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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/519/2023

ATA/203/2024 du 13.02.2024 sur JTAPI/941/2023 ( PE ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/519/2023-PE ATA/203/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 février 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Gazmend ELMAZI, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________



Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 septembre 2023 (JTAPI/941/2023)


EN FAIT

A. a. A______, né le ______ 1995, est ressortissant du Kosovo.

b. Il a obtenu une autorisation de séjour en Suisse dans le cadre du regroupement familial suite à son mariage, le 11 mai 2016 avec B______, ressortissante suisse. Le couple n'a pas d'enfant.

Le 14 mai 2019, B______ a introduit une requête en mesures protectrices de l'union conjugale (ci-après : MPUC) auprès du Tribunal de première instance (ci‑après : TPI), lequel a autorisé les époux à vivre séparés par jugement du 26 juillet 2019.

c. A______ vit avec C______, ressortissante kosovare au bénéfice d'une autorisation de séjour temporaire pour études valable jusqu'au 30 juin 2023. Ils ont une fille, D______, née le ______ 2022 à Genève.

d. L’autorisation de séjour de A______ a été renouvelée jusqu’au 10 mai 2021.

e. Il a sollicité à quatre reprises des visas pour se rendre au Kosovo : le 20 juin 2021, pour effectuer un voyage, puis, pour raisons familiales, les 17 novembre 2021, 31 mars 2022 et 13 juillet 2022.

f. Il travaille au sein de l’entreprise de gypserie peinture E______. F______, oncle de A______, en est l’administrateur unique, avec signature individuelle. A______ perçoit un salaire brut de CHF 4'960.- auquel s’ajoutent des indemnités pour jours fériés, vacances et transport. Le salaire net mensuel varie entre CHF 4'400.- et 5'150.-.

g. A______ ne fait l’objet d’aucunes poursuites ou actes de défaut de biens, n’a pas été aidé financièrement par l’Hospice général et ne figure pas au casier judiciaire.

B. a. Le 19 mai 2021, A______ a sollicité le renouvellement de son autorisation de séjour.

b. Le 26 juillet 2022, l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a informé A______ de son intention de ne pas la renouveler.

c. Par décision du 13 janvier 2023, après réception des observations de l’intéressé, l’OCPM a refusé de renouveler l'autorisation de séjour de A______ et a prononcé son renvoi de Suisse.

Par courrier du 20 mars 2019, B______ avait informé l'OCPM qu'elle ne faisait plus ménage commun avec son époux depuis le 1er mars 2019 en raison de violences conjugales. Elle avait déposé la requête en MPUC le 14 mai 2019, mentionnant la date du 1er mars 2019 comme fin de la vie commune. Elle avait annoncé son changement d’adresse à l'OCPM pour elle‑même et sa fille pour le 1er mars 2019. L’union conjugale avait donc duré moins de trois ans. Aucun élément du dossier ne permettait de penser que la poursuite du séjour de A______ en Suisse s'imposerait pour des raisons personnelles majeures. L'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) ne trouvait pas application, dès lors que la partenaire de l’intéressé ne disposait pas d'un droit de résidence durable en Suisse. Le dossier ne faisait enfin pas apparaître que l'exécution du renvoi ne serait pas possible, pas licite ou ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

C. a. Par acte du 13 février 2023, A______ a formé recours contre la décision précitée devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant à son annulation.

Rien ne permettait de retenir que le courrier du 20 mars 2019 de B______ avait effectivement été adressé à cette date. Vu le contenu et la situation conflictuelle, celui-ci avait uniquement pour but de lui porter préjudice. Il devait dès lors être écarté de la procédure. Aucun élément ne permettait de retenir l'existence de violences conjugales ou le prétendu départ de B______ du domicile conjugal. Cette dernière n'avait jamais déposé plainte pénale contre lui et aucune procédure de divorce n'avait été introduite. Elle avait quitté le domicile conjugal le 14 mai 2019, date à laquelle elle avait introduit sa requête en MPUC. La séparation du couple était dès lors intervenue après trois ans et trois jours.

Il remplissait les critères d'intégration, puisqu'il s'était installé à Genève en septembre 2014, alors âgé de 18 ans, avait toujours travaillé en Suisse, disposait d'excellents revenus, n'avait jamais commis d'infraction, possédait un excellent niveau de français, n'avait jamais émargé à l'aide sociale et n'avait pas de dettes. S'agissant de la date de son arrivée en Suisse, il renvoyait en particulier à une attestation des Transports publics genevois indiquant des achats d'abonnements mensuels dès le 27 octobre 2014 et un extrait AVS faisant état de cotisations dès l'année 2016. Selon une attestation de l'Université populaire albanaise, il avait suivi des cours de français du 23 février au 12 juin 2015. Toute sa famille proche séjournait à Genève. En particulier, son père, sa mère ainsi que son frère étaient titulaires d'un permis de séjour et vivaient en Suisse depuis de nombreuses années. Il n'avait quasiment plus aucun membre de sa famille au Kosovo. L'autorisation de séjour de sa partenaire devrait être prolongée le temps des études universitaires qu'elle allait entamer. En cas de renvoi au Kosovo, il ne pourrait que difficilement maintenir un lien avec son enfant.

b. L'OCPM a conclu au rejet du recours. Il a rappelé qu’il ressortait des courriers et des pièces transmises à l'OCPM, notamment du courrier du 20 mars 2019, reçu le lendemain par l'OCPM, du formulaire de changement d'adresse, de la confirmation du logeur du 2 avril 2019 et du contenu de la requête en MPUC, que B______ avait quitté le domicile conjugal le 1er mars 2019.

c. Après un second échange d’écritures, le TAPI a rejeté le recours par jugement du 4 septembre 2023. Les époux, bien qu’encore mariés, ne faisaient plus ménage commun. L’art. 42 de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) ne trouvait pas application. Les parties divergeaient sur la date de leur séparation. Malgré la critique du recourant, les éléments du dossier amenaient à retenir une date de séparation du couple du 1er mars 2019. Dans tous les cas, la séparation ne pouvait être postérieure à la date à laquelle B______ l'avait annoncée à l'OCPM, à savoir par courrier du 20 mars 2019, reçu le lendemain par cette autorité. L’on ne voyait en effet pas pour quelles raisons ni comment elle aurait annoncé s'être séparée de son mari sans avoir effectivement pris la décision de le faire. Or, même en retenant la date du 20 mars 2019 plutôt que celle du 1er mars 2019, l'union conjugale avait duré moins de trois ans depuis le mariage.

Le recourant n'alléguait pas avoir fait l’objet de violences conjugales ou que son mariage aurait été conclu en violation de sa libre volonté. Sa réintégration sociale au Kosovo n'était pas gravement compromise. En effet, arrivé vraisemblablement fin 2014 en Suisse, à l'âge de 18 ans (et non en 2016 à l'âge de 21 ans comme retenu par l'autorité intimée), il avait passé son enfance et son adolescence dans son pays d'origine, de sorte qu'il en maîtrisait manifestement la langue et les us et coutumes. Il avait sollicité la délivrance de quatre visas de retour depuis le dépôt de sa demande de renouvellement de son autorisation de séjour afin de se rendre dans son pays d'origine pour des raisons familiales, ce qui permettait de constater que, bien que des membres de sa famille résident légalement en Suisse, il disposait d'un tissu familial au Kosovo susceptible de faciliter sa réintégration. Actif dans le domaine du bâtiment, il pourrait faire valoir les connaissances acquises en Suisse et retrouver un emploi dans ce secteur dans son pays d'origine. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'était pas si profonde et irréversible qu'un retour dans son pays d'origine, où il conservait des liens très étroits, constituerait un déracinement complet. Son séjour en Suisse ne s’imposait pas pour des raisons personnelles majeures.

C______ résidait en Suisse uniquement au bénéfice d'une autorisation de séjour pour études temporaires et était appelée à rentrer dans son pays d'origine, accompagnée de sa fille, une fois les études concernées effectuées. Ainsi, ni sa compagne ni sa fille ne disposaient d'un droit de séjour durable en Suisse permettant au recourant de se prévaloir de la protection conférée par l'art. 8 CEDH.

D. a. Par acte du 5 octobre 2023, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Il a conclu à l’annulation du jugement et de la décision, à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de lui délivrer une autorisation de séjour, subsidiairement de préaviser favorablement sa demande auprès du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM). Préalablement, son audition ainsi que celles de G______, son père, H______, sa mère, et I______, son frère, devaient être ordonnées.

Il s’était installé en Suisse au mois de septembre 2014, à l’âge de 19 ans. Il n’avait acquis aucune formation ni exercé la moindre activité professionnelle dans son pays d’origine. Il séjournait en conséquence de manière ininterrompue en Suisse depuis plus de neuf ans. Son père, sa mère et son frère étaient titulaires de permis de séjour et vivaient en Suisse depuis de nombreuses années. Ils se voyaient quotidiennement et étaient très proches. Il avait établi une liste de sa famille en Suisse et détaillé les noms, prénoms, nationalité, titres de séjour, lien familial de 32 personnes, établies à Genève, Bâle, Saint-Gall, et Schwytz, allant de son père à de nombreux cousins.

Il a produit plusieurs attestations de soutien. Dans un document non daté, J______, intendant dans un foyer de l’Hospice général avant de prendre sa retraite, confirmait avoir pu connaître la famille A______, notamment ses deux enfants en bas âge. Il avait vu comment ceux-ci s’étaient transformés en adultes responsables. Leur intégration était évidente, Festim parlant déjà un bon français.

K______, dans une attestation du 20 septembre 2023, a confirmé que le recourant était un travailleur appliqué, gentil et serviable. Il avait tissé de forts liens avec plusieurs personnes en Suisse.

L______ a confirmé le connaître par le biais de sa mère. Il était très bien intégré en Suisse et y avait tout son entourage. Son retour au pays serait une perte pour ses connaissances en Suisse.

M______ soutenait son voisin. Il était exemplaire et respectueux, ne posait jamais de problème et était bien intégré.

N______, dirigeant de la société O______, confirmait avoir connu l’intéressé sur un chantier il y avait quatre ans. Ils étaient amis. Il était très honnête, de confiance et travaillait dur.

P______, voisin, confirmait qu’il était un travailleur respectueux, attentif, humain, calme et gentil. Il était un exemple d’intégration.

Q______ avait rencontré l’intéressé sur un chantier aux Eaux-Vives et entretenait des relations amicales avec lui. Ils se connaissaient depuis deux ans. Il était honnête et de confiance.

R______ était amie avec sa mère. Il était très gentil. Ils se voyaient à l’occasion de nombreux événements tels que des pique‑niques ou anniversaires notamment. Son retour au pays serait une grande perte pour la Suisse car il s’agissait d’un garçon travailleur, poli, respectueux.

S______ travaillait dans la même société que A______. Il parlait très bien le français était très bien intégré, très honnête et sociable.

T______ a confirmé qu’il était très bien intégré et parlait bien la langue française. Il serait dommage qu’il doive quitter la Suisse.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours.

c. Dans sa réplique, A______ a persisté dans ses conclusions. Il a produit une déclaration écrite de son employeur E______ SA vantant ses mérites. Il était un employé « modèle » et était devenu responsable dans la société pour laquelle il travaillait depuis six ans.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

e. Le recourant avait produit trois attestations de soutien supplémentaires devant le TAPI mentionnant sa bonne intégration. Aucune date n’était précisée quant à l’entrée sur le territoire helvétique de l’intéressé. La dernière, qui allègue du statut de personne de confiance dont l’entreprise aurait besoin, émane de l’oncle de l’intéressé.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant sollicite son audition ainsi que celles de ses père, mère et frère.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Le droit d'être entendu n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 En l'espèce, le recourant a eu l'occasion d'exposer ses arguments et de produire des pièces, tant devant l'OCPM que le TAPI et la chambre de céans. Pour le surplus, son niveau de français n’est pas contesté. Son audition n’apparaît pas nécessaire.

S’agissant de celle de ses proches, elle devrait servir à établir son intégration en Suisse. Ces auditions ne sont pas indispensables compte tenu des considérants qui suivent. À titre superfétatoire, d’une part les trois personnes concernées ne pourraient être entendues comme témoins mais uniquement à titre de renseignement (art. 31 let. a et b LPA) au vu de leurs liens familiaux. D’autre part, ils ont d’ores et déjà produit une attestation dans la procédure.

Il ne sera donc pas donné suite aux actes d’instruction demandés.

3.             Le litige porte sur la conformité au droit du refus de prolonger l'autorisation de séjour du recourant et du prononcé de son renvoi de Suisse.

4.             Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), qui a alors été renommée LEI, et de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201).

Conformément à la règle générale posée à l'art. 126 al. 1 LEI, c'est le nouveau droit matériel qui est applicable en la cause, dès lors que l’OCPM a informé le recourant de son intention de ne pas prolonger son autorisation de séjour le 26 juillet 2022 (arrêts du Tribunal fédéral 2C_145/2022 du 6 avril 2022 consid.  5 ; 2C_586/2020 du 26 novembre 2020 consid. 3.1 et les arrêts cités).  

5.             La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

5.1 Le conjoint d’un ressortissant suisse a droit à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité à condition de vivre en ménage commun avec lui (art. 42 al. 1 LEI).

Après la dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu de l’art. 42 LEI subsiste si l'union conjugale a duré au moins trois ans et que les critères d’intégration définis à l’art. 58a LEI sont remplis (art. 50 al. 1 let. a LEI).

Ces deux conditions sont cumulatives (ATF 140 II 289 consid. 3.8 ; 136 II 113 consid. 3.3.3).

5.2 En l’espèce, il n’est pas contesté que les époux sont toujours mariés mais ne font plus ménage commun.

La date de la fin de la vie commune est litigieuse. Le recourant ne développe toutefois aucun nouvel argument devant la chambre de céans ni ne produit aucune pièce à même de remettre en doute les pièces d’ores et déjà versées au dossier et le raisonnement du TAPI. En conséquence, il est établi que par courrier du 20 mars 2019, reçu le 21 mars 2019 par l’OCPM au vu du tampon humide apposé sur ladite correspondance, l’épouse du recourant a annoncé la fin de leur vie commune le 1er mars 2019, date à laquelle elle avait quitté le domicile conjugal. Il n’est pas allégué que la vie commune aurait été reprise. Par courrier du 2 avril 2019, reçu le 8 avril 2019 par l’autorité intimée, elle a annoncé officiellement son changement d’adresse, joignant à son courrier une attestation de son père qui confirmait la loger depuis le 1er mars 2019. La requête en mesures protectrices déposée par l’intéressée ultérieurement, le 14 mai 2019, reprend la date du 1er mars 2019 comme fin de la vie commune. Rien n’indique que cette date aurait été contestée lors de l’audience de comparution personnelle des parties du 24 juillet 2019, mentionnée dans le jugement du TPI du 26 du même mois. Dans ces conditions, le recourant échoue à prouver que la séparation ne serait pas intervenue à cette date et il peut être renvoyé pour le surplus, en tant que de besoin à l’argumentation du TAPI.

L’union des époux ayant duré moins de trois ans, et les conditions de l’art. 50 al. 1 let. a LEI étant cumulatives, il n’est pas nécessaire d’examiner l’intégration du recourant.

6.             Outre les hypothèses retenues à l'art. 50 al. 1 let. a LEI, le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour existe également si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEI).

6.1 Les raisons personnelles majeures visées à l'al. 1 let. b, sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEI).

Cette disposition a pour vocation d'éviter les cas de rigueur ou d'extrême gravité (ATF 137 II 1 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_500/2014 du 18 juillet 2014 consid. 7.1 ; 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 3.1).

L'art. 50 al. 1 let. b LEI vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n'a pas duré trois ans ou parce que l'intégration n'est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que – eu égard à l'ensemble des circonstances – l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 137 II 1 consid. 4.1). À cet égard, c'est la situation personnelle de l'intéressé qui est décisive et non l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s'agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée « raisons personnelles majeures » et de l'appliquer au cas d'espèce, en gardant à l'esprit que l'art. 50 al. 1 let. b LEI confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse, contrairement à l'art. 30 al. 1 let. b LEI (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 137 II 1 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral
[ci-après : TAF] F-626/2019 du 22 mars 2021 consid. 8.1 ; ATA/215/2020 du 25 février 2020 consid. 6a).

6.2 Lors de l'examen des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI, les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d'une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2).

L'art. 31 al. 1 OASA, prévoit que pour apprécier l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l’état de santé (let. f) et des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er janvier 2021, ch. 5.6.12).

6.2.1 S'agissant de l'intégration professionnelle, celle-ci doit être exceptionnelle : le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATA/981/2019 du 4 juin 2019 consid. 6c et l'arrêt cité).

6.2.2 S'agissant de la réintégration sociale dans le pays d'origine, l'art. 50 al. 2 LEI exige qu'elle soit fortement compromise. La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1). Le simple fait que l'étranger doive retrouver des conditions de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne constitue pas une raison personnelle majeure au sens de l'art. 50 LEI, même si ces conditions de vie sont moins avantageuses que celles dont cette personne bénéficie en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1188/2012 du 17 avril 2013 consid. 4.1).

6.3 Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d'une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c ; directives LEI, ch. 5.6).

La reconnaissance de l'existence d'un cas d'extrême gravité implique que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'un cas d'extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu'elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d'origine ou une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 précité consid. 5.2).

6.4 En l’espèce, il n’est pas établi que le recourant serait arrivé en Suisse en 2014, comme il le prétend. Aucune des attestations qu’il a fournies ne mentionne expressément ni une arrivée à cette date ni surtout un séjour continu depuis septembre 2014. Même à retenir cette date il y aurait séjourné de façon illicite pendant plus de deux ans, jusqu’en mai 2016, date de son mariage. Il a alors obtenu une autorisation de séjour avant de n’être, depuis 2021, plus qu’au bénéfice d’une simple tolérance sur le territoire helvétique.

Il est donc arrivé entre 19 et 21 ans en Suisse, après avoir vécu son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte au Kosovo. Il en connaît les usages et coutumes. Il conserve par ailleurs des liens étroits avec la communauté kosovare à l’instar de la liste des 32 personnes de sa famille établies en Suisse ou des liens qui le lient à son oncle pour lequel il travaille quotidiennement. Il conserve en conséquence des liens avec son pays d’origine et ses ressortissants.

Dans le cadre de l’analyse des critères de l’art. 31 OASA il peut être relevé que l’intégration du recourant, appuyée par plusieurs témoignages favorables, relève d’une intégration normale d’une personne vivant à Genève depuis sept, voire neuf années, qu’il n’est pas fait mention d’une intégration particulière qu’il s’agisse d’activités sportives, culturelles ou associatives notamment au sein de la cité, que l’absence de recours à l’aide sociale peut être attendue de tout ressortissant sollicitant une autorisation de séjour et que son intégration professionnelle en qualité de peintre en bâtiment dans l’entreprise de son oncle, ne répond pas aux critères, stricts, de la jurisprudence, pour pouvoir être qualifiée d’exceptionnelle.

Le recourant allègue que les visas auraient uniquement été demandés aux fins de passer des vacances dans son pays d’origine. Outre que cet élément n’est pas prouvé, voire est contredit par les demandes de visas, puisque seule la première fait mention d’un voyage, il témoignerait en tous les cas de l’attachement de l’intéressé et de sa famille avec leur pays d’origine. Il aurait manifestement un pied-à-terre ou de la famille pour l’y accueillir pendant ses vacances. Le recourant invoque d’ailleurs n’avoir quasiment plus aucun membre de sa famille au Kosovo ce qui a contrario confirme que certains y résideraient encore.

L’intéressé est jeune, puisqu’âgé de moins de 30 ans et en bonne santé. Il a indiqué n’avoir obtenu ni formation ni expérience professionnelle dans son pays d’origine avant de le quitter. Il pourra ainsi mettre à profit ses compétences tant professionnelles que linguistiques acquises en Suisse. Si certes la décision litigieuse implique qu’il retourne vivre dans son pays d’origine et se sépare de ses parents proches en tous les cas son père, sa mère et son frère, voire sa compagne et son fils, eux aussi de nationalité kosovare, ceux-ci pourront continuer à communiquer par les moyens modernes de communication voire à se rencontrer pendant leurs vacances, la famille domiciliée en Suisse ayant, selon leur allégations, l’habitude de se rendre au Kosovo dans ces occasions.

L’OCPM pouvait dès lors, de façon conforme au droit et sans abuser de son pouvoir d’appréciation, en procédant à une appréciation globale de l’ensemble de ces éléments, considérer qu’il n’y avait pas de raisons personnelles majeures, au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI, permettant de délivrer à l’intéressé une autorisation de séjour, l’intéressé n’étant pas dans une situation de détresse personnelle au sens de la jurisprudence.

7.             À juste titre, le recourant n’invoque plus devant la chambre de céans une violation de l’art. 8 CEDH.

7.1 Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 § 1 CEDH pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille. Pour qu'il puisse invoquer la protection de la vie familiale découlant de cette disposition, il doit entretenir une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement en Suisse (ATF 139 I 330 consid. 2.1). Les relations familiales qui peuvent fonder un droit à une autorisation sont avant tout les rapports entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant ensemble (ATF 135 I 143 consid. 1.3.2).

7.2 En l’espèce, il n’est pas contesté que la mère de son enfant et ce dernier n’ont pas le droit de résider durablement en Suisse.

8.             Aux termes de l’art. 64 al. 1 let. c LEI, tout étranger dont l’autorisation est refusée, révoquée ou n’est pas prolongée après un séjour autorisé est renvoyé. La décision de renvoi est assortie d’un délai de départ raisonnable (art. 64d
al. 1 LEI).

8.1 Le renvoi d’un étranger ne peut toutefois être ordonné que si l’exécution de cette mesure est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (art. 83
al. 1 LEI).

L'exécution du renvoi d’un étranger n’est pas possible lorsque celui-ci ne peut quitter la Suisse pour son État d’origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans un de ces États (art. 83 al. 2 LEI). Elle n’est pas licite lorsqu’elle serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (art. 83
al. 3 LEI). Elle n’est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l’étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEI).

8.2 En l’espèce, le recourant n’allègue pas que l'exécution de son renvoi dans son pays d’origine serait impossible, illicite ou inexigible au regard de
l’art. 83 LEI et le dossier ne laisse pas apparaître d’éléments qui tendraient à démontrer le contraire, la seule allégation que sa réintégration ne serait ni possible ni envisageable étant sans incidence.

Au vu de ce qui précède, l’OCPM n’a ni excédé ni abusé de son pouvoir d’appréciation en refusant, par décision du 13 janvier 2023, de renouveler l’autorisation de séjour du recourant. C’est ainsi à juste titre que le TAPI l’a confirmée.

Le recours sera rejeté.

9.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 5 octobre 2023 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 4 septembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Gazmend ELMAZI, avocat du recourant, à l'office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu'au secrétariat d'État aux migrations.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Michèle PERNET, juge, Louis PEILA, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. BALZLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :

 

 

 

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.