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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2622/2021

ATA/470/2024 du 16.04.2024 sur ATA/891/2022 ( FPUBL ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2622/2021-FPUBL ATA/470/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 avril 2024

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Éric MAUGUÉ, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES
représenté par Me François BELLANGER, avocat
intimé

et

B______ appelée en cause
représentée par Me Serge PATEK, avocat

 


EN FAIT

A. a. A______, née en 1983, a été engagée à 100% auprès de l'office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS ou l'office) dès le 15 janvier 2014 en tant que ______, en classe 1______ annuité 5 de l'échelle des traitements de l'État de Genève.

Sa responsable hiérarchique était B______, assistante de ______, C______.

A______ a été nommée fonctionnaire le 1er janvier 2016.

Il ressort des différents entretiens d'évaluation passés entre 2014 et 2015 que A______ a accompli son travail à la pleine satisfaction de son employeur.

b. Du 28 octobre 2015 au 15 mars 2016, A______ a bénéficié d'un congé maternité pour la naissance de son deuxième enfant.

c. Dès le 1er avril 2016, A______ a été promue à la fonction ______ en classe 2______ annuité 8, sous la supervision de C______, avec un changement de taux d'activité de 100% à 70%. Elle a été confirmée dans cette fonction le 27 mars 2017.

d. Selon le compte rendu de l’entretien d’évaluation et de développement du personnel (ci-après : EEDP) du 10 mars 2017 en vue de la confirmation de sa promotion, à son retour de congé maternité, « la répartition des tâches [n'avait] pas été d'emblée bien acceptée de la part de Mme A______ et [avait] généré quelques tensions au sein de l'équipe de secrétariat ». Il semblait « que la répartition des tâches [avait] été le prétexte et non la cause des tensions au retour de congé maternité de Mme A______. Après quelques mois difficiles, la situation s'[était] considérablement améliorée ». Le bilan d'évaluation était excellent dans sa globalité, A______ accomplissant ses tâches avec professionnalisme, organisation et sérieux.

e. En 2018, après des absences perlées en 2016 et 2017, A______ a été absente à cause de douleurs dues au syndrome du canal carpien du 5 février au 31 mai 2018, pour des raisons médicales liées à sa troisième grossesse du 31 mai au 4 juillet 2018, puis en raison de son congé maternité du 6 juillet au 22 novembre 2018.

f. À la demande de l'intéressée, l'OCAS lui a accordé un congé parental sans traitement du 8 janvier au 30 avril 2019 avec une reprise d'activité prévue pour le 2 mai 2019 et une réduction de son taux d'activité de 70% à 60% dès le 2 mai 2019.

g. En avril 2019, A______ a informé sa hiérarchie de son incapacité à reprendre le travail le 2 mai 2019 à cause d'un syndrome du canal carpien des deux poignets, nécessitant une double opération.

Le 3 mai 2019, elle a été convoquée chez le médecin-conseil de l'OCAS, qui a attesté que l'arrêt maladie était justifié.

h. Le 21 mai 2019, A______ a informé D______, directeur adjoint et responsable des ressources humaines (ci-après : RH), et C______ qu'elle devait se faire opérer des deux poignets.

Elle avait informé ses collègues de cette absence au moyen d'un groupe WhatsApp « E______ », créé trois ans auparavant. Elle n'avait eu aucune réponse de leur part et ses trois collègues, notamment B______, avaient quitté le groupe le jour même sans répondre à son message, ce qui l'avait profondément blessée et laissée dans l'incompréhension. Elle avait mentionné à C______ que ses collègues avaient voulu lui faire passer le message très clair qu'elles ne souhaitaient pas recevoir des informations sur son état de santé. Ce genre de situation s'était déjà produit par le passé, et elle aspirait uniquement à pouvoir travailler dans une ambiance sereine et dénuée de tensions, sans être jugée ou critiquée sur ses choix de vie privée.

i. Par courriel du 27 septembre 2019, faisant suite à un entretien le jour précédent avec D______ et C______, A______ leur a indiqué avoir été surprise par l'entretien dont le but annoncé par courriel du 3 septembre précédent devait être de préparer son retour.

Or, l'entretien avait uniquement porté sur le fait que la direction de l'OCAS lui reprochait un manque d'intérêt à la vie professionnelle quotidienne à l'OCAS durant son congé maternité et son arrêt maladie ainsi qu'un manque de contact avec ses collègues et supérieurs pour prendre de leurs nouvelles et des nouvelles du travail. Elle avait expliqué, dans l'entretien, n'avoir pas eu le temps et l'énergie pour le faire, compte tenu de la naissance de son troisième enfant et de ses problèmes de santé. Elle avait toujours informé ses supérieurs de son état de santé, sans cependant recevoir de réponse. Personne n'avait pris de ses nouvelles après ses opérations des poignets et ses collègues avaient cessé de répondre à ses messages soudainement.

L'attitude de ses collègues et l'échange téléphonique « mouvementé » qu'elle avait eu avec C______ le 9 avril 2019 lorsqu'elle lui avait annoncé ses nouveaux problèmes de santé indiquaient que ses prises de contact n'étaient pas attendues et souhaitées. Elle avait annoncé à plusieurs reprises par le passé qu'elle regrettait l'attitude déplacée et hostile de ses collègues. Les problèmes reportés n'avaient pas été pris au sérieux par la direction de l'OCAS et ses supérieurs lui avaient demandé de régler cela directement avec ses collègues.

Après l'entretien, elle était allée voir sa collègue F______ afin de discuter de la possibilité de reprendre sa place de travail à son retour. Sa collègue l'avait informée « sèchement » avoir pris la décision avec B______ de rester à sa place de bureau, décision prise sans la consulter et qui avait été validée par la direction. L'espace du bureau n'était pas fait pour accueillir trois collaboratrices sur le long terme, la troisième personne ne disposant pas d'une structure de travail identique aux autres et ne permettant pas une bonne organisation du travail. Cette mise à l'écart de ses collègues ne correspondait pas à l'établissement d'une saine relation de travail.

Enfin, le reproche d'une « longue période écoulée » entre la survenance des douleurs et l'avertissement à l'OCAS n'était pas fondé. Ses douleurs étaient revenues fin févier 2019. Ne les voyant pas disparaître, elle était allée consulter un médecin et avait averti l'OCAS le 9 avril 2019. Elle avait en outre eu un entretien avec le médecin-conseil de l'OCAS qui avait attesté que son arrêt de travail était justifié.

j. Le 11 octobre 2019, D______ a accusé réception du courriel de A______ et a contesté sa perception de l'entretien. Il a émis la possibilité de rediscuter de la situation à son retour le 1er novembre suivant.

k. Alors que la reprise au travail était fixée au 1er novembre 2019, après les opérations, A______ a fourni à son employeur des certificats médicaux de son psychiatre et psychothérapeute la déclarant en incapacité totale de travailler du 1er novembre 2019 au 31 janvier 2020.

l. Le 6 janvier 2020, A______, par l'intermédiaire de sa protection juridique, s'est plainte auprès de l'OCAS qu'il n'avait pas rempli son devoir de protéger sa personnalité. Les tensions au sein du secrétariat et les propos et comportements inappropriés de B______, dont celui relatif à une surveillance quotidienne de sa messagerie électronique, ainsi que le manque de réaction de la direction rendaient la continuation des rapports de travail difficilement envisageable. Elle exigeait qu'un reclassement lui fût proposé à un poste similaire hors de l'OCAS.

m. Le 30 janvier 2020, l'OCAS a intégralement contesté les allégations de A______.

Il avait toujours respecté sa situation personnelle et pris, de manière exemplaire, toutes les mesures lui permettant tant de bénéficier d'un congé maternité puis d'un retour à l'emploi dans les meilleures conditions possibles que d'une situation professionnelle améliorée. Même si B______ avait pu tenir des propos inappropriés, l'OCAS avait immédiatement pris des mesures pour que cette situation, indépendante de sa volonté, ne se reproduisît pas. La réunion du 26 septembre 2019 ne pouvait pas porter sur les modalités de reprise du travail, puisque l'intéressée avait communiqué une prolongation de son arrêt de travail pour un mois supplémentaire.

Le reclassement demandé n'était légalement pas possible, puisque les éléments constitutifs d'un motif fondé de résiliation dûment établi lors d'entretiens de service n'existaient pas. L'OCAS était parfaitement satisfait de son travail avant son dernier arrêt pour cause de maternité puis de maladie, et aucun entretien de service n'avait été tenu. L'OCAS attendait son retour au travail à l'issue de son arrêt maladie, toute reprise de travail étant organisée au préalable avec la hiérarchie de l'OCAS.

n. Le 2 avril 2020, A______ a contesté les arguments de l'OCAS et a indiqué qu'elle n'avait pas connaissance des mesures prises par son employeur pour que la situation conflictuelle ne se reproduisît pas. La directrice avait voulu organiser une séance afin de « recréer une bonne dynamique d'équipe » mais cette séance n'avait jamais eu lieu. La direction n'était pas intervenue après ses plaintes à l'encontre de B______, en lien avec la surveillance de sa messagerie professionnelle. Au contraire, alors que A______ avait coupé les accès de sa messagerie à B______ pour se protéger, la direction lui avait demandé de rétablir cet accès.

Elle demandait de lui indiquer les mesures qu'avait prétendument pris l'OCAS pour résoudre le conflit existant.

o. Le 8 avril 2020, l'OCAS a répondu, persistant globalement dans ses explications précédentes. La problématique de la surveillance de la messagerie concernait une messagerie professionnelle, et il était normal qu'en cas d'absence prolongée de l'intéressée, un suivi des messages fût assuré. S'agissant des conflits avec ses collègues, l'OCAS allait intervenir pour trouver une solution à son retour et organiser un entretien de reprise.

p. Après une relance de A______ du 8 mai 2020 sur les mesures concrètes prises pour protéger sa personnalité, l'OCAS a répondu le 15 mai 2020 s'être clairement exprimé sur les mesures qu'il avait prises pour protéger la personnalité de son employée et a ajouté que d'éventuelles autres mesures seraient déterminées à son retour, en fonction de l'état de la situation à ce moment-là.

q. Le 27 août 2020, D______ a écrit à A______.

Le 24 août 2020, l'OCAS lui avait proposé un entretien fixé le 30 août suivant afin d'obtenir des explications sur l'attestation médicale qu'elle avait fournie. L'attestation datée du 21 août 2020 établissait que A______ serait en pleine possession de sa capacité de travail dès le 1er septembre 2020 mais qu'une reprise n'était pas conseillée afin de préserver sa santé mentale. A______ avait ensuite décliné la proposition d'entretien pour des raisons médicales par courriel du 25 août 2020.

Au vu du contenu de l'attestation médicale, il était nécessaire de la rencontrer afin de pouvoir organiser son retour à son poste et mettre en œuvre toutes les conditions requises après une absence de plus de deux ans. Le fait que l'intéressée déclinât cette proposition d'entretien en dépit d'une pleine capacité de travail avait pour conséquence que si elle persistait dans cette position, elle devait impérativement fournir un nouveau certificat médical dès le 1er septembre 2020, faute de quoi l'OCAS considérerait que le motif durable d'engagement avait disparu, ce qui pouvait aboutir à un licenciement.

r. Le 27 août 2020, A______ a démissionné de l'OCAS pour le 30 novembre 2020.

s. Le 1er septembre 2020, l'OCAS a accepté la démission de A______ et l'a libérée de son obligation de travailler durant le délai de résiliation.

B. a. Le 26 octobre 2020, A______ a adressé au groupe de confiance de l'État de Genève (ci-après : GdC) une demande d'ouverture d'une investigation concernant des atteintes à sa personnalité résultant du comportement de certaines de ses collègues, en particulier de B______ à partir du printemps 2016.

À la suite de sa promotion avec réduction du taux d'activité en avril 2016, ses rapports avec ses collègues directs, en particulier B______, s'étaient détériorés. Celle-ci lui reprochait de ne pas l'avoir consultée avant d'avoir demandé et obtenu une promotion et réduction du taux de travail après la naissance de son deuxième enfant. Elle semblait avoir mal pris la promotion à une classe équivalente à la sienne et n'appréciait pas de devoir de nouveau partager des tâches qu'elle lui déléguait auparavant. B______ avait adopté un comportement de plus en plus agressif à son égard, allant jusqu'à surveiller quotidiennement sa messagerie professionnelle et son travail, en sa présence, pour chercher la critique et la rabaisser.

En janvier 2018, A______ avait annoncé sa troisième grossesse à B______ ce qui avait mené à un entretien téléphonique durant lequel cette dernière avait eu des propos très durs. Elle lui avait fait comprendre qu'elle estimait que son temps partiel et ses absences liées à ses grossesses étaient irresponsables et irrespectueuses envers la direction et ses collègues et qu'elle aurait dû démissionner, car elle ne pouvait pas avoir un bon travail à temps partiel et des enfants. À son sens, leur employeur ne l'aurait pas engagée s'il avait su qu'elle aurait trois enfants.

Lors d'un entretien téléphonique avec C______ le 16 janvier 2019, celle-ci l'avait spontanément informée qu'elle avait constaté un fort ressenti de B______ à son égard. Sa collègue avait exprimé à de multiples reprises au sein de l'OCAS qu'elle considérait que A______ avait tout ce qu'elle « voulait en claquant des doigts et que c'était une injustice ». Elle la dépréciait par ailleurs envers ses collègues. La directrice avait demandé à A______ si elle était disposée à en discuter lors d'une réunion avec ses collègues avant son retour de congé, ce qu'elle avait accepté. A______, inquiète, avait donné suite à l'entretien téléphonique par un long « texto » à sa directrice, lui exposant notamment les propos de B______ après l'annonce de sa troisième grossesse. La directrice l'avait rassurée.

À la suite de l'annonce de son arrêt en avril 2019, à cause de ses douleurs liées au syndrome du canal carpien, C______ l'avait contactée par téléphone, lui faisant part de son mécontentement face à cette situation. Elle-même et les ressources humaines avaient l'impression d'avoir été « trompés sur la marchandise ». Il n'était pas possible pour l'OCAS de compter sur du personnel aussi limité dans son travail. Cette conversation l'avait surprise et affectée compte tenu des bonnes relations entretenues avec sa hiérarchie précédemment, au point qu'elle avait consulté un psychiatre.

Différentes pièces étaient jointes à sa demande dont un courriel du 11 juillet 2016 dans lequel A______ faisait état à une collaboratrice des ressources humaines de difficultés relationnelles avec B______, ainsi que des échanges de messages électroniques tant avec C______ en janvier 2019 qu'avec la mise en cause également en janvier 2019.

b. Le 8 décembre 2020, le GdC a informé A______ que sa plainte n'allait pas être classée. Il lui notifierait, le cas échéant, l'ouverture d'une procédure préliminaire ou d'une investigation. Préalablement, il entendait procéder à une tentative de conciliation, fixée le 12 janvier 2021.

c. Le même jour, le GdC a informé B______ de la demande d'investigation initiée à son encontre et lui a fait parvenir la demande, ses annexes et la convocation à la tentative de conciliation.

d. Le 4 janvier 2021, le Docteur G______, médecin traitant de B______, a adressé au GdC un certificat médical daté du 30 décembre 2020. Sa patiente n'était pas en mesure de se rendre à l'audience du 12 janvier 2021 pour des raisons médicales. Elle présentait une « contre-indication totale et définitive à devoir rencontrer Mme A______ » ainsi qu'une « contre-indication formelle à rencontrer le GdC » dans le cadre de cette affaire. En tant que médecin et sur la base de ce qui lui avait été rapporté, il avait l'intime conviction que A______ avait un comportement de type harceleur et manipulateur. Il était stupéfait que le GdC « [perde] son temps » et ses ressources à instruire le dossier d'une personne ayant une « attitude malveillante et malhonnête » et qui n'était par ailleurs plus employée au sein de l'État.

e. Le 6 janvier 2021, le GdC a informé A______ et B______ que l'audience de tentative de conciliation du 12 janvier 2021 était annulée compte tenu du certificat médical précité.

f. Le 28 janvier 2021, le GdC a notifié aux parties l'ouverture d'une procédure d'investigation formelle. Il invitait B______ à lui faire parvenir sa réponse écrite à la demande d'investigation de A______ du 26 octobre 2020.

g. Le 1er février 2021, le Dr G______ a transmis un nouveau certificat médical au GdC, indiquant que sa patiente ne pouvait être entendue ni par écrit, ni oralement, et ne pouvait donner suite aux demandes du GdC pour des raisons médicales.

h. Le 10 février 2021, l'OCAS, à qui la demande d'investigation et ses annexes avaient également été transmises par le GdC, a indiqué que A______ avait démissionné de son poste, à son initiative, pour la fin du mois de novembre 2020. De plus, B______ était en arrêt maladie de longue date, son état de santé rendant totalement impossible la poursuite de ses activités. Les propos tenus par A______ à l'encontre de son ancien employeur étaient par ailleurs outrageants, totalement erronés et déplacés.

i. Le 11 février 2021, le GdC a de nouveau invité B______ à se déterminer sur la procédure d'investigation par écrit afin de faire valoir son droit d'être entendue et lui a fait part de la possibilité de se faire représenter par un conseil juridique. Il lui a fixé un délai au 19 février 2021 pour contacter un conseil juridique et faire parvenir ses déterminations. Sans nouvelles de sa part d'ici cette date, le GdC poursuivrait l'instruction de la procédure d'investigation.

j. Le 23 février 2021, le GdC a essayé de joindre le Dr G______ par téléphone afin de souligner la possibilité que B______ se fasse représenter par un conseil juridique dans le cadre la procédure d'investigation.

k. Le 1er mars 2021, le Dr G______ a fait suite à ce message téléphonique laissé dans sa boîte vocale par le GdC. Les propos de A______ à l'encontre de sa patiente étaient erronés, diffamatoires et attentatoires à son honneur. Ni sa patiente, ni lui-même ne souhaitaient donner plus ample suite aux demandes, de plus en plus pressantes et inappropriées du GdC. Il l’invitait par ailleurs à requérir des informations auprès de la hiérarchie des personnes concernées, soit auprès de C______ en sa qualité de directrice de l'OCAS. Son courrier mettait fin aux échanges au sujet de sa patiente.

l. Le 16 mars 2021, le GdC a suspendu l'instruction de la demande d'investigation et a sollicité auprès de l'OCAS l'intervention de leur médecin-conseil afin que celui‑ci se déterminât sur la capacité de B______ à prendre part à la procédure d'investigation et son état de santé.

Si celle-ci était incapable de prendre part à la procédure d'investigation, il était invité à préciser sur quoi portait son incapacité (orale, écrite ou les deux), ainsi que la durée de celle-ci. Dans un tel cas, si elle pouvait constituer un avocat pour faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure d'investigation.

m. Le 19 mars 2021, A______ a demandé au GdC de poursuivre la procédure d'investigation en parallèle de l'expertise requise auprès de l'OCAS concernant l'état de santé de B______.

n. Le 26 mars 2021, le GdC a rejeté la demande de A______ et a maintenu la suspension de l'instruction jusqu'à connaissance de l'avis du médecin-conseil de l'OCAS.

o. Le 7 mai 2021, l'OCAS a transmis au GdC l'avis de son médecin-conseil, la Docteure H______. Elle avait eu un échange très confraternel (sic) avec le Dr G______. Compte tenu des informations échangées, elle confirmait que B______ n'était pas en mesure de se rendre à son cabinet pour une visite médicale ou de prendre part à la procédure d'investigation oralement ou par écrit, et ce de manière définitive. Elle était également définitivement incapable de constituer un avocat pour faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure d'investigation.

p. Le 11 juin 2021, le GdC a levé la suspension de la procédure et classé la demande d'ouverture d'investigation de A______ à l'encontre de B______.

Cette dernière n'avait pas pu se déterminer par rapport aux faits qui lui étaient reprochés malgré plusieurs tentatives du GdC de l'entendre sur la procédure à son encontre. Son incapacité à être entendue avait été d'abord attestée à plusieurs reprises par son médecin, le Dr G______, puis confirmée par la médecin‑conseil de l'OCAS, qui avait également attesté de l'incapacité définitive de B______ à être entendue oralement ou par écrit ainsi qu'à se faire représenter dans le cadre de l'investigation.

Le GdC ne disposait ainsi d'aucun moyen de connaître la détermination sur les faits reprochés, et ne pouvait considérer que B______ avait renoncé à l'exercice de son droit d'être entendue. Il était ainsi impossible de procéder à la suite de l'instruction jusqu'à l'établissement d'un rapport constatatoire sans violer le droit d'être entendue de la mise en cause. Nonobstant la démission de A______ à la fin du mois de novembre 2020, celle-ci conservait un intérêt juridique à ce que la procédure d'investigation aille à son terme, notamment afin qu'une voie de recours lui fût ouverte. Cependant, le droit d'être entendue de B______, incapable de participer à la procédure pour cause de maladie – et donc sans sa faute –, primait le droit à un constat de la partie plaignante.

q. Le 17 juin 2021, A______ a sollicité de l'OCAS qu'il communique au GdC que la procédure d'investigation devait être reprise, nonobstant l'absence de prise de position de B______, ou à défaut de rendre une décision formelle sujette à recours confirmant le classement de la procédure.

Si la décision du GdC devait être confirmée et que B______ demeurait incapable de nommer un représentant à la défense de ses intérêts, il convenait de notifier le cas au Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : TPAE) afin qu'un curateur puisse être nommé.

La Dre H______ avait traité le cas de B______ avec « légèreté » en se contentant d'une conversation téléphonique avec le Dr G______. Cette façon de procéder était insolite dans le cadre d'une expertise d'un médecin-conseil de l'OCAS. Elle avait elle-même subi un contrôle « vigoureux » par le médecin-conseil au printemps 2019, alors même que ses certificats médicaux ne laissaient aucun doute sur son incapacité de travail, contrairement au courrier « passablement agressif » du Dr G______ au GdC du 1er mars 2019.

r. Par décision du 28 juin 2021, déclarée exécutoire nonobstant recours, le président du Conseil d'administration de l'OCAS a confirmé la décision du GdC du 11 juin 2021 de classer la demande d'ouverture d'une investigation à l'encontre de B______.

Le GdC était une entité indépendante. Par conséquent, l'OCAS, en tant qu'autorité d'engagement, n'entendait pas exiger et imposer au GdC de modifier une décision qu'il avait rendue, ce qui n'était par ailleurs pas prévu par le règlement relatif à la protection de la personnalité à l'État de Genève du 12 décembre 2012 (RPPers - B 5 05.10). L'OCAS ne pouvait ainsi que confirmer la décision du GdC du 11 juin 2021 de classer la demande d'ouverture d'investigation de A______ à l'encontre de B______.

C. a. Par acte du 10 août 2021, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée, concluant, principalement, à son annulation et au renvoi du dossier au GdC en vue de la poursuite de la procédure d'investigation concernant les atteintes à la personnalité qu'elle avait subies. Subsidiairement, le dossier devait être renvoyé à l'OCAS afin qu'il ordonnât la reprise de la procédure d'investigation par le GdC. Plus subsidiairement, préalablement, une expertise médicale portant sur la capacité de B______ à se déterminer et à désigner un conseil juridique dans le cadre de la procédure d'investigation ouverte à son encontre devait être ordonnée. Sur le fond, elle a repris ses précédentes conclusions principales.

Le GdC avait ouvert une procédure d'investigation le 28 janvier 2021, sans même avoir recours à une procédure préliminaire, car il considérait que la procédure la concernant visait des faits graves et que celle-ci conservait un intérêt juridique à ce que la procédure d'investigation aille à son terme. Les atteintes dénoncées par l'intéressée avaient en effet mené à son arrêt de travail puis à sa démission. La décision de classement violait l'art. 21 al. 1 RPPers qui prévoyait un classement uniquement en cas d'atteinte de faible gravité.

La procédure d'investigation devant le GdC n'avait pas pour objet de sanctionner une personne particulière, mais d'enquêter sur un complexe de faits afin que l'autorité d'engagement puisse constater l'existence ou l'inexistence d'une atteinte à la personnalité. La personne mise en cause n'encourait ainsi aucune sanction à l'issue de la procédure d'investigation. Cette limitation de l'objet de la procédure d'investigation au constat d'une atteinte permettait de justifier les restrictions au droit d'être entendu des parties. La procédure d'investigation n'était pas une procédure contradictoire. Le RPPers ne prévoyait qu'un droit facultatif de se déterminer dans le cadre de la procédure d'investigation. La participation d'une personne mise en cause à la procédure d'investigation n'avait ainsi pas d'impact sur la capacité du GdC de mener la procédure à son terme. Si le GdC avait considéré qu'il était indispensable d'obtenir une détermination écrite de la part de B______, il aurait pu s'adresser au TPAE pour requérir une curatelle limitée de représentation.

Le GdC ne pouvait pas lui faire subir, alors qu'elle était la principale intéressée par la procédure d'investigation, les conséquences d'un refus ou d'une incapacité de B______ de se déterminer. En classant la procédure d'investigation, le GdC n'avait pas tenu compte de l'essence et de l'esprit de la procédure d'investigation et était tombé dans l'arbitraire, au point que la nullité de la décision attaquée pourrait être envisagée. De plus, le refus de continuer la procédure constituait un déni de justice formel.

Le GdC avait par ailleurs constaté l'incapacité de B______ de manière viciée. Il avait requis de l'OCAS la saisie de son médecin-conseil, ce qui constituait une expertise au sens de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10). Le GdC avait violé son droit d'être entendue en ne l'avertissant pas du choix de l'expert, de la portée de son mandat ou du résultat de l'expertise et en ne lui laissant pas la possibilité de se déterminer sur ces points. La Dre H______ s'était limitée à un échange verbal avec le Dr G______ et avait conclu sur cette base que B______ était incapable de participer à la procédure d'investigation. Cette appréciation médicale ne pouvait constituer le fondement de la décision de classement, et en se fondant dessus pour prononcer le classement, le GdC avait arbitrairement établi les faits.

b. Le 23 août 2021, la chambre administrative a ordonné l'appel en cause de B______ et lui a imparti un délai pour lui faire parvenir ses observations.

c. Le 1er septembre 2021, I______, fille de B______, a indiqué à la chambre administrative que sa mère était gravement atteinte dans sa santé et lui avait demandé de répondre en son nom. Sa mère n'entendait pas répondre aux allégations de A______. Elle avait été mise au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité à 100%, notamment pour atteinte psychique. Elle ne ferait plus partie du personnel de l'OCAS à partir du 24 septembre 2021. Les interpellations incessantes de son ancienne collègue péjoraient grandement son état de santé et elle ne comprenait pas l'origine de cet acharnement.

d. Le 1er octobre 2021, l'OCAS a conclu, principalement, à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet et la confirmation de sa décision du 28 juin 2021.

A______ avait démissionné de son poste à l'OCAS avec effet au 30 novembre 2020. Ayant quitté son poste, elle n'avait plus d'intérêt juridique à la reprise de la procédure d'investigation à l'encontre de B______ et ne disposait plus d'un intérêt pratique et actuel à l'admission de son recours.

Selon la lettre de la loi, le classement d'une investigation par le GdC n'était pas limité au seul fait de l'absence d'une certaine gravité de l'atteinte à la personnalité. De plus, le fait de ne pas avoir ouvert de procédure préliminaire ne signifiait pas que le GdC avait d'emblée estimé, à la lecture de la seule plainte de A______, qu'il s'agissait de faits prétendument graves. La procédure d'investigation avait été classée pour d'autres motifs que la gravité de l'atteinte, sur laquelle, le GdC, au stade où il était dans la procédure d'investigation, ne s'était par ailleurs pas prononcé.

Le GdC et l'OCAS n'avaient pas commis de déni de justice. Ils avaient tous deux rendu des décisions sujettes à recours. Contrairement à ce que soutenait A______, une procédure d'investigation pouvait déboucher sur le prononcé de mesures disciplinaires par l'autorité d'engagement, de sorte que la procédure d'investigation pouvait avoir des suites graves pour la personne mise en cause responsable d'atteintes à la personnalité.

B______, de par son état d'incapacité attestée par plusieurs certificats médicaux, se trouvait dans une impossibilité objective et durable, attestée médicalement, de sorte qu'il n'était pas possible de considérer qu'elle avait renoncé à son droit d'être entendue en toute connaissance de cause.

Le RPPers ne prévoyait pas la nomination d'un expert au sens de la LPA, mais uniquement la mise en place de mesures adéquates en cas de défaut de la personne mise en cause. Le GdC n'avait pas voulu mandater un expert, de sorte que les exigences spécifiques à l'expertise ne s'appliquaient pas et que le droit d'être entendue de A______ n'avait pas été violé.

e. Le 1er octobre 2021, le GdC a persisté dans les termes de sa communication de classement ayant fait l'objet de la décision de l'OCAS du 28 juin 2021.

A______ avait omis dans son analyse littérale du RPPers le mot « notamment » figurant à l'art. 21 al. 1 RPPers, qui excluait une limitation au seul cas de figure d'une atteinte de faible gravité. En l'occurrence, le GdC avait constaté l'empêchement de procéder à l'instruction de l'investigation et avait classé la demande d'investigation.

Le rapport établi par le GdC au terme de la procédure d'investigation constatait l'existence ou non d'une atteinte à la personnalité et était obligatoirement et systématiquement suivi d'une décision de l'autorité d'engagement confirmant ou infirmant ses conclusions. Cette décision de l'autorité d'engagement constituait le préalable d'une potentielle sanction administrative. A______ soutenait à tort que la procédure d'investigation du GdC était distincte d'une sanction administrative.

Le RPPers prévoyait que la personne mise en cause avait la possibilité de se déterminer sur les faits qui lui étaient reprochés. Il ne pouvait pas considérer qu'en proposant à la personne mise en cause de répondre à la demande d'investigation, cette dernière aurait librement refusé de faire usage du droit de se déterminer dans le cas où un certificat attestait de son impossibilité à se déterminer à l'oral et à l'écrit tout autant que de se faire représenter. En cas de défaut d'un témoin, le mécanisme prévu par le RPPers voulait que le GdC signale le défaut d'une partie ou d'un témoin à l'autorité d'engagement pour qu'elle prenne les mesures utiles afin que les parties puissent être entendues dans le cadre de la procédure d'investigation. En l'occurrence, après avoir mis en œuvre la procédure de signalement à l'OCAS, le médecin de B______, de même que celui de l'OCAS, avaient attesté de l'incapacité de la mise en cause à se faire entendre par le GdC pour des raisons médicales, de manière durable, même par l'intermédiaire d'un représentant légal. B______ n'avait donc pas refusé de participer à la procédure, n'avait jamais renoncé à son droit d'être entendue, pas plus qu'à défendre ses droits. Le GdC avait ainsi été empêché de poursuivre l'instruction de la procédure d'investigation. Le classement de la procédure avait par ailleurs permis l'ouverture d'une voie de recours pour A______ et celle-ci avait également la possibilité d'agir par la voie de l'action en responsabilité.

f. Le 29 octobre 2021, A______ s'est déterminée sur sa qualité pour recourir et a sollicité un délai pour répliquer sur le fond.

La chambre administrative avait déjà admis que l'intérêt pratique et actuel au constat d'une atteinte illicite à la personnalité demeurait même après la fin des rapports de service, une telle procédure ayant une fonction réparatrice et ouvrant la voie de la réparation d'éventuels préjudices.

L'atteinte qu'elle avait subie lui avait causé un important préjudice et avait impacté sa santé et sa carrière professionnelle. Elle s'était retrouvée en incapacité de travailler durant plus d'un an et s'était vu contrainte de démissionner à cause de l'absence de mesures prises par son employeur pour la protéger. Elle avait ainsi un intérêt pratique et actuel à obtenir la reconnaissance et la réparation de l'atteinte qu'elle avait subie.

g. Le 7 décembre 2021, A______ s'est déterminée sur les écritures de l'OCAS et du GdC.

Le GdC avait ouvert l'instruction et renoncé à la procédure d'enquête préliminaire, de sorte qu'il était tenu de mener l'instruction à son terme et de rendre une décision statuant sur l'existence – ou non – d'une atteinte à la personnalité, le RPPers ne lui offrant plus, à ce stade, la possibilité de classer la procédure.

Le déni de justice reproché au GdC résidait dans le refus de celui-ci de poursuivre la procédure en raison de la prétendue incapacité de B______ d'y prendre part alors que le classement pour un tel motif n'était pas prévu par le RPPers.

L'état de santé de la personne mise en cause ne pouvait pas faire obstacle à la constatation d'une atteinte à la personnalité de la victime dans le cadre de la procédure menée par le GdC. Même en considérant que B______ se trouvait effectivement dans l'impossibilité de pouvoir faire valoir son droit d'être entendue, ce qui n'avait pas été démontré, il appartenait au GdC d'interpeller l'autorité de protection de l'adulte pour requérir la mise en place d'une curatelle de représentation, le RPPers ne prévoyant pas le classement de la procédure comme alternative à cette démarche.

L'évaluation de la capacité de B______ à exercer son droit d'être entendue devait être soumise à des exigences strictes et ne pouvait se limiter à un entretien téléphonique entre son médecin traitant et le médecin-conseil de l'OCAS. De plus, le fait que cet examen ait été conduit par ce dernier, alors même que l'office disposait d'un intérêt manifeste à ce que l'atteinte à la personnalité de A______ ne soit pas constatée, apparaissait problématique. Enfin, le courrier de la fille de B______ du 1er septembre 2021 démontrait que la mise en cause pouvait être représentée. Le courrier en question ne disait de plus pas que la précitée serait dans l'incapacité de se déterminer.

h. Par arrêt du 6 septembre 2022 (ATA/891/2022), la chambre administrative a constaté que le recours était devenu sans objet et rayé la cause du rôle.

A______ avait interjeté son recours contre la décision litigieuse le 10 août 2021. Il avait été établi en cours de procédure, à la suite de l'appel en cause de B______, que celle-ci avait été mise au bénéfice d'une rente de l'assurance invalidité, notamment pour atteinte psychique, et ne faisait plus partie du personnel de l'OCAS depuis le 24 septembre 2021.

Ainsi, aucune des deux personnes concernées par la procédure d'investigation ouverte le 28 janvier 2021 ne travaillait à l'OCAS, de sorte que, même dans l'hypothèse où l'état de santé de B______ aurait permis de mener à terme la procédure d'investigation et de constater une éventuelle atteinte à la personnalité de A______, l'OCAS n'aurait pas été en mesure de prendre une quelconque sanction ou mesure disciplinaire.

Partant, bien qu'il soit possible de considérer que A______ ait eu un intérêt actuel au moment du dépôt de son recours, alors que B______ faisait partie du personnel de l'OCAS, tel n'était plus le cas depuis le 24 septembre 2021.

À titre superfétatoire, la réouverture de la procédure d'investigation par le GdC ne paraissait pas envisageable, car les médecins avaient attesté que B______ était incapable d'intervenir dans la procédure de manière définitive pour des raisons médicales, et le fait qu'elle fût au bénéfice de l'assurance invalidité poussait à croire qu'il y avait de très faibles chances qu'elle réintégre un poste à l'État.

Pour ces raisons, le recours de A______ avait perdu son objet en cours de procédure, ce qu'il y avait lieu de constater, et la cause devait être rayée du rôle.

Compte tenu de l'issue de la procédure, il n'était pas nécessaire de donner suite à la demande d'expertise médicale de A______.

Dans ses considérants, la chambre administrative faisait référence à l'arrêt du Tribunal fédéral 8C_246/2018 du 16 janvier 2019.

i. Par arrêt du 14 juin 2023 (8D_7/2022), le Tribunal fédéral a admis le recours de A______ interjeté contre l'ATA précité, l'a annulé et a renvoyé la cause à la chambre de céans pour nouvelle décision sur la suite à donner à la procédure.

L'arrêt du Tribunal fédéral 8C_246/2018 précité et cité par la chambre administrative, bien qu'il datât de 2019, se rapportait exclusivement à l'ancien art. 22 aRPPers (cf. art. 34 RPPers et consid. 3 de l'arrêt mentionné) et non au nouvel art. 30 RPPers. Cet arrêt indiquait d'ailleurs expressément que, même s'il reprenait en grande partie le contenu de l'ancienne disposition, l'art. 30 RPPers prévoyait que la décision motivée notifiée aux parties par l'autorité d'engagement constatait l'existence ou non d'une atteinte à la personnalité de son auteur, et non plus une violation ou non des devoirs de service (arrêt précit consid. 4 in fine). D'ailleurs, l'arrêt cantonal porté devant le Tribunal fédéral dans la cause 8C_246/2018 distinguait lui aussi clairement la situation sous l'égide de l'art. 22 aRPPers de celle sous l'égide de l'art. 30 RPPers en tant qu'il précisait que la modification apportée par le nouveau RPPers, consistant à remplacer la constatation de la violation ou de la non-violation des devoirs de service par la constatation de l'existence ou non d'une atteinte à la personnalité et son auteur, indiquait expressément que le législateur différenciait ces termes et leurs conséquences juridiques (consid. 5.1 ; cf. ATA/110/2018 du 6 février 2018 consid. 9).

En relation avec le droit de la fonction publique genevois, le Tribunal fédéral avait déjà constaté qu'en reconnaissant aux membres du personnel de l'administration cantonale un droit à la protection de leur personnalité, notamment en matière de harcèlement psychologique (art. 2B al. 1 de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 - LPAC - B 5 05), et en imposant à un organe de l'administration le devoir de rendre une décision de nature constatatoire à cet égard (art. 2B al. 6 aLPAC et 30 RPPers), le droit cantonal genevois conférait au membre du personnel concerné une véritable prétention à ce que le harcèlement psychologique dont il s'estimait victime fût constaté, s'il était avéré, et lui avait en conséquence reconnu un intérêt juridiquement protégé (arrêts du Tribunal fédéral 8C_392/2020 du 19 novembre 2020 consid. 2.3 ; 2P.207/2002 du 20 juin 2003 consid. 1.2).

Il en ressortait que A______ avait un intérêt pratique et actuel, et pouvait tirer un avantage concret, actuel et pratique, à porter son cas devant la juridiction précédente. Le fait que la personne mise en cause ne fasse plus partie du personnel de l'OCAS n'y changeait rien. En niant à A______ un intérêt à agir et en rayant la cause du rôle, la chambre administrative était tombée dans l'arbitraire et avait commis un déni de justice formel.

D. a. Après reprise de la procédure et l'envoi d'une convocation en vue d'une audience de comparution personnelle des parties, B______ a sollicité, sous la plume de son conseil, le 11 octobre 2023, le report de cette audience.

Elle demandait la détermination du juge délégué sur le fait qu'à son souvenir, celui‑ci aurait travaillé avec A______ dans le cadre d'une précédente activité professionnelle. De plus, son état de santé lui imposait de pouvoir disposer de plus de temps pour préparer sa défense.

b. Le 12 octobre 2023, le juge délégué a répondu qu'il ne connaissait pas A______ et n'avait jamais travaillé avec elle. Il n'y avait donc aucune suite à donner sous l'angle de la conduite de la procédure.

c. Le 1er décembre 2023, B______ a conclu au rejet du recours.

Il était manifeste que l'art. 25 (recte : 21) RPPers ne contenait pas une liste exhaustive de motifs pour lesquels le GdC pourrait être amené à classer la procédure dont il avait été saisi. L'hypothèse de classement de la procédure par le GdC en présence d'une « atteinte de peu de gravité » était manifestement une circonstance citée par le législateur à titre d'exemple. Au cours de la procédure, le Dr G______ avait, à plusieurs reprises, attesté par certificats médicaux qu'elle ne pouvait pas être entendue, tant par écrit que par oral. Cela incluait également la possibilité de se faire représenter par un avocat. Le GdC avait donc classé, conformément au droit, la procédure d'investigation au motif que B______ présentait une incapacité définitive de s'exprimer et d'intervenir dans le cadre de la procédure.

La décision de classement du GdC n'était pas arbitraire. Il s'était retrouvé face à une impossibilité objective de l'entendre, dans la mesure où elle présentait une incapacité totale d'exercer son droit d'être entendue. « Motif fondé » à l'appui de son impossibilité, il ne pouvait être considéré qu'elle avait renoncé à l'exercice de son droit d'être entendue.

A______ avait, à la suite de la décision du GdC du 11 juin 2022, sollicité de l'OCAS une décision formelle sujette à recours, soit la décision objet de la présente procédure. La procédure avait donc été correctement suivie, si bien que l'art. 21 al. 2 RPPers avait été correctement appliqué. Le grief d'un déni de justice formel était infondé.

La démarche du GdC, en sollicitant le médecin-conseil de l'OCAS, n'avait pas pour but d'obtenir une expertise judicaire au sens de l'art. 38 LPA, mais uniquement celui d'examiner son incapacité d'être entendue, soit un but autre que celui de l'expertise. Le GdC n'avait donc pas violé le droit d'être entendu de A______, puisque l'intervention du médecin-conseil de l'OCAS ne constituait qu'un avis médical supplémentaire à celui du Dr G______.

Elle a produit une « pétition » signée par A______ et trois autres personnes le 13 juillet 2012 visant une collègue envers laquelle des critiques étaient formulées.

d. Le 8 décembre 2023, le juge délégué a tenu une audience de comparution personnelle des parties.

d.a. L'OCAS a persisté dans ses écritures, relevant que la situation était susceptible d'être bloquée. En effet, c'était le GdC qui avait classé la procédure et c'était cette autorité qui avait les moyens d'investiguer ce genre de situation.

d.b. L'avocat de A______ a noté que si l'arrêt de la chambre de céans retenait que le GdC ne pouvait pas classer la procédure, celui-ci la reprendrait probablement. De plus, la détermination et la présence de la mise en cause légitimait d'autant plus le recours, puisqu'il avait été dit qu'elle était durablement incapable de prendre position.

d.c. A______ a précisé poursuivre la procédure car elle avait besoin que l'atteinte à sa personnalité soit reconnue, afin de tourner la page.

d.d. B______ a confirmé qu'elle ne travaillait plus et était au bénéfice d'une rente de l'assurance-invalidité, à la suite d'une forte dépression. Les demandes répétées du GdC ne l'avaient, à l'époque, pas aidée à aller mieux.

d.e. L'avocat de B______ a informé que l'état de santé de celle-ci s'était légèrement amélioré mais qu'il demeurait fragile.

d.f. L'OCAS a déposé à l'audience un chargé de pièces complémentaires, dont des tableaux des présences et absences de A______ et B______.

e. Le 24 janvier 2024, l'OCAS a persisté dans ses conclusions.

Le GdC avait entrepris toutes les démarches prévues et nécessaires pour permettre l'investigation sollicitée par A______, qui était apparue totalement impossible, vu l'état de santé de B______. Au vu des quatre certificats médicaux de la mise en cause, du courriel du médecin-conseil de l'OCAS du 7 mai 2021 les confirmant, il était établi que la concernée était, pour des raisons médicales, dans l'incapacité de prendre part à la procédure d'investigation dirigée à son encontre, y compris en forme orale et/ou écrite, et de mandater, de manière définitive, un conseil pour faire valoir ses droits dans la procédure d'investigation concernée. Elle ne pouvait de plus pas se faire représenter par un avocat. La continuation de la procédure d'investigation était donc totalement impossible. B______ était au bénéfice de l'assurance-invalidité depuis juin 2020 et avait de très importants troubles de la concentration, ce qui confirmait a posteriori que la poursuite de la procédure d'investigation était totalement impossible au moment de la décision du 28 juin 2021 et qu'elle serait extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, plus de huit ans après les faits reprochés qui s'étaient déroulées en 2016 et plus de trois ans et six mois après la décision de l'OCAS.

Il a repris et développé ses précédents arguments formulés dans sa réponse au recours du 1er octobre 2021.

f. Le 25 janvier 2024, A______ a conclu à l'appel en cause du GdC accompagné d'un délai pour qu'il se détermine sur le recours.

Elle prenait bonne note que la chambre administrative n'entendait pas, à ce stade, instruire le litige sur le fond, mais uniquement trancher la question de la validité des motifs de classement de la procédure d'investigation par le GdC et l'OCAS.

g. Le 26 janvier 2024, B______ a indiqué que les reproches formulés à son égard étaient dénués de tout fondement.

À leur entrée en fonction, A______ et elle avaient entretenu de bonnes relations personnelles jusqu'en 2016 à tout le moins, lorsque celle-ci avait favorisé la promotion de A______. Cela démontrait que B______ n'avait jamais considéré cette dernière comme sa rivale. La relation s'était détériorée par hypothèse en 2016 et ce n'était qu'en novembre 2020 que A______ avait demandé au GdC d'investiguer.

Les pièces produites par l'OCAS montraient que les deux collaboratrices n'avaient que très peu travaillé ensemble entre mi-2016 et fin 2020. Avant le dépôt de la demande d'investigation auprès du GdC, elles ne travaillaient plus ensemble depuis trois ans. De plus, B______ n'avait jamais été sanctionnée en raison d'un prétendu comportement irrespectueux ou déplacé à l'égard de quiconque.

h. Le 16 février 2024, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             La recevabilité du recours a été admise par l'arrêt du Tribunal fédéral du 14 juin 2023 en ce qui concerne l'intérêt pratique et actuel à contester la décision de classement de la procédure d'investigation de la recourante. Les autres conditions de recevabilité étant remplies, le recours est recevable.

Le Tribunal fédéral a ainsi renvoyé la cause à la chambre de céans pour qu'elle rende une nouvelle décision sur la suite à donner à la procédure.

2.             La recourante conclut à l'appel en cause du GdC.

2.1 L’autorité peut ordonner, d’office ou sur requête, l’appel en cause de tiers dont la situation juridique est susceptible d’être affectée par l’issue de la procédure, la décision leur devient dans ce cas opposable (art. 71 al. 1 LPA).

2.2 Cette disposition doit être interprétée à la lumière de celles relatives à la qualité pour recourir en procédure contentieuse. L’institution de l’appel en cause ne doit ainsi pas permettre à des tiers d’obtenir des droits plus étendus que ceux donnés aux personnes auxquelles la qualité pour agir est reconnue (ATA/872/2022 du 30 août 2022 consid. 3c et les arrêts cités), mais a pour but de sauvegarder le droit d’être entendu des personnes n’étant pas initialement parties à la procédure (arrêt du Tribunal fédéral 1C_134/2010 du 28 septembre 2010 consid. 4.2). Ce dernier but est reconnu par la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 1C_505/2008 du 17 février 2009 consid. 4.2) ; ainsi – et conformément du reste à ce que prévoit expressément l'art. 71 al. 1 LPA –, il peut aussi s'agir d'étendre au tiers l'autorité de chose jugée, afin que le jugement lui soit opposable par la suite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_373/2016 du 17 novembre 2016 consid. 2.1).

2.3 L'institution de l'appel en cause est aussi dictée par un souci d'économie de procédure dans la mesure où il a pour fonction d'éviter le déroulement d'une autre procédure sur les mêmes questions litigieuses. Il permet en outre de prévenir le prononcé de décisions ou de jugements contradictoires. Lorsque le juge appelle en cause une partie, il n'a en principe pas besoin d'entendre les participants à la procédure (Stéphane GRODECKI/Romain JORDAN, Code annoté de procédure administrative genevoise, 2017, n. 903 ss ad art. 71 LPA et les références citées).

2.4 Selon l'art. 21 RPPers, le GdC a la faculté de refuser que soit menée une investigation, notamment lorsque l'atteinte à la personnalité alléguée ne revêt pas une certaine gravité. Dans ce cas, il classe la demande et en informe par écrit la personne requérante et l'autorité d'engagement, ainsi que la personne mise en cause lorsqu'elle a été entendue (al. 1). Dans les 20 jours après réception de l'avis de classement, la personne requérante peut demander à l'autorité d'engagement la confirmation de cet avis par voie de décision sujette à recours auprès de la chambre administrative (al. 2). L'autorité d'engagement conserve la faculté d'ouvrir une procédure disciplinaire à l'encontre de celui qui aura dénoncé une personne sur la base de faits qu'il savait manifestement infondés, par pure mauvaise foi ou dans l'intention de nuire (al. 3). En cas de décisions visées aux al. 2 et 3, l'autorité d'engagement informe le GdC de leur existence et lui adresse une copie intégrale des décisions à l'issue du délai de recours, en mentionnant si ces décisions ont fait ou non l'objet d'un recours (al. 4).

2.5 En l'espèce, la question de l'appel en cause du GdC peut souffrir de rester indécise.

En effet, il ressort du dossier que, jusqu'au prononcé de l'ATA/891/2022 précité, le GdC a participé à la procédure, en ce sens qu'il a reçu toutes les écritures produites des parties. L'ATA précité lui a d'ailleurs été notifié à l'instar des parties à la procédure.

S'il est vrai qu'il n'a pas été invité à se déterminer à la suite de l'arrêt du Tribunal fédéral du 14 juin 2023, il n'en demeure pas moins que sa position est connue, puisqu'il avait produit une écriture le 1er octobre 2021, persistant dans les termes de sa communication de classement du 11 juin 2021, et que cette écriture abordait le fond du litige. En outre, le mécanisme mis en place par l'art. 21 – et 30 RPPers comme il sera vu ci-dessous – permet au GdC de suivre le sort de sa communication de classement, puisque l'OCAS a dû l'informer que sa décision du 28 juin 2021 avait fait l'objet d'un recours devant la chambre de céans. En toute hypothèse, le présent arrêt lui sera communiqué.

Dans ces circonstances, la requête sera écartée.

3.             Dans le corps de leurs écritures, l'autorité intimée et l'appelée en cause sollicitent, à titre de preuve, leur audition et celle de témoins. La recourante a également conclu, « plus subsidiairement », à ce qu'une expertise médicale soit mise en œuvre sur la capacité de l'appelée en cause à se déterminer.

3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

3.2 En l'espèce, les parties ont été entendues lors de l'audience du 8 décembre 2023, de sorte que leur requête a été satisfaite sur ce point. Elles ont par ailleurs eu l’occasion, lors des échanges d’écritures, de se déterminer sur les prises de position de leur partie adverse et ont joint à leurs mémoires de nombreuses pièces. En outre, comme il sera vu ci-dessous, l'audition de témoins pour instruire la question du classement de la procédure relative à l'atteinte à la personnalité de la recourante n'est pas nécessaire à la solution du litige à ce stade. Enfin, compte tenu des derniers éléments médicaux produits concernant l'état de santé de l'appelée en cause, une expertise n'est pas indispensable.

Il ne sera donc pas procédé à d’autres actes d’instruction.

4.             Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l'OCAS confirmant celle du GdC de classer la demande d’ouverture d’une investigation pour atteinte à la personnalité.

4.1 Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (al. 1 let. a) et pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (al. 1 let. b). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

4.2 Les modalités de la protection de la personnalité des fonctionnaires soumis à la LPAC sont fixées par le RPPers (art. 2B LPAC).

4.3 À teneur de l’art. 1 RPPers, le Conseil d'État veille à la protection de la personnalité de tous ses collaborateurs dans le cadre de leur activité professionnelle (al. 1). Il prend les mesures nécessaires à la prévention, à la constatation, à la cessation et à la sanction de toute atteinte à la personnalité d'un membre du personnel, en particulier en cas de harcèlement sexuel ou psychologique (al. 2). À cette fin, il a instauré un GdC dont la mission principale consiste à traiter les demandes des personnes qui font appel à lui et à contribuer à ce que cessent les atteintes constatées, d'entente avec la hiérarchie (art. 4 al. 1 et 5 al. 3 RPPers).

Tout collaborateur ou l'autorité d'engagement peut s'adresser librement au GdC dans le cadre de démarches informelles (art. 12 à 18 RPPers).

La demande d'ouverture de l'investigation est présentée par la personne requérante ou l'autorité d'engagement par écrit. Elle contient une description des faits et l'identité de l'auteur présumé d'une atteinte à la personnalité. Lorsque la demande met en cause plusieurs personnes, leur identité ainsi que les faits qui leur sont reprochés doivent être mis en évidence pour chacune d'elles (art. 20 al. 1 RPPers).

4.4 Plusieurs possibilités s'offrent au GdC à la suite d'une demande d'ouverture d'une investigation :

-          le GdC a la faculté de refuser que soit menée une investigation, notamment lorsque l'atteinte à la personnalité alléguée ne revêt pas une certaine gravité. Dans ce cas, il classe la demande et en informe par écrit la personne requérante et le Conseil administratif, ainsi que la personne mise en cause lorsqu'elle a été entendue (art. 21 al. 1 RPPers). Les al. 2 à 4 sont déjà retranscrits plus haut ;

-          si la demande d'investigation n'est pas classée au sens de l'art. 21 al. 1 RPPers et tant que l'instruction n'est pas terminée au sens de l'art. 28 al. 1 RPPers, le GdC peut initier une tentative de conciliation entre les parties, notamment à la demande de l'une d'entre elles (art. 21A al. 1 RPPers) ;

-          avant d'ouvrir l'investigation, le GdC peut procéder à une enquête préliminaire du cas, procédant conformément aux art. 23 à 26 RPPers. Il entend les parties, ainsi que les témoins qu'il juge utiles (art. 22 al. 1 RPPers). Si, sur la base de cette enquête préliminaire, le GdC conclut que les conditions d'une atteinte à la personnalité d'une certaine gravité ne sont manifestement pas réalisées, il classe l'affaire sans suite et en informe par écrit les parties et l'autorité d'engagement. L'art. 21 RPPers est applicable pour le surplus (art. 22 al. 2 RPPers). Faute de classement, le GdC notifie aux parties et à l'autorité d'engagement l'ouverture de l'investigation et poursuit l'instruction (art. 22 al. 3 RPPers) ;

-          l'art. 23 RPPers concerne la notification de la demande d'ouverture d'investigation. Le GdC notifie à toute personne mise en cause et à l'autorité d'engagement une copie de la demande et des éventuelles pièces annexées (al. 1). Dans un délai de 20 jours dès réception de la demande, toute personne mise en cause peut faire parvenir au GdC une réponse écrite à la demande et d'éventuelles pièces. Le GdC les transmet à la personne plaignante avant son audition (al. 2) ;

Le GdC entend ensuite la personne plaignante et toute personne mise en cause (art. 24 al. 1 RPPers). Les parties sont entendues séparément et peuvent se faire accompagner d'une personne de leur choix, qui ne peut être directement impliquée dans la procédure (art. 24 al. 1 RPPers). La personne mise en cause et les témoins ont l'obligation de répondre à leur convocation (art. 25 al. 2 RPPers). Si la personne mise en cause ou un témoin ne se présentent pas sans motif fondé, le GdC le signale immédiatement à l'autorité d'engagement qui prend, le cas échéant, les mesures adéquates (art. 25 al. 3 RPPers). Le GdC instruit la demande, en procédant notamment à l'audition de témoins, hors la présence des parties (art. 26 al. 1 RPPers) ;

Lorsqu'il considère l'instruction de la demande terminée, le GdC octroie aux parties et à l'autorité d'engagement un délai de dix jours pour consulter le dossier et requérir toutes autres mesures d'instruction complémentaires qu'elles jugent utiles (art. 28 al. 1 RPPers). Une fois l'instruction terminée, le GdC octroie un délai de 30 jours aux parties pour lui faire part de leurs déterminations par écrit (art. 29 al. 1 RPPers). Dans les 30 jours qui suivent la réception des déterminations des parties, le GdC établit un rapport contenant l'exposé des faits, donne son appréciation sur l'existence ou non d'une atteinte à la personnalité et indique l'identité de l’auteur identifié. Sont annexées au rapport les déterminations des parties (art. 29 al. 2 RPPers). Le GdC notifie le rapport aux parties et à l'autorité d'engagement (art. 29 al. 3 1ère phr. RPPers) ;

Enfin, l'art. 30 RPPers prévoit que dès réception du rapport définitif, l'autorité d'engagement dispose d'un délai de 60 jours pour entendre les parties et leur notifier une décision motivée, par laquelle elle constate l'existence ou non d'une atteinte à la personnalité et son auteur (al. 1). Sa décision peut être contestée auprès de la chambre administrative (al. 2). À l'encontre de l’auteur d'un harcèlement ou d'une atteinte à la personnalité, l'autorité d'engagement peut prendre – ou proposer à l'autorité compétente – toute mesure disciplinaire utile (al. 3). Le fait qu'une ou des sanctions ont été prises à la suite des faits dénoncés est porté à la connaissance de la personne plaignante (al. 4). Dès la prise des décisions ou mesures disciplinaires visées aux al. 1 et 3, l'autorité d'engagement informe le GdC de leur existence; à l'expiration du délai de recours de 30 jours, elle lui en adresse par ailleurs une copie intégrale, en mentionnant si ces décisions ou mesures ont fait ou non l'objet d'un recours (al. 5).

4.5 Est constitutive d’une atteinte à la personnalité toute violation illicite d’un droit de la personnalité, telles notamment la santé physique et psychique, l’intégrité morale, la considération sociale, la jouissance des libertés individuelles ou de la sphère privée (art. 3 al. 1 RPPers).

4.6 La notion de protection de la personnalité de l’agent public et l’obligation qui en découle pour l’employeur ont la même portée et valeur matérielle en droit public et en droit privé (Valérie DÉFAGO GAUDIN, Conflits et fonctions publiques : Instruments, in Jean-Philippe DUNAND/Pascal MAHON [éd.], Conflits au travail. Prévention, gestion, sanctions, 2015, p. 156). Il incombe à l'employeur public, comme à l'employeur privé de protéger et respecter la personnalité du travailleur, dans les rapports de travail (art. 328 al. 1 de la loi fédérale complétant le code civil suisse du 30 mars 1911 [Livre cinquième : Droit des obligations - CO - RS 220]). Cette obligation comprend notamment le devoir de l'employeur d'agir dans certains cas pour calmer la situation conflictuelle et de ne pas rester inactif (ATF 137 I 58 consid. 4.2.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_340/2009 du 24 août 2009 consid. 4.3.2 ; 1C_245/2008 du 2 mars 2009 consid. 4.2 ; 1C_406/2007 du 16 juillet 2008 consid. 5.2). En particulier, il ne doit pas stigmatiser, de manière inutilement vexatoire et au-delà du cercle des intéressés, le comportement d'un travailleur (ATF 137 III 303 consid. 2.2.2 ; 130 III 699 consid. 5.2).

4.7 Au cours de la procédure de recours, il n'est tenu compte des faits nouveaux que si la juridiction y est en général autorisée, si la décision ne sortit ses effets que dès la date de la décision sur recours et si l'économie de procédure l'impose (Blaise KNAPP, Précis de droit administratif, 4e éd., 1991, p. 434 n. 2105). Le rôle de l'autorité de recours consiste non seulement à contrôler la solution qui a été adoptée, mais aussi à imposer celle qui est propre à mettre fin à la contestation (ATF 98 Ib 178 ; 92 I 327 ; 89 I 337). Or, en faisant abstraction des faits survenus après la décision attaquée, l'autorité de recours ouvrirait la porte à de nouvelles procédures et risquerait donc de laisser subsister le litige, sans contribuer toujours utilement à le trancher (André GRISEL, Traité de droit administratif, Vol. II, 1984, p. 932).

L'art. 68 LPA autorise le recourant, sauf exception prévue par la loi, à invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuve nouveaux qui ne l'ont pas été dans les précédentes procédures. À plusieurs reprises, la chambre de céans a tenu compte, d'office ou sur requête, de faits qui s'étaient produits après que la décision de première instance eut été rendue (ATA/1016/2023 du 19 septembre 2023 consid. 5.1 et l'arrêt cité).

4.8 En cas de maladie du collaborateur, la doctrine précise s'agissant du droit d'être entendu qu'il s'agit de savoir si le collaborateur doit être entendu personnellement ou s'il peut être représenté par son avocat. En premier lieu, il s'agit de déterminer si le collaborateur ne peut réellement pas exercer son droit d'être entendu, ni par écrit, ni par oral. Un certificat médical d'incapacité de travail ne suffit pas, car ne pas être en état de travailler n'équivaut pas à ne pas pouvoir s'exprimer par écrit ou par oral. Si le collaborateur prétend ne pas être en état d'être entendu, il faut exiger un certificat médical attestant que le collaborateur ne peut pas être entendu, ni par écrit, ni par oral. En deuxième lieu, il s'agit d'examiner la question de la représentation. Le droit d'être entendu étant un droit fondamental, il est personnel, c'est-à-dire rattaché au sujet du droit et indissociable de la personnalité de celui-ci. Par contre, son exercice peut être confié à un représentant, par le sujet du droit, qu'il soit en état d'être entendu personnellement ou non (Gabrielle STEFFEN, « Le droit d'être entendu du collaborateur de la fonction publique : juste une question de procédure ? » in RJN 2005, p. 49 ss, p. 63 ; ATA/449/2020 du 7 mai 2020 consid. 4 et l'arrêt cité).

4.9 En l'espèce, selon la chronologie du dossier, le 8 décembre 2020, le GdC a informé la recourante et l'appelée en cause qu'il ne classerait pas la demande d'investigation et qu'il les informerait, le cas échéant, de l'ouverture d'une enquête préliminaire ou d'une investigation. Dans ce même courrier, il a annoncé qu'il entendait, préalablement, procéder à une tentative de conciliation au sens de l'art. 21A RPPers.

Par ce courrier, il a, dans un premier temps, retenu que la dénonciation n'était manifestement pas abusive et a accepté que soit menée une investigation (art. 21 al. 1 1ère phr. RPPers a contrario). Le GdC était de plus en droit d'initier une tentative de conciliation entre les parties, dans la mesure où il a estimé, à cette date, que la demande d'investigation ne devait pas être classée (art. 21A al. 1 RPPers).

Compte tenu du certificat médical de l'appelée en cause du 30 décembre 2020 attestant d'une contre-indication totale et définitive à devoir rencontrer la recourante, cette tentative de conciliation a été annulée le 6 janvier 2021. Le GdC a ainsi, par courrier du 28 janvier 2021, décidé de procéder à une investigation selon l'art. 23 al. 1 RPPers et a demandé à l'appelée en cause de se déterminer par écrit dans un délai de 20 jours. L'appelée en cause ne s'est pas déterminée compte tenu du certificat médical de son médecin du 1er février 2021 attestant qu'elle ne pouvait pas être entendue ni par écrit ni par oral.

Le GdC a donc mis en application la procédure prévue par l'art. 25 al. 3 RPPers en signalant à l'OCAS l'incapacité de l'appelée en cause à prendre part à la procédure. Il a également demandé à ce que la médecin-conseil de l'OCAS se positionne sur cette incapacité. Celle-ci a confirmé le 7 mai 2021 que, selon un échange avec le médecin de la mise en cause, celle-ci n'était pas capable de se rendre à son cabinet pour une visite médicale ou de prendre part à la procédure d'investigation oralement ou par écrit et ce de manière définitive. Elle était également définitivement incapable de constituer un avocat pour faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure d'investigation. Cet élément a été retenu comme étant décisif par le GdC pour classer la demande d'ouverture d'investigation.

Toutefois, cette communication est problématique à plusieurs égards.

En effet, le 28 janvier 2021, le GdC a décidé d'ouvrir une investigation – au sens de l'art. 23 al. 1 RPPers qu'il cite d'ailleurs dans son courrier – à l'encontre de l'appelée en cause. Il ne pouvait donc pas « classe(r) la demande d'ouverture d'investigation », sous peine d'adopter un comportement contradictoire et contraire à la bonne foi (art. 5 al. 3 et 9 Cst.). Il avait d'ailleurs annoncé dans un courrier du 11 février 2021 que sans nouvelles de la mise en cause, il poursuivrait l'instruction de l'investigation. La voie du classement de la demande de l'art. 21 al. 1 RPPers lui était donc fermée. De plus, n'ayant pas choisi la voie de l'enquête préliminaire (art. 22 RPPers), qui lui aurait permis de procéder également par voie écrite, conformément à l'art. 22 al. 1 RPPers qui renvoie notamment à l'art. 23 al. 2 RPPers, un classement sans suite ne pouvait pas non plus être prononcé (art. 22 al. 2 RPPers). Le GdC devait donc poursuivre la voie qu'il avait lui-même choisie en procédant par exemple à l'audition de témoins ou en ordonnant d'autres mesures d'instruction (art. 26 al. 1 et 3 RPPers). En toute état de cause, il devait, comme l'exige l'art.  28 RPPers, octroyer aux parties et à l'autorité d'engagement un délai de dix jours pour consulter le dossier et requérir toutes autres mesures d'instruction complémentaires qu'elles jugeaient utiles (art. 28 al. 1 RPPers), puis, une fois l'instruction terminée, établir un rapport (art. 29 RPPers).

En ne respectant pas la procédure instaurée par le RPPers à la suite de la notification de l'ouverture de l'investigation, le GdC a privé la recourante de toute possibilité de faire entendre par exemple des témoins compte tenu de l'impossibilité, à l'époque, de recueillir par oral ou par écrit la détermination de la mise en cause. La procédure est donc viciée au regard des exigences procédurales de l'art. 23 ss RPPers.

Pour ce motif déjà, la décision de l'OCAS qui confirme la « décision » du GdC du 11 juin 2021 de classer la demande d'ouverture d'une investigation formée par la recourante à l'encontre de l'appelée en cause doit être annulée.

En outre, l'état de santé de la mise en cause apparaît s'être amélioré, élément qu'il convient de prendre en compte conformément à la doctrine précitée.

En effet, il ressort du dossier du Tribunal fédéral que, le 13 décembre 2022, l'appelée en cause s'est déterminée par écrit, sans être représentée par sa fille ou un conseil, sur le recours de la recourante contre l'ATA/891/2022 précité formé par‑devant l'instance suprême. Sous la plume de son conseil, elle s'est également déterminée sur le recours le 1er décembre 2023. Surtout, elle a comparu à l'audience de comparution personnelle des parties le 8 décembre 2023 par-devant la chambre de céans, accompagnée de son conseil. Le dernier certificat médical figurant au dossier, daté du 4 décembre 2023, atteste uniquement que l'intéressée souffre de fatigabilité ainsi que des difficultés de concentration pouvant apparaître après une heure d'effort de concentration. Ces éléments démontrent que la mise en cause est médicalement a priori apte à être entendue par le GdC ou au moins apte à fournir une réponse écrite – personnelle ou sous la plume de son conseil – en réponse à la demande d'investigation, conformément à l'art. 24 al. 1 et 23 al. 2 RPPers. Il sied également de rappeler qu'en cas d'audition, les parties sont entendues séparément et peuvent se faire accompagner d'une personne de leur choix (art. 24 al. 2 RPPers), ce qui permet d'éviter toute confrontation avec la recourante.

Pour cette raison également, la décision attaquée doit être annulée.

Le recours sera ainsi admis. Le dossier sera renvoyé à l'intimé afin qu'il prenne une nouvelle décision (art. 30 RPPers) après que le GdC aura instruit la demande d'investigation de la recourante conformément à l'art. 23 ss RPPers, permettant de déterminer si celle-ci a subi une atteinte à sa personnalité et aura établi un rapport définitif (art. 29 RPPers). L'examen d'une atteinte à la personnalité ne saurait avoir lieu au stade du recours devant la chambre de céans, cette dernière ne devant pas, sans motif particulier, se substituer aux autorités chargées ordinairement de l'instruction.

5.             Vu l'issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 2'000.- sera allouée à la recourante, qui obtient gain de cause, à la charge de l'intimé (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 août 2021 par A______ contre la décision de l'office cantonal des assurances sociales du 28 juin 2021 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision de l'office cantonal des assurances sociales du 28 juin 2021 ;

retourne le dossier à l'office cantonal des assurances sociales pour nouvelle décision dans le sens des considérants ;

dit qu'il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à A______, à la charge de l'office cantonal des assurances sociales ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Eric MAUGUÉ, avocat de la recourante, à Me François BELLANGER, avocat de l'intimé, à Me Serge PATEK, avocat de l'appelée en cause, ainsi qu'au groupe de confiance, pour information.

Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

J. PASTEUR

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. KRAUSKOPF

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :