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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/181/2023

ATA/1065/2023 du 26.09.2023 ( PROC ) , REJETE

Recours TF déposé le 03.11.2023, 9C_692/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/181/2023-PROC ATA/1065/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 26 septembre 2023

4ème section

 

dans la cause

 

A______et B______ requérants
représentés par Me Michel CABAJ, avocat

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS

COUR DE JUSTICE - CHAMBRE ADMINISTRATIVE intimées

 



EN FAIT

A. a. B______, né en 1954, est le fils de C______, lequel est décédé le ______ 2009.

b. Il a épousé A______ en 2011.

B. a. Par courrier de son mandataire du 28 septembre 2018, B______ a informé l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC-GE) avoir reçu de son défunt père des avoirs intitulés « D______ Luxembourg – E______ n. 1______ » pour un montant de EUR 242'962.- au 31 décembre 2017. Cette déclaration spontanée concernait les périodes fiscales 2008 à 2017.

b. Par courriers recommandés du 13 décembre 2018, l’AFC-GE a informé les époux de l’ouverture d’une procédure en rappel et soustraction d’impôt pour les années 2008, 2011, 2012, 2013 et 2015.

c. Le 19 décembre 2019, ces procédures ont été étendues aux années fiscales 2009, 2014 et 2016. Les époux étaient priés de fournir les relevés fiscaux détaillés et complets, avec mention des rendements échus aux 31 décembre 2008 à 2016, de leurs titres déposés auprès de D______ Luxembourg – E______ n. 1______. Ils étaient également invités à justifier concrètement la provenance des fonds à hauteur d’environ EUR 243'000.- au moyen de tous documents.

d. Le 13 juillet 2020, après plusieurs prolongations de délai, l’AFC-GE a imparti aux époux un dernier délai au 31 juillet 2020 pour fournir les pièces demandées, sous peine de taxation d’office et d’amende.

e. Le 14 août 2020, l’AFC-GE a informé les contribuables de l’ouverture complémentaire d’une procédure en tentative de soustraction d’impôt pour l’ICC et l’IFD 2017, en leur demandant les mêmes documents que s'agissant des autres années.

Par courrier recommandé du 17 décembre 2020, l’AFC-GE a informé les époux que les procédures en rappel et soustraction d’impôt pour les années 2008, 2009 et 2011 étaient terminées et leur a remis les bordereaux de rappel d’impôt pour ces années ainsi que des bordereaux d’amende ICC et IFD 2011. Les années 2008 et 2009 ne faisaient pas l’objet d’une amende.

Les reprises et les amendes étaient les suivantes :

Année fiscale

Supplément d'impôt ICC

Supplément d'impôt IFD

Amende ICC

Amende IFD

2008

CHF 129'324.05

CHF 51'400.80

2009

CHF 4'590.40

CHF 488.40

2011

CHF 3'525.05

CHF 390.--

CHF 3'525.-

CHF 390.-

Total

CHF 137'439.50

CHF 52'279.20

CHF 3'525.-

CHF 390.-

f. Le même jour, les époux étaient informés de la clôture des procédures en rappel et soustraction d’impôt relatives aux années 2012 à 2016 et les bordereaux de rappel d’impôt et d’amende pour ces années leur ont été remis.

Les reprises et les amendes étaient les suivantes :

Année fiscale

Supplément d'impôt ICC

Supplément d'impôt IFD

Amende ICC

Amende IFD

2012

CHF 3'489.35

CHF 377.-

CHF 3'489.-

CHF 377.-

2013

CHF 3'551.10

CHF 390.-

CHF 3'551.-

CHF 390.-

2014

CHF 3'602.90

CHF 390.-

CHF 3'602.-

CHF 390.-

2015

CHF 3'160.70

CHF 338.-

CHF 3'160.-

CHF 338.-

2016

CHF 10'637.70

CHF 4'043.-

CHF 10'637.-

CHF 4'043.-

Total

CHF 24'441.75

CHF 5'538.-

CHF 24'439.-

CHF 5'538.-

g. Par courrier du 18 janvier 2021, les époux ont formé réclamation à l’encontre des l'ensemble des bordereaux de rappel d’impôt et d’amende précités, concluant à leur annulation.

h. Par décision sur réclamation du 15 avril 2021, l’AFC-GE a maintenu les bordereaux de rappel ICC et IFD 2008, 2009 et 2011 à 2016 ainsi que les amendes. Malgré le délai supplémentaire accordé, les époux n’avaient toujours pas apporté la preuve de leurs allégations. L’AFC-GE n’avait pu obtenir ni l’identité de l’ayant droit économique, ni les relevés fiscaux pour les années 2008 à 2017, ni les justificatifs de la provenance des fonds qui avaient permis d’alimenter le compte D______ Luxembourg – E______ n. 1______.

i. Par acte du 17 mai 2021, les époux ont recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre la décision sur réclamation du 15 avril 2021, concluant principalement, à son annulation et à ce que de nouveaux bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2008, 2009 et 2011 à 2016 ainsi que d’amende ICC et IFD 2011 à 2016 soient émis. La cause a été enregistrée sous numéro A/1755/2021.

j. Par jugement du 24 janvier 2022, le TAPI a admis partiellement le recours, donnant acte à l'AFC-GE de ce qu’elle annulait les bordereaux de rappel d’impôt ICC et IFD 2009 et rejetant le recours pour le surplus.

k. Par acte posté le 25 février 2022, les époux AB______ ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant préalablement à la comparution personnelle des parties, à l'audition de trois personnes en lien avec F______ SA (ci-après : F______) et à une expertise d'authenticité graphologique de la décharge du 30 novembre 1999, et principalement à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il confirmait les bordereaux de rappel d'impôts et d'amende.

l. Par arrêt du 22 novembre 2022 (ATA/1177/2022), la chambre administrative a admis partiellement le recours.

Les époux n'avaient pas démontré que le compte litigieux avait été dévolu à B______ par voie successorale. L'accusé de réception de 1999 ne pouvait suffire à prouver qui était l'ayant droit économique du compte en 2008. Le délai de conservation de dix ans des pièces justificatives n'était pas échu au moment de la dénonciation spontanée – ni même en 2020, étant rappelé que les taxations concernées allaient jusqu'en 2016 et que les recourants n'ont produit aucun document bancaire –, et l'attestation du 1er septembre 2021 avait été émise pour les besoins de la cause et ne pouvait remplacer d'autres moyens de preuve. Le « mémorandum » rédigé par B______ le 18 août 2020, qui se contentait d'indiquer que les fonds se trouvant sur le compte litigieux résultaient de la fortune personnelle de son père, constituait une simple allégation de partie qui ne prouvait rien par elle-même.

Ce qui était cependant déterminant pour la question d'une possible exonération d'impôt sur le revenu était l'absence totale de pièce probante relative à une dévolution successorale. Aucun testament ni convention d'avance d'hoirie – puisque le transfert de la titularité du compte aurait eu lieu selon B______ une année environ avant le décès de son père, et qu'il n'était pas enfant unique – n'avait été produit. Dans ces circonstances, on ne pouvait retenir que B______ aurait démontré avoir acquis le montant de EUR 242'962.- dans la succession de son père, si bien que la reprise de ce montant dans l’année fiscale 2008 devait être confirmée.

S'agissant de la dénonciation spontanée, force était de constater que les époux n'avaient pas rempli leur devoir de collaborer et que l'une des conditions de l'impunissabilité n'était pas remplie. Le principe du prononcé d'amende pour soustraction était dès lors confirmé. La quotité des amendes devait en revanche être ramenée aux trois quarts de l'impôt éludé et non à l'entier de celui-ci, si bien que le recours était partiellement admis.

m. Saisi d'un recours en matière de droit public, le Tribunal fédéral l'a partiellement admis par arrêt du 20 juin 2023 (9C_39/2023), annulant l'arrêt attaqué s'agissant des amendes et le confirmant s'agissant de la procédure de rappel d'impôt pour les périodes fiscales 2008 et 2011 à 2016.

Les époux avaient produit avec leur mémoire de recours une lettre émanant de l'ancien directeur de F______ SA (ci-après : F______), du 13 janvier 2023, accompagnée de ce qui apparaissait comme étant des extraits d'un compte bancaire. La lettre établie postérieurement à l'arrêt entrepris était irrecevable. En ce qui concernait les extraits de compte, dès lors que les contribuables n'exposaient pas en quoi il leur aurait été impossible d'obtenir ces documents plus tôt ni en quoi leur production devant le Tribunal fédéral résulterait de l'arrêt attaqué, ils devaient également être écartés. Il ne suffisait pas à cet égard de se référer aux explications données dans la lettre sur les circonstances dans lesquelles il aurait retrouvé les pièces en cause.

La requête de suspension devait être rejetée. En effet, la demande de révision déposée devant la chambre administrative semblait ne reposer sur aucun motif déterminant pour la révision, et compte tenu de l'avancement de la prescription en matière de taxation, il convenait de privilégier un règlement rapide du cas conformément au principe de célérité.

Les reprises d'impôt étaient confirmées. Les amendes devaient en revanche être annulées. En effet, la chambre administrative ayant à tort refusé d'entendre les époux oralement (débats publics) concernant la procédure de soustraction d'impôt qui avait conduit au prononcé d'amendes à leur encontre s'agissant des périodes fiscales 2011 à 2016, dans la mesure où les recourants avaient expressément demandé à être entendus oralement et qu'il n'était dès lors pas possible de renoncer à une audition orale. En conséquence, la cause devait être renvoyée à la chambre administrative pour qu'elle entende les recourants dans le cadre de la procédure de soustraction d'impôt. 

n. Une audience de comparution personnelle et de plaidoiries a ainsi eu lieu devant la chambre de céans en date du 5 septembre 2023 et un nouvel arrêt au sujet des amendes est rendu ce jour dans la cause A/1755/2021.

C. a. Par acte posté le 17 janvier 2023, les époux AB______ ont déposé auprès de la chambre administrative une demande en révision de l'ATA/1177/2022, concluant à la révision de celui-ci, seul le rappel d'impôt sur la fortune pouvant être exigé d'eux.

Par courrier du 13 janvier 2023, G______, ancien directeur et administrateur de F______, indiquait avoir pu enfin retrouver « un relevé historique de performance du compte ouvert par C______ (…) remontant au 1er septembre 2002, de ladite relation n° 1______ au 1er avril 2011 de la banque D______ (Luxembourg) SA » et « un récapitulatif interne du groupe F______ relatif à la performance de ce compte au 28 avril 2008 ». C______ avait été le seul bénéficiaire effectif de ce compte jusqu'à son décès en 2009.

Selon le courrier, les pièces précitées avaient pu être retrouvées grâce aux nombreuses relances de l'avocat des époux AB______ ainsi qu'à des recherches d'archives « conséquentes ». Ces documents avaient été regrettablement mal classés, dès lors qu'ils figuraient dans un dossier personnel de G______ sur les suites de l'« affaire H______ ».

Ces pièces démontraient que le compte litigieux avait été ouvert en 2002, si bien que la péremption décennale relative à la procédure de rappel d'impôt était largement atteinte au moment de l'ouverture de la procédure de rappel. L'arrêt de la chambre administrative devait être révisé dès lors qu'il retenait que le montant figurant sur ce compte bancaire était présumé avoir été acquis en 2008 sous forme de revenu. Le délai pour introduire une demande en révision était respecté, dès lors que les documents avaient été reçus quatre jours plus tôt.

b. Le 14 février 2023, l'AFC-GE a conclu à ce qu'il ne soit pas entré en matière sur la demande de révision, subsidiairement à ce qu'elle soit rejetée.

Les époux AB______ perdaient de vue que les procédures en rappel d'impôt avaient été ouvertes à la suite de leur dénonciation spontanée qui portait sur les années 2008 à 2017. Le délai de dix ans était donc venu à échéance pour l'exercice 2008 au 31 décembre 2018, et la procédure avait donc été ouverte dans les délais. En outre, les conditions du rappel d'impôt étaient remplies, puisque des faits inconnus de l'autorité fiscale lui avaient permis d'établir que des taxations effectuées auparavant étaient incomplètes. La demande ne contenait dès lors aucun motif légal de révision au sens des art. 147 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) et 55 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17).

On pouvait enfin s'étonner que les époux AB______ ne fassent valoir l'argument de la péremption du droit d'ouvrir la procédure de rappel d'impôt qu'à ce stade de la procédure, par le biais d'une demande de révision de l'arrêt cantonal, ce qui posait la question du caractère éventuellement dilatoire de la démarche.

c. Le 3 mars 2023, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 31 mars 2023, par la suite prolongé au 14 avril 2023, pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

d. Le 31 mars 2023, l'AFC-GE a indiqué ne pas avoir de requêtes ni d'observations complémentaires.

e. Le 14 avril 2023, les époux AB______ ont persisté dans leurs conclusions.

Les pièces produites, soit le courrier de G______ et ses annexes, constituaient un moyen de preuve pouvant influencer la décision en leur faveur, dès lors qu'elles corroboraient la version des faits qui était la leur depuis l'ouverture de la procédure, à savoir que l'argent du compte litigieux n'était pas un revenu réalisé par eux-mêmes en 2008.

La position de l'AFC-GE était d'autant plus critiquable qu'elle était restée purement passive malgré la maxime inquisitoire qui prévalait en matière fiscale.

EN DROIT

1. Interjetée en temps utile devant la juridiction compétente, la demande est recevable (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; 149 al. 1 LIFD ; 51 al. 4 LHID ; 7 al. 2 et 57 al. 1 LPFisc), étant précisé que si, lors de l'introduction de la demande, l'arrêt dont la révision est demandée n'était pas entré en force, il l'est désormais sur la question pertinente des rappels d'impôt, ceux-ci ayant été confirmés par le Tribunal fédéral dans son arrêt 9C_39/2023 du 20 juin 2023.

2.             L’objet du litige porte sur la demande en révision de l'ATA/1177/2022 du 22 novembre 2022. Il convient donc d'examiner dans un premier temps si les conditions d'une révision sont données (rescindant).

2.1 Selon l'art. 147 al. 1 de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11), une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d'office : lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a) ; lorsque l'autorité qui a statué n'a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait ou devait connaître ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des règles essentielles de la procédure (let. b) ; lorsqu’un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c).

Est nouveau le fait qui était inconnu, mais qui existait déjà au moment de la décision. Les faits en question sont donc des événements antérieurs au prononcé dont la révision est demandée, mais qui ont été découverts par la suite. Les faits et moyens postérieurs à la décision sont donc en principe exclus. S'ils existaient de manière latente dès le début, ils peuvent toutefois justifier une révision en ce qu'ils rétroagissent au jour où la décision a été prise et font apparaître l'appréciation des faits effectuée à cette époque comme inexacte (arrêts du Tribunal fédéral 2C_93/2021 du 9 novembre 2021 consid. 7 ; 2C_245/2019 du 27 septembre 2019 consid. 5.2 et les références citées). Tel est le cas, selon une partie de la doctrine, lorsqu'un revenu, imposé au moment de sa réalisation, est soumis ultérieurement à une obligation de restitution ou à une mesure de confiscation. Ce n'est que si la restitution n'a pas lieu que le revenu reste imposable : un accroissement de fortune ne constitue un revenu imposable que si son acquéreur peut en disposer définitivement. En revanche, lorsqu'elle est effective, la restitution constitue une circonstance nouvelle qui doit être prise en compte par le fisc au moyen d'une révision au sens des art. 147 ss LIFD, même si elle ne constitue pas une nova improprement dite, mais bien une pure nova : c'est en effet une circonstance qui rétroagit au jour de la décision de taxation en ce qu'elle met en lumière une erreur dans l'appréciation juridique initiale des faits (arrêt du Tribunal fédéral 9C_674/2022 du 12 avril 2023 consid. 7.1 et les références citées).

En outre, le fait doit être important, en ce sens que son existence est de nature à influencer la décision dans un sens favorable au demandeur (arrêt du Tribunal fédéral 9C_674/2022 du 12 avril 2023 consid. 7.1).

2.2 La révision est exclue lorsque le requérant a invoqué des motifs qu'il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s'il avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée de lui (art. 147 al. 2 LIFD). En d'autres termes, selon la jurisprudence, même en présence d'un motif de révision, si le contribuable ou son représentant omet, de manière négligente, de faire valoir celui-ci dans la procédure ordinaire, la révision n'est pas possible. La jurisprudence souligne qu'il faut se montrer strict à cet égard. Le seul facteur décisif est donc celui de savoir si le contribuable aurait déjà pu présenter les motifs de révision dans la procédure ordinaire. Le but de la procédure extraordinaire de révision n'est en effet pas de réparer les omissions évitables du contribuable commises au cours de la procédure ordinaire. Cette limitation importante à la révision s'explique par le caractère subsidiaire de cette voie de droit et par les exigences de la sécurité du droit (arrêt du Tribunal fédéral 2C_245/2019 du 27 septembre 2019 consid. 5.3 et les références citées).

2.3 La demande de révision doit être déposée dans les 90 jours qui suivent la découverte du motif de révision, mais au plus tard dans les dix ans qui suivent la notification de la décision ou du prononcé (art. 148 LIFD).

La possibilité pour l'autorité fiscale de procéder d'office à la révision d'une décision ou un prononcé entré en force n'a pas pour effet que le contribuable n'est plus tenu de respecter le délai de l'art. 148 LIFD. Selon la doctrine, l'autorité fiscale doit procéder d'office à la révision d'une décision ou un prononcé entré en force lorsqu'elle découvre un motif de révision par elle-même que le contribuable n'a pas encore découvert ou n'a pas pu découvrir. Il faut éviter que le contribuable qui connaissait ou pouvait connaître le motif de révision ne laisse passer le délai de l'art. 148 LIFD et fasse ensuite grief à l'autorité fiscale de n'avoir pas procédé d'office à la révision d'une manière contraire au principe de la bonne foi, ancré à l'art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_660/2017 du 30 janvier 2019 consid. 6.1 et les références citées).

La découverte du motif de révision implique que le requérant a une connaissance suffisamment sûre du fait nouveau pour pouvoir l'invoquer, même s'il n'est pas en mesure d'en apporter une preuve certaine ; une simple supposition ne suffit pas. S'agissant plus particulièrement d'une preuve nouvelle, le requérant doit pouvoir disposer d'un titre l'établissant ou en avoir une connaissance suffisante pour en requérir l'administration (arrêts du Tribunal fédéral 4A_222/2011 du 22 août 2011 consid. 2.1 et 4C.111/2006 du 7 novembre 2006 consid. 1.2 et les références citées). Il appartient au requérant d'établir les circonstances déterminantes pour la vérification du respect du délai précité (arrêt du Tribunal fédéral 4A_222/2011 précité consid. 2.1 ; ATA/396/2014 du 27 mai 2014 consid. 3).

2.4 Conformément à l'art. 51 al. 1 de la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) et à l'art. 55 al. 1 LPFisc, dont la teneur est identique, une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d'office, lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a), lorsque l'autorité qui a statué n'a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait ou devait connaître ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des règles essentielles de la procédure (let. b), lorsqu'un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c). La révision est exclue lorsque le requérant a invoqué des motifs qu'il aurait déjà pu faire valoir au cours de la procédure ordinaire s'il avait fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée de lui (art. 51 al. 2 LHID ; art. 55 al. 2 LPFisc). La demande de révision doit être déposée dans les 90 jours qui suivent la découverte du motif de révision, mais au plus tard dans les dix ans qui suivent la notification de la décision ou du prononcé (art. 51 al. 3 LHID ; art. 56 LPFisc).

2.5 Lorsque, comme dans la présente affaire, la disposition de droit fiscal fédéral est semblable à celle du droit harmonisé, il y a lieu, en vue d'une harmonisation verticale, d'interpréter cette dernière de la même manière que celle relative à l'impôt fédéral direct, dont elle reprend la teneur. Selon une jurisprudence constante en relation avec l'impôt fédéral direct, le Tribunal fédéral, dans l'intérêt de la sécurité du droit, refuse de corriger des décisions de taxation entrées en force pour d'autres motifs que ceux énumérés à l'art. 147 al. 1 LIFD. Cette jurisprudence vaut également pour l'art. 51 LHID (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1066/2013 du 27 mai 2014 consid. 3.2 et les références citées).

2.6 En matière fiscale, les règles générales relatives à la répartition du fardeau de la preuve, ancrées à l'art. 8 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) et destinées à déterminer qui doit supporter les conséquences de l'échec de la preuve ou de l'absence de preuve d'un fait, impliquent que l'autorité fiscale doit établir les faits qui justifient l'assujettissement et qui augmentent la taxation, tandis que le contribuable doit prouver les faits qui diminuent la dette ou la suppriment (ATF 146 II 6 consid. 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_667/2021 du 11 mars 2022 consid. 4.4 et les arrêts cités).

2.7 En l'espèce, l'arrêt dont la révision est demandée retenait d'une part que les éléments fournis par les demandeurs en vue de prouver que le père du contribuable avait été titulaire ou bénéficiaire du compte bancaire étaient insuffisants, mais aussi que ce qui était déterminant pour la question d'une possible exonération d'impôt sur le revenu était l'absence totale de pièce probante relative à une dévolution successorale, comme un testament ou une convention d'avance d'hoirie (consid. 8). Or si les pièces fournies à l'appui de la demande de révision sont susceptibles d'étayer le premier de ces deux aspects, elles ne constituent en rien des pièces relatives à une dévolution successorale, si bien qu'en toute hypothèse, elles ne permettraient pas de retenir une exonération pour cause de dévolution par voie de succession. Il ne s'agit donc pas de moyens de preuve importants au sens de la jurisprudence.

De plus, si les pièces en question concernent bien des faits antérieurs à la décision dont la révision est demandée (nova improprement dits), on ne saurait retenir qu'elles aient été « découvertes » postérieurement, et surtout que les demandeurs n'auraient pas déjà pu les faire valoir au cours de la procédure ordinaire s'ils avaient fait preuve de toute la diligence qui pouvait raisonnablement être exigée d'eux. En effet, entre la première demande de l'AFC-GE visant à obtenir la documentation relative au compte (le 19 décembre 2019) et le prononcé de l'arrêt de la chambre de céans (le 22 novembre 2022), il s'est écoulé presque trois ans. De plus, comme l'a déjà expressément relevé le Tribunal fédéral dans son arrêt du 20 juin 2023 (consid. 5.3), la date d'ouverture du compte bancaire (2002) n'est pas déterminante pour fixer le point de départ des délais de prescriptions pour l'IFD et l'ICC, qui dépend de la période fiscale pour laquelle la taxation n'a pas été effectuée ou était incomplète, soit de la période fiscale à laquelle le droit de procéder au rappel d'impôt se rapporte.

Les remarques émises par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 20 juin 2023 (consid. 2.3), à savoir que « les contribuables n'exposent pas en quoi il leur aurait été impossible d'obtenir ces documents plus tôt » et qu'« il ne suffit pas à cet égard de se référer aux explications données par G______ sur les circonstances dans lesquelles il aurait retrouvé les pièces en cause », restent valables dans le cadre de la présente demande en révision, ce quand bien même les règles présidant à l'admission de moyens de preuve nouveaux devant le Tribunal fédéral ne sont pas les mêmes que celles régissant la prise en compte d'un moyen de preuve en procédure de révision. À la lecture desdites explications, il n'apparaît ainsi pas que les pièces concernées n'auraient pas pu être retrouvées avant le 22 novembre 2022, mais simplement qu'elles avaient été difficiles à trouver parce que mal classées.

Il résulte de ce qui précède que la demande en révision doit être rejetée.

3.             Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge solidaire des demandeurs en révision, qui succombent (art. 87 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), applicable par le truchement de l'art. 2 al. 2 LPFisc), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée.

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable la demande en révision formée le 17 janvier 2023 par A______ et B______ contre l'arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice du 22 novembre 2022 ;

au fond :

la rejette ;

met à la charge solidaire de A______ et B______ un émolument de CHF 1'000 ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Michel CABAJ, avocat des demandeurs, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance, pour information.

Siégeant : Jean-Marc VERNIORY, président, Florence KRAUSKOPF, Eleanor McGREGOR, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. VERNIORY

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :