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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2900/2022

ATA/1299/2023 du 05.12.2023 sur JTAPI/639/2023 ( PE ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2900/2022-PE ATA/1299/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 5 décembre 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______, agissant en son nom et celui de son fils mineur B______
et
C______ recourants
représentés par Me Maurice UTZ, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 juin 2023 (JTAPI/639/2023)


EN FAIT

A. a. A______ (ci-après : A______), née le ______ 1987, a épousé en 2003 en Côte d’Ivoire D______ (ci-après : D______), né le ______ 1965.

De cette union est née en Côte d’Ivoire C______ (ci-après : C______) le ______ 2003, puis est né à Genève B______ (ci-après : B______) le ______ 2014.

D______ est également le père de E______ (ci‑après : E______), né le ______ 1997, et d’F______ (ci-après : F______) née le ______ 1999 en Côte d’Ivoire.

Tous les membres de la famille A______ ont la nationalité ivoirienne.

b. Le 18 octobre 2013, A______ est arrivée en Suisse en compagnie d’C______, d’F______ et de E______ pour y rejoindre D______, _______ de la Mission permanente de la Côte d’Ivoire auprès de l’Organisation des Nations Unies (ci-après : ONU) à Genève. Ils ont été mis au bénéfice de cartes de légitimation délivrées par le département fédéral des affaires étrangères (ci-après : DFAE).

c. Selon le registre de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), les membres de la famille se sont installés à la rue des G______ à Meyrin, où A______ a résidé jusqu’en mai 2023 avec C______ et B______ avant de s’installer à l’avenue du H______ à Vernier avec ces derniers. En février 2022, F______ s’est établie à la rue I______ à Chêne-Bourg puis à l’avenue du H______ à Vernier à compter de mai 2023.

d. En septembre 2015, A______ a été mise au bénéfice d’un permis « Ci » et a travaillé dans le domaine du nettoyage et de l’économie domestique.

e. Le 17 janvier 2021, après que sa mission en Suisse se fut achevée, D______ est retourné en Côte d’Ivoire. Son fils B______ en a fait de même.

f. En fin d’année 2022, F______ a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

B. a. Le 1er avril 2021, après qu’elle en eut été requise par l’OCPM, A______ a sollicité des autorisations de séjour pour cas de rigueur pour elle-même et ses enfants C______ et B______.

Au vu de la situation des enfants, notamment celle de sa fille, qui avait passé toute son adolescence à Genève, leur retour en Côte d’Ivoire, où C______ n’était jamais retournée et où B______ s’était rendu à une seule reprise pour y refaire son passeport, s’avérait impossible. Les enfants étaient scolarisés à Genève, étaient intégrés et avaient construit des attaches sociales très fortes avec le canton, contrairement à leur pays d’origine.

Elle a, par la suite, précisé qu’elle était toujours mariée et qu’elle n’entendait pas entamer une procédure de divorce, son époux, définitivement reparti en Côte d’Ivoire, n’ayant pas l’intention de revenir en Suisse.

b. A______ a transmis à l’OCPM plusieurs pièces, dont :

- des attestations selon lesquelles elle n’avait pas bénéficié de l’aide financière de l’Hospice général, qu’elle ne faisait l’objet d’aucune poursuite et qu’elle ne figurait pas au casier judiciaire ;

- un contrat de travail du 28 août 2018 conclu avec J______ SA (ci-après : J______) en qualité de nettoyeuse pour une durée de travail de 18 heures par semaine ainsi que des fiches de salaire pour les mois de novembre 2020 à février 2021 ;

- une attestation du 24 novembre 2020 certifiant qu’elle travaillait pour un couple de particuliers depuis le 1er janvier 2019 à raison de huit heures hebdomadaires en qualité de collaboratrice ménagère ;

- des attestations de scolarité d’C______ et de B______.

c. Le 24 janvier 2022, l’OCPM a indiqué à A______ que les membres de la famille du titulaire principal de la carte de légitimation devaient suivre ce dernier en cas de transfert ou cessation d’activité. Elle devait donc, avec son fils, quitter la Suisse. Toutefois, afin de permettre à C______ de poursuivre ses études l’école de culture générale (ci-après : ECG), il était disposé à examiner la possibilité de lui délivrer une autorisation de séjour pour études.

d. A______ a répondu à l’OCPM que sa proposition n’était pas acceptable, C______ n’étant pas indépendante financièrement et ne pouvant être séparée de sa famille. Dans l’intérêt de ses enfants, elle maintenait sa demande de régularisation de l’ensemble des membres de la famille.

e. Le 13 mai 2022, l’OCPM a informé A______ de son intention de refuser sa demande.

Les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité n’étaient pas remplis. Les séjours passés en Suisse avec une carte de légitimation étant de nature temporaire, ses titulaires devaient suivre le bénéficiaire de la carte principale lors d’un transfert à l’étranger. Son intégration socioculturelle correspondait au comportement ordinaire qui pouvait être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour et une réintégration dans son pays d’origine n’aurait pas de graves conséquences sur sa situation personnelle, ce d’autant moins que son époux y résidait. Bien que scolarisé à Genève, l’intégration en Côte d’Ivoire de son fils demeurait possible, dans la mesure où il pouvait bénéficier de la présence de ses deux parents. Il en allait de même d’C______, pour laquelle la proposition d’examiner un éventuel permis de séjour pour études n’avait pas été retenue par les intéressés. Par ailleurs, l’exécution du renvoi était possible, licite et raisonnablement exigible.

f. Le 7 juillet 2022, A______ a fait part à l’OCPM de son incompréhension face à la manière restrictive par laquelle sa situation et celle de ses enfants était appréhendée. L’octroi d’un permis de séjour pour études en faveur de sa fille aurait pour conséquence une séparation de la famille et le renvoi de son fils dans un pays qu’il ne connaissait pas. Ses enfants avaient leurs racines en Suisse, y avaient forgé leur identité et acquis les repères pour leur vie d’adultes.

g. Par décision du 11 juillet 2022, l’OCPM a refusé de soumettre au secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) le dossier de A______ et de ses enfants avec un préavis favorable et a prononcé leur renvoi de Suisse, reprenant les mêmes motifs que ceux figurant dans son courrier du 13 mai 2022.

C. a. Par acte du 9 septembre 2022, A______, agissant en son nom et celui de son fils B______, ainsi qu’C______ ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre cette décision, concluant préalablement à leur audition et principalement à l’annulation de ladite décision, à ce qu’il soit constaté que les conditions d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur étaient remplies et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de transmettre leur dossier au SEM pour approbation, subsidiairement à ce qu’il soit renoncé à leur renvoi en raison de son caractère illicite.

L’OCPM n’avait pas pris en considération leur intégration exceptionnelle. C______ avait ainsi passé son adolescence en Suisse, sans jamais retourner dans son pays d’origine, et avait effectué toute sa scolarité à Genève, où elle avait achevé l’ECG et entamé un apprentissage d’employée de commerce en mode dual, dans le cadre duquel elle avait été autorisée à travailler trois jours par semaine. B______ était également particulièrement intégré à Genève, comme cela résultait de l’attestation de suivi scolaire établie par son enseignante.

Les dispositions régissant les cas de rigueur n’avaient pas été respectées, dès lors qu’il n’y avait pas lieu d’apprécier plus sévèrement la situation d’une famille ayant résidé en Suisse au bénéfice d’une autorisation de séjour valable que celle d’une famille ayant vécu le même nombre d’années illégalement en Suisse. La garantie de la vie privée et familiale avait également été violée, dans la mesure où la famille séjournait en Suisse depuis dix ans et que l’intégration de ses membres leur permettait de poursuivre leur séjour en Suisse. À cela s’ajoutait qu’F______ disposait à présent d’un titre de séjour en raison de son intégration en Suisse, ce qui rendait la position de l’OCPM d’autant moins soutenable. Il n’était ainsi pas acceptable que l’analyse de l’intégration particulière en Suisse soit différente pour les membres d’un même foyer.

Ils ont produit :

- une attestation détaillée du 19 octobre 2022 de l’ancien maître de classe d’C______ à l’ECG durant les années 2020 à 2022, aux termes de laquelle il indiquait qu’elle avait obtenu son certificat et réussi l’année terminale. Elle était une élève sérieuse et assidue, qui avait toujours donné le meilleur d’elle‑même, et qui avait toujours été soutenue par sa mère ;

- une attestation de l’assistante sociale de l’ECG du 31 mai 2022, selon laquelle C______ avait effectué durant sa scolarité un parcours linéaire démontrant son intégration socio-pédagogique. Depuis neuf ans, elle grandissait, évoluait, créait des projets d’avenir et se donnait les moyens pour les réaliser en Suisse. Les enseignants de l’école avaient toujours été unanimes sur sa capacité d’adaptation, son sérieux, son organisation et sa maturité ;

- le bulletin scolaire d’C______ pour l’année scolaire 2022-2023 établi le 18 janvier 2023 par l’école de commerce K______ pour la première année d’employée de commerce, indiquant une moyenne générale de 5,3 au premier semestre. Les observations indiquaient qu’elle était une « élève discrète mais agréable, très bons résultats : que dire à part "félicitations" » ;

- une attestation de l’entreprise L______ SA (ci-après : L______) du 21 mars 2023 selon laquelle C______ effectuait son apprentissage d’employée de commerce dans la branche « construire et habiter » au sein de son bureau depuis le 25 août 2022. Elle se montrait très appliquée et s’acquittait de ses tâches avec sérieux et précision. Ponctuelle et de caractère agréable, sa discrétion et sa disponibilité étaient particulièrement appréciés par l’ensemble des collaborateurs, par la direction et par sa formatrice ;

- des lettres de soutien d’amies d’C______ ;

- une attestation de suivi scolaire pour B______ établie le 30 mai 2022 par l’établissement primaire H______/M______, selon laquelle il s’agissait d’un garçon souriant et agréable ayant pu s’adapter à sa nouvelle classe et au rythme soutenu de l’enseignement. Il avait créé de nouvelles amitiés au sein du groupe et se sentait bien dans son environnement. Il présentait en outre de très bonnes compétences tant d’un point de vue scolaire que social ;

- la preuve de l’inscription de B______ au FC M______-le-H______ pour la saison 2022/2023 ;

- un certificat de travail intermédiaire du 13 septembre 2022 selon lequel J______, l’employeur de A______, qui travaillait en qualité de nettoyeuse d’entretien à temps partiel depuis le 2 décembre 2016, la considérait comme une collaboratrice consciente de son devoir, fiable et très travailleuse, qui accomplissait ses tâches avec rigueur, la quantité et la qualité de son travail étant très bonnes.

b. L’OCPM a conclu au rejet du recours, se référant à la teneur de sa décision et précisant que la relation avec F______ n’entrait pas dans le champ d’application de l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) en l’absence de lien de dépendance réciproque particulier notamment sous l’angle économique.

c. A été versée au dossier une ordonnance pénale du 21 novembre 2022 reconnaissant A______ coupable de voies de faits et la condamnant à une amende de CHF 100.- assortie d’une peine privative de liberté de substitution d’un jour. Il lui était reproché d’avoir, lors d’une altercation avec sa logeuse, fait « basculer » cette dernière, laquelle s’était introduite chez elle alors qu’elle était absente de son domicile.

d. Par jugement du 12 juin 2023, le TAPI a rejeté le recours.

Il n’y avait pas lieu de procéder aux auditions sollicitées, le dossier comportant suffisamment d’éléments pour trancher le litige.

Les conditions pour la reconnaissance d’un cas de rigueur n’étaient pas réalisées. La durée de résidence en Suisse de A______ devait être relativisée, dès lors qu’elle avait été effectuée au bénéfice d’une carte de légitimation, puis d’une simple tolérance. Malgré son indépendance financière, son intégration socio-professionnelle n’était pas exceptionnelle et un retour dans son pays d’origine n’entraînait pas de conséquences particulièrement rigoureuses, ce d’autant moins qu’elle avait toujours vécu en Côte d’Ivoire, où se trouvait sa famille et notamment son mari.

La durée du séjour en Suisse d’C______ devait également être relativisée. Même si elle avait passé toute son adolescence en Suisse et y avait effectué sa scolarité, ces seuls éléments ne justifiaient pas de déroger aux conditions d’admission, rien ne l’empêchant de poursuivre sa formation en Côte d’Ivoire ou de mettre à profit dans ce pays les connaissances acquises à l’ECG. Un renvoi ne constituait ainsi pas une rigueur excessive.

La situation de B______ était similaire à celle de sa sœur, étant rappelé qu’il n’avait pas encore atteint l’adolescence et restait attaché à son pays d’origine par le biais de sa mère. Son intégration, bien qu’accentuée du fait de sa scolarisation, ne pouvait être qualifiée de si profonde et irréversible vu son âge qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Le fait qu’il n’y ait jamais vécu ne l’empêchait pas de s’y intégrer et son intérêt supérieur commandait qu’il suive sa mère dans son pays.

La décision litigieuse ne contrevenait pas non plus au principe d’égalité de traitement, dès lors que l’autorisation de séjour octroyée à F______ ne se fondait pas sur un cas de rigueur mais avait été accordée car son employeur l’avait sollicitée et obtenue pour l’exercice d’activité lucrative.

Les intéressés ne pouvaient pas non plus se prévaloir de l’art. 8 CEDH, puisque la décision litigieuse n’avait pas pour effet de les séparer mais de les réunir. En outre, aucun rapport de dépendance entre l’un et l’autre d’entre eux et un proche parent au bénéfice d’un droit de présence assuré en Suisse ne ressortait du dossier.

Enfin, l’exécution du renvoi était possible, licite et raisonnablement exigible.

D. a. Par acte du 13 juillet 2023, A______, agissant en son nom et celui de son fils B______, ainsi qu’C______ (ci-après : les recourants) ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant préalablement à leur audition ainsi que celle d’F______, principalement à l’annulation du jugement entrepris, à la reconnaissance d’un cas de rigueur en leur faveur, à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de transmettre leur dossier au SEM pour approbation ainsi qu’à l’octroi d’une indemnité de procédure.

L’autorisation de séjour d’F______ avait été accordée non pas pour l’exercice d’une activité lucrative comme l’avait retenu le TAPI, mais en raison de la reconnaissance d’un cas de rigueur, l’intéressée vivant toujours avec sa famille au H______. Il n’y avait pas lieu de traiter cette situation différemment de celle des autres membres de la famille

Les dispositions régissant les cas de rigueur avaient été violées, le TAPI ayant procédé à une analyse désincarnée de la situation de l’intégration et de l’ancrage des recourants en Suisse, sans prendre en compte les pièces produites, ce qui avait conduit à un résultat particulièrement choquant, en particulier s’agissant d’C______. Ses liens avec la Suisse étaient si forts qu’il ne pouvait plus être exigé de sa part qu’elle retourne en Côte d’Ivoire. L’analyse de la situation de B______ était également trop sévère, dès lors qu’il était né à Genève et que ses attaches ivoiriennes étaient par définition limitées. À cela s’ajoutait que le TAPI avait remis en cause la jurisprudence établie de longue date, qui retenait une situation de rigueur lorsqu’une famille avait séjourné pendant une longue période en Suisse en étant composée d’enfants, d’adolescents ou de jeunes adultes ayant passé une grande partie de leur scolarité dans le pays et y ayant obtenu de bons résultats scolaires.

Ils ont produit :

- une ordonnance pénale du 21 novembre 2022 reconnaissant la sous-bailleresse de A______ coupable de violation de domicile et la condamnant à une peine pécuniaire. Il lui était reproché d’avoir, le 13 septembre 2022, pénétré sans droit dans l’appartement qu’elle sous-louait à A______ hors sa présence à l’aide d’une clé qu’elle avait conservée à l’insu de cette dernière ;

- le bulletin scolaire d’C______ pour l’année scolaire 2022-2023 établi le 26 juin 2023 par l’école de commerce K______ pour la première année d’employée de commerce, indiquant une moyenne générale de 4,9 au deuxième semestre et qu’elle satisfait aux normes de promotion. Les observations indiquaient qu’elle était une très bonne élève et une jeune femme charmante, qui devait continuer sur sa lancée et ne pas se relâcher.

b. Le 14 août 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

Il n’y avait pas eu d’inégalité de traitement par rapport à F______, dès lors qu’au moment de la fin du contrat de travail de son père en décembre 2021, elle était âgée de plus de 21 ans, avait obtenu un certificat fédéral de capacité le 30 juin 2022 et exerçait une activité lucrative à la COOP. La situation des recourants n’était pas identique et ils savaient qu’elle était étroitement liée à celle d’D______, vu la minorité des enfants au moment de la perte de la carte de légitimation. Par ailleurs, sous réserve de situations bien particulières, il n’y avait pas lieu d’autoriser les familles d’anciens fonctionnaires internationaux à demeurer en Suisse à la fin des fonctions officielles, au risque de contourner les prescriptions de la loi sur l’État hôte qui voulaient que le séjour soit temporaire.

c. Le 27 septembre 2023, les recourants ont répliqué.

L’OCPM n’était pas en mesure d’expliquer en quoi la situation de personnes ayant été au bénéfice de cartes de légitimation devait être jugée plus sévèrement que celles des personnes n’ayant jamais bénéficié de titres de séjour. Le fait qu’F______ ait été mise au bénéfice d’un titre de séjour démontrait une telle possibilité.

d. Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2) Les recourants concluent préalablement à leur audition et à celle d’F______.

2.1 Garanti à l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes et de participer à l’administration des preuves essentielles lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_148/2023 du 18 octobre 2023 consid. 4.2). Le juge peut cependant renoncer à procéder à des mesures d’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de forger sa conviction et que, procédant à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1). Le droit d’être entendu découlant de l’art. 29 Cst. ne garantit pas, de façon générale, le droit d’être entendu oralement (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_67/2023 du 20 septembre 2023 consid. 3.1) ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_521/2022 du 26 avril 2023 consid. 4.2).

2.2 En l’espèce, les recourants ont eu l’occasion d’exposer leurs arguments et de produire les pièces qu’ils jugeaient nécessaires pour appuyer leur recours, tant devant le TAPI que devant la chambre de céans. Ils n’expliquent pas en quoi les auditions sollicitées seraient de nature à apporter des éléments utiles à l’issue du litige. Pour les mêmes raisons, il n’y a pas non plus lieu de procéder à l’audition d’F______, étant précisé que la question de son titre de séjour n’est pas litigieuse. Il ne sera donc pas donné suite à la demande des recourants, et un éventuel grief de violation du droit d’être entendu par le TAPI sera en tant que de besoin écarté, pour les mêmes motifs.

3) Le litige porte sur la décision de l’intimé, confirmée par le TAPI, refusant de soumettre le dossier des recourants au SEM avec un préavis positif en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur en leur faveur et prononçant leur renvoi de Suisse.

4) 4.1 Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (art. 61 al. 1 let. a LPA), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 let. b LPA). Les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

4.2 La loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants de Côte d’Ivoire.

4.3 Les conditions d’admission fixées par la LEI ne sont toutefois pas applicables notamment aux membres des missions diplomatiques et permanentes et aux fonctionnaires d’organisation internationale ayant leur siège en Suisse, titulaires d’une carte de légitimation du DFAE (art. 30 al. 1 let. g LEI ; art. 43 al. 1 let. a et b OASA). Le conjoint, le partenaire et les enfants des personnes précitées sont admis pendant la durée de fonction de celles-ci au titre du regroupement familial, s’ils font ménage commun avec elles ; ils reçoivent alors également une carte de légitimation du DFAE (art. 43 al. 2 OASA).

Ces mécanismes s’inscrivent dans un complexe de privilèges, immunités et facilités octroyés en faveur du bénéficiaire institutionnel concerné et non pas à titre individuel, dans le but d’assurer l’accomplissement efficace des fonctions dudit bénéficiaire institutionnel (art. 9 al. 1 de l’ordonnance relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu’État hôte du 7 décembre 2007 - OLEH - RS 192.121). Pour le titulaire principal, ils dépendent de l’exercice effectif de la fonction officielle et sont accordés pour la durée de cette fonction (art. 9 al. 2 et 15 al. 1 OLEH). Pour les personnes autorisées à l’accompagner, ils prennent fin en même temps que ceux accordés au titulaire principal (art. 9 al. 2 OLEH). Par ailleurs, le conjoint ou le partenaire et les enfants (jusqu’à l’âge de 25 ans) du bénéficiaire de la carte de légitimation sont admis à travailler et peuvent bénéficier à ces fins d’un titre de séjour particulier, un permis « Ci », en échange de leur carte de légitimation (art. 22 al. 3 OLEH), mais uniquement pour la durée de la fonction ou de la mission.

4.4 En l’espèce, la recourante et ses enfants C______ et B______ ont séjourné en Suisse au bénéfice d’une carte de légitimation délivrée par le DFAE à leur époux et père, premier secrétaire de la mission permanente de la Côte d’Ivoire auprès de l’ONU. Dans ce cadre, A______ s’est vu accorder en 2015 un permis « Ci » afin de travailler dans le domaine du nettoyage et de l’économie domestique. La mission en Suisse d’D______ ayant pris fin, celui-ci est retourné en Côte d’Ivoire en janvier 2021, ce qui a mis un terme à sa carte de légitimation et, par voie de conséquence, à celle des membres de sa famille restés en Suisse, dont les conditions de séjours sont depuis lors soumises à la LEI.

5) 5.1 L’art. 30 al. 1 let. b LEI permet de déroger aux conditions d’admission en Suisse, telles que prévues aux art. 18 à 29 LEI, notamment aux fins de tenir compte des cas individuels d’une extrême gravité ou d’intérêts publics majeurs.

L’art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant sur la base des critères d’intégration définis à l’art. 58a al. 1 LEI (let. a), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g). Les critères énumérés par cette disposition, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs, d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (directives LEI, état au 1er septembre 2023, ch. 5.6.10).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, et les conditions pour la reconnaissance d’une telle situation doivent être appréciées de manière restrictive (ATF 128 II 200 consid. 4). Elles ne confèrent pas de droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1). L’autorité doit néanmoins procéder à l’examen de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce pour déterminer l’existence d’un cas de rigueur (ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/1195/2023 du 7 novembre 2023 consid. 3.6 ; directives LEI, op. cit., ch. 5.6).

5.2 L’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire la personne requérante aux conditions de vie de son pays d’origine, mais implique que la personne concernée se trouve personnellement dans une situation si grave qu’on ne peut exiger de sa part qu’elle tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l’ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question et auxquelles la personne requérante serait également exposée à son retour, ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d’une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd). Au contraire, dans la procédure d’exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n’exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par la personne requérante à son retour dans son pays d’un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/1195/2023 précité consid. 3.7).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATF 139 II 393 consid. 6 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_250/2022 du 11 juillet 2023 consid. 6.2).

5.3 Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; ATAF 2020 VII/2 consid. 8.5).

Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l’examen d’un cas d’extrême gravité, elle doit néanmoins être examinée à la lumière de l’ensemble des circonstances du cas particulier et être relativisée lorsque l’étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2). Le séjour accompli en Suisse au bénéfice d’une carte de légitimation étant d’emblée temporaire, puisqu’à l’échéance de la mission son titulaire doit retourner dans son pays d’origine, il n’est pas réputé conférer audit titulaire un droit de séjour durable en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_241/2021 du 16 mars 2021 consid. 3.4). La durée du séjour accomplie à ce titre n’est pas non plus déterminante pour la reconnaissance d’un cas individuel d’extrême gravité (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-2225/2022 du 18 octobre 2023 consid. 7.1 ; ATA/311/2019 du 26 mars 2019 consid. 9d).

5.4 D’une manière générale, lorsqu’un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse et y a seulement commencé sa scolarité, il reste encore attaché dans une large mesure à son pays d’origine, par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socioculturel suisse n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet (arrêt du TAF C-636/2010 du 14 décembre 2010 consid. 5.4 et la référence citée). Avec la scolarisation, l’intégration au milieu suisse s’accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l’âge de l’enfant lors de son arrivée en Suisse et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, de l’état d’avancement de la formation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter, dans le pays d’origine, la scolarisation ou la formation professionnelle entamée en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l’école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats. L’adolescence, une période comprise entre 12 et 16 ans, est en effet une période importante du développement personnel, scolaire et professionnel, entraînant souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/656/2023 du 20 juin 2023 consid. 3.6). Sous l’angle du cas de rigueur, il est considéré que cette pratique différenciée réalise la prise en compte de l’intérêt supérieur de l’enfant prescrite par l’art. 3 al. 1 de la convention relative aux droits de l’enfant du 20 novembre 1989 (CDE - RS 0.107 ; ATF 135 I 153 consid. 2.2.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1919/2019 du 12 juillet 2021 consid. 9.4 ; ATA/656/2023 précité consid. 3.6).

Dans l’examen d’un cas de rigueur concernant le renvoi d’une famille, il importe de prendre en considération la situation globale de celle-ci. Il ressort toutefois de la jurisprudence que le sort des enfants n’est plus nécessairement lié à celui des parents à partir du moment où ils atteignent la majorité. Toutefois, dans la mesure où l’enfant majeur autorisé à rester en Suisse est financièrement et moralement dépendant de son ou ses parents, il convient d’envisager de façon globale la situation de tous les membres de la famille (arrêt du Tribunal fédéral 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-245/2006 du 18 avril 2008 consid. 4.5.3).

5.5 En l’espèce, la recourante réside en Suisse depuis dix ans. Elle est arrivée à Genève en compagnie de sa fille en octobre 2013 pour y rejoindre son époux, titulaire d’une carte de légitimation, dont elle a également bénéficié, puis a obtenu en 2015 un permis « Ci », dont la validité a pris fin à la suite du départ de son mari pour la Côte d’Ivoire en janvier 2021. Depuis lors, elle séjourne en Suisse au bénéfice d’une simple tolérance des autorités compétentes. La recourante ne peut en conséquence, au vu de la jurisprudence rappelée ci-dessus, tirer parti en tant que telles de ces années de présence en Suisse, d’abord à la faveur d’une carte de légitimation puis d’une simple tolérance.

L’intégration sociale et professionnelle de la recourante ne saurait être qualifiée d’exceptionnelle au sens de la jurisprudence. Sur le plan professionnel et financier, la recourante travaille dans le domaine du nettoyage et de l’économie domestique depuis 2015, n’a pas recouru à l’aide sociale et n’a pas de dettes. Cela étant, ces éléments sont en principe attendus de tout étranger désireux de s’établir durablement en Suisse et, s’ils sont à mettre au crédit de l’intéressée, ils relèvent du comportement que l’on est en droit d’attendre de toute personne séjournant dans le pays (arrêts du Tribunal fédéral 2C_779/2016 du 13 septembre 2016 consid. 4.2). En outre, bien qu’aucune inscription ne figure à son casier judiciaire, elle a néanmoins été condamnée pour voies de fait sur son ancienne logeuse, laquelle a également fait l’objet d’une ordonnance pénale pour s’être introduite sans droit chez la recourante. Enfin, cette dernière n’allègue pas s’être impliquée à un quelconque titre dans la vie culturelle ou associative genevoise, ni s’être créé des attaches particulièrement étroites avec la Suisse au point de relativiser celles avec son pays d’origine.

Au contraire, âgée de 36 ans, la recourante est née en Côte d’Ivoire, où elle a passé son enfance, son adolescence et une partie de sa vie d’adulte, pour arriver en Suisse à l’âge de 26 ans, et rien n’indique que les années passées en Suisse l’auraient rendue étrangère à sa culture d’origine. Sa famille se trouve également dans ce pays, puisqu’à la fin de sa mission son époux est retourné vivre en Côte d’Ivoire avec son fils. En outre, la recourante est encore jeune et en bonne santé et, en cas de retour dans son pays d’origine, elle pourra faire valoir les connaissances et l’expérience professionnelle acquise en Suisse. Elle parle français, langue officielle en Côte d’Ivoire, et dispose de références culturelles nécessaires dans son pays d’origine. Sa réintégration n’apparaît ainsi pas compromise, quand bien même un retour dans son pays est susceptible d’engendrer pour elle certaines difficultés de réadaptation.

Son fils B______ est âgé de 9 ans et son sort est encore dépendant de celui de sa mère, avec laquelle il vit depuis sa naissance. Même s’il est né à Genève et y est scolarisé, il reste encore attaché dans une large mesure à la Côte d’Ivoire par le biais de ses parents, étant rappelé que son père est retourné vivre dans ce pays. Si un départ pour son pays d’origine constituerait certes un changement important, il n’en demeure pas moins que ses parents et les autres membres de sa famille pourront l’y aider. En outre, il est actuellement scolarisé en 5P, de sorte que, même si son intégration scolaire à Genève est bonne selon les pièces versées au dossier, il n’a pas encore atteint un niveau de formation susceptible de constituer un obstacle à la poursuite de sa scolarité dans son pays. Son intégration au milieu socioculturel suisse n’est ainsi pas profonde et irréversible au point qu’un retour en Côte d’Ivoire constituerait un déracinement complet.

La situation d’C______ est particulière. Arrivée en Suisse à l’âge de 10 ans, elle y a passé toute son adolescence et a effectué sa scolarité à Genève, d’abord à l’école primaire, puis au cycle d’orientation. Elle a été scolarisé à l’ECG puis a entamé un apprentissage en mode dual durant l’année scolaire 2022-2023 d’employée de commerce. Les attestations scolaires produites la décrivent comme une élève sérieuse, ayant de très bons résultats et qui s’investit dans ses études. Il en va de même de l’entreprise dans laquelle elle effectue son apprentissage, où son travail donne entière satisfaction et est apprécié de tous. Les différentes attestations produites soulignent en outre ses grands efforts d’intégration.

Aujourd’hui âgée de 20 ans, C______ totalise désormais un séjour en Suisse de dix ans, y ayant passé toute son adolescence, soit les années qui apparaissent, selon la jurisprudence précitée, comme essentielles pour la formation de la personnalité et donc pour l’intégration sociale et culturelle. Elle présente un bon cursus scolaire et fait preuve d’une forte volonté d’acquérir une formation pour s’intégrer dans le milieu professionnel genevois. Ces circonstances, prises dans leur ensemble, sont de nature à faire admettre qu’en retour en Côte d’Ivoire présenterait pour elle une rigueur excessive.

C’est le lieu de rappeler que lorsqu’une famille sollicite la reconnaissance d’un cas de rigueur, la situation de chacun de ses membres ne doit en principe pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global, car le sort de la famille forme en général un tout. Dans le cas particulier, s’il est vrai qu’C______ a atteint sa majorité et que son sort ne devrait plus être nécessairement lié à celui de sa mère et de son jeune frère, il n’en demeure pas moins que le fait qu’elle se trouve encore en formation et qu’elle doive compter sur le soutien matériel et moral de sa mère, laquelle a joué un rôle important dans son intégration, doit conduire à envisager de façon globale la situation de tous les recourants. Dans la mesure où C______ remplit les conditions pour bénéficier d’une exception aux mesures de limitation, le renvoi de sa mère serait en effet de nature à compromettre son intégration en Suisse, et la situation de son jeune frère ne peut suivre un sort différent, vu son jeune âge, étant rappelé qu’F______ s’est également vu octroyer une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

Par conséquent, vu les circonstances particulières, prises dans leur globalité, une exemption au sens de l’art. 30 al. 1 let. b LEI doit exceptionnellement être accordée à tous les recourants. En la refusant, l’autorité intimée a manifestement abusé de son pouvoir d’appréciation.

Il s’ensuit que le recours sera admis et le jugement entrepris, de même que la décision de l’autorité intimée du 11 juillet 2022, seront annulés, le dossier étant renvoyé à l’OCPM pour qu’il préavise favorablement la demande d’autorisation de séjour en faveur des recourants.

6) Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1’000.- sera allouée aux recourants, à la charge de l’autorité intimée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté conjointement le 13 juillet 2023 par A______, agissant en son nom et celui de son fils mineur B______ E______, et C______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 12 juin 2023 ;

au fond :

l’admet ;

annule ce jugement ainsi que la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 11 juillet 2022 ;

renvoie le dossier à l’office cantonal de la population et des migrations pour nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1’000.- aux recourants à la charge de l’État de Genève (OCPM) ;

dit que les éventuelles voies de recours contre le présent arrêt, les délais et conditions de recevabilité qui leur sont applicables, figurent dans la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), dont un extrait est reproduit ci-après. Le mémoire de recours doit être adressé au Tribunal fédéral suisse, av. du Tribunal fédéral 29, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Maurice UTZ, avocat des recourants, à l’office cantonal de la population et des migrations, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Siégeant : Eleanor McGREGOR, présidente, Verena PEDRAZZINI RIZZI, Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. WERFFELI BASTIANELLI

 

 

la présidente siégeant :

 

 

E. McGREGOR



Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :

 


 

Extraits de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110)
consultable sur le site: http://www.admin.ch/ch/f/rs/c173_110.html

Recours en matière de droit public
(art. 82 et ss LTF)

Recours constitutionnel subsidiaire
(art. 113 et ss LTF)

Art. 82 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours :

a. contre les décisions rendues dans des causes de droit public ;

Art. 83 Exceptions

Le recours est irrecevable contre :

c. les décisions en matière de droit des étrangers qui concernent :

1. l’entrée en Suisse,

2. une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit,

3. l’admission provisoire,

4. l’expulsion fondée sur l’art. 121, al. 2, de la Constitution ou le renvoi,

5. les dérogations aux conditions d’admission,

6. la prolongation d’une autorisation frontalière, le déplacement de la résidence dans un autre canton, le changement d’emploi du titulaire d’une autorisation frontalière et la délivrance de documents de voyage aux étrangers sans pièces de légitimation ;

d. les décisions en matière d’asile qui ont été rendues :

1. par le Tribunal administratif fédéral,

2. par une autorité cantonale précédente et dont l’objet porte sur une autorisation à laquelle ni le droit fédéral ni le droit international ne donnent droit ;

Art. 89 Qualité pour recourir

1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire ;

b. est particulièrement atteint par la décision ou l’acte normatif attaqué, et

c. a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification.

Art. 95 Droit suisse

Le recours peut être formé pour violation :

a. du droit fédéral ;

b. du droit international ;

c. de droits constitutionnels cantonaux ;

d. de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires ;

e. du droit intercantonal.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

______________________________________________

Art. 113 Principe

Le Tribunal fédéral connaît des recours constitutionnels contre les décisions des autorités cantonales de dernière instance qui ne peuvent faire l’objet d’aucun recours selon les art. 72 à 89.

Art. 115 Qualité pour recourir

A qualité pour former un recours constitutionnel quiconque :

a. a pris part à la procédure devant l’autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire et

b. a un intérêt juridique à l’annulation ou à la modification de la décision attaquée.

Art. 116 Motifs de recours

Le recours constitutionnel peut être formé pour violation des droits constitutionnels.

Art. 100 Recours contre une décision

1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l’expédition complète.

___________________________________________

 

Recours ordinaire simultané (art. 119 LTF)

1 Si une partie forme contre une décision un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.

2 Le Tribunal fédéral statue sur les deux recours dans la même procédure.

3 Il examine les griefs invoqués selon les dispositions applicables au type de recours concerné.