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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/156/2024

ATA/394/2024 du 19.03.2024 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/156/2024-FORMA ATA/394/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 mars 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourante

contre

SERVICE DES BOURSES ET PRÊTS D’ÉTUDES intimé



EN FAIT

A. a. A______, née le ______ 1993, a commencé une formation d’esthéticienne le 3 octobre 2023.

b. Le 6 novembre 2023, elle a déposé une demande en ligne auprès du service des bourses et prêts d’études (ci-après : SBPE) visant à obtenir un chèque annuel de formation (ci-après : CAF).

c. Le même jour, le SBPE a rejeté la demande, au motif de son dépôt tardif, soit après le début de la formation.

d. Le 30 novembre 2023, A______ a formé réclamation contre cette décision. Elle avait appris tardivement que le canton de Genève offrait une aide financière pour ce type de situations. Jeune maman, elle ne travaillait qu’à temps partiel. Elle avait besoin de cette allocation, ses revenus ne lui permettant pas de financer cette formation.

e. Par décision sur réclamation du 18 décembre 2023, le SBPE a maintenu sa position. Le fait d’avoir pris connaissance de l’existence du CAF après le commencement de la formation ne constituait pas un cas de force majeure.

B. a. Par acte du 15 janvier 2024, A______ a formé recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision.

Elle avait fait sa demande immédiatement après avoir eu connaissance de la possibilité d’obtenir une aide financière, soit un mois seulement après le début de ses cours. Le financement de CHF 13'000.- pour l’obtention du brevet fédéral de médecine esthétique n’était pas à sa portée. Elle avait économisé, mis à contribution sa famille et comptait sur cette aide du canton. L’institut de beauté pour lequel elle travaillait n’ayant ouvert que récemment, il ne pouvait lui proposer un emploi à plein temps. Son employeur ne pouvait pas non plus la soutenir financièrement. Le CAF lui était indispensable sous peine de mettre en péril son avenir. Enfin, elle se réjouissait de pouvoir pratiquer cette profession.

b. Par réponse du 29 janvier 2024, le SBPE a conclu au rejet du recours. La volonté de la commission d’évaluation des politiques publiques d’exclure les demandes rétroactives était de mettre en avant la volonté d’une démarche incitative de l’État. La recourante s’était inscrite à la formation sans connaître l’existence du CAF. La décision du SBPE n’avait donc aucune influence sur la décision de la recourante de suivre cette formation.

c. La recourante n’a pas répliqué dans le délai imparti à cet effet.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 17 al. 2 et 3 de la loi sur la formation continue des adultes du
18 mai 2000 - LFCA - C 2 08 ; art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10). Il sera précisé que si la recourante n’a pas pris de conclusions formelles en annulation de la décision du SPBE, on comprend de ses écritures qu’elle est en désaccord avec celle-ci et souhaite l’octroi du CAF sollicité.

2.             Le litige porte sur le refus de l’intimé d’allouer à la recourante un CAF dans le cadre de sa formation professionnelle.

2.1 L’État encourage la formation continue des adultes dans tous les domaines d’activités, notamment par des chèques annuels de formation continue (art. 1 al. 1 et art. 3 al. 1 let. b LFCA).

2.2 Selon l’art. 10 al. 1 let. a LFCA, le CAF est délivré aux personnes majeures domiciliées et contribuables dans le canton depuis un an au moins au moment de la demande.

L’art. 11 LFCA détermine les conditions de revenu à remplir par le bénéficiaire.

2.3 À teneur de l’art. 11 al. 5 LFCA, la personne intéressée doit remettre, avant le début du cours, sauf cas de force majeure, la formule de demande d’un CAF, dûment remplie, à l’office pour l’orientation, la formation professionnelle et continue, à l’un de ses centres ou au SBPE. À défaut, sa demande ne sera pas prise en compte.

Cette disposition, entrée en vigueur le 12 mai 2012, reprend l’ancien art. 26 al. 2 du règlement d’application de la LFCA du 13 décembre 2000 (RFCA - C 2 08.01). En relation avec ce dernier article, la chambre administrative avait constaté que, s’il existait une certaine logique à ce que la demande de CAF fût antérieure au début du cours que l’intéressée désirait suivre, ce délai ne résultait que de l’art. 26 al. 2 aRFCA et constituait une condition nouvelle par rapport à la LFCA, dépourvue de toute base légale (ATA/261/2011 du 19 avril 2011 consid. 4b). Lors de la révision partielle de la LFCA, vu cette situation et la volonté de la commission d’évaluation des politiques publiques d’exclure les demandes rétroactives, il avait été décidé de « faire monter » cette disposition dans la LFCA, en ajoutant la réserve des cas de force majeure, permettant d’introduire de la souplesse pour les cas nécessaires. Deux exemples de cas de force majeure avaient alors été donnés : la maladie et l’accident (MGC 2011-2012 VI A 5018).

2.4 Selon l’art. 11 al. 6 LFCA, le RFCA précise les modalités d’octroi.

L’art. 26 RFCA prévoit que la demande de CAF doit être déposée électroniquement par le biais du formulaire en ligne ou adressée par écrit au service (al. 1). Les conditions ainsi que le délai relatif au dépôt de la demande sont fixés à l’art. 11 al. 5 LFCA (al. 2).

Tombent sous la notion de cas de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de l’extérieur de façon irrésistible (ATA/1156/2019 du 19 juillet 2019 consid. 5 et les références citées).

2.5 En l’espèce, la recourante admet avoir remis sa demande après le début de sa formation. Elle ne remplit dès lors pas la condition d’octroi de l’art. 11 al. 5 LFCA.

Devant la chambre de céans, elle n’allègue aucun motif pouvant constituer un cas de force majeure, soit un événement extraordinaire et imprévisible survenant en dehors de sa sphère d’activité et s’imposant à elle de l’extérieur de façon irrésistible. Elle n’expose en particulier pas qu’elle aurait été empêchée d’effectuer sa demande avant le début de ses cours le 3 octobre 2023. Ainsi que l’a retenu l’intimé, le fait d’avoir pris connaissance de l’existence du CAF après le commencement de la formation ne constitue pas un tel empêchement. À juste titre, l’intimé a relevé que cet élément démontre en revanche que la décision de la recourante de suivre la formation ne dépendait pas de l’octroi ou non d’une bourse. N’est pas non plus un cas de force majeure le fait que la recourante se trouve dans une situation financière difficile. Il s’agit là de conditions de revenu définies aux al. 1 à 4 de l’art. 11 LFCA.

La condition de la remise de la demande d’un CAF avant le début du cours au sens de l’art. 11 al. 5 LFCA n’étant pas réalisée, c’est de manière conforme au droit que le SBPE a refusé de donner suite à celle de la recourante.

Le recours, mal fondé, sera en conséquence rejeté.

2.6 Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA et 11 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue du litige, il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 janvier 2024 par A______ contre la décision du service des bourses et prêts d’études du 18 décembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à A______ ainsi qu’au service des bourses et prêts d’études.

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :