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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3523/2023

ATA/199/2024 du 13.02.2024 ( FPUBL ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3523/2023-FPUBL ATA/199/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 février 2024

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Guy ZWAHLEN, avocat

contre

TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS intimés
représentés par Me Constansa DERPICH, avocate



EN FAIT

A. a. A______, née le ______1982, a été engagée par les Transports Publics Genevois (ci-après : TPG) en qualité de conductrice à 100% à compter du 1er octobre 2022, sous réserve de la délivrance du permis d’élève conducteur.

Elle a suivi une formation jusqu’au 26 janvier 2023 et a commencé son activité de conductrice le 27 janvier 2023.

b. A______ se prévaut d’une formation de juriste et d’avoir exercé comme telle de 2015 à 2020, notamment au sein du B______.

B. a. Aux TPG, les responsables de groupe tiennent un journal dénommé « fiche RG » recensant les problématiques rencontrées avec les collaborateurs. Il en ressort les incidents concernant A______ évoqués ci-après.

b. Le 30 novembre 2022, elle a ainsi été reçue par son responsable de formation, C______, en raison de deux arrivées tardives. L’exigence de ponctualité lui a alors été rappelée.

Dans un courriel du 9 décembre 2022, elle a relevé que si trois minutes de retard pendant sa formation avaient peu d’impact, il était clair pour elle que ce même laps de temps lorsqu’un collègue attendait la relève était « inadmissible et très long ».

C______ a aussi dû rappeler à A______ l’exigence de porter la tenue conforme, alors qu’elle avait revêtu une veste civile en lieu et place de l’uniforme.

c. Il a aussi dû la reprendre à une autre occasion en raison du non-respect du sens de circulation dans un parking.

d. Lors de l’entretien de fin de formation du 26 janvier 2023, en présence de C______ et du futur responsable de l’intéressée, D______, ces problématiques ont été à nouveau évoquées, de même que la nécessité de respecter le circuit hiérarchique et de ne pas « trianguler ».

e. À cette même date, A______ a fait parvenir à E______, responsable de la planification et du roulement, un courriel au terme duquel elle indiquait que « sa position actuelle » n’était pas du tout compatible avec sa vie de famille. Elle était en couple avec un policier depuis 10 ans et selon le planning prévu, elle était avec lui « tout simplement en décalage complet ». Alors que son premier jour de travail était le 27 janvier 2023, elle demandait qu’il « tombe » le 1er ou le 7 février 2023 ou encore le 13 février 2023. Elle pouvait attendre un mois si nécessaire ou travailler des jours en plus afin de pouvoir « changer de position ». Elle espérait de tout cœur qu’E______ trouve une solution à son problème.

Dans un courriel du 27 janvier 2023, elle a relevé qu’étant maman de quatre enfants, elle ne pouvait absolument pas travailler en « GS ». Elle pensait que la plupart des agents en « GM » qui commençaient se « fich[aient] de leur position et qu’E______ pourrait l’intervertir avec l’un d’eux. Cette situation ne serait pour elle pas viable à long terme et elle lui demandait de bien vouloir réétudier son cas.

f. Entre le 27 janvier et le 31 mars 2023, les prestations de A______ ont été jugées peu satisfaisantes par les TPG. Elle avait commis trois erreurs de parcours, provoqué deux accidents sur obstacles fixes, fait l’objet d’une réclamation de client pour non-passage de bus le 26 mars 2023 en matinée, l’enquête ayant révélé qu’elle ne connaissait pas le parcours et avait eu plus de 10 minutes de retard, présenté une arrivée tardive de 7 minutes, porté un vêtement non conforme et tenu un langage et un accueil inappropriés à l’égard de son responsable à l’occasions de deux audits, les 5 février et 25 mars 2023, en lien avec ces deux derniers incidents.

g. Lors d’un entretien le 8 mars 2023, l’intéressée a fait part de son mécontentement quant à sa rémunération, à l’organisation du travail, notamment l’incompatibilité de certains horaires avec sa vie de famille, ainsi qu’un problème rencontré avec un collègue tenant des propos déplacés. Elle a à cette occasion dit ne pas vouloir donner suite auxdits propos.

h. À la suite de la formalisation de cet entretien par courriel du 15 mars 2023, A______ a écrit à C______ notamment : « […] Effectivement la ponctualité est fondamentale et faire venir des élèves à 7h tous les matins, pour sortir souvent à 9h car il n’y a pas de bus ni de formateur, c’est limite irrespectueux. Pour le port de la veste TPG, comme indiqué lors de notre entretien, elle n’est pas assez chaude par temps de grand froid. J’ai pu observer sur le réseau que chaque RG autorise ou pas, le port d’autres pièces civiles. Pour Monsieur D______, c’est exclu et c’est bien noté. Concernant le marquage au sol j’ai simplement suivi un collègue mais vous avez raison de me convoquer et de souligner ce genre de faits graves ».

i. À l’occasion de l’entretien d’évaluation du 31 mars 2023, il a été dit à l’intéressée que les critères du respect des parcours et des accidents étaient à améliorer, de même que l’aptitude à communiquer, l’orientation client et qualité et l’« orientation succès ».

A______ a, de son côté, relevé qu’elle avait commis trop d’erreurs de parcours dues à un manque de concentration, mais qu’elle connaissait ses lignes. Elle était toujours très motivée pour s’investir au sein de l’entreprise.

Elle a confié à son responsable faire des « extras » en dehors des TPG et a en conséquence reçu l’instruction de présenter une demande d’activité accessoire.

j. Le 5 avril 2023, elle a présenté une arrivée tardive de 7 minutes. Elle a par ailleurs indiqué à la centrale de régulation du trafic ne pas connaître les parcours de substitution des trams.

Selon F______, collaborateur au bureau du roulement, elle avait le lendemain cherché à lui faire retirer cette arrivée tardive du système informatique, ce qu’il avait refusé. A______ s’était alors adressée à un second collaborateur dudit bureau, G______, qui avait à son tour refusé d’accéder à sa demande.

k. Par courrier du 24 mai 2023, les TPG l’ont informée que les faits qu’elle avait relatés lors d’une audition le 25 janvier 2023 n’avaient pas pu être corroborés. Ayant apparemment pris connaissance de ce courrier le 12 juin 2023, A______ a alors contacté H______, de la centrale de régulation du trafic, pour indiquer qu’elle refusait de conduire le lendemain et a insisté pour être jointe en urgence par le piquet d’exploitation, sans quoi elle irait voir son médecin pour se mettre en arrêt maladie. H______ a indiqué qu’elle était très en colère.

Elle a dans la foulée adressé un courriel à sa hiérarchie aux termes duquel elle demandait si on la qualifiait de menteuse, critiquait son formateur qui était constamment sur son téléphone portable, disait être une personne d’honneur et détester l’injustice, leur « petite cuisine » consistant à étouffer des faits graves et « non infondés » ne lui convenant pas. Elle impartissait aux TPG un délai au 1er août 2023 pour « revoir [leur] copie », après quoi elle verrait avec le Conseiller d’État comment régler la situation d’une manière convenable.

l. Le 12 juin 2023, une cyclise a adressé une réclamation écrite aux TPG. Elle s’est plainte d’avoir été insultée par A______.

m. Le 15 juin 2023 au matin, A______ a été surprise, par son responsable D______, au volant de son véhicule avec un téléphone portable en mains. Son véhicule était à l’arrêt à Rive, devant le MCDONALD’S.

n. Par courriel du 15 juin 2023 à I______, responsable du dépôt du Bachet, alors qu’elle dépendait du dépôt En Chardon dont le responsable était J______, elle a fait savoir qu’elle ne pouvait pas continuer à être supervisée par une personne qui la « traqu[ait] » et qu’elle avait besoin d’une personne bienveillante et disponible qui pourrait l’aider à poursuivre sa carrière sereinement. Elle avait tort d’être en retard mais avait besoin de souplesse sinon elle allait « craquer ».

Elle a, à cette même date, évoqué auprès de K______, team leader, venu la soutenir suite à un appel de la centrale de régulation du trafic (ci-après : CRT), le fait qu’elle se sentait mise sous pression par son responsable, notamment en raison de l’épisode du téléphone portable précité, des audits et de l’évaluation de ses prestations.

o. Le 26 juin 2023 à 20h30, A______ a cherché auprès de la CRT à pouvoir changer de service car elle ne connaissait pas la ligne scolaire. Le lendemain matin elle a, toujours en vain, cherché à faire un échange de service pour cette journée avec une collègue.

Elle s’est annoncée absente du 27 au 30 juin 2023 et a alors cherché auprès d’E______, soit en dehors des procédures applicables, à pouvoir éviter le dépôt En Chardon et à prendre son service à celui de La Jonction, le seul moyen pour qu’elle puisse « rouler sereinement ».

p. Le 17 juillet 2023, les TPG ont reçu une réclamation d’une cliente se plaignant que A______ ne se soit pas arrêtée malgré ses signaux clairs.

q. Les 28 et 29 juillet 2023, celle-ci a présenté deux arrivées tardives, dont une de 14 minutes.

r. Le 3 août 2023, les TPG ont signifié à l’intéressée leur intention de mettre fin aux rapports de travail en raison des problématiques relevées depuis son entrée en fonction, soit quatorze « événements responsables » sur une période d’un peu plus de six mois, et l’ont libérée de son obligation de travailler, avec maintien de son traitement.

s. Dans des observations du 25 août 2023, A______ a relevé la difficulté du métier qu’elle exerçait, d’autant plus pour une femme, et les conditions de travail commandant une concentration totale et un comportement exemplaire. Elle ne contestait pas avoir commis des erreurs, dont la gravité était toutefois faible, voire moyenne. Ces erreurs s’expliquaient avant tout par une expérience de courte durée, des difficultés à concilier sa vie privée et sa vie professionnelle, ainsi que les incivilités et l’agressivité croissante des usagers de la route. La clientèle n’était pas toujours au courant des contraintes des conducteurs et les rendait systématiquement responsables des retards et de leur inconfort. Résilier les rapports de service serait un « gâchis complet ».

t. Par décision motivée du 27 septembre 2023, déclarée exécutoire nonobstant recours, les TPG ont résilié les rapports de service de A______, avec effet au 31 octobre 2023, sur la base de l’art. 71 du statut du personnel des TPG du 1er janvier 1999 (ci-après : SP).

L’accumulation conséquente d’événements ou d’incidents au cours de sa première année de service était problématique et n’était pas compatible avec les attentes et les exigences de l’entreprise envers son personnel en matière de savoir-faire. S’y ajoutaient un comportement et une attitude qui ne correspondaient pas aux standards des TPG en matière de savoir-être. Par ailleurs, son taux d’absentéisme était élevé, à savoir 31% sur la période de février à juillet 2023, abstraction faite de l’absence de près d’un mois, consécutive à l’annonce d’intention de résiliation de rapports de service.

C. a. A______ a formé recours contre cette décision par acte expédié le 27 octobre 2023 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative). Elle a conclu préalablement à l’octroi de l’effet suspensif et, principalement, à la mise à néant de la décision de licenciement du 27 septembre 2023.

Le contenu de l’expertise psychologique pour évaluer sa capacité à assumer la conduite de véhicules, un message de gratitude des TPG du 22 août 2023 et deux lettres de clients élogieuses entraient en totale contradiction avec les faits que les TPG lui reprochaient depuis son engagement. Elle revenait sur chacun des incidents reprochés pour en conclure que les TPG motivaient le licenciement par des événements ponctuels, non nuancés, dus au fait qu’elle était nouvelle dans l’entreprise et dont certains étaient contestés.

Ainsi et notamment, ses deux arrivées tardives pendant sa formation n’avaient eu aucune incidence sur la marche du service. Elle n’était pas en contact avec la clientèle lorsqu’elle avait revêtu une veste civile sur sa tenue de service en raison du grand froid. Elle n’avait pas respecté une flèche dans un parking car elle suivait un collègue et que la neige rendait cette signalisation invisible.

On lui reprochait à tort de s’être plainte, avec fondement, de harcèlement moral et sexuel ; le fait que la hiérarchie mette sa bonne foi en doute l’avait beaucoup affectée moralement et psychologiquement compte tenu de la gravité des actes qu’elle avait subis.

Elle avait en effet durant sa formation fait l’objet à plusieurs reprises de propos sexistes et déplacés. Son compagnon pourrait témoigner de l’atteinte à la personnalité qu’elle avait subie et de la déstabilisation que cela lui avait causée. L’un des responsables de la formation n’avait pas hésité à plusieurs reprises à lui parler de sodomie en disant par exemple que « quand c’est bien préparé, la sodomie c’est agréable ». Elle avait essuyé des propos humiliants et désobligeants comme « si tu as ton permis, c’est un miracle »  et « en exploitation, tu t’en sortiras jamais ». Alors qu’ils passaient vers le Pont-de-Sierne, un accompagnant avait désigné un établissement public en lui disant « c’est un bar à pipes ». À la prise de connaissance du courrier le 12 juin 2023, le choc psychologique causé par sa lecture l’avait empêchée de conduire ; elle était en larmes. Elle n’avait donc pas pu assumer le service du bus comme accepté. Elle avait appelé le piquet pour informer ses collègues et cherché en vain à joindre sa hiérarchie. Elle avait refusé la proposition de se mettre en arrêt maladie, pensant qu’elle irait mieux dès le lendemain.

Quant à l’épisode du téléphone portable, elle avait uniquement saisi l’objet pour éteindre le son, alors que le bus était à l’arrêt, frein enclenché, et que tous les passagers en étaient descendus. Elle n’avait pas fait d’erreur de parcours « à comptabiliser ». Étant novice, elle avait dans un autre cas consulté la fiche de route à certains arrêts précisément pour ne pas se tromper. Les deux accidents n’avaient entraîné que des dégâts matériels, le premier lors d’une manœuvre difficile et le second étant un simple contact entre le rétroviseur du véhicule et la porte du dépôt qui n’avait causé qu’une fissure à son attache. Le 26 mars 2023, il y avait effectivement eu un retard ; elle s’en était excusée auprès du client qui avait refusé qu’elle le conduise. Elle avait certes demandé, mais sans urgence, à « changer de position » pour une autre convenant mieux à sa vie de famille. Le 5 avril 2023, elle avait fait une confusion entre l’heure de départ et celle d’arrivée du dépôt, mais en était sortie à temps, de sorte que les usagers n’avaient en rien été prétérités.

Pour le parcours du tram, il n’y avait eu qu’une formation de base. Comme elle manquait d’expérience vu son arrivée récente et craignait de coincer son bus dans les parties herbeuses du parcours, elle avait demandé à une collègue de la remplacer. La « RTC » ne l’avait pas contactée « à cet effet ».

S’agissant de l’épisode avec la cycliste, celle-ci avait fait une manœuvre complètement contraire aux règles de la circulation, de manière imprévisible et dangereuse, ce qui l’avait obligée à freiner d’urgence et avait effrayé les passagers. La cycliste était arrivée hystérique, avait jeté son vélo au sol et l’avait invectivée. Toute discussion avec elle s’étant avérée vaine, elle avait refermé les portes du véhicule et signalé l’incident. Les passagers avaient approuvé son comportement.

Le 26 juin 2023, elle s’était trouvée dans un état d’épuisement en raison de la suite donnée à sa dénonciation. Elle avait dû demander de changer d’horaire, sa collègue ne pouvant pas la remplacer. Le 27 juin 2023, alors qu’elle était en convalescence à la suite d’une opération d’une hernie inguinale, lui causant des douleurs en particulier à l’effort, comme la marche après huit heures de conduite, elle avait demandé à « fréquenter le moins possible » le dépôt En Chardon qui devait être rejoint à pied depuis Blandonnet. Elle avait repris trop vite le travail, soucieuse de ne pas être trop longtemps absente vu son arrivée récente aux TPG.

Le 17 juillet 2023, elle n’avait pas vu le client. Rien n’établissait toutefois qu’elle aurait pu le voir. Les 28 et 29 juillet 2023, elle avait cru qu’elle avait une « coupure » d’1h30 pour le repas. Elle n’avait pas entendu l’appel du « RTC » dans la mesure où son téléphone était en mode silence. Elle avait raté sa relève. Le lendemain, elle avait cru qu’elle commençait au dépôt de Bachet. Elle ferait en sorte que de telles erreurs ne se reproduisent pas.

La prétendue « triangulation », qu’elle contestait, n’avait jamais été le fruit d’une action délibérée de sa part.

Elle avait toujours eu à cœur de remplir correctement les devoirs de sa charge, n’avait jamais fait l’objet d’une mesure disciplinaire, ni de remarques y relatives, pas plus que d’un avertissement formel. Elle était consciente des points qu’elle devait améliorer, conséquences de son peu d’expérience dans l’entreprise. Si par impossible la chambre administrative rejoignait les critiques des TPG, celles-ci ne sauraient fonder un licenciement sur la base de l’art. 71 SP, dès lors que le comportement et les faiblesses relatés, contestés pour certains, devaient être analysés à l’aune d’une employée nouvelle dans l’entreprise ne bénéficiant pas d’une grande expérience. Dans ces circonstances, le maintien de son statut ne saurait constituer un inconvénient pour le bon fonctionnement de l’entreprise justifiant la résiliation des rapports de service sur la base de cette disposition. Du reste, les TPG n’expliquaient pas dans la décision querellée en quoi il en irait ainsi.

Si par impossible la chambre administrative ne mettait pas à néant la décision querellée, les TPG devraient être condamnés à lui verser l’équivalent de six mois de salaire, vu l’absence de justes motifs de licenciement, ce dernier étant abusif. Selon la jurisprudence, un congé était contraire au principe de la bonne foi lorsque donné par un employeur qui violait les droits de la personnalité du travailleur. Il fallait aussi tenir compte du fait que les TPG lui reprochaient de s’être plainte de harcèlement, alors qu’il était de leur devoir de la protéger.

b. La présidence de la chambre administrative a, par décision du 1er novembre 2023, rejeté la requête d’effet suspensif.

c. Les TPG ont conclu au rejet du recours.

Ils avaient été plus que compréhensifs avant de prendre la décision querellée, laissant à la recourante une réelle possibilité de s’améliorer, mais elle avait démontré son absence de remise en question et de prise au sérieux de la nécessité de corriger les manquements reprochés. S’il n’y avait pas eu de procédure disciplinaire, tous les points problématiques constatés dès le 27 janvier 2023, au nombre de quatorze (sans compter ceux rencontrés pendant la période de formation), résumés très clairement dans la « fiche RG », avaient fait l’objet d’un traitement circonstancié, y compris sous la forme d’entretiens et de courriers formels. Ils ne sauraient être dus au seul manque d’expérience de tout conducteur commençant son activité aux TPG.

Il fallait garder à l’esprit qu’en tant qu’entreprise de transports publics et établissement public, ils se devaient de maintenir la confiance et la considération de la population en leur mission.

La recourante avait été entendue le 25 janvier 2023 en lien avec sa dénonciation par un tiers de propos inappropriés de la part de l’un de ses formateurs. Les TPG avaient pris très au sérieux les faits relatés, considérés comme graves, et procédé à toutes vérifications possibles par l’audition du formateur mis en cause et du témoin désigné par la recourante. Il n’avait pas été possible de corroborer ou d’établir les faits dont celle-ci se plaignait, ce qui lui avait été expliqué dans un courrier du 24 mai 2023, de même que, en dépit de cette conclusion, il était rappelé qu’il était important de continuer à leur communiquer tout ressenti du type de celui qu’elle avait vécu. Il ne saurait ainsi être retenu un licenciement abusif au simple motif que la plainte de la recourante n’aurait pas recueilli la suite souhaitée. Il n’avait jamais été reproché à cette dernière de s’être plainte de harcèlement mais bien plus d’avoir subséquemment, à la réception du courrier du 24 mai 2023, eu une attitude particulièrement virulente et peu respectueuse envers sa hiérarchie (refus de conduire le lendemain) faisant montre une nouvelle fois d’un comportement de défiance à l’égard de son employeur, peu compatible avec le respect mutuel requis dans le cadre de rapports de travail. Le congé n’avait enfin aucun lien avec sa plainte.

