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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1729/2023

ATA/910/2023 du 25.08.2023 ( EXPLOI ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1729/2023-EXPLOI ATA/910/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 25 août 2023

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant
représenté par Me Serge ROUVINET, avocat

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR intimé



EN FAIT

A. a. A______ exploite un commerce à l’enseigne « B______» (ci‑après : le commerce), sis rue C______ 1______, à Genève.

b. Il est titulaire d’une autorisation lui permettant de vendre des produits du tabac et produits assimilés au tabac, délivrée par le service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir (ci‑après : PCTN) le 4 décembre 2020. Il ressort notamment de cette autorisation, valable jusqu’au 3 décembre 2024, que toutes les mesures nécessaires doivent être prises afin d’empêcher les mineurs d’accéder sans surveillance aux produits qui leur sont interdits. Le titulaire de l’autorisation et son personnel doivent, en cas de doute sur l’âge d’un client, exiger une pièce d’identité.

B. a. Selon un rapport du PCTN du 22 février 2023, le 16 février 2023, à 11h10, un contrôle achat-test par mineur a été effectué dans le commerce par une inspectrice du PCTN, de concert avec deux agents de la police de proximité. Lors de ce contrôle, il a été constaté que D______, employé du commerce, avait vendu une cigarette électronique « jetable », marque « LIKE ME Capricorn » à un mineur de 16 ans.

b. Par courrier du 9 mars 2023, le PCTN a informé A______ qu’il envisageait de prononcer la suspension, pour une durée de sept jours à six mois, de son autorisation du 4 décembre 2020. Un délai lui était accordé pour lui faire parvenir ses éventuelles observations.

c. Par courrier du 16 mars 2023, A______ s’est excusé pour l’infraction commise. D______ avait clairement manqué à ses obligations vis-à-vis de son employeur et de la loi. L’employé ne travaillait pour le compte de son commerce que depuis quelques mois. Il lui avait expliqué que, lors du contrôle, il avait été confronté à plusieurs clients « pressants » et qu’il n’était « pas limpide » que les « faux clients » étaient mineurs. Le fait qu’ils n’aient acquis qu’une cigarette électronique jetable avait par ailleurs contribué à son manque de diligence. A______ a ajouté qu’il prendrait toutes les mesures pour que cette situation ne se reproduise plus.

d. Par décision du 20 avril 2023, le PCTN a suspendu, pour une durée de 30 jours, l’autorisation du 4 décembre 2020 lui permettant de vendre des produits du tabac et produits assimilés au tabac dans son commerce. Une mesure d’exécution fixant les dates exactes de suspension de l’autorisation lui serait adressée dès l’entrée en force de la décision. Les produits du tabac et produits assimilés au tabac devait être retirés durant l’exécution de la mesure.

C. a. Par acte du 22 mai 2023, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre cette décision, concluant à son annulation.

La photo annexée au rapport de l’inspectrice révélait une cigarette de la marque « RANDM TORNADO 7000 », ce qui ne correspondait pas aux constatations du rapport. Il y avait lieu de s’interroger quant à la bonne tenue de l’enquête. La présence ou non de nicotine dans la cigarette constituait un élément atténuant. Dans le cas d’un achat d’une seule cigarette électronique sans nicotine, il était évident que l’âge du client n’était pas autant préoccupant. Cela pouvait en partie expliquer pourquoi l’employé ne s’était pas douté qu’il s’agissait d’un mineur. L’autorité n’avait par ailleurs nullement pris en compte le fait qu’il y avait plusieurs clients pressants en même temps dans le commerce, créant ainsi une situation stressante et difficilement gérable pour l’employé. Les effets d’une telle sanction étaient désastreux pour son commerce, entrainant une grosse perte de son chiffre d’affaires. Il semblait, enfin, que l’autorité avait jugé des cas semblables de manière différente, en infligeant une simple amende. L’autorité avait ainsi abusé de son pouvoir d’appréciation.

Il a notamment produit un communiqué de presse du 24 avril 2023 du département de la sécurité, de la population et de la santé (ci-après : DSPS) et du département de l’économie et de l’emploi (ci-après : DEE) portant sur les résultats d’une campagne de contrôle de vente de cigarettes électroniques jetables (puff bars) aux personnes de moins de 18 ans réalisée en février 2023.

b. Par réponse du 21 juin 2023, le PCTN a conclu au rejet du recours.

Une erreur de plume s’était glissée dans le rapport de l’inspectrice du PCTN du 22 février 2022, qui mentionnait que la cigarette électronique était de la marque « LIKE ME Capricorn » alors qu’il s’agissait en réalité de la vente à un mineur de 16 ans d’une cigarette électronique de la marque « RANDM TORNADO », saveur « STRAWBERRY WATERMELON », soit un produit avec nicotine.

Il ressortait, par ailleurs, d’un nouveau rapport du 30 mars 2023 qu’en date du 24 mars 2023 à 23h50, le commerce avait omis de soustraire à la vue du public et de mettre des boissons alcooliques sous clé durant l’interdiction de vente à l’emporter entre 21h et 7h, ce qui entrainait une violation de l’art. 12 al. 2 de la loi sur la remise à titre gratuit et la vente à l’emporter de boissons alcooliques, de produits du tabac et de produits assimilés au tabac du 17 janvier 2020 (LTGVEAT - I 2 25). Suite à ce rapport, le PCTN avait informé le recourant, par courrier du 8 juin 2023, qu’une nouvelle mesure administrative était envisagée.

En cas d’infraction à la LTGVEAT, le recourant, en sa qualité de titulaire de l’autorisation, était responsable de la vente dans son commerce, qu’il soit présent ou non lors de l’infraction, à charge pour lui d’intenter ensuite des démarches juridiques contre son employé en cas de faute de ce dernier.

La vente de tabac à des mineurs était considérée comme une infraction grave. Par ailleurs, l’intéressé avait déjà fait l’objet d’un avertissement en date du 26 mai 2023 pour avoir violé l’obligation de mettre les boissons alcooliques sous clé et soustraites de la vue du public entre 21h et 7h. Compte tenu de ces éléments, la suspension de l’autorisation pour une durée de 30 jours respectait le principe de proportionnalité.

c. A______ a répliqué le 21 juillet 2023, persistant dans ses conclusions

d. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).

2.             Le recourant sollicite son audition et celle de son employé.

2.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier et de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 et les références citées). L’autorité peut cependant renoncer à procéder à des mesures d’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 et les références citées). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement, ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

2.2 Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances du recourant sur le fond. Une réparation devant l'instance de recours est toutefois possible si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen que l'autorité intimée. La réparation dépend cependant de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception. Elle peut se justifier même en présence d'un vice grave, lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure. Enfin, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de la violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir eu le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/244/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a et les références citées).

2.3 En l’espèce, le recourant a eu l’occasion de se déterminer à plusieurs reprises sur les faits qui lui sont reprochés, tant auprès de l’intimé que par-devant la chambre de céans. Il ne précise pas en quoi les mesures d’instructions qu’il sollicite iraient au-delà des allégations contenues dans ses écritures ou des pièces figurant au dossier, étant rappelé que le droit d'être entendu ne confère pas de droit à être entendu oralement, la procédure administrative étant en principe écrite (art. 18 LPA). Quant à l’audition de son employé, le recourant a dûment expliqué les circonstances dans lesquelles il avait vendu la cigarette électronique à un mineur. Dans ces circonstances et dès lors que le dossier en mains de la chambre de céans contient tous les éléments lui permettant de trancher le litige en connaissance de cause, il n’y a pas lieu de procéder à d’autres actes d’instruction.

3.             Le litige porte sur la conformité au droit de la suspension de l’autorisation de vendre du tabac et des produits assimilés pour une durée de 30 jours.

3.1 La LTGVEAT a pour buts d’assurer qu’aucun établissement qui lui est soumis ne soit susceptible de troubler l’ordre public, en particulier la tranquillité et la santé publiques, du fait de son propriétaire ou de son exploitant, ainsi qu’en raison de sa construction, de son aménagement et de son implantation. Elle vise également à protéger la santé des mineurs, notamment contre les risques d’addiction (art. 1 al. 1 LTGVEAT). Toute autorisation prévue par cette loi ne peut être délivrée que si les buts énoncés à l’al. 1 sont susceptibles d’être atteints (al. 2).

La vente de produits du tabac et de produits assimilés au tabac, y compris l’exploitation d’appareils automatiques délivrant ces produits est soumise à l’obtention préalable d’une autorisation délivrée par le PCTN (art. 7 al. 1 LTGVEAT).

Selon l’art. 6 al. 4 LTGVEAT, la remise à titre gratuit et la vente de produits du tabac et de produits assimilés au tabac aux mineurs est interdite.

Sont considérés comme produits assimilés au tabac les cigarettes électroniques, présentant un dispositif sans tabac et permettant d’inhaler de la vapeur obtenue par chauffage d’un liquide avec ou sans nicotine, ainsi que les flacons de recharge et les cartouches pour ce dispositif (art. 4 al. 3 let. b LTGVEAT).

Les titulaires d’une autorisation sont tenus de respecter les dispositions de la LTGVEAT et celles de la législation fédérale (art. 10 al. 2 LTGVEAT). Ils doivent en particulier veiller à ce que le personnel de vente contrôle l’âge des jeunes clients. À cette fin, une pièce d’identité peut être exigée (al. 3).

Le PCTN peut effectuer ou organiser des achats-tests afin de vérifier si les prescriptions de la LTGVEAT sont respectées (art. 11 al. 1 LTGVEAT).

Aux termes de l’art. 18 al. 3 LTGVEAT, en cas de violation de la LTGVEAT ou de ses dispositions d’exécution, le PCTN peut prononcer, sans préjudice de l’amende prévue à l’art. 19, l’une des mesures suivantes : la suspension de l’autorisation pour une durée de sept jours à six mois (let. a) ; le retrait de l’autorisation (let. b). Si, dans les trois ans qui précèdent l’acte ou l’omission, le contrevenant a déjà fait l’objet d’une mesure de suspension ou de retrait devenue exécutoire, la sanction est au moins une suspension de 30 jours (al. 4). Si, dans les trois ans qui précèdent une infraction à l’interdiction visée à l’art. 6 al. 2 à 4, le contrevenant a déjà fait l’objet d’une mesure de suspension ou de retrait devenue exécutoire en raison d’une violation de la même disposition, la sanction est le retrait de l’autorisation assorti d’un délai de carence de 36 mois au plus, à compter de l’entrée en force de la décision, pendant lequel le PCTN ne peut entrer en matière sur une nouvelle demande d’autorisation (al. 5). Pour fixer la durée de la mesure ou décider d’un retrait, outre les seuils prévus par la présente disposition, l’autorité tient compte notamment de la gravité de la faute, des antécédents et de leur gravité. Est notamment considérée comme grave la violation des prescriptions visées aux art. 6, 14 et 16.

3.2 De jurisprudence constante, la chambre administrative accorde généralement valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés (ATA/625/2021 du 15 juin 2021 consid. 3d ; ATA/333/2020 du 7 avril 2020 consid. 2d et les références citées), sauf si des éléments permettent de s’en écarter.

3.3 À teneur de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2), non réalisée dans le cas d'espèce (ATA/1308/2018 du 5 décembre 2018 consid. 2).

Le PCTN jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour fixer la mesure administrative. La juridiction de céans ne le censure qu’en cas d’excès (ATA/983/2021 du 24 septembre 2021 consid. 7b ; ATA/625/2021 du 15 juin 2021consid. 4b et les références citées). L'autorité commet un abus de son pouvoir d'appréciation tout en respectant les conditions et les limites légales, si elle ne se fonde pas sur des motifs sérieux et objectifs, se laisse guider par des éléments non pertinents ou étrangers au but des règles ou viole des principes généraux tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, les principes de la bonne foi et de la proportionnalité (ATA/32/2020 du 14 janvier 2020 consid. 2b et l'arrêt cité).

3.4 Une décision viole le principe de l’égalité de traitement garanti par l’art.  8 Cst. lorsqu’il établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait ou lorsqu’il omet de faire des distinctions qui s’imposent au vu des circonstances, c’est-à-dire lorsque ce qui est semblable n’est pas traité de manière identique et lorsque ce qui est dissemblable ne l’est pas de manière différente. Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 142 V 316 consid. 6.1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_774/2014 du 21 juillet 2017 consid. 9.1 ; ATA/610/2017 du 30 mai 2017 ; Vincent MARTENET, Géométrie de l'égalité, 2003, p. 260 ss).

Selon la jurisprudence, un justiciable ne saurait en principe se prétendre victime d’une inégalité de traitement au sens de l’art. 8 Cst. lorsque la loi est correctement appliquée à son cas, alors même que dans d’autres cas, elle aurait reçu une fausse application ou n’aurait pas été appliquée du tout (ATF 139 II 49 consid. 7.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_114/2016 du 9 juin 2016 consid. 5.4 ; ATA/527/2016 du 21 juin 2016 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, 2013, vol. 2, 3ème éd., p.  500/501 n. 1074-1076 ; Pierre MOOR/ Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, 2012, vol. 1, 3e éd., p. 627 ss n. 4.1.1.4 ; Vincent MARTENET, Géométrie de l'égalité, 2003, p. 260 ss).

3.5 En l’occurrence, il est établi que, lors d’un achat-test effectué par le PCTN, un employé du commerce du recourant a vendu une cigarette électronique jetable à un mineur. En cela, le recourant a contrevenu à l’art. 6 al. 4 LTGVEAT, qui interdit la vente de tabac et de produits assimilés à des mineurs. Il a également violé l’art. 10 al. 3 LTGVEAT, qui impose aux titulaires de l’autorisation de veiller à ce que le personnel de vente contrôle l’âge des jeunes clients. Comme le relève l’intimé, le fait que l’inspectrice ait mentionné une marque de cigarette erronée ne porte pas à conséquence, puisqu’il n’est pas contesté qu’il s’agit d’un produit assimilé au tabac au sens de l’art. 4 al. 3 let. b LTGVEAT.

Le recourant remet en cause la proportionnalité de la mesure, qu’il estime trop sévère eu égard à sa situation personnelle. Il reproche également à l’autorité intimée d’avoir omis que l’art. 18 al. 4 LTGVEAT prévoit une suspension minimale de 30 jours uniquement en cas de récidive, ce qui n’était pas son cas.

Le recourant perd toutefois de vue que l’art. 18 al. 4 LTGVEAT ne traite pas spécifiquement des infractions en cas de vente de tabac à des mineurs (art. 6 al. 4 LTGVEAT). Or, dans ces cas, le législateur a opté pour un régime de sanction particulièrement sévère. La LTGVEAT prévoit, en effet, expressément que la vente de tabac ou de produits assimilés aux mineurs constitue une infraction grave (art. 18 al. 6 in fine LTGVEAT). La gravité d’une telle infraction est, par ailleurs, confirmée par la sanction en cas de deuxième manquement à l’art. 6 LTGVEAT, soit le retrait de l’autorisation assorti d’un délai de carence de 36 mois, pendant lequel le PCTN ne peut entrer en matière sur une nouvelle demande (art. 18 al. 5 LTGVEAT). Or, il s’agit là d’une sanction beaucoup plus sévère qu’en cas de récidive aux autres infractions prévues par la loi (art. 18 al. 4 LTGVEAT). La sévérité de la sanction en cas de vente de tabac aux mineurs répond ainsi à une volonté clairement exprimée par le législateur de se montrer intransigeant à l'égard des auteurs de cette infraction. Contrairement à ce que soutient le recourant, la présence ou non de nicotine dans la cigarette – du reste contestées par les parties - ne constitue pas un élément atténuant, la vente de tabac et celle de produits assimilés, avec ou sans nicotine, ayant été traitée de la même manière par le législateur. Quant aux circonstances invoquées par le recourant, selon lequel il y avait plusieurs clients impatients en même temps dans le commerce, il s’agit de situations auxquelles le personnel de vente doit être préparé et qui ne justifient, en aucun cas, l’absence de contrôle de l’âge. C’est au commerce de prendre des dispositions pour ne pas se retrouver dans une telle situation.

Ainsi, compte tenu de la gravité de l’infraction commise, l'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation ni excédé celui-ci en prononçant la suspension de son autorisation pour une durée de 30 jours, durée qui se situe dans la fourchette inférieure de l’art. 18 al. 3 let. a LTGVEAT. En outre, la sanction est apte à atteindre le but visant au respect par le recourant des dispositions de la LTGVEAT, est nécessaire pour ce faire, et respecte le principe de la proportionnalité au sens étroit eu égard à l’intérêt public important consistant à protéger la santé des mineurs, notamment contre les risques d’addiction.

Quant à l’inégalité de traitement dont le recourant dit être la victime, elle n’est pas établie. Il se contente en effet d’affirmer avoir eu connaissance par récit d’autres commerçants que ceux-ci avaient simplement reçu une amende. Il n’apporte toutefois aucune pièce à l’appui de cette allégation, de sorte qu’il n’est pas possible de déterminer si les situations à comparer sont similaires. Le fait que, dans leur communiqué de presse du 24 avril 2023, les représentants du DSPS et du DEE ont mentionné uniquement l’amende comme sanction pour un premier manquement de vente de cigarette électronique à un mineur ne signifie pas encore que l’intimé ait, concrètement, traité différemment des situations semblables. L’intéressé ne saurait, au demeurant, se prétendre victime d’une inégalité de traitement lorsque la loi lui est correctement appliquée, comme c’est le cas en l’espèce.

Mal fondé, le recours sera rejeté.

4.             Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 22 mai 2023 par A______ contre la décision du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 20 avril 2023 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Serge ROUVINET, avocat du recourant, ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN, présidente, Valérie LAUBER, Eleanor McGREGOR, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

C. MARINHEIRO

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. PAYOT ZEN-RUFFINEN

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :