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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2928/2023

ATA/20/2024 du 09.01.2024 ( ENERG ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2928/2023-ENERG ATA/20/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 9 janvier 2024

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Cyrus SIASSI, avocat

contre

SERVICES INDUSTRIELS DE GENÈVE intimés



EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : le propriétaire) est propriétaire de la parcelle n° 4'737 de la commune de B______ d’une surface de 1'873 m2, à l’adresse chemin de C______, sur laquelle sont sis une habitation de 246 m2 au sol, sur deux niveaux (ci-après : la villa), un autre bâtiment de 29 m2 et un bâtiment sous-terrain de 489 m2. Selon le système d’information du territoire genevois, l’autorisation de construire délivrée en 2012 portait notamment sur une « villa avec piscine, spa et pool-house - parking jacuzzi - portail » ; DD 1______). La piscine extérieure mesure environ 6 m de large et 13 m de long.

b. Par jugement du 12 mars 2020, le Tribunal civil de première instance de Genève a prononcé le divorce des époux A______ et a attribué à cette dernière la jouissance exclusive de la villa jusqu’au 31 décembre 2027, A______ étant notamment astreint au paiement des frais d’entretien et des Services industriels de Genève (ci-après : SIG) y afférents.

D______ et son fils E______ vivent dans la villa.

A______ est domicilié à Gstaad depuis le 1er janvier 2014.

c. Entre le 18 juillet 2018 et le 19 mars 2021, les SIG ont émis quinze factures intermédiaires relatives à la villa, fondées sur une estimation de la consommation d’eau, seule litigieuse, à 2.48 m³/jour. Le forfait de la tranche de référence était de CHF 1'203.- /an soit CHF 3.2959/jour.

d. Par décision du 24 septembre 2020, les SIG ont rejeté les réclamations de A______ des 27 juillet, 19 septembre, 15 octobre, 19 octobre 2018, 11 avril et 8 juillet 2019 contre plusieurs factures intermédiaires.

e. Le 19 avril 2021, A______ était débiteur des SIG à hauteur de CHF  67'334.70.

f. À teneur des relevés des compteurs, la consommation quotidienne moyenne en eau de la propriété s’est élevée à : 12,4 m3 entre mai 2015 et mai 2016 ; 4,3 m3 entre mai 2016 et mai 2018 ; 33,9 m3 entre mai 2018 et mai 2021 ; 24,1 m3 entre mai et novembre 2021 ; 2,1 m3 entre novembre 2021 et mai 2022 et 69,9 m3 entre mai 2022 et mai 2023.

g. La consommation d’eau a été relevée par les compteurs n° 2______ (ci-après : 1er compteur) jusqu’au 19 août 2019, n° 3______ (ci-après : 2e compteur) du 19 août 2019 jusqu’à une date non précisée mais se situant entre le 21 mai 2021 et le 18 mai 2022, date à laquelle le compteur n° 4______ (ci-après : 3e compteur) était en fonction.

h. Les factures et correspondances adressées par les SIG à A______ étaient envoyées « p.a » à son adresse professionnelle à la rue F______ à Genève.

B. a. Le 9 juin 2021, les SIG ont émis une facture n° 5______ de CHF 115'152.85 (ci-après : la facture) relative à la consommation d’eau et d’électricité dans la villa pour la période du 23 mai 2018 au 21 mai 2021 (1'094 jours) dont CHF 3'913.- au titre de la consommation d’électricité et CHF 119'152.85 de consommation d’eau.

3'596 m³ d’eau avaient été consommés du 23 mai 2018 au 19 août 2019 selon le 1er compteur, selon le 2e compteur, puis 33'519 m³ d’eau du 20 août 2019 au 21 mai 2021.

Le forfait de la tranche de référence pour la facturation était de CHF 9'123.-/an, soit CHF 24.9945/jour.

b. Le 28 juin 2021, A______ a contesté « toutes vos factures » auprès des SIG. Il avait contacté G______ Sàrl, spécialisée notamment en recherches de fuites d’eau, qui n’en décelait aucune. Le problème relevait des SIG ou était en lien avec leur compteur. Il avait déjà dû payer CHF 30'000.- pour que l’eau soit rétablie.

Selon le rapport de G______ Sàrl, lors de leur intervention du 7 juin 2021 l’alimentation d’eau principale de la maison était fermée. L’entreprise avait procédé à des tests de pression à l’aide d’un gaz traceur au niveau des alimentations d’eau froide et d’eau chaude des sanitaires de la villa ainsi que du réseau d’arrosage extérieur. La société détaillait son protocole. Le test de pression effectué pendant 60 minutes avait permis de valider l’absence de fuite. Des photos étaient jointes au rapport.

c. Le 16 juillet 2021, les SIG ont confirmé l’exactitude de leur facture. Le 10 juin 2021, lors de la réouverture du branchement d’eau, un de leurs agents avait, une nouvelle fois, relevé le 2e compteur. La photo de celui-ci, indiquant 33'530 m³ était jointe. Cette donnée avait servi à l’établissement de la facture de consommation. Les SIG constataient une augmentation de la consommation d’eau. Ils ne disposaient pas d’information expliquant son origine, la consommation se situant à l’aval du compteur d’eau. L’installation après compteur faisait partie du domaine privé du client, seul à avoir la maîtrise complète de ses installations.

d. Le 3 août 2021, A______ a contesté la facture de CHF 13'885.45 pour la consommation d’eau du 22 mai au 20 juillet 2021. Son montant était à nouveau déconcertant. Le problème provenait soit du compteur, défectueux, soit des SIG.

e. Un plombier est intervenu le 24 novembre 2021 à la villa. Selon une première facture, il avait contrôlé l’alimentation d’eau depuis la nourrice jusqu’à tous les points d’eau de la maison avec une caméra thermique. Il avait conclu à l’absence de fuite d’eau. Selon une seconde facture du même jour, il avait procédé à des travaux « écoulement terrasse et piscine bouchée ».

f. Le 6 avril 2022, les SIG ont informé A______ qu’ils avaient procédé à l’étalonnage du 2e compteur en leurs ateliers. Selon le rapport d’expertise, il sous‑comptait la consommation de 8 %, ce qui signifiait que l’appareil avait tourné plus lentement que la normale et qu’une partie de la consommation n’avait pas été enregistrée, ni facturée. Ils sollicitaient le versement de CHF 100'000.- sur le montant ouvert de CHF 177'995.30 ce qui éviterait, notamment, la procédure de coupure de leurs fournitures.

g. Des rappels ont été adressés à A______ les 23 mai, 13 juin et 4 juillet 2022. Le 25 juillet 2022, les SIG ont émis un avis de coupure, l’échéance étant le 3 août 2022.

h. Un avocat est intervenu le 7 décembre 2022. La facture était contestée car le volume d’eau représentait environ 34 m3 en moyenne par jour, soit l’équivalent de la consommation moyenne de 227 personnes vivant sous le même toit.

C. a. Le 19 mai 2023, les SIG ont émis une facture de CHF 88'706,90 relative notamment à la consommation d’eau dans la villa pour la période du 18 mai 2022 au 17 mai 2023 (365 jours) dont CHF 88'749.- au titre de la consommation d’eau, le montant étant plus élevé que le total réclamé en raison d’un crédit pour l’électricité.

25'500 m³ d’eau avaient été consommés. Le forfait de la tranche de référence était de CHF 31'623.-/an soit CHF 86.6384/jour.

b. Par décision du 5 juin 2023, les SIG ont rejeté la réclamation du 28 juin 2021 de A______ contre la facture n° 5______ du 6 juin 2021.

Le courrier recommandé et par pli A a été envoyé à l’intéressé à son adresse à Gstaad. La correspondance recommandée a été retournée, non réclamée, le 15 juin 2023.

D. a. Par acte du 14 septembre 2023, A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision.

Il a conclu à son annulation, à celle de la facture n° 5______ du 6 juin 2021 et à ce que toute mesure probatoire nécessaire soit ordonnée afin de déterminer la cause des erreurs de facturation d’eau, imputable aux SIG, et le niveau réel de consommation dans la propriété.

La décision avait été notifiée de façon irrégulière, à une mauvaise adresse, où il s’était rendu exceptionnellement le 24 juillet 2023, date à laquelle il avait pu réceptionner l’exemplaire de la décision envoyée par courrier A. Selon celle-ci, une copie aurait également été envoyée à son avocat. Toutefois il n’avait pas fait élection de domicile auprès de ce dernier, dont le rôle s’était limité à l’envoi d’un courrier aux SIG le 7 décembre 2022. La notification faite en l’étude dudit conseil n’était pas valable. Enfin, l’avocat n’étant plus son mandataire au moment du prononcé de la décision, il ne lui avait pas transmis copie de la facture. Compte tenu de la suspension des délais entre le 15 juillet et le 15 août, le recours, déposé le 14 septembre 2023, était recevable.

Aucun élément ne permettait de justifier une telle consommation d’eau. Il y avait lieu d’en déduire qu’elle ne pouvait être due qu’à un défaut technique, ou une erreur de raccordement, non décelée, imputable aux SIG, lesquels devraient prendre comme base la consommation habituelle durant les années précédant la période litigieuse en application de l’art. 44 du règlement pour la fourniture de l'eau adopté par le Conseil d'administration des SIG le 9 septembre 2014, approuvé par le Conseil d'État le 26 novembre 2014, dans sa teneur au 1er janvier 2015 [A.1.1 - ci-après : RO] . La villa n’était occupée que par deux personnes. Une consommation d’eau de 34 m³ en moyenne par jour n’était raisonnablement pas attribuable au comportement de deux consommateurs, et encore moins celle de 70 m³ de la nouvelle facture du 19 mai 2023. L’absence de fuite d’eau au niveau des installations situées en aval du compteur d’eau avait été confirmée par deux fois, respectivement dans le rapport de G______ Sàrl le 18 juin 2021 et celui du plombier le 24 novembre 2021. Le rapport relatif à l’étalonnage de compteur mentionnait de façon lacunaire que « le compteur n’est pas conforme selon la directive 75/33/CEE » sans que les SIG n’aient fait d’autres investigations complémentaires, au seul motif que le compteur sous-compterait. Les SIG avaient fait preuve d’arbitraire dans l’appréciation des preuves, ce qui avait conduit à rendre une décision manifestement en contradiction avec les pièces du dossier et donnant lieu à un résultat insoutenable.

b. Les SIG ont conclu au rejet du recours. Par courrier du 16 juillet 2021, les SIG avaient expliqué que le relevé du compteur avait été effectué correctement et avaient proposé un essai de celui-ci dans ses ateliers et à ses frais. Malgré plusieurs échanges de courriers et de courriels, le recourant n’avait jamais accepté de procéder à cet essai. Les SIG avaient malgré tout procédé à l’étalonnage dans leurs ateliers, ce qui avait mis en lumière le fait que le compteur sous‑comptait. À la demande du recourant de procéder à une étude approfondie de l’appareil, les SIG avaient encore fait analyser le compteur auprès de l’institut fédéral de métrologie METAS qui avait procédé à des mesures le 31 août 2022 et rendu un rapport d’expertise le 22 septembre 2022 confirmant que le compteur sous-comptait la consommation d’eau à faible débit.

Jusqu’au 1er janvier 2014 le recourant avait été domicilié au lieu de consommation de la facture, soit à B______. Dorénavant, il était domicilié à Gstaad. C’était uniquement à bien plaire et sur instruction du recourant que les factures de consommation SIG concernant la villa à B______ avaient été envoyées à son attention, pour adresse sur son lieu de travail. Il ne s’agissait toutefois pas de son domicile légal. Le 15 avril 2023, un commandement de payer pour les montants impayés dus par le recourant aux SIG lui avait été notifié à son domicile légal à Gstaad. Il n’avait pas contesté la notification et avait fait opposition totale. Le 5 juin 2023 les SIG avaient notifié, par courrier recommandé et courrier A, la décision que l’intéressé n’avait pas retirée dans le délai de garde de sept jours. Il n’avait réagi que trois mois plus tard. Le recours était irrecevable car tardif, la décision ayant été notifiée à l’issue du délai de garde le 15 juin 2023 et le délai de recours étant arrivé à échéance le 16 août 2023. Il ressortait des pièces produites par le recourant qu’il avait pris connaissance effective de la décision le 24 juillet 2023 au plus tard, date à laquelle il en avait informé son avocat. Il lui aurait appartenu d’interjeter recours dans le délai légal soit avant le 16 août 2023.

Si la chambre administrative devait déclarer le recours recevable, il devait être rejeté. Le compteur avait été analysé à plusieurs reprises, ce qui avait permis d’établir qu’il était effectivement défectueux dans le sens d’un sous-comptage de la consommation d’eau.

c. Dans sa réplique, le recourant a relevé qu’il avait interpellé les SIG les 26 et 27 juillet 2023 pour obtenir le code-barres du dernier recommandé. Ceux-ci avaient indiqué ne pas avoir la possibilité de récupérer le code-barres, les lettres recommandées étant envoyées en masse. La décision avait été adressée, de façon exceptionnelle et non compréhensible, à l’adresse de Gstaad. Il était contesté que la décision puisse être considérée comme notifiée à l’issue du délai légal de sept jours. De surcroît le calcul des SIG était erroné. Le recommandé ayant été remis à l’office postal le 7 juin 2023 après sa première notification infructueuse, le délai de garde de sept jours avait commencé à courir le 8 juin 2023 et avait expiré le 14 juin 2023 et non le lendemain comme soutenu par l’autorité intimée. Le délai de recours serait en conséquence arrivée à échéance le 14 juillet et non le 16 août 2023.

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             La chambre administrative est compétente (art. 36A de la loi sur l'organisation des Services industriels de Genève du 5 octobre 1973 - LSIG - L 2 35) ; art. 50 al. 2 RO ; art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05).

2.             Elle examine d’office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATA/660/2022 du 23 juin 2022 consid. 1 et les références citées).

2.1 Toutes les décisions arrêtées par les SIG en vertu du RO peuvent faire l’objet d’une réclamation par l’usager et par écrit auprès du service clients des SIG, dans un délai de 30 jours dès la notification de la décision (al. 1). Les décisions des SIG suite à réclamation telle que prévue à l’alinéa précédent peuvent être déférées, dans un délai de 30 jours dès la notification de la décision, à la chambre administrative de la Cour de justice (art. 50 al. 2 RO).

2.2 Les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 1re phr. LPA).

Le délai de recours contre une décision finale court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 62 al. 3 1re phr. LPA).

La décision qui n'est remise que contre la signature du destinataire ou d'un tiers habilité est réputée reçue au plus tard sept jours après la première tentative infructueuse de distribution (art. 62 al. 4 LPA).

2.3 Selon une jurisprudence bien établie, les communications des autorités sont soumises au principe de la réception. Il suffit qu'elles soient placées dans la sphère de puissance de leur destinataire et que celle-ci soit à même d'en prendre connaissance pour admettre qu'elles ont été valablement notifiées. Autrement dit, la prise de connaissance effective de l'envoi ne joue pas de rôle sur la détermination du dies a quo du délai de recours (ATF 144 IV 57 consid. 2.3.2 ; 142 III 599 consid. 2.4.1). L'art. 62 al. 4 LPA concrétise la jurisprudence en matière de notification des actes adressés sous pli recommandé, selon laquelle l'envoi non retiré dans le délai de garde de sept jours est réputé notifié le dernier jour de ce délai (ATF 134 V 49 consid. 4 et les références citées).

Celui qui se sait partie à une procédure et qui doit dès lors s'attendre à recevoir des actes de l’autorité est tenu de relever son courrier ou, s'il s'absente de son domicile, de prendre des dispositions pour que celui-ci lui parvienne néanmoins (ATF 141 II 429 consid. 3.1). Une telle obligation signifie que le destinataire doit, le cas échéant, désigner un représentant, faire suivre son courrier, informer les autorités de son absence ou leur indiquer une adresse de notification (ATF 141 II 429 consid. 3.1 et la référence citée). À défaut, il ne peut se prévaloir de son absence lors de la tentative de notification d'une communication officielle à son adresse habituelle (ATF 117 V 131 consid. 4a).

Lorsque l'autorité procède à une deuxième notification, celle-ci est sans effets juridiques (ATF 119 V 89 consid. 4b/aa ; 118 V 190 consid. 3a ; 117 7 V 131 consid. 4a), sous réserve des cas où, intervenue avant l'échéance du délai de recours, elle contient une indication sans réserve des voies de droit et pour autant que les conditions relatives à l'application du principe constitutionnel de la confiance soient remplies (ATF 118 V 190 consid. 3a ; 115 Ia 12 consid. 4c).

Celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 ; ATA/96/2021 du 26 janvier 2021 consid. 3a).

2.4 En l’espèce, le dies a quo du délai de recours est litigieux, l’adresse à laquelle la décision a été notifiée étant contestée par le recourant.

Il ressort des pièces au dossier que le domicile officiel de l’intéressé est à Gstaad. Ce dernier se prévaut des précédentes correspondances des SIG, adressées sur son lieu de travail à Genève. Toutefois dès lors qu’il ne s’agit pas de son domicile officiel, les SIG étaient autorisés à adresser la décision litigieuse dans la commune de Saanen. Le commandement de payer notifié au recourant le 20 avril 2023 faisait déjà mention de cette dernière adresse quand bien même l’intéressé a fait opposition totale, dans le délai, dans le canton de Berne. Le recourant avait par ailleurs initié plusieurs procédures à l’encontre des SIG et devait s’attendre à recevoir des actes de l’autorité à son domicile officiel. Il lui appartenait en conséquence de prendre des dispositions pour que son courrier soit relevé.

Le dies a quo du délai de recours court en conséquence dès la notification au domicile officiel du recourant à Gstaad.

À teneur du suivi des envois de la Poste, le recourant s'est vu notifier la décision des SIG le 7 juin 2023. Le délai de sept jours est arrivé à échéance le 14 juin 2023. Le délai de recours a commencé à courir le 15 juin 2023 et a expiré à minuit le vendredi 14 juillet 2023, qui n'était pas un jour férié ni ne tombait sur une période de suspension des délais.

Partant, le recours, posté le 14 septembre 2023, est tardif. Par ailleurs, rien dans le dossier ne permet de retenir l'existence d'un cas de force majeure, ce que le recourant n’allègue au demeurant pas.

Le recours sera ainsi déclaré irrecevable.

3.             Le recours aurait en tous les cas dû être rejeté pour les raisons qui suivent.

3.1 Le litige porte sur la décision sur réclamation du 12 avril 2023 confirmant la facture de consommation n° 5______ pour un montant total de CHF 115'289,75 adressée par les SIG au recourant le 9 juin 2021.

3.2 Les SIG ont notamment pour but de fournir dans le canton de Genève l'eau, le gaz et l'électricité (art. 1 al. 1 LSIG).

L'eau fournie à l'usager est mesurée par des compteurs et autres instruments de mesure (ci-après : instruments de mesure) mis à disposition par les SIG qui en restent propriétaires. En principe, pour chaque branchement, il est installé un compteur mesurant la totalité de l'eau passant par le branchement (art. 41 al. 1
et 2 RO).

Le propriétaire de l'immeuble est responsable envers les SIG du paiement de la rémunération de l'utilisation du réseau et de l'énergie consommée, respectivement de l'eau consommée par ledit immeuble, ainsi que de toutes autres redevances et taxes pour des locaux inoccupés et des installations inutilisées (art. 2 al. 5 RO).

La consommation de l'eau fournie aux instruments de mesure est relevée à intervalles périodiques par les SIG. Le coût de l'eau fournie et les taxes et redevances tarifaires sont facturés à intervalles périodiques déterminés par les SIG qui adressent un bordereau à l'usager (art. 46 al. 1 et 2 RO).

Lorsque, par suite d'un défaut technique ou d'une erreur de raccordement, la quantité d'eau enregistrée aux instruments de mesure n'est pas exacte, il sera alors procédé à une évaluation de la consommation. Cette estimation sera établie en prenant comme base la consommation habituelle d'une période similaire pour autant que les conditions d'utilisation des installations de l'usager soient restées sensiblement les mêmes (art. 44 RO). En cas de contestation sur les indications d'un instrument de mesure, ce dernier sera contrôlé dans les ateliers des SIG. Si l'erreur dépasse plus ou moins de 5 %, les factures contestées seront rectifiées (art. 45 al. 1 RO). Les frais découlant de cette vérification seront à la charge de l'usager si sa réclamation n'est pas reconnue fondée (art. 45 al. 2 RO).

3.3 Dans son arrêt 2C_783/2017 du 25 janvier 2018, le Tribunal fédéral a rappelé que la réglementation applicable à la fourniture d'eau pose le principe selon lequel la consommation d'eau s'apprécie en fonction des mesurages opérés par les compteurs installés à l'entrée des installations des privés. Ce n'est que s'il est avéré que les compteurs sont frappés de dysfonctionnements techniques que les mesures qu'ils livrent ne comptent pas (consid. 1.2.3). La chambre de céans a confirmé l'application de cette jurisprudence dans deux arrêts rendus en 2018 (ATA/1240/2018 du 20 novembre 2018 consid. 5b et 9d ; ATA/1310/2018 du 4 décembre 2018 consid. 6) et plus récemment le 20 juin 2023 (ATA/654/2023).

3.4 En matière administrative, les faits doivent en principe être établis d'office et, dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle procède à cette recherche, les règles sur la répartition du fardeau de la preuve ne s'appliquent pas. Il n'en demeure pas moins que, lorsque les preuves font défaut, ou si l'on ne peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle les recueille, la règle de l'art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) est applicable par analogie. Pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (ATF 112 Ib 65 consid. 3 ; ATA/1240/2018 du 20 novembre 2018 consid. 6).

3.5 En l'espèce, les SIG ont effectué un test du 2e compteur prouvant que celui-ci ne dysfonctionnait pas dans le sens soutenu par le recourant, mais au contraire
sous-comptait la consommation d’eau à hauteur de 8% pour un débit de 100 litres par heure, ce qui signifiait qu’une partie de la consommation n’avait été ni enregistrée ni facturée. Ainsi, à teneur du rapport d’essai du 10 mars 2022, si le 2e compteur a montré ne pas être conforme aux erreurs maximales tolérées, il apparaît néanmoins que celles-ci étaient négatives, soit en faveur du recourant. Les SIG ont par ailleurs effectué un second contrôle d’étalonnage dudit compteur auprès de l’institut fédéral de métrologie METAS. Son rapport de mesure n° 6______ du 31 août 2022 a confirmé les résultats obtenus le 10 mars 2022.

Le recourant échoue pour sa part à établir que cette surconsommation serait erronée. La seule absence de fuite évoquée par G______ Sàrl et un plombier ne suffit pas à établir un dysfonctionnement du compteur. La propriété de l’intéressé est vaste et comprend notamment plus de 2’000 m² de jardin et une piscine de 78 m² environ. L’autorisation de construire fait par ailleurs état d’un spa et d’un jacuzzi. Pendant trois années aucune facture n’a été établie en fonction de la consommation effective des occupants, seules des estimations servant de base de calcul aux factures intermédiaires. Les factures définitives font de surcroît état de trois compteurs différents : le premier jusqu’au 19 août 2019, le second jusqu’à une date située entre le 21 mai 2021, terme de la facture litigieuse, et le dies a quo de la dernière facture produite, soit le 18 mai 2022. À cette dernière date, un troisième compteur était en fonction. G______ Sàrl est intervenue le 3 juin 2021. Elle ne précise pas le numéro du compteur alors en fonction. Si elle relève une absence de fuite au niveau des alimentations d’eau froide et d’eau chaude des sanitaires, ainsi qu’au niveau du réseau d’arrosage extérieur de la villa, elle précise que l’alimentation d’eau du remplissage de la piscine n’a pas été testée au vu de son implantation « en apparent. Dans le sous-sol ». D’autre part, elle produit, en page 7, des photos numérotées de 8 à 10, attestant d’une fuite au niveau du mécanisme de la chasse d’eau dans la suite parentale et de l’obstruction de l’évacuation de la piscine. Le plombier n’a pas non plus précisé quel compteur il avait vérifié le 24 novembre 2021.

Ainsi, non seulement le recourant n’a pas réussi à démontrer que le 2e compteur était frappé de dysfonctionnements techniques, conformément à ce qu’exige la jurisprudence du Tribunal fédéral, mais le 3e compteur installé par le recourant entre le 21 mai 2021 et le 18 mai 2022 fait aussi état d’une consommation d’eau importante au vu de la facture de consommation pour la période du 18 mai 2022 au 17 mai 2023 portant sur 25'500 m3, soit une consommation moyenne de 69.9 m3 par jour, ce qui tend à confirmer que le problème n’est pas en lien avec le 2e compteur.

Aucune preuve contraire ne démontre ainsi que l’usage de l’habitation, de la piscine, de l’arrosage, voire l’existence d’un spa et jacuzzi n’a pas engendré cette consommation, la seule affirmation que G______ Sàrl et un plombier n’ont rien constaté d’anormal, voire même excluent la possibilité d’une fuite, ne pouvant suffire à prouver une erreur. Cela étant, les causes et raisons de ladite consommation – qui apparaît certes beaucoup plus importante que certaines autres années – n'ont pas à être démontrées dès lors qu'un dysfonctionnement du compteur en défaveur du recourant n'a pas été établi en l'espèce.

L’importance du montant réclamé, outre l’augmentation de la consommation d’eau, est liée au changement de forfait de tranche de référence, passant de CHF 1'203.- annuels jusqu’à 5'000 m3 d’eau par an à CHF 9'124.- de taxe annuelle dès que la consommation dépasse 5'000 m3 annuels et à CHF 31'623.-/an lorsque la consommation dépasse 20'000 m3. Ce système de modification du forfait de base est prévu par l’art. 46 al. 1 et 2 RO. La différence dans le montant du forfait découle du « Tarif OC » pour la fourniture de l’eau, adopté par le Conseil d’administration des SIG le 9 septembre 2014 et approuvé par le Conseil d’État le 26 novembre 2014, applicable dès le 1er janvier 2015 (règlement A.2.1 disponible sur le site des SIG, consulté le 14 juin 2023 ; ci‑après Tarif OC). Selon celui-ci, ce tarif est applicable à la consommation de l’eau enregistrée par un compteur (Tarif OC). Il comprend en fonction des tranches de consommation annuelle d’eau indiquées dans le tableau : 1) le paiement d’une taxe annuelle (forfait), qui est due même en l’absence de consommation ou de dépose du compteur, notamment pour éviter des dégâts dus au gel ; 2) le paiement d’un prix additionnel par chaque m³ supplémentaire. Les tranches de référence, le montant des forfaits annuels, le prix du m3 supplémentaire, non contestés, sont conformes au Tarif OC.

Compte tenu de la teneur de l'art. 44 RO et de la jurisprudence du Tribunal fédéral susmentionnée, et en l'absence d'éléments permettant de tenir pour avéré que le 2e compteur a été frappé de dysfonctionnements techniques en défaveur du recourant, la quantité d'eau enregistrée par ledit instrument de mesure doit être considérée comme exacte.

Dès lors, la décision sur réclamation du 5 juin 2023 confirmant la facture de consommation n° 5______ pour un montant de CHF 115'289,75 adressée par les SIG au recourant le 9 juin 2021 est conforme au droit.

Mal fondé, le recours aurait été rejeté s’il avait été recevable.

4.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

*****

 


PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 14 septembre 2023 par A______ contre la décision des Services industriels de Genève du 5 juin 2023 ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Cyrus SIASSI, avocat du recourant, ainsi qu'aux Services industriels de Genève.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Florence KRAUSKOPF, Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.


Genève, le 

 

 


la greffière :