d. Dans sa réplique datée du 8 janvier 2024 mais reçue le 4 janvier 2024, la recourante a relevé qu’outre quelques incidents véniels, les TPG faisaient grand cas de trois événements, le premier étant sa demande d’adaptation de ses modalités de service pour les rendre plus compatibles avec ses besoins comme femme avec quatre enfants. Or, ils avaient l’obligation de respecter la loi générale sur l’égalité et la lutte contre les discriminations du 23 mars 2023 (LED - A 2 90, entrée en vigueur 1er juillet 2023), la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (LEg - RS 151.1) et la loi sur l’égalité et la lutte contre les discriminations liées au sexe et au genre du 23 mars 2023 (LED-Genre - A 2 91, entrée en vigueur le 1er juillet 2023) et d’œuvrer pour que ses conditions de travail soient compatibles avec sa position de mère.

Les TPG ne pouvaient en second lieu lui reprocher sa réaction à la suite de la réception de la lettre de « non-lieu » du 24 mai 2023 consécutivement à sa plainte pour harcèlement sexuel puisque, selon la jurisprudence de la chambre administrative, la victime de harcèlement sexuel, même sous forme de remarques déplacées, de propos salaces, en était particulièrement affectée. Il n’était pas soutenable d’affirmer qu’aucune suite ne pouvait être donnée à sa plainte faute de preuves directes, à savoir des témoignages. Vu les déclarations de son compagnon, son plus proche confident, qui de plus était policier, auquel elle s’était confiée, les TPG auraient dû considérer ses propres déclarations comme crédibles et prendre toutes les mesures pour la protéger telles qu’imposées par la LED et la LEg et non pas tirer de son comportement un motif de licenciement.

Celui-ci s’avérant être une mesure de rétorsion, il devait être considéré comme abusif dans une application par analogie de l’art. 336 al. 1 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations - RS 220).

e. Les parties ont été informées, le 4 janvier 2024, que la cause était gardée à juger.

f. Leur argumentation et les pièces de la procédure seront pour le surplus repris ci‑dessous dans la mesure nécessaire au traitement du litige.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             La recourante sollicite l’audition de son compagnon.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 132 II 485 consid. 3.2 ; 127 I 54 consid. 2b). Ce droit n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit à l’audition de témoins (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1).

2.2 En l’espèce, l’audition sollicitée vise à établir que la recourante aurait subi un harcèlement sexuel, sous la forme de remarques « salaces » de la part de l’un de ses formateurs. Or, comme cela sera exposé ci-après, même si ces allégations étaient confirmées par le compagnon de la recourante, dont au demeurant une attestation écrite du 12 octobre 2023, établie à la demande du conseil de la recourante, figure à la procédure, elles ne seraient pas susceptibles d’influer sur l’issue du litige.

Il ne sera donc pas procédé à l’audition sollicitée.

3.             La recourante soutient que son licenciement ne reposerait sur aucun motif et serait abusif.

3.1 Les TPG, établissement de droit public genevois (art. 1 al. 1 de la loi sur les transports publics genevois du 21 novembre 1975 - LTPG - H 1 55), sont dotés de la personnalité juridique et sont autonomes dans les limites fixées par la LTPG (art. 2 al. 1 LTPG). Tous les employés sont liés aux TPG par un rapport de droit public (art. 2 al. 2 SP).

3.2 Conformément à l’art. 2 SP, les rapports de travail sont régis par la loi fédérale sur le travail dans les entreprises de transports publics du 8 octobre 1971 (LDT - RS 822.21), la LTPG, la loi fédérale sur la protection des données du 19 juin 1992 (LPD - RS 235.1), la LEg ainsi que par le SP, son règlement d’application et ses règlements particuliers et instructions de service (al. 1). Tous les employés sont liés aux TPG par un rapport de droit public (al. 2). Le CO, notamment son titre dixième (du contrat de travail), s’applique à titre de droit public supplétif (al. 3).

3.3 En application de l’art. 68 al. 2 let. c SP, le contrat de travail peut être résilié par l’autorité d’engagement moyennant un délai de congé de trois mois pour la fin d’un mois de la deuxième à la neuvième année.

3.4 Selon l’art. 71 SP, la direction des TPG peut mettre fin aux rapports de service pour des motifs dûment justifiés en respectant les délais de congé (al. 1). Est considéré comme dûment justifié, tout motif démontrant que la poursuite des rapports de service n’est pas, objectivement, dans l’intérêt du bon fonctionnement de l’entreprise (al. 2).

S’il retient que le licenciement ne repose pas sur un motif justifié, le juge peut proposer à l’entreprise la réintégration du salarié. Si l’entreprise s’y oppose ou s’il renonce à une telle proposition, le juge fixera une indemnité dont le montant ne peut être inférieur à un ni supérieur à huit salaires mensuels (art. 72 al. 1 SP).

3.4.1 Selon la jurisprudence de la chambre de céans, l'art. 71 SP équivaut au licenciement pour motif fondé prévu par les art. 21 al. 3 et 22 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05). Comme pour les fonctionnaires de l'administration cantonale, il n'est pas imposé aux TPG de démontrer que la poursuite des rapports de service est rendue impossible, mais uniquement qu'elle n'est plus compatible avec le bon fonctionnement de l'entreprise. L'intérêt public au bon fonctionnement des TPG sert en effet de base à la notion de motif dûment justifié qui doit exister pour justifier un licenciement en application de l'art. 71 SP (ATA/1839/2019 du 20 décembre 2019 consid. 7c et les arrêts cités).

Ledit motif (ou motif fondé s’agissant des art. 21 al. 3 et 22 LPAC) est un élément objectif indépendant de la faute du membre du personnel. La résiliation pour motif fondé, qui est une mesure administrative, ne vise pas à punir mais à adapter la composition de la fonction publique dans un service déterminé aux exigences relatives au bon fonctionnement dudit service (ATA/1471/2017 du 14 novembre 2017 ; ATA/674/2017 du 20 juin 2017 ; MGC 2005-2006/XI A 10420).

3.4.2 En matière de fonction publique genevoise, le Tribunal fédéral a considéré que le comportement d’une personne employée par un établissement public cantonal pouvait entraîner la rupture du lien de confiance avec son employeur et justifier un licenciement administratif au sens des art. 21 al. 3 et 22 LPAC, et ce bien qu’il n’apparût pas que cette personne ait gravement porté atteinte au fonctionnement ou à l’image de l’autorité intimée. Les conséquences d’un licenciement administratif étaient moins graves que la révocation disciplinaire et une violation fautive des devoirs de service n’excluait pas le prononcé d’un tel licenciement (arrêt du Tribunal fédéral 8C_203/2010 du 1er mars 2011 consid. 3.5 et 3.6) ;

3.4.3 L'employeur jouit d'un large pouvoir d'appréciation pour juger si les manquements d'un fonctionnaire sont susceptibles de rendre la continuation des rapports de service incompatible avec le bon fonctionnement de l'administration (arrêt du Tribunal fédéral 8C_15/2019 du 3 août 2020 consid. 7.2 et les arrêts cités).

3.4.4 Les rapports de service étant soumis au droit public, leur résiliation doit respecter les principes constitutionnels généraux, notamment les principes de la légalité, de l'égalité, de la proportionnalité, de la bonne foi, de l'interdiction de l'arbitraire, lors de la fin des rapports de travail des employés (ATA/600/2021 du 8 juin 2021 consid. 9d ; ATA/479/2020 du 19 mai 2020 consid. 5d).

3.5 Le principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.) exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude) et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) ; en outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et il exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (principe de la proportionnalité au sens étroit, impliquant une pesée des intérêts ; ATF 143 I 403 consid. 5.6.3 ; 142 I 76 consid. 3.5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_635/2020 du 13 janvier 2022 consid. 3.1). Le principe du reclassement, applicable aux seuls fonctionnaires, est une expression du principe de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_309/2008 du 28 janvier 2009 consid. 2.2 ; ATA/130/2022 du 8 février 2022 consid. 6b).

3.6 En vertu de l'art. 34 SP, l'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité de l'employé ; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité.

3.7 À teneur de l'art. 328 CO, l'employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur ; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu'ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes (al. 1). Il prend, pour protéger la vie, la santé et l'intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l'expérience, applicables en l'état de la technique, et adaptées aux conditions de l'exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l'exiger de lui (al. 2).

3.8 L'art. 336 al. 1 et 2 CO énumère des cas dans lesquels la résiliation est abusive ; cette liste n'est toutefois pas exhaustive et une résiliation abusive peut aussi être admise dans d'autres circonstances. Il faut cependant que ces autres situations apparaissent comparables, par leur gravité, aux cas expressément envisagés par l'art. 336 CO. Ainsi, un congé peut être abusif en raison de la manière dont il est donné, parce que la partie qui donne le congé se livre à un double jeu, contrevenant de manière caractéristique au principe de la bonne foi, lorsqu'il est donné par un employeur qui viole les droits de la personnalité du travailleur, quand il y a une disproportion évidente des intérêts en présence ou lorsqu'une institution juridique est utilisée contrairement à son but (ATF 136 III 513 consid. 2.3, et les arrêts cités).

3.8.1 À teneur de l'art. 336 al. 1 let. a CO, le congé est abusif, notamment, lorsqu'il est donné par une partie pour une raison inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise.

3.8.2 Une violation grossière du contrat, notamment une atteinte grave de la personnalité dans le cadre d'une résiliation, peut rendre celle-ci abusive (ATF 132 III 115 consid. 2.2). Notamment, le harcèlement psychologique, à titre d'atteinte à la personnalité du travailleur, peut donner lieu à une indemnisation si sa gravité le justifie. Toutefois, par lui-même, il ne rend pas la résiliation des rapports de travail abusive. Celle-ci peut le devenir si, par exemple, elle intervient à cause d'une baisse des prestations du travailleur qui est la conséquence du harcèlement psychologique toléré par l'employeur en violation de son obligation résultant de l'art. 328 al. 1 CO (ATF 125 III 70 consid. 2a et les références citées ; ATA/78/2020 du 28 janvier 2020 consid. 2f).

4.             En l’espèce, les allégations de la recourante en lien avec un congé-représailles ont été formulées pour la première fois dans son acte de recours et elles ne sont étayées par aucune pièce du dossier. Quoi qu’elle en dise, le congé donné n’est pas uniquement motivé par « trois événements », dont ses demandes en lien avec l’organisation de son service pour tenir compte de ses impératifs familiaux, pas plus que par sa réaction après la prise de connaissance de la position de son employeur qui ne donnerait pas de suite à sa plainte du 25 janvier 2023 après avoir procédé à son audition, celle du formateur qu’elle mettait en cause et d’un témoin qu’elle avait désigné. Le litige soumis à la chambre de céans n’a pour le surplus pas pour objet cette plainte. Il sera encore relevé sur ce point que lors de l’entretien du 8 mars 2023, la recourante a évoqué des propos déplacés tenus par un collègue mais indiqué ne pas vouloir donner de suite. Le 12 juin 2023, après avoir fait part de sa colère en apprenant qu’aucune suite ne serait donnée à sa plainte selon un courrier du 24 mai 2023, faute pour les intimés d’avoir pu établir les faits, la recourante n’a plus entrepris de quelconques démarches.

En tout état, le licenciement repose non pas sur « trois » événements qui ne constitueraient pas des griefs pouvant lui être opposés, mais bien sur une série de comportements liés tant à son savoir-faire qu’à son « savoir-être » qui ont fini par compromettre définitivement la confiance que les TPG doivent pouvoir placer notamment dans leurs employés conducteurs de véhicules transportant une clientèle.

Par essence, le métier de conducteur de véhicules de transports publics implique de devoir se plier à des horaires, comptant des heures de travail plus ou moins pénibles, comme les week-ends ou tard le soir et tôt le matin, voire la nuit. Cette contrainte s’applique sans discrimination que l’employé soit un homme ou une femme et qu’il soit parent ou non. Il en va de l’équité entre tous les employés. Ainsi, en faisant le choix d’orienter sa carrière de juriste à conductrice de bus, la recourante ne pouvait ignorer que ses horaires ne seraient pas forcément toujours compatibles avec ses besoins familiaux, étant relevé que son compagnon policier est soumis aux même genre de contraintes. S’il peut être attendu de l’employeur qu’il ménage autant que faire se peut les horaires de ses employés en fonction des obligations de leur vie privée, dont familiale, on ne saurait exiger de sa part qu’il accède aux souhaits de tous. Au demeurant, la recourante a précisément accepté ces exigences organisationnelles figurant expressément sous le point 4 de son contrat de travail, à savoir en particulier les horaires irréguliers de travail qui peuvent être répartis du lundi au dimanche inclus.

Il sera rappelé que la recourante a commencé sa formation le 3 octobre 2022 pour la terminer le 26 janvier 2023. À cette date, alors qu’elle devait commencer dès le lendemain la conduite de véhicule, elle a adressé un courriel au responsable de planification pour demander que son premier jour de travail tombe le 1er, le 7 ou le 13 février 2023, voire un mois plus tard, vu le « décalage complet » de son planning avec celui de son compagnon. Une telle demande, faite dans un si bref délai, est indubitablement de nature à nuire au bon fonctionnement d’un service de transports publics et inadéquate de la part d’une employée ayant bénéficié de près de quatre mois de formation, et qui se devait de prendre ses dispositions pour honorer son contrat de travail.

Le comportement de la recourante a posé problème dès sa formation. Sur quelques mois seulement, ce ne sont pas moins de quatre arrivées tardives qui ont été dénombrées, trois erreurs de parcours, deux accidents pour lesquels sa responsabilité a été retenue, deux méconnaissances de parcours, deux réclamations de clients pour manque de ponctualité et tracé non respecté/arrêt non effectué et enfin utilisation de son téléphone portable alors qu’elle était en service. Dans ses observations du 25 août 2023, elle n’a pas contesté ces incidents, mais a cherché à les relativiser, les qualifiant d’une gravité faible, voire moyenne, mais en aucun cas forte et pouvant mettre en danger quoi que ce soit ou remettre en question la confiance de son employeur. Elle ne peut être suivie, vu le nombre d’incidents en cause en quelques mois seulement. Lesdits incidents ne peuvent pour le surplus être mis au compte de sa seule inexpérience dans le métier, vu la durée de la formation ainsi que leur nature et leur répétition.

S’y ajoute une problématique d’attitude, à savoir la remise en cause de l’autorité de son responsable, dans un premier temps d’une manière qui peut sembler anecdotique, par exemple en lui disant « bah, vous avez bien choisi votre journée » à l’occasion du premier audit du 5 février 2023 et « c’est encore vous » au début du second, puis directement en demandant à en changer après qu’il l’avait surprise avec son téléphone en main. Il ressort du dossier que son responsable ne la « traquait » alors pas, mais se trouvait dans un tram à Rive alors que le bus de la recourante y était immobilisé. Elle a aussi mis en cause son responsable auprès de tiers, alors qu’il ne ressort pas du dossier que les remarques qu’il a pu lui faire après les manquements précités n’auraient pas été justifiées. À cet égard, la recourante se borne à indiquer qu’elle contesterait certains incidents, en particulier celui qu’elle a eu avec une cycliste mais qui n’apparaît pas dans les griefs qui lui sont faits dans la motivation détaillée de la décision du 27 septembre 2023, la responsabilité de cet événement n’ayant « pas été déterminée » (page 7 de l’annexe à la décision), ou encore trouve diverses raisons à ses arrivées tardives, qu’elle relativise s’agissant notamment de celles intervenues durant sa formation, ou du non-respect du port de l’uniforme, par la nécessité de revêtir une veste en raison du froid, ce qui ne permet pas encore de remettre en cause les remises à l’ordre de son responsable. C’est ensuite sans respecter le processus applicable qu’elle a cherché à changer de dépôt.

Le 5 avril 2023, la recourante a non seulement pris son service en retard, de 7 minutes, mais a de plus demandé à deux collègues de retirer cette nouvelle arrivée tardive du système, cherchant de la sorte à obtenir un « passe-droit ». Le 26 juin 2023 à 20h30, la recourante a cherché à changer de service car ne connaissant pas la ligne scolaire qu’elle devait desservir le lendemain. Faute d’avoir obtenu ce qu’elle voulait, elle a, le lendemain matin tôt, cherché à faire un échange avec une collègue, ce qui n’a pas été possible vu le temps de repos que cette dernière devait observer. N’étant ainsi pas parvenue à ses fins, elle a contacté le bureau de roulement pour avertir de son absence, ce qui a nécessité son remplacement « au pied-levé ». Un tel comportement est sans conteste de nature à ébranler la confiance que les TPG doivent pouvoir avoir en la fiabilité de leurs conducteurs.

La recourante n’a saisi aucune des chances qui lui ont été données de s’améliorer. Elle a en effet été sensibilisée à plusieurs reprises par ses responsables sur les écarts à corriger, à savoir lors d’entretiens des 30 novembre 2022, 5 février, 8 et 31 mars 2023. Elle n’a en particulier pas respecté son engagement de respect de son horaire, présentant des arrivées tardives les 28 et 29 juillet 2023. Ce seul comportement est de nature à faire douter son employeur de sa fiabilité au quotidien, alors que les horaires doivent être strictement tenus à l’égard de la clientèle.

La recourante ne remet pas en cause ses 86 jours d’absence, soit près de trois mois, en dix mois d’activité et ne pas avoir annoncé auprès de son responsable notamment ses absences du 27 juin et du 21 juillet 2023.

Face à cette situation, observée sur quelques mois seulement, la teneur de l’expertise psychologique du 1er septembre 2022 visant à déterminer l’aptitude de la recourante à la conduite de véhicules catégorie B80 n’y change rien, l’expérience ayant en effet démontré que la recourante, bien qu’elle ait pu en avoir la volonté, ne s’est pas avérée apte à assumer sa fonction de conductrice au sein de l’entreprise publique des TPG avec toutes les contraintes que cela impose, notamment horaires et hiérarchiques. Le courriel de remerciement du 22 août 2023 ne remet pas plus en cause le constat des TPG de l’impossibilité de poursuivre la relation de service, puisqu’il s’agissait du contrôle de qualité d’une seule course effectuée par la recourante, le 5 juillet 2023 à 20h20, au cours de laquelle « aucune anomalie n’a été remontée ». Il en va de même d’un courriel de remerciement d’un client satisfait d’une course effectuée le 15 juillet 2023.

Compte tenu de ce qui précède, c’est sans violer le droit ni abuser de leur pouvoir d’appréciation que les TPG ont considéré que la rupture du lien de confiance commandait qu’il soit mis fin aux rapports de service, leur poursuite n’étant objectivement pas dans l’intérêt du bon fonctionnement de cette entreprise.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

5.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA). Aucune indemnité ne sera accordée aux intimés, dont la taille permet de disposer d'un service juridique apte à assumer leur défense, sans avoir à recourir aux services d'un avocat (ATA/78/2020 précité consid. 7 et les arrêts cités).

6.             Compte tenu des conclusions du recours, la valeur litigieuse est supérieure à CHF 15'000.- (art. 112 al. 1 let. d de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110)

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 27 octobre 2023 par A______ contre la décision des TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS du 27 septembre 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 1'000.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les 30 jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Guy ZWAHLEN, avocat de la recourante, ainsi qu'à Me Constansa DERPICH, avocate des TRANSPORTS PUBLICS GENEVOIS.

Siégeant : Valérie LAUBER, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, Michèle PERNET, juges, Louis PEILA, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

J. BALZLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

V. LAUBER

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :