéral 2C_50/2010 du 17 juin 2010 consid. 2.2). En effet, le but de l'art. 49 LEI n'est pas de permettre aux époux étrangers de vivre séparés en Suisse pendant une longue période et exige que la communauté familiale soit maintenue (arrêt du Tribunal fédéral 2C_50/2010 du 17 juin 2010 consid. 2.3.2).

La limite légale de trois ans se calcule en fonction de la durée pendant laquelle les époux ont fait ménage commun en Suisse (ATF 136 II 113 consid. 3.3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1), soit depuis la date du mariage, à condition que la cohabitation ait lieu en Suisse, jusqu'à ce que les époux cessent d'habiter sous le même toit (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1 ; 2C_195/2010 du 23 juin 2010 consid. 5.1).

Outre les hypothèses retenues à l'art. 50 al. 1 let. a LEI, le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour existe également si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEI). Les raisons personnelles majeures visées à l'al. 1 let. b, sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEI).

Lors de l'examen des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI, les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d'une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2 ; ATA/981/2019 du 4 juin 2019 consid. 6b et l'arrêt cité).

2.4 À teneur de l'art. 31 al. 1 OASA, lors de l'appréciation de l'existence d'un cas d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment : a) de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI ; c) de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants ; d) de la situation financière ; e) de la durée de la présence en Suisse ; f) de l'état de santé ; g) des possibilités de réintégration dans l'État de provenance.

Selon l'art. 58a al. 1 LEI, pour évaluer l’intégration, l’autorité compétente tient compte des critères suivants : (a) le respect de la sécurité et de l’ordre publics ; (b) le respect des valeurs de la Constitution ; (c) les compétences linguistiques et (d) la participation à la vie économique ou l’acquisition d’une formation.

Les critères énumérés par l'art. 31 al. 1 OASA pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (Directives et commentaires du SEM, Domaine des étrangers, du 25 octobre 2013, état au 1er septembre 2023 [ci-après : directives LEI], ch. 5.6.12).

À elles seules, la longue durée du séjour et l'intégration (travail régulier, absence de condamnations et de dépendance à l'aide sociale) ne suffisent pas à rendre la poursuite du séjour imposable au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI (ATA/192/2021 Arrêt du 23 février 2021 consid. 9 ; ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d et les références citées).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2).

L'intégration professionnelle doit être exceptionnelle. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine, ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATA/192/2021 du 23 février 2021 consid. 9d).

Alternativement, la réintégration sociale dans le pays d'origine doit sembler fortement compromise. La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1). Le simple fait que l'étranger doive retrouver des conditions de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne constitue pas une raison personnelle majeure au sens de l'art. 50 LEI, même si ces conditions de vie sont moins avantageuses que celles dont cette personne bénéficie en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1188/2012 du 17 avril 2013 consid. 4.1).

2.5 De jurisprudence constante, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu, alors qu'il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/791/2023 du 18 juillet 2023 consid. 7.7).

2.6 En l’espèce, le recourant s’est marié le 30 juin 2017 et a divorcé le 22 septembre 2020.

L’OCPM a cependant retenu que la vie commune avait pris fin avec effet au 1er juillet 2019.

Ce constat ne prête pas le flanc à la critique. Il y a lieu de rappeler que c’est la durée de la vie commune durant le mariage qui est déterminante, et non le mariage lui-même comme semble le penser le recourant. Cette durée a été établie correctement par l’OCPM et le TAPI. Le recourant a en effet indiqué le 17 juillet 2019 dans son annonce de changement de son adresse que celui-ci ne concernait pas sa conjointe et qu’il s’agissait d’une séparation. Il a par ailleurs conclu le 28 avril 2020 avec D______ une convention en vue du divorce indiquant que le couple s’était séparé le 21 juin 2019 et que chacun des époux s’était constitué un domicile séparé.

Le recourant a certes déclaré devant le TAPI qu’H______ les avait hébergés à son domicile, son épouse et lui, dès le mois de juillet 2019 et jusqu’à fin décembre 2020, que leur union conjugale avait ainsi perduré mais qu’ils avaient dû se constituer des adresses administratives séparées du fait que plusieurs personnes étaient déjà officiellement domiciliées chez leur logeur. Ainsi, son adresse postale avait été mise chez F______, ______, chemin G______, tandis que celle de son épouse l’avait été chez J______, ______, route K______.

Le recourant ne justifie ainsi pas pourquoi son épouse et lui auraient dû se constituer deux adresses postales différentes. Ses allégations devant le TAPI sont par ailleurs contredites par la convention en vue du divorce qu’il a passée avec son épouse. Le recourant n’indique pas pour quel motif son épouse et lui auraient dû indiquer dans ce document une date de séparation contraire à la réalité. Les allégations plus récentes du recourant sont également contredites par l’attestation établie le 17 juillet 2019 par F______, selon laquelle il habitait physiquement au domicile de celle-ci, ______, chemin G______ et qu’il ne s’agissait pas d’une boîte aux lettres. On ne comprend d’ailleurs pas pour quelle raison F______ aurait dû attester faussement de son domicile chez elle.

Enfin, le recourant a produit une version différente des faits lorsqu’il a compris que l’OCPM n’entendait pas renouveler son autorisation de séjour en raison de la durée insuffisante de la vie commune du couple.

L’OCPM puis le TAPI étaient ainsi fondés à tenir les faits pour établis sur la base des premières déclarations du recourant, et à ne pas tenir compte de l’attestation d’D______ du 24 juillet 2023 selon laquelle les époux habitaient ensemble chez H______, ni de celle d’H______ du 24 juillet 2023 selon laquelle il avait hébergé les époux jusqu’à fin décembre 2020.

Outre le fait que les auteurs de ces attestations sont proches du recourant, ce qui confère à leurs propos une force probante réduite, les attestations ont été produites après que l’OCPM eut annoncé au recourant le 24 mars 2023 son intention de ne pas renouveler son titre de séjour et lui eut donné l’occasion de se déterminer, de sorte qu’elles apparaissaient circonstancielles. Enfin, leur contenu est incompatible avec les premières déclarations du recourant, la convention de divorce et l’attestations de sa logeuse.

C’est ainsi conformément à la loi et sans abus de leur pouvoir d’appréciation que l’OCPM et le TAPI ont tenu pour établi que la vie commune du recourant avec son épouse durant le mariage avait duré moins de trois ans, et conclu que l’autorisation de séjour de ce dernier ne pouvait être renouvelée en application de l’art. 50 LEI.

Le recourant fait valoir qu’il remplirait les conditions d’un cas individuel d’extrême gravité.

Il ne peut être suivi. Son intégration en Suisse n’a rien d’exceptionnel. S’il maîtrise le français au degré requis et n’a ni dettes ni poursuites, il ne conteste pas dépendre de l’aide financière de l’hospice depuis juin 2021. Il a certes conclu un contrat de travail avec L______ avec effet au 19 septembre 2023, mais celui-ci n’indique aucun taux d’activité, et l’OCPM a produit la décision de l’hospice du 26 avril 2024 octroyant au recourant une aide financière mensuelle de CHF 691.95, dont il ressort que son salaire net pris en compte pour le calcul de l’aide est de CHF 501.60, et enfin il a lui-même a indiqué le 26 avril 2024 à l’OCPM dépendre de l’hospice depuis juin 2021. Au plan social, le recourant ne fait pas valoir d’attaches particulièrement fortes avec la Suisse, ni d’intégration au plan sportif, associatif ou culturel.

Le recourant n’établit pas que sa réintégration aux États-Unis serait à ce point difficile qu’elle ne pourrait raisonnablement être exigée de lui. Âgé de 45 ans, il est encore relativement jeune et en bonne santé. Il pourra faire valoir aux États-Unis les connaissances universitaires, professionnelles et linguistiques acquises en Suisse, étant observé qu’il a produit les diplômes de bachelor en sciences et de master en administration de la santé obtenus aux États-Unis en 2010 et 2013.

Ainsi, c’est de manière conforme à la loi et sans excès ni abus de son pouvoir d’appréciation que l'OCPM a rejeté la demande de prolongation d'autorisation de séjour du recourant.

3.             Reste à examiner si le renvoi prononcé par l’OCPM est conforme au droit.

3.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, l'autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel l'autorisation de séjour est refusée ou dont l'autorisation n'est pas prolongée. Elle ne dispose à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation, le renvoi constituant la conséquence du rejet d'une demande d'autorisation. Le renvoi d'une personne étrangère ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83 al. 1 LEI).

3.2 En l'espèce, dès lors qu'il a, à juste titre, refusé de renouveler l’autorisation de séjour du recourant, l'OCPM devait prononcer son renvoi. Il a été vu plus haut que son retour aux États-Unis est exigible. Il n’invoque aucun élément permettant de retenir que l'exécution de son renvoi ne serait pas possible, licite ou ne pourrait raisonnablement être exigé. De tels éléments ne ressortent pas non plus du dossier.

Il suit de là que rien ne s'oppose à l'exécution du renvoi du recourant.

Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui ne peut se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 6 avril 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 5 mars 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de A______ un émolument de CHF 400.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Sylvie HEIMO, mandataire du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.