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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2926/2023

ATA/382/2024 du 18.03.2024 ( EXPLOI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2926/2023-EXPLOI ATA/382/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 mars 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Manuel BOLIVAR, avocat

contre

DÉPARTEMENT DES INSTITUTIONS ET DU NUMÉRIQUE intimé

 



EN FAIT

A.           Par décision du 21 juillet 2023, le département des institutions et du numérique (ci‑après : DIN) a, sous la menace de la peine d’amende prévue à l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) : (I) ordonné à A______ la cessation immédiate de toute activité tombant sous le coupe de la loi sur la prostitution dans les locaux d’habitation (1) rue B______ ______, 1er étage appt n° 1.2, (2) rue B______ ______, 2e étage appt n° 23, (3) rue C______ ______, 3e étage appt n° 36 et/ou 38, (4) rue D______ ______, 5e étage appt n° 56, (5) rue E______ ______, 5e étage n° appt inconnu, (6) rue E______ ______, 4e étage n° appt inconnu, (7) rue E______ ______, 3e étage n° appt inconnu, (8) rue F______ ______, 3e étage n° appt inconnu, (9) rue G______ ______, 4e étage n° appt inconnu, (10) rue H______ ______, 4e étage, appt n° 44, (11) rue I______ ______ 1er étage appt n° 13, (12) route J______ ______, 3e étage appt n° 31, (13) rue K______ ______, 5e étage appt n° 52, (14) rue B______ ______, 4e étage appt n° 4.3 ; (II) refusé l’ouverture du salon de massage « L______ » ; (III) lui a infligé une amende de CHF 1'000.- et (IV) a mis à sa charge un émolument de CHF 300.-.

Il ressortait d’un rapport de la brigade de lutte contre la traite des êtres humains et la prostitution illicite (ci-après : BTPI) qu’il avait été condamné pour avoir mis à disposition d’une travailleuse du sexe dépourvue de titre de séjour des appartements pour y exercer la prostitution. Il était ou avait été propriétaire, locataire ou sous‑locataire des appartements mentionnés, qui constituaient un salon de massage éclaté.

Il avait d’abord refusé d’éclairer la BTPI puis objecté, sans convaincre, qu’il n’était pas en lien avec les appartements énumérés aux chiffres 5, 6, 11 et 12, que l’appartement du chiffre 10 ne lui était pas lié et qu’il avait rendu les appartements des chiffres 1 et 4. Il avait admis trouver les locataires sur le site « U______ » notamment sous la rubrique « érotique immobilier ». Il avait refusé de produire les documents dont il disposait au sujet de ses locataires.

B.            a. Par acte remis à la poste le 14 septembre 2023, A______ a recouru auprès de la Chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation, à ce qu’il soit dit que le DIN devait autoriser l’ouverture du salon « L______ » en reconnaissant qu’il disposait de l’honorabilité suffisante. Subsidiairement, la cause devait être retournée au DIN pour nouvelle décision. Préalablement, M______, président de la fondation N______ (ci-après : la fondation), et O______, présidente de l’association P______ (ci-après : l’association), devaient être entendus en qualité de témoins.

Le DIN lui reprochait d’avoir mis à disposition de Q______ un appartement rue R______ ______ pour y exercer la prostitution, alors qu’il n’avait jamais disposé d’appartements dans cet immeuble. Il contestait toute infraction à la loi sur les étrangers car Q______ disposait d’un visa de 90 jours lorsqu’il lui avait loué un appartement à la rue C______ pour quatre semaines au plus entre fin 2021 et début 2022.

Il était propriétaire d’un appartement au ______, rue B ______, qu’il louait, et locataire d’appartements rue C______ ______, rue F______ ______, rue G______ ______ et rue K______ ______, qu’il sous-louait. Il n’était plus titulaire du bail de l’appartement 1.2 au ______, rue B ______ depuis le 30 août 2021. Il n’était ni propriétaire ni locataire des autres appartements désignés par le DIN et n’avait aucun lien avec eux. Il ne tenait pas de registre de l’identité de ses locataires et louait ses logements par le biais de petites annonces, de sites internet ou par le bouche à oreille. Hormis les baux, il n’avait aucun rapport avec ses locataires. Il ignorait si certains d’entre eux s’adonnaient à la prostitution et ne les interrogeait pas à ce sujet. Il ne les aidait pas dans une telle activité et ne les mettait pas en contact avec des clients. Il ne leur avait jamais offert de services administratifs, de buanderie, de taxi.

L’association avait récemment acheté un immeuble rue V______ entièrement dédié à l’activité de la prostitution. Elle avait créé la fondation, qui avait acquis l’immeuble et louait ses appartements à des prostituées. L’association n’avait pas sollicité du DIN l’autorisation d’ouvrir un salon de massage et ce dernier ne l’avait pas exigé. Selon les tarifs usuels, le prix de la location d’un studio meublé sur S______ était supérieur à CHF 120.- par jour. Le prix usuel d’un logement meublé loué à un travailleur du sexe était de CHF 100.- par nuit.

Le DIN avait constaté les faits de manière inexacte et incomplète et abusé de son pouvoir d’appréciation. La notion de salon éclaté nécessitait l’intervention d’un tiers qui gérait les locaux de manière centralisée et apportait une aide aux personnes s’y prostituant seules, ce qui n’était pas son cas. Son cas était identique à celui de la fondation. Il ne louait pas ses appartements à des fins de prostitution.

C’était à tort et après avoir constaté les faits de manière inexacte que le DIN lui reprochait un défaut de collaboration. Sa requête d’autorisation pour ouvrir son salon « L______ » comportait toutes les pièces requises. Le DIN n’avait qu’allégué, sans le démontrer, qu’il louait les appartements à des travailleurs du sexe. Il avait expliqué de quels appartements il était le propriétaire ou le locataire. Ceux-ci n’était pas affectés exclusivement à l’exercice de la prostitution ; il ne pouvait lui être reproché de ne pas faire la démonstration d’éléments qui n’existaient pas. Une telle démonstration ne pouvait être exigée de lui. Il ne tenait pas, même sous forme électronique, la liste de ses locataires et de leurs identités. Aucune base légale n’obligeait un bailleur à tenir une telle liste. Il ne pouvait exiger ces informations de ses locataires.

La décision violait sa liberté économique. Il ne louait que des logements destinés à l’habitation. Seules les personnes exploitant un salon et mettant à disposition de tiers des locaux affectés à l’exercice de la prostitution avaient une obligation d’annonce. Reconnaître que la simple location d’appartements sans services constituait un salon éclaté entravait le but de la loi et la vidait de son sens. Interdire une telle location assécherait le marché du logement pour les travailleurs du sexe.

C’était de manière insoutenable que le DIN avait refusé de lui reconnaître l’honorabilité requise par la loi. Son casier judiciaire était vierge et la procédure pénale en cours portait sur le reproche d’avoir négligé de s’assurer qu’une locataire étrangère disposait d’un titre de séjour. Or, celle-ci disposait d’un visa valable 90 jours, ce qui indiquait que les charges n’étaient pas fondées. Il n’avait pas exploité de salon éclaté et avait collaboré.

L’interdiction d’exploiter les appartements sur lesquels il n’avait aucune maîtrise était contraire au droit.

Son droit d’être entendu avait été violé. Le DIN lui avait imparti un délai au 19 mai 2023 pour se déterminer sur la suspension de la procédure d’autorisation du salon « L______ » jusqu’à droit connu sur la procédure pénale dont il faisait l’objet. Il s’était déterminé par courriers des 14 avril et 19 juin 2023. Le 21 juillet 2023, le DIN avait prononcé la décision querellée, violant son droit d’être entendu.

b. Le 13 novembre 2023, le DIN a conclu au rejet du recours.

Il ressortait du rapport de la BTPI du 28 mars 2023 que les adresses imputées au recourant avaient été recueillies par le biais d’autorisations de courte durée dans lesquelles les travailleuses du sexe les avaient mentionnées comme étant leurs lieux de travail, ou à l’occasion de contrôles effectués à la suite de publications de petites annonces érotiques postées sur internet.

L’exception prévue par la loi pour une personne se prostituant seule et en toute indépendance dans un appartement ne visait pas à soustraire à la loi l’activité des sous-bailleurs qui faisaient commerce de la mise à disposition de locaux des fins exclusivement prostitutionnelles en générant des revenus non négligeables. Ceux‑là devaient être considérés comme des exploitants de salons éclatés, indépendamment du nombre des personnes qu’ils installaient dans ces locaux, ce d’autant plus qu’ils participaient aux choix de celles-ci. C’était en recourant à ses services que celles-ci pouvaient s’adonner à la prostitution dans ses locaux. Toute autre interprétation était contraire au but de la loi, qui était de protéger les travailleurs du sexe contre le risque d’exploitation. Le recourant gérait seul et de manière centralisée la location à la semaine d’une douzaine de locaux à des travailleuses du sexe de passage à des fins de prostitution et en tirait des revenus importants.

Les échanges de messages WhatsApp annexés au rapport de la BTPI montraient que le recourant louait du lundi au lundi pour un loyer de CHF 700.- à CHF 840.-. Celui-ci ne démontrait pas qu’il plaçait ses annonces ailleurs que sur des sites érotiques. Il ressortait de sa correspondance avec Q______ qu’il utilisait un vocabulaire typique de la prostitution, que celle-ci était une amie de « T______ » qu’il connaissait, et qu’il lui précisait plusieurs fois que « une fille lui demande » ou que « the next girl doesn’t have the key ».

La fondation était sans but lucratif et avait pour but de favoriser l’autonomie des travailleurs du sexe en mettant à disposition des lieux de vie et de travail à prix équitable, le produit, le bénéfice et le rendement étant affectés aux buts de la fondation.

c. Le 27 décembre 2023, le recourant a persisté dans ses conclusions et son argumentation.

Le rapport de renseignements fondant la décision de l’intimé n’établissait aucun lien entre les adresses supposées abriter des activités de prostitution et lui. La décision querellée, pas plus que le rapport de renseignements, ne fournissaient en effet aucune information sur ses liens avec les appartements n° 5, 6, 7 et 10.

En estimant que la simple relation de bail entre le recourant et une locataire constituait une aide, l’autorité était manifestement sortie du cadre légal. Elle reconnaissait qu’il ne fournissait aucun service, puisqu’elle indiquait qu’il ne fournissait aucun de ceux attendus des exploitants de salons. Le nombre des locations, les revenus générés par celles-ci et le statut du locataire principal étaient des circonstances non prévues par le texte légal. L’intimé ne démontrait pas que le revenu qu’il tirait de ses appartements était plus élevé qu’avec de simples locations meublées. Il contestait placer des travailleurs du sexe dans ses appartements et l’intimé ne démontrait pas qu’il le faisait. Placer une personne impliquait un rapport de subordination, qui faisait défaut. À fin novembre 2023, le site S______ offrait plus de 1'000 studios meublés ou appartements pour des locations de brève durée à Genève.

Il avait écrit aux régies en charge des différents immeubles. Une seule lui avait répondu, indiquant qu’il n’était plus locataire d’un appartement rue B______ ______. Il ne disposait d’aucune autorité pour obtenir une réponse des régies. Il produisait ces documents.

Une procédure pénale en cours portant sur des faits s’étant déroulés deux ans auparavant, dans laquelle il avait été entendu par la police en février 2023 et dont il n’avait reçu aucune information de la part du Ministère public ne permettait pas de lui dénier son honorabilité.

La fondation pratiquait exactement la même activité que lui. Le montant des loyers qu’elle exigeait était étranger au texte de la loi.

d. Le 8 janvier 2024, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Il sera revenu en tant que de besoin dans la partie en droit sur les arguments et pièces produits par les parties.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant conclut préalablement à l’audition de témoins.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit ne s'étend qu'aux éléments pertinents pour l'issue du litige et n'empêche pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l’espèce, le dossier contient suffisamment d’explications sur la fondation et ses buts, et il sera vu plus loin que l’activité de celle-ci ne peut être comparée aux agissements reprochés au recourant. Il s’ensuit que l’audition de M______, président de la fondation, et de O______, présidente de l’association, n’est pas nécessaire et ne sera pas ordonnée.

3.             Le recourant conteste exploiter un salon de massage.

3.1 La loi sur la prostitution du 17 décembre 2009 (LProst - I - 2.49) a pour principal objectif de permettre aux personnes qui se prostituent, c'est-à-dire se livrent à des actes sexuels ou d'ordre sexuel avec un nombre déterminé ou indéterminé de clients, moyennant rémunération (art. 2 al. 1 LProst), d'exercer leur activité dans des conditions aussi dignes que possible (art. 1 let. a LProst).

Selon la jurisprudence, le but poursuivi par la LProst ne se confine pas à la prévention d'infractions pénales. Elle tend aussi à favoriser l'exercice conforme au droit de l'activité de prostitution dans son ensemble, ainsi qu'une gestion correcte et transparente des établissements publics actifs dans ce domaine à risque. Elle vise également le but d’intérêt public légitime de protection des personnes exerçant la prostitution contre l’exploitation et l’usure (ATA/443/2023 du 26 avril 2023 consid. 4.3 ; ATA/1373/2017 du 10 octobre 2017 et les arrêts cités).

3.2 Selon l'art. 8 LProst, la prostitution de salon est celle qui s'exerce dans des lieux de rencontre soustraits à la vue du public (al. 1), quels que soient ces lieux (al. 2). Le local utilisé par une personne qui s'y prostitue seule, sans recourir à des tiers, n'est toutefois pas qualifié de salon au sens de la loi (al. 3).

La loi ne pose pas d'exigences quant au nombre d'utilisatrices, au nombre de pièces et au type de l'appartement. Selon le message du Conseil d'État du 10 mars 2009 à l'appui de la loi (alors projet de loi PL 10447), le terme « salon » doit être interprété de façon très large. Il fait référence à tous les endroits soustraits à la vue du public où des personnes exercent la prostitution (appartements, studios, saunas, fitness, bains turcs, caravanes, etc.) (p. 21). Selon le rapport de la commission judiciaire et de la police du Grand Conseil du 17 novembre 2009 chargée d'examiner le projet de loi, l'amendement de l'art. 8 al. 3 LProst a été adopté à l'unanimité moins une abstention, suite à une discussion sur l'opportunité de préciser le type de local, la location ou la copropriété, et des remarques sur les précisions éventuelles quant au nombre de pièces et au nombre d'utilisatrices ou encore des utilisateurs, qui s'est achevée par le constat « qu'à vouloir apporter trop de précisions, juridiques ou géographiques, cet article deviendrait problématique » (rapport de la commission, p. 36). L'art. 8 al. 3 LProst sera adopté avec le reste de la loi par le Grand Conseil à l'unanimité des votants le 17 décembre 2009.

La chambre de céans a jugé en 2020 que l’organisation, sous la direction et la responsabilité d’une personne, d’une activité uniforme de mise à disposition de lieux de prostitution, avec une permanence pour les clients et une plate-forme de services (lessive, accessoires) desservant les locataires de plusieurs chambres dans des appartements distincts, ainsi qu’un site unique de promotion établit que cette dernière exploitait bien une entreprise – au sens de l’art. 8 LProst – unique et ne sous-louait pas séparément, comme elle le soutient, des appartements privés (ATA/1100/2020 du 3 novembre 2020 consid. 4b).

3.3 La personne responsable au sens du projet de loi est la personne physique qui met à disposition de tiers des locaux destinés à l'exploitation d'un salon, qu'elle soit locataire, sous-locataire, usufruitière, propriétaire ou copropriétaire. La plupart du temps, c'est la personne qui exploite le salon et c'est à elle qu'incombe la responsabilité de remplir les exigences en matière d'annonce (rapport du Conseil d'État, cité, p. 22).

3.4 Dans un précédent de 2012, la chambre administrative a jugé qu'en partageant un local qu'elle louait avec au moins une autre prostituée contre versement d'une participation au loyer, la justiciable était bien responsable d'un salon au sens de l'art. 8 LProst, aucun lien de subordination n'étant par ailleurs requis (ATA/14/2012 du 10 janvier 2012 consid. 5).

3.5 Toute personne physique qui, en tant que locataire ou sous-locataire exploite un salon et met à disposition de tiers des locaux affectés à l'exercice de la prostitution doit s'annoncer, préalablement et par écrit, aux autorités compétentes en indiquant le nombre et l'identité des personnes qui y exercent la prostitution (art. 9 al. 1 LProst). La personne qui effectue l'annonce est considérée comme personne responsable au sens de la LProst (art. 9 al. 4 LProst).

3.6 Selon l'art. 10 LProst, la personne responsable d'un salon doit, au nombre des conditions personnelles à remplir, offrir, par ses antécédents et son comportement, toute garantie d'honorabilité et de solvabilité concernant la sphère d'activité envisagée (let. c), être au bénéfice d’un préavis favorable du département du territoire confirmant que les locaux utilisés peuvent être affectés à une activité commerciales (let. d), ne pas avoir été responsable au cours de dix dernières années d’un salon ou d’une agence d’escorte ayant fait l’objet d’une fermeture ou d’une interdiction d’exploiter (let. e).

3.7 L'art. 11 LProst prévoit que la personne responsable d'un salon est tenue de communiquer immédiatement aux autorités compétentes tout changement des personnes exerçant la prostitution et toute modification des conditions personnelles intervenues depuis l'annonce initiale.

3.8 Selon l’art. 12 LProst, la personne responsable d'un salon a notamment pour obligations : (a) de tenir constamment à jour et en tout temps à disposition de la police, à l'intérieur du salon, un registre mentionnant l'identité, le domicile, le type d'autorisation de séjour et/ou de travail et sa validité, les dates d'arrivée et de départ des personnes exerçant la prostitution dans le salon ainsi que les prestations qui leur sont fournies et les montants demandés en contrepartie. Pour ces derniers, une quittance détaillée, datée et contresignée par les deux parties leur sera remise, dont une copie devra également être en tout temps à disposition de la police à l'intérieur du salon ; (b) de s'assurer qu'elles ne contreviennent pas à la législation, notamment celle relative au séjour et au travail des étrangers, et qu'aucune personne mineure n'exerce la prostitution dans le salon ; (c) d'y empêcher toute atteinte à l'ordre public, notamment à la tranquillité, à la santé, à la salubrité et à la sécurité publiques ; (d) de contrôler que les conditions d'exercice de la prostitution y sont conformes à la législation, en particulier qu'il n'est pas porté atteinte à la liberté d'action des personnes qui se prostituent, que celles-ci ne sont pas victimes de la traite d'êtres humains, de menaces, de violences, de pressions ou d'usure, ou que l'on ne profite pas de leur détresse ou de leur dépendance pour les déterminer à se livrer à un acte sexuel ou d'ordre sexuel ; (e) d'autoriser l'accès des collaborateurs des services chargés de la santé publique afin de leur permettre de procéder aux contrôles et activités de prévention relevant de leur compétence ; (f) d'intervenir et d'alerter les autorités compétentes si elle constate des infractions dans le cadre des obligations qui lui incombent en vertu des lettres a à e ; (g) d'exploiter de manière personnelle et effective son salon, de désigner en cas d'absence un remplaçant compétent et instruit de ses devoirs dont elle répond, et d'être facilement atteignable par les autorités compétentes; le prête-nom est strictement interdit.

3.9 En l’espèce, le recourant conteste dans son recours tout lien avec les appartements nos 5 (rue E______ ______, 5e), 6 (rue E______, 4e), 10 (rue H______ ______), 11 (rue I______ ______) et 12 (route J______ ______). Dans sa réplique, il reproche à l’autorité intimée de ne fournir aucune information sur les liens qu’il aurait ou aurait eus avec les appartements n° 5, 6, 7 (rue E______) et 10 (rue H______).

Le département a expliqué que les adresses qui lui étaient imputées avaient été recueillies dans le cadre de demandes d’autorisations de courte durée à l’appui desquelles des travailleuses du sexe avaient mentionné ces adresses comme étant leurs lieux de travail, ou à l’occasion de contrôles effectués à la suite de publications de petites annonces érotiques postées sur internet.

Le rapport de police du 28 mars 2023 indique pour chaque appartement la source des informations : système d’information centrale pour la migration (ci-après : SYMIC) pour les appartements nos 1, 2, 5, 6, 7, 8, 9, 10 et 11 ; mise en cause du recourants dans une procédure pénale pour les appartements nos 3, 4 et 12 ; informations de la régie pour l’appartement n° 2 ; annonces du recourant pour les appartements nos 2, 9 et 11 ; informations fournies à la BPTI par des travailleuses du sexe pour les appartements nos 12 et 13.

Le rapport de police du 20 février 2023 indique que Q______ avait exercé la prostitution de manière illicite, soit sans titre de séjour, à la route R______ ______. Auparavant, elle avait occupé deux autres appartements, rue D______ et rue C______, qui lui avaient été mis à disposition via le numéro de téléphone du recourant. Le recourant a admis lors de son audition du 3 février 2023 à la police avoir loué ces deux appartements à Q______.

Le recourant a admis à la police poster des offres de location dans la partie destinée aux professionnels de la prostitution du site internet U______. Il a ajouté par la suite qu’il publiait également des offres dans les parties non professionnelles, sans toutefois le documenter. Il a également admis devant la police louer un appartement à une prostituée, mais l’a contesté dans la procédure administrative.

Il a admis dans ses écritures qu’il était propriétaire de l’appartement n° 14 (______, rue B ______) et locataire des appartements nos 3 (rue C______ ______), 8 (rue F______ ______), 9 (rue G______ ______) et 13 (rue K______ ______) et qu’il n’était plus locataire ou sous-locataire des appartements nos 1 (______, rue B ______), 4 (rue D______ ______) et 7 (rue E______ ______ 3e). Il a ajouté qu’il n’était ni propriétaire ni locataire des autres appartements désignés par le DIN et n’avait aucun lien avec eux. Il a par ailleurs indiqué à la police le 3 février 2023 qu’il a également disposé de l’appartement n° 4 (rue D______ ______). Il a annoncé ou mentionné les appartements nos 2, 9 et 11. Il ressort enfin de sa correspondance qu’il a proposé par WhatsApp les appartements nos 3 (rue C______ ______), 4 (rue D______ ______), 5, 6 ou 7 (rue E______ ______) et 10 (rue H______ ______).

Il sera encore observé que le recourant, après avoir dans un premier temps admis à la police qu’il louait des appartements, a rapidement cessé de collaborer et s’est notamment abstenu de fournir les éléments dont il disposait sur les baux conclus, les loyers payés et ceux encaissés ainsi que l’identité de ses locataires, de sorte qu’il ne saurait faire grief à l’intimé d’avoir établi les faits sur les seuls éléments dont il disposait. Le recourant ne saurait en outre soutenir sérieusement qu’il a cherché en vain à apporter la preuve de l’inexistence de baux en faisant valoir dans sa réplique du 27 décembre 2023 un courrier adressé à des régies le 14 décembre 2023.

L’intimé a ainsi établi à satisfaction de droit que le recourant dispose ou a disposé des appartements nos 1, 2, 3, 4, 7, 8, 9, 10, 11, 13 et 14.

Pour les appartements nos 5, 6 et 12 en revanche, les références au SYMIC ou aux déclarations de travailleuses du sexe non documentées à la procédure ne suffisent pas pour établir une maîtrise présente ou passée du recourant. L’exploitation de salons de prostitution ne peut ainsi lui être imputée pour ces logements, et le recours sera partiellement admis sur ce point.

Le recourant affirme qu’il ignorait ce que les locataires faisaient dans les appartements. Il ne peut être suivi.

Il a admis avoir publié des offres sur des sites spécialisés destinés aux travailleurs du sexe, ou encore par le bouche à oreille. Il a admis avoir loué deux appartements à Q______, qui s’y était prostituée. Il a exploité plusieurs salons de massage et est professionnellement engagé dans l’économie des prestations sexuelles depuis des années. Les échanges de messages au sujet des « filles » se succédant dans les appartements, retranscrits avec le rapport de police et mentionnés par l’intimé, laissent peu de doute sur la destination des locations et la connaissance qu’il avait de l’activité qui y serait déployée. Dans un message WHATSAPP du 17 janvier 2022, une locataire lui écrit : « A______, mais il n’y a pas de numéro sur la porte comment puis-je recevoir les gens ». Le 4 février 2022, il écrit à une locataire : « Salut ça va ? J’ai une fille qui me demande pour lundi de la place. Je dois savoir si tu as besoin de l’appartement une semaine supplémentaire ». Le 5 février 2022, une locataire lui dit : « je resterai une semaine, puis je reviendrai... ». Le 7 février 2022, il indique à une locataire : « Je mange en face. Je viens dans 4 min. Si tu es occupée tu me donneras discrètement ».

Il fait valoir qu’il mettait ses appartements en location au même titre que les offres paraissant sur le site S______. Il met toutefois lui-même en avant l’offre sinon pléthorique du moins abondante de ce type de sites tournés vers les touristes, de sorte qu’une offre similaire de sa part à cette même clientèle, à des tarifs comparables, n’apparaît pas de prime abord assurée du succès compte tenu de la concurrence. L’allégation qu’il loue ses appartements à des locataires ordinaires n’apparaît ainsi guère crédible.

C’est ainsi à bon droit que l’intimé a retenu que le recourant louait ses appartements à des prostituées.

3.10 Le recourant conteste avoir exploité un salon éclaté. Il admet que l’exploitation de plusieurs appartements puisse constituer un salon de massage éclaté. Il fait toutefois valoir qu’il s’est limité à une relation de bail et n’a apporté ni l’aide ni l’assistance – services administratifs, réservations de clients, de téléphone, de sites internet, de publicité, etc. – caractéristiques du salon éclaté.

Il perd de vue que le simple fait de mettre à disposition de travailleuses du sexe des appartements constitue pour celles-ci une aide précieuse. Il rappelle lui-même que le marché des lieux de prostitution est tendu et déplore que la pratique restrictive du DIN pourrait encore l’assécher davantage. À la raréfaction des lieux de prostitution s’ajoute le fait que les locataires viennent le plus souvent de l’étranger pour travailler à Genève durant de courtes périodes, si bien qu’elles doivent à chaque fois trouver rapidement un lieu pour exercer. La mise à disposition d’un choix d’appartements par un professionnel connaissant le milieu de la prostitution constitue ainsi indubitablement une aide apportée aux travailleuses du sexe. Les contacts entre collègues du milieu, qui peuvent correspondre au bouche à oreille évoqué par le recourant, facilitent encore l’accès aux logements. La gestion simultanée de séjours de courte durée dans différents appartements par une personne relève d’une gestion professionnelle et centralisée de lieux éclatés.

L’examen de sa correspondance WhatsApp avec ses locataires montre, durant une période assez courte allant du 19 décembre 2021 au 12 février 2022 une intense activité d’organisation et de répartition des appartements entre différentes candidates qui ressortit indubitablement à la gestion d’un salon éclaté.

Le recourant invoque en vain le cas des prostituées exerçant à leur domicile. Comme le relève l’intimé, ses locataires ne sont que de passage pour de brèves durées et dans le but de se prostituer, de sorte qu’elles n’établissent pas leur domicile à Genève mais le conservent au lieu de leur provenance, soit du centre de leurs intérêts.

C’est ainsi de manière conforme au droit que le DIN a retenu que la mise à disposition par le recourant, dans les circonstances d’espèce, de nombreux appartements à un nombre indéterminé de prostituées pour des durées variables mais le plus souvent brèves, correspond à l’exploitation d’un salon de massage éclaté.

C’est, de même, de manière conforme à la loi, que l’intimé a retenu que le recourant n’avait pas annoncé l’exploitation du salon éclaté, en violation de l’art. 9 al. 1 LProst, et avait omis de tenir à jour le registre des travailleuses exerçant dans son salon, en violation de l’art. 12 let. a LProst.

3.11 Le recourant se plaint d’une inégalité de traitement avec P______ et la fondation, que le DIN n’assujettirait pas à la procédure de déclaration alors qu’elles conduiraient exactement la même activité que lui.

La comparaison ne résiste pas à l’examen. Il ressort du registre du commerce que la fondation a pour but de soutenir, contribuer et développer des projets et des activités qui favorisent l’autonomie et les droits des travailleurs du sexe. À cette fin, elle met à disposition et assure la gestion de lieux de vie et de travail à prix équitable pour des travailleurs du sexe, notamment de l’immeuble rue V______ ______ dédié à l’activité de la fondation ; les bénéfices, le rendement et le produit net de la location seront affectés intégralement à la poursuite du but ; la fondation n’a aucun but lucratif. Par comparaison le recourant conduit une activité économique commerciale à but strictement lucratif. Il affirme louer ses appartements CHF 100.- la journée environ, ce qui correspond à un loyer de CHF 3'000.- par mois environ pour un studio, lequel loyer ne saurait être qualifié de philanthropique.

Les activités étant nettement différentes, le grief de la violation du principe d’égalité de traitement n’est pas fondée et il tombe à faux.

4.             Reste encore à examiner si les mesures et sanctions infligées au recourant respectent le principe de la proportionnalité.

4.1 L’art. 14 LProst a trait aux mesures et sanctions administratives dont peut faire l’objet la personne responsable d’un salon (al. 1) qui n’a pas rempli son obligation d’annonce en vertu de l’art. 9 LProst (let. a), ne remplit pas ou plus les conditions personnelles de l’art. 10 LProst (let. b), n’a pas procédé aux communications qui lui incombent en vertu de l’art. 11 LProst (let. c) ou n’a pas respecté les obligations que lui impose l’art. 12 LProst (let. d). L’autorité compétente prononce, selon la gravité ou la réitération de l’infraction (al. 2) l’avertissement (let. a), la fermeture temporaire du salon, pour une durée de un à six mois et l’interdiction d’exploiter tout autre salon, pour une durée analogue (let. b) ou la fermeture définitive du salon et l’interdiction d’exploiter tout autre salon pour une durée de dix ans (let. c).

La fermeture, temporaire ou définitive, est conçue davantage comme une mesure administrative, destinée à protéger l’ordre public et la liberté d’action des personnes qui se prostituent que comme une sanction. Pour être efficace, une telle mesure doit être accompagnée d’une véritable sanction administrative consistant en une interdiction d’exploiter tout autre salon afin d’empêcher la personne concernée de poursuivre, ou reprendre, l’exploitation d’un autre établissement quelques rues plus loin (MGC 2008-2009/VII A 8669).

4.2 Indépendamment du prononcé des mesures et sanctions administratives, l'autorité compétente peut infliger une amende administrative de CHF 100.- à CHF 60'000.- à toute personne ayant enfreint les prescriptions de la loi ou ses dispositions d'exécution (art. 25 al. 1 LProst).

Les amendes administratives prévues par la législation cantonale sont de nature pénale. Leur quotité doit ainsi être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/991/2016 du 22 novembre 2016 consid. 6a ; ATA/810/2016 du 27 septembre 2016 consid. 4a et la référence citée). En vertu de l'art. 1 al. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, ce qui vaut également en droit administratif sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 1 et 3 et 107 CP). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût‑ce sous la forme d'une simple négligence. L'administration doit faire preuve de sévérité afin d'assurer le respect de la loi et jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour infliger une amende. La juridiction de céans ne la censure qu'en cas d'excès. Enfin, l'amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/991/2016 précité consid. 6a).

4.3 Dans sa jurisprudence, la chambre de céans a confirmé la fermeture définitive d'un salon de massages pour défaut de préavis exigé par la loi (ATA/568/2023 du 30 mai 2023). En outre, la chambre de céans a également connu plusieurs dossiers dans lesquels le département a ordonné des fermetures définitives avec une interdiction d'exploiter durant dix ans. Les recours contre ces décisions ont tous été rejetés (ATA/934/2023 du 25 août 2023 ; ATA/791/2023 du 18 juillet 2023 ; ATA/443/2023 du 26 avril 2023 ; ATA/477/2022 du 4 mai 2022 ; ATA/1100/2020 du 3 novembre 2020 ; ATA/1373/2017 du 10 octobre 2017).

Dans un arrêt récent, la chambre de céans a jugé proportionné l'ordre de fermeture, ainsi que l'interdiction d'exploiter pendant une durée de dix ans infligés à un justiciable qui, alors qu’il connaissait parfaitement la réglementation applicable, avait tenté de cacher l’exploitation de sept appartements à des fins de prostitution, n’avait pas communiqué cette situation spontanément au département, n’avait pas signalé le nom des personnes exerçant la prostitution dans les sept appartements et n’avait pas sollicité le changement d’affectation des locaux d’habitation. Il en avait, régulièrement, retiré des revenus de plusieurs milliers de francs par mois. La faute du recourant était grave et les mesures le privaient uniquement de l'exercice d'une activité économique dans le domaine de la prostitution. Compte tenu de la gravité des infractions à la LProst, le montant de l’amende, de CHF 1'000.-, qui se situait au bas de la « fourchette » prévue par l'art. 25 al. 1 LProst, ne prêtait pas le flanc à la critique et apparaissait même clément (ATA/83/2024 du 23 janvier 2024 consid. 3)

4.4 En l’espèce, le recourant se plaint tout d’abord de la violation de son droit d’être entendu. Il n’avait pas pu s’exprimer avant que le refus d’autoriser l’ouverture du salon de massage « L______ » lui soit notifié.

Il ne peut être suivi. L’intimé a fondé sa décision sur le fait que les infractions à la LProst (défaut d’annonce défaut de tenue du registre) et son absence de collaboration mettaient en cause son honorabilité. L’attention du recourant avait été attirée sur ces griefs durant l’instruction. C’était même dans le cadre de l’instruction de sa demande d’ouverture du salon que la police lui avait posé des questions sur les appartements. Il ne pouvait donc ignorer que la reconnaissance des infractions et de son défaut de coopération pouvait avoir pour conséquence de le priver de l’honorabilité requise par la loi (art. 10 let. c LProst). Il est ainsi irrelevant qu’il aurait par ailleurs parfaitement collaboré pour l’ouverture du salon.

Le recourant ne pouvait donc ignorer qu’il risquait de se voir refuser l’ouverture du salon « L______ ». En toute hypothèse, si une violation de son droit d’être entendu devait être retenue, elle aurait été réparée devant la chambre de céans, qui dispose d’un plein pouvoir d’examen.

Le grief sera écarté.

4.5 Le recourant se plaint que la procédure pénale en cours – qui pourrait être en relation avec une infraction à la législation sur les étrangers commise par la mise à disposition des deux appartements à Q______, et dont le recourant affirme n’avoir aucune nouvelle – aurait été prise en compte au titre d’une possible condamnation pénale pour lui dénier son honorabilité.

Les soupçons consistants de commission d’infractions pénales peuvent suffire à priver de l’honorabilité. Cela étant, la question des effets de la procédure pénale en cours pourra souffrir de rester indécise en l’espèce, dès lors que les violations de la LProst et la collaboration médiocre du recourant dans le cas des appartements, soit son comportement, suffisent pour lui dénier de manière générale son honorabilité au sens de la LProst.

Le grief sera écarté.

4.6 Le recourant se plaint enfin de la restriction apportée par les sanctions à son activité économique.

Le reproche d’exploiter sans annonce et l’interdiction d’exploiter à des fins de prostitution seront restreints aux onze appartements dont il est établi que le recourant a ou avait la maîtrise.

Ceci étant précisé, les sanctions prononcées demeurent clémentes compte tenu de la faute du recourant, qui apparaît lourde, et d’un antécédent prononcé en 2021 sous la forme d’un avertissement en raison de la présence de deux prostituées dépourvues de titre de séjour dans l’un de ses salons. Elles ne privent celui-ci que de la possibilité d’exploiter à des fins prostitutionnelles les appartements dont il a la maîtrise, mais ne l’empêchent pas de les louer à des fins d’habitation. Elles ne lui interdisent pas toute activité d’exploitation pour une durée déterminée. Elles ne portent ainsi qu’une atteinte proportionnée à sa liberté économique, nécessitée par les objectifs d’intérêt public de la LProst.

L’amende de CHF 1'000.- se trouve au bas de la fourchette et est clémente.

Les mesures et sanctions infligées au recourant respectent donc le principe de la proportionnalité, de sorte que l'autorité intimée n'a pas violé la loi ni abusé de son pouvoir d'appréciation.

Le recours sera partiellement admis et l’interdiction d’exploiter les appartements nos 5, 6 et 12 comme lieux de prostitution annulée.

5.             Vu l’admission très partielle du recours, un émolument réduit de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant et une indemnité de procédure réduite de CHF 250.- lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2023 par A______ contre la décision du département des institutions et du numérique du 21 juillet 2023 ;

au fond :

l’admet partiellement ;

annule l’interdiction d’exploiter les appartements nos 5, sis rue E______ ______ au 5e étage n° inconnu, 6, sis rue E______ ______ au4e étage n° inconnu et 12, sis route J______ ______ au 3e étage n° 31 ;

confirme la décision attaquée pour le surplus ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

alloue à A______ une indemnité de procédure de CHF 250.-, à la charge de l’État de Genève ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Manuel BOLIVAR, avocat du recourant, ainsi qu'au département des institutions et du numérique.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

B. SPECKER

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière