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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1341/2023

ATA/1265/2023 du 21.11.2023 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1341/2023-EXPLOI ATA/1265/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 novembre 2023

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Daniel MEYER, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE - SERVICE DE L'ESPACE PUBLIC intimée

 



EN FAIT

A. a. A______ exploite l'établissement à l'enseigne B______, situé ______ / ______ en ville de Genève, pour lequel il bénéficie d'une permission communale l'autorisant à exploiter une terrasse. La permission est accompagnée d'un plan délimitant le périmètre autorisé.

b. Il exploite également l'établissement immédiatement contigu, à savoir l'enseigne C______, situé ______ / ______, pour lequel il bénéficie également d'une permission communale l'autorisant à exploiter une terrasse.

B. a. Le vendredi 30 décembre 2022, à 23h30, l'attention d'une patrouille de la police municipale a été attirée par le volume sonore très élevé d'une animation musicale provenant de la rue ______. Cette musique était audible depuis la rue ______, soit à une distance d'une centaine de mètres. La police municipale a constaté que la musique provenait du B______, que sa porte et une fenêtre étaient ouvertes, permettant la diffusion de la musique à l'extérieur des locaux. Après avoir ordonné de baisser le volume et de fermer les ouvertures, les agents ont quitté les lieux.

b. A______ disposait d'une autorisation pour l'animation musicale valable pour le 30 décembre 2022, qui a été présentée à la police municipale.

c. Plus tard dans la nuit, le samedi 31 décembre 2022, à 01h00, sur demande de la centrale d'engagement de la police cantonale, les agents de la police municipale sont de nouveau intervenus pour le même motif. Le volume sonore était plus élevé qu'auparavant. De plus, une trentaine de clients se tenaient à l'extérieur des locaux et terrasses, obstruant le trottoir et la chaussée ; ils consommaient des boissons alcooliques en provenance des établissements précités. Certains clients avaient aussi posé leurs consommations sur des véhicules normalement stationnés.

d. Le 4 janvier 2023, le poste D______de la police municipale a rédigé deux rapports de renseignements : le rapport 1______ concernait les événements du 30 décembre 2022 à 23h30 et mentionnait le B______ comme lieu de l'infraction ; le rapport 2______ concernait les événements du 31 décembre 2022 à 01h00 et mentionnait C______ comme lieu de l'infraction.

e. Le 4 avril 2023, le service (cantonal) de police du commerce et de lutte contre le travail au noir a écrit à A______ pour lui permettre d'exercer son droit d'être entendu, en raison d'une infraction à l'art. 24 al. 2 de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement, du 19 mars 2015 (LRDBHD – I 2 22).

C. a. Par décision du 9 mars 2023 (courrier 3______ – dossier 4______ – amende 5______), notifiée formellement à A______, mais visant le B______, le service de l'espace public de la Ville de Genève (ci‑après : la ville) lui a infligé une amende administrative de CHF 450.- sur la base de l'art. 65 LRDBHD. Les motifs de l'amende étaient les suivants: « 3802 – a exploité la terrasse de son établissement de manière à engendrer des inconvénients graves pour le voisinage », « 3803 – n'a pas veillé au maintien de l'ordre sur la terrasse de son établissement et n'a pas pris toutes les mesures utiles à cette fin » et « 3806 – a servi des boissons alcoolisées à des clients qui se tenaient debout hors du périmètre autorisé de la terrasse de son établissement ». Le débordement des périmètres autorisés (des terrasses) ferait l'objet d'une sanction notifiée par courrier séparé.

b. Par décision parallèle du 9 mars 2023 (courrier 6______ – dossier 4______ – amende 7______), fondée sur la même description factuelle, notifiée formellement à A______, mais visant le B______, le service de l'espace public lui a infligé une amende administrative de CHF 150.- conformément à l'art. 85 de la loi sur les routes du 28 avril 1967 (LRoutes – L 1 10). Le motif de l'amende était le suivant: « 2903 – Dépassement des limites autorisées de terrasse ». Cette décision a été contestée devant le TAPI, puis a été annulée par la ville.

c. Par décision du 5 avril 2023 (courrier 8______ – dossier 9______– amende 10______), notifiée formellement à A______, mais visant le C______, le service de l'espace public lui a infligé une amende administrative de CHF 450.- conformément à l'art. 65 LRDBHD. L'état de fait se limitait aux constats du 31 décembre 2022 à 01h00 ; rien ne mentionnait la soirée du 30 décembre 2022. Les motifs de l'amende étaient identiques à ceux de l'amende du 9 mars 2023.

d. Par décision parallèle du 5 avril 2023 (courrier 11______ – dossier 9______– amende 12______), fondée sur la même description factuelle, notifiée formellement à A______, mais visant le C______, le service de l'espace public lui a infligé une amende de CHF 150.- conformément à l'art. 85 LRoutes. Le motif de l'amende était le suivant: « 2903 – Dépassement des limites autorisées de terrasse ». Cette décision a été contestée devant le TAPI, puis a été annulée par la ville.

Procédure A/1341/2023

D. a. Par acte remis à la poste le 20 avril 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: la chambre administrative) contre la décision 3______ du 9 mars 2023, concluant à son annulation. Il critiquait une constatation inexacte des faits. Le rapport de la police municipale concernant l'intervention du 30 décembre 2022 ne faisait pas référence au débordement de la zone de terrasse et à la consommation de boissons alcoolisées dans la rue, éléments qui avaient été retenus dans la décision, alors que ces faits n'avaient eu lieu que le 31 décembre 2022, qui avait donné lieu à une autre décision. De plus, ces faits avaient donné lieu à une amende ultérieure. Il avait été amendé à deux reprises pour les mêmes faits, soit deux fois pour dépassement des limites autorisées de terrasse (alors qu'il n'y avait qu'une seule terrasse), et deux fois pour débordement des périmètres autorisés, inconvénients graves pour le voisinage, consommation de boissons alcooliques en dehors des terrasses et non-maintien de l'ordre. Le rapport de renseignements et la décision ne coïncidaient pas avec les faits et infractions reprochés. La décision du 9 mars 2023 et celle du 5 avril 2023 reposaient sur les mêmes faits, ce qui violait le principe ne bis in idem.

b. Par pli du 23 mai 2023, la ville a conclu au rejet du recours et persisté dans sa décision. Il n'y avait pas de sanction fondée sur l'art. 31 du Règlement concernant l’utilisation du domaine public du 21 décembre 1988 (RUDP – L 1 10.12), qui avait été mentionné par erreur. Le recourant n'avait pas remis en cause sa culpabilité et le montant de l'amende, proche du minimum, était mesuré.

c. Le 30 juin 2023, le recourant a répliqué et persisté dans son argumentation. La décision et l'amende administrative portaient exclusivement sur les faits du vendredi 30 décembre 2022 et non sur ceux du matin du 31 décembre 2022. L'autorité intimée faisait donc erreur en se fondant sur les faits du 31 décembre 2022. Les faits relatés dans le rapport de police concernant le 30 décembre 2022 portaient uniquement sur un excès de bruit. L'amende administrative aurait donc dû se limiter uniquement aux faits constatés le 30 décembre 2022.

d. Le 13 juillet 2023, la cause a été gardée à juger.

Procédure A/1553/2023

E. a. Par acte remis à la poste le 5 mai 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre la décision 8______ du 5 avril 2023, concluant à son annulation. Il critiquait une constatation inexacte des faits. La décision querellée faisait état de débordement des périmètres autorisés, d'inconvénients graves pour le voisinage, de consommation de boissons alcooliques en dehors des terrasses et d'absence de maintien de l'ordre. Ces faits reprochés avaient fait l'objet d'une autre décision distincte, à savoir celle du 9 mars 2023. Comme la décision du 9 mars 2023 et celle du 5 avril 2023 reposaient sur les mêmes faits, il y avait violation du principe ne bis in idem. La deuxième décision devait donc être annulée.

b. Par pli du 9 juin 2023, la ville a conclu au rejet du recours et persisté dans sa décision. Elle a indiqué qu'il n'y avait pas de sanction fondée sur l'art. 31 RUDP, qui avait été mentionné par erreur. Le recourant n'avait pas remis en cause sa culpabilité et le montant de l'amende, proche du minimum, était mesuré.

c. Le 7 juillet 2023, le recourant a répliqué et persisté dans son argumentation. Il faisait l'objet de deux amendes administratives pour les mêmes faits, visant d'une part le B______ et d'autre part le C______. Le principe ne bis in idem était manifestement violé. De plus, il n'était pas possible d'attribuer avec certitude les comportements reprochés à l'un ou l'autre des établissements. Enfin, le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir envisageait aussi de prononcer une amende administrative.

d. Le 19 juillet 2023, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjetés en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Il faut examiner en premier lieu une éventuelle jonction des deux procédures.

2.1 Selon l'art. 70 al. 1 LPA, l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.

2.2 En l'espèce, les procédures A/1341/2023 et A/1553/2023 concernent deux recours émanant du même exploitant, contre deux décisions du même service de la ville pour des comportements ayant eu lieu la même nuit (certes, à des périodes partiellement différentes, mais cette question relève du fond) au ______. De plus, les questions juridiques posées sont identiques, et les deux causes sont gardées à juger.

2.3 Il se justifie ainsi de joindre les causes précitées sous le numéro A/1341/2023.

3.             Le présent litige concerne la violation de normes de la LRDBHD.

3.1 La LRDBHD a pour but de régler les conditions d'exploitation des entreprises vouées à la restauration et/ou au débit de boissons à consommer sur place, à l’hébergement, ou encore au divertissement public (art. 1 al. 1 LRDBHD). Elle vise à assurer la cohabitation de ces activités avec les riverains, notamment par leur intégration harmonieuse dans le tissu urbain, et à développer la vie sociale et culturelle et sa diversité, dans le respect de l'ordre public, en particulier la tranquillité, la santé, la sécurité et la moralité publiques (art. 1 al. 2 LRDBHD).

3.2 Selon l'art. 4 al. 2, 1ère phrase LRDBHD, la commune du lieu de situation de l'entreprise est compétente pour autoriser l'exploitation des terrasses.

3.3 Selon l'art. 15 LRDBHD, les communes fixent les conditions d'exploitation propres à chaque terrasse, notamment les horaires, en tenant compte de la configuration des lieux, de la proximité et du type de voisinage, ainsi que de tout autre élément pertinent. L'horaire d'exploitation doit respecter les limites prévues par l'autorisation relative à l’entreprise, sans toutefois dépasser l'horaire maximal prévu par les articles 6 ou 7, alinéas 1 et 2 (al. 1). Les terrasses doivent être accessibles aux personnes avec handicap ou à mobilité réduite, à moins que cela n'occasionne des travaux et des coûts disproportionnés (al. 2). Pour des motifs d'ordre public et/ou en cas de violation des conditions d'exploitation visées aux alinéas 1 et 2, les communes sont habilitées à prendre, pour ce qui touche à l'exploitation de la terrasse concernée, les mesures et sanctions prévues par la présente loi, lesquelles sont applicables par analogie (al. 3).

3.4 Selon l'art. 24 LRDBHD, dont le titre est « maintien de l'ordre et de la tranquillité publique », l’exploitant doit veiller au maintien de l’ordre dans son établissement, qui comprend cas échéant sa terrasse, et prendre toutes les mesures utiles à cette fin (al. 1). Il doit exploiter l’entreprise de manière à ne pas engendrer d’inconvénients pour le voisinage (al. 2) Si l’ordre est troublé ou menacé de l’être, que ce soit dans son établissement, sur sa terrasse, ou encore, s’il l’a constaté, dans ses environs immédiats, l’exploitant doit faire appel à la police (al. 3). En cas de constat de troubles à l'ordre public ou de nuisances réitérés, le département peut exiger du propriétaire ou de l'exploitant qu'il organise à ses frais un service d'ordre adéquat afin que le maintien de l'ordre soit assuré (al. 4).

3.5 Selon l'art. 31 al. 9 LRDBHD, lorsqu’elles sont vendues par des établissements au sens de la LRDBHD, les boissons alcooliques doivent être consommées uniquement dans l’établissement, cas échéant dans le périmètre de la terrasse de ce dernier, sous réserve d’une autorisation au sens de l’article 7 de la loi sur la remise à titre gratuit et la vente à l’emporter de boissons alcooliques, de produits du tabac et de produits assimilés au tabac, du 17 janvier 2020 (LTGVEAT – I 2 25).

3.6 Selon l'art. 60 al. 1 LRDBHD, le département est l'autorité compétente pour décider des mesures et sanctions relatives à l'application de la LRDBHD. Sont réservées les dispositions spéciales de la LRDBHD qui désignent d'autres autorités, de même que les mesures et sanctions prévues par d'autres lois et règlements qui relèvent notamment des domaines visés à l'article 1, alinéa 4.

3.7 Selon l'art. 65 al. 1 LRDBHD, en cas d’infraction à la LRDBHD et à ses dispositions d’exécution, ainsi qu’aux conditions des autorisations, le département peut infliger une amende administrative de CHF 300.- à 60'000.- en sus du prononcé de l’une des mesures prévues aux articles 61, 62 et 64, ou encore à la place ou en sus du prononcé de l’une des mesures prévues à l'article 63.

4.             Dans les deux procédures, le recourant se plaint de la constatation inexacte des faits, considérant qu'il y aurait eu un mélange des faits entre les deux procédures.

4.1 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d'office (art. 19 LPA). Ce principe n'est pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA).

4.2 Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Cela ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il leur incombe d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître. En l'absence de collaboration de la partie concernée par de tels faits et d'éléments probants au dossier, l'autorité qui met fin à l'instruction du dossier en considérant qu'un fait ne peut être considéré comme établi, ne tombe ni dans l'arbitraire ni ne viole l'art. 8 CC relatif au fardeau de la preuve (ATF 148 II 465, 470 consid. 8.3).

La constatation des faits, en procédure administrative, est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves, qui signifie que le juge forme librement sa conviction, en analysant la force probante des preuves administrées, dont ni le genre, ni le nombre n'est déterminant, mais uniquement leur force de persuasion (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; ATA/444/2023 du 26 avril 2023 consid. 5.2).

De jurisprudence constante, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés, sauf si des éléments permettent de s'en écarter (ATA/1083/2023 du 3 octobre 2023 consid. 2.5 ; ATA/791/2023 du 18 juillet 2023 consid. 6.1 et les arrêts cités).

4.3 En l'espèce, il est constant qu'il y a eu deux interventions successives de la police municipale de la ville à la rue ______, la nuit du 30 au 31 décembre 2022, la première le vendredi 30 décembre 2022 à 23h30 et la seconde le samedi 31 décembre 2022 à 01h00. Alors que la première intervention résultait d'une patrouille dans le secteur concerné, la deuxième intervention a fait suite à une demande de la centrale d'engagement de la police cantonale.

Il est également acquis que le B______ et C______, dont l'exploitant est la même personne physique, sont deux établissements publics immédiatement voisins. L'exploitant disposait d'une autorisation d'animation musicale, qui a été présentée à la police municipale et ne fait pas l'objet d'un quelconque grief.

En revanche, le volume sonore de l'animation musicale intérieure, notamment sa propagation à l'extérieur par la porte et la fenêtre ouvertes, ainsi que les clients consommant des boissons dans la rue, c'est-à-dire en-dehors du périmètre strict de la terrasse, ainsi que le bruit en découlant sont reprochés à l'exploitant par l'intimée.

Etant donné que la police municipale a établi deux rapports (2______ pour C______ pour le constat du samedi à 01h00, 1______ pour le B______ pour le constat du vendredi à 23h30), le recourant reproche à l'intimée d'avoir mélangé les deux événements et les deux sanctions.

Il est également acquis qu'il y a eu quatre amendes infligées par l'intimée à l'exploitant, indépendamment de celle envisagée par le service (cantonal) de la police du commerce. Deux amendes sur quatre étaient fondées sur la loi sur le domaine public du 24 juin 1961 (LDPu – L 1 05) et la LRoutes et ont été annulées par l'intimée. Les deux autres amendes, qui font l'objet de la présente procédure, ont été adressées l'une au C______ et l'autre au B______. Les « codes motifs » et les bases légales des deux amendes sont identiques.

Les textes des courriers d'accompagnement, qui visent à motiver le bordereau d'amende, sont différents, même s'ils présentent des similitudes. Ainsi la décision du 9 mars 2023 pour le B______ (dossier 3______ et amende 5______) décrit formellement les faits du vendredi soir (date du constat de l'infraction sur le bordereau d'amende) et ceux du samedi matin. Elle constate l'excès de bruit et les personnes situées dans la rue.

La décision du 5 avril 2023 pour C______ (dossier 8______ et amende 10______) décrit uniquement les faits du samedi matin (date du constat de l'infraction sur le bordereau d'amende). Elle mentionne aussi que c'est par suite d'une intervention à l'établissement voisin (B______) qu'il a été constaté que la musique provenait du C______.

Au demeurant, le recourant ne soutient dans aucun recours que le bruit et/ou les clients ne proviendraient que d'un seul établissement et que l'autre aurait, par exemple, été fermé. Bien au contraire, il explique que l'animation musicale se déroulait dans les deux établissements.

Dès lors qu'il y a eu deux interventions successives de la police municipale et que deux établissements publics voisins gérés par le même exploitant étaient concernés, on peine à comprendre en quoi les faits auraient été constatés de manière inexacte. Il aurait assurément été envisageable que la ville de Genève rende toutes ses décisions à la même date et/ou ne prononce une amende (plus élevée) que pour un seul établissement, mais cela ne constitue pas un établissement inexact des faits.

Il serait au demeurant sans pertinence, et le recourant ne le fait pas valoir, de connaître la répartition des clients dans la rue par rapport à l'établissement d'origine. La distinction précise des comportements entre les deux établissements n'apporte rien.

Ce premier grief sera donc écarté.

5.             Dans les deux procédures, le recourant se plaint de la violation du principe ne bis in idem.

5.1 Les amendes administratives prévues par la législation cantonale sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. La quotité de la sanction administrative doit ainsi être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/174/2023 du 28 février 2023 consid. 2.1.3 et les arrêts cités).

5.2 Le principe ne bis in idem, garanti par l'art. 4 du Protocole additionnel n° 7
à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, du 22 novembre 1984 (PA 7 CEDH – RS 0.101.07), et 11 du code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP - RS 312.0), et valable en matière pénale, interdit de poursuivre deux fois la même personne pour les mêmes faits, pour autant que les procédures soient dirigées contre la même personne, qu’elle sanctionne le même comportement condamnable et vise les mêmes biens juridiquement protégés (ATA/957/2014 du 2 décembre 2014 consid. 16 ; ATA/147/2014 du 11 mars 2014 consid. 10 ; ATA/127/2011 du 1er mars 2011 consid. 10 et les références citées ; voir aussi ATA/1261/2020 du 15 décembre 2020 consid. 5b).

5.3 En l'espèce, il est constant, comme déjà mentionné, qu'il y a eu deux amendes contestées devant la chambre de céans pour deux infractions temporellement distinctes, le vendredi à 2300 et le samedi à 0100. Pour ce motif déjà, le principe ne bis in idem n'est pas violé. Même si les amendes avaient été infligées au même établissement, ce principe aurait été respecté : la double intervention policière est en effet avérée.

Le recourant ne remet pas en cause la quotité modeste (2 x CHF 450.-) de l'amende, qui s'explique probablement par les fêtes de fin d'année. Il n'en demeure pas moins que la deuxième intervention policière, sur demande de la centrale d'engagement de la police cantonale, n'aurait pas dû être nécessaire, car les voisins auraient assurément attendu de l'exploitant qu'il tienne compte de la première intervention et diminue (et a fortiori n'augmente pas) les nuisances sonores extérieures. Malgré la récidive du comportement bruyant, le montant de la deuxième amende est donc peu élevé, puisque identique à celui de la première. Autrement dit, le fait que les deux rapports de police et les décisions qui s'en suivent concernent les deux établissements est plutôt à l'avantage du recourant. Si les deux procédures avaient formellement concerné le même établissement, nul doute que la deuxième amende aurait été plus élevée.

Ce deuxième grief sera donc écarté.

5.4 Au surplus, le recourant ne conteste pas les comportements à l'origine de la sanction ; à juste titre, il ne prétend pas non plus que les comportements auraient été licites ; enfin, il ne conteste pas la quotité de la sanction. Les deux amendes de CHF 450.- ont donc été prononcées à juste titre par l'autorité compétente.

Le recours sera donc rejeté.

6.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

préalablement :

ordonne la jonction des causes nos A/1341/2023 et A/1553/2023 sous le no A/1341/2023 ;

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 avril 2023 par A______ contre la décision prononcée par la Ville de Genève - service de l'espace public du 9 mars 2023 ;

déclare recevable le recours interjeté le 5 mai 2023 par A______ contre la décision prononcée par la Ville de Genève - service de l'espace public du 5 avril 2023 ;

au fond :

les rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 500.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Daniel MEYER, avocat du recourant ainsi qu'à la Ville de Genève - service de l'espace public.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Claudio MASCOTTO, juge, David HOFMANN, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

S. CROCI TORTI

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :